M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Richard Yung. Je conclurai en citant François Mitterrand, qui qualifiait la francophonie de « merveilleux rempart contre l’uniformisation », exigeant « une volonté puissante et profonde d’être ce que chacun de nous éprouve profondément ».
Nous craignons qu’il n’en soit pas ainsi. C'est la raison pour laquelle nous ne voterons pas ces crédits. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.)
M. le président. La parole est à M. Louis Duvernois.
M. Louis Duvernois. Madame le ministre d’État, je m’associe tout d’abord aux compliments amplement mérités qui viennent de vous être adressés à la suite de votre nomination au ministère des affaires étrangères et européennes.
Je rappelle que la France est le seul pays à avoir fait le choix d’un dispositif d’enseignement à l’étranger, vecteur primordial de coopération bilatérale pour les communautés françaises expatriées.
Que l’on en juge : quelque 470 établissements scolaires implantés dans 130 pays, 280 000 élèves, dont plus de 100 000 Français, 6 500 titulaires de l’éducation nationale, expatriés ou résidents et 12 000 recrutés locaux représentent un budget annuel de plus de 1 milliard d'euros, dont la moitié relève de la participation de l’État, le reste, c’est-à-dire plus de 500 millions d'euros, étant assumé par les contributions des parents d’élèves.
Madame le ministre d’État, le succès pédagogique du réseau est tel que l’AEFE, sous tutelle de votre ministère, n’arrive plus à satisfaire les demandes d’inscription des familles, faute d’investissements nécessaires pour y répondre. Une entreprise en croissance qui ne peut pas investir court à terme de grands périls.
Le problème est devenu crucial. Un rapport de la mission d’évaluation et de contrôle pointe les très importants besoins de l’AEFE, en particulier pour la mise en conformité de l’immobilier et le financement des charges patronales de pension des fonctionnaires qui lui sont détachés et dont l’État employeur a « refilé » le paiement aux établissements scolaires à l’étranger, de droit public local.
Madame le ministre d’État, je souhaiterais obtenir des réponses concrètes sur deux points spécifiques, le volet immobilier et le recrutement d’enseignants titulaires, même si je suis conscient des contraintes budgétaires de l’État. Je tiens en effet à rappeler l’importance capitale du réseau éducatif français à l’étranger, qui est d’ailleurs le prolongement du réseau national.
La question immobilière est centrale pour l’AEFE, du point de vue tant de ses missions que de son financement. Dans ce débat, deux sujets méritent toute notre attention.
Le premier sujet concerne les nouvelles règles de gestion des domaines de l’État. L’AEFE devra passer des conventions d’occupation des bâtiments avec tous les établissements scolaires en gestion directe, qui sont des services déconcentrés de cette Agence. Celle-ci devra ainsi s’acquitter d’un loyer et provisionner les charges pour entretien.
Je voudrais vous interroger sur un point précis. Comment l’AEFE, qui est déjà structurellement sous-financée, peut-elle faire face à ces charges nouvelles, sachant que les familles qui contribuent déjà beaucoup aux opérations immobilières sont réticentes à apporter leur concours à ce que l’État aurait dû financer depuis quarante ans ?
En l’absence d’une réponse claire, nous pourrions nous poser des questions sur l’inadéquation entre des discours publics volontaristes et le manque de moyens financiers correspondants. Certes, la contrainte budgétaire nous oblige à travailler autrement et à revoir, le cas échéant, l’organisation d’une tutelle unique de l’AEFE, mais aussi à mission interministérielle. L’exemple en a été donné au mois de juillet dernier par la création de l’Institut français au sein du réseau culturel extérieur. Si cette structure relève de votre ministère, une participation significative du ministère de la culture et de la communication est pour la première fois prévue.
N’est-il pas devenu opportun de réfléchir sérieusement au redéploiement des ressources publiques en matière d’offre éducative extérieure ? Des conventions renouvelées avec l’éducation nationale qui préciseraient les orientations stratégiques ne relèvent plus d’une vue de l’esprit ; nous nous inscrivons dans une perspective plus réaliste, avec une mutualisation des moyens ministériels mobilisés.
Le second sujet de préoccupation concerne le recrutement d’enseignants titulaires dans le réseau. C’est évidemment indispensable au maintien d’une offre pédagogique de qualité, force d’attractivité auprès des familles.
Ces personnels sont en constante diminution depuis plusieurs années. Les missions essentielles de coordination et de formation pédagogique qui sont assumées localement par les enseignants titulaires détachés entraînent bel et bien un risque de dégradation pédagogique à l’étranger.
La subvention de l’État au titre du programme 185 a été confirmée, et l’AEFE a inscrit dans son plan d’orientation stratégique l’objectif de maintenir environ 50 % de titulaires enseignants de l’éducation nationale.
Cependant, nous souhaitons avoir l’assurance que l’AEFE pourra continuer à l’avenir à pourvoir ses postes d’enseignants titulaires dans le réseau, en lien avec le ministère de l’éducation nationale. Nous voyons bien le rôle capital, car complémentaire, de ce dernier dans la réalisation du projet pédagogique et éducatif français à l’étranger.
