M. le président. L'amendement n° I-173, présenté par M. Massion et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au VII de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, après les mots : « dispositions du présent article, », sont insérés les mots : « y compris ceux issus d'une fusion, réalisée conformément à l'article L. 5211-41-3 du code général des collectivités territoriales ».
II. - La perte de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Edmond Hervé.
M. Edmond Hervé. Depuis 1992, les communes bénéficient d’une compensation versée par l’État, par l’intermédiaire d’un prélèvement sur recettes, au titre des exonérations de taxe d’habitation et de taxe foncière pour les personnes de condition modeste.
Le montant de cette compensation est égal au montant des bases d’imposition exonérées au titre de l’année précédente multiplié par le taux voté par chaque collectivité en 1991.
Pour les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale, un EPCI, le taux à prendre en compte pour le calcul de la compensation est majoré du taux voté en 1991 par l’établissement.
Néanmoins, lorsque l’EPCI est issu d’une fusion de groupements intercommunaux, la direction générale des finances publiques considère que les taux votés en 1991 par les EPCI fusionnés ne peuvent pas être pris en compte. Cette interprétation entraîne une perte de recettes pour les collectivités locales concernées et ne permet pas de garantir leur équilibre budgétaire en cas d’opération de fusion. Elle est donc susceptible de freiner de telles opérations menées par les EPCI.
C’est la raison pour laquelle nous proposons, par cet amendement, que les taux votés par les EPCI fusionnés puissent être pris en compte pour le calcul de la compensation.
Il s’agit d’un amendement technique réfléchi, au service de l’égalité et de la logique, afin de favoriser les fusions, donc la coopération intercommunale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Nous avons été sensibles à cet amendement, que notre collègue Marc Massion a présenté lors de la réunion de la commission.
Les auteurs de cet amendement suggèrent de permettre la prise en compte dans le calcul de la compensation des exonérations de taxe d’habitation et de taxe foncière pour les personnes de condition modeste, mesure instituée en 1992, du taux voté par l’EPCI en 1991, même si celui-ci est issu d’une fusion de plusieurs groupements intercommunaux préexistants.
J’entends bien votre question, monsieur Hervé. J’imagine que vous avez dû être confronté à une telle situation dans un contexte particulier. Il est tout à fait normal d’évoquer ce type de difficultés. Si je comprends bien, vous vous heurtez à une interprétation administrative qui ne vous est pas favorable.
En réalité, le problème relève strictement des finances locales. Quelle que soit la solution apportée, je ne pense pas qu’elle puisse avoir des conséquences sur les finances et les dépenses de l’État. C’est un pur exercice de répartition interne.
Monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais donc connaître l’avis du Gouvernement sur ce sujet, en espérant que vos services, notamment la direction générale des collectivités locales, pourront nous apporter les éclairages nécessaires.
M. le président. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?
M. Georges Tron, secrétaire d'État. Monsieur Hervé, il s’agit effectivement d’un problème complexe, et la question, qui peut légitimement se poser, a été examinée avec soin.
Comme M. le rapporteur général l’a très bien rappelé, il s’agit de conserver dans le cadre de la fusion d’EPCI des modalités de calcul des compensations d’exonération de taxe d’habitation et de taxe foncière pour les personnes de condition modeste.
Si les intentions qui sous-tendent cet amendement ne me posent aucun problème, la modification proposée risquerait d’entraîner une différence de traitement entre les communes membres en fonction de la date de fusion des EPCI.
En effet, et vous le savez très bien, monsieur Hervé, les règles ne peuvent pas s’appliquer rétroactivement depuis 1992. En d’autres termes, la surcompensation serait maintenue seulement pour les communes membres d’EPCI fusionnés postérieurement au 1er janvier 2011.
Or le Gouvernement souhaite éviter une telle différence de traitement, qui ne se justifie pas, entre les collectivités membres d’un même EPCI.
Au demeurant, une telle modification de la règle applicable contrarierait la logique de compensation des pertes de fiscalité réellement subies par les communes à laquelle le Gouvernement s’est engagé.
Pour ces deux raisons, mais surtout pour la première – je suis très sensible à l’argument de la différence de traitement –, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° I-174, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L'article 7 de la loi n° 2008-1249 du 1er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité et réformant les politiques d'insertion active est ainsi modifié :
1° Les quatrième à septième alinéas du II sont supprimés ;
2° Après le II, il est inséré un III ainsi rédigé :
« III. - À compter de l'exercice 2010, l'État assure la compensation au département des sommes versées au titre des articles L. 262-1 et suivants du code de l'action sociale et des familles sur la base de la différence entre le produit de cette compensation et les dépenses réelles constatées aux derniers comptes administratifs connus des départements.
