Sommaire
Présidence de M. Jean-Claude Carle
Secrétaires :
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, M. Jean Desessard.
2. Dépôt de rapports du Gouvernement
MM. Dominique Watrin, le président.
4. Sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. – Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
Discussion générale : MM. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé ; Bernard Cazeau, rapporteur de la commission des affaires sociales.
Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Jean-Louis Lorrain, Philippe Darniche, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mmes Isabelle Pasquet, Aline Archimbaud, M. Gilbert Barbier, Mmes Chantal Jouanno, Nathalie Goulet, M. Ronan Kerdraon.
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
M. Alain Milon, Mme Virginie Klès.
Clôture de la discussion générale.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales.
Article additionnel avant l'article 1er
Amendement n° 1 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet, MM. le rapporteur, le ministre. – Retrait.
Mme Marie-Christine Blandin, MM. Jacky Le Menn, Jean-Louis Lorrain, Ronan Kerdraon.
Amendement n° 2 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet.
Amendement n° 75 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud.
Amendement n° 55 de M. Jean-Louis Lorrain. – M. Jean-Louis Lorrain.
MM. le rapporteur, le ministre, Dominique Watrin, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mmes Chantal Jouanno, Isabelle Pasquet, M. Jean-Louis Lorrain. – Retrait de l’amendement no 2 ; adoption de l’amendement no 75 ; rejet de l’amendement no 55.
Mme la présidente de la commission.
Suspension et reprise de la séance
Amendement n° 107 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur, Ronan Kerdraon, Mmes Chantal Jouanno, la présidente de la commission. – Adoption.
Amendement n° 3 rectifié de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, le ministre, Alain Milon, Mme Isabelle Pasquet, MM. Ronan Kerdraon, Jean-Louis Lorrain, Mme la présidente de la commission. – Adoption.
Amendement n° 73 rectifié de Mme Chantal Jouanno. – Mme Chantal Jouanno, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Aline Archimbaud. – Adoption.
Amendement n° 112 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur, Ronan Kerdraon. – Rejet.
Amendement n° 96 de la commission. – MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 97 de la commission. – MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l’article 1er
Amendement n° 4 de Mme Isabelle Pasquet. – MM. Dominique Watrin, le rapporteur, le ministre, Jean-Louis Lorrain, Mme Isabelle Pasquet, M. Ronan Kerdraon. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendements identiques nos 25 de M. Gilbert Barbier et 56 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Gilbert Barbier, Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Rejet des deux amendements.
Adoption de l'article.
Amendement n° 57 de M. Jean-Louis Lorrain. – M. Jean-Louis Lorrain.
Amendement n° 16 rectifié de M. Bruno Gilles. – Mme Marie-Thérèse Bruguière.
Amendement n° 17 rectifié de M. Bruno Gilles. – Mme Marie-Thérèse Bruguière.
Amendement n° 30 rectifié de M. Gilbert Barbier. – M. Gilbert Barbier.
Amendement n° 98 de la commission. – M. le rapporteur.
MM. le rapporteur, le ministre, Mmes Isabelle Pasquet, Chantal Jouanno, Nathalie Goulet. – Rejet, par scrutin public, de l’amendement no 57.
5. Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi
Suspension et reprise de la séance
6. Communication d’un avis sur un projet de nomination
8. Sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé. – Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
Adoption de l’amendement no 16 rectifié ; rejet des amendements nos 17 rectifié et 30 rectifié ; adoption de l’amendement no 98.
Amendements nos 26 rectifié et 27 rectifié de M. Gilbert Barbier. – MM. Gilbert Barbier, Bernard Cazeau, rapporteur de la commission des affaires sociales ; Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé ; Ronan Kerdraon. – Rejet des deux amendements.
Amendement n° 28 rectifié de M. Gilbert Barbier. – MM. Gilbert Barbier, le rapporteur, le ministre. – Retrait.
Amendement n° 29 rectifié de M. Gilbert Barbier. – MM. Gilbert Barbier, le rapporteur, le ministre, Ronan Kerdraon. – Rejet.
Amendement n° 31 rectifié de M. Gilbert Barbier. – MM. Gilbert Barbier, le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 74 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud, MM. le rapporteur, le ministre, Ronan Kerdraon, Mme Isabelle Pasquet. – Adoption.
Amendement n° 76 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud, MM. le rapporteur, le ministre, Mme Nathalie Goulet, MM. Ronan Kerdraon, Alain Milon. – Adoption.
Amendement n° 48 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 108 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur, Mme Catherine Génisson. – Rejet.
Amendement n° 99 de la commission. – MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 100 de la commission. – MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 5 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 94 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson. – Adoption.
Amendement n° 103 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur. – Adoption.
Amendement n° 77 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
M. Jean-Louis Lorrain.
Adoption de l'article modifié.
Article 4 bis A (nouveau). – Adoption
Amendement n° 101 de la commission. – MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 32 de M. Gilbert Barbier. – MM. Gilbert Barbier, le rapporteur, le ministre, Mme Nathalie Goulet. – Rejet.
Amendement n° 104 du Gouvernement. – MM. le ministre, le rapporteur. – Rejet.
Amendement n° 6 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 43 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Retrait.
Adoption de l'article.
Amendement n° 58 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 7 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 8 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 9 de Mme Isabelle Pasquet. – MM. Dominique Watrin, le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 14 rectifié bis de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet, MM. le rapporteur, le ministre, Ronan Kerdraon. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 59 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre, Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 33 rectifié de M. Gilbert Barbier. – M. Gilbert Barbier.
Amendement n° 44 de M. Jean-Louis Lorrain. – M. Jean-Louis Lorrain.
Amendement n° 70 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet.
MM. le rapporteur, le ministre, Mmes Isabelle Pasquet, Catherine Génisson. – Rejet des amendements nos 33 rectifié et 44 ; rectification de l’amendement no 70 ; adoption de l’amendement no 70 rectifié.
M. Ronan Kerdraon.
Adoption de l'article modifié.
Article additionnel après l'article 9 bis
Amendement n° 65 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Articles 10 et 10 bis. – Adoption
Amendement n° 66 rectifié de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 42 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Adoption de l'article.
Article additionnel après l’article 12
Amendement n° 10 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Laurence Cohen, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 49 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre, Dominique Watrin. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 67 de M. Jean-Louis Lorrain. – M. Jean-Louis Lorrain.
Amendements nos 89 et 90 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud.
MM. le rapporteur, le ministre, Mme Catherine Génisson. – Adoption de l’amendement no 67, les amendements nos 89 et 90 devenant sans objet.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 14 bis
Amendement n° 64 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 15 rectifié bis de Mme Isabelle Debré. – MM. Alain Milon, le rapporteur, le ministre. – Adoption de l'amendement insérant un article additionnel.
Mme Aline Archimbaud, M. le rapporteur.
Amendement n° 50 de M. Jean-Louis Lorrain. – M. Jean-Louis Lorrain.
Amendement n° 79 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud.
Amendement n° 71 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Laurence Cohen.
Amendement n° 93 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet.
Amendement n° 92 de Mme Aline Archimbaud. – M. Ronan Kerdraon.
MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet de l’amendement no 50 ; rectification de l’amendement no 71 ; adoption des amendements nos 79 et 71 rectifié ; retrait de l’amendement no 93 ; adoption de l’amendement no 92.
Amendement n° 80 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 81 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud, MM. le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 82 de Mme Aline Archimbaud. – Mme Aline Archimbaud, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Amendement n° 72 de Mme Isabelle Pasquet. – Mme Isabelle Pasquet, MM. le rapporteur, le ministre. – Retrait.
Adoption de l'article modifié.
Amendement n° 34 rectifié de M. Gilbert Barbier. – MM. Gilbert Barbier, le rapporteur, le ministre. – Rejet.
Amendement n° 60 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre. – Adoption.
Adoption de l'article modifié.
Articles additionnels après l'article 17
Amendements nos 12 de Mme Isabelle Pasquet et 83 rectifié bis de Mme Aline Archimbaud. – Mmes Isabelle Pasquet, Patricia Schillinger, MM. le rapporteur, le ministre. – Adoption de l'amendement no 12 insérant un article additionnel, l’amendement no 83 rectifié bis devenant sans objet.
Amendements identiques nos 13 rectifié de Mme Isabelle Pasquet et 84 rectifié de Mme Aline Archimbaud. – Mme Isabelle Pasquet, MM. Ronan Kerdraon, le rapporteur, le ministre. – Adoption des deux amendements insérant un article additionnel.
Amendement n° 45 de M. Jean-Louis Lorrain. – MM. Jean-Louis Lorrain, le rapporteur, le ministre, Mmes Isabelle Pasquet, Chantal Jouanno, M. Jean-Marie Vanlerenberghe, Mme la présidente de la commission. – Rejet.
Renvoi de la suite de la discussion.
compte rendu intégral
Présidence de M. Jean-Claude Carle
vice-président
Secrétaires :
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx,
M. Jean Desessard.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Dépôt de rapports du Gouvernement
M. le président. M. le Premier ministre a transmis au Sénat :
- en application de l’article 125 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, le rapport précisant les modalités de répartition du Fonds de péréquation des recettes fiscales intercommunales et communales ;
- en application de l’article L. 115-4-1 du code de l’action sociale et des familles, le rapport sur le suivi de l’objectif de baisse d’un tiers de la pauvreté en cinq ans.
Acte est donné du dépôt de ces documents.
Le premier a été transmis à la commission des finances ainsi qu’à la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d’administration générale, le second à la commission des affaires sociales.
Ils sont disponibles au bureau de la distribution.
3
Rappel au règlement
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour un rappel au règlement.
M. Dominique Watrin. Monsieur le président, mon rappel au règlement se fonde sur l’article 36, alinéa 3, du règlement du Sénat.
Monsieur le ministre, le débat qui va s’ouvrir sur le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé est important. L’émoi suscité par les doutes entourant la politique de vaccination contre la grippe A, par la présence de bisphénol A dans les biberons ou encore par l’affaire du Mediator témoigne de la volonté de nos concitoyens d’être mieux renseignés et de bénéficier, à chaque fois que cela est possible, d’une information fiable parce qu’indépendante.
Ce qui s’applique au secteur sanitaire vaut également pour l’économie – les usagers s’organisent contre les pratiques des banques qui consistent à minimiser ou à taire certains risques – ou pour le secteur marchand, domaine dans lequel les consommateurs veulent plus de transparence, par exemple en matière de fixation des prix alimentaires dans les grandes surfaces.
Cette exigence, corollaire légitime du libre marché, peine néanmoins à s’imposer. Aujourd’hui, la privatisation de la partie presse de l’Institut national de la consommation, l’INC, pourrait conduire la rédaction de 60 Millions de consommateurs, magazine édité par cet organisme, à chercher d’autres sources de financement, notamment sous la forme de publicité. Celle-ci est aujourd’hui exclue, ce qui garantit à ce journal commercial sans publicité commerciale son indépendance au regard des fabricants et des distributeurs.
Cette situation est d’autant plus inquiétante qu’elle s’inscrit dans un contexte d’hostilité à l’égard de la publication : en 2008, le cabinet de M. Luc Chatel a appelé l’INC pour protester contre la diffusion de la liste des prix ayant flambé ; en 2010, la gouvernance de l’INC est réorganisée et les associations de consommateurs deviennent minoritaires au sein du conseil d’administration. C’est d’ailleurs sans doute grâce à cette nouvelle organisation amenuisant le rôle historique des associations de consommateurs que le conseil d’administration « nouvelle monture » préconise la privatisation du magazine au motif d’une réduction des ventes.
Le 9 novembre prochain, le conseil d’administration de l’Institut national de la consommation devra trancher.
Monsieur le ministre, le Gouvernement ne peut laisser faire. Il doit permettre l’émergence d’une solution pérenne pour garantir l’indépendance et la qualité de ce mensuel, véritable aiguilleur au service des consommateurs.
M. le président. Monsieur Watrin, je vous donne acte de ce rappel au règlement.
4
Sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé
Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé (projet n° 5, texte de la commission n° 45, rapport n° 44).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de loi que j’ai l’honneur de présenter avec Nora Berra a été élaboré, vous le savez, à la suite du drame du Mediator. Nous voulons que, dans notre pays, il y ait un avant et un après Mediator.
Ce texte refonde le système de sécurité sanitaire des produits de santé pour concilier à la fois sécurité des patients et accès aux progrès thérapeutiques. Il est l’aboutissement d’importants travaux d’évaluation et de débats avec tous les acteurs des produits de santé, notamment dans le cadre des Assises du médicament. Je tiens aussi à saluer les contributions des missions parlementaires d’information.
Cette réforme doit redonner aux Français confiance dans notre système du médicament. Elle forme un tout. Elle se caractérise à la fois par des mesures législatives ou réglementaires sur lesquelles je reviendrai plus précisément au cours de la discussion et par des dispositions en matière tant d’organisation interne – notamment celle de la future Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé – que de gouvernance. Et je n’oublie pas la dimension européenne, que j’évoquerai lors de l’examen des articles, afin de bien montrer qu’il nous faut œuvrer dans un souci de cohérence.
Si j’insiste sur ce point, c’est que, lors de la présentation de ce texte, d’aucuns ont souligné le silence du projet de loi sur les questions de nature budgétaire. C’est pourtant bien normal, puisque ces dernières relèvent soit du projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit du projet de loi de finances. C’est pourquoi, mesdames, messieurs les sénateurs, sur l’ensemble des changements engagés par ce texte, je m’attacherai à porter à votre connaissance toutes les informations disponibles, de manière que vous puissiez avoir la vision la plus juste possible.
Sur les mesures qui relèvent du domaine réglementaire, j’ai déjà sollicité les services du ministère. Je veux qu’elles soient concomitantes de la mise en œuvre de ce projet de loi, afin que celles et ceux qui le désirent puissent les consulter avant leur publication.
Les débats à l’Assemblée nationale ont été riches et ont permis de parvenir à un texte équilibré, juste et efficace. Je sais que cela n’est pas forcément l’usage, mais, comme je l’ai fait à l’Assemblée nationale, je vous exprime, du haut de cette tribune, mon souhait que, dans deux ou trois ans au plus tard, il soit procédé à une évaluation de cette nouvelle législation. Vouloir des changements, c’est bien ; s’assurer qu’ils ont tous été opérés, dans l’esprit comme dans la lettre, c’est mieux, surtout dans un domaine aussi sensible.
Mesdames, messieurs les sénateurs, votre commission des affaires sociales a souhaité apporter un certain nombre de modifications. J’aurai l’occasion d’y revenir.
Le premier axe de cette réforme est la lutte contre les conflits d’intérêts et la transparence des décisions. Cela passe par deux voies : l’indépendance des experts et l’organisation d’une procédure d’expertise à la fois transparente et collégiale.
Il faut garantir l’indépendance des experts. À ce titre, la lutte contre les conflits d’intérêts est notre priorité. Elle implique à la fois la systématisation de la déclaration d’intérêts et la mise en place de sanctions adéquates.
Dans un souci de simplicité, de lisibilité, mais aussi afin de permettre des contrôles efficaces, tous les acteurs du domaine de la santé sans exception – experts externes ou internes, associations de patients, etc. – devront remplir un formulaire unique de déclaration publique d’intérêts, un DPI. Je souhaite que ce type de déclaration soit étendu à celles et ceux qui exercent des responsabilités dans le champ de la santé, au ministère, dans les administrations centrales comme dans les services déconcentrés. Pour ma part, avant même l’adoption de ce texte, j’ai rempli une telle déclaration et demandé à l’ensemble des collaborateurs de mon cabinet d’en faire autant.
Ces déclarations seront toutes publiques, ce qui permettra aux divers observateurs, journalistes et experts, de les consulter et de vérifier les situations. J’espère vivement qu’ils le feront dès l’entrée en application de la loi, sans attendre qu’une affaire occupe l’actualité. Je n’ai aucun conseil à donner, mais, puisque ces éléments seront publics, je ne peux qu’inviter les observateurs, jamais avares de commentaires, à les consulter et à exprimer leur avis.
Il me semble primordial que chaque institution puisse assumer ses responsabilités dans la gestion et dans le contrôle des DPI. La commission des affaires sociales du Sénat a supprimé la disposition permettant la création à cet effet, au sein de chaque organisme, d’une cellule de déontologie. Je le regrette, parce que je considère que c’est au sein de chaque structure que l’on peut être le mieux à même de définir et d’identifier les liens d’intérêts en fonction des compétences sollicitées. Je ne voudrais pas que, sous prétexte que cette disposition ne figure plus dans le texte, ces structures se croient exemptées de l’obligation de mettre en place des principes de déontologie, laissant ce travail à d’autres. Il faut que cette responsabilité soit pleinement assumée.
Par ailleurs, la commission des affaires sociales a supprimé le recours à une charte de l’expertise sanitaire. Sa mise en place nous paraît pourtant essentielle pour encadrer la procédure expertale.
Les règles de transparence ne sont pas optionnelles, mais doivent au contraire être strictement appliquées. Lorsqu’un expert présent dans une séance est concerné par un conflit d’intérêt, les décisions et les avis pris lors de cette réunion doivent être nuls et non avenus. Cette obligation sera partie intégrante des règlements intérieurs des commissions. Ainsi la situation sera-t-elle claire et dépourvue de toute ambiguïté.
La transparence totale, c’est la condition de la confiance. C’est aussi l’obligation, pour l’industrie pharmaceutique, de rendre publics non seulement l’existence des conventions conclues avec les parties prenantes, mais également les avantages en nature ou en espèce qu’elle procure. Il s’agit là de la transposition du système américain du Sunshine Act. Je souhaite que cette disposition de nature réglementaire s’applique dès le premier euro, de manière à garantir une transparence totale. La commission des affaires sociales a proposé d’inclure dans les parties prenantes les personnes intervenant dans la formation initiale des professionnels de santé ; cela va dans le bon sens. En revanche, en exclure les étudiants, qui sont les professionnels de demain, est selon moi contraire à notre objectif.
Je sais que plusieurs amendements visent à impliquer les ordres professionnels dans la publication de ces conventions. Il s’agirait alors d’étendre les missions que ceux-ci exercent actuellement au regard de la loi anti-cadeaux ; cela me semble une bonne décision. Je rappelle d’ailleurs que le non-respect de cette obligation de déclaration sera sanctionné pénalement.
Après avoir évoqué la lutte contre les conflits d’intérêts, qu’il ne faut pas confondre avec la question des liens d’intérêts, j’en viens maintenant à la transparence des décisions et à la collégialité des travaux des commissions de l’Agence du médicament.
Le projet de loi oblige à rendre publics les ordres du jour ainsi que les comptes rendus assortis des détails et explications de vote, y compris les opinions minoritaires. Ces informations seront mises à disposition du public.
La composition et le fonctionnement des commissions de l’Agence seront définis par voie réglementaire sur les principes suivants : ouverture à la pluridisciplinarité, limitation du nombre de membres et de la durée des mandats. À l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS, certains semblent membres ad vitam aeternam, ce n’est pas une bonne chose.
Dominique Maraninchi, dont je veux saluer tout particulièrement l’action efficace et la parfaite réactivité sur nombre de dossiers, est en train de refonder l’organisation de l’Agence. Celle-ci voit ses moyens renforcés en projet de loi de financement de la sécurité sociale, afin de pouvoir mieux répondre à ses missions.
La transparence des décisions, c’est aussi un système où chaque institution a sa place, avec des rôles et des missions clairement définis, pour que le public s’y retrouve. C’est pourquoi il est indispensable que l’institution en charge de notre police du médicament soit clairement identifiée et que son nom, je l’assume, n’évoque plus le drame du Mediator. L’AFSSAPS deviendra donc l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM. Il ne s’agit pas seulement d’un changement de nom : cette modification s’impose si l’on veut repartir sur des bases nouvelles.
Le projet de loi dote l’Agence d’un arsenal de sanctions proportionnées, qui, à mon sens, sont réellement dissuasives, par exemple un pouvoir de sanction administrative financière. Je serai particulièrement attentif à la mise en œuvre rapide de ce dispositif.
La transparence totale, c’est aussi faire en sorte que le financement de l’Agence soit désormais directement assuré par les subventions de l’État, plus précisément de l’assurance maladie, qui percevra les taxes et les redevances de l’industrie pharmaceutique. C’est un changement, car ce cloisonnement est la garantie d’une totale étanchéité. Le financement de l’ANSM sera augmenté de 40 millions d’euros ; cette mesure est incluse à la fois dans le projet de loi de finances pour 2012 et dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, actuellement en discussion à l’Assemblée nationale.
Le deuxième axe de cette réforme fait suite à une remarque que j’ai lue dans le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, qui m’a été remis à la mi-janvier et qui m’a alors profondément marquée : dans le dossier du Mediator, le doute a bénéficié systématiquement aux laboratoires Servier. Ce n’est pas tout à fait ma conception du principe de précaution, ni la vôtre, mesdames, messieurs les sénateurs : le doute doit bénéficier systématiquement au patient !
Ce principe vaut dès l’autorisation de mise sur le marché, l’AMM, du médicament et tout au long de sa vie. Le médicament ne doit pas juste être un peu mieux que rien, il faut aussi que le patient en tire un réel bénéfice.
C’est pourquoi j’ai présenté à l’Assemblée nationale un amendement tendant à permettre à l’Agence de demander que les essais cliniques soient effectués contre comparateurs. Si l’entreprise s’y oppose, elle devra alors le justifier.
Disposer, dès l’AMM, de données comparatives avec le médicament de référence – quand celui-ci existe –, c’est aussi un combat européen. J’ai déjà évoqué à plusieurs reprises ce sujet avec le commissaire européen John Dalli, afin que la réflexion sur la prise en compte du critère de la valeur ajoutée thérapeutique pour l’octroi d’une AMM soit engagée à l’échelon européen. À ce stade, soyons clairs, nous en sommes loin : le commissaire européen et moi-même ne sommes pas sur la même longueur d’onde ! Je n’abandonnerai pas ce combat, même si je sais pertinemment que convaincre prend du temps …
En attendant l’évolution de la législation européenne, nous allons modifier les règles de remboursement en France. L’Assemblée nationale a donc introduit un article pour que l’inscription au remboursement soit désormais soumise à la réalisation d’essais cliniques versus stratégies thérapeutiques de référence, lorsque ces dernières existent. En d’autres termes, à défaut de pouvoir empêcher l’AMM, on empêchera le remboursement.
L’idéal serait bien évidemment un changement à l’échelon européen, mais, ayant un peu d’expérience en la matière, je sais que cela demande de la patience. C’est pourquoi nous commencerons par modifier les règles nationales, puisque cela dépend de nous seuls.
Enfin, pour les médicaments présentant un service médical rendu insuffisant, ou SMRI, de nouvelles règles doivent être applicables : aucune prise en charge par la collectivité, donc pas de remboursement, sauf avis contraire – et motivé – du ministre. La question est avant tout celle de l’efficacité et non celle du rendement.
Je ne vous le cache pas, mesdames, messieurs les sénateurs, quand j’étais jeune ministre, on m’avait suggéré de « dérembourser » des médicaments pour réaliser des économies. Avec le recul, je me rends compte que ces économies sont nulles, en raison des reports de prescriptions. Le nouveau dispositif s’appuie donc sur un principe de bon sens : il est préférable de placer son argent sur un médicament efficace. Pour autant, il est difficile de changer les habitudes – les patients sont habitués à un médicament, les médecins à le prescrire –, si bien que, lorsque ce médicament est retiré du marché parce qu’il est inefficace, il n’est pas simple de le faire comprendre et accepter.
L’enjeu n’est pas financier, d’autant que des reports de prescriptions sur des médicaments peuvent même se révéler plus coûteux ! Si ceux-ci sont efficaces, je n’y vois personnellement aucun inconvénient. En revanche, jamais je ne dirai qu’un déremboursement vise à réaliser une économie : je n’y crois pas. Je le répète, c’est une question d’efficacité et de bon sens. Nous aurons la responsabilité d’accompagner les professionnels de santé et les patients dans cette évolution de la prise en charge thérapeutique.
Par ailleurs, l’AMM ne sera plus scellée dans le marbre. Avec ce projet de loi, des études complémentaires d’efficacité et de sécurité pourront à tout moment être exigées par les autorités sanitaires, en cas de suspicion de modification du rapport bénéfice-risque. En cas de non-réalisation de ces études, l’AMM pourra être suspendue ou retirée et le titulaire de l’AMM sera susceptible de se voir infliger une sanction financière par l’Agence. Cette question a donné lieu à un grand débat à l’Assemblée nationale : le renouvellement illimité des AMM a été supprimé au profit d’un renouvellement quinquennal.
Pour garantir efficacement la sécurité sanitaire, il faut pouvoir disposer de l’ensemble des informations relatives à la sécurité des produits. C’est pourquoi le projet de loi oblige les exploitants à informer l’Agence de toute mesure d’interdiction, de restriction ou de modification du rapport bénéfice-risque d’un médicament commercialisé dans un pays tiers.
Sur ce point, l’Union européenne nous suit. La Commission européenne propose de réviser la directive relative à la pharmacovigilance en ce sens, avec obligation d’information à l’échelon européen.
M. Gilbert Barbier. Suivons l’Europe !
M. Xavier Bertrand, ministre. On peut aussi la précéder ! (Sourires.)
Les prescriptions hors AMM, bien qu’indispensables dans certains cas, par exemple les maladies orphelines, doivent rester des situations exceptionnelles : elles doivent être encadrées et voir leurs risques associés maîtrisés. C’est ce que prévoit ce texte : un encadrement par l’Agence de l’utilisation des médicaments hors AMM sous la forme de recommandations temporaires d’utilisation. Désormais, la prescription hors AMM, pour perdre quelques kilos, ne sera plus possible !
Les logiciels d’aide à la prescription auront pour objet de permettre aux professionnels de santé de mieux distinguer les indications qui relèvent de l’AMM de celles qui sont hors AMM. Ceux-ci pourront donc informer leurs patients à chaque prescription et le mentionner sur l’ordonnance. Toutefois, j’ai bien conscience que les médecins de ville ont parfois à prendre en compte des prescriptions qui ont été établies initialement à l’hôpital.
En amont de l’AMM, l’évaluation des médicaments doit être mieux encadrée pour garantir un accès équilibré au traitement : c’est bien le sens du nouveau dispositif des autorisations temporaires d’utilisation, les ATU. Il faut avant tout veiller à ce que les patients ne soient pas privés d’un accès aux thérapeutiques qui leur sont indispensables, même si celles-ci n’avaient pas à l’origine été prévues pour cela. Dans ces cas-là, ce serait une perte de chance ; je ne le veux pas.
Tout au long de sa vie, le médicament doit être suivi. Il faudra donc que tous les effets indésirables soient notifiés. Chaque patient pourra le faire lui-même directement et nous devons veiller à ce que les alertes ne puissent plus rester lettre morte, comme cela a été le cas pour le Mediator.
Mme Sylvie Goy-Chavent. C’est une très bonne chose !
M. Xavier Bertrand, ministre. Le projet de loi instaure donc un statut législatif du lanceur d’alerte. En matière d’évaluation, le texte institue un groupement d’intérêt public qui permettra de réaliser des études de pharmacovigilance et de pharmaco-épidémiologie conjointement entre l’ANSM, la Haute Autorité de santé, la HAS, l’Institut de veille sanitaire, l’INVS, et l’Assurance maladie.
Le texte comporte aussi des mesures sur les dispositifs médicaux visant notamment à encadrer leur publicité, ce qui n’existe pas actuellement.
Le troisième axe de cette réforme consiste à mieux informer les patients et les professionnels de santé, ainsi qu’à mieux former ces derniers.
Il faut une information publique, indépendante et de qualité. C’est la raison pour laquelle nous proposons de créer un portail public du médicament, qui regroupera les informations, à la fois de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, de la Haute Autorité de santé et de l’Assurance maladie.
Pour être bien informé, un professionnel de santé doit avant tout avoir été bien formé, dans son cursus médical mais aussi tout au long de sa vie de praticien.
L’absence de liens directs entre les professionnels de santé et les industriels dans le cadre de la formation permettra d’éviter toute suspicion.
Le taux de la contribution sur le chiffre d’affaires de l’industrie pharmaceutique passera donc de 1 % à 1,6 % pour un rendement supplémentaire de 150 millions d’euros, qui sera affecté au financement de la formation médicale continue de tous les médecins, hospitaliers et libéraux.
Je tiens également à revenir sur le contrôle de la publicité auprès des professionnels et la visite médicale.
Le rapport de l’IGAS concluait à la suppression de toute visite médicale, préconisation à laquelle beaucoup ont applaudi. Pour ma part, j’ai proposé de procéder par étape et d’instaurer un contrôle du contenu de la formation et des informations. J’ai notamment indiqué qu’il fallait mettre en place une visite médicale collective à l’hôpital. D’aucuns prétendent que j’ai voulu aller trop loin. Il faut savoir si l’on veut vraiment changer la situation ! Pour ma part, je considère que c’est nécessaire.
Je sais pertinemment que les visiteurs médicaux ont toujours appliqué les consignes qui leur ont été données par les firmes. C’est pourquoi la visite médicale, telle qu’elle existe, doit évoluer. Aujourd’hui, nous avons besoin d’y voir clair. L’Assemblée nationale a adopté des amendements qui restreignent le champ de la réforme. L’information apportée aux prescripteurs par le biais de la publicité des entreprises pharmaceutiques doit être irréprochable. C’est pourquoi un contrôle a priori et non plus a posteriori des publications sera mis en place. Nous devrons également veiller à ne pas empêcher la promotion en ajoutant des délais administratifs sans pareil.
Enfin, j’évoquerai le pilotage de la politique du médicament.
Je sais ce que beaucoup ont pensé : comment se fait-il qu’en trente-trois ans autant de ministres se soient succédé et qu’aucun d’entre eux n’ait été informé de la dangerosité du Mediator ? À mon sens, après le scandale du sang contaminé, une attitude politique a consisté à s’en remettre davantage à l’expertise. Ce phénomène n’a pas été propre à notre pays, il a aussi été anglo-saxon et s’est par exemple particulièrement développé dans les pays scandinaves. En définitive, on a accordé une place très importante à l’expertise. Mais, lorsque les politiques affirment qu’ils n’étaient pas au courant, personne ne les croit, personne ne trouve cela normal.
Aujourd’hui, il faut faire en sorte que les informations remontent jusqu’au ministère. La responsabilité publique, la responsabilité politique d’un ministre ne se partage pas, pas plus qu’elle ne se délègue.
C’est pourquoi je souhaite la création d’un comité stratégique de la politique des produits de santé et de la sécurité sanitaire : il se réunira chaque semaine en comité opérationnel avec un représentant du ministre – non du ministère – et en comité stratégique tous les trimestres sous la présidence du ministre lui-même. Seront notamment passés en revue tous les médicaments qui sont sous surveillance, à charge pour le ministre de déterminer comment il compte assumer ses responsabilités et les exercer sur ces sujets, de façon que jamais il ne puisse dire à propos d’un médicament placé sous surveillance : « Je n’étais pas au courant ! »
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, il s’agit d’une réforme d’ampleur. Elle a fait couler beaucoup d’encre, mais nombreux sont celles et ceux qui, aujourd’hui, reconnaissent qu’il y aura un avant et un après Mediator. Je sais d’expérience que voter un texte aussi ambitieux que celui-ci ne suffit pas : nous devons veiller à sa mise en œuvre effective et rapide. Je vous ai soumis mon souhait que cette réforme fasse l’objet d’une évaluation complète. Dans ce débat, je serai ouvert à toutes vos propositions, ainsi que je l’ai été à l’Assemblée nationale.
Sur un tel sujet, lorsque l’on est capable de s’éloigner des réflexes partisans, les Français sont sans doute plus enclins à nous faire confiance. Les sujets de mésentente sont si nombreux que, lorsque nous trouvons un accord, nos concitoyens peuvent en tirer la conclusion suivante : la politique du médicament n’est ni droite ni de gauche, elle veille avant tout à nous protéger. Je suis sûr que nos débats seront constructifs : nous pourrons ainsi faire la preuve que la santé et la sécurité sanitaire sont l’affaire de tous. (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis la loi de 1998, issue d’une initiative sénatoriale, qui a créé l’AFSSAPS, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui est le premier qui traite de la sécurité sanitaire et des moyens à donner aux autorités chargées de l’assurer. Nous saluons donc un texte qui prévoit de renforcer la sécurité sanitaire des produits de santé, même si notre satisfaction est tempérée par l’absence d’un certain nombre de propositions.
Tout d’abord, fallait-il attendre l’affaire du Mediator pour remédier à des défaillances connues de longue date ? Je rappelle que celles-ci avaient été mises en évidence notamment en 2006 par le rapport d’information de la commission des affaires sociales du Sénat intitulé Les Conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments – Médicament : restaurer la confiance, puis, en 2008, par le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale de l’Assemblée nationale, Médicaments : prescrire moins, consommer mieux.
Monsieur le ministre, nous regrettons surtout que le projet de loi paraisse en retrait par rapport à la réforme ambitieuse que vous annonciez au mois de janvier dernier. Peut-être auriez-vous dû prendre un peu plus de temps et vous inspirer des conclusions de la mission commune d’information du Sénat sur le Mediator, en particulier pour renforcer le volet relatif au contrôle des liens d’intérêts et à la transparence.
Comme je l’ai souligné lors de notre débat en commission, ce volet souffre déjà du fait qu’il recoupe en partie l’objet et les dispositions d’un autre texte, le projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, dit « projet de loi Sauvé », déposé à la fin du mois de juillet dernier sur le bureau de l’Assemblée nationale.
Cette dichotomie a été voulue, nous dit-on, en raison de la spécificité du secteur sanitaire. Elle n’en est pas moins gênante et, après l’adoption des deux textes, elle risque de se traduire par des redites ou des contradictions.
Par ailleurs, il est dommage que, selon toute vraisemblance, la future Autorité de la déontologie de la vie publique que ce projet de loi propose de créer ne soit pas encore en place lorsque le texte que nous examinons aujourd’hui entrera en vigueur.
Nous aurions surtout souhaité une démarche plus ambitieuse. En particulier, le projet de loi qui nous est aujourd’hui soumis ignore la nécessité – soulignée par presque tous les rapports élaborés à la suite de l’affaire du Mediator – de créer un corps d’experts publics indépendants. Il s’agit là d’une lacune que le Parlement, tenu par les rigueurs de l’article 40 de la Constitution, ne peut, hélas ! combler et qui fait un peu tache, si vous m’autorisez une telle expression.
Quant aux nouvelles dispositions relatives aux déclarations publiques d’intérêts, hormis les rares cas où de telles déclarations n’étaient pas encore imposées par la loi – je pense aux agences régionales de santé ou à l’Institut national du cancer –, elles n’ajoutent pas grand-chose aux mesures en vigueur et ne sont guère plus précises.
Le Sunshine Act à la française est très en retrait par rapport à son modèle américain, même si son champ d’application se veut plus vaste, au point que l’on pourrait presque parler d’un Sunset Act !
Le texte propose de changer le nom de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS. Ce changement nous paraît non seulement cosmétique mais aussi redondant : de fait, il nous semble que les médicaments font partie des produits de santé !
Plus intéressantes sont les nouvelles compétences attribuées à cette Agence, comme la possibilité de prononcer des sanctions administratives financières ou celle d’exiger un droit d’accès aux informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission. En outre, nous approuvons la possibilité qui lui est accordée de demander des essais contre comparateurs actifs, même si, comme vous l’avez expliqué, monsieur le ministre, elle est contrainte par le droit communautaire.
J’en viens aux nouveaux moyens de la politique de pharmacovigilance : leur portée et leurs limites ont été fixées par la directive européenne du mois de décembre 2010 qui a modifié en dernier lieu la directive européenne du 28 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.
Parmi les autres améliorations apportées par ce texte issu des travaux de l’Assemblée nationale, j’insisterai en particulier sur celles qui tendent à un meilleur contrôle des prescriptions hors autorisation de mise sur le marché – vous les avez évoquées, monsieur le ministre –, mais aussi sur celles qui visent à encadrer les autorisations temporaires d’utilisation, lesquelles doivent cependant rester, pour les patients, une voie d’accès à l’innovation thérapeutique.
Monsieur le ministre, nous partageons votre souci de mieux contrôler la promotion des produits de santé et d’améliorer l’information des professionnels comme celle du public. Je citerai à cet égard les dispositions renforçant le régime juridique de la publicité des dispositifs médicaux et des médicaments.
Je me réjouis évidemment de la nouvelle impulsion donnée à la prescription des médicaments en dénomination commune internationale – nous l’avons proposée de manière récurrente lors de l’examen des précédentes lois de financement de la sécurité sociale –, comme de la fixation d’un délai pour la généralisation de l’usage de logiciels certifiés d’aide à la prescription et la dispensation, attendue depuis longtemps. Nous avions demandé à plusieurs reprises à Mme Roselyne Bachelot-Narquin l’adoption de cette mesure.
La commission des affaires sociales s’est efforcée de renforcer, de compléter et d’enrichir le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Comme je l’ai souligné, l’obligation de déclaration publique d’intérêts imposée par l’article 1er du projet de loi a une portée trop générale pour être précise. En effet, elle s’impose aux membres des organes consultatifs placés auprès des ministres, aux dirigeants et aux membres des instances collégiales de tous les organismes compétents en matière de sécurité sanitaire ou de produits de santé. Elle concerne ainsi des instances fort différentes et recouvre des situations très diverses. Je ne citerai que quelques exemples : les comités de protection des personnes, l’Agence de biomédecine, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, l’actuelle AFSSAPS, la Haute Autorité de santé, etc.
La commission s’est donc efforcée de clarifier la définition des liens d’intérêts qui devront être déclarés, d’étendre l’obligation de déclaration aux liens noués au cours des cinq années écoulées, de rédiger le texte de manière à ne pas paraître en limiter l’application aux seuls membres d’instances collégiales.
S’inspirant des préconisations de la mission commune d’information du Sénat, la commission a par ailleurs prévu que le président de la Haute Autorité de santé, le directeur général de l’AFSSAPS, le président de l’Institut national du cancer et le président-directeur général de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale ne puissent avoir aucun lien d’intérêts pendant les trois années précédant leur prise de fonctions, ni pendant toute la durée de leur mandat. Cette disposition nous paraît conforme à l’exigence d’impartialité de ces institutions.
La commission a également précisé et complété les compétences actuelles de la commission de déontologie créée par la loi du 29 janvier 1993, dite « loi Sapin », en les étendant à toute personne soumise à l’obligation de déclaration publique d’intérêts. Dans les limites étroites de l’initiative financière qui sont les nôtres, nous avons également souhaité adosser à cette structure le régime de déclaration des liens d’intérêts prévu par l’article 1er du projet de loi. En particulier, il nous semble utile que les déclarations d’intérêts lui soient transmises par les autorités qui en seront destinataires et qu’elle puisse les assister dans leurs contrôles. À cet égard, nous avons pris note de l’intérêt exprimé par la Cour des comptes pour une procédure de déclaration unique auprès d’un organisme centralisateur.
L’intervention de la commission de déontologie nous paraît d’autant plus nécessaire que ses missions seront transférées à l’Autorité de la déontologie de la vie publique. C’est pourquoi nous souhaitons qu’elle puisse dès à présent, comme la future Autorité, exercer un rôle de conseil en matière de rédaction des déclarations publiques d’intérêts et de prévention des conflits d’intérêts.
Par ailleurs, l’article 1er prévoit un nouveau dispositif, substantiellement modifié par l’Assemblée nationale, relatif à la publicité des débats des instances d’expertise. Notre commission en a adopté une nouvelle rédaction, afin de centrer cette obligation de publicité sur la rédaction de procès-verbaux diffusés en ligne et précisant notamment le détail des votes et des opinions dissidentes. Bien évidemment, cela n’interdira nullement la diffusion d’enregistrements audiovisuels. Mais une information écrite sera sans doute plus accessible, plus complète et plus facile à consulter.
Pour éviter qu’une invocation abusive des secrets protégés par la loi n’entrave la publicité des débats, la commission des affaires sociales a donné compétence à la Commission d’accès aux documents administratifs, la CADA, pour connaître des questions relevant de l’application de ces dispositions. Cette compétence sera identique à celle qu’exerce d’ores et déjà cette instance en matière d’application des dispositions relatives à la publicité des débats des assemblées locales.
Enfin, l’article 1er comporte des dispositions relatives à l’expertise sanitaire. Il prévoit notamment l’approbation par décret d’une charte de l’expertise sanitaire. Les chartes, objets juridiques mal identifiés, nous inspirent une confiance limitée. En l’espèce, cela ne nous semble pas l’instrument idéal pour établir des définitions sur des notions comme le lien d’intérêt ou le conflit d’intérêt, cette mission devant incomber au législateur. En tout état de cause, comme cette disposition n’avait aucune portée normative, nous l’avons supprimée, ce que vous avez d’ailleurs déploré, monsieur le ministre.
En revanche, nous inspirant des conclusions de la commission d’enquête du Sénat sur le rôle des firmes pharmaceutiques dans la gestion par le Gouvernement de la grippe A (H1N1), nous proposons d’ouvrir les instances d’expertise à des spécialistes de médecine générale et à des experts en sciences humaines. En effet, il faut également prévenir les travers que provoquent parfois des liens intellectuels ou académiques, les phénomènes de pensée unique ou de pensée de groupe.
L’article 2 du projet de loi traite notamment du Sunshine Act à la française, qui ferait l’objet d’un nouvel article du code de la santé publique. Pour que la lumière soit effectivement faite sur les liens contractuels et financiers entre les laboratoires et les divers acteurs et partenaires du secteur de la santé qu’énumère ce nouvel article, il nous a paru nécessaire d’apporter des modifications substantielles au dispositif prévu.
Le même article proposait de modifier l’une des mesures de la loi anti-cadeaux, afin de permettre aux étudiants se destinant aux professions de santé, à l’instar des professionnels eux-mêmes, de conclure des conventions avec les laboratoires ou de bénéficier de prestations dites d’hospitalité. Il ne nous a pas paru souhaitable de légitimer ou d’encourager de telles pratiques. C’est pourquoi nous avons supprimé cette innovation afin de ne pas donner aux étudiants l’habitude de recourir à l’industrie pharmaceutique. En revanche, nous avons conservé l’extension aux étudiants de l’interdiction de principe de recevoir quelque avantage que ce soit de l’industrie pharmaceutique.
J’en viens aux dispositions du titre II, lequel est principalement consacré au devenir de l’actuelle AFSSAPS, chargée du contrôle de la mise sur le marché et de la sécurité des produits de santé.
L’article 4 rebaptisait l’AFSSAPS et la transformait en Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Nous étions inégalement convaincus de la nécessité de ce changement ; je le répète, il s’agit à nos yeux d’une mesure cosmétique. Pour vous être agréable, monsieur le ministre, nous en acceptons le principe. Toutefois, la nouvelle dénomination posant des difficultés que j’ai déjà évoquées, nous en avons choisi une autre, qui nous semble plus conforme à la réalité de cette structure et reste plus proche de son ancienne appellation.
L’article 5 fixe les règles de publicité des travaux des instances d’expertise de l’Agence et propose d’élargir son conseil d’administration aux parlementaires et aux acteurs du système de santé. Notre commission a jugé cette réforme intéressante, à condition que le conseil d’administration puisse réellement suivre et orienter les actions menées en matière de police sanitaire. Elle a donc modifié le texte en ce sens et garanti l’indépendance des associations de patients représentées au sein du conseil d’administration. Par ailleurs, elle a pris soin d’assurer une représentation spécifique des associations de victimes d’accidents médicamenteux.
L’article 5 bis, inséré par l’Assemblée nationale, propose de confier à la HAS la création d’un portail public consacré aux maladies et à leur traitement. Nous approuvons cette mesure utile et l’avons complétée pour que cette information porte également sur le bon usage des produits de santé.
Le titre III concerne le bon usage du médicament. Il procède notamment à la transposition des dispositions de la directive européenne du 15 décembre 2010 relative à la pharmacovigilance.
Les articles 6 à 9 renforcent l’information et la capacité de l’Agence en charge du médicament d’assurer la pharmacovigilance, notamment en demandant des études de sécurité comparatives après l’autorisation de mise sur le marché, et ce en attendant, bien sûr, l’évolution de la législation communautaire relative aux AMM, que vous avez évoquée, monsieur le ministre, et sur laquelle nous devrions revenir au cours de ce débat.
À cet égard, l’article 9 bis, introduit sur l’initiative de notre collègue député Catherine Lemorton, nous paraît majeur. En effet, il permet de contourner l’obstacle du droit communautaire, ce que vous avez fort bien exposé, monsieur le ministre. Faute de pouvoir exiger des essais comparatifs lors de l’autorisation de mise sur le marché, cet article les impose lors de la demande de remboursement des médicaments, procédure qui relève de la seule compétence nationale. Dans les faits, les conséquences de cette mesure seront pratiquement les mêmes que celles d’une réforme de la procédure d’autorisation de mise sur le marché. Notre commission a d’ailleurs renforcé la rigueur juridique de cet article fondamental.
Les articles 10 à 13 encadrent les conditions de prescription. L’article 11 organise en particulier la prescription en dehors des indications autorisées, dite « hors AMM », en ouvrant la possibilité à l’agence en charge du médicament de formuler des recommandations temporaires d’utilisation, lorsque cela lui semble utile pour la santé publique.
Notons que le médecin conserve une entière liberté de prescription, dès lors qu’il explique à son patient les raisons d’une prescription hors AMM. Cette pratique est nécessaire et répandue, comme l’illustre par exemple la prescription d’aspirine à des patients atteints d’affections cardio-vasculaires. La commission des affaires sociales a complété l’information donnée au patient pour qu’il sache si le médicament lui sera ou non remboursé, la situation créée par le projet de loi étant sur ce point assez complexe.
Les articles 14 à 16 concernent l’accès au médicament, spécialement les autorisations temporaires d’utilisation, qui permettent aux patients qui en ont un besoin impérieux de bénéficier des traitements les plus innovants avant leur autorisation formelle. Nous souhaitons, bien sûr, préserver cet accès. En revanche, comme l’a souligné la Cour des comptes, il ne faut pas que l’ATU soit pour les industriels le moyen de contourner les procédures d’AMM et de fixation des prix par le Comité économique des produits de santé.
Par conséquent, nous avons tenté de parvenir à un équilibre en limitant la durée de vie des ATU et en précisant les conditions d’octroi des ATU nominatives. Cela étant, nous avons choisi de n’apporter aucune restriction à la procédure d’ATU nominative dérogatoire telle qu’elle a été prévue par l’Assemblée nationale, qui permet de répondre à des situations rares et souvent douloureuses.
L’article 18 porte sur la publicité relative aux médicaments. Nous avons fait le choix d’une interdiction de principe des campagnes de publicité menées sur les vaccins par les laboratoires. Il nous semble en effet essentiel d’affirmer que la prévention doit relever exclusivement de la puissance publique.
L’article 19 met en place, à titre expérimental, la visite médicale collective dans les établissements de santé. J’avoue ne pas être entièrement convaincu de la pertinence de cette mesure. Pour autant, si l’on mène une expérimentation, il faut la conduire sérieusement. C’est pourquoi nous n’avons pas suivi nos collègues de l’Assemblée nationale, qui en restreignaient largement la portée, et proposons de préserver le champ initial de l’expérimentation. Il vous reviendra, monsieur le ministre, d’en fixer les modalités en tenant compte des réalités de terrain.
Nous souhaitons aussi confier un rôle pilote à la Haute Autorité de santé dans l’évaluation de cette expérimentation, ce qui ne nous empêchera pas d’envisager d’autres formes de concertation le moment venu.
Enfin, nous demanderons à Mme la présidente de la commission des affaires sociales qu’un rapport soit élaboré sur l’évolution de la profession de visiteur médical.
Le titre IV rassemble des dispositions visant à aligner, dans la mesure du possible, le régime juridique applicable aux dispositifs médicaux sur celui des médicaments, en particulier en matière de publicité et de respect de certaines exigences techniques et de sécurité.
C’est une bonne chose, car les dispositifs médicaux, de plus en plus utilisés, ne font l’objet que d’un encadrement limité en droit national. Je garde en mémoire la réflexion de l’une des personnalités que j’ai auditionnées dans le cadre de la préparation de ce rapport : « Le prochain Mediator sera un dispositif médical. »
Comme une première étape nécessaire à une meilleure évaluation des dispositifs médicaux, la commission a donc souhaité que la Haute Autorité de santé dresse le bilan des règles existantes en matière de sécurité des dispositifs médicaux et propose les réformes qui paraîtraient nécessaires.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la réforme du système de sécurité sanitaire nous semble une avancée importante vers la sécurité du médicament et des dispositifs médicaux. Nous sommes tous animés par le souci de la rendre la plus complète et la plus efficace possible. Espérons que nos débats y contribuent et prolongent, dans le même climat de dialogue ouvert, les apports de l’Assemblée nationale. Pour nous, la réforme qui émergera de ce texte est un premier pas qui, certes, est important, mais que nous devrons compléter à l’avenir.
C’est dans cette attente, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, que la commission des affaires sociales demande au Sénat d’adopter le projet de loi tel qu’elle l’a modifié et complété par les amendements sur lesquels elle a émis un avis favorable. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Escoffier.
Mme Anne-Marie Escoffier. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, comment ne pas souligner la fébrilité, voire la fièvre qui a accompagné la conception, puis la naissance de ce projet de loi ?
Tout le monde en convient sur ces travées, ce texte était très impatiemment attendu après les affaires qui ont jeté discrédit et suspicion sur le médicament à usage humain.
Au cours du premier semestre, pas moins de sept rapports ont été rendus par des instances dont l’autorité est reconnue, dans le but de démêler les fils de dispositifs où s’entrechoquent intérêts des patients, intérêts des professionnels de santé, intérêts commerciaux et industriels, avec leur cortège de contradictions, dans un contexte global de dilution des responsabilités.
Dès lors, comment ne pas se féliciter de ce projet de loi ? Certes, notre excellent rapporteur, Bernard Cazeau, l’a souligné, il est un peu tardif, mais, malgré ses imperfections ou insuffisances, il apporte une véritable amélioration au système que nous connaissons aujourd’hui.
À ce titre, il est tout à fait symbolique que le titre Ier traite des liens d’intérêts et fixe un corpus commun de règles déontologiques, tirant ainsi la leçon des expériences malheureuses vécues récemment. Ces dispositions s’inscrivent délibérément dans la prévention des liens d’intérêts et viendront protéger, contre eux-mêmes, les multiples opérateurs sous tutelle des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.
Dans le même esprit, obligation est faite à l’industriel pharmaceutique de déclarer les conventions conclues avec les acteurs des produits de santé et les avantages en découlant. Cette mesure, qui conforte le rôle et la place du Conseil national de l’ordre des médecins, mériterait toutefois d’être élargie pour rendre obligatoire la transmission de toutes les conventions, et pas uniquement celles qui relèvent de l’article L. 4113-6 du code de la santé publique, aux ordres professionnels afin de faciliter, en toute transparence, la vérification de ces conventions et la publicité des avis rendus.
Le titre II, relatif à la gouvernance des produits de santé, tire, lui aussi, la leçon des liens trop distendus qui existaient entre l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et son ministère de tutelle.
Je veux espérer – je suis confiante – que la nouvelle Agence française de sécurité des produits de santé, avec son conseil d’administration recomposé, saura être cette instance de veille, d’expertise et de conseil qui, parce qu’elle sera entendue, mais aussi écoutée du ministre de la santé, assumera pleinement le rôle et la responsabilité accrus qui lui sont désormais confiés.
Le titre III, relatif au médicament à usage humain, est au cœur des préoccupations de tous les acteurs, patients ou professionnels de santé.
Je rappellerai brièvement quatre des particularités de la France en matière de médicaments : la surconsommation générale en dépit des campagnes qui se multiplient pour en freiner l’usage – je pense notamment aux antibiotiques –, le poids de la visite médicale et des dépenses promotionnelles de l’industrie pharmaceutique, la pratique très répandue des prescriptions hors autorisation de mise sur le marché – leur part pourrait aller jusqu’à 20 % du nombre total de prescriptions –, une sous-notification des effets indésirables liés à un produit de santé.
Sur chacun de ces points, M. le rapporteur a été particulièrement vigilant et s’est attaché à avaliser ou à introduire des dispositions équilibrées, protectrices des uns comme des autres.
Je citerai, à titre d’exemple, l’article 11 relatif aux conditions d’une prescription hors autorisation de mise sur le marché, qui garantit, sans l’alourdir, les modalités d’information du patient sur les conditions de remboursement du médicament.
Je soulignerai encore les améliorations apportées au texte en matière d’autorisations temporaires d’utilisation. Si les ATU constituent un facteur évident d’innovation, elles nécessitent une particulière vigilance avant la mise sur le marché des produits concernés.
La place donnée à la pharmacovigilance et à l’obligation faite aux industriels pharmaceutiques, autant qu’aux médecins et aux professionnels de santé, de dénoncer sans délai tout effet indésirable d’un médicament auprès de l’Agence, est une mesure de bonne gestion, tout à fait opportune, dès lors qu’elle s’accompagne de la protection corrélative des personnes ayant signalé, de bonne foi, ledit effet indésirable.
Si, dans son ensemble, ce texte a bien cherché à répondre à des problématiques dont chacun, ici, mesure la complexité, il n’en reste pas moins que plusieurs points mériteraient encore d’être approfondis. J’en mentionnerai trois.
Sur la visite médicale, nous sommes nombreux à avoir été alertés sur la proposition visant à rendre l’information collective, alors qu’elle était jusqu’à présent délivrée individuellement par démarchage ou par le biais de la prospection pour certains produits de santé. Si je fais abstraction du problème économique et humain qu’entraînera cette mesure, avec la disparition corrélative d’emplois de visiteurs médicaux, je ne peux manquer, en revanche, de m’interroger sur l’efficacité de l’information collective. En effet, pour connaître, comme nombre de mes collègues, le monde des praticiens hospitaliers et libéraux, il me semble qu’elle sera délivrée dans des conditions quelque peu aléatoires.
Dès lors, il me paraît sage d’avoir conféré à cette disposition un caractère expérimental, pour une durée maximale de deux ans.
L’éternel problème budgétaire constitue, me semble-t-il, une autre difficulté qui pourrait survenir lors de l’application de ce texte. Les moyens alloués aux instances de contrôle – Direction générale de la santé, agences régionales de santé – seront-ils à la hauteur des ambitions ? Quels renforts attendre et selon quel calendrier ?
Je pense que nous devons également faire preuve de vigilance sur les dispositifs médicaux eux-mêmes. Si la pharmacovigilance est clairement institutionnalisée, le projet de loi me paraît bien silencieux sur la « matériovigilance ». Pourtant, ne serait-il pas temps de s’interroger sur l’utilisation de certains matériels et sur les habilitations à leur accorder après avoir vérifié, par exemple, leurs effets en matière d’irradiation ou de développement de tumeurs ? L’hôpital Purpan de Toulouse a connu en la matière quelques mauvaises expériences que nous n’avons pas le droit de méconnaître.
Monsieur le ministre, en dépit de quelques insuffisances dont nous sommes sûrs que vous accepterez qu’elles soient comblées, ce texte répond de façon satisfaisante à une attente forte. C’est pourquoi, mon collègue Gilbert Barbier le dira mieux que moi, les membres de mon groupe, confiants dans les améliorations proposées et à condition qu’elles soient adoptées, voteront ce projet de loi. (Applaudissements sur certaines travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi qui nous est soumis entreprend une réforme volontariste et ambitieuse de notre système de sécurité sanitaire. Il fait suite aux travaux menés par l’Inspection générale des affaires sociales, les Assises du médicament et les différentes missions parlementaires d’information.
Notre assemblée a d’ailleurs fortement participé à cette réflexion. Je pense notamment aux travaux de la mission commune d’information qu’a présidée François Autain et dont Marie-Thérèse était le rapporteur.
Nous nous appuierons sur les travaux et recommandations des Assises du médicament. Notre ambition est la vôtre, monsieur le ministre : restaurer la confiance en renforçant la transparence.
Le système d’évaluation et de contrôle du médicament actuellement en vigueur s’est complexifié avec la multiplication des instances impliquées dans le processus, sans parvenir à garantir une expertise impartiale et indépendante pour la sécurité du médicament et la santé des usagers.
Longtemps dominée par l’État, la politique du médicament a été libérée de cette tutelle en 1993. Cette tendance n’a fait que se confirmer avec la loi du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire des produits destinés à l’homme, qui a créé l’AFSSAPS, et la loi du 13 août 2004 relative à l’assurance maladie instituant la Haute Autorité de santé.
Nous avons constaté que l’absence de centre politique et administratif de décision créait un déséquilibre laissant le champ ouvert à toutes les influences, comme l’a souligné l’Inspection générale des affaires sociales dans son rapport du mois de juin 2011. C’est pourquoi un retour à la responsabilité du politique paraît indispensable, tout comme est nécessaire une refonte de la gouvernance des agences.
Après le dramatique scandale du Mediator, la gestion contestée de la grippe H1N1 et, récemment, la publication d’une liste de soixante-dix-sept médicaments sous surveillance, il nous faut aujourd’hui rééquilibrer notre système de sécurité sanitaire pour en renforcer l’efficacité et l’indépendance et restaurer la confiance des Français envers le dispositif de sécurité du médicament.
Il nous est donc demandé de renforcer la pharmacovigilance, de mieux réglementer les prescriptions hors AMM, de contrôler la publicité auprès des professionnels de santé, d’améliorer l’encadrement des dispositifs médicaux.
Le projet de loi que vous nous proposez, monsieur le ministre, a le mérite de ne pas avoir succombé à la tentation de l’excès et a remodelé notre système avec pondération.
Ce texte pose les fondements d’un système qui offrira de plus grandes garanties, tant pour les patients que pour les prescripteurs. Il ne se limite pas à réaliser quelques aménagements du dispositif actuel : il le modifie en profondeur, avec la détermination de garantir l’indépendance et la transparence du système de sécurité sanitaire, de renforcer le processus de pharmacovigilance, d’assurer une meilleure formation des professionnels de santé et d’améliorer l’information du public et des acteurs du système de santé.
Avant d’évoquer les apports essentiels de ce projet de loi – mes collègues aborderont certains points de façon plus détaillée –, je tiens à affirmer que la réforme de notre système de santé ne doit pas être ressentie comme une mise en accusation de l’industrie du médicament. Les laboratoires de recherche et les industries pharmaceutiques réalisent un travail remarquable dont notre pays a le plus vif besoin pour accompagner l’innovation et permettre des avancées médicales indispensables à l’amélioration des soins.