Nos craintes sont pourtant fondées. Les tensions croissantes sur la gestion des personnels du ministère de l’éducation nationale poseront des problèmes dès l’année scolaire 2011-2012.
Madame le ministre d’État, comment convaincrez-vous votre collègue chargé de l’éducation nationale d’envisager le maintien des détachements d’enseignants titulaires dans le réseau de l’AEFE pour conforter l’image de qualité de notre enseignement à l’étranger, source à terme de créations de richesses multiples pour notre pays et nos concitoyens ?
En conclusion, je souhaite me faire l’interprète d’une revendication ancienne de la commission de la culture.
Nous regrettons profondément que l’effort de mise en cohérence de la maquette budgétaire de votre ministère n’ait pas également porté sur les crédits de la francophonie multilatérale, qui continuent de relever du programme 209 de la mission « Aide publique au développement ».
M. Jacques Legendre. Très bien !
M. Louis Duvernois. J’aurai l’occasion d’y revenir le 3 décembre prochain.
La commission de la culture a plaidé à l’unanimité pour le rattachement des crédits de la francophonie à la mission « Action extérieure de l’État »,…
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Louis Duvernois. … plus précisément au programme 105, Action de la France en Europe et dans le monde, qui regroupe les contributions de notre pays à un grand nombre d’organisations internationales.
La francophonie ne doit plus s’entendre comme la chasse gardée du ministère de la coopération. Ces temps sont révolus. Madame le ministre d’État, nous vous demandons de le montrer dans la nouvelle architecture du budget. Pouvez-vous nous indiquer si la francophonie sera enfin rattachée à la mission « Action extérieure de l’État » et nous garantir que vous assumerez vous-même directement la pleine responsabilité de notre politique francophone ? (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, les années se suivent et se ressemblent.
Je veux à mon tour vous alerter sur la situation financière extrêmement préoccupante de l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger.
L’adoption de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État pouvait augurer un avenir moins sombre pour notre « diplomatie culturelle et d’influence », dont l’AEFE est l’un des acteurs.
Le projet de loi de finances pour 2011 a rapidement dissipé toute illusion.
Les crédits du programme 185, Diplomatie culturelle et d’influence, sont amputés de 1,8 % par rapport à l’année dernière, et le projet de loi de programmation des finances prévoit encore des baisses sensibles sur la période 2011-2013. Et si le programme 151 apparaît en progression significative, c’est essentiellement en raison de la hausse du coût de la prise en charge des frais de scolarité des lycéens français à l’étranger.
Plus précisément, si la subvention de l’État à l’AEFE est reconduite à l’identique pour 2011, et même « sanctuarisée » pour la période 2011-2013, son insuffisance demeure manifeste au regard des charges nouvelles qui lui incombent.
L’ampleur, la vigueur et l’excellence de notre réseau font l’unanimité. Le Président de la République appelle régulièrement à son développement. Mais les déclarations incantatoires n’y changent rien. Il s’agit aujourd’hui pour l’État de prendre ses responsabilités.
Au cours de ces dernières années, l’AEFE a vu le nombre d’élèves progresser régulièrement. La tendance s’est accentuée ces trois dernières années, avec un pic de 10 000 élèves supplémentaires l’an dernier.
Une telle hausse des effectifs est positive. Cependant, il faut y apporter un bémol. On constate une prédominance des élèves français au détriment des étrangers, pourtant principaux pourvoyeurs du financement par les droits d’écolage et garants du rayonnement de notre culture.
Cet accroissement devrait donc s’accompagner d’une augmentation des moyens financiers. Mais qu’en est-il en réalité ? La relative stabilité des ressources s’accompagne d’une explosion des charges.
Chaque année, ou presque, nous réserve ainsi sa « nouvelle charge surprise » insuffisamment compensée par l’État.
Je mentionne ainsi le transfert de la compétence immobilière sur les établissements en gestion directe fin 2003, le transfert de la part des cotisations patronales sur les pensions des personnels détachés fin 2007, la prise en charge progressive des frais de scolarité depuis 2007 et le décret qui devrait conduire, au mieux à cinq ans, au transfert de la gestion de la totalité des établissements scolaires français à l’étranger au mois de décembre 2008.
Que nous a réservé la cuvée 2011 ? L’interdiction pour l’AEFE, du fait de l’article 11 du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, de contracter un emprunt sur plus de douze mois. Comme cela a été indiqué à plusieurs reprises, si l’arrêté le confirme, les effets d’une telle disposition seraient désastreux pour l’Agence, qui finance par un emprunt à quinze ans la grande partie de ces opérations immobilières, à savoir la construction de nouveaux établissements et la réhabilitation des anciens.
Je souhaite m’attarder sur la prise en charge des frais de scolarité, la PEC, véritable « cauchemar budgétaire », comme le relève si justement notre collègue Yves Dauge.
