Mme la présidente. La parole est à M. François Marc, auteur de la question n° 1266, adressée à M. le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire.
M. François Marc. Ma question, monsieur le ministre, porte non sur les grandes productions agricoles de notre pays, mais sur les conditions de développement offertes actuellement aux filières bio du lin, du chanvre, de la luzerne et de la fécule de pomme de terre.
Les propriétés écologiques et environnementales de ces productions sont unanimement reconnues. Pourtant, leurs filières se trouvent aujourd’hui en péril. Comme beaucoup, je m’inquiète de la disparition de l’organisation commune des marchés dans ces secteurs, ainsi que des dispositifs de soutien direct d’« aide à la transformation » dans le cadre des droits à paiement unique, dont de telles filières pâtiront inévitablement.
On sait pourtant que la PAC post-2013 devrait reconnaître ces activités du lin, du chanvre, de la luzerne et de la fécule comme étant génératrices de ce que l’on appelle le « bien public monétisable » à l’échelle communautaire. De nouveaux dispositifs de soutien similaires aux systèmes d’« aide à la transformation » sont d’ailleurs d’ores et déjà envisagés.
En attendant, il est malheureusement à craindre que les récoltes de 2012 et 2013 ne soient difficiles. Les cours des matières agricoles évoluent dans un contexte, on le sait, extrêmement tendu. La semaine dernière encore, les experts chargés d’élaborer le rapport Cyclope parlaient de « malédiction des matières premières ». La volatilité des cours aidant, on peut aisément imaginer les conséquences sur les arbitrages en termes d’assolement que prendront prochainement les agriculteurs, à savoir la réduction inéluctable des surfaces de chanvre, de lin, de fécule et de luzerne.
Or on sait qu’il est souvent difficile de remettre en culture des surfaces dont l’exploitation a été réduite pendant ne serait-ce que deux années.
Est-ce donc vraiment souhaitable ? Je ne le crois pas.
Alors que la France pâtit d’un certain retard en matière d’économie verte, il est évident qu’il revient aux politiques publiques d’assurer les conditions de développement de l’offre. Le levier réglementaire incitatif doit donc pouvoir être actionné afin de donner le ballon d’oxygène nécessaire permettant à ces productions de trouver en 2012 et en 2013 les conditions d’une rentabilité satisfaisante.
Je souhaiterais que le Gouvernement nous précise également aujourd’hui ses réelles intentions à l’égard de ces filières bio, des filières en émergence, porteuses d’avenir et essentielles pour une économie verte dont la France a besoin dans le contexte international actuel.
Monsieur le ministre, une solution technique d’appui temporaire pour les campagnes 2012 et 2013 est possible grâce aux articles 63 et 68 du règlement CE 73/2009. Pourriez-vous m’indiquer dans quelles conditions nous serions susceptibles de bénéficier de cette aide relais ? Cela éviterait que ne soient pénalisées des productions qui ont tout leur sens en termes d’économie verte.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Bruno Le Maire, ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire. Monsieur le sénateur, je partage entièrement votre analyse sur la pertinence du développement des filières de la fécule de pommes de terre, du chanvre, du lin ou de la luzerne, chacune d’elles appartenant d’ailleurs à des catégories assez différentes du point de vue des dispositifs d’aides dont elles peuvent bénéficier.
Je rappelle au passage que la Haute-Normandie, ma région d’élection, est la première productrice de lin en France et parmi les premières productrices au monde.
Outre l’habillement, cette filière bénéficie de vrais débouchés tout à fait nouveaux, dans le secteur de la santé, mais aussi dans celui des transports, les fibres de lin pouvant servir, par exemple, à l’aviation ou à l’automobile. Elle présente aussi des avantages en termes de stockage de carbone, d’utilisation limitée d’intrants, de diversité des assolements.
Au total, la filière est d’un bénéfice environnemental considérable, comme vous l’avez rappelé.