Bien sûr, certains des changements apportés par ce texte peuvent préoccuper les professionnels de santé. Or, sans l’instauration d’un système efficient, précis, véritablement renouvelé, nous n’atteindrons pas notre objectif, qui est d’assurer une plus grande transparence du dispositif de sécurité sanitaire, de permettre une meilleure identification des responsabilités et de remettre l’intérêt des patients au cœur du système.
L’expertise est au cœur de la nécessaire transparence. Nos débats doivent permettre d’identifier les liens d’intérêts nécessaires avec les centres de recherche, l’université, la recherche industrielle. Le besoin de clarification des rôles et des missions des experts, internes et externes, doit entraîner une valorisation des métiers. La gestion des déclarations d’intérêts doit aboutir, dans les faits, à l’éradication des conflits d’intérêts.
Aussi ne pouvons-nous que plébisciter ce projet de loi dont les dispositions constituent de réelles avancées.
Le texte vise ainsi à lutter contre toute forme de conflits d’intérêts. Il prévoit une transparence totale dans les relations entre l’industrie et l’ensemble des acteurs du système de santé. Il s’agit notamment d’assurer l’indépendance des experts et de leurs décisions.
À ce titre, la déclaration d’intérêts obligatoire est étendue de façon systématique à tous les acteurs du domaine de la santé. Elle devra mentionner les liens d’intérêts personnels, ceux des conjoints, ascendants et descendants établis au cours des cinq dernières années. Elle sera rendue publique et actualisée.
L’exigence de transparence s’appliquera également à toutes les conventions conclues entre les entreprises et les professionnels de santé, les associations de professionnels de santé et de patients, les étudiants en médecine et en odontologie, les établissements de santé, les fondations, les organes de presse spécialisée, les sociétés savantes et les organismes de conseil. Au-delà d’un certain seuil, l’obligation de publicité s’étendra aux avantages en nature ou en espèce consentis par ces entreprises.
Le texte modifie par ailleurs le système d’admission au remboursement d’un nouveau médicament. Désormais, il faudra que ce médicament apporte quelque chose de plus par rapport au traitement de référence existant.
Une agence restructurée se substituera à l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé. À ce sujet, je tiens à souligner la valeur des hommes et des femmes qui prendront en charge la direction de cette nouvelle agence et à exprimer la confiance que nous leur accordons.
Afin que le doute soit au bénéfice systématiquement du patient, la future Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, pourra demander à l’industrie pharmaceutique de mener des essais comparatifs pour montrer l’amélioration du service médical rendu par un médicament par rapport à un médicament existant et non plus à un placebo. Les industriels qui s’y refuseront, puisqu’une directive européenne empêche d’exiger ce type d’essais, devront le justifier.
L’autorisation de mise sur le marché, l’AMM, ne sera ainsi délivrée et la prise en charge des traitements par la collectivité ne sera possible que si les médicaments apportent un bénéfice au moins comparable à celui d’autres traitements de référence déjà sur le marché. Si les médicaments présentent un service médical rendu insuffisant, aucune prise en charge par la collectivité ne sera envisagée.
La nouvelle agence sera organisée avec l’objectif constant de garantir sa transparence et son indépendance. La composition de son conseil d’administration sera modifiée : le projet de loi fait une plus grande place aux parlementaires – désormais au nombre de six – et supprime la présence de représentants des laboratoires et des entreprises fabriquant ou commercialisant des médicaments. Son mode de financement sera revu : elle sera financée par une subvention de l’État, qui percevra les taxes et redevances de l’industrie pharmaceutique jusqu’à présent directement versées à l’AFSSAPS.
Les modalités de l’autorisation de mise sur le marché et de sa réévaluation sont également réformées, afin d’en faciliter la suspension ou le retrait et de garantir un meilleur suivi du médicament tout au long de sa vie. Cela implique, par exemple, la réalisation d’études comparatives contre un médicament de référence lorsque ce dernier existe.
Un effort tout particulier est engagé afin d’assurer une information efficace et complète des patients et de l’ensemble des acteurs de la santé. La création d’un site internet sur les maladies et leurs traitements, le renforcement de la place de la pharmacovigilance dans la formation des professionnels de santé, la réforme expérimentale de la visite médicale collective à l’hôpital, sur laquelle nous reviendrons, ou encore l’instauration d’un nouveau mode de pilotage de la politique du médicament autour d’un comité stratégique sont autant de dispositions qui participent de cette volonté. De même, les modalités de publicité pour les médicaments et les dispositifs médicaux seront mieux encadrées.
Il s’agit, enfin, de faire évoluer la place des patients et des associations de patients dans le sens d’une plus large implication dans le processus de notification des effets indésirables d’un médicament. Désormais, ceux-ci pourront notifier directement tout effet indésirable, avec la création d’un recours en cas de non-traitement de la demande.
Nous devons le dire avec force, monsieur le ministre : par nos amendements, nous tenterons de rétablir les dégâts provoqués par la déconstruction du texte issu des travaux de la commission des affaires sociales, tout en proposant, ainsi que nous en avons l’habitude, des améliorations issues d’un dialogue fructueux avec le Gouvernement. Ainsi, le système de sécurité sanitaire, encore perfectible, pourrait être stabilisé.
Mes collègues de l’UMP, notamment ceux qui sont membres de la commission des affaires sociales, ne pourront accepter un texte qui ne vise pas à refondre le système de sécurité sanitaire des produits de santé conciliant sécurité des patients et accès au progrès thérapeutique. (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Philippe Darniche.
M. Philippe Darniche. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi est l’aboutissement tant attendu d’un travail considérable, réalisé notamment à l’occasion des Assises du médicament, lesquelles ont permis à tous les acteurs des produits de santé de s’exprimer librement dans l’unique objectif de concilier progrès thérapeutique et sécurité des patients. Tant attendu, ce projet de loi l’était assurément, car nous avions besoin d’un texte qui puisse enfin restaurer la confiance que les patients doivent avoir en leurs médecins et dans les médicaments qui leur sont prescrits, dans un pays qui – il n’est qu’à lire les classements – possède la meilleure médecine du monde.
M. Philippe Darniche. Malheureusement, les scandales du Vioxx et du Mediator ont ébranlé cette confiance.
La base du texte est bonne et, monsieur le ministre, je soutiens notamment les trois principales propositions qui sont formulées.
Tout d’abord, la création d’une nouvelle Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé va dans le bon sens.
Il paraît invraisemblable, alors que nous avons mis en place le plus grand nombre d’organismes de surveillance des produits de santé, d’avoir le sentiment que ceux-ci ont parfois travaillé sans se concerter. Il était donc temps que le pouvoir politique prenne ses responsabilités et mette le holà à une situation de cafouillage qui a trop duré. En effet, la chaîne du médicament ne peut être exonérée de sa responsabilité dans le scandale du Mediator, notamment en ce qui concerne la délivrance de l’AMM.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Eh oui !
M. Philippe Darniche. La création de cette nouvelle agence chargée de surveiller le risque d’un médicament tout au long de sa vie, en en évaluant les dangers et les bénéfices en fonction des travaux de recherche plus récents, est une excellente mesure qui doit remettre de l’ordre dans la chaîne du médicament et rassurer nos concitoyens sur les produits qui leur sont prescrits.
Ensuite, la lutte contre les conflits d’intérêt est renforcée. Il s’agit là d’un objectif essentiel du texte.
Dans le domaine de la santé, les soupçons de collusion entre la recherche et l’argent sont trop nombreux et, malheureusement, parfois fondés. Le prix à payer peut être douloureux. Dans l’affaire du Mediator, une telle suspicion est insupportable pour les familles de victimes.
Il est donc urgent de modifier le travail des autorités de santé et de leurs acteurs. C’est pourquoi la décision d’introduire plus de transparence par le biais de déclarations détaillées rendues publiques sous peine de sanctions constitue, à mes yeux, une avancée fondamentale.
Enfin, nous formons en France des chercheurs de renommée mondiale. Depuis des décennies, ils ont réalisé des découvertes extraordinaires – vaccins, antibiotiques hypersophistiqués – qui nous protègent aujourd’hui de maladies infectieuses encore mortelles voilà quelques années.
Nous ne voulons pas la fin des progrès thérapeutiques. Ce que nous demandons, c’est un pilote, un veilleur attentif aux bonnes découvertes et aux moins bonnes. C’est chose faite dans ce texte et je m’en réjouis.
Cependant, monsieur le ministre, permettez-moi de poser quelques questions.
Premièrement, la déclaration des effets néfastes ou inattendus des médicaments doit être simplifiée. Aujourd’hui, nombre de professionnels n’établissent pas de déclaration, car les formulaires et les démarches sont trop complexes. Prévoyez-vous une amélioration de ce dispositif ?
Deuxièmement, la mission commune d’information sur le Mediator a montré que les conseils régionaux de pharmacovigilance manquaient cruellement de moyens humains et financiers. Les agences régionales de santé pourront-elles y remédier ?
Troisièmement, la formation initiale des médecins en matière de pharmacologie est jugée insuffisante. Je sais que le développement professionnel continu, le DPC, doit permettre des améliorations en ce sens. Pour autant, ce dispositif vous semble-t-il suffisant pour les informer, tout au long de leur exercice, des nouvelles spécialités apparues sur le marché ?
À mon sens, la visite médicale doit être maintenue. Encore faut-il que la charte censée régler le problème éthique soit contrôlée. Il ne faudrait pas qu’elle appartienne aux seuls laboratoires pharmaceutiques.
Enfin, si les AMM doivent résulter d’une évaluation précise, il me semble nécessaire de les retenir en fonction des évolutions qu’elles apportent par rapport aux anciens médicaments de la même classe thérapeutique.
Monsieur le ministre, je profite de mon intervention pour revenir sur une question que vous connaissez et qui concerne l’efficacité de certains médicaments génériques. Je pense plus précisément au générique du Lévothyrox et de la Dépakine, qui a manifestement un effet thérapeutique différent du princeps. Les analyses pratiquées sur les malades qui les absorbent le démontrent depuis plusieurs années. Est-ce dû à l’excipient ou à des doses modifiées ? Cela pose un vrai problème de santé publique, qui doit être réglé au plus vite, afin d’éviter des incidents qui pourraient se révéler majeurs. Aussi souhaiterais-je que vous nous apportiez des éclaircissements en la matière.
Considérant que ce texte constitue une réelle avancée dans l’objectif de sécurité sanitaire que nous devons tous faire nôtre, monsieur le ministre, avec la majorité de mes collègues non inscrits, je soutiendrai vos propositions. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, La Réforme du système du médicament, enfin : tel était le titre – éloquent ! – du rapport de la mission commune d’information sur le Mediator. On peut le dire, le présent projet de loi était attendu !
À la suite du drame du Mediator, le Sénat a décidé, cinq ans d’ailleurs après avoir publié un rapport d’information resté lettre morte, de se ressaisir du sujet afin de mettre au jour les dysfonctionnements de la chaîne du médicament en France. La mission commune d’information sur le Mediator a formulé soixante-cinq propositions que la commission des affaires sociales a adoptées à l’unanimité.
Ces propositions, auxquelles nous souscrivons pleinement, ont-elles été correctement prises en compte ? Si certaines d’entre elles ont été retenues, et j’en remercie le Gouvernement, de nombreuses autres ne figurent pas dans ce texte, car elles sont de nature réglementaire. Par ailleurs, plusieurs d’entre elles ne sont pas neutres en termes de finances sociales. C’est pourquoi, ainsi que vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, celles-ci seront traitées dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
Cette situation nous conduit d’ailleurs à un paradoxe auquel nous ne pourrons échapper : pour éviter le morcellement financier, le morcellement des réformes a été choisi...
Une fois ce ménage effectué, que reste-t-il ?
Le projet de loi initial apportait, il faut le souligner, des améliorations substantielles au fonctionnement de la chaîne du médicament en retranscrivant fidèlement certaines des propositions de la mission commune d’information. Il s’agissait donc là d’une très louable prise en compte par le Gouvernement du travail de cette mission.
Dans le même temps, nous ne pouvons qu’approuver les efforts de notre commission des affaires sociales, dont je salue le travail, en particulier celui de notre rapporteur, Bernard Cazeau, pour intégrer dans le texte un nombre plus grand encore de recommandations formulées par la mission commune d’information.
Notre collègue Nathalie Goulet concentrera son intervention sur la question des conflits d’intérêts, mais nous pouvons d’ores et déjà dire que nous sommes globalement favorables aux propositions qui nous sont soumises, même si, pour ma part, j’estime qu’il aurait été possible d’aller un peu plus loin encore, en excluant complètement les représentants de l’industrie pharmaceutique de toutes les commissions et groupes de travail de l’AFSSAPS et de la HAS. C’était d’ailleurs la proposition n° 4 du rapport d’information.
J’en viens à la gouvernance. Le progrès annoncé est indéniable et nous approuvons l’élargissement des compétences et pouvoirs de l’AFSSAPS et, finalement, sa « sanitarisation ». Cependant, ce qui nous semble peut-être le principal apport de la réforme sur cette matière est invisible dans le texte : il s’agit de la création, par voie réglementaire, du comité stratégique de la politique des produits de santé et de la sécurité sanitaire, qui impliquera directement le ministre dans le dispositif de sécurité sanitaire. L’affaire du Mediator a en effet révélé que le pouvoir politique pouvait ne pas être directement au courant de dérives graves.
Abordons maintenant l’un des sujets les plus déterminants et les plus sensibles, celui de l’autorisation de mise sur le marché.
Parce que les exigences opposables aux demandeurs d’une AMM relèvent de la compétence communautaire, le texte initial se caractérisait par un profond déséquilibre : une sécurisation insuffisante pour l’octroi de l’AMM et de très substantiels progrès après cet octroi. Bref, une sécurisation ex post et rien ex ante !
Aussi, l’article 6 permet à l’agence en charge de la sécurité du médicament de demander des études de sécurité et d’efficacité après l’AMM, tandis que l’article 7 élargit les cas de retrait de l’AMM et que l’article 8 fixe les obligations du titulaire de l’AMM en matière de sécurité.
Pour rééquilibrer le texte, il a fallu finasser, si je puis dire, en contournant en quelque sorte le droit communautaire sans y contrevenir. C’est chose faite avec les articles 6 bis et 9 bis.
Ainsi, l’article 6 bis, ajouté par nos collègues députés, rend obligatoire l’inscription des essais cliniques pré-AMM sur la base de données nationales des recherches biomédicales. Plus important encore, l’article 9 bis, également introduit par l'Assemblée nationale, soumet l’inscription d’un médicament sur la liste des médicaments remboursables à la réalisation d’essais cliniques comparatifs.
Puisque le droit communautaire, avec sa logique de grand marché sans distorsion, nous interdit d’agir sur les conditions d’octroi de l’AMM, il a fallu le contourner en agissant sur les conditions de remboursabilité du médicament. Bravo, monsieur le ministre ! Et je nourris bien sûr l’espoir que vous arriverez à convaincre le commissaire européen en charge de ces questions.
Permettez-moi de noter encore les progrès réalisés en matière de pharmacovigilance.
Lors des auditions réalisées dans le cadre de la mission commune d’information, nous avons été frappés par l’expertise qu’avait développée l’assurance maladie en matière de détection des dangers potentiels de tel ou tel médicament. Cette expertise a enfin été prise en compte : l’assurance maladie entre, avec ce texte, dans le dispositif de veille sanitaire pour y prendre toute la part qui lui revient.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Enfin, j’évoquerai la question de la visite médicale.
Ce sujet est très sensible d’un point de vue tant éthique qu’économique : éthique, parce que la visite médicale mélange information, formation et marketing ; économique, parce que cette activité représente un très grand nombre d’emplois.
Le rapport sénatorial d’information était bien plus menaçant pour la visite médicale que ne l’est le présent texte, car il envisageait tout bonnement sa suppression. Il nous est aujourd'hui proposé d’expérimenter la visite collective.
Il s’agit sans doute là d’une solution sage, bien qu’elle ne soit pas, à mon avis, systématiquement adaptée. L’expérimentation pourrait en effet conclure à l’impossibilité de procéder à des visites collectives dans tous les cas de figure. Nous verrons bien !
Quoi qu’il en soit, c’est le problème de la formation continue du médecin qui se trouve ici implicitement posé.
Comment les médecins se forment-ils aujourd’hui ? La réponse est simple : grâce aux labos ! Ils se forment par la visite médicale, donc par les labos ! Par Le Quotidien du médecin, donc par les labos ! Par les séminaires organisés par... des labos ! C’est donc bien cela qu’il faut réformer ! Mais il s’agit d’une question financière, qui relève du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Tout en continuant de prendre l’argent dévolu à la formation continue là où il se trouve, c'est-à-dire dans les laboratoires, il nous faudra bien trouver, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le moyen de soustraire les praticiens à l’influence marchande des laboratoires. En d’autres termes, il faut couper le cordon ombilical entre les laboratoires et la formation continue. C’est seulement en procédant ainsi qu’il sera possible de régler vraiment la question de la visite médicale.
Toutefois, on ne supprimera sans doute jamais totalement la promotion libérale du médicament et, même si les visiteurs médicaux deviennent des experts d’État, il sera difficile de conserver les 17 000 emplois que cette filière représente aujourd’hui. C’est pourquoi toute décision ne devra être prise qu’en concertation avec la profession elle-même et la HAS. Sans doute faudra-t-il d’ailleurs agir de façon progressive.
Il en est de même en ce qui concerne la réforme du prix du médicament. Nous devrons traiter cette question dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, en vue de soustraire la formation du prix du médicament à l’influence exclusivement économique du lobby pharmaceutique.
Ce constat est partagé par tous : aujourd’hui, le poids des industriels au sein du Comité économique des produits de santé, responsable de la fixation des prix des médicaments, est trop important. Il convient d’en réformer la composition et le fonctionnement, c’est-à-dire d’augmenter le poids des organismes de sécurité sociale en son sein pour le « sanitariser ».
Monsieur le ministre, si nous saluons l’ambition du texte que vous avez initialement soumis au Parlement et les qualités de vos propositions,…
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. … nous attendons du Gouvernement qu’il prenne ses responsabilités lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
De même, nous attendons de l’actuelle majorité sénatoriale qu’elle prenne ses responsabilités en allant jusqu’au bout de la démarche constructive qu’elle a engagée et dont nous nous félicitons. Il serait absurde qu’elle ne vote pas ce projet de loi qu’elle s’est ingéniée à améliorer.
M. Ronan Kerdraon. Très bien !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Sous ces réserves, les membres du groupe de l’Union centriste et républicaine soutiendront le présent texte. (Applaudissements sur les travées de l’UCR et de l’UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le ministre, mes collègues l’ont souligné avant moi : ce projet de loi était très attendu et c’est sans doute la raison pour laquelle la version que vous avez présentée aux députés a quelque peu déçu. Certes, vous exploriez des pistes intéressantes, mais sans aller jusqu’au bout, renonçant même à certains des engagements que vous aviez pris lors de la présentation des deux rapports successifs remis par l’IGAS.
Si ce projet de loi était attendu, c’est parce que ce qu’il est désormais convenu d’appeler « l’affaire du Mediator » a choqué nos concitoyens. Tous les ingrédients ont été réunis pour faire de cette affaire un exemple de ce que nous ne souhaitons plus jamais voir se reproduire : un industriel pharmaceutique aux pratiques salariales douteuses, des liens étroits avec des décisionnaires politiques, des demandes d’autorisation de mise sur le marché non conformes aux destinations réelles du médicament, des agences sanitaires trop absentes, des pressions accrues sur les lanceurs d’alerte ... Bref, un climat peu propice à une transparence qui devrait être la règle, puisqu’elle seule est de nature à satisfaire les exigences légitimes de nos concitoyens. Car c’est bien de cela qu’il s’agit !
Il faut que les agences sanitaires jouent un rôle primordial. Si elles doivent s’assurer que le médicament n’est pas nocif, qu’il présente un réel intérêt thérapeutique, que son prix et les conditions de son remboursement par la sécurité sociale sont décidés en lien avec ses performances médicales, elles doivent aussi s’assurer que les enjeux économiques ou industriels ne prévalent pas contre des considérations de santé publique. Or, sur ce point, nos concitoyens ont l’impression que les agences ont échoué.
Bien que symptomatique, le cas du Mediator n’est pas nouveau pour autant. Depuis plusieurs années, des affaires similaires sont apparues : je pense au bisphénol A, que nous avons partiellement interdit, ou encore au scandale du Vioxx.
C’est au mois de novembre 1999 que le Vioxx reçoit de la part de l’Agence européenne des médicaments, l’AEM, une autorisation de mise sur le marché, et ce sans que le laboratoire ait pu démontrer, lors des essais cliniques, que ce médicament apportait un progrès thérapeutique par rapport aux médicaments de la même famille déjà commercialisés. Très rapidement, la Food and Drug Administration, la FDA, a mis en évidence les dangers du Vioxx, se fondant notamment sur l’étude VIGOR réalisée en 2000, qui portait sur plus de 7 000 malades.
Or, si cette étude concluait que le Vioxx présentait des avantages pour l’estomac et permettait une meilleure tolérance intestinale que le Naproxène, vieil anti-inflammatoire, elle révélait surtout un taux d’infarctus du myocarde majoré : 0,74 % pour le Vioxx, contre 0,15 % pour le Naproxène et 0,33 % pour le Celebrex. Ainsi, le risque cardiaque du Vioxx était cinq fois plus élevé que celui de ses concurrents. Or ni la FDA, ni l’AFSSAPS, ni l’AEM ne prononceront l’interdiction du Vioxx et c’est le laboratoire Merck lui-même qui retirera le médicament du marché, par crainte moins des autorités sanitaires que des actions de groupes, les fameuses class actions autorisées aux États-Unis.
Si cet exemple est précieux, c’est qu’il contient déjà tous les prémices du scandale du Mediator. Ainsi la question des conflits d’intérêts y est-elle déjà présente. En effet, Marcia Angell, professeur de médecine sociale, qui a étudié les procès-verbaux de la FDA, mettra en évidence que quatre des six membres auraient dû être récusés pour conflits d’intérêts potentiels. De la même façon, on trouve aussi l’intérêt commercial, le Vioxx étant pour le laboratoire Merck ce que l’on appelle communément un blockbuster, qui rapportait tout de même annuellement 2 milliards de dollars !
Comme le souligne à raison Nicole Delépine, auteur du livre intitulé La Face cachée des médicaments, « le scandale du Vioxx a révélé qu’il n’était pas le fruit du hasard, mais bien la conséquence d’un système opaque d’autorisation de mise sur le marché, dont le souci principal n’est pas la sécurité du patient mais bien la création d’un blockbuster au même titre qu’un film ou un livre ».
Après ce premier scandale, nombreux ont été les acteurs ou les témoins attentifs à attendre des pouvoirs publics qu’ils prennent les mesures nécessaires pour que, plus jamais, un tel scandale sanitaire ne puisse avoir lieu !
Sept ans après le scandale du Vioxx, puis l’épisode de la vaccination contre la grippe A, le scandale du Mediator éclate. Le constat est dramatique : les gouvernements n’ont tiré aucune conséquence du passé, exposant de fait nos concitoyens aux mêmes risques.
On pouvait espérer que ce projet de loi mettrait un terme à ces situations et apporterait enfin toute la transparence nécessaire à l’élaboration d’un parcours du médicament qui ne souffrirait plus de critiques.
Hélas ! Si le texte que vous avez déposé contenait bien une ébauche de déclaration publique d’intérêts, monsieur le ministre, nous avons constaté dans le même temps que vous proposiez ni plus ni moins d’autoriser les représentants des laboratoires à siéger au sein même du conseil d’administration de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. Heureusement, cette disposition a été supprimée par l’Assemblée nationale ! Elle témoigne néanmoins de ce « décrochage » entre les aspirations qui s’expriment et les réponses que vous apportez.
Je pense, par exemple, à la disposition permettant d’étendre aux étudiants la possibilité de recevoir des cadeaux de la part de l’industrie pharmaceutique et de ne déclarer que ceux dont le montant excède un certain seuil. Nous nous réjouissons que, sur notre initiative, la commission des affaires sociales du Sénat ait supprimé cette disposition et adopté notre amendement visant à rendre désormais publics les avantages de toute nature versés par les entreprises qui produisent ou commercialisent des produits pharmaceutiques aux parlementaires nationaux et européens, aux membres des cabinets des ministères en charge de la santé et de la sécurité sociale ainsi qu’aux membres du Gouvernement.
D’une manière générale, je trouve que, tel qu’il résulte des travaux de la commission des affaires sociales, l’article 2 constitue un acquis solide pour notre système sanitaire. Je pense notamment à la disposition relative à la publicité des conventions signées entre les professionnels de santé et l’industrie, qui est proposée par notre groupe et notre collègue François Autain depuis la publication, au mois de juin 2006, du rapport sénatorial d’information intitulé Les Conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments – Médicament : restaurer la confiance. Je pense encore à l’établissement d’un registre unique, consultable par tous gratuitement et permettant de prendre connaissance de telles conventions.
L’article 4 de ce projet de loi, relatif aux prérogatives de la nouvelle agence sanitaire, sort également renforcé du travail accompli par la commission des affaires sociales. Naturellement, nous sommes favorables au fait que cette structure puisse, à tout moment, demander que les essais cliniques portant sur des médicaments soient effectués sous forme d’essais contre comparateurs actifs. Cela permettra d’éviter que des essais ne soient réalisés contre des placebos, l’exploitant devant alors limiter la démonstration de l’efficacité du produit pour lequel il demande une autorisation de mise sur le marché à sa supériorité par rapport à un produit sans effet thérapeutique.
Nous saluons le travail réalisé par la commission des affaires sociales du Sénat, qui a également pris en compte les propositions que nous formulions en matière de transparence des débats. Nous avons déposé un amendement sur la publicité des conclusions des travaux rendus par les groupes de travail, dont l’adoption nous semble de nature à renforcer le dispositif prévu dans ce projet de loi.
L’article 5 bis, qui résulte des travaux de l’Assemblée nationale, constitue également une avancée notable. Il confie à la Haute Autorité de santé, en liaison avec l’agence en charge de la sécurité du médicament et les caisses d’assurance maladie, la mission de créer une base de données de référence sur les maladies et leurs traitements qui sera accessible gratuitement – la précision est importante – tant aux professionnels de santé pour l’aide à la prescription qu’aux patients.
Les articles 6 et 6 bis vont également dans le bon sens, puisqu’ils permettent d’améliorer la pharmacovigilance. Même si ces mesures se heurtent aux dispositions communautaires, elles ont le mérite d’exister. Nous soutenons le rapporteur et le Gouvernement dès lors que ce dernier s’engage dans cette voie ; c’est pourquoi nous voterons cet article.
Mais c’est l’article 9 bis qui constitue pour nous l’un des plus grands motifs de satisfaction, puisqu’il subordonne l’inscription d’un médicament sur la liste des médicaments remboursables par la sécurité sociale à la réalisation d’essais cliniques contre comparateurs actifs. Avec cet article, le temps où des médicaments inefficaces ou moins efficaces que ceux qui étaient déjà commercialisés pouvaient obtenir une prise en charge par la sécurité sociale est enfin révolu !
Désormais, et c’est un progrès notable, seuls les médicaments présentant un intérêt thérapeutique pourront prétendre à une prise en charge par la solidarité nationale. Celle-ci retrouve sa vocation initiale, à savoir soutenir les patients en assumant une part de leurs dépenses de soins. Elle n’est plus considérée, comme ce fut trop longtemps le cas, comme une subvention à l’emploi dans des secteurs qui, par ailleurs, génèrent d’importants profits allégrement répartis entre leurs actionnaires.
J’en viens à l’article 13. Tel qu’il a été modifié par la commission, en prévoyant non pas d’infliger des amendes aux laboratoires qui ne respectent pas leurs obligations, mais d’imposer à ces derniers des baisses de prix, cet article s’inscrit dans cette logique de responsabilisation et de meilleure utilisation des deniers publics. En période de crise économique, cela ne peut que tous nous satisfaire.
L’article 17, en apportant plus de protection aux lanceurs d’alerte, constitue aussi une avancée, particulièrement lorsque l’on mesure les attaques parfois virulentes dont les professionnels de santé peuvent être victimes dans de telles situations. Il est donc bienvenu.
Par conséquent, c’est très logiquement que notre groupe votera ce projet de loi, considérant que les évolutions qui ont été apportées, tant par l’Assemblée nationale que par la commission des affaires sociales du Sénat, vont dans le bon sens, celui d’une plus grande transparence et d’une plus grande efficacité de notre système sanitaire.
Pour autant, des améliorations demeurent possibles.
Certes, l’article 1er constitue une avancée notable et nous nous réjouissons du fait que la commission ait retenu notre proposition d’instaurer des mécanismes d’appels à candidatures. Il n’en reste pas moins que nous considérons que les déclarations publiques d’intérêts reposent sur la capacité des agences à vérifier le contenu et la véracité de celles-ci. Nous craignons que ce dispositif n’apparaisse pour le moins compliqué, notamment en raison de l’insuffisance des financements qui lui sont dédiés.
Mais, surtout, nous sommes persuadés qu’il est à la fois possible et nécessaire de permettre l’émergence d’un corps d’experts internes à l’agence et indépendants de tout lien avec l’industrie pharmaceutique, à l’image de la proposition que nous avons retenue concernant le directeur de la future Agence française de sécurité des produits de santé, l’AFSEPS. Sur ce sujet, parce que nous sommes toutes et tous convaincus de l’importance de doter cette structure d’une expertise qui lui soit propre, je suis certaine que nous saurons trouver une solution.
Nous proposons également que soient sanctionnés les exploitants d’un médicament qui auraient eu connaissance d’effets négatifs sur la santé du public liés à une utilisation récurrente de ce médicament, dans des cas autres que ceux qui ont conduit à la délivrance de l’autorisation de mise sur le marché. Chacun aura compris qu’il s’agit là d’une mesure en réaction contre les conséquences du Mediator.
Nous proposons également de renforcer l’article 9 bis, en prévoyant que les essais comparateurs du traitement actif soient réalisés contre les médicaments présentant le meilleur service médical rendu. Cette précision est importante, puisqu’elle servira de support légal à l’AFSEPS pour refuser les études qui pourraient lui être soumises lorsque ces dernières sont réalisées avec des produits déjà commercialisés, mais présentant un service médical rendu ou une amélioration du service médical rendu négligeable ou faible.
Beaucoup a été fait pour améliorer le texte proposé par le Gouvernement. La commission des affaires sociales a su pleinement jouer son rôle et les débats que nous allons avoir en séance publique nous permettront d’apporter les éclaircissements nécessaires et d’avancer sur le chemin d’un système sanitaire sinon irréprochable, du moins plus transparent, plus efficace et, au final, plus sûr. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste-EELV, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous sommes réunis ici afin d’examiner le projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.
Ce texte, que vous avez déposé cet été, monsieur le ministre, a un objectif : « qu’il n’y ait pas demain de nouveau "Mediator" » ; je reprends vos propres termes.
L’examen de ce projet de loi est l’occasion de rappeler certains principes fondamentaux de l’éthique médicale, notamment le fameux précepte latin que l’on traduit communément ainsi : d’abord ne pas nuire, ensuite soigner.
Ce principe figure dans le traité d’Hippocrate sur lequel les médecins en Occident prêtaient traditionnellement serment et qui leur a longtemps fait déclarer : « Dans toute la mesure de mes forces et de mes connaissances, je conseillerai aux malades le régime de vie capable de les soulager et j’écarterai d’eux tout ce qui peut leur être contraire ou nuisible. »
Que la santé ne nuise pas au patient, quelle évidence a priori ! Pourtant, ce précepte est encore quotidiennement bafoué, au mépris des principes élémentaires.
Le phtalate, substance classée cancérogène, mutagène et reprotoxique de catégorie 2 par l’Union européenne, au point qu’il est interdit depuis quelques années dans les jouets destinés aux enfants de moins de trois ans, entre pour plus de 50 % dans la composition des plastiques à usage médical.
La concentration de résidus de médicaments, notamment des antibiotiques, antidépresseurs et pilules contraceptives, est de plus en plus importante dans nos rivières et l’eau du robinet. Elle est même devenue une cause majeure de pollution de l’eau.
Les traitements médicaux entraînent de nombreux effets dits « iatrogènes », allant du simple effet secondaire bénin à la maladie nosocomiale létale. L’affaire du Mediator en est un exemple terrifiant, qui vient s’ajouter à la liste noire et bien trop longue des affaires du Distilbène, des hormones de croissance, du Vioxx, de l’Isoméride et d’autres qui ont déjà été citées par mes collègues.
Évidemment, il ne faut pas être de mauvaise foi : les effets iatrogènes ne pourront jamais être totalement éradiqués et le système français de pharmacovigilance n’est pas responsable de chacun d’entre eux. Cela dit, ne les considérons sûrement pas comme une fatalité statistique : ne nous résignons pas ! Nous ne pouvons pas accepter une situation dans laquelle les patients sont parfois mis en danger, alors que nous pouvons éviter nombre de ces drames par une amélioration de la gouvernance du système de santé.
De ce point de vue, ce projet de loi paraît salutaire, bien que nous en déplorions l’arrivée tardive. En effet, lorsque l’on alerte sans relâche sur les dangers de telle ou telle pratique, sur les dérives de tel ou tel système, il est quelque peu déprimant d’en être réduit à attendre une catastrophe pour constater enfin l’amorce d’un changement !
Selon les études commandées par l’AFSSAPS, ce sont environ 5 millions de personnes qui ont été traitées avec le principe actif du Mediator, le benfluorex, entre 1976 et 2009. Si la succession de défaillances de la chaîne du médicament avait été évitée, ce sont plusieurs centaines de vies qui auraient pu être sauvées. Hélas ! Même si les chiffres sont encore très provisoires, le Mediator aurait provoqué le décès de 500 à 2 000 personnes !
Monsieur le ministre, vous avez pris l’initiative heureuse de ce projet de loi, même si l’on peut déplorer que son dépôt soit intervenu quelques jours avant la publication des conclusions de la mission commune d’information sur le Mediator. Nous regrettons ce manque de considération pour le travail de longue haleine mené par les parlementaires.
Ce texte paraît tout de même aller dans le bon sens, puisque, comme il est précisé dans la présentation du rapport, « trop longtemps différée, une grande réforme de ce système est désormais incontournable ».
Dans sa version initiale, le projet de loi était toutefois très loin de répondre au besoin de changements que l’affaire du Mediator a mis en lumière. Il était plus que timoré ; d’aucuns l’ont à juste titre souligné avant moi.
Par exemple, il ne faut pas vouloir nous faire croire que rebaptiser l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé en Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé suffirait à garantir la sécurité sanitaire ! On resterait dans l’effet d’annonce, alors qu’il est clair que seule une réforme de la gouvernance de l’agence permettra une telle avancée.
L’objectif que vous avez annoncé et qui consiste à restaurer la confiance des Français dans notre système du médicament après l’affaire Mediator est louable. Mais vouloir rassurer les Français en proposant, une fois de plus, une loi alibi dictée par l’actualité ne suffit pas.
Restaurer la confiance de l’opinion publique est une bonne chose, mais le véritable but que nous devons nous fixer, celui qui dépasse toute stratégie politicienne et se fonde sur l’intérêt général, doit être de garantir réellement la sécurité sanitaire. Encore faut-il s’en donner les moyens en n’ayant pas peur de dénoncer les travers de la chaîne du médicament telle qu’elle fonctionne aujourd’hui. Encore faut-il oser dénoncer le fait que certaines décisions publiques se prennent sous influence et que cela n’est pas acceptable. Encore faut-il oser entreprendre de construire un mur parfaitement étanche entre la décision publique, qui ne peut être fondée que sur l’intérêt général, et les intérêts privés.
C’est justement dans cette optique que les socialistes et les écologistes ont, en partenariat avec les communistes, œuvré à renforcer certaines dispositions de ce texte et à en combler les nombreuses lacunes.
À l’Assemblée nationale, tout d’abord, les députés sont parvenus à apporter des améliorations sensibles, notamment sur trois points : la question de la protection des lanceurs d’alerte, d’abord, l’obligation pour les membres de groupes de travail ayant pour objet l’avenir des médicaments de faire, eux aussi, une déclaration d’intérêts, ensuite, la suppression dans la composition du conseil d’administration de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé des membres des entreprises qui produisent et commercialisent des médicaments et des produits de santé, enfin.
Malgré les efforts de nos collègues députés socialistes, écologistes et communistes et les quelques avancées obtenues, les mesures introduites par le texte restaient cependant très insuffisantes.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, vous l’avez bien compris, tel qu’il était arrivé au Sénat, ce projet de loi n’était pas acceptable.
Je tiens à remercier M. le rapporteur, Bernard Cazeau, du travail très important qu’il a fourni. Je veux également saluer l’œuvre collective de grande qualité réalisée par mes collègues membres de la commission des affaires sociales, malgré le rythme extrêmement rapide imposé par le Gouvernement, lequel nous a obligés à travailler dans la précipitation, avec un calendrier peu favorable, puisque l’examen de ce projet de loi intervient immédiatement après le renouvellement partiel du Sénat, et donc en pleine période d’installation des nouveaux sénateurs, dont je fais partie.
Toutefois, grâce à la réflexion et aux amendements de qualité adoptés par la commission, de nombreuses améliorations ont été intégrées au texte qu’il nous est aujourd’hui donné d’examiner. Je ne les citerai pas toutes, elles l’ont déjà été. Je tiens cependant à rappeler quatre d’entre elles : la consultation par le public des déclarations publiques d’intérêts, qui seront accessibles gratuitement, se trouvera facilitée, ce qui permettra une plus grande transparence ; la publicité des séances des commissions, conseils et instances collégiales d’expertise sera effective ; les étudiants en médecine seront davantage protégés de l’influence de l’industrie pharmaceutique ; le Gouvernement remettra un rapport au Parlement sur l’avenir des visiteurs médicaux.
Très clairement, notre volonté a été de ne pas nous contenter d’adopter un projet de loi se satisfaisant d’un discours, certes intéressant, mais très général.
Nous ne le savons que trop bien : le diable se cache souvent dans les détails et apparaît lors de la mise en œuvre des mesures adoptées. Aussi l’examen de ce texte en séance publique aujourd’hui et demain doit-il être l’occasion de perfectionner certains dispositifs.
Pour commencer, il convient de s’assurer que les liens d’intérêts entre la décision publique et l’industrie pharmaceutique sont, une fois pour toutes, jugulés. Il s’agit notamment – j’ai cru comprendre, monsieur le ministre, que vous étiez favorable à une telle mesure – d’ajouter à la liste des personnes soumises à l’obligation de déclaration publique d’intérêts les membres des cabinets des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale,…
Mme Aline Archimbaud. … afin d’accroître la transparence sur l’influence que peut avoir l’industrie pharmaceutique au sommet de l’État.
Par ailleurs, nous souhaitons nous assurer que les personnes physiques ou morales soumises à obligation de déclaration publique d’intérêts ou de publicité de leurs conventions et qui s’y soustrairaient partiellement ou totalement soient effectivement et équitablement sanctionnées. Par exemple, le montant de certaines amendes prévues par le texte nous paraît encore insuffisant : le lier au chiffre d’affaires des industries en question nous a semblé pertinent. Cela garantirait à la fois le caractère dissuasif de l’amende et la justice de la peine, dans un secteur que l’on sait très hétérogène, puisque les entreprises concernées par ces dispositions peuvent être des PME ou des multinationales.
Quant à la question des visiteurs médicaux, elle est trop importante pour demeurer en suspens dans ce projet de loi, plusieurs de mes collègues l’ont fait remarquer. La remise d’un rapport sur cette problématique est prévue pour le début de l’année 2013, mais il me semble important d’exiger dès à présent davantage qu’une simple promesse de réflexion.
Sans porter de jugement sur une profession difficile ni stigmatiser les visiteurs médicaux qui ne font que le travail pour lequel on les rémunère, nous devons toutefois rappeler, cela a d’ailleurs été souligné dans de nombreux rapports, que l’information par démarchage ou la prospection commerciale pour des médicaments soulèvent un problème flagrant de conflit d’intérêt.
Bien sûr, ce ne sont ni les individus ni leur intégrité qu’il faut mettre en cause. Je veux dès à présent insister sur ce point et le rappellerai lors de la discussion des articles.
C’est bien le système tel qu’il est conçu et le statut professionnel totalement commercial dans lequel ces personnes sont aujourd’hui enfermées qui posent problème, à tel point que des ajustements à la marge, à l’instar de l’expérimentation de la visite médicale de groupe à l’hôpital, ne suffiront pas à effacer l’incompatibilité de fait entre la nécessité d’une information objective des médecins et la rémunération des visiteurs médicaux par les laboratoires pharmaceutiques, rémunération intrinsèquement liée à leur performance commerciale.
C’est la raison pour laquelle nous avons déposé deux amendements d’une importance capitale à nos yeux, pour parvenir réellement à pallier les défaillances avérées du système du médicament.
Le premier amendement tend à mettre fin, à compter du 1er janvier 2014, à la délivrance de nouvelles autorisations d’exercice de la profession de visiteur médical et donc à placer la profession en « extinction progressive ». Bien évidemment, il s’agit non pas de mettre 18 000 personnes au chômage, mais au moins d’empêcher de nouveaux recrutements et le renflouement de ce corps, qui rend sa reconversion toujours plus difficile.
Le second amendement vise à exiger du Gouvernement qu’il remette au Parlement, avant le 1er janvier 2013, un rapport évaluant l’intérêt et le coût pour les finances publiques de la constitution d’un corps public rattaché à la Haute Autorité de santé et chargé de l’information des professionnels de santé. Ce rapport devra également présenter les possibilités de reconversion offertes aux visiteurs médicaux, sachant qu’il doit s’agir d’un processus inscrit dans la durée et mené sérieusement avec tous les partenaires.
Mieux maîtriser l’influence des laboratoires pharmaceutiques nous est en effet apparu comme une nécessité impérieuse d’intérêt général. Mais il était également primordial de garder à l’esprit le point de vue des patients, notamment ceux qui sont atteints du cancer, du sida ou de maladies rares.
De nombreuses associations de malades nous ont alertés sur l’importance dans le traitement des personnes qu’elles représentent du système des autorisations temporaires d’utilisation. En effet, ces dernières permettent de faire face à des situations intolérables, alors que les molécules nécessaires sont encore à l’étude et que les résultats des essais sont très positifs.
Mme Aline Archimbaud. Par le biais de plusieurs amendements, nous nous assurerons que le renforcement de la sécurité sanitaire ne se fera en aucun cas au détriment de l’accès des malades aux soins, tout en encadrant plus fermement le système des ATU, de manière à éviter les éventuels détournements de ce dispositif.
Dans le même état d’esprit de protection des usagers du système de santé, nous avons déposé plusieurs autres amendements.
Il s’agira notamment de rendre possibles les actions de groupe, qui se substitueront au véritable parcours du combattant que doivent en général affronter les victimes sanitaires, souvent atteintes psychologiquement ou physiquement et démunies face à de grands groupes industriels qui possèdent la capacité économique et judiciaire de retarder les procédures.
Il s’agira aussi de renforcer les droits des victimes d’accidents médicamenteux.
Parce qu’un seul projet de loi, même modifié par nos amendements, ne suffira certainement pas à régler les dysfonctionnements de notre système de santé, nous avons également souhaité prolonger la réflexion dans le cadre de deux rapports.
J’ai d’ores et déjà évoqué l’idée d’un rapport sur les visiteurs médicaux, renforcé par la création d’une mission parlementaire que M. le rapporteur a évoquée tout à l’heure.
Laissez-moi vous dire quelques mots du second rapport, qui portera sur une analyse globale du système d’information et de formation médicale, initiale comme continue. Outre le financement de la formation continue, pris en compte pour partie par l’article 18 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, il s’agira en effet de prendre la mesure de l’ensemble des enjeux et des besoins, afin d’assurer une formation pertinente des professionnels de santé tout au long de la vie. La perspective retenue est de s’appuyer sur les recommandations déjà émises lors des Assises du médicament et d’en proposer des mises en œuvre concrètes, efficaces et rapides.
Vous l’aurez compris, nous ne nous satisferons donc pas d’un texte trop général pour être autre chose qu’une loi alibi. L’affaire du Mediator l’a souligné, la sécurité sanitaire est un sujet bien trop important pour que nous fassions preuve d’immobilisme.
Nous voulons prendre nos responsabilités et passer des bonnes intentions d’affichage aux actes ! Les amendements que nous nous apprêtons à défendre et que je vous invite à soutenir, mes chers collègues, vont tous dans ce sens. Aujourd’hui, au sein de ce Sénat renouvelé, je ne peux pas imaginer une seule seconde que nous n’y parvenions pas.
Bien sûr, nous ne savons pas quel sort sera ensuite réservé au texte en commission mixte paritaire ni, en dernier ressort, si celle-ci échouait, à l’Assemblée nationale. Mais je vous rappelle, monsieur le ministre, que vous avez affirmé vouloir empêcher un nouveau Mediator.
Mme Aline Archimbaud. Or, dans sa version initiale, ce texte n’apportait selon nous aucune garantie à cet égard.
Mme Aline Archimbaud. Dans la mesure où vous n’avez pas renoncé à un tel objectif, j’espère que les membres de votre famille politique ne reviendront pas, par un jeu systématique de « détricotage », sur les avancées salutaires qu’auront permises nos travaux.
Je souhaite qu’au-delà des appartenances partidaires un débat constructif soit mené dans l’unique souci de la santé publique et, donc, de l’intérêt général. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. Jean Desessard. C’était un discours qui avait du cachet ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, prenant la mesure de la crise de confiance ouverte par les révélations sur le Mediator, commercialisé en France pendant trente-trois ans et consommé par cinq millions de nos compatriotes sans que notre système de sécurité sanitaire ait pu éviter cette situation, le Gouvernement présente aujourd’hui un projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.
Une Réforme du système du médicament, enfin : tel était le titre du rapport de la mission commune d’information du Sénat sur le Mediator, rendu au mois de juillet dernier. Cet « enfin » avait un sens. Comment ne pas constater avec douleur semblable défaillance de la chaîne du médicament dans notre pays, cinq ans après le rapport Médicament : restaurer la confiance de la mission commune d’information sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments, que j’avais eu l’honneur de présider ? Nous avions déjà insisté sur les nombreuses incohérences du système en vigueur depuis quinze ans. Tous aujourd’hui reconnaissent la lucidité du diagnostic et la pertinence des recommandations que nous avions alors formulées. Celles-ci sont restées, hélas ! lettre morte.
Après les incidents qui ont jalonné la décennie précédente – Vioxx, cérivastatine, Acomplia, Avandia –, après la gestion de la grippe H1N1 l’an dernier, le drame du Mediator aura eu enfin raison de l’inaction, puisque nous examinons aujourd’hui votre projet de loi, monsieur le ministre.
Cette affaire a révélé clairement la responsabilité des laboratoires Servier, mais aussi jeté le discrédit sur tout un système. Comment ce médicament a-t-il pu obtenir une autorisation de mise sur le marché pour un produit dérivé des amphétamines, comme l’indiquent sa formule et son nom, le benfluorex ? Comment a-t-il pu être refusé en Belgique, retiré en Italie en 1999 et en Espagne en 2004, sans que l’AFSSAPS réagisse ? Comment les signalements de ses effets néfastes ont-ils pu être ignorés aussi longtemps ?
Nos concitoyens se posent légitimement toutes ces questions. Notre devoir est aujourd’hui de leur redonner confiance dans le médicament. Ce n’est pas la publication, précipitée et sans explication, d’une liste de produits sous surveillance qui peut y contribuer ! Bien au contraire...
Nous devons rebâtir un édifice solide de sécurité sanitaire, qui apportera à nos concitoyens les garanties qu’ils sont en droit d’attendre.
Il ne s’agit pas ici de stigmatiser les laboratoires pharmaceutiques, qui ont permis, par leur recherche et leurs découvertes, d’immenses progrès médicaux, les experts ou les médecins dans leur ensemble. Mais force est de constater une certaine porosité entre évaluateurs et évalués, contrôleurs et contrôlés. Cette situation équivoque, peut-être source de fantasmes, est certainement à l’origine de dérives.
M. Jean-Michel Baylet. C’est bien vrai !
M. Gilbert Barbier. Comment se fait-il qu’en France nous disposions d’un panel de 12 000 médicaments différents, contre 2 500 dans d’autres pays ? Les Français consomment trop de médicaments ; ceux-ci leur sont trop souvent prescrits. Beaucoup de ceux qui arrivent sur le marché sont peu efficaces. Il y a eu, à l’évidence, trop de complaisances !
La réforme doit donc reposer sur des valeurs fondamentales, parfois oubliées au fil des années : déontologie, transparence, efficacité et, surtout, souci de l’intérêt des patients.
Les dispositions de l’article 1er du projet de loi marquent à cet égard une avancée : elles prévoient l’obligation, pour tout expert mais aussi pour certains agents et les dirigeants des autorités et agences de sécurité sanitaire, de déclarer leurs liens d’intérêts et d’actualiser régulièrement cette déclaration.
La commission des affaires sociales est allée encore plus loin en prévoyant que le directeur général de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, l’AFSSAPS, ainsi que les présidents de la Haute Autorité de santé, l’HAS, de l’Institut national du cancer, l’INCA, et de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’INSERM, devront n’avoir entretenu aucun lien d’intérêts dans les trois ans précédant leur nomination ; on peut être quelque peu sceptique sur cette proposition.
Certains voudraient tout interdire, ou recourir à la seule expertise interne. Soyons sérieux. Dans certains domaines très spécialisés, les experts compétents ne sont pas légion : pourquoi devrions-nous disqualifier un expert sous prétexte qu’il a participé à des recherches financées par l’industrie pharmaceutique ?
Un lien d’intérêts ne constitue pas en soi un conflit d’intérêts : c’est en fonction de la décision qui doit être prise qu’un lien peut devenir un conflit.
Il me semble que l’article 1er devrait mieux répondre au problème de la transparence des procédures. J’ai souvent dénoncé l’absence de publicité des travaux des agences, notamment l’anonymat des votes. Faire la plus grande lumière sur la position des experts, y compris minoritaires, est de nature à lever la suspicion.
Le projet de loi prévoit également la mise en place d’un Sunshine Act à la française. Je suis évidemment favorable à une transparence totale sur les conventions conclues entre les entreprises et les professionnels de santé, ainsi que sur les avantages qu’elles consentent à ces derniers.
Toutefois, mes chers collègues, ne cherchons pas à laver plus blanc que blanc ! Personnellement, je plaide pour la mise en place d’un seuil, au moins symbolique, que je propose de fixer à cent euros par an – à défaut, la fixation pourrait intervenir par décret. Je crois qu’il faut aussi mieux associer les ordres professionnels au contrôle des conventions.
Concernant la gouvernance des produits de santé, le projet de loi prévoit de changer le nom de l’AFSSAPS – Pourquoi pas ? Il s’agit de montrer qu’une page est tournée – et de donner à cette agence une mission et des compétences plus larges.
Personnellement, je regrette que l’on n’ait pas été plus loin. Nous avons trop de structures, trop d’agences : la commission d’autorisation de mise sur le marché de l’AFSSAPS considère le rapport bénéfices-risques du médicament et doit autoriser la mise sur le marché, l’AMM, si ce bilan est favorable ; la commission de la transparence de la HAS détermine pour sa part le service médical rendu en vue d’un éventuel remboursement ; puis interviennent encore la Commission nationale de pharmacovigilance et le Comité économique des produits de santé, le CEPS, qui fixe les prix des médicaments...
On me rétorquera que la division des compétences et l’indépendance des structures renforcent l’émergence de problématiques nouvelles et la sécurité. Je n’en suis pas convaincu. Je crois plutôt que cette division et cette indépendance favorisent les dysfonctionnements – nous l’avons bien vu.
J’aurais préféré qu’une seule commission existe, chargée de la mise sur le marché du médicament, de la détermination du niveau de son remboursement et du suivi de ses effets indésirables. Peut-être était-ce trop révolutionnaire !
Le projet de loi comporte d’autres avancées. C’est le cas des études de sécurité et d’efficacité post-autorisation et de la réforme de la pharmacovigilance. Sur ce denier sujet, il était devenu nécessaire d’ouvrir le système pour donner plus de place aux avis contradictoires – lanceurs d’alerte, praticiens, patients, associations…
Parmi les avancées, il y a également les essais contre comparateurs : parce que – il est vrai – les nouveaux médicaments sont trop souvent de simples copies, il convient de les évaluer en fonction de l’amélioration qu’ils apportent par rapport à d’autres traitements qui existent déjà.
L’encadrement des prescriptions hors autorisation de mise sur le marché ainsi que celui de la publicité constituent d’autres avancées.
Concernant la visite médicale, je suis en revanche plus dubitatif devant l’expérimentation proposée. L’idée peut paraître intéressante, mais la généraliser sera difficile : que se passera-t-il dans les petits hôpitaux, pour les spécialités dont le nombre de professionnels est limité, pour les prescriptions restreintes ?
Quoi qu’il en soit, j’aurai l’occasion d’aborder de nouveau quelques-uns de ces sujets lors de l’examen des amendements que j’ai déposés. Certains d’entre eux me paraissent fondamentaux pour que ce projet de loi puisse être appliqué. Dans sa version actuelle, celui-ci comporte certains excès ; j’espère que notre discussion permettra de les corriger. (Applaudissements sur les travées du RDSE. – MM. Jean-Marie Vanlerenberghe et Alain Milon applaudissent également.)
M. Jean-Michel Baylet. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi défendu devant nous par M. le ministre marquera un grand pas pour la sécurité sanitaire, si nous le préservons des clivages politiques que certains veulent introduire à son sujet.
Il est fondé en effet sur une inversion de la charge de la preuve : ce n’est plus aux autorités de sécurité sanitaire de démontrer la nécessité d’un médicament, mais à ses concepteurs d’apporter la preuve de ses bienfaits ; ce n’est plus aux patients, mais aux industriels, de faire valoir leurs droits. Inverser la charge de la preuve permet tout simplement de faire prévaloir la quête de la sécurité sur celle du profit.
Je trouve intéressant qu’en plus de ce principe fondateur d’autres principes soient inscrits dans la loi, comme ceux de l’indépendance de l’expertise, de la transparence ou encore de l’évaluation permanente.
Que ces principes y figurent montrent, s’il en était besoin, que ce projet de loi n’est pas une adaptation marginale ; il est une réponse systémique à une crise elle-même systémique.
Cette réponse était indispensable. Rien ne serait pire en effet que la défiance de nos concitoyens à l’égard du système sanitaire. Or, malheureusement, nous apercevons les prémices d’une telle défiance dans certains domaines, notamment celui de la vaccination – à tel point qu’on voit réapparaître des cas de rougeole…
Espérons aussi que notre discussion irriguera le débat européen. On nous dit que ce projet de loi est regardé en Europe, qu’il est précurseur. Vous-même avez dit, monsieur le ministre, que « disposer, dès l’AMM, de données comparatives avec le médicament de référence s’il existe, c’est un combat qui doit se mener au niveau européen. » Il est temps de le faire ; mais, dans votre discours, j’ai perçu un certain scepticisme…
Aussi serait-il intéressant de savoir où en est notre système de sécurité sanitaire par rapport à celui de nos voisins européens, et où il en sera lorsque nous aurons adopté ce projet de loi – légèrement modifié, je l’espère, par rapport au texte de la commission.
Je veux maintenant évoquer certaines dispositions, en commençant par celles qui concernent les conflits d’intérêts. Sur cette question passionnante, j’ai particulièrement apprécié le rapport Sauvé qui, comme le fait celui de l’Inspection générale des affaires sociales consacré à l’expertise sanitaire, souligne qu’un lien d’intérêts ne constitue pas en soi un conflit d’intérêts.
Si donc c’est une bonne chose que l’obligation de déclaration des liens d’intérêts soit extensive, que les experts en situation de conflit d’intérêts ne puissent plus participer aux décisions – principes dont on peut seulement souhaiter qu’ils s’appliquent aussi à d’autres domaines –, il faut garder à l’esprit qu’un lien d’intérêts n’équivaut pas nécessairement à un conflit d’intérêts.
Vous avez proposé, monsieur le rapporteur, d’interdire à tout responsable d’agence sanitaire d’avoir entretenu un lien d’intérêts pendant les trois ans précédant sa nomination. En commençant l’étude de ce projet de loi, je pensais moi-aussi que c’était la meilleure solution.
Mais le système sanitaire est très spécifique. On peut avoir mené de grandes recherches pour le compte de laboratoires sans être pour cela un chercheur ou un expert corrompu ! D’ailleurs, ne pas avoir mené de recherches ne me semble pas être une preuve de reconnaissance, donc de compétence… Cette fois encore, il serait très utile à nos débats de savoir quelle est la situation dans d’autres pays : les experts des agences publiques y sont-ils totalement dépourvus de liens d’intérêts avec les industriels ?
Dans ces conditions, il me semble beaucoup plus pertinent de laisser les commissions parlementaires apprécier, lors de la nomination du responsable d’une agence sanitaire, si un lien d’intérêts constitue un conflit d’intérêts et s’il est opportun de retenir la candidature proposée.
Cependant le projet de loi, dans sa version actuelle, ne prévoit pas clairement que les commissions du Parlement auront à se prononcer sur ces futures nominations, en particulier celle du directeur de l’ancienne AFSSAPS – puisqu’il est question de changer son nom. Qu’en est-il, monsieur le ministre ?
S’agissant maintenant de la déontologie, je ne pense pas que nous devions attendre, pour voter les dispositions de ce projet de loi, qu’une haute autorité de déontologie soit créée. Ne cherchons pas d’excuse pour reporter encore ce débat ! Franchissons la première étape : si une telle autorité doit ensuite être créée, elle sera nécessairement compétente.
Comme d’autres, j’aurais aimé avoir plus de précisions sur la suite qui sera donnée au rapport Sauvé ; mais je comprends, monsieur le ministre, que vous ne puissiez pas nous les apporter.
De toute façon, je suis convaincue que la transparence et l’attention des associations suffiront à garantir le respect des règles. À cet égard, je ne comprends pas que la commission des affaires sociales ait adopté des dispositions qui font peser un doute, une suspicion même, sur l’indépendance des associations de patients, au point de les écarter de fait du système d’expertise. Veillons à ce que l’idéologie ne nous éloigne pas du bon sens et de l’intérêt général !
L’obligation de transparence sur les avantages consentis constitue un autre grand progrès. Comme vous, monsieur le ministre, je trouve bon que, dans ce projet de loi, il ne soit pas question de seuil. La simplicité a le mérite de la clarté.