« Cette compensation est ajustée chaque année, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges, dans les conditions prévues au II de l'article 119 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
« Dans l'attente du calcul de la compensation définitive au titre d'une année considérée, l'État assure mensuellement, à chaque département, le versement d'une somme calculée sur la base de la compensation complémentaire déterminée au titre de l'exercice précédent. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
... - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard Miquel.
M. Gérard Miquel. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, afin de gagner du temps, je présenterai conjointement les amendements nos I-174, I-175 et I-176, qui relèvent tous trois de la même philosophie.
M. le président. J’appelle donc en discussion les amendements nos I-175 et I-176.
L'amendement n° I-175, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le code de l'action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° La section 1 du chapitre II du titre III du livre II est complétée par une sous-section ainsi rédigée :
« Sous-section...
« Dispositions communes à l'allocation personnalisée d'autonomie à domicile et en établissement
« Art. L. 232-11-1. - À compter de 2010, les charges résultant, pour les départements, des prestations versées au titre des articles L. 232-3 et L. 232-8 sont compensées sur la base des dépenses constatées aux derniers comptes administratifs connus des départements.
« La compensation versée en application de l'article L. 232-3 est calculée hors le montant actualisé versé en 2001 au titre de la prestation spécifique de dépendance, créée par la loi n° 97-60 du 24 janvier 1997 tendant, dans l'attente du vote de la loi instituant une prestation d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes, à mieux répondre aux besoins des personnes âgées par l'institution d'une prestation spécifique dépendance.
« Les compensations versées au titre des deux alinéas précédents sont ajustées par département, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges, dans les conditions prévues au II de l'article 119 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
« Dans l'attente du calcul de ces compensations définitives au titre d'une année considérée, l'État assure mensuellement, à chaque département, le versement d'une somme calculée sur la base de la compensation complémentaire déterminée au titre de l'exercice précédent. » ;
2° Après l'article L. 232-3, il est inséré un article L. 232-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 232-3-1. - I. - Pour chaque département, le droit à compensation de l'allocation personnalisée d'autonomie à domicile est calculé en prenant en référence le plan d'aide moyen national établi par la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie.
« Sur la base de la moyenne des dépenses constatées au titre des trois derniers exercices, la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie calcule, pour chaque département et au niveau national, les montants moyens des plans d'aide établis à l'aide de la grille nationale mentionnée à l'article L. 232-2 pour chacun des groupes iso-ressources.
« Elle détermine aussi pour chaque département et au niveau national le montant moyen des plans d'aide sur l'ensemble des groupes iso-ressources.
« II. - Pour les départements dont le montant moyen des plans d'aide est supérieur au montant moyen des plans d'aide au niveau national, le droit à compensation est calculé en multipliant le nombre réel de bénéficiaires par le montant national résultant du calcul effectué au deuxième alinéa du I du présent article.
« III. - Pour les départements dont le montant moyen des plans d'aide est inférieur au montant moyen des plans d'aide au niveau national, le droit à compensation est calculé en multipliant le nombre réel de bénéficiaires par le montant départemental résultant du calcul effectué au deuxième alinéa du I du présent article.
« IV. - Chaque département reçoit 90 % du droit à compensation visé aux II et III du présent article. » ;
3° Après l'article L. 232-8, il est inséré un article L. 232-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 232-8-1. - I. - Le droit à compensation de l'allocation personnalisée d'autonomie en établissement est calculé en prenant en compte l'ensemble des forfaits globaux mentionnés au 2° de l'article L. 314-2 versés dans le département aux établissements relevant du I de l'article L. 313-12.
« La caisse nationale de solidarité pour l'autonomie calcule pour chaque département et au niveau national les valeurs départementales et la valeur nationale du point groupe iso-ressources dépendance en divisant pour le dernier exercice connu le total des forfaits globaux mentionnés au 2° de l'article L. 314-2 par le total des points groupes iso-ressources dépendance des établissements concernés.
« La caisse nationale de solidarité pour l'autonomie calcule aussi le groupe iso-ressources moyen pondéré des établissements relevant du I de l'article L. 313-12 dans le département.
« II. - Pour les départements dont la valeur du point groupe iso-ressources dépendance est supérieure au montant de la valeur nationale, le droit à compensation est calculé en multipliant d'abord la valeur nationale du point groupe iso-ressources dépendance par le groupe iso-ressources moyen pondéré départemental et, ensuite, le résultat ainsi obtenu par le nombre départemental de places dans les établissements relevant du I de l'article L. 313-12.