Le lin fait l’objet d’un programme de promotion qui est soutenu par l’Union européenne et par la France et que nous continuerons à défendre dans les années à venir.
J’en viens aux aides dont peuvent disposer ces différentes cultures.
La luzerne est et restera intégrée dans le plan protéines. C’est l’un des enjeux stratégiques pour l’agriculture française, car nous importons trop de protéines végétales, en particulier du Brésil et de l’Argentine. C’est bien pour ces pays, mais si la France pouvait, dans les années à venir, gagner en indépendance en matière de production de protéines végétales, ce serait une excellente chose.
Je veux donc affirmer ici tout mon attachement à la défense de la production de luzerne et, je le redis, au maintien de son inclusion dans le plan protéines.
Pour le lin et la fécule de pomme de terre, nous avons maintenu un régime d’aides.
À partir de 2011, une inclusion des aides à la transformation est prévue dans le régime des aides directes découplées. Comme le calendrier était trop serré pour permettre à la filière lin de s’adapter au découplage, j’ai demandé et obtenu une prolongation d’un an, renvoyant le découplage à 2012. Cela laisse une année supplémentaire.
À compter de 2012, les aides dont bénéficient ces filières seront de toute façon intégrées dans les DPU, puisque le report obtenu est d’un an au plus.
Enfin, vous m’interrogez sur la possibilité de rouvrir l’article 68 du règlement communautaire. J’ai jusqu’au mois d’août 2011 pour prendre une décision en la matière, et c’est toujours compliqué, vous le savez. Rouvrir cet article, comme nous l’avons fait dans le cadre du bilan de santé de la PAC, signifierait redéfinir la totalité du régime d’aides dont bénéficient les agriculteurs, autrement dit prendre aux uns pour redistribuer aux autres.
Nous vivons une période de sécheresse très difficile pour tous les agriculteurs français. Les éleveurs sont les premiers pénalisés, mais, il ne faut pas se le cacher, l’ensemble des grandes cultures connaîtront des rendements plus faibles.
Je ne suis pas certain que la réouverture de l’article 68 soit aujourd’hui la solution la plus opportune. À ce stade, je préfère m’en tenir aux mesures que je vous ai annoncées, le report du découplage à 2012, le maintien de la luzerne dans le plan de soutien aux protéines afin de défendre la production de luzerne en France et, enfin, les aides spécifiques relatives au lin et au chanvre, qui ont déjà été prévues.
Mme la présidente. La parole est à M. François Marc.
M. François Marc. Je vous remercie, monsieur le ministre, des précisions que vous avez bien voulu nous apporter.
La prolongation d’un an que vous avez signalée est un élément intéressant que les agriculteurs pourront prendre en compte dans leur assolement. C’est une perspective plus positive que ce qui avait été annoncé jusque-là.
Reste la question portant sur la réouverture de l’article 68. Vous indiquez que, si vous la décidez, certains arbitrages seront à faire et d’autres à revoir.
J’attire votre attention sur les engagements nombreux et variés pris par le Gouvernement en matière d’économie verte et d’agriculture durable. Je pense, notamment, aux déclarations que l’on a vu fleurir ces derniers mois, voire ces dernières années, que ce soit la stratégie nationale de développement durable 2010-2013 intitulée « Vers une économie verte et équitable », la stratégie nationale de recherche et d’innovation, ou encore le rapport de mars 2010 du Commissariat général au développement durable, intitulé Les Filières industrielles stratégiques de l’économie verte, sans compter les engagements du cadre du Grenelle II, mais aussi les engagements internationaux pris dans le cadre de la convention de Stockholm.
Ce sont là des engagements forts de la part du Gouvernement. La réouverture de l’article 68 pourrait faciliter leur concrétisation.
J’ajoute que la sécurité qui est apportée aux agriculteurs par la gouvernance publique constitue un élément déterminant de leur comportement en matière d’assolement et de cultures. L’histoire ne manque pas d’exemples de ce qui peut se passer lorsque cette sécurité n’est pas assurée.