À propos de la transparence et de la charte de l’expertise – sujets dont nous allons débattre –, je veux rappeler d’abord que notre premier objectif est de garantir l’indépendance et l’impartialité de l’expertise et de la décision publique. Or l’indépendance ne repose pas uniquement sur la transparence et l’absence de conflits d’intérêts avec les industriels.
Nous avions longuement discuté de cette question dans le cadre du Grenelle de l’environnement et le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales est parvenu à la même conclusion : au-delà de la transparence, l’indépendance repose sur la pluralité des expertises et le principe du contradictoire. Cela suppose de faire une plus grande place aux experts extérieurs et aux associations.
Je rappelle ensuite que M. le rapporteur a soutenu la suppression de la charte de l’expertise, au motif qu’elle ne serait pas suffisamment normative et qu’il appartiendrait au législateur de prendre des dispositions – aucune, d’ailleurs, ne figure dans le texte de la commission… Mais le législateur ne peut ni ne doit entrer dans le détail de chaque situation où un lien d’intérêts devient un conflit d’intérêts !
Il lui appartient en revanche de fixer des principes pour encadrer l’expertise. C’est pourquoi nous présenterons un amendement visant à rétablir la charte et à poser les principes qui devront s’appliquer à l’expertise : transparence, pluralité, principe du contradictoire et bien sûr impartialité.
Ce projet de loi introduit d’immenses progrès dans le domaine de la pharmacovigilance. Permettez-moi de décerner un satisfecit particulier s’agissant de la protection du statut des lanceurs d’alerte. Il s’agit d’un sujet sensible, dont il avait beaucoup été question dans le domaine de l’environnement, sans que nous puissions avancer ; tant mieux si nous le pouvons dans le domaine de la sécurité sanitaire.
Nous présenterons néanmoins certains amendements pour nous assurer qu’à côté du lanceur d’alerte le fait d’alerter sera lui-même protégé.
Espérons, monsieur le ministre, que ces dispositions pourront s’appliquer à d’autres domaines, notamment celui de la santé environnemental.
Permettez-moi enfin de dire un mot des sanctions. Le dispositif qui avait été envisagé instaurait un véritable arsenal juridique. Nous savons que seule une sanction financière majeure pourra être audible, compte tenu des sommes en jeu. Je doute vraiment que la baisse du prix du médicament, en revanche, puisse constituer une sanction audible.
Je sais qu’il s’agit d’un sujet trop complexe pour être traité dans le cadre du présent projet de loi, si important soit-il. Pour ma part, je serais très favorable à l’ouverture d’une réflexion sur les class actions – même si je n’aime pas employer cet anglicisme.
En effet, la procédure prévue pour l’indemnisation des victimes, dans le système français, est perçue par les associations de patients comme trop restreinte. Aux États-Unis, au contraire, son champ d’application est extrêmement large, puisqu’il peut s’étendre aux droits civiques, au droit de la consommation, au droit de l’environnement et, bien entendu, au droit de la santé ; il s’agit, dans ce pays, d’un véritable système de régulation sociale.
Nos amis députés ont déposé une proposition de loi ; je pense qu’à un moment ou à un autre il nous faudra reparler de ce sujet dans cet hémicycle.
Naturellement, le présent projet de loi ne règle pas tous les problèmes – il faudrait plus de prévention et moins de médicaments ; naturellement, l’opposition au Gouvernement dira qu’il ne va pas assez loin, qu’il est en retrait. Une opposition, finalement, est là pour s’opposer ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Ici, c’est vous qui êtes dans l’opposition !
Mme Chantal Jouanno. Il reste néanmoins que ce projet de loi marque une immense avancée. Nous pouvons et nous devons nous entendre à son sujet, au-delà des postures, si chacun accepte de faire un pas dans le bon sens ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.)
M. Ladislas Poniatowski. Excellent !
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, beaucoup de choses ont déjà été dites. Pour ma part, je voudrais d’abord rendre hommage à Marie-Thérèse Hermange et à François Autain, qui ont, avec constance et acharnement, en faisant preuve d’une grande honnêteté intellectuelle, suivi ce dossier de la politique du médicament.
En effet, si le rapport rédigé par Marie-Thérèse Hermange et Anne-Marie Payet après le scandale du Vioxx et intitulé « Médicament : restaurer la confiance », rapport déposé le 8 juin 2006, avait tant soit peu retenu l’attention du gouvernement d’alors, il est fort probable que l’affaire du Mediator n’aurait pas existé, à tout le moins pas dans de telles proportions, car ce sont essentiellement ses préconisations que nous examinons aujourd’hui à travers ce projet de loi.
Vice-présidente de la mission commune d’information, je n’ai pas pu assister, en raison des élections sénatoriales, à l’ensemble des auditions ; néanmoins, j’ai été très attentive aux soixante-cinq propositions qui figurent dans le rapport. Elles sont toutes très importantes, car nous sommes tous des malades en puissance.
Lors de l’examen des articles, j’interviendrai sur les dispositions relatives à la pharmacovigilance. Il se trouve que la mission commune d’information s’est rendue aux États-Unis. Nous avons pu y examiner à la fois la question des class actions et les dispositifs de pharmacovigilance. Ces derniers sont très développés dans ce pays, pour des raisons structurelles qui tiennent au système de soins américain et à la place des assurances.
Je limiterai mon intervention à la question des conflits d’intérêts, que les orateurs précédents ont déjà largement évoquée.
Cette question constitue le volet le plus emblématique du présent projet de loi. Car c’est bien dans ce terreau de la confusion des genres que germent les affaires comme celle du Mediator, affaires qui ne se limitent pas, hélas ! au domaine de la sécurité sanitaire.
La loi doit établir une étanchéité la plus absolue possible entre les intérêts marchands et la protection de la santé des personnes.
C’est ce à quoi tend le titre Ier du présent projet de loi en unifiant les dispositions concernant les déclarations d’intérêts des experts et en les généralisant à l’Institut national du cancer et aux agences régionales de santé.
Comme le recommandait le rapport de la mission commune d’information, l’article 1er établit un socle commun à tous les experts, et parties prenantes au système de veille sanitaire du médicament.
Ce texte tend donc à simplifier le dispositif, à en améliorer la transparence tout en l’universalisant. C’est propre à établir une protection effective.
Sur cette base solide, nos collègues députés et notre rapporteur ont encore renforcé le dispositif en étendant aux conjoints, aux ascendants et aux descendants l’interdiction de liens indirects personnels ou en étendant la compétence de la commission de déontologie créée par la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin », aux personnels des conseils et agences sanitaires soumis à déclaration publique d’intérêts.
Je salue particulièrement la clarification opérée par notre rapporteur visant à bien établir que la déclaration publique d’intérêts concernera autant les dirigeants des autorités sanitaires que les membres d’instances collégiales.
De même, l’article 2 du texte, notre Sunshine Act, fixe enfin les conditions de publicité des relations entre les acteurs du système de santé et les entreprises. Là encore, je salue le renforcement du dispositif opéré par notre commission des affaires sociales afin, par exemple, d’assurer la publicité des liens entre les entreprises et les établissements qui assurent la formation initiale des futurs professionnels de santé ou d’imposer la publication des rémunérations versées.
Nous avons également interdit aux entreprises de passer des conventions d’hospitalité avec les étudiants ou de leur octroyer des avantages, et ce afin de limiter au maximum l’emprise des laboratoires sur l’Université.
Il restera à régler le problème du financement de la recherche. C’est une équation difficilement soluble et nous ne l’avons pas encore résolue. Clairement, comme cela se pratique un peu partout dans le monde, il faudrait que les laboratoires puissent subventionner des universités, notamment par des dons, plutôt que d’aider directement les étudiants.
Enfin, ce dispositif serait un vœu pieux en l’absence de mécanisme de sanctions. C’est l’objet de l’article 3, qui prévoit les sanctions pénales applicables en cas de non-respect des obligations de déclaration pesant sur les personnes ou les entreprises. Ces sanctions pénales me semblent adaptées.
L’architecture générale du dispositif de lutte contre les conflits d’intérêts sanitaires dépasse ce seul texte. Nous attendons d’examiner le projet de loi Sauvet, actuellement en instance à l’Assemblée nationale. Le problème des conflits d’intérêts concerne l’ensemble de la vie publique.
Si, sur le papier, l’ensemble de ce dispositif semble propre à prévenir les conflits d’intérêts dans le domaine du médicament et des produits de santé, tout dépendra évidemment de la manière dont il sera concrètement mis en œuvre.
À cet égard, monsieur le ministre, je note que vous avez prévu une clause de revoyure au bout de trois ans destinée à évaluer son efficacité. C’est très important,…
Mme Nathalie Goulet. … car, comme l’a souligné la mission commune d’information, une fois certains établissements créés, leur mode de fonctionnement n’est jamais vérifié. Plusieurs d’entre eux ne communiquent pas les uns avec les autres, alors que cette communication est essentielle.
Favorable à l’instauration de mesures coercitives pour faire venir les médecins en zones sous-médicalisées, j’ai été déclarée persona non grata par le corps médical. (Marques d’étonnement amusé sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
Mme Nathalie Goulet. Gacé ne fait pas le printemps, monsieur le ministre ! Cela étant, j’ai été très contente de vous recevoir, même si ce n’était pas à mon invitation, dans mon département. C’était un honneur.
Mme Nathalie Goulet. Et une réussite, en effet ! Il n’en demeure pas moins que je suis favorable aux mesures coercitives pour faire venir les médecins en zones rurales !
Mme Nathalie Goulet. Parce qu’on ne m’a pas laissé la parole !
Mme Nathalie Goulet. La Haute Assemblée doit être éclairée sur ce problème orno-ornais.
Lorsque M. le ministre est venu à Gacé inaugurer un centre de médecine ambulatoire, les médecins et le député local lui ont dit tout le mal qu’ils pensaient des clauses coercitives. Pour ma part, je pense tout le contraire, mais je n’ai pas pu m’exprimer sur ce sujet.
Ces considérations me donnent l’occasion d’attirer votre attention, mes chers collègues, sur les mesures nécessaires en matière de formation.
Environ la moitié des médecins qui prescrivent des médicaments contre le cholestérol n’ont pratiquement jamais mis leurs patients au régime. Ce taux atteint près de 30 % pour ce qui concerne les maladies cardiovasculaires, dont on sait qu’elles peuvent être largement évitées avec une alimentation plus saine.
Il a été insuffisamment question, aujourd’hui, des dernières assises du médicament. Pourtant, son groupe de travail consacré à la formation et à l’information sur les produits de santé, présidé par Alain-Michel Ceretti, a préconisé un certain nombre de mesures concernant la formation continue et initiale des professionnels de santé : rendre obligatoire la publication des déclarations publiques d’intérêts pour les enseignants ; interdire tout financement direct des laboratoires à destination des étudiants ; rendre obligatoire l’évaluation de la qualité des formations validées, qu’elles bénéficient ou non de financements de l’industrie.
En conclusion, monsieur le ministre, je reprendrai mon propos initial pour regretter que ce texte majeur pour l’évolution de notre système de santé n’ait abouti qu’en raison du scandale du Mediator, alors qu’on aurait pu traiter ce problème bien plus tôt. Mais mieux vaut tard que jamais !
Je souhaite que les procédures judicaires en cours fassent toute la lumière sur les responsabilités de façon à dissuader à jamais certains industriels de se comporter de façon bien légère en matière de sécurité sanitaire.
Nous sommes tous des malades potentiels. À ce titre, nous suivrons avec une particulière attention l’application du texte que vous soumettez aujourd’hui à notre examen. (Applaudissements sur les travées de l’UCR.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, n’étant pas médecin, je n’ai donc aucun lien avec l’industrie pharmaceutique. Le seul lien qui m’unit aux médicaments, c’est d’en consommer parfois, aussi rarement que possible. C’est donc en tant que potentiel patient que je m’exprimerai cet après-midi.
En préambule, je voudrais saluer le travail de notre rapporteur sur ce projet de loi – car il a proposé – et dire ceci à Mme Jouanno : ma chère collègue, même si nous sommes majoritaires au Sénat, nous sommes dans l’opposition ; mais, s’il vous plaît, ne confondez pas toutes les oppositions avec celles de la ville de Paris ! (Sourires sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – M. le rapporteur applaudit.)
Mme Nathalie Goulet. Oh !
M. Ronan Kerdraon. Compte tenu des conditions dans lesquelles la commission des affaires sociales a dû étudier ce texte, il ne lui a guère été propice de remédier à l’ensemble des confusions, imprécisions, imperfections ou ambiguïtés qu’il contient.
Mais je veux souligner que sa réflexion – notre réflexion – s’est construite autour du principe énoncé tout à l’heure par notre collègue Aline Archimbaud, à savoir « d’abord ne pas nuire », et ne pas nuire avant tout aux patients.
Le projet de loi qui nous est soumis aujourd’hui s’inscrit dans un contexte que chacun d’entre nous connaît : une perte de confiance de nos concitoyens dans notre système de santé.
C’est également toute l’industrie pharmaceutique qui est placée sur le banc des accusés.
C’est bien ce que signifie l’Inspection générale des affaires sociales dans son rapport sur le Mediator, rendu en janvier dernier, quand elle affirme : « La chaîne du médicament fonctionne aujourd’hui de manière que le doute bénéficie non aux patients et à la santé publique, mais aux firmes. »
Perte de confiance, disais-je, mise en lumière par l’affaire du Mediator, dernier scandale médical en date après tant d’autres.
Isoméride, Vioxx, Distilbène et Pondéral, la liste est longue des noms qui attestent en effet les trop nombreux dysfonctionnements de notre système de sécurité sanitaire.
Comme d’autres orateurs, je regrette qu’il ait fallu attendre ce drame du Mediator pour que le Gouvernement se saisisse enfin de la sécurité du médicament et des produits de santé pour tenter de la renforcer.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, à travers la succession de ces scandales sanitaires, c’est donc bien toute la chaîne du médicament qui est aujourd’hui sur la sellette.
Ces drames sont certes imputables à des comportements individuels, mais ils résultent aussi et surtout de graves défaillances des politiques publiques et du système français de pharmacovigilance.
Et pourtant, nombreux sont les travaux administratifs ou parlementaires rédigés sur le sujet. Je pense notamment à l’excellent travail de notre collègue Catherine Lemorton, députée, qui, en 2008, fut rapporteur d’une mission d’information à l’origine d’un rapport intitulé « Médicaments : prescrire moins, consommer mieux ».
Ses préconisations, adoptées à l’unanimité, n’ont jamais été suivies. C’est bien dommage !
Face à ces alertes, un défi s’imposait à l’État : mettre en place une réforme d’envergure de la pharmacovigilance, reconstruire notre politique du médicament pour redonner à notre pays un positionnement nouveau et moderne en Europe, le tout avec un objectif principal, celui de la protection et de la promotion de la santé publique.
Oui, mes chers collègues, des changements profonds sont nécessaires si l’on ne veut pas que s’aggrave encore davantage le sentiment de défiance à l’égard du médicament.
C’est au regard de ce défi que nous avons appréhendé le texte voté au Palais-Bourbon.
Certains nous reprochent d’être allés trop loin. Non, ce texte était imparfait sur un certain nombre de points, malgré les quelques avancées arrachées par les députés de gauche.
Nous nous félicitons, par exemple, de la création d’un portail Internet public qui recensera les données administratives et scientifiques sur les maladies et leurs traitements.
Nous nous félicitons également du fait que les laboratoires pharmaceutiques ne soient plus représentés au conseil d’administration de la nouvelle agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé.
Nous saluons aussi le dispositif qui tend à faciliter le développement des médicaments génériques.
Pour autant, la séparation claire entre les politiques de santé publique et l’industrie pharmaceutique, celle que les Français attendaient tant et que nous appelions de nos vœux, n’a pas eu lieu.
La commission des affaires sociales du Sénat, sous l’impulsion de son rapporteur, y a introduit de nouvelles avancées, qu’il a exposées dans son intervention.
Je souhaite véritablement que nos débats ainsi que les amendements présentés par le groupe socialiste-EELV permettent d’atteindre l’ambition initiale affichée : l’amélioration de l’indépendance et de la sécurité du système du médicament.
Je veux tout de même souligner ce qui, dans ce texte, apparaît comme une carence de taille, à savoir le renvoi quelque peu systématique au décret.
Mes chers collègues, ne vous méprenez pas : je connais la frontière entre ce qui relève du domaine législatif et ce qui relève du domaine réglementaire. Mais nous savons tous ce qu’il advient parfois des décrets d’application...
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Hélas !
M. Ronan Kerdraon. Revenons au texte.
Mes chers collègues, chacun d’entre nous est conscient qu’il est temps de doter la France d’une politique du médicament qui soit enfin tournée vers la santé publique, et uniquement vers elle, car le médicament n’est définitivement pas une marchandise comme les autres. Aussi, il convient en priorité de renforcer notre système de pharmacovigilance.
Quel bilan dresser de la situation actuelle ?
Notre système est en décalage avec les exigences contemporaines : cela fait trop longtemps que la culture du juridisme s’impose face à la culture du risque.
Par exemple, lors des travaux menés sur le Mediator, on a trop souvent entendu la phrase suivante : « on ne retire pas une autorisation de mise sur le marché comme cela ! »...
Observons toutefois qu’un changement culturel semble s’être amorcé : ces derniers mois ont été prononcées des suspensions de médicaments dont le rapport bénéfice–risque était mis en cause depuis des années... Il était temps !
Mais le système de notification français reste complexe et peu incitatif pour les professionnels de santé. Les méthodes de recensement utilisées aujourd’hui entraînent clairement une sous-estimation des risques.
Il est donc primordial d’encourager davantage les acteurs de la pharmacovigilance en simplifiant les procédures de déclaration de tout effet indésirable suspecté.
Qui sont aujourd’hui ces acteurs ?
À l’échelon national, il s’agit du département de pharmacovigilance de l’AFSSAPS, de la Commission nationale de pharmacovigilance et du comité technique de cette dernière.
À l’échelon régional, il s’agit des centres régionaux de pharmacovigilance, les CRPV, des professionnels de santé, des patients et associations de patients ainsi que des entreprises du médicament.
Si je me félicite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement d’origine socialiste créant un statut de lanceur d’alerte en matière de pharmacovigilance et protégeant les salariés signalant les cas de corruption dans leur entreprise, il n’en demeure pas moins qu’une réforme de fond de la pharmacovigilance est nécessaire. Les bases en sont désormais posées par le rapport de notre collègue Bernard Cazeau.
Venons-en justement à l’AFSSAPS.
En théorie, tous les experts de l’AFSSAPS doivent, depuis 1993, déclarer leurs liens, en particulier financiers, avec les laboratoires. Or force est de reconnaître qu’ils ne le font pas systématiquement.
C'est la raison pour laquelle nous proposons un renforcement de cette transparence par une déclaration des liens non seulement personnels, mais aussi familiaux que les experts entretiennent avec les laboratoires et l’industrie pharmaceutique. Il s’agit là d’une question de déontologie.
En ce qui concerne le fonctionnement de l’Agence, le constat est sans appel. Je cite le rapport d’enquête sur le Mediator de l’IGAS de janvier 2011 : « surchargée de travail, empêtrée dans des procédures juridiques lourdes et complexes, […] bridée par la crainte des contentieux avec les firmes », l’Agence est apparue, dans l’affaire du Mediator, comme « une structure lourde, lente, peu réactive, figée, malgré la bonne volonté et le travail acharné de la plupart de ses agents, dans une sorte de bureaucratie sanitaire ».
Son activité aboutit, selon le rapport, « à une forme de coproduction [avec les firmes] des expertises et des décisions qui en découlent ». C’est intolérable !
Suffira-t-il alors de modifier le nom de l’Agence pour en changer la gouvernance et les pratiques ? Je crains au contraire que nous ne nous situions là davantage sur le plan du symbole que sur celui des actes.
C’est pourquoi je me félicite de l’exclusion des laboratoires du conseil d’administration de l’Agence.
Mais qu’en est-il du département interne de pharmacovigilance, situé dans la même direction que le département chargé de délivrer les autorisations de mise sur le marché ?
Le texte modifie les prérogatives de l’Agence en matière de diffusion de message sanitaire ou d’avis de rappel : elle a désormais la possibilité d’alerter, outre l’opinion publique, les professionnels de santé. C’est très bien.
L’Agence pourra également désormais prononcer des sanctions administratives et financières accompagnées d’une astreinte journalière. Ce matin, la commission a émis un avis favorable sur un amendement portant le montant de cette astreinte à 2 500 euros par jour : pour les industriels du médicament qui, au titre de leurs profits, engrangent des millions, cette sanction est soutenable ! On est encore un peu loin de la préconisation de l’IGAS, consistant à imposer des sanctions proportionnées aux enjeux en cas de non-respect des engagements par les laboratoires pharmaceutiques.
Alors que les patients bénéficient aujourd’hui de l’autorisation de déclarer les effets indésirables susceptibles d’être liés aux médicaments, il aurait fallu soumettre l’ensemble des professionnels de santé, et non pas seulement certaines catégories de médecins, à l’obligation de notifier de tels effets.
Il convient de réformer l’ensemble des modalités de notification. Élargir le champ des notificateurs ne suffit pas, il faut aussi favoriser la notification en l’explicitant et en simplifiant les modalités de déclaration.
La pharmacovigilance doit devenir une habitude.
Cela passe bien évidemment par la formation initiale et continue des professionnels de santé : pourquoi ne pas ainsi intégrer la pharmacologie, la pharmacovigilance, la thérapeutique et l’économie de santé dans le cursus universitaire des étudiants en médecine ? Quant à la formation continue, il devient unanimement admis qu’elle doit être indépendante des laboratoires.
Cela pose naturellement la délicate question du rôle des visiteurs médicaux.
Dans son « rapport sur la pharmacovigilance et gouvernance de la chaîne du médicament », remis en juin dernier au ministre de la santé, l’IGAS a préconisé de mettre fin à la visite médicale.
Comment savoir toutefois si la suppression des visiteurs médicaux est la bonne solution ? Certes, la profession est sur le gril depuis déjà quelques années : de 24 000 en 2004, le nombre de visiteurs médicaux a chuté à 18 000, sous l’effet conjoint de la réforme de l’assurance maladie et des mesures prises pour baisser le coût des médicaments ; je pense notamment à la montée en puissance des génériques.
Quelle est la mission des visiteurs médicaux ? Ils font connaître aux praticiens libéraux et hospitaliers ainsi qu’aux pharmaciens les médicaments produits par leur employeur. L’objectif est évidemment de les inciter à les prescrire ou à les proposer.
On le voit bien : les risques de dérives existent.
C’est pourquoi une charte de la visite médicale avait été mise en place en 2004. Aux termes de ce document, « le délégué médical ne doit pas utiliser d’incitations pour obtenir un droit de visite ni offrir, à cette fin, aucune rémunération ou dédommagement ».
En 2009, un rapport de la Haute Autorité de santé notait toutefois que, si « les cadeaux remis aux médecins par des délégués médicaux ont été totalement interdits, même ceux de valeur négligeable », « lors des audits par les organismes certificateurs, l’accès aux informations a parfois suscité des difficultés, pour des documents non mentionnés dans le référentiel et que des auditeurs souhaitaient consulter ».
Un autre rapport de l’IGAS a épinglé des méthodes « visant notamment à circonvenir les capacités de réactions critiques des médecins ».
Certains pays européens, comme la Suède, en sont arrivés à la conclusion qu’il n’existe aucune solution alternative à la suppression de la visite médicale, qu’ils ont donc supprimée.
Faut-il aller si loin ?
Sur un tel sujet, il nous faut éviter d’agir dans la précipitation, sous l’effet de l’émotion et dans la stigmatisation. C’est de réflexion que nous avons besoin.
Notre rapporteur a fait sur ce sujet une proposition particulièrement importante. Je vous invite, mes chers collègues, à aller dans son sens.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Ronan Kerdraon. Cela étant dit, c’est bien la Haute Autorité de santé qui doit piloter et organiser la politique d’information sur le médicament.
J’évoquerai maintenant les autorisations de mise sur le marché, les AMM.
Ces autorisations doivent avoir du sens.
Or, aujourd’hui, le constat est implacable : trop de médicaments n’ayant pas fait la démonstration d’un progrès thérapeutique par rapport aux médicaments déjà autorisés obtiennent une autorisation de mise sur le marché.
Une telle pratique ne doit plus perdurer car elle est potentiellement dangereuse.
La mise sur le marché d’un médicament ne peut en effet se résumer à un banal acte de commercialisation. Elle ne doit être accordée qu’en vertu d’un bénéfice clinique avéré et d’une réelle valeur ajoutée thérapeutique.
Il convient également de rendre publics les résultats des études cliniques, et ce le plus largement possible.
Par ailleurs, il faut faire du renouvellement de l’AMM qui doit avoir lieu cinq ans après l’enregistrement initial un rendez-vous de réévaluation de la valeur ajoutée thérapeutique, et prévoir que la suspension ou le retrait de l’AMM puisse avoir lieu à ce moment.
Reste à savoir si ces modifications nécessaires seront acceptées par l’Europe, qui a aujourd'hui compétence pour autoriser la mise sur le marché d’une grande partie des médicaments.
Dans le même esprit, il serait souhaitable que soit systématiquement appliqué l’article R. 163–3 du code de la sécurité sociale, aux termes duquel « les médicaments dont le service médical rendu est insuffisant au regard des autres médicaments ou thérapies disponibles ne sont pas inscrits sur la liste » des spécialités remboursables. Autrement dit : un médicament est utile, il est remboursé ; un médicament est inutile, il ne doit pas être remboursé.
C’est tout le sens de l’article 9 bis que notre commission des affaires sociales a ajouté au texte du projet de loi.
Enfin, je voudrais vous faire part de ma réflexion sur les autorisations temporaires d’utilisation, les ATU.
Inscrites dans le code de la santé publique depuis 1994, les ATU ont contribué à traiter plusieurs dizaines de milliers de patients chaque année.
L’article 15 du présent projet de loi crée trois types d’ATU : les ATU de cohorte, les ATU nominatives « protocolisées » et les ATU nominatives « simples ». Ces ATU sont aujourd’hui indispensables aux personnes exclues des essais cliniques du fait de leur état de santé.
Afin de prévenir le risque de ralentissement des procédures et de conserver une certaine souplesse au dispositif prévu par le texte, le groupe socialiste-EELV a déposé un amendement que je vous invite à soutenir également.
Il ne faut en effet pas se tromper de combat : nous voulons agir contre les abus dont se rend responsable l’industrie pharmaceutique, et non contre les malades.
Je terminerai mon propos en évoquant les victimes.
S’agissant des victimes d’effets indésirables graves de médicament, nous plaidons pour une plus grande protection et pour une indemnisation rapide, ce qui n’est pas le cas actuellement. Il s’agit d’ailleurs là d’une proposition de la mission commune d’information sur le Mediator qui a été reprise à l’Assemblée nationale.
À l’heure actuelle, les victimes se retrouvent seules, isolées, face à la puissance financière et juridique des laboratoires et plus largement des grands groupes industriels. Ce n’est pas acceptable ! J’espère que l’examen en séance du présent texte nous permettra d’avancer sur ce point.
Mes chers collègues, en conclusion, ce projet de loi, qui a été très largement enrichi par le travail et les propositions de la commission des affaires sociales, doit permettre de réorienter la politique du médicament vers la santé publique, et ainsi de restaurer la confiance des Français.
C'est la raison pour laquelle mon groupe votera en faveur du texte, dans sa version proposée par la commission des affaires sociales et enrichie par nos amendements. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
(M. Jean-Léonce Dupont remplace M. Jean-Claude Carle au fauteuil de la présidence.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Léonce Dupont
vice-président
M. le président. La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, un certain nombre d’incidents, voire de drames mettant en cause des médicaments – beaucoup d’entre vous en ont évoqué cet après-midi – ont suscité des réactions de méfiance dans une partie de l’opinion publique et ont contribué à alimenter, chez nos concitoyens, un sentiment d’inquiétude. Je n’irai pas toutefois jusqu’à parler de perte de confiance.
L’affaire du Mediator a eu un retentissement, notamment, sur l’ensemble de l’industrie pharmaceutique, comme si la faute était collective. Pour cette raison, le Gouvernement a décidé de refondre la législation sur le médicament dans sa globalité.
Si cette crise de confiance n’a eu jusqu’à présent que des effets « limités » sur la consommation de médicaments, nous le devons sans doute à une réglementation que nous souhaitions stricte en matière de suivi et de mise sur le marché.
Permettez-moi de rappeler, à la suite de Jean-Louis Lorrain et Chantal Jouanno, quelques points qui me semblent importants.
Tout médicament doit recueillir une autorisation de mise sur le marché délivrée par l’AFSSAPS ou par l’Agence européenne du médicament. Cette AMM est bien entendu précédée de travaux d’évaluation scientifique, et peut être modifiée ou même retirée.
Cette AMM est désormais largement européenne. Mais, comme le soulignent les professeurs Debré et Even dans leur rapport de mars 2011, la compétence d’attribution des prix et des niveaux de remboursement relevant toujours d’une compétence nationale, les agences françaises ont les moyens d’une politique juste et sélective.
Or le diagnostic semble sans appel : les médicaments sont en nombre excessif ; beaucoup sont inutiles ; certains sont même dangereux : il en serait ainsi de 12 % des molécules mises sur le marché.
Monsieur le ministre, en juin dernier, lors de la clôture des Assises du médicament, vous avez déclaré : « Il faut réévaluer toute la pharmacopée ».
M. Alain Milon. Selon le rapport de la mission d’information parlementaire sur le médicament, c’est même tout le circuit du médicament qui est à rénover, en rendant la procédure d’AMM plus exigeante, en réévaluant régulièrement les médicaments déjà sur le marché, en encadrant plus strictement la prescription de médicaments hors autorisation de mise sur le marché, en intégrant également la notion de progrès thérapeutique dans l’évaluation des bénéfices et des risques du médicament. Tous ces paramètres sont pris en compte dans votre réforme et nous ne pouvons que les soutenir.
Je souhaite revenir sur un dispositif à nos yeux très important, celui des autorisations temporaires d’utilisation, dont M. le ministre a parlé.
Les ATU sont extrêmement importantes, notamment pour les patients atteints de maladies graves ou rares pour lesquelles il n’existe pas de traitement approprié.
Elles sont maintenues par le projet de loi et il faut s’en féliciter, car elles constituent parfois le seul accès aux soins pour ces malades. Elles sont maintenues, mais elles seront mieux encadrées : cette évolution était indispensable, car les traitements concernés n’en restent pas moins délivrés hors AMM et doivent donc demeurer l’exception.
Deux idées essentielles sous-tendent ces dispositions, je tiens à les rappeler puisqu’elles sont déterminantes : la sécurité et l’accès aux soins. Le projet de loi pose ainsi les bases d’un système qui offrira de plus grandes garanties de sécurité aux patients, tout en leur permettant l’accès aux traitements innovants.
Les ATU se divisent en deux sous-groupes : les ATU nominatives, délivrées à la demande et sous la responsabilité du médecin prescripteur, qui concernent un seul malade nominativement désigné et les ATU de cohorte qui concernent un groupe ou un sous-groupe de patients traités suivant un protocole d’utilisation thérapeutique.
Le système actuel conduisait à certaines dérives, puisque les ATU étaient parfois utilisées pour contourner l’AMM, dans des conditions non encadrées, et potentiellement dangereuses pour les patients : il fallait y mettre fin, et vous avez eu raison de le faire, monsieur le ministre.
Cependant, encadrer ne signifie pas limiter l’accès aux avancées médicales, bien au contraire ! Il n’est en aucun cas question de réduire l’accès des patients à des traitements innovants. Il s’agit de leur offrir cet accès en toute sécurité pour que les ATU remplissent leur rôle et uniquement celui-ci. L’AFSSAPS entretient en effet un dialogue permanent avec les sociétés innovantes. Les objectifs visés consistent, d’une part, à faire en sorte que les ATU conduisent à des AMM et, d’autre part, à éviter que ces molécules ne soient utilisées sans vrai développement.
Les mesures d’encadrement ainsi prises permettent de répondre à une meilleure sécurisation de la pratique des ATU. Ainsi, la durée des ATU sera limitée dans le temps. Cette mesure vise particulièrement les détournements des ATU. Une ATU pourra cependant être prolongée, puisque la nouvelle agence aura la possibilité de la renouveler.
L’ATU devra, par ailleurs, faire l’objet d’un protocole thérapeutique et d’un recueil d’informations sur l’efficacité et les effets secondaires du médicament. La notification des effets indésirables est modifiée, dans le sens d’un durcissement et d’une plus large implication des patients et des associations agréées de patients. Désormais, tous les effets indésirables devront être notifiés, il n’est plus question de limiter la notification aux seuls effets indésirables graves ou inattendus.
S’il est prévu qu’une ATU nominative puisse être délivrée à un patient, alors même qu’une ATU de cohorte ou un essai clinique ont été refusés, celle-ci sera encadrée par deux obligations strictes : d’une part, le médicament devra vraiment présenter un intérêt individuel ; d’autre part, le patient et le prescripteur devront être informés des motifs du refus. Les industriels devront s’engager à déposer soit une demande d’AMM, soit une demande d’ATU de cohorte ou une demande d’autorisation d’essais cliniques en France.
C’est ainsi que l’on peut combiner sécurité et accès aux traitements innovants.
Enfin, le dispositif devra inciter à la réalisation d’essais cliniques sur le territoire national. La France joue un rôle moteur dans la recherche médicale : il faut encourager cette recherche, car elle est indispensable aux avancées médicales.
Alors que le texte transmis par l’Assemblée nationale nous donnait satisfaction en ce qui concerne les ATU (Pas à nous ! sur les travées du groupe socialiste-EELV.), le texte adopté en commission ne nous convient pas, sur deux points particuliers.
M. Ronan Kerdraon. Ah !
M. Alain Milon. D’une part, limiter la durée des ATU à un an, renouvelable deux fois, ne nous semble pas opportun. En effet, les médicaments faisant l’objet d’ATU nominatives peuvent traiter des maladies chroniques. Il faut donc prévoir un renouvellement non limité, sinon les traitements pourraient être interrompus.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Les industriels n’auront qu’à demander une AMM !
M. Alain Milon. D’autre part, il nous paraît nécessaire de rétablir la possibilité pour l’Agence d’accorder une autorisation temporaire nominative, si le laboratoire s’engage à déposer une demande d’autorisation temporaire d’utilisation de cohorte ou une demande d’autorisation de mise sur le marché. Nous aurons l’occasion de revenir sur ces points lors de la discussion de nos amendements.
Un autre sujet me semble fondamental et me tient particulièrement à cœur, comme à beaucoup de membres de cette assemblée : la pharmacovigilance. Celle-ci est un des piliers de notre système de sécurité sanitaire, puisqu’elle a pour objet de surveiller, d’évaluer et de gérer le risque d’effets indésirables résultant de l’utilisation des médicaments et produits à usage humain. Nous ne pouvons pas nous diviser sur le renforcement de la pharmacovigilance ! Parce que tout médicament peut à un moment se révéler dangereux pour la santé humaine, il doit être suivi tout au long de sa vie. Je me réjouis que le projet de loi soit aussi engagé sur cette question.
Le dispositif existant, jugé globalement efficace en 2006, d’après le rapport de nos collègues Gilbert Barbier, Marie-Thérèse Hermange et Anne-Marie Payet sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments, a souvent été modifié : mise en place de plans de gestion des risques en 2004 ; actualisation des bonnes pratiques de pharmacovigilance par arrêté en 2005 ; création, en 2005, au sein de l’AFSSAPS d’un nouveau département de surveillance du risque et d’information sur le bon usage.
Cependant, il est certain que nous ne pouvons pas refonder efficacement notre système de sécurité sanitaire sans changer totalement les règles de la pharmacovigilance, pour les renforcer. Mais encore faut-il, pour assurer l’efficacité du système, que tous les acteurs soient mobilisés : praticiens, professionnels de santé, entreprises, autorités, associations. Je constate avec satisfaction que le projet de loi organise cette mobilisation. Avec le nouveau dispositif, plus aucune demande ne pourra rester lettre morte, puisqu’un système de médiation est instauré au sein de chaque institution, afin d’organiser un recours en cas de non-traitement d’une demande ou d’un dossier.
J’ajoute que le système ne peut être réellement efficace que si toutes les personnes qui en ont la capacité s’engagent dans la notification systématique des effets indésirables. Nous n’obtiendrons un tel engagement que si nous assurons la protection de ces donneurs d’alerte. C’est pourquoi mes collègues et moi-même sommes satisfaits que le texte aille en ce sens, notamment en assurant la protection des personnes qui auront signalé de bonne foi à leur employeur ou aux autorités sanitaires l’existence d’un effet indésirable suspecté.
Je veux souligner que les entreprises auront une responsabilité à assumer dans le dispositif de pharmacovigilance : c’est normal et c’est nécessaire ! Toute entreprise sera tenue de mettre en œuvre un système de pharmacovigilance et d’enregistrer, de déclarer, de suivre tout effet indésirable suspecté. De même, le titulaire de l’AMM devra communiquer immédiatement à la nouvelle agence toute interdiction ou restriction imposée par l’autorité compétente de tout pays dans lequel le médicament est mis sur le marché. Toute autre information nouvelle qui pourrait influencer l’évaluation des bénéfices et des risques de ce médicament devra également être transmise. Je ne reviendrai pas sur le cas du Mediator qui avait été interdit en Espagne et en Italie.
Je tiens à souligner que les premiers acteurs de la pharmacovigilance sont les praticiens médicaux qui, dans l’exercice de leur profession, constatent les effets indésirables d’une préparation. Or nos étudiants en médecine ne sont pas assez formés à la pharmacovigilance : la formation initiale et la formation continue devront laisser une plus large place à l’étude de celle-ci.
Alors que nous allons entamer l’examen de ce texte, modifié – pour ne pas dire dénaturé, monsieur le rapporteur ! – par les travaux de la commission,...
M. Bernard Cazeau, rapporteur. N’exagérons rien !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous y allez un peu fort !
M. Alain Milon. … nous défendrons un certain nombre d’amendements : notre vote final, vous l’aurez compris, mes chers collègues, dépendra du sort qui leur sera réservé. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à Mme Virginie Klès.
Mme Virginie Klès. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, s’exprimer à la tribune en quatorzième position après tant de législateurs et législatrices compétents n’est pas une tâche facile : j’espère donc que vous accepterez avec bonne humeur que je n’aborde pas la question uniquement à travers le prisme du législateur ou de la législatrice que je suis aussi, mais sous un angle un peu plus large.
Dans une première vie, je fus vétérinaire ; dans une deuxième vie, un doctorat en biologie m’a amenée à être responsable d’études scientifiques, notamment au sein du Centre national d’études vétérinaires et alimentaires, le CNEVA, devenu l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, ou AFSSA, elle-même devenue l’ANSES ou, pour les profanes, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. Enfin, j’ai participé, d’une part, à la mission commune d’information du Sénat sur le Mediator et, d’autre part, à la mission commune d’information Assemblée nationale/Sénat sur les toxicomanies.
Qu’ai-je conclu de ma participation à ces deux missions d’information et que puis-je affirmer avec force lorsque je porte ma « casquette » de législatrice ? Le médicament n’est pas un produit de consommation courante :…
M. Ronan Kerdraon. Très bien !
Mme Virginie Klès. … le marché du médicament doit par conséquent être organisé différemment de tout autre marché de produit de consommation courante, du début à la fin de la chaîne, y compris pendant la commercialisation.
Monsieur le ministre, vous avez raison de dire que les habitudes et les comportements doivent être profondément modifiés, ce qui nécessite un travail de fond. Cette modification exige également un positionnement différent des pouvoirs publics vis-à-vis de l’industrie pharmaceutiques, de la compétitivité de nos laboratoires pharmaceutiques, de la production, de la recherche et développement ; un positionnement différent, en tout cas, de celui qu’ils peuvent adopter à l’égard de toute autre entreprise, notamment en ce qui concerne la production et la consommation.
Je pense que nous devons passer, aujourd’hui, en France, d’une confiance immodérée en certains médicaments – et d’une peur déraisonnable de certains autres – à une défiance raisonnée vis-à-vis de tous les médicaments. Dans notre pays, on consomme trop de médicaments, sans doute ce constat doit-il servir de base à la politique que nous devons adopter dans le domaine du médicament.
Mon passage à l’AFSSA, sous les divers avatars qu’elle a connus, me fait douter, monsieur le ministre, de l’utilité réelle ou de l’efficacité réelle du changement de nom de cette agence, notamment en raison des coûts et des délais qui en résulteront avant qu’elle soit de nouveau efficace. Tel est mon avis : je reste dubitative, mais je n’en ferai pas pour autant un point de crispation.
En revanche, j’ai retenu de mon passage à l’AFSSA – j’ai du mal à l’appeler ANSES, puisqu’elle ne se nommait pas encore ainsi lorsque je l’ai quittée ! – que l’on dépense beaucoup de temps et de moyens à doser les résidus des médicaments présents dans les denrées alimentaires d’origine animale et ensuite réabsorbés par les humains. Parallèlement, nous consommons du médicament sous forme de pilules par boîtes entières : cherchez l’erreur ! Un effort considérable de communication doit sans doute être effectué en direction de tous nos concitoyens.
Depuis très longtemps, je suis migraineuse et je ne crois pas que cela soit prêt de changer. Monsieur le ministre, vous disiez tout à l’heure qu’il est parfois difficile de retirer du marché un médicament inefficace, parce que les consommateurs y sont habitués. Certes, c’est un cas de figure ; mais il en existe d’autres.
Quand j’étais petite, il n’y a pas si longtemps que cela – cela ne fait que trente ou quarante ans ! (Sourires.) –, je consommais de la Véganine pour mes migraines. Certains d’entre vous ont peut-être connu ce médicament…
Mme Virginie Klès. La Véganine s’achetait par boîtes ou tubes de quarante comprimés, qui coûtaient à peu près 2,65 francs…
M. Bernard Cazeau, rapporteur. C’était un poison !
Mme Virginie Klès. Un jour, la Véganine a brutalement disparu du marché : elle a été remplacée par le Novacétol, vendu dans des boîtes en carton, avec seulement dix ou douze comprimés sous emballage individuel, mais cinq à six fois plus cher,…
Mme Gisèle Printz. Eh oui !
Mme Virginie Klès. … nous n’étions pas encore passés à l’euro. Pourtant, ce médicament avait la même composition et la même efficacité que la Véganine. Celle-ci a donc été retirée du marché non pas parce qu’elle était devenue inefficace ou moins efficace que le Novacétol, mais parce qu’elle n’était plus assez rentable pour le laboratoire pharmaceutique qui la produisait ! Les pouvoirs publics gagneraient donc parfois à modifier leur comportement vis-à-vis du médicament…
M. Ronan Kerdraon. Excellent exemple !
Mme Virginie Klès. Aujourd’hui, je prends du Codoliprane pour mes migraines – vous allez finir par tout savoir de ma vie ! – et j’en ai toujours dans mon sac à main : comme tous les migraineux, je ne me sépare jamais de mon médicament miracle.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il est pourtant moins efficace !
Mme Virginie Klès. Je vous lis la notice de ce médicament. Qu’est-ce que le Codoliprane et dans quel cas doit-il être utilisé ? La réponse donnée au public indique qu’il s’agit d’un « antalgique périphérique, analgésique opioïde ». J’ignore si monsieur ou madame Tout-le-monde peuvent comprendre ce que cela signifie ; quant à moi, je le comprends, mais parce que je dispose par ailleurs d’autres compétences, comme je viens de vous l’expliquer.
Je continue la lecture de cette notice : « Prise ou utilisation d’autres médicaments. Ce médicament doit être évité avec les agonistes-antagonistes morphiniques – buprénorphine, nalbuphine, pentazocine –, la naltrexone et avec la consommation d’alcool. » Tout le monde comprend la dernière recommandation, mais pour le reste, personne n’y comprend rien !
Peut-être ma suggestion ne relève-t-elle pas du domaine de la loi, mais de celui du règlement, voire du simple bon sens ? Je pense malgré tout que nous devons faire évoluer ces notices d’information qui sont devenues illisibles pour le public et ne constituent donc plus une véritable information ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. Jacky Le Menn. Bravo !
Mme Virginie Klès. Trions tout simplement dans ces notices : traduisons en termes simples ce qui doit être compris par tout le monde et maintenons en termes compliqués, éventuellement dans la même notice, mais à part, ce qui relève de l’information du professionnel, lequel en a effectivement besoin quand il reçoit un patient.
Si nous avons un message, et un seul, à faire passer au public et aux consommateurs de médicaments, c’est que l’on prend un médicament uniquement en cas de besoin, et seulement s’il nous a été prescrit par un médecin ou recommandé par un pharmacien.
Dans toute ordonnance comprenant cinq médicaments figure au minimum une contre-indication, et dans toute ordonnance de sept médicaments au moins une contre-indication majeure entre deux médicaments : c’est ce que l’on m’apprenait à l’école vétérinaire, voilà un certain temps déjà !
Aujourd’hui, le phénomène s’est encore complexifié et le nombre de médicaments nécessaires pour provoquer une contre-indication majeure sur une ordonnance a diminué, compte tenu des associations de principes actifs des médicaments actuels.
Tels sont les messages importants qu’il convient de transmettre au public. C’est en martelant ces informations que l’on parviendra à faire baisser la consommation de médicaments. Ne laissons pas la seule responsabilité aux médecins et aux pharmaciens ; les pouvoirs publics doivent également agir !
C’est la raison pour laquelle j’insiste sur une recommandation excessivement importante que j’ai faite à la mission sénatoriale : interdisons toute publicité pour les médicaments, quels qu’ils soient, que ceux-ci soient délivrés ou non sur prescription médicale !
En faisant de la publicité pour les médicaments, on les ramène à des produits de consommation courante. (M. Alain Fauconnier applaudit.) Je suis toujours choquée lorsque je vois à la télévision des publicités pour des médicaments, y compris pour de l’aspirine, qui ne sont pas exempts d’effets secondaires.
On ne peut pas tenir deux discours : dire que les médicaments, quels qu’ils soient, ont des effets secondaires et, dans le même temps, en faire la publicité à la télévision ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.)
Il faut de la même manière rester extrêmement ferme en matière d’interdiction de vente des médicaments, quels qu’ils soient, en dehors des pharmacies.
Mme Virginie Klès. Sur le plan de la législation, toutes les propositions de la mission commune d’information du Sénat sur le Mediator en matière de post-AMM, de délais accordés aux laboratoires pharmaceutiques pour fournir des études supplémentaires et de sanctions financières doivent être impérativement respectées.
Concernant l’indépendance des experts, je ne partage pas l’avis émis par certains. Je considère pour ma part que le fait de nommer un corps d’experts indépendants est possible et souhaitable.
M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.
Mme Virginie Klès. Je conclus, monsieur le président.
Monsieur le ministre, comme d’autres avant moi à cette tribune, je salue ce texte qui comporte des avancées, enrichies encore par la commission des affaires sociales. Il demeure cependant insuffisant, et j’espère fermement que vous respecterez l’engagement que vous avez pris ici même il y a quelques instants de tenir les parlementaires informés de toutes les décisions qui seront prises par voie d’ordonnance ou par décrets. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – Mmes Nathalie Goulet, Catherine Procaccia et Caroline Cayeux ainsi que M. Gilbert Barbier applaudissent également.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole dans la discussion générale ?…
La discussion générale est close.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Je voudrais tout d’abord rappeler à mes collègues de la commission des affaires sociales que nous nous réunissons à la suspension du dîner pour terminer l’examen des amendements déposés sur ce texte.
Je souhaite ensuite dissiper une confusion provoquée par une association et reprise dans cet hémicycle. En aucun cas, la commission n’a écarté en droit ou en fait les associations d’usagers des instances de la démocratie sanitaire. Il faut le dire avec force.
Elle a simplement prévu que les associations représentées au sein du conseil d’administration de l’ancienne AFSSAPS soient exemptes de liens d’intérêts avec l’industrie. Cette restriction est donc limitée. Elle n’est en aucun cas une remise en cause de la participation des autres associations agréées aux instances de la démocratie sanitaire.
Les associations dépendent de fonds privés en raison de l’absence de fonds publics. Nous soulignons ce point depuis longtemps ; il a été évoqué à cette tribune. Je constate que le Gouvernement n’a toujours pas proposé une autre source de financement aux associations, en dépit des multiples rapports qui l’ont préconisé. Cela permettrait pourtant d’éviter les confusions.
M. le président. Nous passons à la discussion des articles.
TITRE Ier
TRANSPARENCE DES LIENS D’INTÉRÊTS
Chapitre Ier
Liens d’intérêts
Article additionnel avant l'article 1er
M. le président. L'amendement n° 1, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 1114-1 du code de la santé publique, après les mots : « Les associations, régulièrement déclarées », sont insérés les mots : « qui n’ont pas de lien direct ou indirect avec les entreprises, établissements ou organismes dont les activités, les techniques ou les produits entrent dans le champ de compétence de l’association ».
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Avec cet amendement, nous entendons aborder une question importante, celle du financement des associations représentant les usagers du système de santé et, plus spécifiquement, de leur indépendance.
Il ne s’agit pas, pour nous, de considérer que les associations de patients sont toutes aux ordres des laboratoires pharmaceutiques. Elles jouent pleinement leur rôle dans une démocratie sanitaire qu’il convient sans doute de perfectionner ; nous ne le nions pas.
Toutefois, dès lors que l’article 5 de ce projet de loi prévoit que des représentants d’associations agréées au titre de l’article L. 1114–1 du code de la santé publique sont autorisés à siéger au sein du conseil d’administration de l’Agence, il est logique de se soucier de leur indépendance, c’est-à-dire de l’absence de lien avec l’industrie pharmaceutique, comme nous le faisons pour chacun des autres membres.
En effet, il serait regrettable que ces associations soient les seules à siéger au sein du conseil d’administration de l’Agence en bénéficiant d’un financement par l’industrie pharmaceutique.
Or cette dernière dispose, depuis l’adoption de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », – et c’est ce qui nous inquiète – de la faculté de financer légalement les associations de patients, afin que celles-ci réalisent des missions d’éducation thérapeutique. Les laboratoires voient dans cette possibilité une manière de contourner l’interdiction qui leur est faite d’entrer directement en contact avec les patients et de choisir les missions qu’ils entendent financer, preuve s’il en est qu’il s’agit moins d’une mesure philanthropique que d’une mesure commerciale.
C’est sur la base de ce constat que nous nous étions opposés, en vain, à cette mesure. C’est également cette analyse qui a conduit l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, à préconiser dès 2007 une telle interdiction. Je cite le rapport : « Il paraît nécessaire d’inscrire dans la loi une disposition indiquant clairement l’interdiction, pour une entreprise pharmaceutique, de conduire tout contact personnalisé et toute démarche directe ou indirecte d’information, de formation ou d’éducation à destination du public relative à un médicament prescrit. »
La situation est telle, les intérêts pour les industriels sont si importants que certains laboratoires n’hésitent pas à constituer de toutes pièces des associations de patients, à l’image de la société Biogen, afin de peser sur les responsables du système sanitaire britannique pour que ces derniers inscrivent un médicament de la firme dans la liste de ceux qui sont prescrits en cas de sclérose en plaques.
Si nous sommes convaincus que les associations de patients ont toute leur place dans la construction d’un système sanitaire dont les patients sont de fait trop souvent dépossédés, nous devons avoir la même exigence de transparence et d’indépendance pour ces associations que pour l’ensemble des acteurs. C’est ce que nous proposons dans cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement pose une vraie question, celle de l’indépendance des associations de patients, qui est en principe une condition de leur agrément, et, au-delà, celle de leur financement public.
Si la commission ne peut émettre un avis favorable sur cet amendement, c’est simplement parce que son adoption ne suffirait pas à résoudre le problème.
La commission a souhaité réserver la représentation des usagers du système de santé au conseil d’administration de la nouvelle AFSSAPS, comme l’a indiqué Mme la présidente, à des associations ne recevant aucun soutien de l’industrie pharmaceutique. Cependant, nous en sommes convaincus, ce n’est pas une réponse globale.
Nous souhaiterions, monsieur le ministre, connaître la position du Gouvernement sur ce sujet.
Comment assurer concrètement l’indépendance des associations de patients ?
Par ailleurs, comment est appliquée la disposition de la loi HPST qui, à l’initiative du sénat, impose la déclaration et la publication des aides de l’industrie aux associations ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Il ne faut pas confondre les conflits d’intérêts et les liens d’intérêts. Or, à partir du moment où la plupart des associations, notamment des grandes associations, peuvent aujourd'hui obtenir un financement public et transparent, vous les empêchez de facto de siéger. Je comprends par conséquent leur réaction.
J’ajoute que certaines associations, mais elles sont très minoritaires, refusent le financement public pour garder leur indépendance.
Quoi qu’il en soit, comme je l’ai indiqué à différentes reprises, nous avons besoin d’une nouvelle loi sur les droits des patients, notamment sur la démocratie sanitaire. Ce sera justement l’occasion de prévoir d’autres modalités de financement et d’action. La loi HPST suivait une logique, mais, dix ans après la loi Kouchner, il faut pouvoir à la fois accompagner et anticiper les évolutions de la société.
En l’état actuel des choses, si cet amendement était adopté, ce serait un recul en termes de démocratie sanitaire et de participation des associations.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le rapporteur, vous l’avez compris, il s’agissait d’un amendement d’appel destiné à attirer l’attention sur une situation préoccupante, qui n’est pas nouvelle.
Monsieur le ministre, vous le savez mieux que personne, ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui « l’éducation thérapeutique » trouve ses origines au sein même de l’industrie pharmaceutique.
Il s’agit pour ces firmes de mécanismes d’optimisation de leur stratégie commerciale, dans un environnement marqué à la fois par l’absence d’innovation et par une certaine stagnation des ventes. Vous aviez d’ailleurs fait preuve de courage, en 2007, puisque vous vous étiez vous-même opposé à de telles mesures.
Ces financements, parce qu’ils sont ciblés, laissés au choix de l’industrie, apparaissent comme une manière pour ces dernières de contrôler la prise de médicament et même de la développer en rendant le patient captif d’un seul traitement, celui pour lequel il bénéficie de cette éducation thérapeutique.
L’IGAS emploie d'ailleurs une expression forte pour qualifier ces actions qu’elle décrit comme des « programmes de fidélisation des patients permettant d’augmenter le volume des ventes ».
Naturellement, l’immense majorité des associations sont respectueuses de la loi et de ses principes, mais nous partageons les interrogations d’Alain Bazot, président de l’association UFC-Que Choisir, quand il s’interroge en ces termes : « Comment les associations, dont une partie des financements dépend de l’industrie, seraient-elles mieux armées que les professionnels de santé ? Pour beaucoup d’entre elles, les cotisations perçues, la vente d’un journal et le bénévolat ne suffisent pas à couvrir tous les besoins ».
Nous retirons donc cet amendement en espérant que nous pourrons, notamment à l’occasion du rapport qui est prévu dans ce projet de loi, nous pencher sérieusement sur cette question et faire en sorte que l’éducation thérapeutique, qui est un sujet important, puisse enfin sortir de la logique commerciale dans laquelle la loi HPST l’a enfermée.
M. le président. L'amendement n° 1 est retiré.
Article 1er
I. – Le titre V du livre IV de la première partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Règles déontologiques et expertise sanitaire » ;
2° L’intitulé du chapitre Ier est ainsi rédigé : « Liens d’intérêts et transparence » ;
3° L’article L. 1451-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1451-1. – I. – Les membres des commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ainsi que les dirigeants, personnels de direction et d’encadrement et les membres des instances collégiales, des commissions, des groupes de travail et conseils des autorités et organismes mentionnés aux articles L. 1123-1, L. 1142-22, L. 1222-1, L. 1313-1, L. 1413-2, L. 1415-2, L. 1417-1, L. 1418-1, L. 1431-1, L. 3135-1 et L. 5311-1 du présent code, à l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, à l’article 5 de la loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale et à l’article 13 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire sont tenus, lors de leur prise de fonctions, d’établir une déclaration d’intérêts.
« Cette déclaration est remise à l’autorité administrative compétente.
« Elle mentionne les liens d’intérêts de toute nature, directs ou par personne interposée, que le déclarant a, ou qu’il a eus pendant les cinq années précédant sa prise de fonctions, avec des entreprises dont les activités, les techniques et les produits entrent dans le champ de compétence de l’autorité sanitaire au sein de laquelle il exerce ses fonctions, ou de l’organe consultatif dont il est membre, ainsi qu’avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans les mêmes secteurs.
« Elle est rendue publique. Elle est actualisée à l’initiative de l’intéressé.
« Pendant les trois ans précédant leur nomination et pendant toute la durée de leur mandat, le président de l’autorité mentionnée à l’article L. 161–37 du code de la sécurité sociale, le directeur général de l’établissement public de l’État mentionné à l’article L. 5311–1 du présent code, le président de l’Institut national du cancer mentionné à l’article L. 1415–2 et le directeur général de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale ne peuvent avoir aucun lien d’intérêts direct susceptible d’affecter ou de paraître affecter l’exercice indépendant, impartial et objectif de leurs fonctions.
« Les personnes mentionnées au présent article ne peuvent prendre part aux travaux, aux délibérations et aux votes des instances au sein desquelles elles siègent qu’une fois la déclaration souscrite ou actualisée. Elles ne peuvent, sous les peines prévues à l’article 432-12 du code pénal, prendre part ni aux travaux, ni aux délibérations, ni aux votes de ces instances si elles ont un intérêt, direct ou indirect, à l’affaire examinée. Elles sont tenues au secret et à la discrétion professionnels dans les mêmes conditions que celles définies à l’article 26 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
« II. – Sont également tenus d’établir la déclaration prévue au I, lors de leur prise de fonctions, les agents des autorités et des organismes mentionnés au même I dont les missions ou la nature des fonctions le justifient et qui sont mentionnés sur une liste établie par décret en Conseil d’État. » ;
4° Après l’article L. 1451-1, il est inséré un article L. 1451-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 1451-1-1. – La publicité des séances des commissions, conseils et instances collégiales d’expertise mentionnés au I de l’article L. 1451-1 et qui sont consultés dans le cadre de procédures de décision administrative est organisée, selon le cas, par le ministère de la santé ou par l’autorité, l’établissement ou l’organisme dont ils relèvent ou auprès duquel ils sont placés.