Il est inutile d’expliquer une telle mesure, qui, depuis sa mise en place voilà trois ans, revient périodiquement sur le devant de la scène parlementaire
Ce fut une nouvelle fois le cas voilà trois semaines, lors de la remise au Président de la République du rapport de la députée Geneviève Colot et de notre collègue sénatrice Sophie Joissains, qui dressent un bilan extrêmement positif de la PEC, contrairement aux conclusions de la mission d’évaluation et de contrôle de la commission des finances de l’Assemblée nationale, déposées au mois de juin dernier.
La plus remarquable de leurs préconisations réside la cristallisation de la PEC des frais de scolarité de l’année 2007-2008 pour l’ensemble des établissements du réseau.
Cette recommandation aurait donc pour effet, à terme, d’offrir à toutes les familles de lycéens, qu’elles en aient besoin ou non, une partie des frais d’écolage, laissant à leur charge un « ticket modérateur » toujours plus important.
En dénaturant totalement la mesure brandie par Nicolas Sarkozy, cette proposition révèle l’incongruité même de la gratuité. Mais, surtout, elle ne comble aucunement le profond sentiment d’injustice suscité par la PEC et exacerbé encore par ses « dommages collatéraux », notamment le durcissement des critères de bourses, qui est consécutif à la hausse des demandes, elle-même provoquée par l’augmentation des frais d’écolage.
La véritable et indispensable équité, qui fait tant défaut à l’action de l’État ces derniers mois, ne peut résider que dans un retour à une aide à la scolarité fondée exclusivement sur des critères sociaux.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Claudine Lepage. À défaut de suspendre la PEC au profit d’un mécanisme de bourse, il faut en encadrer l’attribution par un double plafonnement.
L’enseignement français à l’étranger est indispensable pour nos compatriotes expatriés et essentiel pour le rayonnement de la France. Notre réseau, extrêmement riche, varié et dynamique, est en danger.
II faut agir, et agir vite, avant qu’il ne soit trop tard ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Béteille.
M. Laurent Béteille. Monsieur le président, madame le ministre d’État, mes chers collègues, dans un rapport que j’avais présenté lors de la XXe Assemblée régionale Europe de la francophonie à Skopje au mois d’octobre 2007, j’avais établi des comparaisons entre les principaux dispositifs de promotion des langues européennes. De ce fait, j’avais également proposé un certain nombre de pistes d’amélioration en matière de promotion de la langue française et la culture francophone à l’étranger.
M’étant rendu dans plusieurs capitales, j’avais rencontré les responsables de plusieurs organismes, comme le British Council ou le Goethe Institut, ce qui m’a amené à appeler de mes vœux plusieurs évolutions.
La première consistait à rationaliser le réseau français, qui est très disparate, et à regrouper sous un label unique les centres culturels, les instituts français, les alliances françaises, afin de renforcer ce qui nous paraissait manquer, c'est-à-dire la visibilité de la présence française culturelle et linguistique à l’étranger.
Sur ce point, la création de l’Institut français par la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’Etat me semble aller tout à fait dans le bon sens. Elle doit nous permettre de donner un élan à notre action culturelle extérieure.
Bien entendu, cela ne pourra pas se faire sans que soit mise en œuvre ma deuxième recommandation : le dispositif culturel français à l’étranger doit bénéficier des moyens nécessaires.
À cet égard, j’avais noté en 2007 que le réseau français ne disposait que d’un budget annuel de 133 millions d’euros, contre 250 millions d’euros pour le Goethe Institut. (M. Jean-Louis Carrère s’exclame.)
C’est dire la performance réalisée par les personnels. Œuvrant pour la défense de la langue française et la culture à l’étranger, ils parviennent à effectuer un travail presque équivalent à celui de nos amis allemands à partir d’un budget deux fois moindre ! (M. Jean-Louis Carrère acquiesce.)
Cependant, l’exercice a évidemment ses limites. Certes, et nous devons aujourd’hui l’admettre, la crise est intervenue. Mais il est vraiment nécessaire de faire en sorte que les moyens soient à la hauteur des besoins dans un domaine où le rayonnement de la France est particulièrement en cause.
M. Jacques Legendre. Très bien !
M. Laurent Béteille. Par ailleurs, dans mes conclusions, j’avais appelé à un rapprochement avec nos partenaires européens, en me fondant sur un constat. Dans un certain nombre de capitales, des projets communs, notamment sur le plan immobilier, avaient été envisagés entre les instituts culturels français et le Goethe Institut, mais tous avaient capoté pour des raisons d’incompréhension, me semble-t-il, entre nos représentants respectifs.
Madame le ministre d’État, de tels partenariats immobiliers avec des pays européens pourraient-ils être développés pour permettre de rassembler et d’utiliser en un même lieu les moyens dont nous disposons les uns et les autres ?
Enfin, j’avais également souhaité un renforcement des synergies entre les différents acteurs francophones.