Vous avez évoqué la Haute-Normandie, grande productrice de lin. Je citerai, pour ma part, la Bretagne, qui a été une région extraordinairement productive pour le lin et le chanvre, jusqu’à ce que la politique colbertiste, voilà trois siècles, vienne stopper cet élan puisque, pour des raisons internationales, notamment en raison d’arrangements avec les Anglais, on a cessé de donner des assurances aux marchés en termes de commande publique, par exemple pour la marine de guerre.
Ainsi, on le voit, quand la gouvernance publique ne donne plus les sécurités nécessaires, les agriculteurs peuvent être dissuadés de mettre en culture des productions pourtant porteuses d’avenir.
C’est la raison pour laquelle j’insiste, monsieur le ministre, afin que vous réexaminiez éventuellement l’arbitrage dans un sens favorable à ces productions.
avenir des opticiens en milieu rural face à la politique de conventionnement des complémentaires santé
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet, auteur de la question n° 1262, transmise à Mme la secrétaire d'État chargée de la santé.
M. Jean-Luc Fichet. Madame la secrétaire d'État, avec la politique mise en œuvre par votre gouvernement depuis 2007, le reste à charge que les assurés ont à payer pour leurs soins est toujours plus important. C’est la conséquence d’une politique de déremboursement à tout crin et d’une prise en charge par la solidarité nationale des soins d’optique et dentaires qui n’a jamais été suffisante ; nous pouvons même dire qu’elle est inexistante.
Aussi, les complémentaires santé ont mis en place des réseaux de soins avec les professionnels concernés, ce qui bien souvent permet d’obtenir une qualité de prestations supérieure pour un coût moindre.
À la suite des critiques des professionnels de l’optique, le ministère de l'économie s’est inquiété des risques de distorsion de concurrence que pouvaient comporter ces réseaux. Sur sa demande, en vertu de l’article L. 462-1 du code de commerce, l’Autorité de la concurrence a rendu un avis le 28 septembre 2009 sur ce sujet précis.
Dans cet avis, l’Autorité de la concurrence ne s’oppose pas au principe de réseaux de conventionnement fermés tout en reconnaissant qu’ils « peuvent constituer le support de pratiques ayant pour effet d’exclure certains professionnels du marché ». Elle préconise ainsi la mise en œuvre de critères clairs, transparents et non discriminatoires de la part des complémentaires santé.
Pourtant, madame la secrétaire d'État, la situation concrète mérite que le Gouvernement apporte des solutions plus précises. En effet, certains professionnels d’optique, tout particulièrement dans les communes rurales, sont confrontés à un effet cumulatif de réseaux importants dont ils sont exclus.
Pour prendre le cas de ma commune, Lanmeur, l’opticien ne peut bénéficier d’un conventionnement ni avec Groupama ni avec la MGEN, ce qui réduit terriblement son chiffre d’affaires et met véritablement sa survie en question. Par ailleurs, du côté des assurés, cela signifie encore une fois un accès aux soins rendu plus difficile du fait de l’éloignement.
Mon propos n’est absolument pas de dénigrer le travail des mutuelles, qui ont un rôle aujourd’hui primordial à jouer pour la qualité des soins et une meilleure prise en charge des patients. Ce sont d’ailleurs les pouvoirs publics qui appellent eux-mêmes à « un engagement supplémentaire dans la gestion du risque et la prise en charge des soins », comme le rappelait récemment Étienne Caniard, président de la Mutualité Française.
En réalité, il s’agit de conserver un équilibre entre une offre de soins égale sur tout le territoire et l’équilibre du financement de la sécurité sociale.
Cette question est d’autant plus d’actualité que, lors de la première lecture à l’Assemblée nationale de la proposition de loi de M. Fourcade modifiant certaines dispositions de la loi portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, les députés ont adopté un amendement visant à « légaliser » cette pratique des conventionnements.