« III. - Pour les départements dont la valeur du point groupe iso-ressources dépendance est inférieure au montant de la valeur nationale, le droit à compensation est calculé en multipliant d'abord, la valeur départementale du point groupe iso-ressources dépendance par le groupe iso-ressources moyen pondéré départemental et, ensuite, le résultat ainsi obtenu par le nombre départemental de places dans les établissements relevant du I de l'article L. 313-12.
« IV. - Chaque département reçoit 90 % du droit à compensation visé aux II et III du présent article. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I ci-dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
... - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L'amendement n° I-176, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 21, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, il est inséré un article L. 245-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 245-1-1. - À compter de 2010, les charges résultant pour les départements des prestations versées au titre de l'article L. 245-1 sont compensées sur la base des dépenses constatées aux derniers comptes administratifs connus des départements.
« II. - La compensation versée au titre de l'alinéa précédent est ajustée par département, après avis de la commission consultative sur l'évaluation des charges, dans les conditions prévues au II de l'article 119 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.
« III. - Dans l'attente du calcul de cette compensation définitive au titre d'une année considérée, l'État assure mensuellement, à chaque département, le versement d'une somme calculée sur la base de la compensation complémentaire déterminée au titre de l'exercice précédent. »
II. - La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales des I à III ci dessus est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
... - La perte de recettes résultant pour l'État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Veuillez poursuivre, monsieur Miquel.
M. Gérard Miquel. Nos trois amendements ne surprendront personne dans cet hémicycle, puisque les membres du groupe socialiste ont déjà défendu de telles propositions lors de la discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, au début du mois de novembre. Ils portent sur un problème important : le financement des allocations individuelles de solidarité.
Nous avons eu un débat intéressant voilà quelques jours. Nous espérons que ce sera également le cas aujourd’hui et que la Haute Assemblée pourra enfin trouver une solution satisfaisante à ce problème, dont tout le monde ou presque reconnaît la réalité.
Dans l’hypothèse où ce ne serait pas le cas aujourd’hui, il est d’ores et déjà prévu que nous rediscutions du sujet le 9 décembre prochain, lors de l’examen d’une proposition de loi visant le même objectif.
Je présenterai succinctement ces trois amendements, puis je répondrai aux critiques qui nous ont été adressées lors de la discussion précédente.
Depuis 1982, et plus encore depuis ces dix dernières années, les nombreuses lois de décentralisation ont fait reposer la solidarité collective dans une large mesure sur les collectivités territoriales, en particulier sur les départements, qu’il s’agisse du revenu minimum d’insertion, le RMI, en 2003, du revenu de solidarité active, le RSA, en 2009, de l’allocation personnalisée d’autonomie, l’APA, en 2001 ou de la prestation de compensation du handicap, la PCH, en 2005.
L’État a conservé sa compétence générale de détermination des normes, des mécanismes de calcul et des conditions d’accès à ces allocations. Les départements n’ont donc aucune responsabilité particulière dans la détermination de ces règles.
Bien entendu, les transferts se sont accompagnés de compensations financières, dans le cadre des dispositions prévues par la Constitution et le code général des collectivités territoriales.
Mais, comme vous le savez, les modalités actuelles de la compensation sont largement insuffisantes et ne permettent pas de répondre au défi qui nous est posé en termes de financement de ces allocations individuelles de solidarité.
Une pratique restrictive des règles retenues et une absence de volonté des gouvernements successifs d’assumer leurs responsabilités face aux enjeux de la décentralisation ont conduit les départements dans une situation financière qui n’est aujourd’hui plus tenable.
La crise économique et sociale n’a fait qu’accélérer l’effet de ciseaux qui pesait sur les budgets départementaux, aggravant des difficultés déjà importantes.
La suppression de la taxe professionnelle, la chute des droits de mutation et la hausse continue des charges sociales privent les départements de toute marge de manœuvre, à tel point que nombre de départements sont confrontés à des difficultés financières mettant en péril, dans un avenir proche, la continuité des paiements et le maintien des allocations individuelles de solidarité.
Pour la seule année 2010, le déficit brut de compensation de ces trois allocations s’élèvera à près de 6 milliards d’euros. Selon les estimations, en 2010, le taux de couverture par la compensation des dépenses de RSA serait seulement de 88,4 %, celui de l’APA chuterait à 28,7 % et celui de la PCH, dont le transfert date de cinq ans, diminuerait encore, pour atteindre 47,8 %. La couverture globale serait donc de 61 %. Je ne donnerai pas d’autres chiffres. Dorénavant, il s’agit d’une bataille non plus de chiffres, mais de principes.