« À cette fin sont prévus :
« 1° L’enregistrement des débats et la conservation de ces enregistrements ;
« 2° Sans préjudice, le cas échéant, de la diffusion en ligne de l’enregistrement audiovisuel des débats, l’établissement de procès-verbaux comportant l’ordre du jour, le compte rendu des débats, le détail et les explications des votes, y compris les opinions minoritaires, et la diffusion gratuite en ligne de ces procès-verbaux sur les sites internet du ministère de la santé ou des autorités, établissements ou organismes mentionnés au premier alinéa. » ;
5° L’article L. 1451-2 est ainsi rédigé :
« Art. L. 1451-2. – I. – L’interdiction énoncée au premier alinéa de l’article L. 4113–6 est applicable aux personnes mentionnées à l’article L. 1451–1. Est interdit le fait, pour les entreprises mentionnées au premier alinéa de l’article L. 4113–6, de leur proposer ou de leur procurer les avantages définis au même alinéa.
« II. – Les personnes mentionnées à l’article L. 1451–1 sont tenues à l’obligation définie au premier alinéa de l’article L. 4113–13. Cette obligation est étendue aux liens avec des entreprises intervenant dans le domaine de compétence des autorités et organismes énumérés au I de l’article L. 1451–1. En cas de manquement à ces dispositions, l’autorité administrative peut mettre fin à leurs fonctions. » ;
6° Le chapitre Ier est complété par des articles L. 1451-3 et L. 1451-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 1451-3. – Les conditions d’application du présent chapitre, et notamment le modèle et le contenu de la déclaration d’intérêts, les conditions dans lesquelles elle est rendue publique ainsi que ses modalités de dépôt, d’actualisation et de conservation sont fixées par décret en Conseil d’État.
« Art. L. 1451-4. – (Supprimé)
7° Le chapitre II devient le chapitre IV et l’article L. 1452-1 devient l’article L. 1454-1 ;
8° Il est rétabli un chapitre II ainsi rédigé :
« CHAPITRE II
« Expertise sanitaire
« Art. L. 1452-1. – (Supprimé)
« Art. L. 1452-2. – Les personnes invitées à apporter leur expertise dans les domaines de la santé et de la sécurité sanitaire au ministre chargé de la santé, aux commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, aux instances collégiales des autorités et des organismes mentionnés au I de l’article L. 1451-1 sans être membres de ces commissions, conseils ou instances déposent au préalable une déclaration d’intérêts.
« Le modèle et le contenu de cette déclaration, les conditions dans lesquelles elle est rendue publique ainsi que ses modalités de dépôt, d’actualisation et de conservation sont fixés par le décret en Conseil d’État prévu à l’article L. 1451-3.
« Art. L. 1451-2-1 (nouveau). – Les dispositions applicables à chacune des instances collégiales d’expertise mentionnées à l’article L. 1451-1-1 prévoient la représentation au sein de ces instances de spécialistes de médecine générale et d’experts en sciences humaines. »
II. – 1. Le deuxième alinéa de l’article L. 1123-3, le dernier alinéa de l’article L. 1142-24-3, l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1222-7, l’article L. 1312-5, le premier alinéa de l’article L. 1313-9, les II et III de l’article L. 1313-10, le second alinéa des articles L. 1413-11 et L. 1417-7, la deuxième phrase du troisième alinéa de l’article L. 1418-6 et les sixième et septième alinéas de l’article L. 5323-4 du code de la santé publique sont supprimés.
2. L’article L. 161-44 du code de la sécurité sociale est abrogé.
3. Le dernier alinéa de l’article 5 de la loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire est supprimé.
4. Les deux premières phrases du quatrième alinéa de l’article 13 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire sont supprimées.
III. – L’article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques est ainsi modifié :
1° Le septième alinéa (5°) du I est ainsi rédigé :
« 5° Aux membres des conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, aux dirigeants, aux personnels de direction et aux membres des instances d’expertise de l’autorité publique indépendante, des établissements publics et organismes mentionnés au I de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique, ainsi qu’aux agents mentionnés au II du même article ; »
2° Après le II, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
« II bis. – Les déclarations d’intérêts établies en application des articles L. 1451-1 et L. 1452-2 du code de la santé publique sont communiquées à la commission par les autorités qui en sont destinataires. Elle peut, à titre exceptionnel et à leur demande, les assister pour leur contrôle.
« La commission est également chargée de rendre des avis, à la demande des personnes mentionnées au 5° du I, sur les questions d’ordre déontologique relatives à l’établissement de leur déclaration d’intérêts ou à la prévention des conflits d’intérêts susceptibles de les concerner. Ces avis, ainsi que les documents sur la base desquels ils sont rendus, sont secrets. »
IV (nouveau). – Après le deuxième alinéa (1°) de l’article 21 de la loi n° 78–753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 1° bis Les articles L. 1451–1–1 et L. 5324–1 du code de la santé publique ; ».
M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Blandin, sur l'article.
Mme Marie-Christine Blandin. Mon propos concerne la problématique de l’expertise, qui, je le rappelle, est une mission centrale dans la loi du 18 avril 2006 de programme pour la recherche.
Afin de garantir l’indépendance de l’expertise, un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques de 2008 préconisait une haute autorité spécifique. Ensuite, en 2009, l’article 52 de la loi de programme relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement, dit Grenelle 1, qui mettait à l’étude un rapport sur la pertinence d’une instance spécifique de garantie de l’indépendance de l’expertise, avait été voté à l’unanimité.
Ne voyant rien venir – deux ans s’étaient écoulés –, je posais une question écrite, en 2010, à Mme Bachelot qui indiquait que la santé n’avait rien à voir avec l’environnement et que le Grenelle ne concernait que ce dernier.
Ne voyant toujours rien venir, je posais avec de nombreux collègues, au plus fort de la crise, une question d’actualité à M. Xavier Bertrand, ministre ici présent, qui me répondait que le problème était tellement grave qu’on allait faire bien mieux qu’une haute autorité de garantie de l’indépendance de l’expertise.
Effectivement, ce projet de loi prévoit désormais des déclarations d’intérêts obligatoires, une commission d’éthique au sein de chaque agence et une charte de l’expertise sanitaire.
Mes chers collègues, je ne voudrais pas qu’il vous échappe que l’on en reste au même état qu’auparavant. Simplement, ce qui était dans le règlement des agences est inscrit dans la loi, ce qui est une très bonne chose. Cependant, le contrôle des déclarations d’intérêts et de la fiabilité des experts en la matière se fera à huis clos, au sein de chaque agence.
Or l’avantage de la haute autorité de garantie de l’indépendance de l’expertise, c’était un contrôle indépendant et extérieur.
Certes, l’amendement n° 115 de M. le rapporteur, qui a été adopté, permettra une centralisation des déclarations d’intérêts.
Mais la haute autorité en question avait bien plus d’ambition. Sa première mission était le contrôle des déclarations d’intérêts. Un tel contrôle nous aurait évité le militantisme du précédent directeur de l’AFSSAPS, M. Marimbert, qui nous a déclaré : « la gestion des déclarations d’intérêts ne doit pas échapper à l’agence concernée, qui est la mieux à même de connaître ces experts et de détecter les anomalies ». On a vu les résultats !
Sa deuxième mission était la médiation sur les expertises contradictoires. Une telle médiation nous aurait évité les chassés-croisés entre l’Agence et le Parlement à propos du bisphénol A.
Enfin, sa troisième mission était le recours des lanceurs d’alerte. Bien des mésaventures auraient pu être épargnées à Mme Irène Frachon et au docteur Georges Chiche, de Marseille, pour ne citer qu’eux.
Tout cela pour vous dire, monsieur le ministre, qu’il faudra revenir sur le manque de contrôle extérieur et prévoir, peut-être, une autorité de déontologie de la vie publique. Nous saisirons de cette question votre collègue en charge de la recherche. Il faudra veiller, dans cette loi, à ce que sa rédaction soit compatible avec un contrôle extérieur de ces déclarations d’intérêts. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV. – Mme Laurence Cohen applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jacky Le Menn, sur l'article.
M. Jacky Le Menn. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je rappelle que, contrairement à ce que l’on pourrait croire ou nous faire accroire, il n’y a pas en France de chaîne du médicament. Tel est le constat, sans appel, que faisaient en juin dernier les inspecteurs de l’Inspection générale des affaires sociales. L’IGAS évoque les trois maillons que sont la sécurité sanitaire, l’évaluation médico-économique et la décision du remboursement par la collectivité. Le projet de loi, monsieur le ministre, est-il de nature à créer une telle chaîne ? Je ne le pense pas.
Ce projet de loi ne fonde pas une nouvelle politique du médicament. Il vise avant tout, on l’aura compris, à restaurer la confiance de l’opinion dans le médicament – les optimistes diront que ce n’est déjà pas si mal ! Certes… C’est à la fois sa force et sa faiblesse dans la mesure où la politique du médicament restera largement aux mains des laboratoires et de leur stratégie industrielle, comme en témoigne l’affaire des pénuries de certaines spécialités.
La FDA américaine, la Food and drug administration, a plus ou moins servi de modèle à ce projet. Cette influence venue d’outre-Atlantique se retrouve dans la volonté du Gouvernement de mettre en place un embryon d’expertise interne, avec l’annonce du recrutement d’une vingtaine d’experts, tels que des pharmacologues, des épidémiologistes, etc.
Nous sommes bien évidemment très loin des effectifs de la FDA, lesquels se comptent en centaines de personnes. L’expertise externe a donc encore de beaux jours devant elle ! C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le plan prévoit des dispositions pour lutter contre les conflits d’intérêts – c’est l’objet principal de l’article 1er –, conflits que, bien évidemment, monsieur le ministre, nous ne confondons pas avec les liens d’intérêts. Nous verrons à l’usage, mais il aurait été plus simple de couper le cordon ombilical économico-financier qui relie les laboratoires au monde sanitaire.
Si le projet de loi initial vise à rétablir la sécurité sanitaire des médicaments, cela ne suffit pas pour autant à faire une politique du médicament. Selon le rapport de l’IGAS de juin 2011, la chaîne du médicament comprend trois maillons, dont j’ai fait état. Mais, en France, ils ne sont pas reliés entre eux, comme l’ont noté les inspecteurs des affaires sociales. Les mesures proposées n’y changeront rien, car elles sont très timides, notamment en matière d’évaluation médico-économique, de fixation des prix et de critères de remboursement.
Ainsi, rien n’est prévu, ou pas grand-chose, pour redonner du pouvoir à l’Agence nationale de sécurité du médicament par rapport à l’Autorité européenne. Demain, comme aujourd’hui, l’ANSM risque de n’être qu’une chambre d’enregistrement des décisions prises à Londres, où 90 % des médicaments reçoivent leur autorisation de mise sur le marché de l’Agence européenne des médicaments, comme le soulignait en juin 2011 le rapport de l’IGAS.
Ainsi demain, comme aujourd’hui, les observations de l’lGAS resteront vraies. La Commission de la transparence, qui accorde les autorisations de remboursement, « ne disposera ni des règles précises ni des moyens de pratiquer une véritable évaluation médico-économique ». Elle se contentera « de reprendre les données issues de la commission d’AMM », lesquelles calculent la balance entre les bénéfices et les risques d’un médicament, mais non le rapport entre le coût et l’efficacité.
En outre, le Comité économique des produits de santé, le CEPS, qui négocie les prix des médicaments avec les industriels, continuera d’agir, selon le rapport de l’IGAS, « de façon isolée, sans contact réel et formalisé avec la Commission de la transparence », en fixant « les prix des médicaments sur des fondements discutables ».
Voilà pourquoi je regrette, par exemple, le fait qu’aucune réforme du remboursement et du prix n’ait été proposée, comme le souligne du reste fort justement dans son excellent rapport notre collègue Bernard Cazeau.
Enfin, il est à noter que le projet de loi initial ne prévoit pas une implication beaucoup plus importante des professionnels de santé dans la gouvernance du système, ce qui constitue un manque important. Il prévoit simplement « l’institution d’échanges privilégiés entre l’Agence nationale de sécurité du médicament – agence dont il faudra d’ailleurs que nous modifions le nom – et les professionnels de santé, dans le cas de signaux mettant en jeux la sécurité sanitaire ». C’est pourtant la moindre des choses, me semble-t-il, que de s’adresser en priorité aux personnes qui prescrivent les médicaments s’ils s’avèrent dangereux.
L’un des enseignements qui avait été tiré d’une autre crise sanitaire, celle de la grippe H1N1 en 2009, avait justement été que le manque d’implication des professionnels de santé avait nui au relais de la campagne de santé publique.
La commission des affaires sociales et son rapporteur ont pu remédier à certaines insuffisances du projet de loi initial, et c’est heureux. Mais, hélas ! nous sommes encore très loin des nombreuses préconisations – au nombre de soixante-cinq – formulées dans l’excellent rapport de la mission commune d’information sur le Mediator – rapport intitulé, je le rappelle à toutes fins utiles, « La réforme du médicament, enfin » –, mission présidée par notre ancien collègue François Autain. Ce rapport avait été adopté à l’unanimité des membres de la commission, toutes sensibilités politiques confondues.
Il s’agit donc d’une réforme a minima, ce qui est fort regrettable, compte tenu, d’une part, de l’attente de l’immense majorité de nos concitoyens et, d’autre part, du fait que le médicament, ainsi que l’a rappelé notre collègue migraineuse Virginie Klès, n’est pas un produit de consommation courante, banal, sans effets secondaires. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, sur l'article.
M. Jean-Louis Lorrain. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le Gouvernement a engagé une réforme ambitieuse. Celle-ci est devenue d’autant plus indispensable que le système actuel ne parvient plus à garantir une expertise impartiale et indépendante pour la santé des usagers.
Je ne peux par conséquent que déplorer les modifications apportées au texte en commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous l’avez déjà dit dans la discussion générale !
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Bis repetita !
M. Jean-Louis Lorrain. Sous couvert de vouloir aller plus loin dans la transparence, nous arrivons à un texte qui, en l’état, n’est ni praticable ni applicable, alors qu’une réforme profonde et efficiente est cruciale. (Mme Catherine Procaccia applaudit.)
Je tiens à revenir sur quelques dispositions majeures instituées par l’article 1er du projet de loi voté par nos collègues députés.
Les dispositions relatives à l’obligation de déclaration d’intérêts prévues dans cet article constituent un réel progrès. Elles permettent de renforcer considérablement la transparence des décisions, et il est évident que la transparence – on pourrait s’attarder sur le contenu de cette notion – est gage de confiance.
L’obligation de déclaration d’intérêts, que le texte systématise, s’impose à un nombre important de personnes. Elle est bien loin d’être restreinte, contrairement à ce qu’affirment certains de nos collègues. La déclaration publique d’intérêts, ou DPI, s’impose aux experts internes ou externes, comme aux personnels des organismes de sécurité sanitaire, mais également à certains agents, aux dirigeants de toutes les autorités et agences de sécurité sanitaire, à tous les membres des diverses commissions et aux professionnels de santé.
L’Assemblée nationale est allée plus loin encore : elle a étendu l’obligation de déclaration d’intérêts aux groupes de travail qui préparent les commissions et les conseils des agences.
De plus, cette déclaration devra être régulièrement actualisée et tout manquement à ces obligations sera sanctionné.
Il faut d’ailleurs prendre garde à ne pas confondre la lutte contre les conflits d’intérêts et la publication des liens d’intérêts. Je pense que beaucoup d’entre nous l’ont compris.
J’attire votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu’il ne paraît ni souhaitable ni efficient que la collecte, le contrôle et la publication des déclarations d’intérêts relèvent de la commission de déontologie créée par la loi Sapin. La gestion et le contrôle des déclarations doivent être du ressort de la cellule de déontologie créée au sein de chaque institution. C’est la méthode la plus simple et la plus rapide à mettre en œuvre. Il ne faut toutefois pas reproduire, bien sûr, ce qui s’est fait dans le passé. C’est surtout la méthode qui conduit chaque institution à assumer ses responsabilités, et c’est bien là le point essentiel. Je rappelle que toutes les déclarations pourront être consultées dans une base de données publique.
Le projet de loi oblige également à rendre publics les ordres du jour et les comptes rendus des réunions des commissions de la nouvelle agence, assortis des détails et explications des votes, y compris les opinions minoritaires. Ces informations seront mises à la disposition du public, dans le respect du secret médical et du secret industriel. Transparence ne veut pas dire obligatoirement fin du secret.
Enfin, la charte de l’expertise sanitaire, approuvée par décret en Conseil d’État, est fondamentale pour le bon déroulement des expertises réalisées dans les domaines de la santé et de la sécurité sanitaire. Elle permettra d’indiquer les modalités de choix des experts, le processus d’expertise et ses rapports avec le pouvoir de décision, la notion de lien d’intérêts, les cas de conflit d’intérêts, les modalités de gestion d’éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par des experts présentant un conflit d’intérêts ».
Concernant la publicité des débats des instances d’expertise, les séances, qui peuvent être enregistrées, doivent faire l’objet d’un enregistrement. Selon M. le rapporteur, une information écrite serait plus accessible et plus facile à consulter. Or je pense qu’il est plus aisé de visualiser un débat que d’en lire un compte rendu écrit. Surtout, un enregistrement audiovisuel est plus instructif et révélateur. Il permet de voir l’attitude de chacun ou de certains, ce que ne révèlent pas obligatoirement les procès-verbaux et les comptes rendus écrits. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, sur l'article.
M. Ronan Kerdraon. L’article 1er porte sur les liens d’intérêts et la transparence dans le milieu médical. Le drame récent du Mediator a montré combien l’indépendance des experts et la transparence pouvaient faire défaut dans ce milieu.
Le texte du Gouvernement n’a pas, dans les faits, ajouté grand-chose au droit en vigueur. En effet, des dispositions analogues étaient déjà prévues dans les textes législatifs spécifiques aux instances sanitaires, exceptions faites de l’Institut national du cancer et des agences régionales de santé.
Au contraire, le projet de loi initial prévoyait la suppression de certains dispositifs spécifiques, souvent plus complets et plus détaillés. C’est sans doute ce à quoi notre collègue Jean-Louis Lorrain faisait référence lorsqu’il évoquait « une écriture sans excès ». Outre le fait que sa rédaction était confuse et imprécise, l’article proposé par le Gouvernement ne prévoyait ni définition des liens et des conflits d’intérêts ni système de contrôle centralisé des déclarations.
Or les exemples de conflits d’intérêts sont nombreux. Ainsi, la recommandation de la Haute Autorité de santé sur le traitement médicamenteux du diabète de type 2 a été remise en cause par l’association FORMINDEP, qui a saisi le Conseil d’État. Celui-ci, dans un arrêt en date du 27 avril 2011, a annulé la décision par laquelle le président de la Haute Autorité avait refusé d’abroger cette recommandation et lui a enjoint d’effectuer cette abrogation dans un délai de quinze jours.
Pour justifier sa décision, le Conseil d’État a relevé que l’association avait « produit à l’appui de ses allégations des éléments susceptibles d’établir l’existence de liens d’intérêts entre certaines personnes ayant participé au groupe de travail et des entreprises ou établissements intervenant dans la prise en charge du diabète » et que, à aucun moment, « la Haute Autorité de santé n’a été en mesure de verser au dossier l’intégralité des déclarations d’intérêts dont l’accomplissement était pourtant obligatoire de la part des membres de ce groupe de travail ».
De fait, les experts externes des agences ont l’habitude des collaborations avec l’industrie pharmaceutique. L’IGAS relève que, à l’AFSSAPS, ces derniers ont en moyenne six liens d’intérêts chacun. Ce chiffre est d’autant plus significatif que plus d’un quart des experts – 28 % d’entre eux pour être précis – de l’Agence n’ont aucun lien d’intérêts. La simple déclaration d’intérêts proposée par le ministre était donc insuffisante.
Le texte adopté par la commission des affaires sociales, sur l’initiative du rapporteur Bernard Cazeau, a permis des avancées significatives. Ainsi, l’article étend dès à présent la déclaration d’intérêts aux dirigeants des autorités sanitaires et interdit au président de la Haute Autorité de santé et au directeur général de l’AFSSAPS, dans les trois ans précédant leur mandat et au cours de celui-ci, tout lien susceptible d’affecter l’exercice de leurs fonctions. Pour des fonctions aussi importantes, la transparence en matière de relations d’intérêts ne suffit pas. Aucun conflit d’intérêts ne doit tout simplement être possible.
Les déclarations d’intérêts seront par la suite confiées à l’Autorité de déontologie de la vie publique, l’ancienne commission de déontologie créée par la loi Sapin en 1993. Cet ajout tient du bon sens et témoigne de l’impartialité complète dont devront faire preuve les membres des autorités sanitaires dans le futur.
L’article 1er prévoit aussi, parallèlement à la captation vidéo, de diffuser gratuitement en ligne un procès-verbal intégral comprenant « le détail et les explications des votes, y compris les opinions minoritaires ». Il est, de fait, plus aisé de rechercher sur Internet une parole écrite que de devoir retrouver dans une vidéo un passage précis.
Enfin, si l’article supprime la référence au secret industriel et commercial censé limiter la publicité des débats, c’est pour confier le contrôle du respect des secrets protégés par la loi à la Commission d’accès aux documents administratifs afin d’éviter toute invocation abusive tendant à limiter la publicité des débats au sein des agences.
L’article 1er ainsi modifié par la commission permet donc de mettre fin à des pratiques qui n’ont que trop duré dans le milieu médical. Comme le rappellent les inspecteurs de l’IGAS, dans leur rapport d’avril dernier, « la qualité et la légitimité de l’expertise dépendent de son impartialité, de la garantie que celle-ci ne résulte pas d’une analyse biaisée ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 2, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 5 à 7
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
« Art. L. 1451–1. –I.- Nul ne peut être membre des commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale, dirigeant, membre des personnels de direction et d’encadrement, ou membre des instances collégiales, des commissions, des groupes de travail et conseils des autorités et organismes mentionnés aux articles L. 1123-1, L. 1142-22, L. 1222-1, L. 1313-1, L. 1413-2, L. 1415-2, L. 1417-1, L. 1418-1, L. 1431-1, L. 3135-1 et L. 5311-1 du présent code, à l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, à l’article 5 de la loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale et à l’article 13 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, s’il n’apporte pas la preuve par écrit qu’il n’a pas, depuis au moins trois ans, d’intérêts directs ou indirects dans le champ de compétence de l’agence.
« Cette déclaration est remise à l’autorité administrative compétente.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’affaire du Mediator, parce qu’elle a mis en évidence les failles de notre système sanitaire, a soulevé de manière directe la question de l’indépendance des experts qui participent à la prise de décision des différentes agences. À l’occasion de la création d’une commission d’enquête sur la grippe A/H1N1, qui s’attardait notamment sur le rôle de l’industrie pharmaceutique dans la prise de décision des pouvoirs publics, le groupe CRC avait déjà mis en évidence les imbrications qui existaient entre les conseillers du Gouvernement, les experts des agences et les firmes pharmaceutiques.
Depuis, les exemples se sont multipliés, au point que, lors des auditions organisées au Sénat dans le cadre de la mission commune d’information sur le Mediator présidée par notre collègue François Autain, certaines personnes entendues ont signalé que, contrairement à ce que prévoyait la réglementation, certains représentants des laboratoires venus solliciter une demande d’autorisation de mise sur le marché, une AMM, ne prenaient pas la précaution de sortir durant les délibérations. Autant dire que les membres des commissions débattaient devant ceux qui avaient un intérêt financier et immédiat à ce que l’affaire se fasse ! Cela n’est pas très sain, particulièrement quand on sait que l’immense majorité des experts a des liens d’intérêts avec ces mêmes laboratoires.
À cet égard, l’article 1er constitue une avancée puisqu’il contraint tous les experts à faire connaître leurs liens d’intérêts et renforce l’interdiction qui leur est faite de participer à des délibérations les concernant. La publicité des débats est une nouveauté qui devrait permettre au grand public de s’assurer que cette obligation est bel et bien respectée.
Pour notre part, nous considérons néanmoins qu’il faut aller encore plus loin. Nous proposons donc que la loi interdise aux personnes qui ne peuvent pas prouver l’absence de liens d’intérêts directs ou indirects avec des laboratoires durant les trois ans précédant leur prise de fonctions de travailler au sein des agences sanitaires.
Nous sommes convaincus que pour en finir avec les risques de conflits d’intérêts, il faut mettre en terme à certaines pratiques. Les expertises pré-AMM doivent aujourd’hui être le fait d’experts non seulement indépendants, mais aussi internes à l’Agence. Nous faisons nôtres l’analyse et la préconisation du rapport de l’IGAS sur « la pharmacovigilance et gouvernance de la chaîne du médicament » quand celui-ci souligne en page 11 : « La capacité d’expertise en interne à l’agence ne suffit pas. L’AFSSAPS doit disposer d’un noyau d’experts capables de discuter d’égal à égal avec les représentants des CRPV et avec une commission consultative externe ».
Nous sommes également en accord avec ce rapport quand il souligne à la page 17 que « ce modèle d’expertise externe présente de très sérieux défauts, comme l’a montré le rapport sur le Mediator : la porosité existant entre experts externes et firmes pose la question de l’indépendance de ces experts, a fortiori compte tenu de l’incapacité des autorités publiques à faire appliquer correctement les règles prévenant les conflits d’intérêts ».
C’est sur la base de ce constat que nous vous invitons à voter en faveur de cet amendement portant création de ce corps d’experts internes et indépendants.
M. le président. L'amendement n° 75, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Après les mots :
des ministres en charge de la santé et de la sécurité sociale
insérer les mots :
, les membres des cabinets des ministres,
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement vise à compléter la liste des personnes soumises à l’obligation de déclaration publique d’intérêts.
Les membres des cabinets des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ayant pour rôle d’éclairer les ministres dans leur prise de décision, il nous semble primordial qu’ils soient également soumis à l’obligation de déclaration publique d’intérêts, ce qui n’est pas prévu par le texte en son état actuel.
Aussi, mes chers collègues, nous soumettons à votre appréciation cet amendement ayant pour objet d’ajouter les membres des cabinets des ministres de la santé et de la sécurité sociale à la liste des personnes soumises à l’obligation de déclaration publique d’intérêts. Nous vous le proposons dans l’optique d’une transparence toujours plus grande des processus conduisant à la prise de décision en matière de santé publique.
Il doit être perçu non pas comme un amendement de défiance par rapport à l’État, mais plutôt comme un amendement de caractère préventif. Il ne s’agit pas d’interdire l’accès des cabinets ministériels aux personnes qui pourraient être concernées par des conflits d’intérêts,…
M. Jean-Claude Gaudin. Ah ! Tout de même !
Mme Aline Archimbaud. … mais plutôt d’éviter les ambiguïtés et les soupçons qui pourraient peser sur elles et leur travail.
La défiance des Français vis-à-vis des hommes et des femmes politiques est un phénomène qui doit nous préoccuper dans cette assemblée comme ailleurs. Une volonté manifeste de ne pas rendre publics les liens pouvant exister entre les industries pharmaceutiques et certains membres des cabinets ministériels serait un mauvais signal envoyé à nos concitoyens. La suspicion envers la classe politique tout entière est insupportable à nombre d’entre nous. Ne perdons pas l’occasion de la faire reculer !
M. le président. L'amendement n° 55, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 5
Après la référence :
L. 1123-1,
insérer la référence :
L. 1142-5,
II. – Alinéas 6 à 9
Remplacer ces alinéas par deux alinéas ainsi rédigés :
« Cette déclaration adressée, selon le cas aux ministres, aux directeurs ou aux présidents des autorités ou organismes mentionnés à l’alinéa précédent, mentionne les liens d’intérêts de toute nature, directs ou par personne interposée, que le déclarant a, ou qu’il a eus pendant les cinq années précédant sa prise de fonctions, avec des entreprises dont les activités, les techniques et les produits entrent dans le champ de compétence de l’autorité sanitaire au sein de laquelle il exerce ses fonctions, ou de l’organe consultatif dont il est membre, ainsi qu’avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans les mêmes secteurs.
« Elle est rendue publique. Elle est actualisée à l’initiative de l’intéressée, dès qu’une évolution intervient concernant ses liens d’intérêts.
III. – Alinéa 27
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« Art. L. 1452-1. – Une charte de l’expertise sanitaire, approuvée par décret en Conseil d’État, s’applique aux expertises réalisées dans les domaines de la santé et de la sécurité sanitaire à la demande du ministre chargé de la santé ou à la demande des autorités et des organismes mentionnés au I de l’article L. 1451-1. Elle précise les modalités de choix des experts, le processus d’expertise et ses rapports avec le pouvoir de décision, la notion de lien d’intérêts, les cas de conflit d’intérêts, les modalités de gestion d’éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par des experts présentant un conflit d’intérêts. »
IV. – Alinéas 36 et 37
Supprimer ces alinéas.
V. – Alinéas 41 et 42
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement technique demande une explication qui l’est autant !
Le I vise à ajouter, au sein de l’article 1er, les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, ou CRCI, à la liste des instances concernées par les DPI.
Par ailleurs, nous pensons qu’il n’est pas utile de créer une autorité administrative compétente dédiée, les déclarations pouvant être simplement adressées soit aux ministres soit aux agences concernées. C’est l’objet du II et du IV.
Le III rétablit la charte de l’expertise sanitaire qui nous paraît indispensable. En effet, cette charte devra préciser les modalités de choix des experts, le processus d’expertise et ses rapports avec le pouvoir de décision, la notion de lien d’intérêts, les cas de conflits d’intérêts, les modalités de gestion d’éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par des experts présentant un conflit d’intérêts. L’importance de cette charte est donc réelle !
Le V supprime les alinéas 41 et 42 qui sont inutiles. En effet, les procès-verbaux des séances des commissions sont des documents administratifs dont il n’y a pas lieu de faire mention spéciale dans la liste prévue à l’article 21 de la loi n° 78–753 du 17 juillet 1978.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. L’amendement n° 2 a le mérite de souligner que le projet de loi ne règle pas la question de la création d’un corps d’experts indépendants.
Cependant, je ne pense pas que l’on puisse dès à présent interdire aux experts d’avoir des intérêts directs ou indirects dans le champ de compétence de l’Agence. Ce serait nous priver de connaissances utiles pour l’expertise sanitaire.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La solution réside dans la création d’un corps public d’experts indépendants. Or, en la matière, le Gouvernement seul peut en décider. Aussi la commission a-t-elle émis un avis défavorable sur cet amendement, qui n’est pas compatible avec le texte qu’elle a adopté.
La commission est favorable à l’amendement n° 75. Cette obligation faite à tous les membres des cabinets ministériels est certes prévue par le projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique. Mais, puisque le Gouvernement a choisi, avec le présent projet de loi, de faire figurer dans le code de la santé publique des dispositions parallèles relatives au secteur sanitaire, cette précision est utile.
J’en viens à l’amendement n° 55. Nous aurions pu être favorables au I, mais, comme M. Lorrain a refusé de scinder son amendement en commission, et comme il persiste à ne pas le faire, nous ne pouvons qu’émettre un avis défavorable sur cet amendement dont les II, III, IV et V remettent en cause le texte de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 75. L’apport qu’il prévoit était effectivement contenu dans le projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique. S’il vous paraît plus à sa place dans le texte que nous discutons actuellement, je n’y vois pas de problème. Pour ma part, j’ai déjà appliqué cette réglementation au sein de mon cabinet, de façon certainement plus contraignante que ne le prévoiront vos recommandations.
Le Gouvernement est également favorable à l’amendement n° 55.
En revanche, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 2, pour deux raisons.
D’une part, le débat sur l’indépendance des experts tend à occulter le fait que les experts, s’ils sont internes, ont un caractère indépendant. Le rapport des professeurs Debré et Even évoquait la nécessité de mettre en place des « super-experts ». Si les termes diffèrent, la logique de notre texte est en revanche la même. Le renforcement des moyens permettra en outre de leur proposer une rémunération de très bon niveau. La question du déroulement de carrière n’est pas non plus anecdotique dans cette optique. Ce que prévoit le texte me semble donc aller dans le sens que vous souhaitez.
D’autre part, sans vouloir imprimer aux débats une tonalité trop personnelle, il est certain que si l’on avait appliqué le principe d’un tel amendement Dominique Maraninchi, qui m’accompagne en ces lieux, n’aurait jamais pu être nommé à la tête de l’INCA, l’Institut national du cancer. Il était en effet PU-PH, professeur des universités-praticien hospitalier, et travaillait dans le cadre de contrats de recherche financés par l’industrie. Mais, en l’occurrence, la situation était claire.
En tout état de cause, les parlementaires peuvent demander à auditionner les personnes dans cette situation. Si les choses sont connues, il me semble que cela vaut la peine d’établir un rapport bénéfices-risques ! Adopter cet amendement, c’est refuser de voir le bénéfice qu’il y a à nommer un expert alors qu’il ne présente pas de risque de conflit d’intérêts ; c’est se priver de la possibilité de nommer des personnalités particulièrement compétentes au prétexte qu’elles auraient eu, à un moment ou à un autre, des intérêts même indirects dans le champ de compétence de l’Agence.
Je ne m’appesantirai pas sur le débat portant sur la différence entre le conflit d’intérêts et le lien d’intérêts. Il ne s’agit pas du tout de la même chose ! Dominique Maraninchi – qu’il me pardonne de le prendre encore à témoin ! – est l’exemple type. Je le répète, il n’aurait pas pu être nommé à la tête de l’INCA si un tel dispositif avait été appliqué.
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote sur l'amendement n° 2.
M. Dominique Watrin. Je souhaite répondre aux interrogations qui ont été exprimées, notamment par le rapporteur, quant à la faisabilité immédiate de la mesure que nous proposons avec l’amendement n° 2. J’espère d’ailleurs que l’amendement n° 4 que nous avons déposé et qui tend à insérer un article additionnel après l’article 1er réussira à satisfaire le rapporteur.
L’amendement n° 2, que nous avions déjà déposé en commission, visait à ce que l’important sujet de l’indépendance des experts soit débattu en séance publique. Cette question est en effet au cœur de toutes les crises sanitaires que notre pays a eu à connaître. Comme le souligne à raison le rapport sénatorial intitulé « La réforme du système du médicament, enfin », la question de l’indépendance de l’expertise paraît aujourd’hui centrale « pour espérer regagner la bataille de la confiance dans le système de santé », ce qui a d’ailleurs été exprimé sur plusieurs travées de cet hémicycle.
Nous retirons donc cet amendement, en espérant que l’amendement n° 4 recevra un avis favorable du rapporteur.
M. le président. L'amendement n° 2 est retiré.
La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Notre groupe votera évidemment en faveur de l’amendement n° 75.
J’en viens à l’amendement n° 55.
Sur le principe, je ne vois pas pourquoi nous nous opposerions à une « charte de l’expertise » ayant pour objet de préciser les modalités de choix des experts, quand bien même la rédaction du texte serait imparfaite.
La véritable question est de savoir si le dispositif est efficace. Pour ma part, je souscris à ce que M. le ministre a indiqué ; d’ailleurs, l’exemple qu’il a pris me semble pertinent. Nous ne pouvons pas nous priver de l’expérience des experts.
En revanche, nous n’avons pas résolu le problème du contrôle sur les nominations. Le texte prévoit que les responsables des organismes les plus importants dans la chaîne du médicament ne doivent pas avoir eu de lien d’intérêts de nature à affecter un exercice impartial de leurs fonctions pendant les trois années précédant leur nomination. Mais qui assurera le contrôle de cette règle ? L’autorité de nomination. Autant dire qu’elle sera à la fois juge et partie !
Dans ces conditions, la solution proposée ne nous satisfait pas, et nous nous abstiendrons.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote sur l’amendement n° 55.
Mme Chantal Jouanno. Je soutiens de nouveau l’amendement n° 55.
Comme cela vient d’être souligné, personne ne peut s’opposer à ce que les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux soient soumises aux mêmes obligations que les autres commissions.
Nous avons fait le choix de ne pas scinder cet amendement, monsieur le rapporteur.
Je conçois parfaitement que l’on puisse préférer avoir une autorité de déontologie unique plutôt que plusieurs organismes, mais ce n’est pas le cas actuellement. Faisons donc déjà un premier pas aujourd'hui. Nous pourrons très bien ensuite appliquer le même dispositif à l’autorité unique qui sera instituée après l’adoption du projet de loi inspiré des conclusions du rapport Sauvé.
Je ne répéterai pas ce que j’ai dit sur la charte de l’expertise pendant la discussion générale. Je précise simplement qu’il nous appartient, en tant que législateurs, de fixer les principes. Laissons à la charte le soin de traiter des cas particuliers. Mais, en refusant un tel outil, nous nous priverions de la possibilité de déterminer un cadre garantissant les principes du contradictoire, de pluralité, de transparence et d’impartialité, que j’évoquais tout à l’heure.
M. le ministre s’est exprimé voilà quelques instants sur la question soulevée à l’alinéa 9 de l’article 1er. Il me semble que la commission a auditionné M. Maraninchi et M. Harousseau, le président de la Haute Autorité de santé, l’HAS, mais pas les responsables de l’INCA. Je voudrais donc faire une suggestion : pourquoi ne pas graver dans le marbre que les dirigeants des organismes concernés doivent systématiquement être auditionnés par les commissions parlementaires compétentes ?
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Serait-il possible de voter par division sur cet amendement ? Dans ce cas, nous pourrions nous prononcer en faveur du I.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. C’est ce que j’ai proposé tout à l’heure, mais l’auteur de l’amendement s’y oppose !
M. le président. Monsieur Jean-Louis Lorrain, acceptez-vous qu’il soit procédé à un vote par division sur l’amendement n° 55 ?
M. Jean-Louis Lorrain. Je ne suis pas hostile par principe à un vote par division sur mon amendement. Mais je tiens à ce que le volet consacré à la charte de l’expertise – il s’agit pour nous d’une disposition fondamentale – soit maintenu. Si le vote par division est un moyen de le faire disparaître, je ne peux pas l’accepter. D’ailleurs, en commission, j’ai défendu une position globale, et je préfère m’y tenir.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Le I, auquel nous sommes favorables, ne saurait faire passer la pilule des autres paragraphes de l’amendement, auxquels nous sommes hostiles.
Nous soutenons le I de l’amendement, qui vise à intégrer les commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux, les CRCI, dans le champ des instances concernées par les DPI.
Mais nous sommes notamment défavorables au II, qui concerne les alinéas 6 à 9 de l’article 1er, au III, qui porte sur l’alinéa 27, et au V, qui vise à supprimer les alinéas 41 et 42.
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que, dans le cas d’un vote par division, le vote sur chacune des divisions est suivi d’un vote sur l’ensemble de l’amendement.
Dans ces conditions, je vous propose de voter directement sur l’amendement n° 55.
Je mets aux voix l’amendement n° 55.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous arrivons à la discussion de l’amendement n° 107, qui vient d’être déposé par le Gouvernement.
Or la commission des affaires sociales n’a pas encore eu le temps de l’examiner, à l’instar d’ailleurs des autres amendements qui viennent également d’être déposés par le Gouvernement.
Je sollicite donc une suspension de séance d’une dizaine de minutes pour réunir la commission afin de lui permettre de se prononcer sur ces nouveaux amendements.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures vingt, est reprise à dix-huit heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
L'amendement n° 107, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les présidents, les directeurs et les directeurs généraux des instances mentionnées aux articles L. 1142-22, L. 1222-1, L. 1313-1, L. 1413-2, L. 1415-2, L. 1417-1, L. 1418-1, L. 3135-1 et L. 5311-1 du présent code, à l'article L. 161-37 du code de la sécurité sociale, à l'article 5 de la loi n° 2001-398 du 9 mai 2001 créant une Agence française de sécurité sanitaire environnementale et à l'article 13 de la loi n° 2006-686 du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité en matière nucléaire, sont auditionnés par le Parlement avant leur nomination.
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Il s’agit tout simplement ici de mettre en œuvre ce que j’ai déjà proposé pour d’autres instances, notamment pour l’AFSSAPS, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
L’audition par des parlementaires permettra, d’une part, d’apprécier les qualités, les ambitions, la vision de celles et ceux qui rempliront ces fonctions et, d’autre part, donnera la possibilité, j’en suis persuadé, aux futurs candidats d’évaluer si les liens qu’ils ont pu tisser par ailleurs posent un problème particulier.
Cet amendement va donc dans le sens de la clarification dont j’ai parlé tout à l’heure.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Ces auditions seront certainement intéressantes et permettront aux parlementaires d’être informés des projets des nouveaux dirigeants. Néanmoins, il ne s’agit pas véritablement d’une mesure de transparence, monsieur le ministre.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. À plusieurs reprises, nous avons affirmé que nous interviendrions et que nous voterions dans un esprit constructif.
Ayant entendu l’avis de sagesse de M. le rapporteur et constatant que M. le ministre a tenu compte de nos interventions respectives, nous ne serons pas plus royalistes que le roi et nous voterons cet amendement. Il nous semble, effectivement, que les parlementaires doivent avoir un rôle à jouer en la matière.
La preuve est donc faite, madame Jouanno, que nous pouvons également répondre positivement à certaines propositions ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.
Mme Chantal Jouanno. Le groupe UMP s’inscrit dans ce grand mouvement d’œcuménisme (Nouveaux sourires.) et soutient fermement cet amendement.
Les personnes qui sont amenées à exercer des responsabilités au sein des instances intervenant dans le champ de la santé doivent pouvoir être auditionnées par les commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat. Cette disposition nous semble de nature à prévenir les conflits d’intérêts et pourrait être substituée à l’alinéa 9 de l’actuel article 1er, qui va jusqu’à interdire tout lien d’intérêts direct pour ces personnes.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Simple sénatrice, je m’élevais déjà contre le dépôt d’amendements gouvernementaux de dernière minute, quel que soit le ministère concerné. Je m’élève donc également aujourd’hui contre cette pratique en tant que présidente de la commission des affaires sociales.
Certes, je comprends qu’en raison de certains impératifs gouvernementaux des propositions nous parviennent au dernier moment. Néanmoins, il s’agit ici d’un texte important, attendu, compliqué de surcroît, et sur lequel nous ne voulons pas nous tromper.
Le rapporteur a émis un avis de sagesse et la commission le suivra. Mais déposer des amendements de dernière minute en séance publique – j’attire l’attention du Gouvernement sur ce point – n’est pas une pratique très démocratique, car, en l’occurrence, les membres de la commission n’ont eu que quelques minutes pour examiner ces propositions.
M. Jacky Le Menn. C’est un hommage indirect à la compétence des commissaires…
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. D’autres amendements, que nous examinerons bientôt, ont été déposés par le Gouvernement en même temps que celui-ci. Dans la mesure où ils sont un peu plus complexes que l’amendement n° 107, qui vise simplement à introduire davantage de transparence, leur examen aurait mérité qu’on y consacre un peu plus de temps.
Je me devais de le dire, et je l’ai fait !
M. Ladislas Poniatowski. Autrement dit, n’y revenez pas, monsieur le ministre ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 3 rectifié, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 16
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque les débats mentionnés au 2° font référence aux conclusions de groupes de travail, ces conclusions sont annexées aux procès-verbaux établis et diffusés en application du même alinéa. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet article aborde la question essentielle de la publicité des séances des commissions des différentes agences sanitaires.
Cette publicité constitue le corollaire indispensable à l’existence d’un régime de déclaration d’intérêts, qui demeure bien inférieur aux préconisations du rapport sénatorial intitulé La réforme du système du médicament, enfin.
C’est bien parce que nous continuons à conserver, pour un temps seulement, je l’espère, ce régime hybride que la publicité des travaux des différentes agences est incontournable. Il faut que les liens d’intérêts soient connus de tous - c’est chose faite -, mais également que les décisions prises par les experts soient connues afin que le grand public puisse s’assurer par lui-même qu’elles sont sans lien avec les intérêts que les experts ont par ailleurs déclarés.
En ce sens, la rédaction proposée par le rapporteur en commission des affaires sociales constitue une avancée notable, puisque les laboratoires ne pourront plus demain, contrairement à ce que prévoyait le projet de loi initial, s’abriter derrière le secret médical ou industriel pour empêcher la publication de certains éléments pourtant indispensables à une meilleure compréhension des prises de position des différents experts.
En commission, soucieux d’étendre cette exigence de transparence à l’ensemble de la chaîne de prise de décision, nous avions proposé d’élargir la publicité aux groupes de travail. Cette rédaction un peu abrupte a fait craindre à nos collègues un amoindrissement du travail réalisé dans ces groupes, ce qui n’était évidemment pas notre intention.
Pour autant, les travaux réalisés au sein de ces groupes présentent un intérêt réel, car ils contribuent à nourrir l’avis des commissions sur lesquels se fondent des décisions administratives. Il arrive même, ce fut le cas du Mediator, que les commissions de l’AFSSAPS se contentent d’approuver les travaux réalisés par le groupe de travail et ne produisent pas elles-mêmes les études d’expertise ou de réflexion.
Dans une telle situation, rendre publiques les séances des commissions reviendrait à ne rendre publique qu’une prise d’acte, ce qui n’est pas satisfaisant et risquerait même d’entraîner un transfert, des commissions vers les groupes de travail, réduisant à néant les avancées introduites dans cet article, la phase la plus importante, c’est-à-dire la phase d’expertise et de débats contradictoires, ayant lieu au sein du groupe de travail.
Il convenait donc de trouver une solution qui permette la transparence tout en n’entravant pas les groupes de travail.
Avec l’aide de la commission, nous sommes parvenus à une proposition médiane, à notre avis acceptable par tous, puisque nous suggérons de rendre publiques, dans certaines conditions, les conclusions de ces groupes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. En l’état, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Défavorable !
Un long débat a eu lieu à l’Assemblée nationale sur cette question. Je rappelle que ces groupes de travail sont uniquement préparatoires et non décisionnaires. Je souligne également que c’est moi qui ai proposé que les séances des travaux en commission soient enregistrées.
C’est une avancée sans pareille qui nous a d’ailleurs permis, sur un médicament, de discerner les positions et les attitudes des uns et des autres ; cela n’a pas été inutile.
Mais, en tout état de cause, je ne suis pas sûr que, si l’on se fixe des obligations impossibles à respecter, on aura beaucoup progressé pour autant… Certains pourront même nous reprocher de ne pas respecter la loi dont nous aurons nous-mêmes pris l’initiative.
Par ailleurs, il s’agit de travaux préparatoires. Donc, tout ce qui sortira de ces travaux préparatoires sera bel et bien consigné. Les groupes de travail ont pour mission de mener des travaux préparatoires qui, comme leur nom l’indique, préparent les commissions, dans lesquelles tout est enregistré.
Voilà pourquoi je pense que cet ajout, qui ne fera que compliquer les choses, n’est pas opportun. Je réitère donc, devant le Sénat, le questionnement qui avait été le mien à l’Assemblée nationale.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Seules les conclusions sont annexées !
M. Xavier Bertrand, ministre. Certes, mais on pourra très bien demander, au-delà des conclusions, quels sont les différents avis. C’est la même chose. Je suis prêt à avoir cette transparence, mais, sur la question de l’enregistrement public, une telle disposition me paraît très compliquée à mettre en œuvre s’agissant de travaux qui n’ont pas un caractère décisionnaire.
Je m’inscris tout à fait dans la logique de la transparence, je n’ai aucun problème pour aller jusqu’au bout, mais, dans les faits, il faut évaluer les contraintes que cette obligation peut créer et se demander s’il est possible de la mettre en œuvre.
Honnêtement, je pense que cette proposition ne nous apportera rien en termes d’enregistrement public. On peut même se demander qui cela intéressera, alors même que la publicité des travaux en commission, elle, est garantie.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il faut distinguer deux choses : les débats de ces groupes de travail et leurs conclusions.
Je n’ai pas accepté que les débats soient publiés, comme certains de nos collègues me l’avaient demandé, parce que cela aurait pu entraver des expressions intéressantes. Lors d’un débat, les experts, par exemple, peuvent tenir des propos qui doivent rester en interne. Certes, le débat importe, mais ce qui compte pour nous, pour la transparence, ce sont les conclusions du débat.
C'est la raison pour laquelle j’ai accepté que soient publiées les conclusions des commissions, qui ne sont d'ailleurs pas toutes obligatoirement préparatoires, monsieur le ministre, puisque cela n’est pas précisé. Je suis sûr que, dans les groupes préparatoires ou autres, on a certainement évoqué le problème du Mediator, mais que la commission a ensuite enterré la question.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il n’y avait rien de public, en effet, mais la commission a enterré cette question, même si les groupes préparatoires avaient demandé à ce qu’elle soit revue.
Rendre publiques les conclusions des travaux des groupes préparatoires ou des différentes commissions de réflexion permet de ménager au débat toute sa liberté tout en garantissant la transparence. Je ne vois pas en quoi cela soulève un quelconque problème. Il est au contraire intéressant de le faire, monsieur le ministre.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Si j’ai bien compris, des groupes de travail formulent des conclusions et établissent des rapports qui sont ensuite transmis aux commissions. Le travail des commissions est rendu public. Par conséquent, les rapports qui sont remis aux commissions deviennent eux-mêmes publics. Il est donc inutile d’aller au-delà.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. J’entends bien les arguments de M. le ministre, mais, si nous avons déposé cet amendement, c’est parce qu’il arrive souvent que, dans les faits, les commissions de l’AFSSAPS se contentent d’approuver les travaux réalisés par les groupes de travail, ne produisant pas elles-mêmes les travaux d’expertise ou de réflexion. Ce fut notamment le cas pour le Mediator, où la commission d’autorisation de mise sur le marché s’est contentée d’approuver les conclusions du groupe de travail.
Il ne faudrait pas que les commissions servent uniquement de chambres d’enregistrement et que, de ce fait, ne soient pas connues les conclusions des groupes de travail. C'est la raison pour laquelle nous insistons et maintenons notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Plus on a de transparence, mieux c’est !
Je vais prendre un exemple qui n’a rien à voir avec le Mediator ou avec tout autre problème d’ordre médical.
Ayant participé à la mission commune d’information sur les conséquences de la tempête Xynthia, j’ai constaté que, par le passé, à la suite de catastrophes naturelles, de nombreux rapports avaient été établis, des alertes avaient été émises, des systèmes de prévention avaient été proposés. Or, malgré cette masse d’informations, rien n’avait été fait, rien n’avait été prévu qui aurait pu éviter les conséquences de cette tempête.
Il est donc essentiel de tirer les leçons d’un certain nombre de catastrophes ou de scandales qui ont été dénoncés tout à l’heure à la tribune et de prendre en compte cette demande d’information, cette volonté de transparence, qu’il faut envisager comme une aide à la prise de décision, en toute objectivité.
Le groupe socialiste votera donc cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Il n’est pas dans mes habitudes d’être iconoclaste, mais je voudrais quand même dire que la transparence peut être dangereuse.
Je suis pour que les choses soient claires, mais « il faut cesser de croire que toute occultation cache un acte délictueux », comme l’a récemment écrit un philosophe. Le fait de ne pas dire n’implique pas obligatoirement de se sentir coupable de participation à un acte délictueux.
Ce même philosophe écrit encore : « Il y a bien évidemment des ombres légitimes et des opacités vertueuses. » Je le pense aussi, ce qui ne veut pas dire, bien sûr, qu’il ne faut pas prendre toutes les précautions, ce à quoi nous nous efforçons.
Mais méfions-nous des excès de vertu. On sait très bien que la suppression du secret médical, par exemple, entraînerait l’effondrement de la médecine. Mais il ne faut pas non plus le sacraliser, au risque de nuire.
Mme Isabelle Pasquet. Cela n’a rien à voir !
M. Jean-Louis Lorrain. Prenons garde au « toujours plus » ! N’oublions pas que la notion de secret aussi se dilue avec le temps, pour paraphraser encore les propos du même philosophe.
Tels sont les éléments de réflexion que je voulais verser aux débats.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, l’intervention de M. Lorrain me laisse penser que, finalement, vous n’êtes pas tous d’accord. En effet, M. Lorrain nous dit qu’il faut parfois garder certaines choses secrètes, alors que M. Milon et M. le ministre nous rétorquent que les conclusions sont publiques.
M. Jean-Louis Lorrain. Mais non !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Monsieur Lorrain, excusez-moi, mais M. Milon vient de dire que les conclusions étant déjà publiques cet amendement ne servait à rien, et vous, vous nous dites qu’il est inutile parce que, finalement, tout n’est peut-être pas à dire !
En tout cas, ce qui est visé – et vous l’avez suggéré tout à l’heure, monsieur le ministre – dans cet amendement auquel la commission a donné un avis favorable, c’est le cas où les commissions ne s’appuient que sur les conclusions des groupes de travail. C’est ce que nous ne voulons pas.
Il n’est en aucun cas question d’imposer un enregistrement vidéo des débats des groupes de travail, il s’agit simplement d’annexer leurs conclusions aux procès-verbaux des commissions.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Non, ce n’est pas encore le cas !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Avec l’amendement que nous allons, je l’espère, adopter !
Il me paraît nécessaire d’adopter cet amendement pour que, effectivement, les commissions ne se contentent plus des conclusions des groupes de travail. On disposera par avance de ces conclusions et l’on saura que, à partir de ces documents, la commission fera un vrai travail.
Voilà ce qui est visé dans cet amendement : la commission mènera une vraie réflexion à l’issue des délibérations des groupes de travail qui auront, eux, rendu leurs conclusions. Aujourd'hui, ce n’est pas le cas, sinon nous n’aurions pas les difficultés que nous connaissons et la commission n’aurait pas à adopter cet amendement.
Au-delà de notre volonté de transparence, nous voulons aussi dire qu’il ne faut pas se contenter des conclusions des groupes de travail, même si, évidemment, elles vont servir de point d’appui. Il faut que la commission fasse à son tour le travail qui lui incombe à partir de ces conclusions.
Voilà le sens de cet amendement. Il n’est pas question d’enregistrements vidéo ou d’étalage sur la place publique de conclusions qui auparavant étaient secrètes, puisque ces conclusions sont connues, en tout cas par la commission.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la présidente, l’adoption de votre amendement aurait l’effet inverse de celui que vous souhaitiez,…
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Mais non !
M. Xavier Bertrand, ministre. … puisqu’il vise à permettre que soient enregistrées de façon audiovisuelle les réunions des groupes de travail comme celles des commissions.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Non, relisez l’amendement !
M. Xavier Bertrand, ministre. Son objet est très clair : il s’agit d’étendre les obligations d’enregistrement des séances aux groupes de travail préparant les travaux des commissions.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous faites référence à l’amendement n° 3, qui a depuis été rectifié.
M. Xavier Bertrand, ministre. Non, il s’agit bien de l’amendement n° 3 rectifié.
Si vous souhaitez que les conclusions soient annexées aux procès-verbaux, c’est bel et bien ce qui est prévu, et la version retenue par l’Assemblée nationale était précise en ce sens. Nous avons eu un très long débat à l’Assemblée nationale sur ce point.
Il n’y a pas ceux qui veulent plus de transparence et d’autres qui en voudraient moins. Environ quatre-vingts groupes de travail se réunissent tous les mois à l’AFSSAPS. S’il faut procéder à l’enregistrement audiovisuel quatre-vingts fois, c’est plus compliqué, pas pour moi, mais pour l’Agence.
Maintenant, si vous souhaitez que non seulement les conclusions mais aussi les comptes rendus soient déposés en annexe et rendus publics, il n’y a aucun problème, c’est bel et bien ce que l’on a prévu.
Mais, pour en revenir à l’objet de votre amendement, pour les raisons pratiques que je viens d’exposer, cela paraît difficile à mettre en œuvre.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Il faut se référer non pas à l’objet mais au texte de notre amendement !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. C’est le texte de l’amendement qui compte, pas l’objet !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne suis ministre que depuis quinze jours, veuillez excuser mon ignorance ! (Sourires sur plusieurs travées de l’UMP.)
S’il s’agit d’avoir des enregistrements vidéo, comprenez ma position…
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Notre alinéa s’insère désormais après l’alinéa 16, c’est donc différent !
M. Xavier Bertrand, ministre. Je le répète, s’il s’agit d’annexer les conclusions aux procès-verbaux des commissions, il n’y a aucun problème, c’était la version initiale de l’Assemblée nationale.
M. le président. L'amendement n° 73 rectifié, présenté par Mme Jouanno, est ainsi libellé :
Avant l'alinéa 27
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 1452-1A. - L’expertise sanitaire répond aux principes d'impartialité, de transparence, de pluralité et de contradictoire.
La parole est à Mme Chantal Jouanno.
Mme Chantal Jouanno. Cet amendement s’est, dès l’origine, inscrit dans la perspective de conservation d’une charte de l’expertise. Il s’agit toutefois d’en préciser le cadre et d’en inscrire les principes dans la loi en vue d’une expertise transparente et indépendante.
Cette expertise doit donc répondre aux principes d’impartialité, de transparence – il en a longuement été question à propos de la publicité des débats, et il me semble à cet égard que la diffusion des avis minoritaires est très importante –, de pluralité des experts – ce projet de loi le permet également – et de contradictoire, parce que c’est bien dans le contradictoire en général que l’on peut « lever les loups ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Mme Jouanno ayant modifié son amendement dans le sens souhaité par la commission, j’émets un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.
Mme Aline Archimbaud. Le mot « impartialité » ayant été ajouté, conformément au souhait émis ce matin en commission, le groupe socialiste-Europe Écologie Les Verts votera cet amendement.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 112, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 30
Après les mots :
instances collégiales d'expertise mentionnées à l'article L. 1451-1-1
insérer les mots :
et ayant trait aux produits mentionnés à l'article L. 5311-1,
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Il s’agit d’un amendement de précision.
La présence de spécialistes en médecine humaine ne saurait être étendue aux instances qui n’ont pas vocation à traiter de sujets se rapportant aux produits mentionnés à l’article L. 5311-1 du code de la santé publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission est défavorable à un amendement dont l’objet est plus restreint que ce qu’elle propose.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Faut-il le préciser, mesdames, messieurs les sénateurs, la présence de généralistes n’est pas nécessaire lorsqu’il s’agit de produits vétérinaires !
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Nous avons tous apprécié l’intervention originale de notre collègue Virginie Klès, tout à l’heure. Ceux qui l’ont bien écoutée ne pourront que voter contre cet amendement : c’est ce que fera le groupe socialiste-EELV.