En effet, un arrêt de la Cour de cassation du 18 mars 2010 remet en cause cette pratique en interdisant à une mutuelle de moduler le niveau de prestations suivant l’existence ou non d’un conventionnement.
Or, si je comprends le souhait des mutuelles de constituer un réseau de soins au bénéfice des patients et la nécessité de limiter les dépenses de santé, je sais aussi qu’il faut faire très attention à l’avenir de la liberté de choix. Ma crainte est que, en créant certaines obligations par la loi, on ne porte atteinte à la liberté de choix des patients comme des professionnels.
Ce n’est pas en voyant disparaître des professionnels, ces artisans indépendants que sont nos opticiens dans nos communes rurales, que nous améliorerons la prise en charge des patients.
Aussi, je voudrais savoir, madame la secrétaire d'État, quelles réponses vous pouvez apporter dès aujourd’hui pour que ces commerces de proximité ne mettent pas la clé sous la porte et pour que les habitants des communes rurales ne soient pas les victimes de politiques de conventionnement qui les dépassent.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Nora Berra, secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé. Monsieur le sénateur, les réseaux de soins permettent aux organismes complémentaires de santé d’effectuer un pilotage de leur risque grâce à l’encadrement des montants des prestations de santé servies aux assurés.
En effet, en acceptant d’intégrer un réseau de soins, un professionnel de santé s’engage à respecter une grille tarifaire, ce qui contribue à la réduction des coûts et, donc, à une évolution mieux maîtrisée des cotisations.
Les réseaux de soins permettent, par ailleurs, le développement d’une politique efficace de lutte contre la fraude pour les complémentaires santé, qui disposent ainsi d’un réseau intégré de prestataires de santé.
Pour ces raisons, le Gouvernement a soutenu, comme vous le savez, l’amendement de la députée Valérie Boyer, visant à étendre la possibilité de mettre en place des réseaux de soins aux mutuelles du code de la mutualité.
Toutefois, cette possibilité ne doit ni s’accompagner d’une baisse de la qualité de l’offre de santé ni entraîner une distorsion de concurrence entre les prestataires de santé. Pour cette raison, l’amendement de Valérie Boyer a également inscrit l’obligation pour l’Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire, l’UNOCAM, de fixer, dans une charte, les principes auxquels doit obéir tout conventionnement entre les prestataires de santé et les organismes assureurs, qu’il s’agisse des assurances, des mutuelles et des institutions de prévoyance, et ce en matière notamment de transparence et de traçabilité des produits proposés.
De plus, l’Autorité de la concurrence remettra un rapport relatif aux réseaux de soins aux commissions des affaires sociales de l’Assemblée nationale et du Sénat afin d’effectuer un suivi du respect des règles de la concurrence pour les prestataires de santé.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Luc Fichet.
M. Jean-Luc Fichet. Je vous remercie de votre réponse, madame la secrétaire d'État.
Permettez-moi cependant de souligner que, dans la mesure où les assurances n’acceptent de conclure des conventions qu’avec un nombre limité de professionnels par zone géographique, ceux qui ne sont pas conventionnés se trouvent forcément exclus des réseaux de soins.
J’ai évoqué tout à l'heure l’exemple de ces artisans, ces professionnels de nos communes rurales qui n’ont pas la possibilité d’intégrer des réseaux de soins et voient de ce fait leur clientèle partir à plusieurs kilomètres pour bénéficier d’un meilleur remboursement. Je peux même citer le cas d’une opticienne qui, pour ses propres lunettes, devrait se rendre chez un autre opticien pour être mieux remboursée ! On le voit, la situation est totalement aberrante.
Bien des questions se posent aussi, à commencer par celles du libre choix et, plus largement et de façon permanente, de l’accès aux soins.
Il faudrait également citer, en corollaire, la présence des commerces en zone urbaine sensible ou en zone rurale. Une telle préoccupation n’entre évidemment pas dans les objectifs des complémentaires santé. Il n’en demeure pas moins que les pratiques de conventionnement de ces organismes favorisent la désertification croissante de certaines communes.
