M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 247 et 474.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 242 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 471 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, l'office peut, au vu des éléments présentés à l'appui de la demande d'asile, décider que l'instruction de la demande se fera selon la procédure normale. Dans ce cas, l'office informe l'étranger et l'autorité administrative compétente qui lui délivre le titre provisoire de séjour prévu à l'article L. 742-1. »
La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l’amendement n° 242.
Mme Josiane Mathon-Poinat. En l’état actuel du droit, l’OFPRA est tenu, lorsqu’un préfet refuse le séjour à un demandeur d’asile, d’examiner sa demande en procédure prioritaire. La procédure est donc accélérée, ce qui ne laisse pas le temps à l’office de statuer sur une demande d’asile présentant une situation complexe et nécessitant, de ce fait, une instruction particulière.
C’est le cas des demandes d’asile émanant d’étrangers originaires de pays considérés comme sûrs – ma collègue Nicole Borvo Cohen-Seat a tout à l'heure bien montré ce qu’on pouvait penser de cette notion ! – ou bien d’étrangers placés en rétention.
Notre amendement tend donc à permettre à l’OFPRA de revenir à la procédure normale de demande d’asile lorsqu’il le juge nécessaire, afin de disposer du temps utile à l’instruction de tous les dossiers dans les meilleures conditions.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 471.
Mme Patricia Schillinger. Venus se réfugier dans notre pays, les demandeurs d’asile ont en principe le droit d’y rester pendant tout le temps que prendra l’examen de leur requête par l’OFPRA ou par la Cour nationale du droit d’asile. Les demandeurs d’asile sont donc « admis provisoirement au séjour ». Ils disposent en principe d’un titre de séjour, valable pendant trois mois et renouvelé jusqu’à ce qu’une décision définitive soit prise quant à leur demande de protection.
Il existe néanmoins trois cas dans lesquels le préfet peut refuser cette admission provisoire au séjour : le demandeur d’asile est originaire d’un pays désigné comme sûr ; sa présence en France constitue une menace grave pour l’ordre public ; sa demande d’asile est considérée comme abusive. Dans tous ces cas, les demandeurs d’asile sont placés en procédure dite « prioritaire ».
Contrairement à ce que cette qualification de « prioritaire » pourrait laisser penser, cette procédure est loin d’être avantageuse. Les demandeurs d’asile qu’elle concerne ne bénéficient d’aucun droit : ni logement, ni allocation temporaire d’attente, ni couverture maladie universelle...
Si la réponse de l’OFPRA est négative, le recours devant la Cour nationale du droit d’asile n’est pas suspensif. La personne peut alors être renvoyée vers son pays d’origine même si son recours n’a pas été examiné.
J’ajoute que, selon la Commission nationale consultative des droits de l’homme, le recours excessif aux procédures prioritaires, appliquées à près d’un quart des demandes d’asile, n’est pas assorti de toutes les garanties requises pour un examen équitable des dossiers, notamment l’assurance d’un délai raisonnable d’instruction et le droit au recours suspensif.
C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, d’octroyer plus de souplesse à l’OFPRA dans l’examen des dossiers. L’office devrait pouvoir décider, au regard des éléments matériels, que l’instruction de la demande se fera selon la procédure normale, et non selon la procédure prioritaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Ces amendements tendent à permettre à l’OFPRA de décider qu’une demande d’asile examinée en procédure prioritaire passera en procédure normale, ce qui permettrait de délivrer une autorisation provisoire de séjour au demandeur.
La décision d’admission au séjour des demandeurs d’asile relève de l’autorité préfectorale, et non de l’OFPRA. L’autorité préfectorale ne peut toutefois refuser l’admission au séjour du demandeur que dans quatre hypothèses limitativement énumérées, sous le contrôle du juge administratif saisi, le cas échéant, par la voie d’un référé-liberté.
Des mécanismes de contrôle existent donc bien et la commission est défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 242 et 471.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 470, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa (c) de l'article L. 723-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est supprimé.