M. le président. L'amendement n° 96, présenté par M. Cazeau, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 31
Supprimer la référence :
l’article L. 1312-5,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il s’agit d’un amendement formel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 97, présenté par M. Cazeau, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 32
1° Au début
Insérer les mots :
L’article L. 1312-5 du code de la santé publique et
2° Remplacer les mots :
est abrogé
par les mots :
sont abrogés
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il s’agit, là aussi, d’un amendement formel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er
M. le président. L'amendement n° 4, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 30 juin 2012, un rapport portant sur les modalités, le financement et les mécanismes de formation, à mettre en œuvre pour parvenir à la création au 1er janvier 2015 d’un corps d’experts interne à l’agence mentionnée à l’article L.5311-1 du code de la santé publique, ne présentant aucun lien d’intérêt avec des entreprises dont les activités, les techniques et les produits entrent dans le champ de compétence de l’autorité sanitaire.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Cet amendement revient sur la question centrale de la constitution, au sein de l’AFSSAPS, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, et peut-être demain de l’AFSSEPS, d’un corps d’experts indépendants interne à l’agence.
Le rapport sénatorial a mis en évidence que le système français, reposant sur une expertise presque exclusivement externe, est devenu obsolète. Il conclut, tout comme celui qui a été remis par les professeurs Debré et Even, à la nécessité de créer un corps d’experts permanents désignés par le ministre de la santé et composé principalement, mais en aucun cas uniquement, de professeurs des universités-praticiens hospitaliers ou de chefs de service.
Il faut en convenir, la création d’un tel corps prend du temps et nécessite que les pouvoirs publics aient la volonté de mobiliser les fonds nécessaires.
Il faut en effet proposer à ces experts des rémunérations les mettant à l’écart de tentations, notamment du secteur privé. Mais il sera également nécessaire, comme le souligne Philippe Foucras – le président du FORMINDEP, association pour une formation et une information médicales indépendantes – de recruter des médecins ou des scientifiques et de les former à l’expertise en matière de santé publique. Cette question de la formation est évidemment centrale. Avec le Mediator, c’est certes l’indépendance des experts de l’AFSSAPS qui a été remise en cause, mais également la qualité même de cette expertise.
Il faut donc permettre à l’agence de créer un tel corps qui doit être constitué, comme le précise Philipe Even, de véritables experts. Il faut aussi réussir à attirer l’élite de la médecine, en lui offrant un véritable statut, comme aux États-Unis, et une rémunération intéressante.
Il ne s’agit pas pour nous de défendre un amendement de repli destiné à contourner l’application de l’article 40 de la Constitution. Nous sommes persuadés que le Gouvernement doit être à l’initiative d’une refonte plus importante que celle qui est préconisée ici s’il veut parvenir à créer ce corps d’experts.
Les rapports parlementaires, tout comme ceux de l’IGAS, constituent des pistes intéressantes qu’il faut creuser, s’agissant notamment des modalités pratiques et des conditions financières.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Je ne peux qu’être favorable à un dispositif que j’ai réclamé à plusieurs reprises.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Des rapports, des rapports, toujours des rapports ! Mais il faut bien se rendre compte que la publication de ces documents nécessite en amont un énorme travail. Il aurait été plus judicieux de demander une évaluation du système qui va être mis en place dès le 1er janvier ; vous pouvez d’ailleurs procéder à cette évaluation vous-même, au bout de six mois de mise en œuvre.
Je sais ce qu’il advient de tous ces rapports. Je suis donc défavorable à cet amendement, par principe, et cela n’a même rien à voir avec l’article 40 de la Constitution !
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Après avoir entendu les propos de M. Watrin, lesquels témoignent de la grande différence d’appréciation existant entre nous, j’aimerais rappeler notre position sur la question des experts.
M. le ministre l’a clairement indiqué, nous préférons une collaboration avec les experts. Nous souhaitons également éviter de stigmatiser ceux qui seraient extérieurs au cénacle politique des bien-pensants, quel qu’il soit. Et nous estimons qu’il est aussi nécessaire de travailler avec le secteur industriel.
Il ne faut pas considérer les experts comme les membres d’une élite, ou les sacraliser. Moi qui suis membre d’un centre de recherches, ce n’est en tout cas pas du tout comme cela que je me vois ! Il s’agit plutôt de l’aboutissement d’un parcours. Vouloir créer des d’experts d’État me paraît donc difficile.
En ce qui concerne les spécialités, certaines sont effectivement tout à fait rares. Le plus important est de mettre la connaissance à la portée des citoyens et à la disposition des décideurs. Il est vrai que la connaissance est produite par les experts, mais ils ne sont pas isolés : en contact avec d’autres, ils travaillent dans la transdisciplinarité et sont capables d’être pluridisciplinaires.
Nous sommes là bien loin de la conception qui sous-tend l'amendement n° 4 !
Néanmoins, il est vrai que certaines choses doivent changer. Dans le cadre de la mission commune d’information relative au Mediator, nous avons entendu des experts quasi bénévoles, qui peinaient à se faire rembourser leurs frais de déplacement. Une telle situation n’est pas admissible. Il faut leur accorder un statut qui permette de les reconnaître comme des collaborateurs choisis pour la qualité de ce qu’ils peuvent offrir à la société.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Je rebondis sur ce que vient de dire M. Lorrain : nous sommes tout à fait favorables à la création d’un véritable statut pour ces experts. Nous ne demandons pas un rapport pour le plaisir ; nous débattons de dispositions destinées à améliorer la sécurité sanitaire dans notre pays, notamment en favorisant la transparence, car nous avons connu des drames.
Voilà la logique qui est la nôtre. Pour autant, nous avons entendu vos arguments sur les difficultés que cela allait engendrer et sur les risques d’assèchement. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit examinée la possibilité de créer un corps d’experts à l’horizon 2015.
Nous maintenons donc notre amendement et nous espérons qu’il sera voté.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Je ne vais pas reprendre l’exégèse du mot « expert », après le brillant exposé de notre collègue Jean-Louis Lorrain à l’instant, car je risquerais de lasser…
Nous devons examiner la proposition de nos collègues à l’aune de notre objectif, qui est de nous doter d’une expertise transparente, et donc indépendante. Cela suppose de conduire une réflexion sur le statut des experts si l’on ne veut pas que ces derniers aient des liens avec l’industrie pharmaceutique ou avec les laboratoires.
Pour en arriver là, soyons honnêtes, il faut faire exactement ce que vient de dire Mme Pasquet. Il s’agit non pas d’un rapport de plus, mais, bien au contraire, d’un outil qui nous permettra, à partir d’une analyse objective, d’apporter une réponse qui soit en cohérence avec ce projet de loi.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Ronan Kerdraon. Nous avons tous dit, en tout cas au moins les sénateurs de gauche, combien ce projet de loi tel qu’il était issu de l'Assemblée nationale était imparfait et incomplet. Nous sommes en train de l’améliorer.
M. Roland Courteau. Voilà !
M. Ronan Kerdraon. Le rapport dont nous discutons est une proposition de plus émanant de ceux qui sont dans l’opposition nationale, mais majoritaires dans cet hémicycle.
Le groupe socialiste-EELV votera donc cet amendement.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 1er.
Article 1er bis (nouveau)
Après le premier alinéa de l’article L.1415-4 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ne peuvent être nommées aux fonctions de président du conseil d'administration et de président du conseil scientifique, que les personnes ayant répondu à un appel à candidature, satisfaisant aux conditions mentionnées dans ce dernier et qui auraient fait la démonstration qu’elles n’ont pas d’intérêts directs ou indirects avec le champ de compétence de la Haute Autorité, dans les trois années qui précèdent leur candidature. Un décret en Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles les personnes candidates à la présidence du conseil d'administration et du conseil scientifique, font connaître l’absence de lien d’intérêts et les conditions dans lesquelles ce document est rendu public. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 25 est présenté par M. Barbier.
L'amendement n° 56 est présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l'amendement n° 25.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement vise à supprimer l’article 1er bis qui a été ajouté en commission à la demande de nos collègues du groupe CRC.
Cet article est en effet redondant avec l’alinéa 9 de l’article 1er, qui précise déjà très clairement les conditions dans lesquelles les candidats aux postes proposés doivent démontrer l’absence de liens d’intérêts.
Je ne vois donc pas ce qu’apporte cet article, si ce n’est l’appel à candidatures. Mais celui-ci risque de compliquer et de retarder sérieusement le processus de recrutement des présidents.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour présenter l'amendement n° 56.
M. Jean-Louis Lorrain. L’article 1er bis précise que le président du conseil d’administration ainsi que celui du conseil scientifique de l’Institut national du cancer sont nommés après avoir répondu à un appel à candidatures. Dans le cadre de cette procédure, ils doivent apporter la preuve qu’ils n’ont pas de liens d’intérêts avec le champ de compétence de la Haute Autorité de santé.
Or cette disposition, qui n’est pas harmonisée avec celles des autres instances intervenant dans le champ de la sécurité sanitaire, ne relève pas du domaine législatif. Je propose donc de la supprimer.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Ces amendements identiques tendent à supprimer l’article 1er bis, qui a été inséré par la commission. Nous y sommes donc défavorables.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est favorable à ces amendements identiques de suppression.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 25 et 56.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er bis.
(L'article 1er bis est adopté.)
Chapitre II
Avantages
Article 2
I. – Après le chapitre II du titre V du livre IV de la première partie du code de la santé publique, il est inséré un chapitre III ainsi rédigé :
« CHAPITRE III
« Avantages consentis par les entreprises
« Art. L. 1453-1. – Au terme de chaque année civile, les entreprises produisant ou commercialisant des produits mentionnés au II de l’article L. 5311-1 ou assurant des prestations associées à ces produits sont tenues de rendre publiques les conventions conclues ou appliquées au cours de l’année considérée entre elles et :
« 1° Les professionnels de santé relevant de la quatrième partie du présent code ;
« 2° Les associations de professionnels de santé ;
« 3° Les personnes morales assurant la formation initiale des professionnels de santé mentionnés au 1° ou participant à cette formation ;
« 4° Les associations d’usagers du système de santé ;
« 5° Les établissements de santé relevant de la sixième partie du présent code ;
« 6° Les fondations, les sociétés savantes et les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans le secteur des produits ou prestations mentionnés au premier alinéa ;
« 7° Les entreprises éditrices de presse, les éditeurs de services de radio ou de télévision et les éditeurs de services de communication au public en ligne ;
« 8° Les éditeurs de logiciels d’aide à la prescription et à la dispensation.
« II. – La même obligation s’applique à tous les avantages ou rémunérations, en nature ou en espèces, que les mêmes entreprises procurent ou versent, directement ou indirectement, aux personnes physiques ou morales mentionnées aux 1° à 8° du I et aux parlementaires nationaux et européens, aux membres des cabinets des ministères en charge de la santé et de la sécurité sociale ainsi qu’aux membres du Gouvernement.
« III. – L’ensemble des informations collectées en application du présent article sont disponibles sur un site internet unique et gratuit, conçu pour assurer un accès aisé à tout ou partie de ces informations et pour permettre des recherches à partir de la raison sociale de chacune des entreprises mentionnées au premier alinéa du I, ou du nom ou de la raison sociale des personnes énumérées aux alinéas 1° à 8° du même paragraphe.
« Sont également disponibles sur le site les informations relatives aux sanctions prononcées, en application de l’article L. 1454-3, en cas de non-respect des obligations définies au présent article.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
II. – L’article L. 4113-6 du même code est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, après les mots : « au présent livre » sont insérés les mots : « ou les étudiants se destinant à ces professions, » ;
1°bis (Supprimé)
2° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« Les dispositions du présent article ne sauraient soumettre à convention les relations normales de travail. » ;
3° (Supprimé)
4° (nouveau) Le quatrième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« L'entreprise est tenue de faire connaître à l'instance ordinale compétente si la convention a été mise en application. »
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 57, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
publiques les conventions
par les mots :
publique l’existence des conventions
II. – Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« ...° Les étudiants se destinant aux professions relevant de la quatrième partie du présent code ainsi que les associations et groupements les représentant ;
III. – Alinéa 11
Après les mots :
Les entreprises éditrices de presse
insérer les mots :
spécialisées s’adressant principalement aux professionnels de santé
IV. – Alinéa 13
Supprimer les mots :
ou rémunérations
V. – Alinéa 15
Supprimer cet alinéa.
VI. – Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, la nature des informations qui doivent être rendues publiques, notamment l’objet et la date des conventions mentionnées au I, ainsi que les modalités de publication et d’actualisation de ces informations. »
VII. – Alinéa 18
Après le mot :
professions
insérer les mots :
ainsi que les associations les représentant
VIII. – Alinéa 19
Rétablir le 1° bis dans la rédaction suivante :
1° bis Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il ne s’applique pas non plus aux avantages prévus par conventions passées entre les étudiants se destinant aux professions médicales et des entreprises dès lors que ces conventions ont pour objet des activités de recherche dans le cadre de la préparation d’un diplôme. » ;
IX. – Alinéa 22
Rétablir le 3° dans la rédaction suivante :
3° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il en va de même, en ce qui concerne les étudiants se destinant aux professions médicales, pour l’hospitalité offerte, de manière directe ou indirecte, lors de manifestations à caractère scientifique auxquelles ceux-ci participent, lorsque cette hospitalité est d’un niveau raisonnable et limitée à l’objectif scientifique principal de la manifestation. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement vise à instaurer un Sunshine Act « à la française » – les Britanniques ont opté pour une autre formule – de manière à favoriser une transparence maximale des liens d’intérêts entre l’industrie pharmaceutique et les parties prenantes intervenant dans le champ de la santé, et de mettre ainsi fin au soupçon de collusion entre ces différents acteurs.
Transparence doit en outre rimer avec cohérence. Ainsi, il est nécessaire de prévoir un seuil minimal, fixé en concertation avec les parties, qui permettrait de se concentrer sur les avantages les plus importants, sans pour autant sous-estimer l’effet des « petits cadeaux ».
L’amendement vise également à étendre aux étudiants tout le dispositif issu de la loi de 1993 dite « anti-cadeaux », texte applicable aux membres des professions médicales, de sorte qu’aucun des acteurs susceptibles d’avoir des liens avec l’industrie pharmaceutique ne soit exclu du champ d’application de la mesure introduite par notre texte.
L’objectif est non de légitimer une pratique d’ores et déjà existante, mais de l’encadrer juridiquement.
M. le président. L'amendement n° 16 rectifié, présenté par M. Gilles, Mme Bruguière, Mlle Joissains, Mme Sittler, MM. Dulait et Houpert, Mme Deroche et MM. B. Fournier, Lefèvre et Beaumont, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés fixe les conditions d’application du présent article et la définition des catégories de personnes physiques ou morales concernées. »
La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière.
Mme Marie-Thérèse Bruguière. L’article 2 prévoit une déclaration par les industriels, sur leur propre site internet, des liens qu’ils entretiennent avec plusieurs catégories de partenaires. Les professionnels de santé, associations de professionnels de santé, étudiants, associations de patients, établissements de santé, fondations, sociétés savantes, organismes de conseils et organes de presse sont concernés par la publication de ces conventions, tout comme les avantages en nature ou en espèces – hospitalité et dons –, au-delà d’un certain seuil.
Les conditions d’application et la nature des informations publiées, les délais et les modalités de publication, sont renvoyés à un décret.
Toutefois, on peut remarquer que la philosophie du dispositif proposé va au-delà de la prévention des conflits d’intérêts, qui aurait impliqué que la transparence concerne seulement les personnes participant à la prise de décision publique. Le texte vise en réalité la transparence de l’ensemble des liens de l’industrie avec ses partenaires, professionnels de santé, monde associatif, étudiants, conseils, ce qui pose problème au regard du droit à la protection de la vie privée.
Ce dispositif s’inspire de la loi américaine dite « Sunshine Act ». Dans les États qui l’ont déjà mis en œuvre, le Vermont, par exemple, on constate déjà l’inquiétude des médecins quant à d’éventuels appels au boycott de la part de certaines associations, à l’affût de leurs liens d’intérêts.
Par ailleurs, la publication de toutes les conventions des entreprises avec les intervenants du secteur, y compris lorsqu’ils n’ont aucun rôle d’expertise publique, risque d’avoir des conséquences négatives sur les partenaires publics-privés de recherche. Que l’on se réfère aux recherches cliniques, où le rôle des investigateurs et chercheurs cliniciens est majeur pour attirer en France les essais cliniques industriels ou académiques.
Il est intéressant de comparer l’article 2 du présent texte avec les dispositions du projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, déposé à l’Assemblée nationale le 27 juillet. Ce dernier projet de loi prévoit que seules les déclarations d’intérêts des membres du Gouvernement seront publiées. L’étude d’impact indique que même s’il n’y a pas d’extension de publicité des déclarations, si l’exigence de prévention des conflits d’intérêts implique que l’autorité dont relèvent les déclarants connaisse les intérêts déclarés, l’atteinte à la liberté individuelle et au respect de la vie privée que constituerait la publication des déclarations semble trop importante au regard du bénéfice qu’apporte la publicité.
Dès lors, il est difficilement compréhensible que la question de l’atteinte au respect de la vie privée ne se pose pas ici aussi. L’avis préalable de la CNIL serait donc une garantie nécessaire, car on touche là à des questions de protection de données personnelles et de la vie privée.
M. le président. L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Gilles, Mme Bruguière, Mlle Joissains, Mme Sittler, MM. Dulait et Houpert, Mmes Deroche et Cayeux et MM. B. Fournier, Lefèvre, Beaumont et Cléach, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il précise également les modalités suivant lesquelles les ordres des professions de santé sont associés à cette publication.
La parole est à Mme Marie-Thérèse Bruguière.
Mme Marie-Thérèse Bruguière. L’ordre des médecins, qui examine 80 000 conventions par an, s’est doté d’un outil informatique permettant de rendre opérationnelle la publication des liens d’intérêts dans de brefs délais.
Il y a donc lieu de prévoir une modification du texte afin de faire apparaître le rôle des ordres dans la publicité des liens d’intérêts relatifs aux professionnels de santé.
M. le président. L'amendement n° 30 rectifié, présenté par M. Barbier, Mme Escoffier, MM. Mézard, Alfonsi et Collin, Mme Laborde et MM. Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéa 16
Compléter cet alinéa par les mots :
notamment les moyens de contrôle auquel sont associés les ordres professionnels
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement, comme celui qui vient d’être présenté, a pour objet de nous permettre d’agir de manière efficace dans le cadre des nouvelles règles de transparence.
La création d’une structure spécialisée a été repoussée. Or le Conseil national de l’ordre des médecins, par exemple, examine chaque année 80 000 conventions.
Cet amendement vise donc à préciser que le décret en Conseil d’État détermine également les moyens de contrôle auxquels sont associés les ordres professionnels. Cela me paraît fondamental si l’on veut garantir l’efficacité de ces contrôles.
M. le président. L'amendement n° 98, présenté par M. Cazeau, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 18
Après les mots :
à ces professions
insérer les mots :
ainsi que les associations ou groupements les représentant,
La parole est à M. le rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les amendements nos 57, 16 rectifié, 17 rectifié et 30 rectifié.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. L’amendement no 98 tend, à l’article L. 4113-6 du code de la santé publique, à étendre aux associations étudiantes l’interdiction de recevoir des avantages de l’industrie pharmaceutique.
Sur l’amendement no 57, la commission a émis un avis défavorable, car il revient sur des modifications que nous avons apportées à l’article instaurant le Sunshine Act « à la française ».
L’amendement vise en effet à supprimer l’obligation de publication des conventions, alors que la commission considère que leur seule existence ne saurait avoir un effet suffisant. Il tend également à supprimer toute mention des rémunérations que peuvent prévoir ces conventions, ainsi que la publication, pourtant prévue par la loi américaine, des sanctions encourues en cas de non-respect des dispositions prévues à l’article 2.
Si nous avons conservé les dispositions qui interdisent aux étudiants de recevoir des avantages de l’industrie pharmaceutique, c’est parce que nous ne souhaitons pas que de futurs professionnels de santé prennent l’habitude de considérer qu’il est normal de recevoir des aides de l’industrie, voire de les solliciter.
Nous considérons que c’est à l’université qu’il revient éventuellement de collecter des fonds, de toutes origines, pharmaceutiques ou autres, et de les répartir en fonction de la qualité des demandes des étudiants, congrès ou thèses.
La commission est favorable à l’amendement no 16 rectifié, qui prévoit l’avis préalable de la CNIL pour garantir la protection des données personnelles et de la vie privée.
En revanche, la commission est défavorable à l’amendement no 17 rectifié, car elle considère qu’il est inutile de légiférer pour prévoir la consultation des ordres professionnels, car il entre déjà dans leurs missions de juger de la régularité et de leur opportunité des procédures.
La commission est également, pour les mêmes raisons, défavorable à l’amendement no 30 rectifié, qui a le même objet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement no 57.
Il souhaite le retrait de l’amendement no 16 rectifié ; à défaut il y sera défavorable.
Il est favorable à l’amendement no 17 rectifié, ainsi qu’à l’amendement no 30 rectifié, qui renforce les moyens de contrôle des ordres professionnels.
Enfin, monsieur le rapporteur, si l’amendement no 57 est adopté, votre amendement no 98 sera satisfait. Je ne puis donc qu’y être défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 57.
Mme Isabelle Pasquet. Le groupe CRC votera contre cet amendement qui non seulement prévoit un retour au texte de l’Assemblée nationale, entraînant une remise en cause les améliorations obtenues en commission, mais qui de surcroît obscurcit encore un système que tout le monde souhaite aujourd’hui plus transparent.
Je ne prendrai que deux exemples.
Tout d’abord, le paragraphe I de cet amendement vise à revenir à la situation juridique existante, où seule est rendue publique l’existence des conventions formées entre des professionnels de santé et des firmes pharmaceutiques ou d’autres industriels, alors que le texte tel qu’il est issu des travaux de notre commission prévoit de rendre également public le contenu des conventions.
Ce serait d’ailleurs, mes chers collègues, le sens même d’un véritable Sunshine Act. Vous le savez, les dispositions du Sunshine Act ont été intégrées dans le droit américain par le biais d’un amendement dû à l’initiative d’un sénateur républicain, Charles Grassley. Elles visent à rendre publiques les sommes que versent les firmes pharmaceutiques aux médecins.
Permettez-moi de vous rappeler la teneur de cet amendement : la déclaration devra inclure les compensations, repas, divertissements ou cadeaux, excursions ou voyages, des produits ou autres choses proposés pour moins que leur valeur marchande, des frais de participation à des conférences ou à la formation médicale continue, des rabais ou remises, des honoraires ou paiements des interventions à titre de consultant, et tout autre bénéfice économique.
À l’occasion d’une conférence de presse, le sénateur Grassley déclarait : « Les firmes pharmaceutiques ne paieraient pas tout cet argent s’il n’avait pas un effet direct sur les prescriptions et les dispositifs médicaux que les médecins utilisent. Pour les patients, tout ce côté reste dans l’obscurité, ils ne savent pas si leurs médecins reçoivent ou non de l’argent. »
L’amendement visant à rendre transparents les paiements des médecins par les firmes, devenu depuis le Sunshine Act, fait la lumière sur ces liens financiers cachés et, comme le soulignait le sénateur Grassley, « éclaire les rapports obscurs entre médecins et firmes au moyen du meilleur désinfectant : le soleil ».
C’est de ce soleil que vous entendez priver aujourd’hui nos concitoyens.
Alors que nous étions au cœur de la crise et qu’un sondage venait de révéler que nos concitoyens avaient perdu confiance en notre système, vous vous déclariez, monsieur le ministre, favorable à une « forme absolue de transparence », précisant même que, pour y parvenir, il fallait la « publication, sous la responsabilité de chaque industriel, de toutes les conventions et rétributions passées entre les laboratoires, les médecins, les experts, les sociétés savantes, les associations de patients et les organes de presse spécialisés. »
Vous poursuiviez en prônant, au cas où ces obligations de déclaration ne seraient pas respectées, la mise en place « de sanctions analogues à celles qui sont prévues par le code du commerce pour non-respect des obligations relatives aux comptes des entreprises. » Au regard de ce seul engagement, l’adoption de l’amendement no 57 constituerait un recul majeur.
Par ailleurs, cet amendement prévoit l’extension aux étudiants de la possibilité dont disposent les professionnels de santé de recevoir des cadeaux de la part des industriels.
Dans l’objet de cet amendement, on fait fort habilement référence à la loi anti-cadeaux de 1993, omettant simplement de préciser que cette loi a été considérablement réformée par une autre loi, adoptée en 1994, qui a autorisé sous certaines conditions les pratiques initialement interdites.
Aujourd’hui, vous proposez d’étendre ces dispositions aux étudiants, au risque que ces derniers deviennent aussi dépendants.
Autrement dit, alors que le but de ce projet de loi était de rendre les professionnels de santé moins dépendants des laboratoires, vous proposez de placer les étudiants sous perfusion de ces mêmes laboratoires.
Telle n’est pas notre conception de la transparence. Nous voterons donc contre cet amendement et demandons, compte tenu de la régression qu’il constitue, qu’il soit procédé à un vote par scrutin public, afin que nos concitoyens puissent tous connaître la position de chacun d’entre nous.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.
Mme Chantal Jouanno. Je vais m’efforcer d’apporter un peu de lumière dans cette discussion sur le Sunshine Act. (Sourires.)
Celui-ci ne prévoit pas la publication in extenso des conventions. D’ailleurs, le rapport de la mission commune d’information Autain-Hermange, auquel il est souvent fait référence, rappelle bien les conditions du Sunshine Act : les sociétés concernées sont tenues de déclarer les nom, adresse, numéro d’identification de l’hôpital ou du praticien ; doivent aussi être impérativement précisés le montant du paiement, sa date et la nature précise du « service » fourni par le médecin, ainsi que sa spécialité.
Par conséquent, toute la convention n’est pas publiée. Si tel devait être le cas, honnêtement, je crains que ce ne soit un peu lourd, et surtout parfaitement illisible pour nos concitoyens.
Concernant le paragraphe II de l’amendement, tout le monde est d’accord, puisqu’il s’agit d’étendre les mesures de transparence aux étudiants.
Cependant, s’agissant des paragraphes IV et V, pourquoi est-il proposé de supprimer les mots : « ou rémunérations » ? Tout simplement parce que le texte prévoit déjà les avantages en espèces. De la même façon, l’alinéa 15 de l’article 2 est redondant avec l’article 3 du projet de loi, qui prévoit déjà que les sanctions pénales sont publiées.
Donc, ne nous faites pas dire ce que nous ne disons pas ! La droite n’est absolument pas favorable à l’obscurité. Nous portons ce texte, et depuis le départ, mais il nous semble juste de revenir à des dispositions qui renforceront la transparence sans entamer la rationalité de la démarche. Publier toutes les conventions ne rendra service à personne.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je dirai juste un mot pour souligner l’importance de ces dispositions concernant les étudiants.
Les mesures proposées par les Assises du médicament, je le rappelle, étaient identiques à celles-ci. À ce propos, je voudrais souligner encore une fois l’apport exceptionnel du groupe de travail présidé par Alain-Michel Ceretti, un apport considérable pour toute la politique du médicament.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 57.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Je rappelle que la commission a émis un avis défavorable et le Gouvernement un avis favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n°11 :
Nombre de votants | 318 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Majorité absolue des suffrages exprimés | 159 |
Pour l’adoption | 138 |
Contre | 179 |
Le Sénat n'a pas adopté.
5
Engagement de la procédure accélérée pour l’examen d’un projet de loi
M. le président. En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi relatif à la rémunération pour copie privée, déposé ce jour sur le bureau de l’Assemblée nationale.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
6
Communication d’un avis sur un projet de nomination
M. le président. En application de la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 et de la loi n° 2010-838 du 23 juillet 2010 relatives à l’application du cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution, et conformément à l’article 1er de la loi n° 80-3 du 4 janvier 1980, la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire a émis un vote favorable - 37 voix pour, 1 voix contre et 4 bulletins blancs - en faveur de la nomination de M. Yves de Gaulle à la présidence du directoire de la Compagnie nationale du Rhône.
Acte est donné de cette communication.
7
Conférence des présidents
M. le président. La conférence des présidents a établi comme suit l’ordre du jour des prochaines séances du Sénat :
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
Jeudi 27 octobre 2011
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé (texte de la commission, n° 45, 2011 2012) ;
À 15 heures et, éventuellement, le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures) ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
SEMAINE SÉNATORIALE D’INITIATIVE
Mercredi 2 novembre 2011
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste - EELV:
1°) Proposition de loi tendant à préserver les mandats en cours des délégués des établissements publics de coopération intercommunale menacés par l’application du dispositif d’achèvement de la carte de l’intercommunalité, présentée par M. Jean-Pierre Sueur (texte de la commission, n° 68, 2011 2012) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, lundi 31 octobre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 31 octobre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mercredi 2 novembre) ;
À 18 heures 30 et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
2°) Débat sur les prélèvements obligatoires et leur évolution (demande de la commission des finances et de la commission des affaires sociales) ;
(La conférence des présidents :
- a attribué un temps d’intervention de quinze minutes respectivement à la commission des finances et à la commission des affaires sociales ;
- a fixé à deux heures la durée globale du temps dont disposeront, dans le débat, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, lundi 31 octobre, avant dix-sept heures).
Jeudi 3 novembre 2011
De 9 heures à 13 heures :
Ordre du jour réservé au groupe UMP :
1°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’identité (texte de la commission, n° 40, 2011 2012) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mercredi 2 novembre, avant dix-sept heures ;
- au jeudi 27 octobre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mercredi 2 novembre) ;
De 15 heures à 19 heures :
Ordre du jour réservé au groupe UCR :
2°) Deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, relative au patrimoine monumental de l’État (n° 740, 2010 2011) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mercredi 2 novembre, avant dix-sept heures ;
- au vendredi 28 octobre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission de la culture se réunira pour examiner les amendements mercredi 2 novembre, matin) ;
À 19 heures et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
3°) Texte de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication sur la proposition de loi visant à instaurer la scolarité obligatoire à trois ans, présentée par Mme Françoise Cartron et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés (n° 63, 2011 2012) ;
(La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mercredi 2 novembre, avant dix-sept heures ;
- au vendredi 28 octobre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission de la culture se réunira pour examiner les amendements mercredi 2 novembre, matin).
SEMAINE RÉSERVÉE PAR PRIORITÉ AU GOUVERNEMENT
ET DÉBUT DE LA SEMAINE DE CONTRÔLE
Lundi 7 novembre 2011
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 15 heures, le soir et, éventuellement, la nuit :
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (A.N., n° 3790) ;
(La commission des affaires sociales se réunira pour le rapport mercredi 2 novembre, matin.
La conférence des présidents a fixé :
- à trois heures la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, vendredi 4 novembre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 7 novembre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements lundi 7 novembre, à quatorze heures trente).
Mardi 8 novembre 2011
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
Mercredi 9 novembre 2011
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 14 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ;
À 18 heures :
2°) Déclaration du Gouvernement, suivie d’un débat, sur le G20 ;
(La conférence des présidents a décidé d’attribuer un temps de parole de quinze minutes aux groupes socialiste-EELV et UMP, et de dix minutes aux groupes UCR, CRC et RDSE, la réunion des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes) ;
Le soir et la nuit :
3°) Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ;
Jeudi 10 novembre 2011
À 9 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
1°) Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 ;
À 15 heures :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures) ;
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Éventuellement, lundi 14 novembre 2011
Ordre du jour fixé par le Gouvernement :
À 10 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012.
SEMAINE SÉNATORIALE DE CONTRÔLE
Mardi 15 novembre 2011
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales ;
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1382 de M. Antoine Lefèvre à M. le ministre chargé des transports ;
(Création d’un échangeur sur l’autoroute A 26) ;
- n° 1383 de M. Daniel Laurent à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Associations d’aide à domicile et respect du taux d’emploi de travailleurs handicapés) ;
- n° 1384 de M. Michel Doublet à M. le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire ;
(Reconduction des contrats « mesures agro-environnementales territorialisées » dans les marais charentais) ;
- n° 1395 de M. Hervé Maurey à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Achats en ligne par les collectivités territoriales) ;
- n° 1396 de Mme Maryvonne Blondin à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;
(Les fouilles au corps abusives) ;
- n° 1404 de M. Roland Courteau à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale ;
(Point sur les violences conjugales) ;
- n° 1408 de M. Thierry Foucaud à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement ;
(Remise en service de matériel ferroviaire) ;
- n° 1409 de Mme Brigitte Gonthier-Maurin à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Dégradation de l’accès au service public de la santé dans les Hauts-de-Seine) ;
- n° 1413 de M. Christian Favier à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Maintien du service de chirurgie cardiaque du CHU Henri-Mondor à Créteil) ;
- n° 1415 de M. Éric Bocquet à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Suppressions d’emplois dans le secteur de la vente à distance) ;
- n° 1416 de M. Jean-Marc Todeschini à M. le ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse et de la vie associative ;
(Enseignement des langues vivantes à l’école primaire) ;
- n° 1417 de M. Rachel Mazuir à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Statut des membres d’un syndicat mixte compétent en matière d’aménagement du territoire) ;
- n° 1419 de Mme Nicole Bonnefoy à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement ;
(Actions mises en œuvre pour lutter contre la prolifération du frelon asiatique) ;
- n° 1422 de M. Claude Domeizel à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Mauvaise santé financière des hôpitaux et projet de service de réanimation à l’hôpital de Manosque) ;
- n° 1424 de M. Philippe Paul à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement ;
(Écotaxe et territoire breton) ;
- n° 1425 de M. Yvon Collin à M. le ministre chargé de l’industrie, de l’énergie et de l’économie numérique ;
(Fermeture partielle de nombreux bureaux de poste) ;
- n° 1426 de M. Yves Détraigne à M. le secrétaire d’État chargé du logement ;
(Part communale de la taxe d’aménagement) ;
- n° 1427 de M. Philippe Darniche à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement ;
(Réalisation de l’autoroute A 831 Fontenay-Le-Comte-Rochefort) ;
De 14 heures 30 à 17 heures :
Ordre du jour réservé au groupe UMP :
2°) Éventuellement, suite de la deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’identité (texte de la commission, n° 40, 2011-2012) ;
3°) Proposition de loi relative à la prévention et l’accompagnement pour l’organisation des soirées en lien avec le déroulement des études, présentée par M. Jean-Pierre Vial et plusieurs de ses collègues (n° 421, 2010 2011) ;
(La commission des lois se réunira pour le rapport mardi 8 novembre ; délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 7 novembre, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, lundi 14 novembre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 14 novembre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mardi 15 novembre, matin) ;
De 17 heures à 17 heures 45 :
4°) Questions cribles thématiques sur « La désindustrialisation » (demande du groupe CRC) ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant douze heures trente) ;
De 18 heures à 19 heures 30 :
Suite de l’ordre du jour réservé au groupe UMP :
5°) Suite de l’ordre du jour de l’après-midi ;
À 21 heures 30 :
Ordre du jour fixé par le Sénat :
6°) Proposition de loi organique portant application de l’article 68 de la Constitution, présentée par M. François Patriat et plusieurs de ses collègues (n° 69, 2009-2010) (demande de la commission des lois) ;
(La commission des lois se réunira pour le rapport mardi 8 novembre ; délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 7 novembre, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, lundi 14 novembre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 14 novembre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mardi 15 novembre, matin) ;
Mercredi 16 novembre 2011
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe CRC :
1°) Proposition de loi garantissant le droit au repos dominical, présentée par Mme Annie David et plusieurs de ses collègues (n° 794, 2010-2011) (après concertation avec les partenaires sociaux) ;
(La commission des affaires sociales se réunira pour le rapport mercredi 9 novembre, matin ; délai limite pour le dépôt des amendements en commission : mardi 8 novembre, à quinze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mardi 15 novembre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 14 novembre à douze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des affaires sociales se réunira pour examiner les amendements mercredi 16 novembre, matin) ;
2°) Proposition de loi visant à répartir les responsabilités et les charges financières concernant les ouvrages d’art de rétablissement des voies, présentée par Mme Évelyne Didier et plusieurs de ses collègues (n° 745, 2010 2011) ;
(La commission des lois se réunira pour le rapport mardi 8 novembre ; délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 7 novembre, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mardi 15 novembre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 14 novembre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mercredi 16 novembre, matin) ;
À 18 heures 30, le soir et la nuit (jusqu’à 0 heure 30) :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste - EELV :
3°) Proposition de loi relative à l’abrogation du conseiller territorial, présentée par Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de ses collègues (n° 800, 2010-2011).
(La commission des lois se réunira pour le rapport le mardi 8 novembre ; délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 7 novembre, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, lundi 14 novembre, avant dix-sept heures ;
- au lundi 14 novembre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mercredi 16 novembre, matin) ;
Jeudi 17 novembre 2011
À 11 heures, à 14 heures 30 et, éventuellement, le soir :
- Sous réserve de sa transmission, projet de loi de finances pour 2012 (A.N., n° 3775) ;
(Pour la discussion générale, la conférence des présidents a décidé de fixer à quatre heures la durée globale du temps dont disposeront les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mercredi 16 novembre, avant dix-sept heures).
Vendredi 18 novembre 2011
À 14 heures 30 et, éventuellement, le soir et la nuit :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Examen des articles de la première partie.
Lundi 21 novembre 2011
À 10 heures, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Suite de l’examen des articles de la première partie.
Mardi 22 novembre 2011
À 9 heures 30 :
1°) Questions orales :
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
- n° 1379 de M. Alain Fouché transmise à Mme la ministre des solidarités et de la cohésion sociale ;
(RMI, RSA : les lacunes du système) ;
- n° 1407 de M. Jean-Jacques Mirassou à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;
(Attaques diffamatoires sur les réseaux sociaux) ;
- n° 1420 de Mme Nathalie Goulet à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie ;
(Emprunts toxiques DEXIA) ;
- n° 1421 de M. Jean Besson à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés ;
(Situation du tribunal d’instance de Valence) ;
- n° 1423 de M. Jacques Mézard à M. le secrétaire d’État chargé du logement ;
(Logement social dans le Cantal) ;
- n° 1428 de M. Yannick Botrel à M. le ministre de la culture et de la communication ;
(Fréquences d’émissions radiophoniques) ;
- n° 1429 de M. Robert Laufoaulu à Mme la ministre chargée de l’outre-mer ;
(Statut de la fonction publique territoriale de Wallis et Futuna) ;
- n° 1430 de M. Philippe Madrelle à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable, des transports et du logement ;
(Opération de désamiantage) ;
- n° 1431 de M. Georges Patient à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement ;
(Gestion des bases cadastrales en Guyane) ;
- n° 1432 de M. Pierre Bernard Reymond à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Désinstitutionnalisation des enfants handicapés) ;
- n° 1433 de M. Rémy Pointereau à Mme la ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l’État, porte-parole du Gouvernement ;
(Réforme de la taxe professionnelle et transfert de la part départementale de la taxe d’habitation) ;
- n° 1434 de M. Philippe Dallier à M. le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;
(Marchés clandestins aux portes de Paris) ;
- n° 1435 de Mme Claudine Lepage à M. le ministre d’État, ministre des affaires étrangères et européennes ;
(Problème des justificatifs d’existence à fournir tous les trois mois pour les retraités établis à l’étranger hors de l’Union européenne) ;
- n° 1436 de Mme Mireille Schurch à M. le ministre de la défense et des anciens combattants ;
(Projet de restructuration des activités de défense entre SAFRAN et THALES) ;
- n° 1437 de Mme Claire-Lise Campion à M. le ministre de la défense et des anciens combattants ;
(Restructuration des activités de défense entre THALES et SAFRAN) ;
- n° 1438 de M. Alain Néri à M. le ministre chargé des transports ;
(Desserte ferroviaire Clermont-Ferrand - Paris) ;
- n° 1439 de M. Claude Dilain à Mme la secrétaire d’État chargée de la santé ;
(Mise en œuvre du programme national de lutte contre la tuberculose) ;
- n° 1441 de M. Daniel Reiner à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé ;
(Avenir du régime minier) ;
À 14 heures 30 et le soir :
2°) Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Suite de l’examen des articles de la première partie.
Mercredi 23 novembre 2011
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Examen de l’article 30 : évaluation du prélèvement opéré sur les recettes de l’État au titre de la participation de la France au budget de l’Union européenne (deux heures) ;
(Les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mardi 22 novembre, avant dix-sept heures) ;
- Suite et fin de l’examen des articles de la première partie ;
- Explications de vote sur l’ensemble de la première partie ;
(Il est attribué un temps de parole forfaitaire et égal de cinq minutes à chaque groupe et de trois minutes à la réunion administrative des sénateurs non inscrits.
Les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mardi 22 novembre, avant dix-sept heures) ;
Scrutin public ordinaire de droit.
Jeudi 24 novembre 2011
À 9 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Justice (+ article 52) (deux heures) ;
- Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation (+ article 49) (une heure trente) ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures) ;
3°) Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Éventuellement, suite de l’ordre du jour du matin ;
- Outre-mer (trois heures).
Vendredi 25 novembre 2011
À 9 heures 30, à 14 heures 30, le soir et, éventuellement, la nuit :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Écologie, développement et aménagement durables (+ articles 50 et 51) (quatre heures) ;
budget annexe : contrôle et exploitation aériens ;
compte spécial : contrôle de la circulation et du stationnement routiers ;
compte spécial : services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ;
compte spécial : avances au fonds d’aide à l’acquisition de véhicules propres ;
- Travail et emploi (+ articles 62 et 63) (deux heures) ;
compte spécial : financement national du développement et de la modernisation de l’apprentissage ;
- Culture (une heure quarante-cinq) ;
- Médias, livre et industries culturelles (deux heures) ;
compte spécial : avances à l’audiovisuel public.
Lundi 28 novembre 2011
À 10 heures, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Politique des territoires (une heure trente) ;
- Économie (une heure quarante-cinq) ;
compte spécial : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ;
- Aide publique au développement (deux heures) ;
compte spécial : prêts à des États étrangers ;
compte spécial : engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique ;
- Solidarité, insertion et égalité des chances (+ article 61) (deux heures) ;
- Défense (trois heures) ;
compte spécial : gestion et valorisation des ressources tirées de l’utilisation du spectre hertzien.
Mardi 29 novembre 2011
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Santé (+ article 60) (une heure trente) ;
- Action extérieure de l’État (trois heures) ;
- Ville et logement (+ article 64) (une heure quarante-cinq).
Mercredi 30 novembre 2011
À 9 heures 30, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Relations avec les collectivités territoriales (+ articles 53 à 59) (deux heures trente) ;
compte spécial : avances aux collectivités territoriales ;
- Sport, jeunesse et vie associative (une heure trente) ;
- Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Provisions (une heure) ;
compte spécial : gestion du patrimoine immobilier de l’État ;
- Engagements financiers de l’État (trente minutes) ;
compte spécial : accords monétaires internationaux ;
compte spécial : avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics ;
compte spécial : participations financières de l’État ;
- Régimes sociaux et de retraite (trente minutes) ;
compte spécial : pensions (+ articles 65 et 66) ;
- Remboursements et dégrèvements (quinze minutes).
Jeudi 1er décembre 2011
À 9 heures 30 :
1°) Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Recherche et enseignement supérieur (deux heures trente) ;
- Sécurité (une heure trente) ;
À 15 heures et le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
(L’inscription des auteurs de questions devra être effectuée à la division des questions et du contrôle en séance avant onze heures) ;
3°) Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Sécurité (suite) ;
- Sécurité civile (quarante-cinq minutes) ;
- Administration générale et territoriale de l’État (quarante-cinq minutes) ;
- Enseignement scolaire (trois heures).
Vendredi 2 décembre 2011
À 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Immigration, asile et intégration (une heure trente) ;
- Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales (+ article 48) (trois heures trente) ;
compte spécial : développement agricole et rural ;
- Conseil et contrôle de l’État (trente minutes) ;
- Pouvoirs publics (quinze minutes) ;
- Direction de l’action du Gouvernement (une heure) ;
. budget annexe : publications officielles et information administrative.
Samedi 3 décembre 2011
À 14 heures 30 et, éventuellement, le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Éventuellement, discussion des missions et des articles rattachés reportés ;
- Discussion des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits.
(Le délai limite pour le dépôt des amendements en séance est fixé au vendredi 2 décembre, à onze heures).
Lundi 5 décembre 2011
À 10 heures, à 14 heures 30 et le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Suite de la discussion des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits.
Mardi 6 décembre 2011
À 14 heures 30 et, éventuellement, le soir :
- Suite du projet de loi de finances pour 2012 :
- Éventuellement, suite et fin de la discussion des articles de la seconde partie non rattachés aux crédits ;
- Explications de vote sur l’ensemble du projet de loi de finances ;
(Il est attribué un temps de parole forfaitaire et égal de dix minutes à chaque groupe et de cinq minutes à la réunion administrative des sénateurs non inscrits.
Les inscriptions de parole devront être faites à la division de la Séance et du droit parlementaire, lundi 5 décembre, avant dix-sept heures) ;
Scrutin public à la tribune de droit.
Mercredi 7 décembre 2011
De 14 heures 30 à 18 heures 30 :
Ordre du jour réservé au groupe RDSE :
1°) Proposition de loi visant à étendre l’obligation de neutralité aux structures privées en charge de la petite enfance et à assurer le respect du principe de laïcité, présentée par Mme Françoise Laborde et les membres du groupe RDSE (n° 56, 2011-2012) ;
2°) Proposition de loi visant à punir d’une peine d’amende tout premier usage illicite de l’une des substances ou plantes classées comme stupéfiants, présentée par M. Gilbert Barbier et plusieurs de ses collègues (n° 57, 2011-2012) ;
(La commission des lois se réunira pour le rapport mardi 29 novembre, après midi ; délai limite pour le dépôt des amendements en commission : lundi 28 novembre, à douze heures).
La conférence des présidents a fixé :
- à une heure la durée globale du temps dont disposeront, dans la discussion générale, les orateurs des groupes ou ne figurant sur la liste d’aucun groupe ; les inscriptions de parole devront être faites à la division de la séance et du droit parlementaire, mardi 6 décembre 2011, avant dix-sept heures ;
- au lundi 5 décembre, à onze heures, le délai limite pour le dépôt des amendements en séance.
La commission des lois se réunira pour examiner les amendements mercredi 7 décembre, matin).
Jeudi 8 décembre 2011
De 9 heures à 13 heures :
Ordre du jour réservé au groupe socialiste-EELV :
1°) Proposition de loi constitutionnelle, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à accorder le droit de vote et d’éligibilité aux élections municipales aux étrangers non-ressortissants de l’Union européenne résidant en France (n° 329, 1999-2000) ;
De 15 heures à 19 heures :
Ordre du jour réservé au groupe UMP
À 19 heures et le soir :
Ordre du jour fixé par le Sénat.
2°) Proposition de loi visant à faire du logement une priorité nationale présentée par M. Jean-Pierre Bel et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés (n° 669, 2010-2011).
Y a-t-il des observations en ce qui concerne les propositions de la conférence des présidents relatives à la tenue des séances et à l’ordre du jour autre que celui qui résulte des inscriptions prioritaires du Gouvernement ?...
Ces propositions sont adoptées.
Par ailleurs, conformément à l’article 48 de la Constitution et à l’article 29 bis, alinéas 2 et 3, du règlement, la conférence des présidents a décidé que le Sénat suspendrait ses travaux :
- du samedi 24 décembre 2011 au dimanche 8 janvier 2012 ;
- et à compter du lundi 27 février 2012.
Elle a en outre, en accord avec le Gouvernement, procédé à la répartition des semaines de séance entre le Gouvernement et le Sénat des mois de janvier et février 2012.
La prochaine conférence des présidents se réunira le mercredi 16 novembre 2011, à dix-neuf heures.
8
Sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé
Suite de la discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.
Dans la discussion des articles, nous poursuivons l’examen de l’article 2.
Article 2 (suite)
M. le président. Saisi des amendements nos 57, 16 rectifié, 17 rectifié, 30 rectifié et 98 faisant l’objet d’une discussion commune, le Sénat a précédemment rejeté l’amendement n° 57.
Je mets aux voix l'amendement n° 16 rectifié.
(L'amendement est adopté.)
M. le président. L'amendement n° 26 rectifié, présenté par M. Barbier, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard, Plancade, Alfonsi, Collin et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Après le mot :
s’applique
insérer les mots :
, au-delà d’un seuil fixé par décret,
La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 26 rectifié.
M. Gilbert Barbier. Monsieur le président, si vous me le permettez, je défendrai par la même occasion l’amendement n° 27 rectifié. En effet, ces deux amendements portent sur l’alinéa 13, relatif aux obligations de publication des avantages, en nature ou en espèces, accordés par les entreprises aux acteurs du système de santé.
M. le président. J’appelle donc en discussion l'amendement n° 27 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Alfonsi, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Plancade, Tropeano et Collin, et ainsi libellé :
Alinéa 13
Après les mots :
en espèces
insérer les mots :
d’une valeur au moins égale à dix euros ou dès lors que leur montant cumulé dépasse cent euros par an,
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Gilbert Barbier. Avec l’amendement n° 26 rectifié, nous souhaitons revenir au texte adopté par l’Assemblée nationale, modifié par la commission des affaires sociales du Sénat ; il s’agit de rétablir le seuil de dépenses fixé par décret.
L’amendement n° 27 rectifié va plus loin, en visant à fixer dans la loi un seuil minimal pour le montant des « petits cadeaux » qu’il est possible de recevoir. Nous nous sommes inspirés du fameux Sunshine Act en vigueur aux États-Unis, où le seuil est fixé à dix dollars par objet, pour un montant cumulé de cent dollars annuels.
Ainsi, il ne serait pas obligatoire de déclarer les cadeaux d’une valeur inférieure à dix euros, pour un montant cumulé de cent euros par an. De fait, il convient à mes yeux d’éviter la déclaration d’avantages tout à fait dérisoires,…
Mme Gisèle Printz. Dérisoires ?
M. Gilbert Barbier. … dont la vérification risque de poser problème.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur de la commission des affaires sociales. La commission émet un avis défavorable sur les deux amendements, qu’elle juge trop imprécis et donc source d’incertitudes.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre du travail, de l'emploi et de la santé. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 26 rectifié. Je dois vous avouer que, dans mon esprit, il faut que cela s’applique dès un euro. Je puis donc vous annoncer d’ores et déjà que le décret fixera le seuil à un euro.
Mme Catherine Génisson. Cela nous rappelle les primaires ! (Sourires.)
M. Xavier Bertrand, ministre. Sauf que l’on y voit un peu moins de professionnels de santé… (Nouveaux sourires.)
M. Ronan Kerdraon. Quoique…
M. Xavier Bertrand, ministre. Nous sommes certes dans le domaine du symbole, mais toute somme doit être déclarée.
Mme Catherine Génisson. Qui vole un œuf vole un bœuf !
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote sur l’amendement n° 26 rectifié.
M. Ronan Kerdraon. Mon propos vaudra également pour l’amendement n° 27 rectifié, monsieur le président.
Nous nous opposons résolument à ces deux amendements.
D’abord, cela commence à faire beaucoup de décrets. Ensuite, si nous sommes effectivement dans le domaine du symbole, monsieur le ministre, ne donnons pas le mauvais exemple ! On peut très bien commencer par un café, poursuivre par une caisse de champagne et finir par un voyage aux Seychelles !
M. le président. L'amendement n° 28 rectifié, présenté par MM. Barbier, Alfonsi et Collin, Mmes Escoffier et Laborde et MM. Mézard, Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéa 13
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Sont identifiés dans les déclarations les types d’activité auxquels correspondent les avantages ou rémunérations.
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Dans son rapport d’avril 2011 sur l’expertise sanitaire, l’Inspection générale des affaires sociales suggère d’identifier dans les versements déclarés par les laboratoires les divers types d’activités financées : activités de recherche, consultations, formations, rédaction d’articles, etc.
Dans la mesure où ces informations seront accessibles au public, il nous semble important de pouvoir préciser très clairement à quoi correspondent les avantages accordés. Ce souci de clarification nous paraît de nature à éviter toute suspicion sur ces rémunérations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement est d’ores et déjà satisfait par le texte de la commission, qui prévoit la publication des conventions.
Je demande donc à son auteur de bien vouloir le retirer. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Barbier, l’amendement n° 28 rectifié est-il maintenu ?
M. Gilbert Barbier. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 28 rectifié est retiré.
L'amendement n° 29 rectifié, présenté par MM. Barbier, Alfonsi et Mézard, Mmes Laborde et Escoffier et MM. Collin, Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Après les mots :
ces informations
supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. L’alinéa 14 de l’article 2, qui crée un portail d’informations, nous semble contenir des détails qui ne devraient pas relever de la loi. En conséquence, nous proposons de supprimer la fin de cet alinéa.
Mais je ne me fais guère d’illusions sur le sort que vous réserverez à cet amendement, chers collègues… (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Nous ne souscrivons pas à votre argumentation, monsieur Barbier, et nous émettons en conséquence un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Le groupe socialiste-EELV suit logiquement la position de M. le rapporteur : cet amendement vise à supprimer une partie de la disposition relative à la création d’un portail public d’informations qui avait été adoptée à l’Assemblée nationale sur notre initiative commune. Au surplus, l’argumentation de notre collègue Gilbert Barbier sur le fait que certains détails ne relèveraient pas de la loi nous paraît infondée.
M. le président. L'amendement n° 31 rectifié, présenté par M. Barbier, Mme Escoffier et MM. Mézard, Alfonsi, Collin, Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 22
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Les deux premières phrases du quatrième alinéa sont remplacées par une phrase ainsi rédigée :
« Toutes conventions passées entre les membres des professions médicales et les entreprises susvisées sont, avant leur mise en application, soumises pour avis au conseil départemental de l’ordre compétent ou lorsque leur champ d’application est interdépartemental ou national, au conseil national de l’ordre compétent. »
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement concerne le problème, déjà évoqué, du rôle du conseil de l’ordre des médecins dans les conventions passées entre les entreprises et les professions médicales.
Il nous semble important de permettre au conseil de l’ordre compétent, soit au niveau départemental, soit au niveau national, d’apprécier ces conventions, et de prévoir en conséquence la transmission pour avis de ces conventions à l’instance ordinale au titre de l’article L. 4113-9 du code de la santé publique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement, qui tend à codifier une pratique en vigueur.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Comme il s’agit d’une simple pratique, elle ne relève pas du niveau législatif ! (Sourires.) Avis défavorable !
M. le président. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 2 bis
(Non modifié)
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le financement des associations d’usagers du système de santé et leurs besoins, au plus tard le 30 juin 2012. – (Adopté.)
Chapitre III
Sanctions pénales
Article 3
I. – Le chapitre IV du titre V du livre IV de la première partie du code de la santé publique est complété par des articles L. 1454-2 à L. 1454-5 ainsi rédigés :
« Art. L. 1454-2. – Est puni de 30 000 € d’amende le fait pour les personnes mentionnées aux I et II de l’article L. 1451-1 et à l’article L. 1452-2 d’omettre sciemment, dans les conditions fixées par ce même article, d’établir ou de modifier une déclaration d’intérêts afin d’actualiser les données qui y figurent ou de fournir une information mensongère qui porte atteinte à la sincérité de la déclaration.
« Art. L. 1454-3. – Est puni de 45 000 € d’amende le fait pour les entreprises produisant ou commercialisant des produits mentionnés à l’article L. 5311-1 ou assurant les prestations associées à ces produits d’omettre de rendre publics, au terme de chaque année civile, les conventions mentionnées au I de l’article L. 1453-1 passées avec les personnes, associations, établissements, fondations, sociétés, organismes et organes mentionnés aux 1° à 8° du même paragraphe, ainsi que les avantages et rémunérations mentionnés au II qu’elles leur ont procurés ou versés.
« Art. L. 1454-4. – Pour les infractions mentionnées au présent chapitre, les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° La diffusion de la décision de condamnation et celle d’un ou plusieurs communiqués informant le public de cette décision, dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal ;
« 2° L’affichage de la décision prononcée, dans les conditions et sous les peines prévues au même article 131-35 ;
« 3° L’interdiction des droits civiques, selon les modalités prévues à l’article 131-26 du même code ;
« 4° L’interdiction d’exercer une fonction publique ou une profession commerciale ou industrielle, selon les modalités prévues à l’article 131-27 du même code ;
« 5° L’interdiction de fabriquer, de conditionner, d’importer et de mettre sur le marché les produits mentionnés à l’article L. 5311-1 du présent code pour une durée maximale de cinq ans.
« Art. L. 1454-5. – Les personnes morales déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, des infractions prévues au présent chapitre encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du même code, les peines prévues aux 2° à 9° de l’article 131-39 dudit code. »
II. – À la fin du premier alinéa de l’article L. 4163-1 du même code, est ajoutée la référence : « et à l’article L. 4221-17 ».
III. – Le premier alinéa de l’article L. 4163-2 du même code est ainsi modifié :
1° Après les mots : « présent livre », sont insérés les mots : « et pour les étudiants se destinant aux professions relevant de la quatrième partie du présent code ainsi que pour les associations et groupements les représentant » ;
2° (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 74, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer le mot :
sciemment
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Afin de sécuriser la chaîne du médicament, le Gouvernement prévoit dans son projet de loi de soumettre un certain nombre de personnes à l’obligation de déclaration publique d’intérêts, disposition qui va dans le bon sens.
Cependant, pour réellement passer des bonnes intentions aux actes, encore faut-il s’assurer que cette obligation se traduise dans les faits par un dépôt effectif de ces déclarations, complètes et sincères.
L’utilisation de l’adverbe « sciemment » pose problème, dans le sens où cela laisse planer une certaine ambiguïté sur la sévérité avec laquelle les manquements à la règle seront sanctionnés.
Nous sommes bien conscients que, de manière générale, en droit pénal, c’est l’intentionnalité qui fonde l’infraction. Mais le fait d’ajouter dans le texte de loi que seules seront sanctionnées les personnes qui auraient « sciemment » omis d’établir ou de modifier une déclaration d’intérêts me semble susceptible de rendre très aléatoire l’application de la sanction concernée, et donc d’entraver une mise en œuvre efficace de l’obligation de déclaration publique d’intérêts.
En résumé, nous souhaitons nous assurer que les personnes physiques qui se soustrairaient partiellement ou totalement à leur obligation de déclaration publique d’intérêts soient réellement sanctionnées, afin de dissuader de tout manquement à la loi.
Il y va de l’effectivité de la mise en œuvre des dispositions contenues dans ce texte.
Et puisque nous nous accordons tous sur la nécessité de donner à ce projet de loi l’ambition qu’il mérite, nous vous invitons, mes chers collègues, à voter cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Aux termes du code pénal, « il n’est point de délit sans intention de le commettre ». En l’occurrence, il s’agit d’une sanction pénale et, même si le texte ne le prévoit pas, le juge saura rechercher l’intention de l’auteur de l’acte.