Il serait certainement important que nous menions une réflexion, dans le cadre de la mise en place d’un « bouclier rural », sur l’accès à ces services pour nos concitoyens, comme nous devons le faire pour l’accès à un médecin, à une maternité, à La Poste, à un tribunal, au Trésor public ou aux transports publics.
Madame la secrétaire d’État, le monde rural ne doit pas être considéré comme une terre de relégation !
autorisation d'exercice des médecins titulaires de diplômes obtenus hors union européenne
Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Schurch, auteur de la question n° 1261, adressée à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé.
Mme Mireille Schurch. Madame la secrétaire d’État, confrontés à une véritable pénurie de médecins, les établissements hospitaliers des villes moyennes sont conduits à recruter par contrat des médecins titulaires de diplômes obtenus hors de l’Union européenne. C’est le cas des trois principaux établissements de l’Allier : Vichy, Moulins-Yzeure et Montluçon.
Ces nombreux médecins doivent exercer sous la responsabilité directe d’un chef de service, ou de l’un de ses collaborateurs, dans des conditions financières largement plus désavantageuses que celles dont bénéficient leurs confrères.
Afin de régulariser ces situations, il est possible d’autoriser individuellement ces médecins à exercer, conformément aux dispositions du code de la santé publique. La procédure d’autorisation d’exercice se traduit, pour la grande majorité d’entre eux, par un concours, le nombre maximum de places étant fixé par arrêté pour chaque spécialité. Or ce nombre est très largement inférieur aux besoins.
Ainsi, une jeune cardiologue d’origine camerounaise titulaire d’un diplôme de l’université de Saint-Pétersbourg, bien qu’ayant eu d’excellentes notes à l’ensemble des épreuves, n’a pu obtenir l’une des cinq places offertes, et ne peut donc plus exercer au sein du centre hospitalier de Montluçon. Aucune solution n’est proposée au service de cardiologie dans lequel elle travaillait. Au centre hospitalier de Moulins, c’est un anesthésiste qui a été refusé, bien qu’il ait obtenu une note de 18 sur 20.
On peut, dès lors, s’interroger sur ce concours.
Si ces situations pénalisent les praticiens, elles mettent en péril la survie des services et créent des situations ambiguës. En effet, des services de soins ne fonctionnent aujourd’hui qu’avec la tolérance des autorités administratives !
Des mesures pérennes associant les régions, via les agences régionales de santé, les ARS, et les directeurs des centres hospitaliers doivent être envisagées. Elles permettraient au candidat, après trois ans de pratique sur le territoire national, de déposer sa demande directement auprès de la commission d’autorisation d’exercice, sans passer par le filtre d’un examen ou d’un concours déguisé.
Dans l’attente de ces mesures, les dispositions dérogatoires prévues dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 permettant aux praticiens de passer un examen, et non un concours, arrivent à échéance au 31 décembre 2011. Nombre de ces praticiens expérimentés seront donc privés d’emploi, alors que de nombreux établissements de santé connaissent toujours une situation de grave pénurie.
Envisagez-vous, madame la secrétaire d’État, de prolonger cette mesure dérogatoire et d’autoriser ceux qui ont pu exercer après le 10 juin 2004 de se présenter à l’examen ? Quelles décisions pérennes comptez-vous prendre afin de régulariser la situation de ces 10 000 praticiens, dans les meilleures conditions, avant la fin de cette année ?
J’ajoute que cette mesure serait en phase avec l’esprit et la finalité de la directive « carte bleue », transposée dans le projet de loi relatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, qui consiste à rendre l’Union européenne plus attractive pour les travailleurs hautement qualifiés des pays tiers.
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Nora Berra, secrétaire d’État auprès du ministre du travail, de l’emploi et de la santé, chargée de la santé. Madame la sénatrice, vous avez appelé l’attention du Gouvernement sur la situation des médecins titulaires de diplômes délivrés par un État tiers à l’Union européenne, recrutés dans les établissements publics de santé sous le statut d’associés.