Face à une telle situation, il est aujourd’hui de notre responsabilité commune de rechercher au plus vite les solutions pour construire une réforme structurelle et pérenne du financement de ces allocations de solidarité.
Comme vous le savez, lors de leur congrès annuel, les 20 et 21 octobre dernier en Avignon, les départements ont lancé un appel unanime en ce sens.
Que faire ? Il y a deux hypothèses.
La première consisterait à réduire le montant des allocations individuelles. Nous l’excluons d’office, en tout cas sur nos travées. Ne reste alors que la seconde option, celle du financement.
Dans cette perspective, nous souhaitons nous inscrire dans la philosophie qui a prévalu lors de la mise en œuvre de la sécurité sociale, à l’issue de la Seconde Guerre mondiale. Les fondements d’une solidarité collective, garante du lien social et du vivre ensemble, ont alors été posés, étant précisé que son financement incombait à la société dans son ensemble, via l’impôt national.
Le RSA, l’APA et la PCH s’inscrivent aujourd’hui pleinement dans la volonté de notre pays d’assurer à tous cette sécurité, dans le cadre de notre pacte républicain.
M. Yvon Collin. Très bien !
M. Gérard Miquel. Par conséquent, à l’instar de la sécurité sociale, le financement de ces allocations se doit d’être assumé par tous.
Or tel est n’est pas le cas aujourd’hui. L’impôt local, avec ses injustices inhérentes, que tout le monde connaît, a pris le relais pour une part importante du financement national, mettant en cause le pacte républicain que j’évoquais à l’instant.
Mes chers collègues, les sénateurs socialistes, apparentés et rattachés estiment aujourd’hui que l’ensemble du système de financement des allocations individuelles de ressources doit être réformé et reposer sur des ressources nationales.
Tel est l’objet de nos trois amendements, qui visent à mettre en place un financement par l’État pour chacune des allocations de solidarité.
À présent, je voudrais répondre aux critiques formulées par le Gouvernement au cours de la précédente discussion.
Lors de l’examen d’amendements similaires dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, le président de la commission des finances, notre éminent collègue Jean Arthuis, nous avait reproché de déresponsabiliser les départements en envisageant une compensation intégrale des allocations versées.
Or notre amendement relatif à la compensation de l’APA prévoit, comme la dernière fois, un ticket modérateur à la charge des départements. En effet, avec le dispositif que nous proposons, les départements n’obtiendraient de compensation qu’à hauteur de 90 % des dépenses engagées. Ce principe tient compte des engagements en termes d’accompagnement de la mise en œuvre du dispositif de l’APA pris par les départements en 2001.
Au début du mois de novembre, vous avez rejeté nos propositions au motif que le projet de loi sur le cinquième risque apporterait les réponses nécessaires.
Lors de son entretien télévisé de la semaine dernière, le Président de la République a confirmé sa volonté de faire adopter un texte avant l’automne de l’année 2011.
Néanmoins, les pistes évoquées pour le moment sont inquiétantes, qu’il s’agisse du recours sur succession ou des assureurs privés via, selon le Président de la République, des « produits financiers innovants » !
Outre ces propositions critiquables, le projet de loi, s’il est déposé puis adopté – voilà tellement longtemps qu’on l’attend qu’on ne l’espère plus ! –, ne permettra pas de répondre au problème global de financement du RSA et de la PCH.
En outre, lors de la discussion générale, M. le ministre du budget a évoqué la mise en place, à titre exceptionnel, d’un fonds de soutien dans le collectif de fin d’année, à hauteur de 150 millions d’euros. Si cette solution était finalement retenue, elle serait largement insuffisante face à l’ampleur du déficit auquel sont confrontés les départements.
Comme je l’ai indiqué, le déficit brut de compensation des départements avoisine les 6 milliards d’euros en 2010, le reste à charge net étant de 5,3 milliards d’euros. Dans ce contexte, les 150 millions d’euros proposés « généreusement » par le Gouvernement relèvent à nos yeux de la charité !
De même, 50 % de ce montant, soit 75 millions d’euros, serait sans doute, sous toute réserve, distribué discrétionnairement en échange d’un engagement des départements à stabiliser certains postes budgétaires, par exemple les personnels ou les dépenses non obligatoires sur des politiques d’intervention, comme le sport et la culture. C’est inacceptable !