La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Les demandeurs d'asile sont auditionnés par l'OFPRA. Néanmoins, quatre exceptions sont prévues par la loi, à l'article L. 723-3 du CESEDA.
S'il paraît justifié que l'étranger ne soit pas convoqué à une audition du fait de son état de santé ou si « l'office s'apprête à prendre une décision positive à partir des éléments en sa possession », il devrait pouvoir bénéficier d'un entretien dans les autres cas. En effet, les éléments écrits transmis à l'OFPRA, souvent dans des conditions difficiles – je pense notamment à leur rédaction –, ne peuvent remplacer un entretien individuel.
Par conséquent, il convient de supprimer la disposition excluant de l'entretien individuel les étrangers dont la demande écrite apparaît infondée à ce stade de la procédure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à supprimer les dispositions permettant à l’OFPRA de se dispenser de convoquer pour un entretien le demandeur dont la demande paraît manifestement infondée.
Il faut préciser que ces dispositions incluent notamment les demandes n’entrant pas dans le champ de la convention de Genève ou de la protection subsidiaire : par exemple, une demande formulée pour des motifs économiques tels que l’obtention d’un emploi.
D’après les chiffres qui nous ont été communiqués, le taux de convocation à un entretien est toutefois très élevé : il atteint 97% en première demande, dont 94 % pour les procédures prioritaires. J’ajoute qu’une personne qui n’aurait pas été convoquée par l’OFPRA peut toujours, en cas de recours, être entendue par la Cour nationale du droit d’asile.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 250 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 476 est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 75 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le titre provisoire de séjour autorise à travailler selon les conditions fixées par décret en Conseil d'État. »
M. le président. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour présenter l'amendement n° 250.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Cet amendement a pour objet d’ouvrir un droit au travail aux demandeurs d’asile, en précisant que le titre provisoire de séjour autorise à travailler.
Accorder ce droit est important puisqu’il conditionne l’intégration, mais surtout les conditions de vie – pour ne pas dire de survie – des étrangers demandeurs d’asile sur le territoire français. II permet à chacun de subvenir à ses propres besoins et d’acquérir une indépendance financière indispensable.
Dans le cas où la demande d’asile est en cours d’instruction à l’OFPRA depuis moins de six mois, une autorisation préalable serait délivrée et, si la demande d’asile dépasse le délai de six mois ou si un recours est déposé contre la décision de rejet de la demande d’asile, cette autorisation serait délivrée de manière automatique.
Rien ne saurait justifier le refus d’accorder ce droit au travail, notamment au regard des délais évoqués.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour présenter l'amendement n° 476.
Mme Patricia Schillinger. Lorsqu’un étranger est admis à séjourner en France pour déposer une demande d’asile, il dispose de vingt et un jours pour transmettre son dossier à l’OFPRA. L’article R. 742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile prévoit la délivrance d’un titre provisoire de séjour au demandeur d’asile dans l’attente de la décision de l’office.
Durant cette période, sous certaines conditions, le demandeur peut toucher l’allocation temporaire d’attente, qui équivaut à 10,83 euros par jour. Par ailleurs, il n’a pas le droit de travailler. Certains des demandeurs d’asile travaillent donc illégalement ou vivent grâce à l’aide de tiers. En tout cas, cette interdiction maintient les demandeurs d’asile dans une précarité extrême.
C’est pourquoi notre amendement tend à prévoir qu’est délivrée au demandeur d’asile une autorisation de travail pour la période d’attente de la décision de l’OFPRA.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. La commission sollicite l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est, donc, l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Les auteurs de ces amendements souhaitent donner aux demandeurs d’asile le droit au travail. Le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition. (Exclamations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)
Le demandeur d’asile peut solliciter la délivrance d’une autorisation provisoire de travail dans deux hypothèses : lorsque l’OFPRA n’a pas statué dans un délai d’un an suivant l’enregistrement de sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié pour des raisons qui ne lui sont pas imputables ; lorsqu’il a formé un recours devant la CNDA, la Cour nationale du droit d’asile, contre une décision de rejet de l’OFPRA.
