M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, sur l'article.

M. Guy Fischer. Alors que nos collègues de l’Assemblée nationale viennent d’entériner la logique des soins sous contrainte portée par ce texte, nous nous devons de défendre la liberté des personnes souffrant de troubles psychiatriques. Nous ne sommes pas dupes et nous voulons mettre au jour les intentions grossièrement dissimulées dans ce texte.

Comme nous avions pu le constater en première lecture, le malade mental est assimilé à un individu dangereux, porteur de risques. Il s’agit dès lors de l’enfermer, de le mettre à l’écart pour éviter de cette manière tout « trouble à l’ordre public ».

Cette logique de soins forcés fait ainsi paraître l’hospitalisation complète comme une incarcération et non plus comme un élément de la chaîne de soins. Une fois de plus, nous ne pouvons que dénoncer, avec force et vigueur, cette conception uniquement sécuritaire de la psychiatrie.

L’autre point majeur de cet article est la procédure, qui reste inadmissible, d’admission en soins psychiatriques en cas de péril imminent. Alors que deux certificats sont exigés pour une admission en soins sans consentement à la demande d’un tiers, un seul certificat médical serait nécessaire dans cette hypothèse. Cette mesure visant à faciliter l’hospitalisation soulève de lourdes inquiétudes, légitimes, de la part tant des soignants que des soignés.

Alors que, en première lecture, le groupe CRC-SPG avait déposé une motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité – motion que vous avez refusé d’adopter, mes chers collègues –, le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État jugent aujourd’hui que ce texte ne saurait être conforme à la Constitution, reconnaissant de ce fait la violation des droits fondamentaux des malades mentaux faisant l’objet de soins en hospitalisation complète.

Inconstitutionnel, ce texte est également inapplicable. La politique gouvernementale des vingt-cinq dernières années a, en effet, considérablement fragilisé le secteur hospitalier, y compris les services de psychiatrie, où le nombre de lits disponibles a connu une diminution de plus de 50 %. Or il n’est certainement pas exagéré de dire que le projet de loi qui nous est présenté ici en deuxième lecture soulève un important paradoxe.

Alors que le Gouvernement n’envisage à aucun moment l’augmentation des effectifs de médecins et de cadres infirmiers au sein du secteur de la psychiatrie publique, il n’hésite pas à imposer à ces derniers des obligations qui ne feront que favoriser l’engorgement que connaît d’ores et déjà ce secteur. Bien sûr, nous considérons que ces certificats, tout comme l’intervention du juge des libertés dans le cadre des hospitalisations d’office, sont nécessaires : ces mesures cruciales garantissent en effet le respect des droits des personnes souffrant de troubles psychiatriques. Cependant, elles doivent s’accompagner d’un déploiement de moyens à la hauteur de la demande. Cette dernière risque d’être considérable si la logique du Gouvernement, qui préconise l’hospitalisation d’office sur décision préfectorale pour les individus ayant causé des troubles à l’ordre public, est suivie.

Face à cet article qui vise à réformer les conditions d’hospitalisation d’une personne à la demande d’un tiers et à instaurer une nouvelle procédure faisant référence au péril imminent, nous ne pouvons nous empêcher de nous poser la question de la pénurie de psychiatres et de cadres infirmiers. Le déficit de personnel soignant est un élément critique au sein de notre système hospitalier actuel, tout particulièrement au sein des différents services de psychiatrie.

Au début du siècle dernier, Sigmund Freud inaugura l’entrée triomphante de la psychanalyse au sein de la médecine psychiatrique. Depuis lors, la place que la psychanalyse occupe dans le processus de soin n’a cessé de grandir. Aujourd’hui, la relation que le soignant entretient avec le soigné par le biais de la parole ne saurait être complètement remplacée par de simples traitements médicamenteux.

Les individus souffrant de troubles psychiatriques ne sont pas des malades comme les autres. Loin de vouloir les stigmatiser et les mettre au ban de la société, nous sommes convaincus qu’ils nécessitent un suivi médical étroit et particulier, cohérent avec des pathologies le plus souvent très complexes. Cet article est loin de répondre à ces besoins.

M. le président. Je suis saisi de onze amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 67 rectifié, présenté par MM. Mézard, Collin, Alfonsi, Baylet, Detcheverry et Fortassin, Mme Laborde et MM. Milhau, Plancade, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

À la seconde phrase du deuxième alinéa de l'article L. 3212-7 du code de la santé publique, après les mots : « ce certificat », sont insérés les mots : « et sous réserve de la décision du juge des libertés et de la détention saisi en application de l'article L. 3211-12-1 ».