En conséquence, l’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable.
La bonne foi, le caractère volontaire ou non de l’omission : toutes ces notions ont un sens dans notre droit.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Nul n’est censé ignorer la loi : au nom de ce précepte, et en total accord avec notre collègue écologiste, le groupe socialiste votera cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. L’alinéa 2 de l’article 3, sur lequel porte cet amendement, prévoit des sanctions relativement importantes à l’encontre des personnes qui omettraient sciemment d’établir ou d’actualiser leur déclaration d’intérêts ou qui y feraient figurer une information mensongère de nature à porter atteinte à la sincérité de la déclaration.
S’inscrivant dans la droite ligne d’un amendement que nous avions déposé en commission et que nous avions sans doute limité à tort à l’alinéa suivant, les auteurs de cet amendement proposent de supprimer l’adverbe « sciemment ».
Nous voterons en faveur de cet amendement, considérant qu’il sera très difficile d’établir, en cas de manquement, le caractère volontaire de l’omission, à moins de considérer que chaque omission est volontaire. Mais, dans cette hypothèse, il serait sans doute plus raisonnable de faire de cette obligation de déclaration et de mise à jour une obligation de résultat, ce à quoi tend précisément cet amendement.
Comme nous l’avons dit, la question des conflits d’intérêts est primordiale et la difficulté du régime de déclaration publique d’intérêts préconisé dans cet article réside précisément dans l’exactitude des déclarations.
Souvenez-vous, mes chers collègues : à l’occasion de la grippe A(H1N1), nous avions fait la démonstration que les conseillers du Gouvernement et de la ministre de la santé de l’époque avaient omis de déclarer leurs liens d’intérêts avec l’industrie pharmaceutique, alors même que ceux-ci étaient nombreux.
Plus récemment, et suite à un recours engagé par l’association FORMINDEP, le Conseil d’État abrogeait la recommandation de la Haute Autorité de santé sur le traitement médicamenteux du diabète de type 2, précisément à cause des conflits d’intérêts existant au sein de la Haute Autorité.
En effet, cette association avait démontré que les recommandations de la HAS avaient été rédigées en dépit du respect de la législation et des règles internes de la Haute Autorité sur la gestion des conflits d’intérêts, relevant notamment l’absence de mise à jour des déclarations d’intérêts ou l’impossibilité de les consulter.
Avec cette décision du Conseil d’État, nous sommes au cœur de la difficulté et il ne faudrait pas, à l’avenir, que les juges se trouvent dans l’impossibilité de prononcer des sanctions en raison de leur incapacité à prouver le caractère volontaire de la violation des dispositions de ce projet loi.
Pour toutes ces raisons, nous voterons cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 76, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer les mots :
Est puni de 45 000 € d’amende le fait pour les entreprises
par les mots :
Fait l’objet d’une pénalité ne pouvant être supérieure à plus de 10 % du chiffre d’affaires hors taxe réalisé en France le fait pour une entreprise
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. L’article 3 du projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé prévoit un certain nombre de sanctions pénales.
Il dispose notamment que les entreprises pharmaceutiques qui ne rendraient pas publics les conventions passées avec les acteurs de la santé ainsi que les avantages et rémunérations qu’elles leur ont procurés ou versés sont punies de 45 000 euros d’amende.
Ce dispositif nous paraît améliorable, et ce pour deux raisons.
Tout d’abord, le montant fixé de 45 000 euros est largement insuffisant pour toute une frange de l’industrie pharmaceutique, au vu de l’importance du chiffre d’affaires de ces sociétés.
Ensuite, le dispositif ne prend pas en compte la diversité de la taille des entreprises liées aux médicaments, qui vont de la PME à la multinationale. Ainsi, la même amende de 45 000 euros, qui peut représenter une somme très importante pour une petite entreprise, ne sera absolument pas dissuasive pour une multinationale.
Pour pallier ces insuffisances, nous vous proposons de remplacer l’amende forfaitaire actuellement prévue par le texte par une amende dont il serait possible d’ajuster le montant en tenant compte du chiffre d’affaires des entreprises, dans la limite de 10 % de ce dernier.
Une telle disposition permettrait, à notre sens, d’assurer une meilleure justice entre les petites et les grosses entreprises pharmaceutiques.
L’adoption de cet amendement permettrait également, grâce à des amendes réellement dissuasives, de garantir l’effectivité du dispositif de transparence relatif aux liens d’intérêts entre laboratoires pharmaceutiques, décideurs publics et soignants.
Étant donné qu’il s’agit de l’un des principaux objectifs du projet de loi qu’il nous est aujourd’hui donné d’étudier, nous espérons, mes chers collègues, que vous serez favorables à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Je comprends la volonté des auteurs de cet amendement de différencier les sanctions frappant les personnes physiques et les personnes morales. Toutefois, le plafond prévu dans cet amendement est peut-être un peu élevé, même s’il convient de rappeler que le juge aura toute latitude pour individualiser la sanction, dans la limite fixée.
La commission s’en remet donc, sur cet amendement, à la sagesse du Sénat. Mais il s’agit plutôt d’une sagesse « positive », ma chère collègue ! (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je souhaiterais en fait obtenir une précision.
Le plafond de 45 000 euros s’applique-t- il au niveau de l’entreprise, globalement, ou pour chaque infraction constatée ? Ainsi, que se passera-t-il si l’entreprise oublie de publier cinq ou six conventions ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. C’est un plafond !
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Comme le dit souvent notre collègue Daniel Raoul : « À chacun selon ses moyens ! » Ce principe de proportionnalité de la sanction mérite d’être appliqué et, en se félicitant de la belle unanimité affichée par M. le rapporteur et par M. le ministre (M. le ministre fait des signes de dénégation.), les membres du groupe socialiste-EELV voteront cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote.
M. Alain Milon. Monsieur Kerdraon, d’après ce que j’ai entendu, il n’y a pas unanimité entre le ministre et le rapporteur ! C’est même tout le contraire.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. C’est clair, nous fixons un plafond. À partir de ce moment, qu’il s’agisse de 45 000 euros ou de 10 % du chiffre d’affaires, le juge fait ce qu’il veut : il ne peut pas aller au-delà du plafond, mais il peut fixer un montant inférieur.
M. le président. L'amendement n° 48, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Après les mots :
d’omettre
insérer le mot :
sciemment
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Comme précédemment, il s’agit de sanctionner pénalement les entreprises qui omettent de rendre publics les conventions et avantages dont il est question, mais uniquement quand les omissions sont volontaires, disposition qui participe à la proportionnalité de la mesure. C'est pourquoi nous introduisons le mot « sciemment ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission émet un avis défavorable, en cohérence avec son avis sur l’amendement n° 74.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 3, modifié.
(L'article 3 est adopté.)
TITRE II
GOUVERNANCE DES PRODUITS DE SANTÉ
Article 4
I. – L’article L. 5311-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :
« I. – L’Agence française de sécurité des produits de santé est un établissement public de l’État, placé sous la tutelle du ministre de la santé.
« II. – L’agence procède à l’évaluation des bénéfices et des risques liés à l’utilisation des produits à finalité sanitaire destinés à l’homme et des produits à finalité cosmétique. Elle surveille le risque lié à ces produits et effectue des réévaluations des bénéfices et des risques.
« L’agence peut demander que les essais cliniques portant sur des médicaments soient effectués sous forme d’essais contre comparateurs actifs et contre placebo. Si la personne produisant ou exploitant un médicament s’oppose aux essais contre comparateurs actifs, elle doit le justifier. » ;
2° Le début du vingt-deuxième alinéa est ainsi rédigé : « III. - L’agence participe… (le reste sans changement). » ;
3° La première phrase du vingt-troisième alinéa est supprimée ;
3° bis Le vingt-septième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le rapport comporte le bilan annuel de la réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques des médicaments à usage humain mentionnés à l’article L. 5121-8. » ;
4° L’avant-dernier alinéa est supprimé.
II. – L’article L. 5311-2 du même code est ainsi modifié :
1° Le 3° est complété par les mots : « ; elle apporte l’appui scientifique et technique nécessaire à l’élaboration et à la mise en œuvre des plans de santé publique » ;
2° Sont ajoutés des 6° et 7° ainsi rédigés :
« 6° Encourage la recherche, assure la coordination et, le cas échéant, met en place, en particulier par voie de conventions, des études de suivi des patients et de recueil des données d’efficacité et de tolérance ;
« 7° Accède, à sa demande et dans des conditions préservant la confidentialité des données à l’égard des tiers, aux informations nécessaires à l’exercice de ses missions qui sont détenues par toute personne physique ou morale, sans que puisse lui être opposé le secret médical, le secret professionnel ou le secret en matière industrielle et commerciale. »
III. – L’article L. 5312-4 du même code est ainsi modifié :
1° Après la référence : « L. 5312-3 », sont insérés les mots : «, ainsi que dans tous les cas où l’intérêt de la santé publique l’exige » ;
2° Après les mots : « opinion publique », sont insérés les mots : « et les professionnels de santé » ;
3° Est ajoutée une phrase ainsi rédigée :
« Ces mesures et leur coût sont, le cas échéant, à la charge de la personne physique ou morale responsable de la mise sur le marché, de la mise en service ou de l’utilisation du ou des produits concernés. »
IV. – A. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À l’avant-dernière phrase du 2° de l’article L. 1121-1, à la fin des première et seconde phrases de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1121-3, à la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 1121-15, à la fin du premier alinéa de l’article L. 1123-12, à la fin du dernier alinéa de l’article L. 1123-14, à la fin du second alinéa de l’article L. 1125-1, à la deuxième phrase du premier alinéa et aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 1125-2, à la première phrase de l’article L. 1125-3, à la fin de l’article L. 1131-5, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1161-5, au 1° et à la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 1221-8, au premier alinéa de l’article L. 1221-8-2, au début de l’article L. 1221-10-1, au premier alinéa de l’article L. 1221-12, au dernier alinéa de l’article L. 1221-13, au 4° de l’article L. 1222-1, à la fin des premier et dernier alinéas de l’article L. 1222-3, à l’avant-dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 1223-2, à l’article L. 1223-3, à la fin de la première phrase du deuxième alinéa et à la fin du dernier alinéa de l’article L. 1223-5, à la fin du b de l’article L. 1223-6, à la fin de la première phrase de l’article L. 1235-5, à la première phrase des premier et deuxième alinéas de l’article L. 1241-1, au troisième alinéa de l’article L. 1242-1, au premier alinéa et à la fin de la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 1243-2, au début de la première phrase et à la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1243-3, au premier alinéa de l’article L. 1243-5, au deuxième alinéa de l’article L. 1243-6, à la fin du dernier alinéa de l’article L. 1245-1, aux première et seconde phrases du premier alinéa et à la première phrase des quatrième et dernier alinéas de l’article L. 1245-5, à l’article L. 1245-6, à la fin du premier alinéa et de la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 1261-2, à la fin de l’article L. 1261-3, au dernier alinéa de l’article L. 1271-8, à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 1413-4, au second alinéa de l’article L. 1413-14, à la deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 1421-3, au deuxième alinéa de l’article L. 1435-7, à la fin du second alinéa de l’article L. 1522-4, au 2° du II de l’article L. 1525-4, à la fin du second alinéa des e du 2° et d et e du 3° de l’article L. 1541-4, au 1° de l’article L. 1542-9, au 2° du II de l’article L. 1543-3, au début de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 2151-7, à la fin du deuxième alinéa de l’article L. 2323-1, à la fin du cinquième alinéa de l’article L. 3114-1, à la fin du cinquième alinéa de l’article L. 3421-5, à la fin de l’article L. 4151-4, au premier alinéa des articles L. 4163-1 et L. 4211-6, à la fin du premier alinéa de l’article L. 4211-8, au premier alinéa de l’article L. 4211-9, à l’article L. 4222-7, au 2° des articles L. 4232-7 et L. 4232-8, à la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 4311-1, aux articles L. 4314-2, L. 4323-2 et L. 4344-1, à la dernière phrase du 2° et à la troisième phrase des 12° et 13° de l’article L. 5121-1, à la fin du premier alinéa et à la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 5121-5, à la fin des premier et second alinéas de l’article L. 5121-7, à la fin de la première phrase du premier alinéa, à la première phrase du quatrième alinéa et à la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5121-8, à la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 5121-9, à la première phrase de l’article L. 5121-9-1, au deuxième alinéa et à la première phrase du dernier alinéa de l’article L. 5121-10, aux deuxième et quatrième alinéas et à la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5121-10-2, à la fin de la première phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5121-13, à la fin des septième et onzième alinéas de l’article L. 5121-14-1, aux deux premiers alinéas de l’article L. 5121-15, au 2° et à la fin de l’avant-dernier alinéa de l’article L. 5121-16, à la première phrase du premier alinéa, deux fois, de l’article L. 5121-17, à la première phrase du premier alinéa et au deuxième alinéa de l’article L. 5121-18, à l’article L. 5121-19, au 17° de l’article L. 5121-20, au premier alinéa de l’article L. 5122-5, à la fin du deuxième alinéa de l’article L. 5122-6, à la fin de l’article L. 5122-7, au premier alinéa de l’article L. 5122-8, à la première phrase et au début de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5122-15, à la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5124-3, à la fin de l’article L. 5124-5, aux première et avant-dernière phrases du premier alinéa de l’article L. 5124-6, à la première phrase du premier alinéa, au début des deuxième et troisième alinéas et à la première phrase et au début de la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 5124-11, à la fin du premier alinéa de l’article L. 5124-13, au 12° de l’article L. 5124-18, à la première phrase et à la fin de la seconde phrase du troisième alinéa de l’article L. 5125-1, à la seconde phrase du premier alinéa et au deuxième alinéa de l’article L. 5125-23-1, au troisième alinéa de l’article L. 5126-1, à la fin du dernier alinéa de l’article L. 5126-2, à la fin du premier alinéa de l’article L. 5131-2, à la fin des première et dernière phrases de l’article L. 5131-5, à la fin des a et d de l’article L. 5131-7-2, à la première phrase de l’article L. 5131-7-3, à la fin du deuxième alinéa et au début de la seconde phrase du dernier alinéa de l’article L. 5131-9, au premier alinéa de l’article L. 5131-10, à la fin de l’article L. 5132-7, à la fin de la première phrase de l’article L. 5138-1, aux première et seconde phrases du second alinéa de l’article L. 5138-3, au premier alinéa de l’article L. 5138-4, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5138-5, aux deux dernières phrases de l’article L. 5139-1, à la fin des première et dernière phrases de l’article L. 513-10-3, à la fin de l’article L. 5211-2, au deuxième alinéa de l’article L. 5211-3, à l’article L. 5211-3-1, à la fin du premier alinéa de l’article L. 5211-4, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 5211-5-2, au 5° de l’article L. 5211-6, au premier et aux deux derniers alinéas de l’article L. 5212-1, à la fin du premier alinéa et au deuxième alinéa de l’article L. 5212-2, à la fin de l’article L. 5212-3, aux articles L. 5221-2, L. 5221-3, L. 5221-6, L. 5221-7 et L. 5222-2, aux première et seconde phrases du premier alinéa de l’article L. 5222-3, à la première phrase de l’article L. 5232-4, à l’article L. 5241-3, au début du premier alinéa de l’article L. 5312-1, au second alinéa de l’article L. 5414-1, aux articles L. 5421-4 et L. 5421-5, au troisième alinéa de l’article L. 5431-1, au 1° de l’article L. 5431-2, au 3° de l’article L. 5431-6, au premier alinéa de l’article L. 5461-2, au 2° de l’article L. 5462-1, à l’article L. 5462-2, à la fin du second alinéa de l’article L. 5511-4, à la fin de la première phrase du second alinéa du 3° de l’article L. 5521-1-1, à la fin du deuxième alinéa de l’article L. 5521-6, au premier alinéa des articles L. 5523-1 et L. 5541-2, à la fin de la première phrase du second alinéa de l’article L. 6211-3, à la fin de l’article L. 6211-22, à l’article L. 6221-6, à la première phrase, deux fois, et au début de la seconde phrase du deuxième alinéa de l’article L. 6221-9, au début de l’article L. 6221-10, au premier alinéa de l’article L. 6221-11, au dernier alinéa de l’article L. 6231-1, les mots : « l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé » sont remplacés par les mots : « l’Agence française de sécurité des produits de santé » ;
2° À l’intitulé du livre III de la cinquième partie, les mots : « l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé » sont remplacés par les mots : « l’Agence française de sécurité des produits de santé ».
B. – Au 2° et à la première phrase du huitième alinéa de l’article L. 161-37, au troisième alinéa, deux fois, et à l’avant-dernier alinéa de l’article L. 161-39, au premier alinéa de l’article L. 162-4-2, à la seconde phrase du premier alinéa, au troisième alinéa, deux fois, et au dernier alinéa de l’article L. 162-12-15, au deuxième alinéa de l’article L. 162-22-7-2 et à la première phrase des deux premiers alinéas de l’article L. 165-5 du code de la sécurité sociale, à la première phrase du premier alinéa de l’article L. 221-10 du code de la consommation, au 7° du I de l’article L. 521-12 et au deuxième alinéa du I de l’article L. 521-14 du code de l’environnement et au VI de l’article L. 234-2 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé » sont remplacés par les mots : « l’Agence française de sécurité des produits de santé ».
V. – Après l’article L. 5312-4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 5312-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5312-4-1. – L’Agence française de sécurité des produits de santé prononce, à l’encontre des personnes physiques ou morales produisant ou commercialisant des produits mentionnés à l’article L. 5311-1 ou assurant les prestations associées à ces produits, des amendes administratives qui peuvent être assorties d’astreintes journalières, dans les cas prévus par la loi et, le cas échéant, par décret en Conseil d’État.
« L’agence met préalablement en demeure la personne physique ou morale concernée de présenter ses observations, avec l’indication de la possibilité de se faire assister d’un conseil, et de régulariser la situation, au besoin en assortissant cette mise en demeure d’une astreinte journalière. En cas de constatation d’un manquement au titre des 7°, 10° et 11° de l’article L. 5421-8, l’agence peut prononcer une interdiction de la publicité, après que l’entreprise concernée a été mise en demeure.
« Les montants de l’amende et de l’astreinte sont proportionnés à la gravité des manquements constatés. Ils ne peuvent dépasser les montants fixés à l’article L. 5421-9.
« Les amendes mentionnées au présent article sont versées au Trésor public et sont recouvrées comme les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. »
VI. – L’intitulé du livre IV de la cinquième partie du même code est ainsi rédigé : « Sanctions pénales et financières ».
VII. – Le chapitre Ier du titre II du même livre IV est complété par des articles L. 5421-8 à L. 5421-11 ainsi rédigés :
« Art. L. 5421-8. – Constituent un manquement soumis à une sanction financière :
« 1° Le fait pour toute personne exploitant un médicament ou produit mentionnés à l’article L. 5121-1 ou pour tout titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-6 de méconnaître l’obligation de mise en œuvre d’un système de pharmacovigilance en vue de recueillir des informations concernant les risques que présentent les médicaments pour la santé des patients ou pour la santé publique ;
« 2° Le fait pour toute personne exploitant un médicament ou produit mentionnés à l’article L. 5121-1 ou pour tout titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-6, ayant eu connaissance d’un effet indésirable suspecté, de s’abstenir de le signaler sans délai selon les modalités définies par voie réglementaire à l’Agence française de sécurité des produits de santé. Lorsque ce manquement est également susceptible de faire l’objet d’une pénalité financière au titre de l’article L. 5421-6-1, les pénalités peuvent se cumuler dans la limite du montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues ;
« 3° Le fait pour toute personne exploitant un médicament ou produit mentionnés à l’article L. 5121-1 ou pour tout titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-6 de méconnaître, en matière de pharmacovigilance, l’obligation de transmission du rapport périodique actualisé ou de maintien en continu de la présence d’une personne responsable ;
« 4° Le fait pour le demandeur d’une autorisation de mise sur le marché de ne pas transmettre dans les délais requis le résultat des études mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5121-8 ;
« 5° Le fait pour le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché de ne pas transmettre dans les délais requis le résultat des études mentionnées à l’article L. 5121-8-1. Lorsque ce manquement est également susceptible de faire l’objet d’une pénalité financière au titre du 4° bis de l’article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale, les pénalités peuvent se cumuler dans la limite du montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues ;
« 6° Le fait pour une entreprise de ne pas communiquer un arrêt de commercialisation, une interdiction ou une restriction imposée par les autorités compétentes de tout pays dans lequel le médicament ou produit de santé est mis sur le marché ainsi que toute information nouvelle de nature à influencer l’évaluation des bénéfices et des risques du médicament ou du produit de santé concerné ou de ne pas transmettre dans les délais requis les données demandées par l’agence en application de l’article L. 5121-9-3 ;
« 7° Le fait pour toute personne d’effectuer auprès du public ou des professionnels de santé toute publicité sur les médicaments mentionnés à l’article L. 5121-12 ;
« 8° Le fait pour toute personne de ne pas transmettre à l’Agence française de sécurité des produits de santé dans les délais impartis les informations mentionnées au même article L. 5121-12 ;
« 9° Le fait, pour l’entreprise, de ne pas respecter les obligations prévues au second alinéa de l’article L. 5121-14-3 lorsqu’aucune convention entre le Comité économique des produits de santé et l’entreprise n’a été conclue en application de l’article L. 162-17-4-1 du code de la sécurité sociale ;
« 10° Le fait pour le fabricant de dispositifs médicaux ou son mandataire ainsi que pour toute personne qui se livre à la fabrication, la distribution ou l’importation de dispositifs médicaux de diffuser une publicité auprès du public pour des dispositifs médicaux remboursés, pris en charge ou financés, même partiellement, par les régimes obligatoires d’assurance maladie, à l’exception de ceux figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 5213-3 ;
« 11° Le fait pour le fabricant de dispositifs médicaux ou son mandataire ainsi que pour toute personne qui se livre à la fabrication, la distribution ou l’importation de dispositifs médicaux de diffuser une publicité sans avoir sollicité l’autorisation préalable dans les conditions définies à l’article L. 5213-4.
« Art. L. 5421-9. – L’Agence française de sécurité des produits de santé peut prononcer une amende administrative à l’encontre de l’auteur d’un manquement mentionné à l’article L. 5421-8.
« Elle peut assortir cette amende d’une astreinte journalière qui ne peut être supérieure à 1 000 € par jour lorsque l’auteur du manquement ne s’est pas conformé à ses prescriptions à l’issue du délai fixé par une mise en demeure.
Le montant de l’amende prononcée pour les manquements mentionnés à l’article L. 5421-8 ne peut être inférieur à 10% du chiffre d’affaires réalisé dans la limite d’un million d’euros.
« Art. L. 5421-10. – Pour les infractions pénales mentionnées au présent titre, les personnes physiques encourent également les peines complémentaires suivantes :
« 1° L’affichage ou la diffusion de la décision prononcée, dans les conditions et sous les peines prévues à l’article 131-35 du code pénal ;
« 2° L’interdiction temporaire ou définitive d’exercer une ou plusieurs professions régies par le présent code ou toute autre activité professionnelle ou sociale à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise, suivant les modalités prévues à l’article 131-27 du même code ;
« 3° La confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit, en application de l’article 131-21 du même code.
« Art. L. 5421-11. – Les personnes morales déclarées pénalement responsables, dans les conditions prévues à l’article 121-2 du code pénal, des infractions prévues au présent titre encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues à l’article 131-38 du même code, les peines prévues aux 2° à 9° de l’article 131-39 dudit code. »
VIII. – L’article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Au début du dixième alinéa, les mots : « Lorsqu’une mesure d’interdiction de publicité a été prononcée par l’Agence française de sécurité sanitaire » sont remplacés par les mots : « Lorsqu’un retrait de visa de publicité a été prononcé par l’Agence française de sécurité » ;
2° Au onzième alinéa, les mots : « de la publicité interdite » sont remplacés par les mots : « du retrait de visa de publicité » et les mots : « d’interdiction » sont remplacés par les mots : « de retrait de visa » ;
3° Au douzième alinéa, les mots : « la mesure d’interdiction » sont remplacés par les mots : « le retrait de visa de publicité » ;
4° Au seizième alinéa, les mots : « d’une mesure d’interdiction de publicité » sont remplacés par les mots : « d’un retrait de visa de publicité ».
M. le président. L'amendement n° 108, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 3
Remplacer les mots :
Agence française de sécurité des produits de santé
par les mots :
Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé
II. - Procéder au même remplacement dans tout le texte.
La parole est à M. le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission émet un avis défavorable…
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Par cohérence !
M. Bernard Cazeau, rapporteur. … parce que l’amendement présenté par le Gouvernement pose un problème de forme. Dans le contexte européen, mieux vaut parler d’agence « française » que d’agence « nationale ».
Par ailleurs, il pose surtout un problème de fond : le médicament est un produit de santé. Le nom choisi par la commission remédie à ce défaut. Nous pouvons en parler pendant une demi-heure si vous le souhaitez, mais l’essentiel, me semble-t-il, a été dit.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Je souhaiterais que M. le ministre nous précise que cette agence, qu’elle soit « française » ou « nationale », de sécurité du médicament et des produits de santé a bien désormais dans ses responsabilités les dispositifs médicaux.
Mme Catherine Génisson. Je vous remercie, monsieur le ministre.
M. le président. L'amendement n° 99, présenté par M. Cazeau, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 22
1° Remplacer la référence :
À l'avant-dernière phrase du 2° de l'article L. 1121-1
par la référence :
À l'antépénultième phrase, deux fois, du 2° de l'article L. 1121-1
2° Supprimer la référence :
à l'article L. 5241-3,
3° Avant la référence :
L. 5421-4
insérer la référence :
L. 5421-3,
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il s’agit de la rectification d’erreurs de référence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 100, présenté par M. Cazeau, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 24
Remplacer la référence :
huitième alinéa
par la référence :
neuvième alinéa
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Idem !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 5, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 34
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 2° bis Le fait pour toute personne exploitant un médicament ou produit, ou pour tout titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-6, ayant eu connaissance d’utilisations hors autorisation de mise sur le marché, de s’abstenir de les signaler sans délai selon les modalités définies par voie réglementaire à l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ;
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il convient ici de distinguer deux notions : le mésusage thérapeutique, qui se définit comme l’utilisation d’un médicament non conforme aux recommandations des caractéristiques du produit, et la prescription hors AMM, qui s’entend comme une décision volontaire du praticien d’utiliser un produit en dehors de ses indications thérapeutiques officielles. C’est bien sur ce dernier point que porte notre amendement.
En effet, le Mediator – pour ne prendre que cet exemple – a fait l’objet d’une mise en garde dès la demande de commercialisation. Comme on le souligne dans le rapport sénatorial La réforme du système du médicament, enfin, dès 1974, le compte rendu de la réunion de présentation des travaux du rapporteur faisait état dans sa conclusion, en forme d’avertissement, de l’éventualité d’un usage détourné de la spécialité pharmaceutique.
L’exploitant ne pouvait donc pas ignorer que, en réalité, le Mediator était moins prescrit comme antidiabétique que comme un médicament destiné à faciliter ou encourager la perte de poids.
Or, pour pouvoir bénéficier d’une autorisation de mise sur le marché, l’exploitant doit démontrer notamment que, pour les indications thérapeutiques qu’il vise, le médicament présente plus d’avantages que d’inconvénients, c’est la fameuse notion de « bénéfice-risque ». Le laboratoire réalise pour ce faire des essais cliniques, et c’est sur la base de ces derniers que l’agence décide ou non de délivrer la fameuse AMM, synonyme de commercialisation.
Dans les faits, cette prescription hors AMM oscillerait en moyenne entre 10 % et 20 % des prescriptions et résulte à la fois des prescriptions réalisées par les médecins, mais aussi de l’exploitant lui-même qui, étant informé des potentialités hors AMM du médicament qu’il exploite, ne demande pas la modification de son AMM. Or un médicament prescrit hors AMM peut être très dangereux, dans la mesure où les essais ayant conduit à sa commercialisation, notamment le « bénéfice-risque », portent exclusivement sur l’action présentée par le laboratoire dans son dossier de demande d’AMM.
Face à cette situation, et nous appuyant sur le rapport de la mission commune d’information présidée par François Autain, nous considérons que l’exploitant ne peut pas se soustraire à ses obligations en termes de pharmacovigilance. Ainsi, dès lors qu’il a eu connaissance d’une utilisation répétée de son médicament hors AMM et qu’il en a tiré des profits, il doit impérativement informer l’Agence nationale de sécurité de cette situation afin que, le cas échéant, elle puisse exiger de l’exploitant qu’il réalise de nouveaux essais cliniques et formule une nouvelle demande d’AMM intégrant cette utilisation non initialement prévue.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement vise à lutter contre le contournement massif de l’AMM. Il paraît cependant un peu excessif d’obliger les entreprises à notifier l’utilisation hors AMM, désormais encadrée par les recommandations temporaires d’utilisation, les RTU.
La commission émet un avis de sagesse positive.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Vous n’avez pas osé aller jusqu’à un avis favorable !
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 94, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 43
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
« 12° Le fait pour un grossiste-répartiteur de ne pas respecter les obligations de service public, ainsi que de ne pas assurer l’approvisionnement continu du marché national, mentionnés à l’article L. 5124-17-2 ;
« 13° Le fait pour une entreprise pharmaceutique exploitante de ne pas respecter l’obligation d’information de tout risque de rupture de stock ou de rupture qui lui incombe, en application de l’article L. 5124-6.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement n° 68, que nous examinerons plus tard. Il convient, nous semble-t-il, de prévoir des sanctions en cas de manquement aux obligations introduites dans cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission émet un avis favorable parce que la sanction prévue par cet amendement est le corollaire nécessaire des mesures contraignantes prévues à l’amendement n° 68.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Je suis favorable à l’amendement, mais j’aimerais que l’on pose les mêmes contraintes et que l’on ait les mêmes exigences vis-à-vis de l’ensemble des professionnels de santé.
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 103, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 43
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 12° Le fait pour le fabricant de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro ou son mandataire ainsi que pour toute personne qui se livre à la fabrication, la distribution ou l’importation de dispositifs médicaux de diagnostic in vitro de diffuser une publicité sans avoir sollicité l’autorisation préalable dans les conditions définies à l’article L. 5223-3.
La parole est à M. le ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Favorable !
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
L'amendement n° 77, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Alinéa 45
Remplacer le montant :
1 000 €
par le montant :
2 500 €
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. L’article 4 prévoit un certain nombre de mesures visant à rénover l’ancienne Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé.
L’agence a notamment la possibilité de prononcer des sanctions accompagnées, le cas échéant, d’une astreinte journalière, dans un certain nombre de situations : quand un système de pharmacovigilance ne serait pas mis en œuvre ; quand un effet indésirable ne serait pas signalé ; quand une information demandée ne serait pas transmise ou encore quand une publicité non autorisée serait diffusée.
Au vu de l’ordre de grandeur du chiffre d’affaires généré par la commercialisation de certains produits de santé, les auteurs de cet amendement craignent qu’il ne soit trop souvent plus rentable de rester dans l’irrégularité en payant l’astreinte journalière que d’y mettre un terme.
C’est pourquoi nous proposons de renforcer le dispositif de sanctions prévu à l’article 4 afin de le rendre plus dissuasif et donc plus efficace.
L’idée est de porter à 2 500 euros, au lieu des 1 000 euros initialement prévus, le montant maximal de l’astreinte journalière.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Favorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote sur l'article 4.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet article 4 nous paraît très important parce qu’il substitue à l’AFSSAPS une nouvelle agence, qui aura désormais véritablement le rôle d’évaluer les médicaments. Elle ne sera pas qu’un guichet d’enregistrement des autorisations de mise sur le marché. C’est le changement majeur, me semble-t-il.
Nous venons de le voir à l’instant, l’agence est dotée de pouvoirs de sanctions qui lui donneront les moyens d’une véritable action dissuasive vis-à-vis des entreprises. À cela s’ajoute une plus large gamme d’informations qui lui seront dorénavant accessibles.
Atteindre l’objectif de transparence de la nouvelle agence implique de modifier aussi son système de financement.
Les dispositions du texte traduisent un retour à la responsabilité du politique autour de la création d’un comité stratégique de la politique des produits de santé et de la sécurité sanitaire.
Tous ces éléments, vous en conviendrez, mes chers collègues, traduisent parfaitement les objectifs d’efficacité, de transparence et d’indépendance de la nouvelle agence.
Je souhaite m’arrêter quelques instants sur le changement de nom de l’agence, car l’inscription du mot « médicament » nous paraît très importante pour que l’opinion publique puisse bien identifier le rôle de la nouvelle agence. Il faut, me semble-t-il, partir sur de nouvelles bases, et la dimension symbolique est aussi importante en la matière. C’est pour nous une façon de souhaiter « bon vent » à cette nouvelle agence !
M. le président. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Article 4 bis A (nouveau)
L’observatoire national des prescriptions et consommations des médicaments rassemble les informations relatives aux prescriptions et analyse les déterminants médicaux, sociaux, culturels et promotionnels de la prescription. Il remet annuellement aux ministres en charge de la santé et de la sécurité sociale un rapport faisant état de ses travaux. Les données contenues dans ce rapport ne peuvent pas faire l’objet d’une utilisation commerciale. – (Adopté.)
Article 4 bis
(Non modifié)
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5122-15, les mots : «, après avis de la commission prévue au deuxième alinéa du présent article, » sont supprimés ;
2° À la première phrase du second alinéa du même article, les mots : « après avis d’une commission et » sont supprimés ;
3° Le 4° de l’article L. 5122-16 est abrogé ;
4° Au cinquième alinéa de l’article L. 5323-4, après les deux occurrences du mot : « commissions », sont insérés les mots : « comités, groupes de travail ».
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par M. Cazeau, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
4° Au cinquième alinéa de l'article L. 5323-4, les mots : « conseils et commissions » sont remplacés, deux fois, par les mots : « conseils, commissions, comités et groupes de travail ».
La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je constate que cet amendement a été adopté à l’unanimité des présents.
Je mets aux voix l'article 4 bis, modifié.
(L'article 4 bis est adopté.)
Article 5
I. – Le deuxième alinéa de l’article L. 5322-1 du code de la santé publique est remplacé par dix alinéas ainsi rédigés :
« Le conseil d’administration est composé, outre son président, des membres suivants :
« 1° Des représentants de l’État ;
« 2° De trois députés et de trois sénateurs ;
« 3° Des représentants des régimes obligatoires de base d’assurance maladie ;
« 4° (Suppression maintenue)
« 5° Des représentants des professionnels de santé autorisés à prescrire et à dispenser des produits mentionnés au même article L. 5311-1 ;
« 6° Des représentants d’associations agréées au titre de l’article L. 1114-1, dont au moins un représentant d’association représentant exclusivement des victimes d’accidents médicamenteux, et ne recevant pas de subventions ou avantages des entreprises produisant ou commercialisant des produits mentionnés au II de l’article L. 5311-1 ou assurant des prestations liées à ces produits ;
« 7° Des personnalités qualifiées ;
« 8° Des représentants du personnel de l’agence.
« Les droits de vote sont répartis pour moitié entre les membres mentionnés au 1° et pour moitié entre les autres membres du conseil d’administration. Le président a voix prépondérante en cas de partage égal des voix. »
I bis. – Le troisième alinéa du même article L. 5322-1 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le directeur général est nommé pour une durée de trois ans renouvelable une fois. »
I ter (nouveau). – Après le troisième alinéa du même article L. 5322-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil d’administration fixe les orientations de la politique de l’agence. Il délibère en outre sur son programme de travail ainsi que sur des sujets définis par voie réglementaire. »
II. – Le titre II du livre III de la cinquième partie du même code est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« CHAPITRE IV
« Commissions
« Art. L. 5324-1. – L’agence assure la publicité des réunions des commissions, des comités et des instances collégiales mentionnés à l’article L. 1451-1 et qui sont consultés dans le cadre de procédures de décision administrative selon les modalités prévues à l’article L. 1451-1-1.
« Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article. »
III. – L’article L. 1413-8 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « composé dans les conditions prévues à l’article L. 5322-1 » sont supprimés ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le conseil d’administration comprend, outre son président, pour moitié des représentants de l’État et pour moitié des personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence dans les domaines entrant dans les missions de l’institut et des représentants du personnel. »
M. le président. L'amendement n° 32, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 4, qui prévoit la présence de trois députés et de trois sénateurs au sein du conseil d’administration de l’agence.
Le texte initial du projet de loi prévoyait la présence d’un député et d’un sénateur. L’Assemblée nationale a souhaité renforcer cette représentation parlementaire en multipliant par trois le nombre de parlementaires.
Cela étant, il faut s’interroger sur l’intérêt d’une telle présence dans cette instance, dont la mission est avant tout scientifique et technique. On ne trouve pas, par exemple, de parlementaires au conseil d’administration de l’ANSES.
Par ailleurs, se pose un problème concernant les droits de vote puisque, dans ce conseil d’administration, les représentants de l’État ont la moitié des droits de vote. Il suffira donc qu’un parlementaire – peut-être favorable au gouvernement du moment – vote avec les représentants de l’État pour que les autres membres du conseil d’administration ne puissent pas faire prévaloir leur avis.
M. Gilbert Barbier. Dans cette affaire, me semble-t-il, les parlementaires n’ont peut-être pas un rôle primordial à jouer (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.) et que l’on peut supprimer leur présence.
Par ailleurs, le Parlement a parfaitement le droit d’exercer son droit de contrôle sur ces agences.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Nous ne voyons pas les choses de manière aussi déviante que vous, mon cher collègue ! (Sourires.)
Pour notre part, nous estimons que la présence de parlementaires, de tendances politiques diverses, d’ailleurs – nous avons prévu trois députés et trois sénateurs, alors que nous aurions pu n’en prévoir qu’un seul, qui aurait appartenu à la majorité, quelle qu’elle soit ! –, au sein du conseil d’administration de l’agence permettra un meilleur suivi des travaux. Le Parlement y a sa place, au moins dans un rôle d’écoute.
C'est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je n’ai pas pour habitude de m’exprimer sur des questions qui concernent la représentation nationale. Aussi m’en remettrai-je à la sagesse de la Haute Assemblée. Toutefois, si j’étais parlementaire, je voterais contre cet amendement !
Permettez-moi de vous dire que c’est moi qui ai demandé qu’il y ait une représentation politique au sein du conseil d’administration. Dès le départ, j’ai souhaité introduire une forme de politisation, avec la responsabilité politique du ministre ; je pense que tel doit être aussi le cas des parlementaires.
Lorsque les députés ont proposé d’augmenter le nombre de parlementaires de façon que majorité et opposition soient représentées, le Gouvernement s’en est remis à la sagesse de l'Assemblée nationale.
Concernant cet amendement, vous aurez compris mon point de vue, mesdames, messieurs les sénateurs, même si je m’en remets à la sagesse de votre assemblée.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Combien y a-t-il de membres dans ce conseil d’administration ?
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. En fait, je souhaiterais interroger le Gouvernement.
Monsieur le ministre, avez-vous une idée du nombre des membres de ce conseil d’administration ?
Mme Nathalie Goulet. Il y aura donc six parlementaires sur vingt ! C’est beaucoup !
M. le président. L'amendement n° 104, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 6° Des représentants d’associations agréées au titre de l’article L. 1114-1 ;
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Il s’agit d’un amendement de cohérence avec ce que je disais tout à l’heure sur les associations. Leurs représentants seront soumis à déclaration publique d’intérêts.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Les associations de victimes dont la représentation est prévue par le texte de la commission n’ont pas de lien d’intérêts.
Aussi la commission a-t-elle émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 6, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Après les mots :
décision administrative
insérer les mots :
ainsi que des conclusions des groupes du travail
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il s’agit d’un amendement de coordination avec l’amendement n° 3 rectifié, que nous avons déposé à l’article 1er du projet de loi et qui a été adopté.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Favorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 5, modifié.
(L'article 5 est adopté.)
Article 5 bis
Après l’article L. 161-40 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 161-40-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 161-40-1. – La Haute Autorité de santé, en liaison avec l’Agence française de sécurité des produits de santé et l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, met en œuvre une base de données administratives et scientifiques sur les maladies et leurs traitements ainsi que sur le bon usage des produits de santé, consultable gratuitement, destinée à servir de référence pour l’information des professionnels de santé, des usagers et des administrations compétentes en matière de produits de santé. Cette base de données répond aux critères définis dans la charte de qualité des bases de données médicamenteuses destinées aux éditeurs de logiciels d’aide à la prescription candidats à la procédure de certification prévue à l’article L. 161-38.
« Un décret fixe les conditions dans lesquelles celle-ci est rendue gratuitement accessible au public. »
M. le président. L'amendement n° 43, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Rédiger ainsi ces alinéas :
« Art. L. 161-40-1. - Une base de données administratives et scientifiques sur les maladies et leurs traitements est mise en œuvre par le ministre chargé de la santé, en lien avec la Haute Autorité de santé, l’Agence nationale de sécurité du médicament et les caisses d’assurance maladie. Cette base sert de référence pour l’information des professionnels de santé, des usagers et des administrations compétentes en matière de produits de santé.
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article et notamment les conditions dans lesquelles cette base de données est rendue accessible au public. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement est relatif à la création de la base de données administratives et scientifiques sur les maladies et leurs traitements.
Nous souhaitons que la mise en œuvre de cette base de données soit assurée par le ministre chargé de la santé pour qu’elle puisse être considérée comme indépendante et fiable par les utilisateurs.
Or, en confiant la gestion des données à la HAS, l’information pourrait avoir une connotation médico-économique.
Par ailleurs, la HAS ne peut mettre en œuvre une base de données qui devra être conforme à une charte de qualité dont elle assure elle-même le suivi : elle serait alors juge et partie.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Chat échaudé craint l’eau froide ! (Sourires.)
Mme Bachelot-Narquin avait annoncé en décembre 2008 que le ministère de la santé allait créer « incessamment » une base publique d’information sur les médicaments. Trois ans après, nous attendons toujours ! Nous faisons donc beaucoup plus confiance à la HAS pour réussir dans l’entreprise.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je serais tenté de demander à M. Lorrain de bien vouloir retirer son amendement au profit d’un amendement gouvernemental. Même si, dans cette affaire, le ministère de la santé ne peut être absent – au contraire ! -, j’estime qu’il ne lui revient pas de mettre en œuvre cette base de données : cette mission revient à l’HAS.
M. le président. Monsieur Lorrain, l'amendement n° 43 est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Lorrain. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 43 est retiré.
Je mets aux voix l'article 5 bis.
(L'article 5 bis est adopté.)
TITRE III
LE MÉDICAMENT À USAGE HUMAIN
Chapitre Ier
L’autorisation de mise sur le marché
Article 6
I. – La seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 5121-8 du code de la santé publique est complétée par les mots : «, notamment l’obligation de réaliser des études de sécurité ou d’efficacité post-autorisation ».
II. – Après le même article L. 5121-8, il est inséré un article L. 5121-8-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5121-8-1. – Après délivrance de l’autorisation prévue à l’article L. 5121-8, l’Agence française de sécurité des produits de santé doit, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, exiger du titulaire de l’autorisation qu’il effectue, dans un délai qu’elle fixe :
« 1° Des études de sécurité post-autorisation dès que des signalements d’effets indésirables ont été constatés dans le cadre de la pharmacovigilance ou s’il existe des craintes quant aux risques de sécurité présentés par un médicament autorisé ;
« 2° Des études d’efficacité post-autorisation lorsque la compréhension de la maladie ou la méthodologie clinique fait apparaître que les évaluations d’efficacité antérieures pourraient devoir être revues de manière significative.
« Les études mentionnées aux 1° et 2° sont menées en comparaison avec les autres traitements disponibles, lorsqu’il en existe. »
III. – La première phrase du quatrième alinéa du même article L. 5121-8 est ainsi modifiée :
1° Les mots : «, pour des raisons justifiées ayant trait à la pharmacovigilance, » sont supprimés ;
2° Le mot : « supplémentaire » est remplacé par le mot : « quinquennal ».
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Remplacer le mot :
doit
par le mot :
peut
II. - Alinéa 4
Supprimer les mots :
dès que des signalements d’effets indésirables ont été constatés dans le cadre de la pharmacovigilance ou
III. – Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Le paragraphe I de cet amendement vise à remplacer par une simple possibilité l’obligation faite à l’ANSM d’exiger du titulaire de l’autorisation qu’il réalise des études post-autorisation, donc après l’octroi de l’AMM.
En effet, il n’est pas opportun de demander systématiquement la réalisation d’études complémentaires au titulaire de l’AMM. Ces études doivent être demandées au cas par cas, lorsque la situation exige des données supplémentaires sur le médicament.
Par ailleurs, la directive européenne relative à la pharmacovigilance n’impose pas la réalisation d’études post-autorisation, mais elle prévoit la possibilité de les demander au titulaire lorsque cela est nécessaire. Le paragraphe I de cet amendement tend donc à remettre en conformité notre droit avec le droit européen.
Le paragraphe II de cet amendement prévoit la suppression de l’obligation de réaliser des études post-autorisation dès que sont signalés des effets indésirables. Tout signalement d’effets indésirables ne justifie pas la réalisation d’études. En effet, ces effets peuvent être attendus, sans gravité particulière et conformes au résumé des caractéristiques du produit. De plus, une telle exigence n’est pas conforme à la directive européenne relative à la pharmacovigilance, précitée.
Le paragraphe III de cet amendement vise à supprimer l’obligation pour le titulaire de réaliser des études post-autorisation après délivrance de l’AMM menées en comparaison avec les autres traitements disponibles, lorsqu’ils existent.
Les études post-autorisation ne sont pas nécessairement comparatives, cela dépend de la question posée. Aussi, il n’est pas cohérent d’imposer une telle obligation. Les études comparatives seront demandées lorsque la situation le justifiera, et au cas par cas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. On ne peut pas envisager que l’agence aura une attitude véritablement proactive en matière de pharmacovigilance si aucune obligation n’est prévue. Mais elle saura, le cas échéant, ne pas imposer de contraintes inutiles. Toutefois, il nous faut prévoir le plus haut niveau de sécurité, et c’est ce que nous avons fait avec les comparateurs actifs.
En conséquence, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 7, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Compléter cet alinéa par les mots :
y compris dans le cadre d’une utilisation autre que celle ayant fait l’objet de l’autorisation visée à l’article L. 5121-8
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Avec cet amendement, nous revenons sur un débat que nous avons entamé à l’occasion de l’examen de l’amendement n° 5 relatif à l’utilisation hors AMM d’un médicament.
L’article 6, que notre amendement vise à compléter, précise les conditions dans lesquelles l’agence peut demander au titulaire de l’autorisation de mise sur le marché des études complémentaires.
Ainsi, de nouvelles études peuvent être demandées s’il existe des craintes quant aux risques liés au médicament, concernant notamment sa nocivité. Il s’agit, avec cet amendement, d’aller plus loin, en prévoyant que de nouveaux essais seront réalisés si le médicament se révèle nocif lors d’une utilisation autre que celle qui a fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché.
Avec l’affaire du Mediator, les prescriptions dites « hors AMM » ont fait l’objet d’un important débat. La mission commune d’information sur le Mediator a, par exemple, reçu des témoignages très intéressants, tel celui de M. Bruno Toussaint, directeur de la revue Prescrire, qui a présenté l’utilisation hors AMM comme un élément parfois nécessaire pour soigner certains patients, notamment les enfants, ou encore les personnes souffrant de pathologies ophtalmiques.
S’il est indéniable que telle ou telle utilisation hors AMM peut être sans risque pour le patient, comme le prouve le cas classique de l’aspirine utilisée pour soigner des maladies cardiovasculaires, alors que son AMM ne comportait que l’utilisation antalgique, il n’en demeure pas moins qu’il faut encadrer ces pratiques, ne serait-ce que pour éviter, comme le préconise le groupe de travail n° 3 des Assises du médicament, de faire supporter au patient des risques sanitaires potentiellement graves, mais aussi des risques juridiques important pour les médecins prescripteurs.
Vous-même, monsieur le ministre, conscient de cette nécessité, avez proposé des mesures visant à encadrer les AMM afin, affirmiez-vous alors – et vous aviez raison ! –, que le « doute profite systématiquement aux patients ».
Dans un article du Monde paru le 23 juin 2011, vous annonciez certaines mesures qui, selon nous, allaient dans le bon sens. Vous proposiez alors de responsabiliser les industriels sur l’usage « hors AMM » de leurs spécialités « en leur demandant, à l’issue d’une période d’autorisation dérogatoire, de déposer une demande d’extension d’indication ou d’AMM », allant même – et tel est l’objet de l’amendement n° 5 – jusqu’à vouloir doter le CEPS, le Comité économique des produits de santé, d’un pouvoir de sanction en cas de non-respect des obligations imposées aux firmes pharmaceutiques.
Dès lors que, comme ce fut le cas avec le Mediator, l’agence sanitaire est informée qu’une utilisation « hors AMM » fait courir des dangers pour les patients, elle doit pouvoir exiger des études afin de s’assurer de l’exactitude ou non de cette information.
Tel est tout simplement l’objet de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Tout en en comprenant l’intérêt, je pense que l’amendement n’est pas adapté à toutes les situations.
La plupart du temps, les effets secondaires d’un médicament sont les mêmes, quelle que soit l’utilisation qui en est faite. C’est le cas de l’aspirine, chère collègue, que vous pouvez utiliser comme antalgique ou comme anti-agrégant, mais qui, dans les deux cas, risque de vous causer des brûlures d’estomac !
En conséquence, la commission s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, qui est satisfait par les plans de gestion des risques.
M. le président. L'amendement n° 8, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« 3° un suivi spécifique du risque, de ses complications et de sa prise en charge médicosociale, au travers d’un registre de patients atteints, lorsque le médicament, bien qu’autorisé, est susceptible de provoquer un effet indésirable grave. La liste des effets indésirables concernés est fixée par décret. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Bien que susceptibles d’avoir un ou plusieurs effets indésirables graves, des médicaments peuvent obtenir une autorisation de mise sur le marché ou bénéficier d’un maintien de cette AMM dès lors que les risques potentiels qu’ils présentent sont inférieurs aux avantages thérapeutiques. C’est ce que l’on appelle la balance bénéfices-risques, qui doit impérativement être positive.
Pour autant, la délivrance de cette autorisation de mise sur le marché n’est pas synonyme d’un blanc-seing pour l’exploitant. L’article 6, dans sa rédaction actuelle, renforce d’ailleurs la responsabilisation de l’exploitant, avec la faculté donnée à l’agence de demander des études de sécurité dès que des signalements d’effets indésirables ont été enregistrés par le système de pharmacovigilance.
Mais il faut également que l’exploitant soit responsabilisé quant aux conséquences sur la qualité de vie des victimes, et tel est l’objet de cet amendement.
En effet, dès lors qu’un médicament présente un risque grave, identifié comme tel dans le rapport bénéfices-risques, le producteur ne peut ignorer la réalisation de ce risque, puisqu’il a été identifié et reconnu par le laboratoire. Or, bien qu’ayant connaissance de ce risque, le laboratoire n’est jamais associé au financement des dépenses éventuellement associées à la réalisation du risque. Ces dépenses sont exclusivement prises en charge par la sécurité sociale dans la mesure où il suffit que ce risque soit mentionné sur la notice pour que le laboratoire se dégage de toute responsabilité.
Cela revient à dire que la délivrance de l’autorisation de mise sur le marché efface la responsabilité du producteur du médicament. Pourtant, celui-ci continue de tirer des avantages commerciaux liés à la commercialisation du produit. Il serait dès lors logique que les producteurs soient également appelés en responsabilité.
Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission est favorable à cet amendement, même si le décret ici prévu pour établir une liste d’effets indésirables graves n’est pas, à mon avis, la formule la plus pratique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Avis défavorable. Cet amendement me semble satisfait par les plans de gestion des risques.
M. le président. Je mets aux voix l'article 6, modifié.
(L'article 6 est adopté.)
Article 6 bis
(Non modifié)
Après le même article L. 5121-8, il est inséré un article L. 5121-8-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5121-8-2. – L’inscription sur la liste définie à l’article L. 1121-15 des essais cliniques préalables à la délivrance de l’autorisation de mise sur le marché est obligatoire. » – (Adopté.)
Article 7
Le dernier alinéa de l’article L. 5121-9 du code de la santé publique est remplacé par huit alinéas ainsi rédigés :
« L’autorisation prévue à l’article L. 5121-8 est suspendue, retirée ou modifiée dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État et notamment pour l’un des motifs suivants :
« 1° Le médicament est nocif ;
« 2° Le médicament ne permet pas d’obtenir de résultats thérapeutiques ;
« 3° Le rapport entre les bénéfices et les risques n’est pas favorable ;
« 4° La spécialité n’a pas la composition qualitative et quantitative déclarée ;
« 5° Le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché ne respecte pas les conditions prévues au même article L. 5121-8 ou les obligations qui lui sont imposées en application des articles L. 5121-8-1 et L. 5121-24.
« La suspension, le retrait ou la modification prévus au quatrième alinéa du présent article ainsi que tout refus de l’autorisation prévue à l’article L. 5121-8 sont rendus publics sans délai aux frais du titulaire ou du demandeur de l’autorisation de mise sur le marché par tous moyens permettant une large diffusion auprès du grand public et des professionnels et établissements de santé. Le refus de prendre cette décision est également rendu public dans les mêmes conditions aux frais de l’agence.
« L’Agence française de sécurité des produits de santé peut être saisie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, par une association agréée au titre de l’article L. 1114-1 d’une demande visant à ce qu’elle fasse application du présent article. Le refus de prendre la décision demandée ainsi que les motifs attachés à cette décision sont rendus publics. »
M. le président. L'amendement n° 9, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« La suspension, le retrait ou la modification prévue dans le cas visé au 1° entraîne systématiquement la réalisation d’une étude pharmaco-épidémiologique rétrospective de mortalité dans des conditions définies par décret. »
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. L’article 7 du projet de loi précise que l’autorisation prévue à l’article L. 5121-8 du code de la santé publique sera suspendue ou retirée si le médicament est nocif ou si le titulaire de l’AMM ne se conforme pas aux demandes d’informations et d’études émises par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé. En ce sens, il constitue une évolution notable et positive.
Nous souhaitons toutefois soutenir et renforcer son dispositif en le complétant par un alinéa prévoyant que, dans le cas d’une suspension, d’un retrait ou d’une modification de l’autorisation au motif que le médicament est nocif, une étude pharmaco-épidémiologique rétrospective de mortalité sera systématiquement réalisée.
Nous constatons en effet que notre pays manque cruellement de données en la matière ; le rapport de la mission commune d’information l’a mis en évidence.
Ce type d’études doit nous permettre de mieux appréhender l’évaluation de la prévalence de ces risques, qui ne relève pas de la simple pharmacovigilance, celle-ci ayant pour vocation de détecter les risques.
Nous faisons nôtres les conclusions de la mission commune d’information sur le Mediator selon lesquelles « ces études doivent dépasser le cadre de la sécurité sanitaire pour explorer celui d’une politique de santé publique dynamique en matière de produits de santé ».
Or, pour parvenir à de telles avancées, il faut donner aux autorités scientifiques les moyens de mesurer pleinement le caractère nocif des médicaments incriminés, ainsi que toutes les conséquences, y compris quantitatives, de leur utilisation pour les patients.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Avis favorable. La rédaction proposée me semble plus précise, et donc mieux adaptée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 14 rectifié bis, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« En application du principe de précaution, le décret en Conseil d’État mentionné au quatrième alinéa fixe également les conditions dans lesquelles des données nouvelles suscitant un doute sérieux sur la sécurité ou l’équilibre entre les bénéfices et les risques d’un médicament dont le service médical rendu n’est pas majeur ou important peuvent motiver la suspension ou le retrait de l’autorisation de mise sur le marché de ce médicament notamment en ce qui concerne la proportionnalité de la preuve à apporter concernant sa sécurité ou sa dangerosité. »
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Lors des travaux de la mission commune d’information sur le Mediator, le principe de précaution a fait l’objet d’un important débat, et toutes les interventions se sont conclues de la même façon : le doute doit systématiquement profiter au patient, afin d’éviter la survenue de drames sanitaires aux conséquences importantes.
Il faut donc impérativement faire en sorte que l’agence chargée de la sécurité sanitaire soit dotée non seulement des moyens, mais aussi des fondements légaux lui permettant de prévenir un risque, même lorsque celui-ci n’est que potentiel, dès lors que les études scientifiques ou les alertes lancées par les professionnels de santé ou les patients témoignent d’un lien probable entre l’utilisation de certains médicaments et la survenue de certaines pathologies ou d’effets indésirables.
Cet amendement a donc pour objet de transposer dans notre droit une recommandation, visant à appliquer ce principe de précaution au domaine pharmaceutique, du rapport intitulé « La réforme du système du médicament, enfin », adopté, je tiens à le rappeler, à l’unanimité des membres de la mission commune d’information. Cela reviendra à reconnaître l’application du principe de précaution aux autorisations de mise sur le marché.
Concrètement, il s’agit de proportionner le niveau de preuve requis pour la suspension ou le retrait de l’AMM à l’efficacité du médicament en cause, en prévoyant que les médicaments de très faible utilité puissent être facilement retirés du marché en cas de doute sur leur innocuité.
On nous oppose souvent le cadre juridique européen. S’il est vrai que celui-ci est contraignant, il est aujourd’hui inopérant et il faudra bien que le Gouvernement engage avec nos partenaires européens des négociations pour transposer à l’échelon européen les mécanismes dont nous nous dotons. En effet, le Tribunal de première instance des Communautés européennes, le TPICE, a déjà rendu, le 26 novembre 2002, une décision précisant que, au regard de l’article 174 du traité instituant la Communauté européenne, « dans le domaine de la santé publique, le principe de précaution implique que, lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à la portée de risques pour la santé des personnes, l’autorité compétente peut prendre les mesures nécessaires sans avoir à attendre que la réalité et la gravité de ces risques soient pleinement démontrées sur le plan scientifique et médical ».
J’insiste sur le fait que l’article 7 du projet de loi se borne à prévoir la suspension ou le retrait de l’AMM lorsque le médicament est nocif, c’est-à-dire s’il a déjà été établi qu’il présente un risque pour la santé. Notre amendement vise à ce que le principe de précaution s’applique, conformément à la décision précitée, et que le doute profite au patient, sans attendre la survenue d’un drame sanitaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement va dans le sens que vous souhaitez, monsieur le ministre, puisqu’il est fondé sur l’idée que le doute doit profiter au patient. Il reprend aussi une préconisation contenue dans le rapport sénatorial de la mission commune d’information sur le Mediator.