De tels contrats auront donc pour conséquence d’imposer une contrainte supplémentaire aux départements. Or les départements ont besoin non pas d’une mise sous tutelle, mais d’un desserrement de l’étau financier qui pèse sur leur budget !
Encore une fois, la proposition du Gouvernement prouve sa défiance envers les collectivités territoriales et son refus de prendre conscience du fait décentralisateur.
Nos amendements ont le mérite de poser clairement le problème du financement des allocations individuelles de solidarité et d’apporter une solution immédiate, en envisageant une réforme structurelle et pérenne.
Les départements ne peuvent plus attendre. Il est maintenant urgent d’agir. M. le président de la commission des finances, qui exerce les fonctions de président du conseil général de son département, ne me démentira pas sur la situation d’urgence dans laquelle nous sommes placés ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Mme Nicole Bricq. Eh oui !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances. Il n’y a pas bien longtemps, je recevais avec ses services le président de l’Assemblée des départements de France, M. Claudy Lebreton, président du conseil général des Côtes d’Armor, et nous abordions ces différentes problématiques.
Plus récemment, trois propositions de loi ont été déposées, la première par le groupe du RDSE, la deuxième par le groupe socialiste et la troisième par le groupe CRC-SPG. Si ma mémoire est bonne, la conférence des présidents a décidé d’en inscrire deux à notre ordre du jour du 9 décembre.
La commission des finances y travaille avec tout le soin dont elle est capable, en particulier en cette période de l’année. C’est notre excellent collègue Charles Guené, ici présent, qui sera chargé de rapporter ces différentes propositions de loi, ce qu’il fera en commission mardi prochain.
Les propos qui ont été tenus par notre collègue Gérard Miquel anticipent sur ce débat. Faut-il vraiment que nous allions au fond des choses ce matin dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances, alors que des véhicules spécifiques, en l’occurrence des propositions de loi, sont prévus ?
M. Charles Guéné aura, je suppose, l’occasion de le dire, et nous le redirons avec lui, l’un des problèmes fondamentaux des finances départementales est celui de la dépendance des personnes âgées.
Vous le savez, le Sénat a pris l’initiative sur le sujet voilà déjà assez longtemps.
Nous avons créé la mission commune d’information sur la prise en charge de la dépendance et la création du cinquième risque, dont les travaux sont prolongés jusqu’au 31 janvier prochain. J’ai l’honneur d’en être le président et notre collègue Alain Vasselle en est le rapporteur. La composition de cette mission est pluraliste, puisqu’elle compte parmi ses membres, par exemple, notre collègue Bernard Cazeau, le président du conseil général de la Dordogne. Nous avons travaillé et remis un rapport d’étape. Les auditions reprendront courant janvier, puis nous remettrons définitivement notre copie.
Selon nous, il est absolument essentiel de traiter la question de la dépendance, car elle interfère directement avec les équilibres financiers des départements.
Dans un premier temps, on nous a annoncé un projet de loi. Maintenant, on nous annonce un débat. Peut-être en saurons-nous plus, notamment en toute fin de matinée. Mais c’est bien dans ce cadre que nous travaillons.
La répartition de la charge de l’APA, à l’origine conçue comme égalitaire entre l’État et les départements, a fortement évolué, sans doute de manière excessive, au détriment de ces derniers.
Il est à l’évidence nécessaire de trouver des ressources, des formules nouvelles pour financer la dépendance. Notre mission commune d’information a émis des propositions, qu’il s’agisse du gage sur succession, de l’assurance ou encore de la mobilisation d’autres recettes. Mais, et je me permets d’insister sur ce point, nous avons bien posé le principe d’une répartition à égalité. C’est peut-être un élément de désaccord avec le Gouvernement, mais c’est l’analyse unanime de la mission commune d’information du Sénat.
Mes chers collègues, dans l’attente du débat du 9 décembre, qui sera tout à fait passionnant et auquel vous contribuerez les uns et les autres, je vous demande vraiment, dans un souci d’éviter tout « doublon », de retirer vos amendements. (Non ! sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
Quelle est l’utilité de déposer une proposition de loi si vous n’attendez même pas les conclusions du rapporteur, dont nous connaissons la capacité de travail, l’objectivité et la technicité ? (M. Charles Guené sourit et salue. – Applaudissements sur les travées de l’UMP.) Je vous rappelle qu’il est l’un des meilleurs spécialistes des finances locales. Et vous voudriez vous priver de la qualité d’un tel travail pour présenter directement vos amendements en séance ?
Sincèrement, mieux vaut les retirer. Nous reprendrons cette question calmement, sur la base du rapport de M. Guéné. Telle est du moins la recommandation de la commission.