Vous me demandez si j’envisage d’augmenter le nombre de possibilités pour ces praticiens de se présenter aux épreuves de vérification des connaissances organisées dans le cadre de la procédure d’autorisation d’exercice, ce qui rendrait nécessaire de relever les quotas de candidats.
Je rappelle que la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires a porté de deux à trois le nombre de possibilités, pour les candidats à l’autorisation d’exercice, de se présenter aux épreuves de vérification des connaissances et de solliciter cette autorisation. Cette année supplémentaire constitue donc un premier facteur d’accroissement des chances pour ces candidats. En outre, grâce à des procédures transitoires applicables jusqu’au 31 décembre 2011, ils ont la possibilité de présenter un examen, au lieu d’un concours, ce qui est très important.
J’ai tenu, tout d’abord, à ce que la situation particulière et l’expérience acquise par les praticiens recrutés depuis plusieurs années, qui ont en effet, madame la sénatrice, rendu de nombreux services dans les établissements de santé, soient mieux prises en compte. Il m’a paru ainsi important de revoir le processus d’évaluation, afin de privilégier les compétences pratiques des candidats. Ces médecins ont en effet un savoir-faire qu’ils mettent à la disposition de nos établissements.
J’ai également veillé à ce que ce changement ne pénalise aucun des médecins actuellement concernés. C’est pourquoi j’ai demandé à la directrice générale de l’offre de soins de saisir les directeurs des établissements de santé pour leur demander de recenser les praticiens concernés et de les inciter fortement à s’inscrire cette année à l’examen. Je rappelle que les dossiers d’inscription à l’examen de vérification des connaissances doivent être déposés avant le 31 mai 2011, soit dans quelques jours.
Par ailleurs, la directrice générale de l’offre de soins a contacté les organisations syndicales représentatives de ces professionnels afin de les sensibiliser à la nécessité de s’inscrire pour cette dernière session. Dans la mesure où le nombre de candidats qui, habituellement, tirent parti de leur possibilité de passer l’examen une troisième fois est très faible, la perte de chance sera limitée.
Enfin, j’ai demandé à mes services de prévoir une augmentation du nombre de postes ouverts au concours de 2012, afin de compenser la fin de la procédure transitoire et de permettre aux médecins concernés de trouver une voie de résolution pour la reconnaissance de leur expérience professionnelle.
La question que vous soulevez, madame la sénatrice, est pour moi essentielle, et j’ai à cœur d’y apporter de nouvelles réponses dans les semaines et les mois à venir.
Mme la présidente. La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Je vous remercie de ces précisions, madame la secrétaire d’État, même si je ne suis pas tout à fait convaincue.
Vous dites qu’il faudra augmenter le nombre de postes ouverts et veiller à ne pénaliser aucun de ces médecins. Or s’ils échouent à ce concours, qui représente pour eux la dernière chance d’exercer, ils vont se retrouver dans l’illégalité, privés de papiers. Des sans-papiers ne peuvent pas travailler dans un hôpital ! Leur situation est donc extrêmement fragile.
Ce problème concerne surtout les petits centres hospitaliers, qui accueillent ces médecins à bras ouverts, dans la mesure où, comme vous le savez, il existe une pénurie de praticiens. Ainsi, chacun des hôpitaux de nos villes moyennes de l’Allier emploie un médecin dans cette situation.
Je compte sur votre extrême vigilance, madame la secrétaire d’État, pour que ces médecins puissent envisager un avenir professionnel dans notre pays, ne serait-ce qu’en raison de la qualité de leur formation, de l’expérience qu’ils ont acquise dans nos hôpitaux et des services qu’ils rendent depuis de nombreuses années, en étant d’ailleurs souvent financièrement désavantagés. C’est pourquoi je vous ai demandé quelles mesures pérennes vous comptiez prendre dans ce domaine. Nous serons très attentifs à votre action.