L’amendement tend à permettre de retirer rapidement du marché un médicament dont le service médical rendu est faible ou insuffisant, en cas de doute sérieux sur son innocuité ou son rapport bénéfices-risques.
Je souligne que ce retrait pourra n’être que temporaire, pour permettre, par exemple, de confirmer ou d’infirmer les doutes.
La commission a donné un avis favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote.
M. Ronan Kerdraon. Cet amendement représentant un enrichissement du texte et un progrès, nous le voterons.
M. le président. Je mets aux voix l'article 7, modifié.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
Après l’article L. 5121-9-1 du même code, sont insérés des articles L. 5121-9-2 à L. 5121-9-4 ainsi rédigés :
« Art. L. 5121-9-2. – L’entreprise ou l’organisme exploitant un médicament ou un produit de santé communique immédiatement à l’Agence française de sécurité des produits de santé tout arrêt de commercialisation, toute interdiction ou restriction imposée par l’autorité compétente de tout pays dans lequel le médicament à usage humain est mis sur le marché et toute autre information nouvelle de nature à influencer l’évaluation des bénéfices et des risques du médicament à usage humain ou du produit concerné. Le cas échéant, l’Agence française de sécurité des produits de santé diligente immédiatement une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques de ce médicament ainsi que de tous les produits présentant le même mécanisme d’action ou une structure chimique analogue.
« Art. L. 5121-9-3. – L’Agence française de sécurité des produits de santé peut à tout moment demander au titulaire de l’autorisation de mise sur le marché de transmettre des données démontrant que ce rapport reste favorable.
« Art. L. 5121-9-4. – (Supprimé)
M. le président. L'amendement n° 59, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
I. - Alinéa 2, première phrase
Supprimer les mots :
tout arrêt de commercialisation,
II. – Alinéa 3
Après la référence :
« Art. L. 5121-9-3. –
insérer les mots :
Afin de pouvoir évaluer en continu le rapport entre les bénéfices et les risques liés au médicament tel que défini au premier alinéa de l’article L. 5121-9,
III. - Alinéa 4
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« Art. L. 5121-9-4. – Le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché qui arrête la commercialisation d’un médicament dans un autre État que la France alors que ce produit reste commercialisé en France doit en informer immédiatement l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et lui communiquer le motif de cet arrêt de commercialisation. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement vise à assurer la transposition de la directive 2010/84/UE relative à la pharmacovigilance. L’évaluation en continu du rapport bénéfices-risques ne peut être dissociée de la demande d’informations sur les risques adressée au titulaire de l’AMM.
Par ailleurs, nous proposons de rétablir la rédaction de l’alinéa 4 de l’article 8 qui avait été adoptée par l’Assemblée nationale, tendant à obliger le titulaire de l’AMM à informer l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé de l’arrêt de commercialisation du médicament dans un autre État que la France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. L’avis est défavorable, car cet amendement n’améliore en rien la rédaction proposée pour l’article 8. Au contraire, il enfonce des portes ouvertes, s’agissant notamment de l’article L. 5121-9-3 du code de la santé publique.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Je ne suis pas du tout d’accord avec M. le rapporteur !
Si cet amendement n’est pas adopté, rien ne garantira qu’il y aura un « après Mediator » et que ce qui s’est passé ne se reproduira pas.
Lorsque Servier a retiré le Mediator du marché en Espagne et en Italie, les autorités sanitaires françaises n’en ont pas été informées dans des conditions satisfaisantes : il a été prétendu que ce retrait avait été décidé pour des raisons commerciales…
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Je comprends très bien que l’on puisse ne pas être d’accord sur certaines dispositions, mais la légèreté avec laquelle vous traitez ce sujet, monsieur le rapporteur, me paraît gravissime ! Je me permets d’insister pour que cet amendement soit adopté.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. Je ne comprends pas du tout, moi non plus, la position de M. le rapporteur sur cet amendement, qui reprend une préconisation figurant dans le rapport de la mission commune d’information sur le Mediator !
Nous nous sommes rendus à Londres pour débattre de ce point essentiel avec l’Agence européenne des médicaments. Nous souhaitons d’ailleurs que ce soit elle qui diffuse l’information sur les retraits de médicaments dans les différents pays.
Je ne comprends donc absolument pas l’opposition de la commission à un amendement qui me paraît être de bon sens !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Je rappelle les termes de la rédaction adoptée par la commission pour l’article L. 5121-9-2 du code de la santé publique :
« L’entreprise ou l’organisme exploitant un médicament ou un produit de santé communique immédiatement à l’Agence française de sécurité des produits de santé tout arrêt de commercialisation, toute interdiction ou restriction imposée par l’autorité compétente de tout pays dans lequel le médicament à usage humain est mis sur le marché et toute autre information nouvelle de nature à influencer l’évaluation des bénéfices et des risques du médicament à usage humain ou du produit concerné. Le cas échéant, l’Agence française de sécurité des produits de santé diligente immédiatement une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques de ce médicament ainsi que de tous les produits présentant le même mécanisme d’action ou une structure chimique analogue. »
Cette rédaction satisfait l’amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Monsieur le rapporteur, dans cette rédaction, il manque le motif ! C’est pourquoi il faut la compléter en adoptant l’amendement n° 59.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. La rédaction dont M. le rapporteur vient de donner lecture vise tout motif. La commission estime qu’elle satisfait complètement l’amendement, c’est pourquoi M. le rapporteur a indiqué que celui-ci enfonçait des portes ouvertes. L’amendement nous semble superfétatoire.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Madame la présidente de la commission, j’affirme, quant à moi, que cet amendement est utile, car il apporte une précision supplémentaire : rien de plus, rien de moins. Il ne retranche rien au texte, il le complète.
La rédaction de l’article 8 issue des travaux de la commission prévoit une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques du médicament ou du produit concerné. Cela est très bien, mais l’expérience nous a appris qu’il importait d’avoir communication du motif pour lequel le médicament a été retiré du marché dans un autre État ! Si c’est pour des raisons commerciales, comme l’avait prétendu Servier à propos du retrait du Mediator en Italie et en Espagne, cela vaut la peine de le savoir !
M. le président. Je mets aux voix l'article 8, modifié.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
(Non modifié)
I. – Le troisième alinéa de l’article L. 5124-11 du même code est complété par les mots : « ou dont l’autorisation de mise sur le marché n’a pas été renouvelée pour les mêmes raisons ».
II. – À la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 5124-13 du même code, après la référence : « L. 5121-8 », est insérée la référence : « et à l’article L. 5121-9-1 ». – (Adopté.)
Article 9 bis
Après le premier alinéa de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La demande d’inscription d’un médicament sur cette liste est subordonnée à la réalisation d’essais cliniques contre comparateurs actifs, lorsqu’il en existe. »
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 33 rectifié, présenté par M. Barbier, Mme Escoffier, MM. Mézard et Collin, Mme Laborde et MM. Alfonsi, Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
contre
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
des stratégies thérapeutiques lorsqu’elles sont pratiquées depuis au moins trois ans pour la ou les mêmes pathologies.
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Il s’agit d’un amendement de bon sens ! En effet, les stratégies thérapeutiques trop récentes, qui n’ont pas fait leurs preuves dans le temps, risquent de poser problème. Il me paraît donc souhaitable de prévoir qu’elles devront avoir été pratiquées depuis au moins trois ans, afin que leur efficacité et leur innocuité puissent être établies. Les dangers de certains médicaments, tels le Distilbène ou le Mediator, qui semblaient d’abord intéressants sur le plan thérapeutique, ne sont apparus qu’au fil des années.
M. le président. L'amendement n° 44, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après le mot :
contre
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
des stratégies thérapeutiques lorsqu’elles existent, dans des conditions et des limites définies par décret en Conseil d’État
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. L’article 9 bis subordonne la demande d’inscription d’un médicament sur la liste des produits remboursables en médecine de ville à la réalisation d’études comparatives, mais uniquement avec d’autres médicaments.
Or la prise en charge thérapeutique d’une pathologie n’est pas exclusivement médicamenteuse ; elle peut reposer sur l’utilisation d’un dispositif médical, sur la réalisation d’actes paracliniques, par exemple de kinésithérapie.
Aussi est-il nécessaire de prendre en compte toutes les stratégies thérapeutiques alternatives au médicament pour mener une évaluation comparative de celui-ci. Il convient de ne pas limiter cette démarche aux seuls comparateurs actifs, lorsqu’il en existe.
Le Gouvernement a engagé des démarches, à l’échelon européen, visant à ce que des études comparatives soient exigées dès le stade de l’AMM. Dans l’attente de l’aboutissement de ces démarches, il a souhaité que ces études soient requises lors de l’admission au remboursement, cette procédure relevant des seuls États membres de l’Union européenne.
Toutefois, l’article 9 bis introduit un automatisme qui ne tient pas compte de cas, exceptionnels, dans lesquels un laboratoire ne peut légitimement pas présenter d’études comparatives.
Par exemple, quand un médicament innovant arrive sur le marché peu de temps après son comparateur, il n’est matériellement pas possible de prévoir un développement comparatif.
Afin d’éviter que cette disposition, conçue comme protectrice des patients, ne se retourne contre ces derniers, du fait de l’automaticité de sa mise en œuvre, en empêchant la prise en charge de produits indispensables, il est proposé d’en définir plus précisément les conditions d’application par décret en Conseil d’État.
M. le président. L'amendement n° 70, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
contre comparateurs actifs
insérer les mots :
présentant le meilleur niveau de service médical rendu
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 9 bis, qui résulte de l’adoption d’un amendement par l’Assemblée nationale, constitue l’une des véritables avancées de ce projet de loi.
Il est d’autant plus important que le droit communautaire nous interdit d’agir sur les conditions de délivrance des autorisations de mise sur le marché par l’Agence européenne des médicaments, alors que notre agence nationale ne délivre plus qu’une très faible partie des AMM.
Or, si nous ne pouvons agir au stade de la délivrance des AMM à l’échelon européen, il nous reste la possibilité d’intervenir au moment de la demande de remboursement par la sécurité sociale.
Pour la première fois, l’inscription d’un médicament sur la liste des médicaments remboursables par la sécurité sociale sera subordonnée à la réalisation d’essais cliniques contre comparateurs actifs.
Sur l’initiative de M. le rapporteur, la commission des affaires sociales a adopté un amendement rédactionnel visant à clarifier la procédure. Nous avons donc voté en faveur de cet article, dont le contenu est similaire à celui de l’amendement que notre collègue François Autain déposait depuis 2005 lors de l’examen de chaque projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Toutefois, nous souhaitons compléter sa rédaction actuelle, en apportant une précision qui permettra à l’autorité sanitaire de disposer d’une base légale et d’éviter que des situations floues ne donnent l’occasion aux laboratoires de contourner l’esprit de la loi.
Cette précision concerne la nature des comparateurs. Il est acquis que ceux-ci doivent être actifs, c’est-à-dire que sont exclus de fait les essais comparatifs réalisés contre des placebos, comme cela est d’ailleurs actuellement le cas. En clair, il s’agit d’éviter que les comparateurs soient des médicaments ne présentant aucun effet thérapeutique.
Les membres du groupe CRC sont convaincus qu’il faut renforcer cette logique, en prévoyant que le comparateur actif utilisé pour réaliser l’étude doit être celui qui présente le meilleur service médical rendu ou la meilleure amélioration du service médical. Les laboratoires ne doivent pas pouvoir choisir les comparateurs, car on risque alors de les voir opter systématiquement pour ceux qui présentent le service médical rendu le plus faible.
Vous l’aurez compris, par cet amendement, nous voulons garantir que, à l’avenir, seuls les médicaments représentant un progrès thérapeutique par rapport à la pharmacopée existante pourront bénéficier d’un remboursement par la sécurité sociale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau. La commission a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 33 rectifié.
Elle est également défavorable à l’amendement n° 44, car les textes imposent d’ores et déjà à la commission de la transparence de tenir compte de l’existence de thérapies non médicamenteuses.
Il s’agit d’exiger d’un médicament, chaque fois que c’est possible, qu’il soit « un petit peu mieux que rien », pour reprendre les termes de M. le ministre, et donc de ne pas s’en tenir à des essais comparatifs contre placebo.
Sur l’amendement n° 70, la commission a émis un avis défavorable, car elle craint que son adoption ne soit source de complications. En effet, qui déterminera les comparateurs présentant le meilleur niveau de service médical rendu ? Cela étant, si M. le ministre pouvait éclairer ce point, la commission pourrait envisager de revoir sa position.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 33 rectifié, trop restrictif, et favorable à l’amendement n° 44.
L’avis est défavorable sur l’amendement n° 70. En effet, son adoption poserait problème en ce qui concerne les maladies orphelines, car il n’existe pas de comparateurs pour les médicaments contre ces maladies. Par conséquent, les patients subiraient une perte de chances.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote sur l'amendement n° 70.
Mme Isabelle Pasquet. Je comprends l’argument de M. le rapporteur selon lequel il convient de ne pas compliquer l’application de la loi.
En revanche, le problème soulevé par M. le ministre à propos des maladies orphelines se pose déjà avec la rédaction actuelle du texte.
Par cet amendement, nous voulons simplement inscrire dans la loi qu’un nouveau médicament ne pourra être mis sur le marché qu’à condition d’être au moins aussi efficace que le meilleur des médicaments existants.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. L’amendement de nos collègues pourrait être accepté, à condition de ne pas supprimer les mots : « lorsqu’il en existe ».
M. le président. Madame Pasquet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par Mme Génisson ?
Mme Isabelle Pasquet. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° 70 rectifié, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
contre comparateurs actifs
insérer les mots :
présentant le meilleur niveau de service médical rendu, lorsqu'il en existe.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission demeure défavorable à cet amendement, la rédaction actuelle de l’article lui paraissant plus satisfaisante.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour explication de vote sur l'article 9 bis.
M. Ronan Kerdraon. Cet article marque un progrès évident, car il conditionne l’acceptation de la demande de remboursement du médicament par la sécurité sociale à la réalisation d’essais cliniques contre comparateurs actifs, lorsqu’il en existe.
Les exigences opposables aux demandeurs d’une AMM relèvent de la compétence communautaire, ce qui laisse à l’industriel la possibilité de se dérober à la réalisation d’essais cliniques contre comparateurs. Cependant, les autorités nationales sont seules compétentes pour définir les éléments d’information que doivent comporter les dossiers de demande de prise en charge ou de remboursement par l’assurance maladie. Or, sans remboursement par la sécurité sociale, la plupart des médicaments ne résistent pas sur le marché.
De fait, l’un des aspects les plus révoltants du drame du Mediator tenait au remboursement de ce médicament à 65 % par la sécurité sociale, jusqu’à son retrait du marché en 2009.
En raison de sa souplesse en matière d’acceptation de demandes de remboursement par la sécurité sociale de médicaments ayant fait l’objet d’essais cliniques contre placebo, le texte du Gouvernement favorisait la mise en œuvre, par certains laboratoires, d’une stratégie de contournement des médicaments génériques par le développement d’isomères –c’est-à-dire de molécules possédant la même formule brute que les produits originaux, mais dont la matrice est différente –, de nouveaux dosages ou encore de nouvelles formulations.
La comparaison contre placebo avait ainsi contribué, ces dernières années, à l’émergence du principe de « non-infériorité », la recherche du « mieux » ayant été remplacée par celle du « moyen ». Il est ainsi estimé que 37 % des médicaments mis sur le marché auraient un effet mesurable supérieur à celui d’un placebo, certes, mais égal ou inférieur à celui des traitements déjà existants, et seraient donc sans intérêt.
La comparaison contre médicaments existants est, par ailleurs, une méthode déjà utilisée dans certains cas, mais encore trop rarement : la rendre presque systématique par le biais de cet article est donc assez simple. Ainsi, entre 1999 et 2005, sur 122 médicaments contenant une nouvelle substance ayant été autorisés en Europe, 58 seulement, soit 48 % d’entre eux, ont été comparés à d’autres médicaments dans le cadre de la demande d’AMM.
Les essais contre comparateurs actifs se sont étendus, jusqu’à représenter aujourd’hui 60 % des essais, et beaucoup plus encore en cancérologie, en hématologie et en cardiologie. Il semble que l’industrie procède à des essais contre placebo principalement pour des molécules dont elle sait l’efficacité limitée.
Conditionner le remboursement des médicaments par l’assurance maladie à la réalisation d’essais cliniques contre comparateurs actifs est donc nécessaire et, finalement, relativement peu contraignant pour les industries pharmaceutiques, qui cherchaient déjà à mesurer le progrès thérapeutique apporté par leurs médicaments.
L’article 9 bis permettra donc un progrès de la sécurité sanitaire et des conditions d’évaluation de l’amélioration du service médical rendu. Il peut également contribuer à convaincre l’Union européenne de la nécessité d’imposer la réalisation d’essais comparatifs.
M. le président. Je mets aux voix l'article 9 bis, modifié.
(L'article 9 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 9 bis
M. le président. L'amendement n° 65, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’avant-dernier alinéa de l’article L. 161-37 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les commissions spécialisées mentionnées à l’article L. 161-41 précité, autres que celles créées par la Haute Autorité de santé, remettent chaque année au Parlement un rapport d’activité mentionnant notamment les modalités et principes selon lesquels elles mettent en œuvre les critères d’évaluation des produits de santé en vue de leur prise en charge par l’assurance maladie. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Préalablement à leur admission au remboursement par l’assurance maladie, les produits de santé – médicaments et dispositifs médicaux – font l’objet d’une évaluation scientifique conduite par les commissions spécialisées de la Haute Autorité de santé, notamment la commission de la transparence et la commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé.
Les critères d’évaluation sont encadrés par des textes juridiques, mais chaque commission se forge néanmoins une « doctrine » concernant l’interprétation et les modalités d’application de ces critères.
Cette doctrine est un élément essentiel de la politique de santé publique et de prise en charge par l’assurance maladie du remboursement des produits de santé. La rendre publique et l’expliciter conduira les industriels du secteur à anticiper l’évaluation de leurs produits et à se conformer, dès le développement de ceux-ci, aux exigences requises en France pour qu’ils soient pris en charge par la collectivité.
Dans un souci de transparence et de prévisibilité des principes d’évaluation pour l’ensemble des acteurs, il est proposé que l’exposé de cette doctrine soit l’une des composantes des rapports d’activité que les commissions spécialisées remettront chaque année au Parlement, comme le fait déjà le CEPS.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
Cet amendement n’est pas dépourvu d’intérêt, mais il me semble que les rapports d’activité demandés aux commissions spécialisées devraient plutôt figurer dans le rapport annuel de la Haute Autorité de santé.
Par ailleurs, les critères d’évaluation utilisés par les commissions sont définis par la loi et le règlement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 9 bis.
Chapitre II
La prescription
Article 10
(Non modifié)
L’article L. 5121-1 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au 1°, après le mot : « déterminé », sont insérés les mots : « en raison de l’absence de spécialité pharmaceutique disponible disposant d’une autorisation de mise sur le marché, de l’une des autorisations mentionnées aux articles L. 5121-9-1 et L. 5121-12, d’une autorisation d’importation parallèle ou d’une autorisation d’importation délivrée à un établissement pharmaceutique dans le cadre d’une rupture de stock d’un médicament, » ;
2° À la première phrase du 2°, après le mot : « adaptée », sont insérés les mots : « disposant d’une autorisation de mise sur le marché, de l’une des autorisations mentionnées aux articles L. 5121-9-1 et L. 5121-12, d’une autorisation d’importation parallèle ou d’une autorisation d’importation délivrée à un établissement pharmaceutique dans le cadre d’une rupture de stock d’un médicament, ». – (Adopté.)
Article 10 bis
(Non modifié)
I. – Après le mot : « exécution », la fin du second alinéa de l’article L. 5125-1-1 du code de la santé publique est ainsi rédigée : « par une officine de pharmacie des préparations autres que celles mentionnées au premier alinéa, pouvant présenter un risque pour la santé et dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, est soumise à une autorisation du directeur général de l’agence régionale de santé. »
II. – Après le même article L. 5125-1-1, il est inséré un article L. 5125-1-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5125-1-1-1. – Le directeur général de l’agence régionale de santé suspend ou interdit l’exécution des préparations, autres que celles visées à l’article L. 5125-1-1, lorsque l’officine ne respecte pas les bonnes pratiques de préparation ou réalise les préparations dans des conditions dangereuses pour la santé publique.
« Le directeur général de l’agence régionale de santé suspend ou retire l’autorisation d’exercice de l’activité de sous-traitance visée à l’article L. 5125-1 ou celle visée à l’article L. 5125-1-1 lorsque l’officine ne respecte plus les bonnes pratiques de préparation ou réalise les préparations dans des conditions dangereuses pour la santé publique.
« Sauf en cas d’urgence, le pharmacien d’officine concerné est mis à même de présenter ses observations avant l’intervention des mesures prévues au présent article. » – (Adopté.)
Article 11
I. – Après l’article L. 5121-12 du même code, il est inséré un article L. 5121-12-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5121-12-1. – I. – Une spécialité pharmaceutique peut faire l’objet d’une prescription non conforme à son autorisation de mise sur le marché en l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée disposant d’une autorisation de mise sur le marché ou d’une autorisation temporaire d’utilisation, sous réserve :
« 1° Que l’indication ou les conditions d’utilisation considérées aient fait l’objet d’une recommandation temporaire d’utilisation établie par l’Agence française de sécurité des produits de santé, cette recommandation ne pouvant excéder trois ans ;
« 2° Ou que le prescripteur juge indispensable, au regard des données acquises de la science, le recours à cette spécialité pour améliorer ou stabiliser l’état clinique du patient.
« I bis. – Les recommandations temporaires d’utilisation mentionnées au I sont mises à disposition des prescripteurs.
« I ter. – (Supprimé)
« II. – Le prescripteur initial informe le patient que la prescription de la spécialité pharmaceutique n’est pas conforme à son autorisation de mise sur le marché, de l’absence d’alternative médicamenteuse appropriée, des risques encourus et des contraintes et des bénéfices susceptibles d’être apportés par le médicament et porte sur l’ordonnance la mention : “Prescription hors autorisation de mise sur le marché”.
« Il informe le patient sur les conditions de prise en charge, par l’assurance maladie, de la spécialité pharmaceutique prescrite.
« Il motive sa prescription dans le dossier médical du patient.
« III. – Les recommandations temporaires d’utilisation mentionnées au I sont établies après information du titulaire de l’autorisation de mise sur le marché.
« Ces recommandations sont assorties d’un recueil des informations concernant l’efficacité, les effets indésirables et les conditions réelles d’utilisation de la spécialité par le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché ou l’entreprise qui l’exploite, dans des conditions précisées par une convention conclue avec l’agence. La convention peut comporter l’engagement, par le titulaire de l’autorisation, de déposer dans un délai déterminé une demande de modification de cette autorisation. »
II. – L’article L. 162-4 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les spécialités pharmaceutiques mentionnées au 1°, l’inscription de la mention : “Prescription hors autorisation de mise sur le marché” prévue à l’article L. 5121-12-1 du code de la santé publique dispense de signaler leur caractère non remboursable. »
M. le président. L'amendement n° 66 rectifié, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 10
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les recommandations temporaires d’utilisation sont élaborées dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État. Concernant les maladies rares, l’agence visée à l’article L. 5311-1 élabore les recommandations temporaires d’utilisation en s’appuyant notamment sur les travaux des professionnels de santé prenant en charge ces pathologies, et, le cas échéant, les résultats des essais thérapeutiques et les protocoles nationaux de diagnostics et de soins.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Il convient de préciser que les modalités d’établissement des recommandations temporaires d’utilisation seront fixées par décret en Conseil d’État, lequel devra prendre en considération les spécificités des maladies rares, notamment en prévoyant l’implication des centres de référence compétents.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement ayant été rectifié comme demandé par la commission, l’avis est favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 11, modifié.
(L'article 11 est adopté.)
Article 12
(Non modifié)
Après l’article L. 5121-1-1 du code de la santé publique, sont insérés des articles L. 5121-1-2 et L. 5121-1-3 ainsi rédigés :
« Art. L. 5121-1-2. – La prescription d’une spécialité pharmaceutique mentionne ses principes actifs, désignés par leur dénomination commune internationale recommandée par l’Organisation mondiale de la santé.
« Art. L. 5121-1-3. – Tout titulaire d’une autorisation de mise sur le marché d’un médicament ou tout exploitant de ce médicament est tenu, dans un délai d’une année à compter de la promulgation de la loi n° … du … relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé, de mettre à la disposition du public sur son site internet la désignation des principes actifs de ce médicament selon leur dénomination commune internationale recommandée par l’Organisation mondiale de la santé ou, à défaut, leur dénomination dans la pharmacopée européenne ou française. »
M. le président. L'amendement n° 42, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots et les phrases :
ou, à défaut, leur dénomination dans la pharmacopée européenne ou française. En l’absence de telles dénominations, elle mentionne leur dénomination commune usuelle. Elle peut également mentionner la dénomination de fantaisie de la spécialité.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement prévoit l’obligation, pour le prescripteur, de mentionner sur l’ordonnance, lorsque la spécialité ne dispose pas d’une dénomination commune internationale, la dénomination dans la pharmacopée européenne ou française ou la dénomination commune usuelle.
Il s’agit de s’assurer que les principes actifs que comporte la spécialité soient précisés sur l’ordonnance. Prévoir cette obligation s’impose du fait que toutes les spécialités pharmaceutiques ne disposent pas d’une DCI.
Cet amendement vise également à rétablir la possibilité, pour le prescripteur, de mentionner la dénomination dite « de fantaisie » de la spécialité sur l’ordonnance, ce qui peut faciliter la lecture de celle-ci par le patient.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. L’avis est défavorable.
Nous ne voulons plus que, dans les prescriptions, figure le nom commercial des médicaments, ce qui ne manquera pas d’être le cas si la possibilité en reste ouverte. Nous pensons que le principe doit être clair : la DCI suffit dans la grande majorité des cas.
Le dialogue entre le patient, son médecin et son pharmacien permettra de lever toute ambiguïté ; il sera même l’occasion d’expliquer qu’un médicament contient des substances actives et n’est pas un produit comme un autre. Une telle explication devrait d’ailleurs déjà être donnée, monsieur le ministre, à propos des génériques ; cela permettrait d’accroître leur prescription, alors que la France figure, à cet égard, parmi les derniers de la classe…
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 12.
(L'article 12 est adopté.)
Article additionnel après l’article 12
M. le président. L'amendement n° 10, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 12
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au troisième alinéa de l’article L. 5125-23 du code de la santé publique, après le mot : « prescription », sont insérés les mots : « sous forme exclusivement manuscrite ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il s’agit, avec cet amendement, de compléter le troisième alinéa de l’article L. 5125-23 du code de la santé publique en insérant les mots : « sous forme exclusivement manuscrite ».
Cet article pose le principe de l’automaticité de la prescription et de la délivrance des médicaments sous une forme générique, le pharmacien n’étant autorisé à délivrer un générique qu’à la condition que le médecin prescripteur n’en ait pas expressément exclu la possibilité.
Or, dans les faits, il est courant que les médecins portent mécaniquement sur leurs ordonnances, au moyen soit d’un tampon, soit d’un insert informatique, la mention « non substituable », empêchant ainsi le pharmacien de procéder à la délivrance d’un médicament générique.
Si nous comprenons aisément que, dans certains cas, les patients puissent être attachés à un traitement particulier, notamment parce qu’ils ont pris l’habitude d’un mode spécifique d’administration, il nous semble que la non-substitution d’un générique doit rester l’exception. Or tel ne semble pas être le cas, d’après l’enquête menée par l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine, l’USPO, auprès de 3 800 pharmaciens : 85 % d’entre eux ont déclaré que la mention « non substituable » apparaissait de plus en plus souvent sur les prescriptions.
Plus intéressante encore est la déclaration faite, lors des rencontres annuelles de l’USPO, qui se sont tenues le 5 octobre dernier, monsieur le ministre, en votre présence, par le président de cette organisation, M. Gilles Bonnefond : il a indiqué que la mise en œuvre de la convention pharmacie était ralentie « par des manœuvres industrielles, par une visite médicale agressive contre les génériques. Entre les tampons fournis et les logiciels paramétrés non substituables, certaines ordonnances deviennent des caricatures. Ce n’est pas raisonnable. »
Nous partageons ce constat et considérons qu’il est nécessaire d’élaborer des mécanismes propres à répondre à un mouvement qui semble organisé par l’industrie, dont les intérêts sont de toute évidence contraires à ceux de l’assurance maladie. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement s’éloigne un peu du texte, mais il soulève une vraie question. La commission émet donc un avis de sagesse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 12.
Article 13
Après l’article L. 162-17-4 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 162-17-4-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 162-17-4-1. – I. – Les conventions mentionnées à l’article L. 162-17-4 peuvent comporter l’engagement de l’entreprise ou du groupe d’entreprises de mettre en œuvre des moyens tendant à limiter l’usage constaté des médicaments en dehors des indications de leur autorisation de mise sur le marché lorsque cet usage ne correspond pas à des recommandations des autorités sanitaires compétentes.
« Ces moyens consistent notamment en des actions d’information spécifiques mises en œuvre par l’entreprise ou le groupe d’entreprises en direction des prescripteurs.
« II. – En cas de manquement d’une entreprise à un engagement souscrit en application du I, le Comité économique des produits de santé prononce, après que l’entreprise a été mise en mesure de présenter ses observations, une baisse de prix à l'encontre des produits de cette entreprise. Cette baisse de prix est reconductible chaque année, dans les mêmes conditions, en cas de persistance du manquement.
« Le montant de la baisse de prix est fixé en fonction de l'importance du manquement.
« Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction.
« Les règles et délais de procédure ainsi que les modes de calcul de la baisse de prix sont définis par décret en Conseil d'État. »
M. le président. L'amendement n° 49, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 7 :
Rédiger ainsi ces alinéas :
« II. – En cas de manquement d’une entreprise ou d’un groupe d’entreprises à un engagement souscrit en application du I, le Comité économique des produits de santé peut prononcer, après qu’ils ont été mis en mesure de présenter leurs observations, une pénalité financière à l’encontre de cette entreprise ou de ce groupe d’entreprises. La pénalité est reconductible chaque année, dans les mêmes conditions, en cas de persistance du manquement.
« Le montant de cette pénalité ne peut être supérieur à 10 % du chiffre d’affaires hors taxes réalisé en France par l’entreprise ou le groupe d’entreprises au titre du ou des médicaments objets de l’engagement souscrit durant les douze mois précédant la constatation du manquement. Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité du manquement.
« La pénalité est recouvrée par les organismes mentionnés à l’article L. 213-1 désignés par le directeur de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Son produit est affecté aux régimes obligatoires de base d’assurance maladie selon les modalités prévues à l’article L. 162-37. Le recours présenté contre la décision prononçant cette pénalité est un recours de pleine juridiction.
« Les règles et délais de procédure ainsi que les modes de calcul de la pénalité financière sont définis par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. L’article 13 prévoit les conditions de respect des obligations fixées dans les conventions relatives à l’usage hors autorisation d’un médicament.
Le texte de la commission prévoit que les sanctions financières prononcées par le CEPS doivent prendre la forme de baisses de prix, et non de pénalités.
L’incidence financière serait identique pour les laboratoires, mais de telles « baisses de prix-sanctions » nuiraient à la lisibilité des prix pour les patients et les prescripteurs : en effet, les prix seraient amenés à fluctuer au gré des sanctions prises par le CEPS à l’égard des laboratoires. Elles pourraient même se révéler contre-productives, en faisant apparaître les médicaments concernés comme moins coûteux pour la collectivité…
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Je ne vois pas pourquoi les malades s’inquiéteraient d’une baisse de prix… La forme de sanction que nous avons prévue aura au contraire un effet positif direct pour les patients et les prescripteurs.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, pour explication de vote.
M. Dominique Watrin. Le groupe CRC votera contre cet amendement, non seulement parce qu’il vise à supprimer une disposition introduite sur notre initiative par la commission des affaires sociales, mais aussi parce que nous sommes en désaccord sur le fond avec ses auteurs.
En effet, pour justifier le retour en arrière que constituerait la réintroduction d’une sanction par « remise », ces derniers soutiennent qu’une sanction prenant la forme d’une baisse des prix nuirait à la lisibilité de ceux-ci. Or nous n’en sommes pas convaincus. Surtout, nous sommes persuadés que cette mesure profiterait aux patients, et ce à un double titre.
En premier lieu, d’un point de vue économique, la « remise » constituant la sanction actuelle ne profite qu’à l’ACOSS, alors que la sécurité sociale n’est pas le seul acteur financier dans ce domaine, puisque les mutuelles et les patients eux-mêmes participent également au financement des médicaments : les premières en versant des remboursements complémentaires de ceux de la sécurité sociale, les seconds en assumant la part non remboursée.
Dès lors, si l’ACOSS a en quelque sorte indûment remboursé certains médicaments en raison des agissements fautifs d’un laboratoire n’ayant pas respecté ses engagements conventionnels avec le CEPS, il convient en toute logique de considérer que les autres acteurs financiers ont eux aussi exposé des dépenses indues.
C’est la raison pour laquelle nous avions proposé, en commission, de substituer aux « remises » des baisses de prix, qui profiteraient à la fois aux organismes complémentaires d’assurance maladie, à l’ACOSS et aux patients.
En second lieu, au contraire des « remises » actuelles, des sanctions sous forme de baisses de prix permettront au grand public d’être informé du non-respect, par les exploitants, de certains de leurs engagements conventionnels. Cela est d’autant plus souhaitable que ceux-ci ne sont pas sans importance : il s’agit de réduire l’usage hors autorisation du médicament, de contrôler cet usage le cas échéant et de mener des campagnes d’information tendant à limiter l’usage hors recommandation du médicament.
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Il serait vraiment aberrant que les sanctions prennent la forme de baisses de prix ! Comment le grand public fera-t-il la différence avec les baisses de prix résultant de décisions ministérielles ou motivées par des considérations économiques, par exemple ?
M. le président. Je mets aux voix l'article 13, modifié.
(L'article 13 est adopté.)
Chapitre III
La délivrance des médicaments
Article 14
Après l’article L. 5121-14-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 5121-14-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 5121-14-2. – I. – Sans préjudice des décisions de modification, de suspension ou de retrait d’autorisation de mise sur le marché, l’Agence française de sécurité des produits de santé peut, dans l’intérêt de la santé publique, interdire la prescription et la délivrance d’une spécialité pharmaceutique et la retirer du marché dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État et notamment pour l’un des motifs suivants :
« 1° La spécialité est nocive ;
« 2° Le médicament ne permet pas d’obtenir de résultats thérapeutiques ;
« 3° Le rapport entre les bénéfices et les risques n’est pas favorable ;
« 4° La spécialité n’a pas la composition qualitative et quantitative déclarée ;
« 5° Les contrôles sur la spécialité ou sur les composants et les produits intermédiaires de la fabrication n’ont pas été effectués ou une autre exigence ou obligation relative à l’octroi de l’autorisation de fabrication n’a pas été respectée.
« II. – L’agence peut limiter l’interdiction de délivrance et le retrait du marché aux seuls lots de fabrication le nécessitant.
« Pour une spécialité pharmaceutique dont la délivrance a été interdite ou qui a été retirée du marché, l’agence peut, dans des circonstances exceptionnelles et pour une période transitoire, autoriser la délivrance de la spécialité à des patients qui sont déjà traités avec elle, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
« III. – La décision prévue au I est rendue publique sans délai aux frais du titulaire de l’autorisation de mise sur le marché par tous moyens permettant une large diffusion auprès du grand public et des professionnels et établissements de santé. Le refus de prendre cette décision est également rendu public dans les mêmes conditions aux frais de l’agence. » – (Adopté.)
Article 14 bis
Pour des raisons de santé publique, le ministre chargé de la santé, l’Agence française de sécurité des produits de santé et l’Institut national de veille sanitaire peuvent accéder aux données anonymes relatives aux médicaments qui sont hébergées dans le cadre du dossier pharmaceutique mentionné à l’article L. 1111-23 du code de la santé publique.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 67, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – Après la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 1111-23 du code de la santé publique, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Dans les mêmes conditions, les pharmaciens exerçant dans une pharmacie à usage intérieur peuvent consulter et alimenter ce dossier. »
… – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente loi, les médecins peuvent, dans certains établissements de santé et dans le cadre de la prise en charge des patients, consulter avec leur autorisation leur dossier pharmaceutique.
Un décret pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et du Conseil national de l’ordre des pharmaciens fixe les conditions d’application de cette expérimentation et notamment les modalités de désignation des établissements objets de l’expérimentation.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Le partage entre pharmaciens officinaux et pharmaciens hospitaliers des informations relatives aux médicaments dispensés aux patients en ambulatoire s’avère nécessaire pour favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins, ainsi que la sécurité de la dispensation des médicaments à ces patients, conformément à la finalité du dossier pharmaceutique.
Le dossier médical personnalisé, le DMP, est l’outil privilégié de la coordination des soins. Aussi est-il déjà prévu, à l’article L. 1111-23 du code de la santé publique, que les informations figurant dans le dossier pharmaceutique alimentent le DMP.
Nous proposons d’abord de permettre aux pharmaciens exerçant dans les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé et des établissements médicosociaux de consulter et d’alimenter librement le dossier pharmaceutique des patients qui le souhaitent.
Par ailleurs, afin d’améliorer la continuité et la coordination des soins pour les patients hospitalisés, notamment en vue de diminuer le risque de iatrogénie médicamenteuse, il est proposé, à titre expérimental, de permettre aux médecins prenant en charge ces patients de consulter leur dossier pharmaceutique, avec leur consentement.
Cette expérimentation visera avant tout à évaluer, à un horizon de six mois, l’usage que feront les médecins hospitaliers, notamment les urgentistes et les anesthésistes, des données figurant dans le dossier pharmaceutique, qui ont vocation à être intégrées au DMP.
Un décret définira les modalités de l’expérimentation en réservant la faculté de consultation du dossier pharmaceutique aux médecins urgentistes, anesthésistes et gériatres. Par souci de cohérence, l’expérimentation sera prioritairement mise en place dans les régions où le DMP a déjà été institué.
M. le président. L'amendement n° 89, présenté par Mme Archimbaud, M. Kerdraon, Mmes Klès et Génisson, M. Le Menn et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 1111-23 du code de la santé publique, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« Dans les mêmes conditions, les pharmaciens exerçant dans une pharmacie à usage intérieur peuvent utiliser ce dossier. »
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. L’article 14 bis, introduit par l’Assemblée nationale, permet, sur demande expresse des autorités sanitaires et pour des raisons de santé publique, au Conseil national de l’Ordre des pharmaciens d’accéder aux données contenues dans le dossier pharmaceutique.
Il est peut-être utile de rappeler que la loi du 21 juillet 2009 a créé le dossier pharmaceutique afin de favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins, ainsi que la sécurité de la dispensation des médicaments et des produits de santé. Il est également prévu que les informations de ce dossier utiles à la coordination des soins soient reportées dans le dossier médical personnel quand ce dernier aura été créé.
Le dossier pharmaceutique est créé pour chaque bénéficiaire de l’assurance maladie, avec son consentement. Tout pharmacien d’officine, sauf opposition du patient, est tenu de l’alimenter à l’occasion de la dispensation des médicaments. Les données contenues dans ce dossier sont conservées quatre mois.
Le dossier pharmaceutique est un outil dont l’intérêt se révèle non négligeable en cas d’alerte sanitaire ou de retrait de lots de médicaments, ainsi qu’en matière de prise de connaissance des prescriptions et de lutte contre la iatrogénie. C’est pourquoi nous proposons, au travers de cet amendement, d’en étendre l’accès et l’utilisation aux pharmaciens exerçant dans les pharmacies à usage intérieur des établissements de santé.
Le partage entre pharmaciens officinaux et pharmaciens hospitaliers des informations relatives aux médicaments participe du rapprochement entre la médecine de ville et l’hôpital, et il est propre à favoriser une coordination efficace au regard de la santé publique et de la sécurité sanitaire. En outre, il est susceptible de faire gagner du temps et de permettre de sauver des vies en facilitant un accès immédiat au dossier pharmaceutique de patients arrivant aux urgences dans le coma.
M. le président. L'amendement n° 90, présenté par Mme Archimbaud, M. Kerdraon, Mmes Klès et Génisson, M. Le Menn et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente loi, les médecins peuvent dans certains établissements de santé et dans le cadre de la prise en charge des patients, consulter avec leur autorisation leur dossier pharmaceutique.
Un décret pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés et du Conseil national de l’ordre des pharmaciens fixe les conditions d’application de cette expérimentation et notamment les modalités de désignation des établissements objets de l'expérimentation.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement vise à permettre, à titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente loi, que les médecins exerçant dans certains établissements de santé puissent, dans le cadre de la prise en charge des patients, consulter le dossier pharmaceutique de ces derniers, avec leur autorisation.
Il s’agit là encore de prévoir le partage des informations relatives aux médicaments dispensés aux patients ambulatoires, tant par les pharmacies d’officine que par les établissements de santé, en vue d’améliorer la continuité et la coordination des soins donnés aux patients hospitalisés, notamment pour réduire le risque d’iatrogénie médicamenteuse.
L’expérimentation proposée visera en premier lieu à évaluer et à apprécier, à un horizon de six mois, l’usage par les médecins hospitaliers, notamment les urgentistes et les anesthésistes, des données disponibles dans le dossier pharmaceutique.
Un décret définira les modalités de l’expérimentation, en réservant la faculté de consultation du dossier pharmaceutique aux médecins urgentistes, anesthésistes et gériatres.
Par souci de convergence, l’expérimentation sera prioritairement mise en place dans les régions où a déjà été institué le dossier médical personnel.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. L’amendement n° 67 peut être considéré comme un cavalier législatif, mais son dispositif devrait permettre le développement du dossier pharmaceutique. Pour cette raison, la commission émet un avis favorable.
Quant aux amendements nos 89 et 90, ils sont presque identiques à l’amendement n° 67.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement n° 67, dont l’adoption rendra sans objet les amendements nos 89 et 90.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Nous sommes bien évidemment favorables à ces trois amendements.
Toutefois, je ne souscris pas à la proposition de M. Lorrain de mener prioritairement cette expérimentation dans les régions où le DMP a déjà été institué. Il me semble au contraire que le dossier pharmaceutique sera particulièrement utile en l’absence de DMP.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 89 et 90 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 14 bis, modifié.
(L'article 14 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 14 bis
M. le président. L'amendement n° 64, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Après l’article 14 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L. 5123-2 du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, la référence : «, L. 5121-12 » est supprimée ;
2° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les médicaments faisant l’objet des autorisations mentionnées à l’article L. 5121-12 peuvent être achetés, fournis, pris en charge et utilisés par les collectivités publiques sans figurer sur la liste mentionnée au premier alinéa. »
II. – À titre expérimental, du 1er avril 2012 jusqu’au 31 décembre 2013, un médicament qui a fait l’objet d’une autorisation temporaire d’utilisation mentionnée à l’article L. 5121-12 du code de la santé publique et bénéficie d’une autorisation de mise sur le marché peut, passée la date à laquelle l’autorisation temporaire cesse de produire ses effets ou la date à laquelle l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a cessé de délivrer lesdites autorisations, être acheté, fourni, pris en charge et utilisé par les collectivités publiques jusqu’à ce qu’une décision ait été prise, au titre de son autorisation de mise sur le marché, sur son inscription sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 5123-2 du même code ou sur la liste mentionnée aux premier ou deuxième alinéas de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale, et au plus tard sept mois après l’octroi de l’autorisation de mise sur le marché.
Les dispositions prévues au premier alinéa du présent II cessent de s’appliquer si aucune demande d’inscription sur la liste mentionnée au premier alinéa de l’article L. 5123-2 du code de la santé publique n’a été déposée, pour le médicament considéré, dans le mois suivant l’octroi de son autorisation de mise sur le marché.
Le Gouvernement présente au Parlement, dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014, un rapport dressant le bilan de l’expérimentation prévue au premier alinéa du présent II, notamment au regard de son impact sur les dépenses et du bon usage des produits concernés. Ce rapport porte sur les données relatives à la période comprise entre le 1er mars 2012 et le 1er avril 2013. Il peut proposer des évolutions législatives découlant de ce bilan, de nature à assurer le bon usage de ces médicaments et la maîtrise du coût qu’occasionne leur prise en charge par la collectivité dans cette période transitoire.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement vise à modifier la rédaction de l’article L. 5123-2 du code de la santé publique, afin de permettre l’achat, l’utilisation et la prise en charge par les collectivités publiques des médicaments faisant l’objet des autorisations temporaires d’utilisation mentionnées à l’article L. 5121-12 du même code, sans que ceux-ci figurent sur la liste des médicaments agréés à l’usage des collectivités.
Les dispositions introduites au D de l’article L. 5123-2 prévoient, à titre expérimental, la mise en œuvre, du 1er mars 2012 au 31 décembre 2013, d’un dispositif d’autorisation d’achat, d’utilisation et de prise en charge par les établissements de santé des médicaments ayant fait l’objet d’ATU qui bénéficient d’une AMM.
Cette mesure a pour objet de prévenir toute rupture de traitement et de garantir l’égalité entre patients pendant la période nécessaire à l’instruction de la demande de prise en charge par l’assurance maladie du médicament au titre de son autorisation de mise sur le marché.
Ce dispositif a déjà été mis en place, pour des raisons de santé publique, par une circulaire ministérielle du 11 avril 2007. Il convient de lui conférer une assise législative.
À compter du 1er janvier 2012, les médicaments disposant d’une ATU nominative feront l’objet d’une codification qui permettra de suivre leur consommation au sein des établissements de santé et d’apprécier l’incidence financière de celle-ci.
Ce dispositif permettra, à titre expérimental, la fourniture, l’achat, l’utilisation et la prise en charge par tout établissement de santé d’un médicament ayant fait l’objet d’une ATU, passée la date de fin de l’ATU de cohorte ou la date de fin d’octroi des ATU nominatives, jusqu’à ce qu’une décision soit prise quant à l’inscription du médicament, au titre de son AMM, sur la liste des médicaments agréés à l’usage des collectivités, sur la liste « ville » ou sur la liste ouvrant droit à une prise en charge au titre de la rétrocession, et au plus tard neuf mois après l’octroi de cette AMM. À défaut de dépôt d’une demande d’inscription du médicament sur l’une de ces listes dans le mois suivant l’octroi de l’AMM, ces dispositions cesseront de s’appliquer.
Un bilan de cette expérimentation sera présenté au Parlement dans le cadre de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Si j’ai bien compris, cet amendement vise à garantir la prise en charge des patients entre la fin de l’ATU et l’inscription du médicament sur la liste des produits de santé remboursés par l’assurance maladie, au titre de l’AMM.
Si cette mesure semble répondre à un problème réel, l’expérimentation proposée paraît assez lourde.
La commission s’en remet à la sagesse du Sénat, en attendant d’entendre l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 bis.
L'amendement n° 15 rectifié bis, présenté par Mme Debré, MM. Milon, Lorrain et Gilles, Mmes Cayeux et Bouchart, MM. Cardoux, Pinton et Laménie, Mmes Bruguière, Hummel, Jouanno, Giudicelli et Deroche, M. Fontaine, Mme Procaccia, M. Gournac, Mme Kammermann et MM. Dériot et Savary, est ainsi libellé :
Après l'article 14 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Titre II du Livre III de la Sixième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre VI : Centres médicaux et équipes de soin mobiles du service de santé des armées
« Article L. 6326-1 - Les centres médicaux du service de santé des armées et leurs équipes mobiles figurent parmi les éléments du service de santé des armées mentionnés à l’article L. 6147-9. Ces derniers peuvent, dans le cadre de leur mission prioritaire mentionnée à l'article L. 6147-7, délivrer, à titre gratuit et sous la responsabilité d'un médecin ou d'un pharmacien, les médicaments et dispositifs médicaux et, le cas échéant, les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, nécessaires à leurs soins.
« Les centres médicaux du service de santé des armées sont approvisionnés à titre gratuit par les établissements de ravitaillement sanitaire du service de santé des armées mentionnés à l'article L. 5124-8. »
« Les conditions d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Alain Milon.
M. Alain Milon. Cet amendement a pour objet de permettre aux centres médicaux du service de santé des armées et à leurs équipes mobiles de dispenser, dans des conditions bien définies, les médicaments et dispositifs médicaux, ainsi que, le cas échéant, les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro, nécessaires à leurs soins.
Le service de santé des armées a pour mission prioritaire de soutenir les forces armées, tant sur le territoire national qu’en opérations extérieures. Pour ce faire, il dispose, à côté des hôpitaux des armées, qui participent également aux missions de service public dans le domaine de la santé, de centres médicaux au sein des forces. Ces centres médicaux regroupent des médecins et des infirmiers qui réalisent le suivi médical des personnels de la défense et leur apportent des soins, tant dans les casernements qu’à l’extérieur.
Les médicaments, les dispositifs médicaux et, le cas échéant, les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro utilisés à cette occasion sont produits par la pharmacie centrale des armées ou achetés à d’autres établissements. La direction des approvisionnements en produits de santé des armées fournit les établissements de ravitaillement sanitaire du service de santé des armées, qui distribuent les médicaments, les dispositifs médicaux et, le cas échéant, les dispositifs médicaux de diagnostic in vitro aux centres médicaux. Ces produits sont ensuite stockés sous la responsabilité du médecin-chef du centre médical et délivrés à titre gratuit par les personnels du service de santé des armées, sur prescription exclusive du médecin militaire.
Un pharmacien ne peut être systématiquement présent pour procéder à la délivrance des médicaments, notamment lors de manœuvres militaires. Cet amendement vise donc à permettre au personnel des centres médicaux, dans le cadre de leur mission prioritaire mentionnée à l’article L. 6147-7 du code de la santé publique, ainsi qu’en cas d’urgence ou d’impératifs opérationnels, de délivrer ces médicaments.
En l’état actuel du droit, la délivrance de médicaments relève du monopole pharmaceutique. Toutefois, des dérogations à ce monopole sont expressément prévues dans le code de la santé publique, par exemple au profit des centres et des équipes mobiles de soins aux personnes en situation de précarité ou d’exclusion gérés par des organismes à but non lucratif, qui sont habilités à délivrer, à titre gratuit et sous la responsabilité d’un médecin ou d’un pharmacien, les médicaments nécessaires à leurs soins.
Le présent amendement tend à appliquer le même dispositif aux centres médicaux du service de santé des armées et à leurs équipes mobiles, afin qu’ils puissent dispenser les médicaments et dispositifs médicaux nécessaires à leurs soins.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat sur cet amendement, qui semble être un cavalier.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 14 bis.
Chapitre IV
L’autorisation temporaire d’utilisation
Article 15
I. – L’article L. 5121-12 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Art. L. 5121-12. – I. – Les articles L. 5121-8 et L. 5121-9-1 ne font pas obstacle à l’utilisation, à titre exceptionnel, de certains médicaments destinés à traiter des maladies graves ou rares, en l’absence de traitement approprié, lorsque la mise en œuvre du traitement ne peut pas être différée et que l’une des conditions suivantes est remplie :
« a) L’efficacité et la sécurité de ces médicaments sont fortement présumées au vu des résultats d’essais thérapeutiques auxquels il a été procédé en vue d’une demande d’autorisation de mise sur le marché qui a été déposée ou que l’entreprise intéressée s’engage à déposer dans un délai déterminé ;
« b) Ces médicaments, le cas échéant importés, sont prescrits, sous la responsabilité d’un médecin, à un patient nommément désigné et ne pouvant participer à une recherche biomédicale dès lors qu’ils sont susceptibles de présenter un bénéfice pour lui et que leur efficacité et leur sécurité sont présumées en l’état des connaissances scientifiques. Le médecin prescripteur doit justifier que le patient, son représentant légal ou la personne de confiance qu’il a désignée en application de l’article L. 1111-6 a reçu une information adaptée à sa situation sur l’absence d’alternative thérapeutique, les risques courus, les contraintes et le bénéfice susceptible d’être apporté par le médicament. La procédure suivie est inscrite dans le dossier médical.
« II. – L’utilisation des médicaments mentionnés au I est autorisée, pour une durée d’un an éventuellement renouvelable deux fois par l’Agence française de sécurité des produits de santé, à la demande du titulaire des droits d’exploitation du médicament dans le cas prévu au a du I ou à la demande du médecin prescripteur dans le cas prévu au b du même I.
« III. – Une demande au titre du b du I n’est recevable que si, pour l’indication thérapeutique sollicitée, l’une des conditions suivantes est remplie :
« 1° Le médicament a fait l’objet d’une demande au titre du a du I ;
« 2° Le médicament a fait l’objet d’une demande d’autorisation de mise sur le marché mentionnée à l’article L. 5121-8 ou d’une demande d’autorisation de mise sur le marché délivrée par l’Union européenne en application du règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments ;
« 3° Des essais cliniques sont conduits en France.
« En cas de rejet de l’une de ces demandes, l’autorisation mentionnée au b du I accordée sur son fondement est retirée pour les indications thérapeutiques sollicitées dans la demande.
« IV. – Par dérogation aux dispositions du III, une autorisation demandée au titre du b du I peut être accordée dans l’un des cas suivants :
« 1° Lorsque le pronostic vital du patient est engagé, en l’état des thérapeutiques disponibles ;
« 2° Lorsque le médicament a fait l’objet d’un arrêt de commercialisation, si l’indication thérapeutique sollicitée est différente de celle de l’autorisation du médicament ayant fait l’objet de cet arrêt et qu’il existe de fortes présomptions d’efficacité et de sécurité du médicament dans l’indication thérapeutique sollicitée ;
« 3° Si, dans l’indication thérapeutique sollicitée, le titulaire des droits d’exploitation du médicament s’est vu refuser une demande pour un médicament mentionné au a du I ou si une demande d’autorisation d’essai clinique mentionnée au III a été refusée, sous condition d’une information du patient et du praticien sur les motifs du refus de la demande et sous réserve d’un bénéfice individuel pour le patient.
« V. – Sauf si elle est accordée conformément au IV, l’autorisation est subordonnée à la conclusion, entre l’agence et le titulaire des droits d’exploitation du médicament, d’un protocole d’utilisation thérapeutique et de recueil d’informations concernant l’efficacité, les effets indésirables, les conditions réelles d’utilisation ainsi que les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament ainsi autorisé.
« Pour les médicaments autorisés au titre du même IV, les prescripteurs transmettent à l’agence, à l’expiration de l’autorisation et, le cas échéant, à l’occasion de chaque renouvellement, des données de suivi des patients traités. La nature de ces données est précisée par l’autorisation.
« Ces autorisations peuvent également être subordonnées par l’Agence française de sécurité des produits de santé à la mise en place d’un protocole d’utilisation thérapeutique et de recueil d’informations.
« VI. – L’autorisation mentionnée au I peut être suspendue ou retirée si les conditions prévues au présent article ne sont plus remplies ou pour des motifs de santé publique. »
II. – Au premier alinéa de l’article L. 1121-16-1 et au quatorzième alinéa de l’article L. 1123-14 du même code, la référence : « a » est remplacée par la référence : « a du I ».
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, sur l'article.
Mme Aline Archimbaud. L’autorisation temporaire d’utilisation permet à des patients atteints de graves affections d’avoir accès à des traitements disponibles, mais qui ne bénéficient pas encore ou plus d’une autorisation de mise sur le marché.
Nous le savons, cela a permis, et permet encore aujourd’hui, de sauver des vies. Des malades atteints du sida, de certains cancers ou de maladies rares nous ont légitimement alertés à ce sujet ces dernières semaines.
À titre d’exemple, concernant le VIH, de nombreux traitements étaient disponibles avant obtention de l’autorisation de mise sur le marché. Selon une analyse européenne dont les conclusions ont été récemment publiées dans la revue The Lancet Infectious Diseases, le dispositif des ATU a contribué, entre 2000 et 2009, à la multiplication par trois du nombre de patients porteurs du VIH dont la charge virale est devenue indétectable, et donc à la réduction de la mortalité parmi ces mêmes patients.
Mieux maîtriser les détournements possibles par les laboratoires pharmaceutiques de ce type de régime dérogatoire est bien sûr une nécessité impérieuse. Cela étant, plusieurs des amendements que nous avons déposés sur cet article tendent précisément à faire en sorte que le renforcement de la sécurité sanitaire ne se fasse en aucun cas au détriment de l’accès des malades aux soins.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Je souhaiterais expliciter la position de la commission sur la question des ATU.
Il s’agit là d’un sujet particulièrement sensible. D’un côté, nous voulons écarter toute tentative, de la part des laboratoires, d’utiliser la procédure des ATU pour contourner la procédure d’autorisation de mise sur le marché et la fixation des prix par le Comité économique des produits de santé ; de l’autre, nous souhaitons que les patients puissent accéder le plus rapidement possible aux soins les plus innovants.
Le texte de la commission distingue clairement deux situations : d’une part, les ATU de cohorte, qui constituent une première étape vers l’AMM ; d’autre part, les ATU nominatives qui feront l’objet d’une procédure dérogatoire et garantiront l’accès aux soins à des patients se trouvant dans des situations d’isolement ou particulièrement douloureuses.
Concernant les ATU nominatives dérogatoires, nous n’avons apporté aucune restriction au texte adopté par l’Assemblée nationale. Cela signifie qu’aucun patient ne sera privé de traitement.
En revanche, dans la mesure où les autres types d’ATU nominatives sont clairement considérés comme un premier pas vers l’AMM, il était nécessaire de préciser leur régime. C’est ce que nous avons fait en commission. Sans doute le texte issu des travaux de cette dernière demeure-t-il perfectible ; nous le verrons à l’occasion de l’examen des amendements.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 50, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer les mots :
pour une durée d’un an éventuellement renouvelable deux fois
par les mots :
pour une durée limitée, éventuellement renouvelable
II. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. – Une demande au titre du b du I n’est recevable que si le médicament a également fait l’objet, dans l’indication thérapeutique sollicitée, d’une demande au titre du a du même I ou s’il a fait l’objet d’une demande d’autorisation de mise sur le marché mentionnée à l’article L. 5121-8 ou d’une demande d’autorisation de mise sur le marché délivrée par l’Union européenne en application du règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments ou si le titulaire des droits d’exploitation s’engage à déposer dans un délai déterminé l’une des trois demandes précitées ou, à défaut, si des essais cliniques sont conduits en France sur le médicament dans l’indication thérapeutique sollicitée ou si une demande d’autorisation d’essai clinique a été déposée en France. »
III. – Alinéas 7 à 9 et 17
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement a pour objet de supprimer la limitation de la durée des autorisations temporaires d’utilisation à un an renouvelable deux fois.