Cet amendement n'est pas soutenu.

En conséquence, la discussion commune ne se justifie plus. Les dix amendements suivants vont donc être examinés successivement, les uns après les autres.

L'amendement n° 54, présenté par Mme Demontès, MM. Le Menn, Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 11

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Les deux médecins ne peuvent être propriétaires de parts sociales au sein d’un établissement de santé privé de statut commercial habilité au titre de l’article L. 3222-1.

La parole est à Mme Christiane Demontès.

Mme Christiane Demontès. Notre assemblée a souvent été en pointe sur les questions ayant trait aux conflits d’intérêts. Encore récemment, un rapport d’information sur la prévention effective des conflits d’intérêts pour les parlementaires, signé par plusieurs membres de la commission des lois, est paru.

Il est vrai qu’aujourd’hui la problématique relative aux conflits d’intérêts présente une vive acuité. L’actualité fourmille d’exemples nationaux, européens ou internationaux qui témoignent de la multiplication des cas de conflits d’intérêts.

Cette question est d’autant plus fondamentale qu’elle s’inscrit dans un contexte où la demande de justice et d’éthique des citoyens n’a jamais été aussi légitime et forte.

Notre amendement se situe dans cette perspective. Il tend à lever toute ambiguïté quant au conflit d’intérêt qui pourrait exister dans l’hypothèse où les certificats médicaux seraient rédigés par des médecins psychiatres actionnaires d’un établissement de santé privé de statut commercial susceptible d’être habilité à prendre en charge le patient.

Par conséquent, cet amendement reste fidèle à l’adage juridique qui, en matière médicale, s’applique pleinement : « Nul ne peut être à la fois juge et partie ».

M. Guy Fischer. Une vérité qui mérite d’être rappelée !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Il s’agit de préciser que les médecins établissant les deux certificats médicaux d’admission ne peuvent être propriétaires de parts sociales d’un établissement de santé privé de statut commercial.

Une telle précision ne relève pas du domaine de la loi. Par ailleurs, comme nous avons pu nous en rendre compte durant les auditions, les hospitalisations sous contrainte se font très rarement dans des établissements privés commerciaux.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Cet amendement vise à empêcher tout psychiatre d’être actionnaire d’un établissement de santé privé habilité à prendre en charge un malade faisant l’objet de soins psychiatriques, même si le nombre de parts qu’il détient ne lui confère aucun pouvoir dans la gestion de cet établissement de santé privé et même s’il n’exerce pas dans cet établissement.

Si cet amendement devait être adopté, il restreindrait le champ des praticiens auxquels pourraient être octroyées des missions de service public. Je rappelle que l’article L. 6112-2 du code de la santé publique précise simplement que les missions de service public peuvent être octroyées notamment à des praticiens exerçant dans des établissements de santé titulaires d’autorisations, sans évoquer de quelque façon la possession de parts sociales dans les établissements.

Le Gouvernement est donc défavorable à l’amendement n° 54.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 54.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 9, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 22

Remplacer les mots :

le directeur de l’établissement

par les mots :

le juge des libertés saisi à la demande du directeur de l’établissement

La parole est à Mme Annie David.

Mme Annie David. L’alinéa 22 de l’article 2 précise que « lorsque les deux certificats médicaux ont conclu à la nécessité de prolonger les soins, le directeur de l’établissement prononce le maintien des soins ». Cette rédaction ne nous satisfait pas, car nous la considérons contraire à notre Constitution. Je ne reviendrai pas sur la discussion que nous avons eue il y a quelques instants à propos de l’article 66 de ladite Constitution.

Que l’état du patient exige que les soins qu’il reçoit soient prolongés peut être une réalité médicale que nous ne contestons pas. Toutefois, dans la mesure où ces soins peuvent prendre la forme d’une mesure privative de liberté, leur prolongation justifiée pour des motifs médicaux doit, selon nous et selon le Conseil constitutionnel, être approuvée par le juge des libertés.

En effet, dans une décision récente, qui rend dès aujourd’hui caduque le projet de loi, le Conseil constitutionnel a considéré que, si une mesure privative de liberté n’a pas à être nécessairement prise par l’autorité judiciaire – comme je le rappelais dans ma défense de la motion tendant à opposer l’exception d’irrecevabilité –, elle doit néanmoins impérativement être approuvée par elle. C’est tout le sens de la décision n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010 relative à l’hospitalisation sans consentement qui a conduit au dépôt de ce projet de loi.