Les demandeurs d’asile pouvant être déboutés, leur insertion par le travail est susceptible de créer de fausses attentes…
M. Alain Gournac. Eh oui !
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. … et rendrait systématiques les demandes de régularisation par le travail.
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Même avis de la commission !
M. le président. La parole est à Mme Alima Boumediene-Thiery, pour explication de vote.
Mme Alima Boumediene-Thiery. Je souhaite vous rappeler, madame la ministre, que ces demandeurs d’asile ont besoin de vivre. Ils sont donc obligés de travailler, au moins un peu. Cela signifie tout simplement que, par votre politique, vous encouragez le travail au noir.
Mme Patricia Schillinger. Tout à fait !
M. Alain Gournac. Mais non !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 250 et 476.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 75 quater A (nouveau)
Le chapitre III du titre III du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un article L. 733-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 733-3. – Avant de statuer sur un recours soulevant une question de droit nouvelle, présentant une difficulté sérieuse et se posant dans de nombreux litiges, la Cour nationale du droit d’asile peut, par une décision qui n’est susceptible d’aucun recours, transmettre le dossier de l’affaire au Conseil d’État, qui examine dans un délai de trois mois la question soulevée. Il est sursis à toute décision au fond jusqu’à l’avis du Conseil d’État ou, à défaut, jusqu’à l’expiration de ce délai.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. » – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 75 quater A
M. le président. L'amendement n° 232 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 213-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° Aux premier et septième alinéas, les mots : « quarante-huit heures » sont remplacés par les mots : « deux jours ouvrés ».
2° Le troisième alinéa est supprimé.
3° Les deuxième et troisième phrases du sixième alinéa sont supprimées.
4° À la première phrase du neuvième alinéa, les mots : « de quinze jours » sont remplacés par les mots : « d'un mois ».
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La France a été condamnée le 26 avril 2007 par la Cour européenne des droits de l’homme, dans son arrêt Gré, en raison de l’absence de recours suspensif pour les procédures de refoulement du territoire.
Cet arrêt a reconnu que l’absence d’un recours juridictionnel de plein droit suspensif ouvert aux étrangers dont la demande d’asile à la frontière a été rejetée méconnaît les articles 3 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
À la suite de cette condamnation, la France s’est retrouvée dans l’obligation de légiférer et de créer un recours effectif et suspensif, ce qu’elle a fait partiellement dans la loi du 20 novembre 2007 relative à l’immigration, à l’intégration et à l’asile. Les sénateurs du groupe CRC-SPG avaient ensuite déposé une proposition de loi visant à garantir un droit au recours effectif aux étrangers demandeurs d’asile : cela reste d’actualité.
Le texte de la loi de 2007 est loin de se conformer aux obligations issues de la Convention européenne des droits de l’homme et rappelées dans l’arrêt de la CEDH d’avril 2007, qui exige que tout recours soit réellement effectif en droit, mais également en pratique.
Tout d’abord, ce texte a limité le droit à un recours suspensif aux seuls demandeurs d’asile, sans rien prévoir pour les autres étrangers maintenus en zone d’attente. Nous pensons, pour notre part, qu’il convient d’étendre ce droit à tous les étrangers maintenus en zone d’attente.
La loi de 2007 dispose également que l’étranger demandeur d’asile dispose d’un délai de quarante-huit heures pour déposer un recours contre son refus d’admission sur le territoire au titre de l’asile. Or ce délai est trop court compte tenu de la difficulté d’aider les personnes concernées en quarante-huit heures, l’association habilitée à être présente en zone d’attente n’étant pas sur place tous les jours. Nous souhaitons donc porter ce délai à deux jours ouvrés, afin de garantir l’effectivité du recours.
De même, il ne nous semble pas acceptable que ce recours soit exclusif de tout autre recours, ce qui prive les personnes concernées de la possibilité d’exercer un autre recours, tel un référé-liberté, fondé sur une autre liberté fondamentale.