Même si les moyens dont disposent la Communauté française de Belgique, le Luxembourg ou le Québec sont naturellement plus modestes que ceux de la République française, une coordination avec nos amis francophones peut être utile au renforcement de la visibilité des actions destinées à défendre la langue française dans le monde.
Madame le ministre d’État, de tels dispositifs peuvent-ils être mis en œuvre ? De mon point de vue, ce qui pouvait paraître utile en 2007 devient franchement indispensable en 2010 ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Mes chers collègues, à la demande de la commission et de nombreux sénateurs, je vous propose de poursuivre nos débats sans suspendre la séance.
Toutefois, je me permets d’inviter les auteurs des amendements à faire preuve de concision, et les différents orateurs à éviter de multiplier les explications de vote.
M. Jean-Louis Carrère. Bien reçu !
M. le président. La parole est à Mme le ministre d'État. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État, ministre des affaires étrangères et européennes. Monsieur le président, monsieur le rapporteur spécial, madame, messieurs les rapporteurs pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord remercier toutes celles et tous ceux d’entre vous, issus d’ailleurs de différents groupes parlementaires, qui m’ont chaleureusement accueillie.
J’aurais aimé pouvoir profiter de ma première intervention devant le Sénat depuis mon entrée en fonctions au Quai d’Orsay pour aborder les sujets de fond de notre politique étrangère. Ceux d’entre vous qui me connaissent – pour certains, cela fait longtemps – savent bien que cela me passionne.
Cela m’aurait permis de répondre à plusieurs d’entre vous. Nos conceptions, parfois opposées, sont respectables, et chacune, y compris la mienne – ma vision n’est pas forcément identique à celles qui ont été exprimées –, mérite d’être exposée.
J’aurais également pu rectifier des propos qui ont été tenus et qui ne correspondent pas, à mon sens, à la réalité. Je pense notamment aux affirmations sur la prétendue absence de politique de la France sur certains dossiers.
Prenons l’exemple de la rénovation du siège de l’ONU, qui a été évoqué au cours de la discussion. Hier encore, j’étais avec le Président de la République, qui s’exprimait sur ce point. Et, voilà trois jours, j’ai assisté aux discussions qu’il a menées avec le président des États-Unis, la chancelière allemande et le président de Russie à Lisbonne. À cette occasion, je me suis également entretenue avec M. Karzaï, et nous avons évoqué un certain nombre d’aspects du problème afghan.
La politique internationale et multinationale, la coopération bilatérale avec un certain nombre de pays, la francophonie sont des sujets passionnants. Pour ma part, je souhaite pouvoir en discuter régulièrement avec vous, en prenant tout le temps nécessaire.
M. Robert del Picchia, vice-président de la commission des affaires étrangères. Nous ferons un débat en commission !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je serai toujours heureuse de répondre aux invitations de la commission des affaires étrangères, mais aussi, plus largement, du Sénat, afin de pouvoir aborder l’ensemble de ces questions.
Notre débat d’aujourd’hui s’inscrit dans un cadre bien déterminé, celui de la procédure budgétaire. J’ai bien noté que nous étions soumis à des contraintes horaires, monsieur le président.
L’adoption d’un budget est un acte éminemment politique, au sens le plus noble du terme : il s’agit de définir les moyens mis à la disposition des missions que l’on veut mener à bien et des actions que l’on veut engager.
Certes, le projet de budget qui vous est soumis n’a pas été préparé par mes soins. Je ne l’ai pas négocié. Les « lettres plafond » ont été adressées au ministère des affaires étrangères bien avant ma nomination.
Pour autant, et e le dis d’emblée, j’assume et je revendique ma responsabilité. Je suis membre du Gouvernement. À ce titre, ce projet de budget est aujourd’hui le mien.
M. Robert del Picchia, vice-président de la commission des affaires étrangères. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Je suis donc chargée de le défendre devant vous, et je vais m’y employer.
Réseaux diplomatiques et consulaires, situation des Français de l’étranger, contributions aux organisations internationales, diffusion des moyens du rayonnement de la France, telles sont les actions qui s’appuient largement sur les moyens de la mission « Action extérieure de l’État ».
Aujourd’hui – la plupart d’entre vous l’ont indiqué –, force est de reconnaître que des contraintes pèsent sur le budget. J’en évoquerai trois.
Première contrainte, dans un contexte de crise économique et financière, où un certain nombre de pays sont menacés par des spéculateurs qui profitent des difficultés budgétaires des États, des efforts de maîtrise des dépenses publiques s’imposent. À l’évidence, le ministère des affaires étrangères ne saurait y faire exception.
Mais, comme cela a été souligné, voilà longtemps déjà que le ministère a spontanément commencé à réaliser des efforts, aussi bien d’ailleurs – je me tourne vers Mme Cerisier-ben Guiga et MM. Bel et Hue – sous des gouvernements « de droite » que sous des gouvernements « de gauche ». On ne peut donc pas accuser qui que ce soit d’avoir fait preuve d’imprévoyance.
Il faut en tirer les conséquences. Ainsi que j’avais eu l’occasion de l’indiquer lorsque j’exerçais les fonctions de garde des sceaux, on ne peut pas demander des efforts à un ministère sans tenir compte de ceux qu’il a déjà fournis par le passé.
Deuxième contrainte, le budget de la mission « Action extérieure de l’État » doit favoriser la mise en œuvre des réformes engagées, notamment des mesures adoptées dans le cadre de la loi du 27 juillet 2010 relative à l’action extérieure de l’État, en y associant – cela m’a été demandé – les autres ministères intéressés. Je pense par exemple au ministère de l’éducation nationale et au ministère de la culture, qui ont été évoqués par MM. Gouteyron, Dauge et Raffarin.
M. Adrien Gouteyron, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Michèle Alliot-Marie, ministre d'État. Troisième contrainte, la présidence française du G8 et du G20 constitue une échéance majeure pour mon ministère, comme elle est une échéance majeure non seulement pour la France, mais également pour tous les pays concernés et, plus généralement, pour la planète entière. L’enjeu, ce sont les équilibres mondiaux et la perspective d’une stabilité internationale.
Dans ce contexte contraint, le présent projet de budget de la mission « Action extérieure de l’État » pour 2011 repose sur un choix de responsabilité et tient compte de la nécessité de faire évoluer un certain nombre de pratiques du ministère.
Le total des crédits s’élève à 2,96 milliards d’euros, soit une progression de 4,8 % en crédits d’engagement et de 6 % en crédits de paiement. Surtout, comme l’ont souligné MM. les rapporteurs, l’exigence de responsabilité que j’évoquais se traduit par un triple effort de sincérité, de sécurité et de pérennité.
Effort d’abord de sincérité : les dépenses engagées au titre de nos contributions internationales et des opérations de maintien de la paix font l’objet d’une budgétisation.
Certes, il y a toujours la tentation, et c’est un classique, de sous-évaluer ce type de dépenses ; je l’avais déjà remarqué lorsque j’exerçais les fonctions de ministre de la défense. Mais comme l’a souligné votre éminent rapporteur spécial, Adrien Gouteyron, les montants inscrits au projet de loi de finances pour 2011 correspondent bien aux dépenses que pouvons aujourd’hui anticiper.
Cet effort, qui était indispensable, doit s’accompagner d’une analyse sur nos contributions, qu’elles soient volontaires ou obligatoires. C’est ce que souligne à juste titre le sénateur André Trillard dans le rapport pour avis qu’il a remis au nom de la commission des affaires étrangères.
Effort ensuite en faveur de la sécurité : il est de notre devoir d’œuvrer pour la sécurité d’un certain nombre de territoires avec lesquels nous avons des relations privilégiées ou qui sont essentiels pour la stabilité du monde. En particulier, nous devons éviter que le développement de certains conflits larvés ne favorise le développement de zones grises.
Nous devons donc assumer nos responsabilités en faveur de la paix. De ce point de vue, la coopération militaire de défense et de sécurité est plus que jamais nécessaire. Les crédits d’intervention sont stabilisés à hauteur de 35 millions d’euros. Ils ne sont donc pas touchés par les restrictions ; le contraire eût été irresponsable.
Je remercie le rapporteur pour avis André Trillard d’avoir analysé une grande précision l’utilité de ces crédits pour notre politique nationale comme pour nos intérêts essentiels d’aujourd’hui et de demain.
Plus près de nous, la sécurité, c’est aussi celle de nos implantations à l’étranger, notamment dans un certain nombre de pays où notre personnel diplomatique peut se retrouver dans des situations extrêmement difficiles. Ainsi, 2 millions d’euros sont consacrés à la mise en sécurité d’un certain nombre de nos ambassades par l’installation de moyens de vidéoprotection, de moyens informatiques ou, dans un certain nombre de cas, par le recrutement de personnels supplémentaires.
Bien entendu, en 2011, cet effort portera tout particulièrement sur la zone sahélienne et sur plusieurs pays du Moyen-Orient ou du sous-continent indien.
Effort enfin de pérennité : notre action doit s’inscrire dans la durée.
Ainsi, nous devons attirer dans nos universités les futurs cadres des pays étrangers. Comme je l’ai déjà souvent indiqué lorsque j’occupais d’autres fonctions, c’est évidemment une manière de préparer l’avenir. Ces futurs cadres, par les décisions qu’ils prendront, auront une influence directe à la fois sur nos exportations et sur notre politique.
Quand on a reçu un enseignement dans une langue autre que sa langue maternelle, quand on a été formé dans un pays étranger, quand on y a créé un réseau, on garde des liens tout au long de sa vie. J’y vois là un élément de notre influence.
Les crédits consacrés aux bourses sont donc sanctuarisés à hauteur de 80 millions d’euros. Ce sont ainsi près de 15 000 boursiers, dont 3 000 en Europe et autant en Asie, qui pourront en bénéficier.
C’est un début ; je pense qu’il faut aller plus loin. Comme l’ont souligné plusieurs orateurs, le financement des bourses est, là encore, un élément de notre influence, un aspect de la francophonie.
Un opérateur unique des bourses du ministère des affaires étrangères sera mis en place au cours de l’année 2011. En effet, nous devons mieux gérer l’attribution des bourses.
Cet opérateur unique résulte de la fusion de l’association EGIDE, centre français pour l’accueil et les échanges internationaux, avec les activités internationales du Centre national des œuvres universitaires et scolaires, le CNOUS.
Je veux aussi y associer des entreprises qui, dans un certain nombre de cas, mènent des actions de formation plus ciblées. De fait, nous avons besoin d’une vision globale de tous les efforts qui peuvent être réalisés en la matière.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la France, et j’insiste sur ce point, est une puissance de premier rang ! Contrairement à ce que prétendent les « déclinistes » ou les défaitistes, ce n’est pas une puissance de second ordre. (M. le vice-président de la commission applaudit.) La voix de la France, à la différence de celle d’autre pays, est écoutée partout dans le monde. Je peux en porter témoignage. Lors de mes différents déplacements, que ce soit en Chine – je me suis entretenue avec son président –, en Amérique latine, dans de nombreux pays africains ou en Asie centrale, j’ai constaté que l’on s’interrogeait partout sur la position de la France, sur son analyse de telle ou telle situation. On compte sur la France !
Aussi, face au monde qui se crée sous nos yeux, face aux défis de la mondialisation, face à l’émergence de nouvelles puissances, il est important de conserver ce qui fait notre spécificité et ce qui contribue à notre rayonnement dans le monde.
M. Pozzo di Borgo a raison de dire que la France a une voix à faire entendre. C’est pourquoi nous devons être soucieux des moyens qui sont mis au service de notre vision et de notre action.
La présence de notre pays à l’étranger, en Europe ou dans les pays francophones, participe aussi de cette puissance. Nous pouvons également utiliser pour étendre notre capacité d’influence auprès des pays qui leur sont frontaliers, et faire ainsi tache d’huile.
Je nourris donc de hautes ambitions en la matière pour le ministère des affaires étrangères et européennes.
Pour répondre à une question qui m’a été posée, je souhaite prendre en charge directement la politique de francophonie ! Cela se traduira dans la structure du ministère. Je fais effectivement de la francophonie un élément de la présence de la France dans le monde ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et sur certaines travées du groupe socialiste.)
Les missions les plus fondamentales de l’État, et celle-ci en est une, monsieur Chevènement, ne peuvent pas être soumises à de banales contraintes de gestion. Soyez-en assurés, pas plus que je ne l’ai fait dans le passé, je ne laisserai des considérations comptables l’emporter sur les intérêts de la France ou sur son influence ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
Effectivement, messieurs Raffarin, Chevènement et Yung, j’ai l’intention de me battre pour défendre le budget de ce ministère. Lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative, j’essaierai d’obtenir des moyens supplémentaires.
Je suis opposée non pas au principe la RGPP, mais à une approche strictement comptable !
Si la RGPP a pour finalité une utilisation optimale de l’argent dont les Français nous confient la gestion en payant leurs impôts, j’y suis favorable. Mais faire de celle-ci un simple instrument destiné à justifier des coupes budgétaires, ce serait oublier les intérêts majeurs de la France et le long terme au profit d’équilibres comptables immédiats !
Certes, il faut associer les deux aspects. Nous avons besoin de moyens, mais nous devons aussi veiller à les gérer au mieux.
En tout état de cause, je n’accepterai pas un décalage excessif entre nos ambitions et les moyens consacrés à la diplomatie française dans toutes ses composantes.
Que ce soit en matière stratégique, économique, scientifique, linguistique et culturelle, nous pouvons avoir des ambitions, car notre pays dispose d’atouts dans la compétition internationale, sans doute encore plus aujourd’hui qu’hier, face au risque de la mondialisation.
Bien entendu, nos moyens resteront insuffisants pour satisfaire nos ambitions, mais nous devons réfléchir ensemble à la manière de mieux les utiliser et les développer.
Madame Garriaud-Maylam, monsieur de Montesquiou, je suis tout à fait disposée à réfléchir à des solutions innovantes nous permettant d’être plus efficaces dans un certain nombre de domaines.
À l’évidence, notre organisation diplomatique doit mieux intégrer la construction européenne et les enjeux d’aujourd’hui, tout en anticipant ceux de demain.
Monsieur Yung, vous m’avez interrogée sur le nombre de Français au sein du nouveau Service européen pour l’action extérieure.
Je vous rappelle que, à compter du 1er décembre prochain, le premier collaborateur de Mme Ashton sera un diplomate français dont la compétence est unanimement reconnue.
En outre, dans les prochaines semaines ou dans les prochains mois, trois Français seront nommés chefs de délégation de l’Union européenne en pays tiers. Enfin, l’ancien ministre de la défense que je suis se félicite de la présence d’un compatriote à la tête de l’une des directions principales de l’Agence européenne de défense.