Or cet article méconnaît les principes réaffirmés par les juges constitutionnels dans la mesure où le directeur de l’établissement pourrait décider seul de maintenir ou de prolonger une décision dont l’effet est de priver le patient de sa liberté.

Si l’intervention du juge des libertés et de la détention est indispensable, elle l’est également chaque fois que cette décision est renouvelée, puisque sa mission est précisément de vérifier que la mesure privative de liberté est conforme à l’intérêt du patient. C’est donc à lui et non au directeur de l’établissement de décider de la prolongation de la peine.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement tend à proposer que ce soit le juge des libertés et de la détention et non le directeur d’établissement qui prononce la décision de prolongation des soins.

Une telle proposition conduit à une judiciarisation tout à fait excessive, qui n’est pas du tout demandée par le Conseil constitutionnel. C'est la raison pour laquelle nous y sommes défavorables.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d'État. Je suis complètement défavorable à cet amendement, qui tend à confier au juge des libertés et de la détention le soin d’effectuer une démarche administrative revenant au directeur de l’établissement. Le juge des libertés et de la détention est un juge de la liberté et du respect des droits des patients, c'est-à-dire, en l’espèce, de leur maintien en hospitalisation ou de leur sortie. Il est le gardien des libertés individuelles. Il ne peut se substituer à l’autorité administrative qui est responsable de la décision d’admission et, par la suite, des décisions de maintien dans les soins psychiatriques, quelle que soit la forme de la prise en charge.

Madame David, nous vous avons entendu dénoncer à de nombreuses reprises l’aspect judiciaire et sécuritaire de la loi. Et là, vous proposez d’accentuer cette judiciarisation. Votre démarche est quelque peu contradictoire !

M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote.

Mme Annie David. Je me réjouis de constater que Mme la secrétaire d’État vient d’émettre un avis « complètement défavorable ». Jusqu’à présent, elle se contentait d’émettre des avis « défavorables ». Au demeurant, le sens de cette nuance m’échappe un peu puisque, de toute façon, aucun de nos amendements n’a été adopté depuis le début de cet après-midi.

Lorsque des avis médicaux préconisent la prolongation des soins, celle-ci est tout à fait légitime, comme je l’ai rappelé dans mon intervention. Toutefois, si cette prolongation de soins se traduit par le maintien du régime de privation de liberté imposé au patient concerné, le juge des libertés et de la détention doit être associé à la prise de décision, puisqu’il peut seul apprécier légitimement si les droits du patient sont bien respectés.

Le texte en discussion prévoit que le directeur de l’établissement décide de la prolongation des soins sans qu’à aucun moment le juge des libertés et de la détention soit consulté. Or nous demandons que ce juge, saisi à la demande du directeur de l’établissement, décide de la prolongation des soins, puisqu’elle prend la forme d’une hospitalisation sans consentement, c’est-à-dire d’une privation de liberté.

Cette demande n’est donc absolument pas contradictoire, nous semble-t-il, avec les positions que nous défendons depuis le début de cet après-midi. Il s’agit tout simplement de garantir que les patients des hôpitaux psychiatriques bénéficient des mêmes droits que n’importe quel autre malade en matière de privation de sa liberté.

M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.

M. Jean Desessard. Monsieur le président, je vais demander une troisième lecture de ce projet de loi, puisque Mme la secrétaire d’État n’a visiblement pas compris nos arguments !

Mme Christiane Demontès. Elle fait semblant !

M. Jean Desessard. En effet, si Mme la secrétaire d’État avait compris nos arguments, peut-être aurait-elle émis des avis favorables sur nos amendements…

Madame la secrétaire d’État nous a reproché de réclamer plus de judiciaire. Mais nous demandons tout simplement, madame la secrétaire d’État, que soient respectés les droits des citoyens, et donc des malades mentaux en tant que citoyens ! L’hospitalisation sans consentement doit par conséquent être placée sous le contrôle de la justice.

Nous ne dénonçons pas le judiciaire, nous dénonçons le tout-sécuritaire ! Il y a une grande différence entre l’État de droit et l’État policier, entre l’intervention d’un juge et celle d’un préfet. Ce que nous regrettons, c’est la vision sécuritaire du Gouvernement sur cette question.

Permettez-moi de vous démontrer le bien-fondé de la position des écologistes. (Sourires sur les travées de lUMP.) Votre majorité ne cherche pas à résoudre les problèmes sociaux – je ne parle même pas des problèmes environnementaux –, elle a décidé de casser, dans notre pays, le modèle social, agissant en cela à l’unisson d’autres partis politiques européens. Cette politique va provoquer l’appauvrissement de la population, l’aggravation de la précarité sociale, toutes manifestations de ce que j’appelle « l’implosion sociale ». Il se peut aussi que nous assistions à des explosions sociales, mais là vous faites intervenir les CRS, qui tapent !

Je pense donc que nous assisterons plutôt à une implosion sociale, qui se traduira par des violences dans les cités, au sein des familles, c’est-à-dire l’expression d’un mal-être des individus, qui se retournent contre eux-mêmes ou contre leurs proches. Telle me semble être la tendance qui se développera dans les dix ou quinze prochaines années.

Les écologistes estiment, quant à eux, qu’il convient de garantir un modèle social et économique qui assure une répartition des richesses équilibrée, permettant à chacun de trouver un emploi, plutôt que d’attendre l’implosion – ou l’explosion – sociale. C’est la seule façon, selon nous, de remédier à ces problèmes !

La droite, elle, refuse cette solution : elle estime qu’il faut continuer de favoriser les plus riches – je n’y insiste pas ! – et de laisser la précarité sociale et le chômage se développer. Sa réponse au mal-être social se résume à la politique sécuritaire, à la répression. Ce repli sécuritaire n’a rien à voir avec notre demande justifiée d’intervention du pouvoir judiciaire : en effet, avec les réponses que vous apportez, la force, la répression prennent le pas sur les droits des citoyens.

M. Christian Cambon. C’est un conte pour enfants !

M. Jean Desessard. Nos demandes n’ont donc rien à voir avec ces réponses, madame la secrétaire d’État, et je comprends maintenant pourquoi vous n’avez pas émis plus d’avis favorables sur nos amendements !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 21, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer les mots :

ou de l’avis mentionnés

par le mot :

mentionné

Cet amendement n’a plus d’objet.

L’amendement n° 22, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 33, dernière phrase

Supprimer cette phrase.

Cet amendement n’a plus d’objet.

L’amendement n° 23, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 34, première phrase 

Supprimer les mots :

ou de l’avis médical

Cet amendement n’a plus d’objet.

L’amendement n° 55, présenté par M. Le Menn, Mme Demontès, MM. Michel, Desessard, Kerdraon et Cazeau, Mmes Le Texier et Schillinger, M. Jeannerot, Mmes Alquier et Campion, M. Daudigny, Mme Ghali, MM. Gillot et Godefroy, Mme Jarraud-Vergnolle, M. S. Larcher, Mmes Printz et San Vicente-Baudrin, M. Teulade et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :

Alinéa 34

1° À la fin de la première phrase

Remplacer les mots :

d’un mois

par les mots :

de quinze jours

2° En conséquence, à la seconde phrase

Remplacer les mots :

d’un mois

par les mots :

de quinze jours

La parole est à M. Roland Courteau.

M. Roland Courteau. Nous persistons dans notre opposition à ce projet de loi !

L’amendement n° 55 s’inscrit dans le prolongement de la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin 2011, selon laquelle la mesure d’hospitalisation d’office ne peut se prolonger au-delà de quinze jours en l’absence de contrôle du juge des libertés et de la détention, sous peine de méconnaître les exigences posées par l’article 66 de la Constitution.

En l’espèce, la décision du Conseil constitutionnel qui censure l’article L. 3213-4 du code de la santé publique vaut pour l’hospitalisation d’office, sujet de la question prioritaire de constitutionnalité qui lui a été soumise. Pour autant, il est évident que le raisonnement établi par les Sages est transposable au régime d’hospitalisation sur demande d’un tiers ou en cas de péril imminent.

En l’état, si un justiciable décidait un jour de contester l’article L. 3212-7 du code de la santé publique, dont nous débattons actuellement, en soulevant une question prioritaire de constitutionnalité, il est certain que le Conseil constitutionnel le censurerait pour les mêmes motifs que ceux qu’il a invoqués dans sa décision du 9 juin 2011.

En d’autres termes, l’article L. 3212-7 du code de la santé publique est potentiellement inconstitutionnel ; en effet, il prévoit que les soins peuvent être maintenus par le directeur d’établissement pour des périodes maximales d’un mois. Or, en vertu de la décision précitée du Conseil constitutionnel, le maintien des soins psychiatriques ne peut être prolongé au-delà de quinze jours sans intervention de l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle.