Enfin, s’agissant des voies de recours contre la décision de refus d’entrée sur le territoire du tribunal administratif, la loi a posé deux restrictions qui en limitent considérablement la portée. Le délai de recours est de quinze jours, ce qui tend à le rendre ineffectif, d’autant qu’il n’est pas suspensif. Aussi souhaitons-nous non seulement porter ce délai de recours à un mois, mais encore prévoir que l’appel est suspensif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement vise à modifier le régime juridique du recours exercé contre le refus d’entrée sur le territoire au titre de l’asile en portant de quarante-huit heures à deux jours ouvrés le délai pour former ce recours, en supprimant la possibilité d’utiliser la visioconférence et en instaurant un appel suspensif dans un délai d’un mois.
Le recours suspensif en matière d’asile à la frontière a été introduit en 2007, afin d’assurer la conformité de notre droit avec les exigences posées par la CNDA.
Il ne paraît pas souhaitable d’aller au-delà de ce que prévoit le code des étrangers. Je rappelle que, pendant le temps de cette procédure, l’étranger est maintenu en zone d’attente.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 462 rectifié, présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi modifié :
1° L'article L. 742-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. » ;
2° Les articles L. 742-5 et L. 742-6 sont abrogés ;
3° Le second alinéa de l'article L. 731-2 est complété par les mots : « ou, si le requérant est maintenu en rétention, au plus tard le dix-huitième jour qui suit cette notification » ;
4° Après l'article L. 733-2, il est inséré un article L. 733-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 733-3. - Le président et les présidents de section examinent par priorité, sans respecter l'ordre chronologique d'enregistrement des recours, les requêtes déposées par les requérants dans le cadre de la procédure décrite à l'article L. 731-2. » ;
5° Après l'article L. 554-3, il est inséré un article L. 554-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 554-4. - Il est mis fin au maintien de l'étranger en rétention lorsque la demande d'asile présentée par celui-ci a été rejetée et qu'il a exercé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile dans les conditions prévues à l'article L. 731-2.
« Dans ce cas, l'autorité administrative peut décider de l'assigner à résidence dans les conditions prévues à l'article L. 552-5. »
La parole est à Mme Raymonde Le Texier.
Mme Raymonde Le Texier. Par cet amendement, nous vous interpellons une nouvelle fois sur les problèmes liés au placement de très nombreux demandeurs d’asile en procédure prioritaire, car cette procédure accélérée les prive de nombreux droits, dont le droit à un recours suspensif.
Cet amendement vise donc à consacrer le caractère suspensif de toute mesure d’éloignement lors du recours formé devant la CNDA et de supprimer deux articles qui deviennent donc sans objet.
Cet amendement prévoit également la fin du maintien en rétention administrative en cas de dépôt d’un recours devant la CNDA. Il est alors prévu d’assigner à résidence le requérant libéré, dans les conditions de droit commun.
M. le président. L'amendement n° 249 rectifié, présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :
Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est ainsi rédigé :
« Art. L. 742-3. - L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir et ne peut faire l'objet d'aucune mesure d'éloignement jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection de réfugiés et des apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. »
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Nous avons déjà eu maintes fois l’occasion de vous exposer nos positions sur la procédure appliquée aux étrangers : elle doit améliorer leur protection et se dérouler avec la garantie du respect de leurs droits fondamentaux.
Ici, nous abordons la procédure relative aux mesures d’éloignement.
Il s’agit d’interdire qu’une mesure d’éloignement soit prise à l’encontre d’un étranger admis à résider régulièrement en France avant que l’OFPRA n’ait notifié sa décision ou lorsqu’un recours a été formé, jusqu’à la notification de la décision de la CNDA.
Plusieurs conventions internationales, dont la convention de 1951 relative au statut des réfugiés et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, affirment l’interdiction du refoulement des demandeurs d’asile, au regard des risques encourus.