Mon ambition, puisque nous devons anticiper, est que le Quai d’Orsay devienne, ou redevienne, l’outil permettant d’avoir une vision stratégique à dix ans, vingt ans, trente ans de ce que doit être l’action de la France et qu’il puisse ainsi mieux servir la politique du Président de la République et de notre pays.
Dès lors, nous devons nous adapter et nous moderniser. Nous devons apprendre à travailler différemment, sur la base des moyens prévus pour l’heure par la mission « Action extérieure de l’État », quand bien même ceux-ci augmenteraient à l’avenir.
La mise en œuvre de ce budget soulève un certain nombre de questions, auxquelles j’entends apporter des réponses concrètes le plus rapidement possible.
S’agissant des effectifs, ceux-ci seront réduits. Ainsi, 160 équivalents temps plein seront supprimés en 2011. Ces réductions prolongent malheureusement celles des exercices précédents.
Comme certains d’entre vous l’ont fait remarquer, dans un certain nombre de cas, une utilisation plus rationnelle des moyens est non seulement possible, mais encore nécessaire.
Monsieur de Montesquiou, une logique d’adéquation aux priorités stratégiques doit être mise en œuvre. Nous devons définir nos priorités et y adapter nos moyens. Vous avez d’ailleurs cité un certain nombre de chiffres. Ce sont les missions qui doivent définir les moyens, et non l’inverse.
Il n’est pas question que les suppressions de postes remettent en cause la qualité du service, en administration centrale comme dans les ambassades et les consulats. Là où les postes sont nécessaires, ils subsisteront. Je rejoins sur ce point les préoccupations exprimées par plusieurs sénateurs, notamment par M. le rapporteur spécial.
Concrètement, une trentaine d’ambassades dites « à mission simplifiée » sont aujourd’hui en service. La question est de savoir si une ambassade peut réellement fonctionner avec onze, voire dix équivalents temps plein.
À ce jour, je ne suis pas en mesure de vous répondre. C’est pourquoi je lancerai un audit dès le début de l’année 2011 pour évaluer la pertinence du modèle. Ne le condamnons pas par avance. Voyons ce qu’il en est.
Je tiens à rassurer Jean-Pierre Raffarin. Mon objectif est de conforter notre présence diplomatique à l’étranger. Je veux aussi valoriser certains ambassadeurs qui n’ont pas d’affectation territoriale ou qui ne sont pas en poste. Quel dommage de ne pas employer leur compétence, leur savoir-faire, leur expertise, qui seraient si utiles, par exemple, pour renforcer la culture diplomatique de nos entreprises ou de nos collectivités territoriales !
S’agissant maintenant des crédits de fonctionnement, qui doivent également faire l’objet d’une réflexion approfondie, ils seront réduits de 5 % cette année, soit une économie non négligeable.
La présidence du G8 et du G20 n’en sera toutefois pas affectée. Comme l’ont d’ailleurs noté MM. Adrien Gouteyron et André Trillard, une enveloppe spécifique nous permet de nous en assurer.
En outre, dans le total des dépenses de fonctionnement, plus du tiers sont liées aux loyers. Cette charge nous oblige aujourd’hui plus que jamais à suivre tout particulièrement notre parc immobilier, afin de voir dans quelle mesure il correspond réellement à nos besoins. Nous devons également réfléchir à l’utilisation d’un certain nombre de locaux.
Je reviens de Berlin, où j’ai passé la journée avec mon homologue et la chancelière Merkel. J’ai pu constater que certains locaux de notre ambassade, notamment les locaux de réception, étaient loués à des entreprises étrangères qui ont besoin de mener des actions à Berlin. Cela permet de diminuer d’autant, voire de prendre en charge entièrement les frais de fonctionnement de l’ambassade. Ce modèle peut être reproduit ailleurs.
Il existe également un problème d’entretien, cela n’est pas contestable. Monsieur Trillard, monsieur Yung, vous avez eu raison de le noter.
Compte tenu des règles établies, se pose aussi un problème de fluidité des ventes. Pour cette raison, j’ai demandé au Quai d’Orsay de prendre contact avec la SOVAFIM.
La Société de valorisation foncière et immobilière, créée sur capitaux publics à l’initiative de Jean-Pierre Raffarin alors qu’il était à Matignon, s’occupe de ventes « prépayées », c’est-à-dire que le vendeur reçoit l’argent avant même que la vente ne soit réalisée, et dispose également d’une clause d’incitation à vendre au-delà de l’estimation.
J’ai fait travailler cette société pour le ministère de la justice, notamment au titre de la cession de prisons. Je désire la faire travailler également pour le ministère des affaires étrangères. La formule a donné de bons résultats ailleurs, pourquoi ne pas y recourir ici ?
Il est vrai, monsieur Yung, que les délais de rattachement des crédits immobiliers sont longs et complexes, vous avez souligné ce décalage effectivement préoccupant. Je demanderai donc à M. Baroin de faire en sorte que ses services soient un peu plus rapides et efficaces. Il est bon de demander aux autres de faire des efforts, mais il n’est pas moins utile d’en exiger de soi-même…
En tout état de cause, la fluctuation des taux de change pose le problème de l’anticipation d’un certain nombre de dépenses. Pour parvenir à une plus juste appréciation de ces charges, j’entends demander le plus rapidement possible à Bercy de trouver une solution, afin de procéder à la nécessaire couverture du risque de change.