Par conséquent, notre amendement vise à prévoir que les soins peuvent être maintenus par le directeur de l’établissement pour des périodes maximales de quinze jours, conformément à la décision du Conseil constitutionnel.

M. Guy Fischer. C’est très clair !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. L’interprétation de la commission n’est pas tout à fait identique !

Cet amendement tend à subordonner le maintien des soins, dans le cadre de la procédure d’admission sur demande d’un tiers, à un renouvellement du certificat médical tous les quinze jours, alors que le projet de loi prévoit un renouvellement mensuel.

Pour justifier leur position, les auteurs de l’amendement s’appuient sur la décision du Conseil constitutionnel du 9 juin dernier. Or, dans cette décision qui, je le rappelle, concerne l’hospitalisation d’office, le Conseil constitutionnel ne conteste pas la périodicité mensuelle des certificats médicaux, mais l’absence d’intervention de l’autorité judiciaire dans un bref délai. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est également défavorable. Le Conseil constitutionnel a estimé que le juge des libertés et de la détention devait intervenir avant l’expiration d’un délai de quinze jours ; en aucun cas il n’a demandé que le directeur d’établissement renouvelle sa décision administrative tous les quinze jours.

Je rappelle que cette décision administrative peut être prise à tout moment, avant même la date du renouvellement, qui intervient aujourd’hui tous les mois.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 55.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 24, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 36 et alinéa 37, première phrase

Supprimer les mots :

, des avis médicaux

II. - Alinéa 37, seconde phrase

Remplacer les mots :

ou de l’avis médical mentionnés

par le mot :

mentionné

Cet amendement n’a plus d’objet.

L’amendement n° 25, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 47

Supprimer les mots :

ou, en cas d’impossibilité d’examiner le patient, un avis médical

Cet amendement n’a plus d’objet.

L’amendement n° 10, présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche, est ainsi libellé :

Alinéa 48

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Le juge des libertés et de la détention est informé de cette situation et peut décider de prononcer en urgence la mainlevée de la mesure, sans recourir à l’avis du collège mentionné à l’article L. 3211-9 ou des experts mentionnés au II de l’article L. 3211-12.

La parole est à M. Guy Fischer.

M. Guy Fischer. Cet amendement vise à rétablir les patients dans leurs droits fondamentaux au regard de nos principes en matière de liberté individuelle.

Nous l’avons déjà dit, la décision du juge constitutionnel a bien embarrassé le Gouvernement. Bien qu’il prétende aujourd’hui répondre à cette injonction, nous avons suffisamment rappelé combien celle-ci était mal prise en compte, notamment sur la question des délais, et que la ligne directrice de ce projet de loi visait bien plus un objectif sécuritaire que l’objectif affiché de respect des libertés individuelles.

Dans cette optique, le Gouvernement a jugé bon de transformer l’hospitalisation à la demande d’un tiers en hospitalisation d’office. En l’occurrence, la mesure de mainlevée sur la demande d’un proche est soumise à une procédure des plus compliquées et des plus lourdes.

Permettez-moi donc, mes chers collègues, de m’interroger sur cette situation où un tiers pourrait demander l’internement d’un proche, mais n’aurait, dès lors, plus aucune réelle possibilité d’y mettre un terme en dehors de l’intervention des médecins. Cette procédure pourrait cependant avoir une logique si elle permettait l’intervention, dans les meilleurs délais, du juge des libertés et de la détention, gardien de la liberté individuelle.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Louis Lorrain, rapporteur. Cet amendement tend à permettre de contester la possibilité de transformer une mesure de soins sur demande d’un tiers en une mesure de soins sur décision du représentant de l’État.

Pourtant cette possibilité existe déjà et s’avère nécessaire dans certains cas ; c’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nora Berra, secrétaire d’État. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

Si cet amendement était adopté, en cas de transformation d’une hospitalisation à la demande d’un tiers en hospitalisation d’office, il faudrait saisir immédiatement le juge, sans attendre le délai de quinze jours. Or cette transformation s’analyse comme l’engagement d’une nouvelle procédure et le juge des libertés et de la détention sera par conséquent automatiquement amené à se prononcer avant l’expiration du délai de quinze jours. Il n’est donc pas raisonnable de prévoir une saisine immédiate.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 10.

(L’amendement n’est pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 27, présenté par M. Desessard et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet, est ainsi libellé :

Alinéa 58 

Supprimer les mots :

Les avis et

Cet amendement n’a plus d’objet.

Je mets aux voix l’article 2.

(L’article 2 est adopté.)