D’autre part, la Convention européenne des droits de l’homme, dans son article 13, reconnaît le droit à un recours effectif, ce qui est particulièrement important considérant que certaines personnes sont susceptibles de subir des sévices lors de l’éloignement.
Notre amendement vise donc à mettre en conformité le droit français avec ces deux principes consacrés par le droit international.
M. le président. Les amendements nos 245 rectifié et 473 rectifié sont identiques.
L'amendement n° 245 rectifié est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 473 rectifié est présenté par MM. Yung, Anziani et Sueur, Mmes Boumediene-Thiery et Bonnefoy, MM. Collombat, Frimat et C. Gautier, Mme Klès, MM. Michel, Antoinette, Assouline et Badinter, Mmes Blondin, Cerisier-ben Guiga et Ghali, M. Guérini, Mme Khiari, M. Lagauche, Mme Lepage, MM. Madec, Mermaz, Patient et Ries, Mme Tasca et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 75 quater A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile si un recours a été formé auprès de celle-ci. »
La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, pour présenter l’amendement n° 245 rectifié.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. L’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme prévoit que le droit à un recours effectif doit passer par un recours suspensif ; c’est ce que la Cour européenne des droits de l’homme a affirmé concernant la France en 2007 dans l’arrêt Gebremedhin.
Comme le droit français n’a toujours pas intégré ces injonctions, nous proposons de l’inscrire dans la loi afin qu’aucune mesure d’éloignement ne puisse être effectuée avant que la CNDA n’ait pu notifier sa décision lorsqu’un recours a été effectué auprès d’elle.
Contre toute logique, la France permet actuellement la reconduction des étrangers avant que la CNDA n’ait pu rendre sa décision, ce qui limite grandement l’intérêt de la décision rendue comme de la possibilité de former un recours.
Nous proposons donc de rétablir les droits des étrangers, en conformité avec le droit international.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l'amendement n° 473 rectifié.
Mme Raymonde Le Texier. Nous proposons de consacrer le fait que le recours formé devant la CNDA est suspensif de toute mesure d’éloignement.
En effet, les demandeurs d’asile placés en procédure prioritaire peuvent être éloignés à tout moment du territoire lorsque leur demande a été rejetée par l’OFPRA.
Certes, un recours suspensif contre la mesure d’éloignement peut être exercé devant le juge administratif, celui-ci devant alors examiner les risques de torture ou de mauvais traitements en cas de renvoi dans le pays d’origine du demandeur d’asile débouté. Cependant, la pratique démontre que le juge administratif n’a ni le temps ni les moyens d’opérer un examen approfondi des risques invoqués. Le juge a donc tendance à s’en remettre à l’appréciation négative qui a été faite par l’OFPRA. En conséquence, les annulations des mesures d’éloignement sur la base de ce recours devant le juge administratif sont rares.
Pour ces raisons, nous considérons que le droit à un recours effectif garanti par l’article 13 de la Convention européenne des droits de l’homme est dénié aux demandeurs d’asile placés en procédure prioritaire.
Il est donc essentiel que tous les demandeurs d’asile puissent interjeter un recours suspensif devant la CNDA, car celle-ci, contrairement au juge administratif, est spécialisée pour traiter des questions d’asile.
Notons que la CNDA annule un très grand nombre de décisions de l’OFPRA. Cela signifie donc que, en l’absence de ce recours, des personnes déboutées par l’OFPRA auraient pu être renvoyées dans leur pays d’origine alors que la CNDA a ensuite reconnu qu’ils y étaient en danger.
Nous n’avons pas le droit de prendre le risque, par simple mesure d’économie, de renvoyer des personnes dans leur pays alors que la mort, la torture et les mauvais traitements les y attendent.
C’est pourquoi, conformément aux recommandations de la Cour européenne des droits de l’homme et du Haut Commissariat aux réfugiés, nous vous demandons de consacrer le caractère suspensif de toute mesure d’éloignement du recours formé devant la CNDA.