D’autres solutions peuvent être trouvées, et j’en ai entendu qui étaient appréciables, notamment de la part de M. Béteille, qui prône une politique de partage ou de mutualisation d’un certain nombre de biens immobiliers. Ces voies sont à explorer. L’important est d’être concret et pragmatique, et de chercher des solutions de bon sens.
Enfin, toujours au titre de la nécessaire adaptation des pratiques, je citerai la prise en charge des frais de scolarité pour les élèves français.
Beaucoup d’intervenants ont évoqué, et à juste titre, notre politique d’enseignement à l’étranger et l’attrait que nous pouvions avoir pour un certain nombre d’étrangers. Je pense notamment à MM. Duvernois, Pozzo di Borgo et Yung, ainsi qu’à Mme Garriaud-Maylam.
Les actions à mener sont de plusieurs ordres.
Le problème des élèves français à l’étranger est particulier. La décision du Président de la République d’instaurer la gratuité de l’enseignement public à l’étranger répond à une exigence d’égalité.
En conséquence, le coût de prise en charge budgétaire des frais de scolarité augmente, la dotation budgétaire correspondante aussi. Ainsi, l’évolution entre 2010 et 2011 correspond à une augmentation de 13 %. Les besoins sont couverts pour l’année prochaine. Cela étant, il faut envisager cette question aussi sous l’angle du moyen et du long terme. Je sais que le Parlement est attentif à ce sujet, nous aurons l’occasion d’en reparler.
Un rapport a été remis par Mmes Colot et Joissains au Président de la République. Dans ce contexte, plusieurs amendements sénatoriaux ont été déposés. Nous y reviendrons plus tard au cours de ce débat.
À cet instant, je veux souligner que le financement public des frais de scolarité ne doit pas conduire à un désengagement total des entreprises et des acteurs économiques, désengagement que je n’admettrai pas.
Pour un certain nombre d’entreprises, en effet, cela représentera une économie, et j’attends que ces dernières montrent aussi qu’elles sont prêtes à participer au rayonnement de la France, singulièrement à l’entretien des bâtiments. J’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs grands chefs d’entreprises ayant des implantations à l’étranger. Je me suis adressée à eux très directement, car je pense que cela relève aussi de leur responsabilité, et de leur intérêt à long terme, que de soutenir l’action menée en la matière par le gouvernement français.
Monsieur le président, je ne voudrais pas abuser de l’attention du Sénat. Je crois en effet savoir qu’une règle a été fixée pour que nous tâchions d’achever rapidement cette discussion.
Permettez-moi cependant de souligner que 2011 sera une année importante pour le ministère des affaires étrangères et européennes.
Le budget prévu pour la mission « Action extérieure de l’État » correspond aux priorités les plus importantes. Il nous oblige aussi à faire des choix, à innover, à proposer des pratiques nouvelles, ce qui n’est pas désagréable : nous sommes dans un monde en mouvement et devons savoir nous remettre en cause.
L’année 2011 sera celle de la mise en œuvre d’outils nouveaux, tel que l’Institut français, qui répondra en partie aux préoccupations de M. Béteille.
Que nous soyons d’accord ou pas, je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, dans les discussions qui vont suivre, toujours constructives, je l’espère, à ne pas oublier l’essentiel.
L’essentiel, c’est la France, et la place incontournable qu’elle occupe désormais dans le monde. C’est le rôle de premier plan que nous avons repris grâce à la présidence française de l’Union européenne, grâce à la présidence du G20, et bientôt celle du G8.
Nos valeurs et nos principes nous amènent à élever une voix forte, et une voix entendue dans le monde entier. Notre responsabilité à tous est de faire en sorte que cette voix soit la plus audible possible.
Nous pouvons avoir des divergences, nous ne sommes sans doute plus à l’époque du consensus général sur tous les sujets, mais l’important est la hauteur de vues que nous exigeons de nous-mêmes pour débattre.
Le budget que je vous présente aujourd’hui est un moyen. L’important est que ce moyen nous permette de mettre en œuvre ce que sont nos idées et ce qu’est notre politique. Nous n’avons pas le temps d’aborder l’Afghanistan, l’ONU, l’Afrique, l’Europe ou la piraterie. Je le regrette, car j’ai des choses à dire sur tous ces sujets.
Ces débats, je souhaite que nous les ayons. Ils sont en effet aussi essentiels à l’information de tous qu’aux échanges d’idées. Et nous aurons ces débats dans un état d’esprit qui sera digne des enjeux, car je suis persuadée que nous sommes tous ici attachés à des valeurs qui ont fait la grandeur et l’histoire de notre pays, et à cette valeur qui nous dépasse tous : la France ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)