En effet, les médicaments faisant l’objet d’ATU nominatives pouvant servir à traiter des maladies chroniques, il convient, en l’absence d’alternative thérapeutique et d’engagement du laboratoire, de prévoir la possibilité d’un renouvellement non limité des ATU. À défaut, les traitements pourraient devoir être interrompus.
En conséquence, l’amendement n° 50 tend à rétablir la possibilité, pour l’Agence française de sécurité des produits de santé, d’accorder une autorisation temporaire nominative si le laboratoire s’engage à déposer, dans un délai déterminé, une demande d’autorisation temporaire d’utilisation de cohorte ou une demande d’autorisation de mise sur le marché. Il convient en effet de ne pas interdire à des patients souffrant de maladies rares ou graves l’accès à des thérapeutiques indispensables lorsqu’il n’existe pas de traitement approprié.
Enfin, cet amendement vise à supprimer l’alinéa 17, qui prévoit la possibilité, pour l’Agence française de sécurité des produits de santé, de subordonner l’octroi d’une ATU à titre dérogatoire à la mise en place d’un protocole d’utilisation thérapeutique et d’un recueil d’informations. En effet, un suivi des patients par les prescripteurs est déjà prévu ; aucun laboratoire n’étant partie à la procédure, on peut envisager d’imposer la mise en place d’un suivi des patients traités par le titulaire des droits d’exploitation.
M. le président. L'amendement n° 79, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer les mots :
, pour l'indication thérapeutique sollicitée,
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Dans sa rédaction actuelle, l’article 15 du projet de loi prévoit que, pour qu’un médicament puisse bénéficier d'une ATU nominative protocolisée, une demande d’ATU de cohorte ou d’AMM doit auparavant avoir été déposée « pour l’indication thérapeutique sollicitée », alors que le code de la santé publique ne prévoit pour l’heure rien de tel.
Cette disposition fera peser un risque sur l’accès précoce à certains médicaments des personnes qui peuvent en avoir le plus besoin. Une telle condition soumet en effet la possibilité d’accéder aux médicaments aux plans de développement décidés par les firmes pharmaceutiques. Or, pour des considérations de marché, ces dernières peuvent avoir avantage à développer une molécule d’abord dans une certaine indication plutôt que dans une autre, ou à restreindre l’indication dont relèvera ce médicament dans la première phase de sa commercialisation.
En dépit des intentions affichées, le dispositif actuel de l’article 15 risque donc d’être préjudiciable à la santé, voire au pronostic vital, de certains patients. En somme, nous sommes ici confrontés à un choix entre des impératifs de santé publique – l’accès précoce aux médicaments pour celles et ceux qui en ont le plus besoin – et des intérêts de marché –l’indication choisie par l’industriel.
M. le président. L'amendement n° 71, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
l’indication thérapeutique sollicitée
insérer les mots :
ou pour une pathologie identique
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Les médicaments ne sont pas des produits de consommation comme les autres. C’est d'ailleurs pour cette raison qu’ils sont les seuls à être soumis à un régime d’autorisation préalable à la commercialisation.
Un exploitant souhaitant être autorisé à commercialiser un médicament peut demander soit une AMM, soit une ATU dès lors que la spécialité est destinée à traiter, à prévenir ou à diagnostiquer une maladie grave ou rare, qu’il n’existe pas de traitement approprié et que son efficacité et sa sécurité d’emploi sont présumées en l’état des connaissances scientifiques.
De tels médicaments sont donc utilisés pour traiter des pathologies très lourdes, engageant « à plus ou moins long terme », pour reprendre une formulation sans doute imparfaite, le pronostic vital du patient.
Cette situation d’urgence, combinée à une balance bénéfices-risques forcément différente de celle des autres médicaments, justifie que soient appliquées des règles dérogatoires, qui seront mieux encadrées à l’avenir, ce dont nous nous réjouissons.
Pour obtenir une ATU, l’exploitant devra remettre à l’AFSEPS un dossier dans lequel il précisera notamment l’indication thérapeutique. Or cette précision, très logique dans le cadre d’une AMM, peut ne pas être sans conséquences pour les patients soumis à un traitement par un médicament faisant l’objet d’une ATU. En effet, il pourra arriver que des malades atteints d’une autre forme de la même maladie que celle qui est visée dans l’indication thérapeutique se trouvent exclus, pour ce seul motif, du protocole de soins, et ce même si le médicament en question peut avoir des effets positifs sur leur état de santé ou leur qualité de vie.
Cette disposition concerne notamment les personnes vivant avec le VIH. Ainsi, la grande majorité des antirétroviraux sont développés pour une indication thérapeutique relative au traitement du VIH-1. Si la rédaction actuelle était maintenue, les patients atteints du VIH-2 ou du virus de l’hépatite C pourraient donc ne pas bénéficier d’un traitement pourtant efficace.
Cette situation tient pour beaucoup au fait que la recherche sur le VIH-2 est presque inexistante, parce que considérée par les laboratoires pharmaceutiques comme insuffisamment rentable. Pourtant, comme l’attestent la plupart des études scientifiques, la très grande majorité des molécules efficaces contre le VIH-1 le sont également contre le VIH-2. Il arrive même régulièrement que des médicaments ayant reçu une ATU pour une indication thérapeutique liée au VIH-1 voient celle-ci étendue au VIH-2 lors de la transformation de l’ATU en AMM.
Pour remédier à cette situation, nous proposons donc de compléter la rédaction du texte en faisant référence à la notion de pathologie identique.
M. le président. L'amendement n° 93, présenté par Mme Pasquet, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Compléter cet alinéa par les mots :
, ou l’exploitant accepte qu’après expiration du délai figurant au II, le médicament mentionné au b du I soit distribué gratuitement jusqu’au dépôt de l’une des demandes mentionnées au présent 2°
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article 15 traite d’un sujet éminemment sensible, puisqu’il s’agit de trouver un équilibre entre les mesures d’encadrement nécessaires pour les médicaments délivrés au titre d’une ATU et une souplesse suffisante pour permettre que ces médicaments restent accessibles aux malades dont l’état de santé justifie que l’on déroge aux procédures prévues dans le régime des autorisations de mise sur le marché.
La commission des affaires sociales a adopté, sur notre initiative, un amendement prévoyant que la durée des ATU de cohorte soit fixée à un an renouvelable deux fois. Ainsi, au bout de trois années, l’exploitant aura l’obligation de déposer une demande d’AMM.
Les choses sont évidement plus complexes dès lors qu’il s’agit d’ATU dites nominatives, demandées par un clinicien pour un patient donné, afin de pouvoir lui prescrire un médicament dont le développement en est encore à un stade précoce – généralement la phase II, alors que les ATU de cohorte sont, le plus souvent, délivrées au stade de la phase III, après la réalisation d’essais cliniques.
La rédaction de l’article 15 issue des travaux de la commission des affaires sociales du Sénat prévoit de conditionner l’octroi d’ATU nominatives au dépôt d’une demande d’ATU de cohorte ou d’AMM, ce qui fait craindre à certaines associations un report des traitements : les exploitants pourraient attendre que le développement des médicaments atteigne la phase III, afin de pouvoir demander concomitamment ATU de cohorte et ATU nominative.
La rédaction de l’article 15 issue des travaux de l’Assemblée nationale permettait certes la délivrance précoce des ATU nominatives, mais elle présentait l’inconvénient de laisser les laboratoires pharmaceutiques imposer leurs règles, ce qui ne nous semble pas acceptable. Notre volonté est de responsabiliser les laboratoires exploitants.
Afin d’aboutir à un équilibre, nous proposons de ne pas modifier les conditions d’octroi des ATU nominatives, mais de prévoir que la durée maximale de validité de trois ans pourra être dépassée dès lors que le laboratoire exploitant aura consenti, en amont, à la distribution gratuite des médicaments.
M. le président. L'amendement n° 92, présenté par Mme Archimbaud, M. Kerdraon, Mmes Klès et Génisson, M. Le Menn et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché, est ainsi libellé :
Après l'alinéa 9
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le titulaire des droits d’exploitation s’engage à déposer, dans un délai déterminé par l’agence, une des demandes mentionnées aux 1° et 2° ou une demande d’essais cliniques.
La parole est à M. Ronan Kerdraon.
M. Ronan Kerdraon. Les autorisations temporaires d’utilisation permettent, à titre dérogatoire, que certains produits ne disposant pas d’une AMM soient néanmoins distribués lorsqu’ils sont destinés à lutter contre des maladies graves ou rares, en l’absence de traitement approprié.
On distingue l’ATU nominative de l’ATU de cohorte. L’ATU nominative est délivrée, à la demande et sous la responsabilité du médecin prescripteur, pour un seul malade nommément désigné et ne pouvant participer à une recherche biomédicale. L’ATU de cohorte concerne quant à elle un groupe de patients, traités et surveillés selon des critères définis dans un protocole d’utilisation thérapeutique et de recueil d’informations ; elle est délivrée à la requête du titulaire des droits d’exploitation, qui s’engage à déposer une demande d’autorisation de mise sur le marché dans un délai déterminé.
On doit souligner que les ATU ont permis de faire face à des situations intolérables, où des personnes allaient mourir faute de traitement, alors que les résultats d’essais de molécules à l’étude étaient très positifs. L’introduction de ces nouveaux produits s’est traduite, en termes de santé publique, par un bénéfice évident pour les patients traités, comme le montrent les résultats d’une étude menée à l’échelle européenne. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : entre 2000 et 2009, le nombre des patients chez lesquels la charge virale est devenue indétectable a été multiplié par trois, l’incidence du sida a été divisée par quatre et la mortalité a été réduite. L’étude souligne que si ces tendances positives sont probablement liées à des améliorations de l’observance et du management des résistances, elles sont également dues à l’apparition de nouveaux produits, accessibles via le dispositif des ATU.
Aujourd’hui, les ATU continuent de répondre aux besoins des personnes vivant avec le VIH, de 5 % à 7 % d’entre elles se trouvant en situation d’impasse thérapeutique en 2007. Par ailleurs, 20 % des personnes séropositives sont co-infectées par le virus de l’hépatite C ; chez elles, le traitement de référence de l’hépatite C est moins efficace que chez les personnes mono-infectées par ce même virus. Or ces malades ne peuvent avoir accès aux essais thérapeutiques menés sur la dizaine de nouvelles molécules actuellement à l’étude, du fait de refus de l’industrie pharmaceutique.
Les ATU nominatives doivent pouvoir continuer de constituer une voie d’accès précoce à certains médicaments, c’est-à-dire dès la phase II du développement clinique ; on ne peut risquer que l’exigence du dépôt d’une demande d’ATU de cohorte ou d’AMM amène les laboratoires exploitants à attendre la phase III.
Pour éviter tout ralentissement dans l’accès à des médicaments indispensables à certains patients, nous proposons d’assouplir le dispositif adopté en commission, en prévoyant une quatrième hypothèse de recevabilité des demandes d’ATU nominative : celle où, dans un délai déterminé par l’Agence française de sécurité des produits de santé, le titulaire des droits d’exploitation s’engagera à déposer une demande d’ATU de cohorte, une demande d’AMM ou une demande d’essais cliniques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. L’amendement n° 50 tend à revenir sur le texte adopté par la commission. Or, il est légitime de limiter la durée de validité des ATU dès lors que ces dernières constituent une première étape, par définition transitoire, vers la demande d’AMM.
Concernant l’octroi des ATU nominatives, le texte adopté en commission pourrait être utilement complété par l’amendement n° 92, sans qu’il soit nécessaire de revenir à la rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale.
Enfin, s’agissant des protocoles d’utilisation thérapeutique pour les ATU nominatives soumises à la procédure dérogatoire, nous ne faisons que redonner à l’AFSSAPS un pouvoir dont elle dispose actuellement mais que lui retirait le projet de loi.
La commission émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 50.
L’adoption de l’amendement n° 79 priverait de leur portée les règles définies pour encadrer la procédure d’ATU nominative. De plus, cet amendement devrait être satisfait, dans l’esprit, par l’adoption de l’amendement n° 71.
L’avis de la commission est donc défavorable.
L’amendement n° 71 apporte un assouplissement bienvenu à la procédure d’ATU nominative, en élargissant ses règles. L’avis de la commission est favorable.
L’amendement n° 93, qui a pour objet de créer une possibilité nouvelle d’accès à l’ATU nominative, est en partie satisfait par l’amendement n° 92. Nous demandons donc son retrait. À défaut, l’avis de la commission sera défavorable.
L’amendement n° 92 tend à répondre à une inquiétude légitime des associations de patients, tout en conservant la clarté rédactionnelle du dispositif voulu par la commission. L’avis est donc favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. J’émets un avis favorable sur l’amendement n° 50, dont le dispositif permettra un encadrement suffisant des ATU, sans rendre le patient otage du système.
J’émets également un avis favorable sur l’amendement n° 79, qui me semble de nature à compléter utilement le dispositif.
En revanche, j’émets un avis défavorable sur les amendements nos 71, 93 et 92.
M. le président. Monsieur le rapporteur, n’est-il pas nécessaire de rectifier l’amendement n° 71, afin de tenir compte de l’adoption de l’amendement n° 79 ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. En effet, monsieur le président.
M. le président. Il s’agit donc de l’amendement n° 71 rectifié, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, et ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
l’indication thérapeutique sollicitée
insérer les mots :
pour une pathologie identique
Je le mets aux voix.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Madame Pasquet, l’amendement n° 93 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. Non, je le retire au profit de l’amendement n° 92, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 93 est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 92.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. L’amendement n° 80, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 1° Lorsque, en l’état des thérapeutiques disponibles, des conséquences graves à court terme pour le patient sont très fortement probables ;
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Même si la précaution doit rester la règle face aux nouveaux médicaments, le dispositif d’ATU contribue non seulement à sauver des vies, mais aussi à améliorer les conditions d’existence de nombreux malades.
Cet amendement a pour objet d’ouvrir le champ de cette dérogation, afin qu’elle puisse permettre de couvrir les besoins actuels et réels des malades, sans limiter l’accès aux médicaments innovants : en effet, à trop vouloir sécuriser celui-ci, nous risquerions de voir augmenter la morbidité et la mortalité.
Nous soutenons donc le maintien d’un dispositif d’ATU nominatives « non protocolisées » qui soit marqué par la souplesse. L’accès à ce dispositif ne doit pas être restreint, compte tenu des besoins impérieux des malades en termes de qualité de vie et des risques de séquelles irréversibles ou de dégradation grave de leur état de santé, risques qu’eux-mêmes et leur médecin sont seuls en mesure d’évaluer.
Il faut continuer de laisser aux médecins et à l’AFSSAPS, devenue l’AFSEPS, le soin d’apprécier, dans un dialogue contradictoire, la balance bénéfices-risques, en fonction de la situation individuelle du patient, des risques d’évolution de sa maladie et de ses souhaits.
La rédaction actuelle du projet de loi, qui réserve les autorisations d’utilisation temporaires aux seuls cas où « le pronostic vital du patient est engagé », nous paraît trop restrictive. C’est pourquoi nous proposons de modifier la rédaction de l’alinéa 12 de l’article 15, afin que les ATU soient accordées « lorsque, en l’état des thérapeutiques disponibles, des conséquences graves à court terme pour le patient sont très fortement probables ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 81, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Le titulaire de l’autorisation adresse systématiquement à l’agence, après l’octroi de cette autorisation, toute information concernant notamment l’efficacité, les effets indésirables, les conditions réelles d’utilisation ainsi que les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament ainsi autorisé. Il établit, selon une périodicité fixée par l’agence, un rapport d’analyse des données ainsi recueillies qu’il transmet à cette dernière.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Nous revenons à la question du recueil des informations relatives à l’utilisation des médicaments délivrés dans le cadre des ATU.
L’amendement n° 81 tend à permettre une meilleure connaissance des médicaments dont l’utilisation est autorisée par le biais du dispositif des ATU.
À cette fin, nous réintroduisons les dispositions prévues par le texte initial du projet de loi, tel qu’il avait été présenté au Conseil d’État. Ce texte prévoyait que, dans le cadre des ATU, « toute information concernant l’efficacité, les effets indésirables et les conditions réelles d’utilisation ainsi que les caractéristiques de la population bénéficiant du médicament autorisé est adressée à l’agence. Un rapport d’analyse des données recueillies est également transmis à l’agence, selon une périodicité fixée par cette dernière. »
Nous souhaitons ainsi que la loi prévoie de nouveau un système plus poussé de recueil d’informations.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 82, présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux et MM. Dantec, Gattolin, Labbé et Placé, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Ce recueil d’informations concerne notamment les personnes appartenant à des populations non ou insuffisamment représentées, au regard des populations amenées à faire usage de ces médicaments, au sein des essais thérapeutiques auxquels il a été procédé en vue d’une demande d’autorisation de mise sur le marché.
La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Cet amendement tend à promouvoir la prise en compte de la diversité des populations dans le recueil des informations, comme le recommande l’Organisation mondiale de la santé, par exemple, dans un document intitulé Perspectives politiques de l’OMS sur les médicaments.
Comment peut-on prétendre réformer la pharmacovigilance, sans s’assurer préalablement qu’une plus grande attention est accordée à toutes les populations, notamment celles qui sont négligées par la recherche clinique ?
En effet, les femmes, les enfants, les personnes âgées ou les personnes présentant plusieurs pathologies sont sous-représentées dans les essais cliniques. Or les exemples d’effets indésirables spécifiques à l’utilisation de médicaments par les femmes enceintes ne manquent malheureusement pas ; il suffit de rappeler les précédents du Distilbène ou de la Thalidomide.
Une fois le médicament autorisé, les populations méprisées par la recherche clinique vont découvrir à leur détriment les effets spécifiques des traitements, qui auraient pu être anticipés si elles avaient été davantage prises en compte lors des essais. De nombreuses minorités sont ainsi concernées.
Prendre conscience du fait que tous les futurs usagers des médicaments ne sont pas des hommes hétérosexuels âgés de 30 à 60 ans est primordial. Il nous semble donc indispensable que la loi contraigne les laboratoires à diversifier les populations incluses dans les essais.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 72, présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
III. – À titre expérimental jusqu’au 1er janvier 2014, l’article L. 5211-3 du code de la santé publique ne fait pas obstacle à l’utilisation, à titre exceptionnel, de certains dispositifs médicaux destinés à être utilisés pour traiter des maladies graves ou rares, notamment dans le cas visé au I du présent article.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Les dispositifs médicaux, contrairement aux médicaments, ne sont pas soumis à un régime d’autorisation préalable ; ils relèvent, en vertu de l’article L. 5211-3 du code de la santé publique, d’un régime de certification. En fonction des cas, la certification incombe aux fabricants eux-mêmes ou est confiée par l’AFSSAPS à des organismes désignés à cet effet.
Lors des travaux de la commission des affaires sociales, plusieurs de nos collègues sont intervenus pour souligner les risques qui pesaient sur ces dispositifs médicaux, notamment du fait de l’absence de contrôle a priori. Nous sommes convaincus que la marque « CE » ne suffit plus aujourd’hui et qu’il serait temps d’instaurer, pour les dispositifs médicaux, des mécanismes de certification similaires à ceux qui valent pour les médicaments, afin d’éviter, à l’avenir, que ces dispositifs ne soient à l’origine de nouveaux scandales sanitaires. Je pense notamment ici aux amalgames dentaires, ou encore aux prothèses mammaires, dont la qualité et la sécurité peuvent parfois laisser à désirer.
Je regrette d’ailleurs que le Gouvernement n’ait pas saisi l’occasion offerte par la discussion de ce projet de loi – nous ne le pouvons pas, pour notre part, en raison de l’application de l’article 40 de la Constitution – pour faire en sorte que les dispositifs médicaux soient, à l’avenir, soumis à AMM. En effet, comme le souligne le professeur Jean-Michel Dubernard, président de la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé, à l’heure actuelle, « ce marquage ne suffit pas ; c’est le même marquage que pour les jouets que vous allez acheter pour les enfants ».
Pour autant, bien qu’exigeant un renforcement du contrôle des dispositifs médicaux, nous considérons que, dans certains cas, l’urgence de la situation impose que les patients puissent disposer le plus rapidement possible de ceux-ci, sans attendre, le cas échéant, que le dispositif ait reçu tous les agréments prévus.
Nous avons été sensibilisés à cette question par les associations de personnes infectées par le VIH. Celles-ci nous ont décrit des situations ubuesques, où des médicaments bénéficiaient d’une ATU – de cohorte ou nominative – sans être pour autant utilisables, faute de dispositif médical approprié, la certification de ce dernier étant toujours en attente. Dans le cas précis qu’elles ont évoqué, il s’agissait d’un dispositif d’administration pour un traitement antirétroviral faisant l’objet d’une ATU. Tant le médicament que le dispositif avaient fait la preuve de leur efficacité dans d’autres pays ; il avait également été démontré, si l’on transpose aux dispositifs médicaux la démarche applicable aux médicaments, que la balance bénéfices-risques était positive. S’il avait existé une possibilité de déroger à l’article L. 5211-3 du code de la santé publique, le dispositif médical concerné aurait pu être utilisé en France, ce qui aurait permis d’améliorer considérablement la qualité de vie des malades.
Nous mesurons la portée de cet amendement. Étant donné les craintes qu’il peut susciter, je souhaite préciser, au nom du groupe CRC, qu’il ne vise que les dispositifs médicaux nécessaires à la délivrance de traitements ayant eux-mêmes bénéficié d’une ATU. Il ne s’agit pas d’instaurer un régime dérogatoire applicable à tous les dispositifs médicaux. Je rappelle notre position à ce sujet : ceux-ci devraient faire l’objet d’un encadrement plus strict de la part des agences sanitaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement fait référence aux certificats que doivent recevoir les dispositifs médicaux au moment de leur commercialisation.
Prévoir, fût-ce à titre expérimental et dans des circonstances particulières, que des dispositifs médicaux non certifiés puissent être utilisés me paraît dangereux. C’est pourquoi je demande aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Pasquet, l’amendement n° 72 est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. Non, je le retire, monsieur le président. Cela étant, je tenais à interpeller le Gouvernement sur cette question complexe, car certains malades peuvent actuellement se trouver empêchés de bénéficier de traitements antirétroviraux innovants.
M. le président. L’amendement n° 72 est retiré.
Je mets aux voix l’article 15, modifié.
(L’article 15 est adopté.)
Chapitre V
La prise en charge hors autorisation de mise sur le marché
Article 16
Le premier alinéa de l’article L. 162-17-2-1 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° La première phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées :
« Lorsqu’il n’existe pas d’alternative appropriée, toute spécialité pharmaceutique faisant l’objet d’une recommandation temporaire d’utilisation prévue à l’article L. 5121-12-1 du code de la santé publique, tout produit ou toute prestation prescrit en dehors du périmètre des biens et services remboursables pour le traitement d’une affection de longue durée remplissant les conditions prévues aux 3° ou 4° de l’article L. 322-3 du présent code ou d’une maladie rare telle que définie par le règlement (CE) n° 141/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 1999, concernant les médicaments orphelins peut faire l’objet, à titre dérogatoire et pour une durée limitée, d’une prise en charge ou d’un remboursement. La spécialité, le produit ou la prestation doit figurer dans un avis ou une recommandation relatifs à une catégorie de malades formulés par la Haute Autorité de santé, après consultation de l’Agence française de sécurité des produits de santé pour les produits mentionnés à l’article L. 5311-1 du code de la santé publique, à l’exception des spécialités pharmaceutiques faisant déjà l’objet, dans l’indication thérapeutique concernée, d’une recommandation temporaire d’utilisation prévue à l’article L. 5121-12-1 du même code. » ;
2° Au début de la troisième phrase, les mots : « L’arrêté » sont remplacés par les mots : « En accord, le cas échéant, avec la recommandation temporaire d’utilisation mentionnée ci-dessus et la convention afférente conclue entre l’entreprise et l’Agence française de sécurité des produits de santé, l’arrêté ». – (Adopté.)
Chapitre VI
La pharmacovigilance
Article 17
I. – Après le chapitre Ier du titre II du livre Ier de la cinquième partie du code de la santé publique, il est inséré un chapitre Ier bis ainsi rédigé :
« CHAPITRE IER BIS
« Pharmacovigilance
« Art. L. 5121-22. – La pharmacovigilance a pour objet la surveillance, l’évaluation, la prévention et la gestion du risque d’effet indésirable résultant de l’utilisation des médicaments et produits mentionnés à l’article L. 5121-1.
« Art. L. 5121-23. – L’Agence française de sécurité des produits de santé assure la mise en œuvre du système de pharmacovigilance pour procéder à l’évaluation scientifique de toutes les informations, pour examiner les options permettant de prévenir les risques ou les réduire et, au besoin, pour prendre des mesures appropriées. Elle définit les orientations de la pharmacovigilance, anime et coordonne les actions des différents intervenants, veille au respect des procédures de surveillance et participe aux activités de l’Union européenne dans ce domaine.
« Art. L. 5121-24. – Toute entreprise ou organisme exploitant un médicament ou un produit mentionnés à l’article L. 5121-1 est tenu de respecter les obligations qui lui incombent en matière de pharmacovigilance et en particulier de mettre en œuvre un système de pharmacovigilance ainsi que d’enregistrer, de déclarer et de suivre tout effet indésirable suspecté d’être dû à un médicament ou produit mentionnés au même article L. 5121-1 dont il a connaissance et de mettre en place des études post-autorisation mentionnées à l’article L. 5121-8-1 dans les délais impartis.
« Art. L. 5121-25. – Les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens déclarent tout effet indésirable suspecté d’être dû à un médicament ou produit mentionné à l’article L. 5121-1 dont ils ont connaissance.
« Les autres professionnels de santé, les patients et les associations agréées de patients peuvent signaler tout effet indésirable suspecté d’être dû à un médicament ou produit mentionné au même article L. 5121-1 dont ils ont connaissance.
« Art. L. 5121-26. – Les règles applicables à la pharmacovigilance exercée sur les médicaments et sur les produits mentionnés à l’article L. 5121-1 sont déterminées par décret en Conseil d’État, notamment ses modalités d’organisation ainsi que les procédures de détection, de recueil et d’analyse des signalements et les procédures de suivi et de retour de l’information vers les personnes mentionnées à l’article L. 5121-25.
« Art. L. 5121-27 . – (Supprimé)
II. – Le 13° de l’article L. 5121-20 du même code est abrogé.
III. – L’article L. 5421-6-1 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 5421-6-1. – Est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait pour toute personne exploitant un médicament ou produit mentionnés à l’article L. 5121-1 ou pour tout titulaire de l’autorisation prévue à l’article L. 4211-6 de méconnaître les obligations de signalement d’un effet indésirable grave suspecté d’être dû à ce médicament ou produit dont il a eu connaissance. »
M. le président. L’amendement n° 34 rectifié, présenté par M. Barbier, Mme Escoffier et MM. Collin, Alfonsi, Plancade et Tropeano, est ainsi libellé :
Alinéas 7 et 8
Compléter ces alinéas par les mots :
et qui n’est pas signalé dans le résumé des caractéristiques du médicament ou du produit
La parole est à M. Gilbert Barbier.
M. Gilbert Barbier. Cet amendement tend à préciser, dans la rédaction du nouvel article L. 5121-25 du code de la santé publique, que les effets indésirables à déclarer par les médecins, les chirurgiens-dentistes, les sages-femmes, les pharmaciens et les autres professionnels de santé sont uniquement ceux qui ne sont pas déjà signalés dans le résumé des caractéristiques du médicament ou du produit.
Il s’agit donc d’un amendement de précision, ayant pour objet d’éviter la déclaration systématique d’effets indésirables classiques et bien identifiés.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La survenue d’effets indésirables doit être signalée dans tous les cas, afin que la fréquence et l’intensité de ceux-ci puissent être établies.
La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 60, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
Alinéa 9
remplacer le mot :
signalements
par le mot :
signaux
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Le terme « signalement » renvoie aux notifications d’effets indésirables.
Le terme « signal », quant à lui, vise le dépassement d'un seuil fixé, devant appeler l'attention au cours d'une surveillance. En pratique, on parlera de signal quand la valeur d'un paramètre – nombre de cas, taux d’incidence, etc. – s'écarte de ce qui était attendu ou admis.
Or ce sont non pas les notifications d’effets indésirables qu’il convient d’analyser, mais plutôt les effets indésirables eux-mêmes. Par conséquent, le terme « signalements » n’est pas adapté et devrait être remplacé par celui de « signaux ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Nous entrons dans des considérations d’ordre sémantique…
Le terme « signalements », si ma mémoire est bonne, figurait dans la rédaction initiale du projet de loi. Nous l’avons repris, mais la commission n’est pas opposée à son remplacement par le terme « signaux ».
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Bien évidemment, on a besoin de signalements, mais l’analyse porte sur des signaux. (Sourires.)
Le Gouvernement émet un avis favorable. Je ne sais pas si le signal que j’adresse est clair…
M. Jean Desessard. Il est lumineux !
M. Xavier Bertrand, ministre. Si ce n’est pas le cas, je ferai l’objet d’un signalement ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Quant à moi, les propos que vient de tenir M. le ministre me semblent obscurs… Je souligne une nouvelle fois que c’est le mot « signalements » qui était employé dans la rédaction initiale du projet de loi.
M. le président. Je mets aux voix l'article 17, modifié.
(L'article 17 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 17
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 83 rectifié bis est déposé par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux, MM. Dantec, Gattolin, Labbé, Placé et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché.
Tous deux tendent à insérer après l’article 17 un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article 1386-12 du code civil, les mots : « ou par les produits issus de celui-ci » sont remplacés par les mots : «, les produits issus de celui-ci ou par tout médicament à usage humain tel que mentionné à l’article L. 5121-1 du code de la santé publique ».
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour défendre l’amendement n° 12.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement vise à rétablir le principe de responsabilité sans faute pour risque de développement des fabricants de médicaments.
À l’occasion de la transposition par la France de la directive 85/374/CEE relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, le gouvernement de l’époque avait décidé de transposer en droit interne une disposition de cette directive dont la transposition était optionnelle, c’est-à-dire laissée à la libre appréciation des gouvernements.
C’est ainsi qu’a été transposée en droit français l’exonération de responsabilité sans faute pour risque de développement. D’autres pays membres de l’Union européenne n’ont pas fait ce choix. Cette clause d’exonération est spécifique à la responsabilité des producteurs du fait des produits défectueux. Si l’exploitant démontre qu’il était, compte tenu des données acquises de la science, dans l’impossibilité de déceler le défaut du médicament, ou même ses effets néfastes, aucune responsabilité ne peut lui être imputée. La victime aura beau établir l’existence d’un dommage, ainsi que celle d’un lien de causalité entre ce dommage et le médicament, l’exploitant ne verra jamais sa responsabilité engagée. La victime ne sera donc pas indemnisée.
Très logiquement, les exploitants s’abritent derrière cette disposition et font la démonstration que le risque ayant causé un dommage pour un consommateur n’était pas connu au moment du lancement du produit, dont la nocivité n’a été révélée que du « fait du développement ultérieur des connaissances scientifiques et techniques ».
Pourtant, la France n’était pas obligée de transposer cette partie de la directive. Ce qui a été fait peut être défait, car les conséquences de cette transposition sont importantes pour les victimes, particulièrement quand les dommages sont survenus entre 1998 et 2001.
En effet, l’arrêt rendu en 2007 par la Cour de cassation et mentionné dans l’objet de notre amendement précise qu’un laboratoire ne peut faire valoir le risque de développement qu’à compter de 1998, année où la France a ratifié la directive.
Or l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, l’ONIAM, ne peut intervenir dans le processus d’indemnisation que pour les préjudices survenus à partir de 2001. Il résulte de cette situation que les victimes des années 1998 à 2001 sont contraintes, pour obtenir réparation, de faire la démonstration que le fabricant a commis une faute qu’il ne pouvait ignorer, que l’exploitant a sciemment commercialisé un médicament dont il savait déjà qu’il était nocif.
Cette condition étant quasiment impossible à remplir, nous proposons au Sénat d’adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour défendre l’amendement n° 83 rectifié bis.
Mme Patricia Schillinger. Comme le soulignait l’Organisation mondiale de la santé dans son document Perspectives politiques de l’OMS sur les médicaments, publié en octobre 2004, « l’expérience a montré que de nombreux effets indésirables ainsi que des problèmes d’interaction (par exemple avec des aliments ou d’autres médicaments) ou des facteurs de risques n’apparaissent qu’au cours des années qui suivent la mise sur le marché d’un médicament ».
Contrairement aux produits de grande consommation classiques, le médicament est toujours un produit à risque et la détection de ce dernier est partie intégrante du processus d’industrialisation : la couverture du risque doit donc être prise en charge par l’industriel à tous les stades de détection.
Par cet amendement, nous souhaitons donc rétablir la responsabilité sans faute pour risque de développement des fabricants de médicaments.
Nous estimons en effet que les essais cliniques ne permettent pas d’évaluer a priori de manière exhaustive les risques graves, tels que les effets secondaires ou certaines interactions avec d’autres traitements ou certains modes de vie.
Dès lors, la sécurité des « primo-consommateurs » ne peut être totalement garantie. Le risque qu’ils encourent doit donc être considéré et assuré par les industriels du médicament, au même titre que ceux pris par les participants aux essais cliniques.
L’exemple de la Thalidomide est révélateur à cet égard et vous convaincra, je l’espère, de la nécessité d’adopter cet amendement.
Apparu en 1957, ce médicament était largement prescrit en tant que remède prétendument inoffensif contre les nausées et vomissements matinaux incoercibles de la grossesse. Son utilisation pendant la grossesse devait cependant rapidement être associée à une anomalie congénitale entraînant de graves malformations des enfants à la naissance. Il fut retiré du marché mondial dès 1961.
D’autres scandales, comme ceux du Distilbène et du Mediator, ne peuvent que nous inciter à renforcer la responsabilité du fabricant et/ou du distributeur-importateur du médicament et à redonner aux « primo-consommateurs » d’un médicament récemment mis sur le marché les mêmes droits, en termes d’indemnisation, que les participants aux essais cliniques qui ont précédé cette mise sur le marché.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. La commission est favorable à ces deux amendements identiques.
Je rappelle à cet instant que, en 1998, lors de la discussion de la loi de transposition de la directive relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, la commission des lois du Sénat s’était déclarée défavorable à l’exonération de responsabilité pour risque de développement. Elle avait d’ailleurs expressément proposé d’exclure de son champ les producteurs de produits de santé.
Vous me direz peut-être, monsieur le ministre, que l’adoption de ces amendements poserait problème au regard du droit communautaire, même si, à l’origine, la transposition en droit interne de la clause d’exonération pour risque de développement était optionnelle.
Je note cependant que le gouvernement de l’époque n’avait rien objecté de tel à la commission des lois du Sénat. Il avait même adopté la même position qu’elle.
En tout cas, ces amendements vont dans la bonne direction et leur adoption pourrait provoquer une réflexion utile à l’échelon communautaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Vous appelez à l’engagement d’une réflexion, monsieur le rapporteur, mais c’est avant de renoncer à notre théorie de la responsabilité, fondée sur la faute, qu’il faut bien réfléchir ! Pour ma part, je ne considère pas comme un modèle le système américain, fondé sur le risque. Il faudrait m’expliquer quels seraient les avantages d’un tel changement pour les patients et pour notre système de santé !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos12 et 83 rectifié bis.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 17.
La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. On demande souvent au Gouvernement de présenter des études d’impact ; j’aimerais obtenir communication de celle qui a conduit à une telle décision. (Marques d’approbation sur les travées de l’UMP.) Cela étant, je respecte bien entendu le vote du Sénat…
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 13 rectifié est présenté par Mmes Pasquet, Cohen et David, MM. Watrin, Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 84 rectifié est présenté par Mme Archimbaud, M. Desessard, Mmes Blandin, Aïchi, Benbassa et Bouchoux, MM. Dantec, Gattolin, Labbé, Placé et les membres du groupe Socialiste, Apparentés et groupe Europe Écologie Les Verts rattaché.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. - Après l'article 17
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 5121-21 du code de la santé publique, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. ... – I. – Est considérée comme la manifestation probable d’un effet indésirable accepté d’un médicament ou produit de santé à usage humain tel que défini à l’article L. 5121-1 :
« 1° Toute affection similaire à la description donnée ou connue d’un effet indésirable d’un médicament mentionné dans la notice du médicament au moment de la survenue de l’affection ou ultérieurement et survenant dans la période de latence admise suivant la prise de ce médicament ;
« 2° Toute affection figurant sur une liste définie par décret en Conseil d’État.
« II. – Tout doute sur l’implication d’un produit de santé dans l’affection considérée doit bénéficier à la victime.
« III. – La liste définie par décret en Conseil d’État précise tous les éléments de nature à établir le dommage et l’implication d’un médicament dans la survenue de ce dernier. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre VI bis
Réparation des accidents médicamenteux
La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour présenter l'amendement n° 13 rectifié.
Mme Isabelle Pasquet. La théorie de la responsabilité civile repose sur un triptyque juridique composé d’un fait générateur – l’action d’une personne ou d’une chose, comme c’est le cas ici –, de l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité entre celui-là et celle-ci.
En somme, pour pouvoir espérer bénéficier d’une indemnisation à la suite d’un préjudice du fait d’un médicament, la victime doit apporter la preuve que la dégradation de son état de santé est la conséquence du traitement qu’elle a suivi.
Cette démonstration est d’autant plus complexe à faire que deux éléments entrent en jeu. Tout d’abord, c’est à la victime d’apporter la preuve de l’existence d’un lien de causalité. Mais surtout, il ne peut s’agir d’un lien de causalité général, se fondant notamment sur la doctrine scientifique ou sur l’existence de cas similaires avérés : il faut impérativement que ce lien de causalité soit prouvé à titre individuel.
Or cela est extrêmement difficile, dans la mesure où ce que les victimes peuvent le plus aisément prouver, c’est l’existence d’un dommage similaire à d’autres personnes se trouvant dans des situations identiques, c’est-à-dire présentant la même pathologie et ayant suivi le même traitement.
Apporter la preuve, déconnectée des recherches scientifiques et des autres cas existants, qu’un médicament a provoqué sur soi des effets néfastes demeure, dans les faits, très compliqué.
Tout cela restreint considérablement le droit à l’indemnisation des victimes, ce qui n’est pas acceptable eu égard à l’importance des dépenses que leur situation médicale peut entraîner.
Aussi, afin de permettre une juste indemnisation, c’est-à-dire la réparation du dommage et la compensation des dépenses qui y sont liées, apparaît-il nécessaire d’aménager la charge de la preuve, en mettant en œuvre la théorie dite du « faisceau d’indices », en vertu de laquelle la victime a non plus à démontrer le lien de causalité, mais l’existence de différents éléments concordants ayant vraisemblablement conduit à la réalisation du dommage.
S’agissant du Mediator, cela reviendrait à considérer que, pour pouvoir être indemnisée, la victime devra prouver qu’elle a été traitée par ce médicament durant une certaine période, que, comme de nombreuses autres personnes dans le même cas, elle a développé des valvulopathies et que, en outre, de telles situations étaient déjà connues des agences sanitaires. Si le présent amendement était adopté, pourrait être intégré au faisceau d’indices le rapport de l’AFSSAPS indiquant que, sur les « 303 000 patients [suivis] (73 % de femmes, âge moyen : 53 ans), 597 patients ont été hospitalisés pour valvulopathie, 50 % ont eu une chirurgie valvulaire et 64 sont décédés, dont 33 après chirurgie. Et l’analyse de la cause la plus probable de décès met en évidence 46 décès imputables à une valvulopathie. »
Il ne s’agit là que d’un exemple, les victimes du Mediator bénéficiant d’un régime particulier d’indemnisation, mais il illustre parfaitement ce que l’on entend par faisceau d’indices.
De la même manière, nous considérons que la notice du médicament, qui fait état d’effets indésirables pouvant être graves et correspondre à ceux dont est victime le patient, doit également être considérée comme établissant un commencement de lien de causalité.
M. le président. La parole est à M. Ronan Kerdraon, pour présenter l'amendement n° 84 rectifié.
M. Ronan Kerdraon. Le doute doit bénéficier au patient, comme l’a indiqué M. le ministre au cours de la discussion générale : nous avons été très sensibles au signal qu’il nous a ainsi adressé !
Cet amendement tend à inscrire ce principe dans le projet de loi, s’agissant de l’établissement d’un lien de causalité entre la prise d’un médicament et un effet indésirable. En effet, l’existence de ce lien de causalité est si complexe à démontrer pour un cas individuel qu’il est souvent difficile, pour les victimes, d’aboutir dans leur démarche.
Or il serait insupportable que se reproduise l’affaire du Distilbène, par exemple, dont les victimes ont dû mener un combat judiciaire de vingt années…
En effet, alors que ce médicament avait été contre-indiqué en 1977, et même dès 1971 aux États-Unis, pour les femmes enceintes, que les premières plaintes ont été déposées en 1991, il aura fallu attendre 2002 pour que la responsabilité du laboratoire dans le développement des cancers des plaignantes soit reconnue. D’appels en nouveaux procès, ce n’est qu’en 2011 que la cour d’appel de Versailles a reconnu le lien entre la prise de Distilbène et l’apparition de handicaps à la troisième génération ! Plus aucune victime ne doit avoir à subir un tel parcours du combattant !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Ces amendements identiques tendent, comme les deux précédents, à revenir sur les conséquences défavorables, pour les victimes d’accidents médicamenteux, de la transposition en droit français de la directive relative à la responsabilité du fait des produits défectueux. Celle-ci impose aux victimes d’un accident médicamenteux de prouver l’existence d’un lien de causalité entre la prise du médicament et le dommage subi. Paradoxalement, il était plus facile d’obtenir une indemnisation avant la transposition de la directive !
Les amendements visent à alléger la charge de la preuve lorsque la victime souffre d’une affection similaire à un effet indésirable connu, d’une infection répertoriée comme fréquemment liée à un médicament.
La commission a émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 13 rectifié et 84 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.
Chapitre VII
Information et publicité sur le médicament à usage humain
Article 18
I. – Le second alinéa de l’article L. 5122-2 du code de la santé publique est complété par les mots : « ainsi que les stratégies thérapeutiques recommandées par la Haute Autorité de santé ».
II. – L’article L. 5122-3 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La publicité pour un médicament est interdite lorsque ce médicament fait l’objet d’une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques à la suite d’un signalement de pharmacovigilance. Les professionnels de santé sont informés par l’exploitant du médicament de la réévaluation conduite dans le cadre du présent alinéa. »
III. – Au premier alinéa de l’article L. 5122-5 du même code, après la référence : « L. 5122-8 », est insérée la référence : «, L. 5122-9 » et la référence : « aux articles L. 5122-9 et » est remplacée par les mots : « à l’article ».
IV. – Les troisième à avant-dernier alinéas de l’article L. 5122-6 du même code sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au premier alinéa, les campagnes publicitaires pour les médicaments mentionnés à l’article L. 5121-2 peuvent s’adresser au public. »
V. – L’article L. 5122-9 du même code est ainsi rédigé :
« Art. L. 5122-9. – La publicité pour un médicament auprès des membres des professions de santé habilités à prescrire ou à dispenser des médicaments ou à les utiliser dans l’exercice de leur art est soumise à une autorisation préalable de l’Agence française de sécurité des produits de santé dénommée “visa de publicité”.
« Ce visa est délivré pour une durée qui ne peut excéder la durée de l’autorisation de mise sur le marché pour les médicaments soumis à cette autorisation.
« En cas de méconnaissance des articles L. 5122-2 ou L. 5122-3, le visa peut être suspendu en cas d’urgence ou retiré par décision motivée de l’agence.
« Toute publicité auprès des professionnels de santé pour des vaccins est assortie, de façon clairement identifiée et sans renvoi, des recommandations in extenso de l’avis du Haut Conseil de la santé publique. »
VI. – Après le même article L. 5122-9, il est inséré un article L. 5122-9-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 5122-9-1. – Les demandes de visa prévues à l’article L. 5122-9 sont effectuées selon un calendrier et durant une période déterminés par décision du directeur général de l’Agence française de sécurité des produits de santé.»
VII. – Le 5° de l’article L. 5122-16, l’article L. 5422-3 et l’article L. 5422-4 du même code sont abrogés.
VIII. – L’article L. 5422-6 du même code est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après le mot : « public », sont ajoutés les mots : « ou des professionnels de santé » ;
2° Au 2°, la référence : « à l’article L. 5122-8 » est remplacée par les références : « aux articles L. 5122-8 et L. 5122-9 ».
IX. – Le 3° de l’article L. 5422-11 du même code est ainsi rédigé :
« 3° Qui n’a pas fait l’objet du visa de publicité prévu à l’article L. 5122-9 ou qui est effectuée malgré la décision de suspension ou de retrait de celui-ci prise en application du même article. »
X. – Après le d de l’article L. 613-5 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un d bis ainsi rédigé :
« d bis) Aux actes nécessaires à l’obtention du visa de publicité mentionné à l’article L. 5122-9 du code de la santé publique ; ».
XI (nouveau). – Au premier alinéa de l’article L. 5122-8 du code de la santé publique, les mots : « ainsi que les campagnes publicitaires auprès du public pour les vaccinations » sont supprimés.
M. le président. L'amendement n° 45, présenté par M. Lorrain, Mme Jouanno, M. Milon, Mmes Bouchart, Bruguière et Cayeux, M. Cardoux, Mme Debré, M. Dériot, Mme Deroche, MM. Fontaine et Gilles, Mme Giudicelli, M. Gournac, Mmes Hummel et Kammermann, MM. Laménie et Pinton, Mme Procaccia et MM. Savary et Villiers, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3, dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
L’exploitant du médicament informe les professionnels de santé de la réévaluation conduite dans le cadre du présent alinéa par la seule diffusion des informations élaborées par l’Agence française de sécurité des produits de santé.
II. – Alinéa 6
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation au premier alinéa, les campagnes publicitaires pour les médicaments mentionnés à l'article L. 5121-2 ou pour des vaccins soumis à prescription médicale ou remboursables peuvent s'adresser au public.
« Les campagnes publicitaires non institutionnelles auprès du public pour des vaccins mentionnés au troisième alinéa ne sont autorisées que si les conditions suivantes sont réunies :
« 1° Ils figurent sur une liste de vaccins établie pour des motifs de santé publique par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis du Haut Conseil de la santé publique ;
« 2° Le contenu de ces campagnes publicitaires est conforme à l'avis du Haut Conseil de la santé publique et est assorti, de façon clairement identifiée, des mentions minimales obligatoires déterminées par cette instance. Ces mentions sont reproduites in extenso, sont facilement audibles et lisibles, selon le support du message publicitaire concerné, sont sans renvoi et sont en conformité avec des caractéristiques définies par arrêté du ministre chargé de la santé. »
III. – Alinéa 22
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Louis Lorrain.
M. Jean-Louis Lorrain. Cet amendement a un double objet.
D’une part, il tend à préciser que, en cas de réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques présentés par un médicament, à la suite d’un signalement de pharmacovigilance, les seules informations que l’exploitant pourra délivrer aux professionnels de santé seront celles élaborées par l’Agence française de sécurité des produits de santé.
D’autre part, il vise à rétablir la possibilité de faire de la publicité, institutionnelle ou non, sur les vaccins et à renforcer le cadre juridique relatif à ces publicités. En effet, interdire la publicité sur les vaccins serait contraire à la directive européenne. Par ailleurs, une telle interdiction ne serait pas satisfaisante en termes de santé publique. La publicité permet en effet de sensibiliser le public à ces médicaments et à la vaccination.
Toutefois, il est primordial que ces publicités soient faites selon des règles bien définies et rigoureuses. C’est pourquoi il est proposé de renforcer l’encadrement de la publicité pour les vaccins.
Ainsi, après avis du Haut Conseil de la santé publique, un arrêté du ministre chargé de la santé fixera la liste des vaccins qui, pour des motifs de santé publique, pourront faire l’objet d’une publicité. Un second arrêté précisera les caractéristiques de forme des recommandations définies par le Haut Conseil de la santé publique, que les entreprises du médicament devront désormais prendre en compte afin que ces recommandations soient plus lisibles pour le public.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Cet amendement a pour principal objet de revenir sur l’interdiction de la publicité pour les vaccins.
La commission a décidé d’affirmer le principe suivant : c’est à la puissance publique qu’il appartient d’assurer l’information sur ce type de produits.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Xavier Bertrand, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement important.
Voilà quelques mois, il a été dit, et même écrit dans un hebdomadaire satirique, que les visiteurs médicaux avaient accentué la promotion d’un médicament qui avait été placé sous surveillance et faisait l’objet d’une réévaluation. Cela a été démenti par le laboratoire concerné. Il est difficile de faire la part des choses et de savoir ce qui s’est réellement passé, mais en tout cas le risque existe.
Dans ces conditions, le présent amendement me semble bienvenu. Il convient en effet d’encadrer le dispositif, de manière que lorsqu’un médicament fera l’objet d’une réévaluation, seules pourront être communiquées aux médecins les informations élaborées par l’Agence française de sécurité des produits de santé. Une telle précaution est à mon sens nécessaire.
M. le président. La parole est à Mme Isabelle Pasquet, pour explication de vote.
Mme Isabelle Pasquet. Nous avons déjà évoqué, lors d’une explication de vote sur un amendement relatif à l’application du principe de précaution que nous avions déposé, la question de la publicité pour les vaccins, à propos du Gardasil.
L’amendement n° 45 vise à rétablir, aux termes de son objet, « la publicité, institutionnelle ou non, sur les vaccins ». Cette proposition est justifiée par des motifs de santé publique et par l’argument selon lequel l’interdiction de la publicité sur les vaccins telle que prévue à l’article 18 serait contraire à la réglementation européenne.
Nous contestons cette analyse et considérons pour notre part que cet amendement tend, d’abord et avant tout, à répondre aux attentes des exploitants, qui ont su jouer sur l’émotion du public et des peurs légitimes pour imposer leurs volontés.
Si nous nous sommes opposés à une disposition favorisant la publicité sur le Gardasil, c’est parce que nous sommes très réservés sur ce vaccin. Il faut dire que le laboratoire exploitant suscite le doute en affirmant qu’il s’agit d’un vaccin contre le cancer du col de l’utérus, alors qu’on sait qu’aucun vaccin ne protège des cancers. Le Gardasil protège en réalité les femmes contre le papillomavirus, qui peut provoquer – mais ce n’est pas systématique – un cancer du col de l’utérus.
En outre, l’efficacité de ce vaccin est loin d’être démontrée. Il présenterait même certains risques. Selon un article de la journaliste Virginie Belle paru le 10 octobre dernier, l’AFSSAPS aurait recensé 351 victimes et établi que le taux d’effets indésirables graves s’élève à 8,1 cas pour 100 000 vaccinations. Cet article apporte par ailleurs la précision suivante : « On sait que seules 1,5 million de femmes ont été vaccinées, les jeunes filles recevant pour la plupart d’entre elles trois doses de vaccin. Aussi, le taux d’effets indésirables graves (EIG) est en fait de 23,4 pour 100 000 femmes. […] À titre de comparaison, le taux d’incidence du cancer du col de l’utérus est de 6,4 pour 100 000 femmes en 2010. »
Il semblerait donc que le risque d’être victime d’effets secondaires graves après une vaccination soit près de trois fois plus important que celui d’être atteinte d’un cancer du col utérin.
C’est sans doute pour cette raison que le Gardasil fait l’objet d’un suivi particulier et que vos services l’ont placé sous surveillance, monsieur le ministre, à l’instar de cinquante-huit autres médicaments potentiellement dangereux.
Vous conviendrez, mes chers collègues, que, compte tenu de ces éléments, singulièrement de l’action du ministre de la santé, nous ne pouvons que nous opposer à une mesure permettant, au nom de la santé publique, la publicité sur un vaccin placé sous surveillance pour des raisons de santé publique !
M. le président. La parole est à M. Jean-Louis Lorrain, pour explication de vote.
M. Jean-Louis Lorrain. Les vaccins sont toujours une source de polémiques…
Personnellement, je supporte difficilement d’entendre affirmer que si nous défendons la publicité sur les vaccins, c’est parce que nous serions à la solde des laboratoires exploitants. Ce n’est pas du tout cela !
Ce qui nous importe, c’est le rôle protecteur de ce type de traitement en termes de santé publique. La vaccination contre la grippe, par exemple, permet chaque année de sauver un grand nombre de personnes âgées. On nous fait donc un mauvais procès.
Nous pourrions échanger de nombreux arguments contradictoires sur l’intérêt de tel ou tel vaccin, mais nous ne participons pas ici à un congrès international de spécialistes.
Par cet amendement, nous cherchons simplement à encadrer les choses en nous appuyant sur les préconisations du Haut Conseil de la santé publique. Il ne s’agit nullement de satisfaire je ne sais quel lobby.
M. le président. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.
Mme Chantal Jouanno. Je trouve moi aussi choquant que l’on puisse nous soupçonner d’être dans la main des exploitants.
Nous sommes tout de même confrontés à un véritable problème de santé publique. Ainsi, on constate une recrudescence de la rougeole en France, avec plus de 1 500 cas en 2009, contre 44 en 2007. Il est nécessaire de relancer la vaccination contre cette maladie. Je pourrais également évoquer l’extension insuffisante de la vaccination contre l’hépatite ou contre la grippe, y compris d’ailleurs parmi les professionnels de santé eux-mêmes.
Je pense sincèrement que le dispositif proposé est particulièrement sain, d’autant que seuls seront concernés les vaccins figurant sur une liste arrêtée par le ministre. Nous avons besoin de relancer notre politique de vaccination.
M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Vanlerenberghe, pour explication de vote.
M. Jean-Marie Vanlerenberghe. On est en train de confondre publicité pour la vaccination et publicité pour les vaccins. Ce n’est pas tout à fait la même chose !
M. le rapporteur serait bien inspiré de prendre en compte l’amendement de M. Lorrain, qui est frappé au coin du bon sens. J’en appelle donc à la clairvoyance de la majorité sénatoriale : adopter ce dispositif renforcerait le projet de loi.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. Ne pas préciser la façon dont la promotion d’un médicament sous surveillance qui fait l’objet d’une réévaluation du rapport entre les bénéfices et les risques à la suite d’un signalement de pharmacovigilance est assurée, c’est laisser perdurer une zone d’ombre qui est aujourd'hui pourtant clairement identifiée.
Quant à la vaccination, arrêtons avec les fantasmes ! Les laboratoires ne feront pas de la publicité seuls dans leur coin. Ces campagnes auront lieu sous l’égide du Haut Conseil de santé publique – c’est écrit noir sur blanc ! –, qui n’est pas n’importe quel organisme. Si vous voulez aller au bout de votre raisonnement, déposez donc un amendement visant à supprimer le HCSP !
Vous pouvez penser ce que vous voulez de la vaccination, toujours est-il qu’elle ne se fait pas n’importe comment. La France ne se situe pas à l’arrière-garde en matière de santé publique. Notre système de santé est même considéré comme l’un des meilleurs, sinon le meilleur au monde.
À chacun de prendre ses responsabilités. Sachez que cet amendement apportera un réel plus et que ne pas l’adopter constituerait une régression.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Puisque vous venez d’évoquer la rougeole, madame Jouanno, je pose la question : pourquoi les campagnes de vaccination contre la rougeole ne sont-elles pas menées par le Gouvernement ?
Vous nous affirmez ne pas être dans les mains des exploitants, soit ! Il n’en demeure pas moins que les campagnes publicitaires pour la vaccination contre la rougeole, la coqueluche ou d’autres maladies pourraient être faites sous d’autres formes que celles utilisées aujourd'hui.
Vous nous parlez, monsieur le ministre, de supprimer le HCSP. Ce n’est pas ce que nous proposons !
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Vous êtes excessif, monsieur le ministre !
Mme Annie David, présidente de la commission des affaires sociales. Pourtant, c’était l’une des propositions du rapport de la commission d’enquête sur la grippe A H1N1. Aller jusqu’au bout ? Pourquoi pas !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. En tant que médecin, je ne peux pas ne pas réagir.
La campagne contre la rougeole a été lancée il y a dix jours, dites-vous ? Bien sûr, il y a une recrudescence des cas de rougeole !
M. Xavier Bertrand, ministre. Et l’épidémie de rougeole aux États-Unis, c’est aussi la faute du Gouvernement ?
M. Bernard Cazeau, rapporteur. Laissez-moi parler, monsieur le ministre !
C’est systématiquement qu’il faut faire des campagnes, non seulement contre la rougeole, mais aussi contre la coqueluche ou la tuberculose. Maintenant que le BCG n’est plus obligatoire à la naissance, on voit des gosses développer des méningites tuberculeuses. J’ai ainsi vu le fils d’un copain, six mois après, devenir totalement handicapé.
Ne venez pas nous dire qu’il faut laisser aux laboratoires la responsabilité des campagnes. L’institut Mérieux en fait-il ? Évidemment non : le BCG ne leur rapporte presque rien ! C’est à la puissance publique d’agir, et si vous la dédouanez de ce rôle, vous avez tort.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Xavier Bertrand, ministre. L’horaire tardif ne m’empêchera pas de remettre les pendules à l’heure ! Lisez le texte de l’amendement : « Ils figurent sur une liste de vaccins établie pour des motifs de santé publique par arrêté du ministre chargé de la santé pris après avis du Haut Conseil de la santé publique ; ».
Vous avez raison, c’est bien au Gouvernement d’agir, et ce principe est gravé dans le marbre de la loi. Le reproche que vous nous faites n’est donc pas fondé.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Bernard Cazeau, rapporteur. N’essayez pas de détourner le problème, monsieur le ministre ! Vous avez très bien compris mon propos.
Je dis que c’est à la puissance publique de s’occuper des campagnes. Son rôle n’est pas de demander aux laboratoires de le faire, même si cela passe par le HCSP, et je n’en démordrai pas !
M. le président. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
9
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 27 octobre 2011 :
À neuf heures quarante-cinq :
1°) Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé (texte de la commission, n° 45, 2011-2012) ;
À quinze heures et, éventuellement, le soir :
2°) Questions d’actualité au Gouvernement ;
3°) Suite de l’ordre du jour du matin.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le jeudi 27 octobre 2011, à zéro heure trente-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART