M. le président. La parole est à M. François Fortassin, pour explication de vote.
M. François Fortassin. L’immense majorité de notre groupe suivra les avis de la commission sur les trois amendements présentés par le Gouvernement.
Très aimablement et très courtoisement, je souhaite vous faire remarquer, madame la ministre, que nous pourrions vous croire lorsque vous dites qu’il n’y a pas d’alternative à la politique que vous menez, mais à condition que celle-ci soit couronnée de succès. Or qu’avons-nous sous les yeux ? Une dette abyssale, un chômage qui ne cesse d’augmenter et un retournement dans la politique suivie. Ne l’oublions pas, voilà quelques années, il n’était question que de relance. Et puis, en très peu de temps, le déficit budgétaire est passé de 3 % à 8 % du PIB…
Par conséquent, madame la ministre, malgré la tonicité de vos propos, vous êtes assez peu convaincante. (Applaudissements sur la plupart des travées du RDSE, ainsi que sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC.)
M. le président. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Comme mon collègue François Fortassin, j’ai été quelque peu surpris par votre propos liminaire, madame la ministre.
La révision de croissance proposée par le Gouvernement n’est pas simplement, dans le cadre de ce projet de budget, un acte de sincérité ; c’est aussi un aveu concernant la santé de notre économie. Un constat s’impose : la crise que nous connaissons aujourd’hui, notamment le déficit de nos finances publiques, est autant due à l’absence de croissance qu’à une maîtrise insuffisante des dépenses.
J’ai l’impression que le Gouvernement, plutôt que de favoriser la croissance, s’attache uniquement à faire des économies, que dis-je ? des coupes claires dans les dépenses, notamment en matière de dépenses sociales.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est faux !
M. Martial Bourquin. Le prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz parle du « triomphe de la cupidité ».
On en arrive, dans nos sociétés, à ne plus être capable de se représenter ce qu’est le coût réel de 4,7 millions de personnes inscrites à Pôle emploi. Tout à l’heure, madame la ministre, vous affirmiez qu’aucune autre politique n’était possible. Eh bien, qu’on fasse le compte ! Combien coûtent 8 millions de pauvres ? Combien coûte aujourd’hui cette politique fiscale, à propos de laquelle François Marc a apporté tout à l’heure des précisions très utiles ?
Aux états généraux de l’industrie, Carlos Ghosn nous avait dit en substance : « Supprimez la taxe professionnelle et nous nous installerons un peu plus sur le territoire français ! »
Je fais le compte des différentes mesures que vous avez prises – suppression de la taxe professionnelle, augmentation du crédit d’impôt recherche, qui est surtout utilisé par les grands groupes, cadeaux fiscaux à ces mêmes grands groupes, qui paient, cela a été dit par François Marc, 8 % environ d’impôt sur les sociétés – et je n’en constate pas moins une poursuite des délocalisations, un abandon par les grands groupes du territoire national et une absence de patriotisme économique.
À mes yeux, la politique industrielle du Gouvernement est complètement à rebours de ce qu’il faudrait faire.
Nous avons besoin d’une vraie politique industrielle, conforme au principe du donnant, donnant : crédit d’impôt recherche ou dégrèvements de fiscalité contre investissement sur le sol national. En revanche, en cas de boursicotage ou de délocalisation, ce sera le prix fort ! Il faut tout de même un peu plus de justice !
Vous avez dit tout à l’heure, madame la ministre, que les Français avaient un président qui les protégeait.
Mme Christiane Hummel. Elle a eu raison !
M. Martial Bourquin. Cela me choque ! Demandez aux 4,7 millions de personnes inscrites à Pôle emploi ce qu’elles en pensent ! Demandez-le également aux patrons des TPE et PME, qui travaillent dur, tout comme leurs salariés, qui ne délocalisent pas, investissent sur le sol français et y créent des emplois, alors qu’ils sont souvent abandonnés par le secteur bancaire, malmenés par la politique fiscale du Gouvernement, lequel ne mène en outre aucune politique industrielle. Je doute que ceux-là se sentent protégés !
Madame la ministre, entre les slogans et la réalité, l’écart est grand ! Votre bilan économique et industriel est calamiteux.
Franchement, votre plaidoyer était déplacé : il ressemblait plus à un discours de meeting de l’UMP qu’à un vrai discours gouvernemental destiné à présenter une politique visant à sortir le pays de la crise ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Mirassou. Madame la ministre, après avoir eu l’occasion de vous observer depuis maintenant une dizaine de jours, je serais tenté de qualifier votre ligne politique de très… linéaire. (Sourires.)
Mme Christiane Hummel. Elle a de la suite dans les idées !
M. Jean-Jacques Mirassou. Avant-hier, vous avez choisi les retraites chapeaux, nous, les mutuelles. Hier, vous avez choisi l’État, nous, les collectivités territoriales. Aujourd’hui, vous choisissez le CAC 40, nous, les PME, alors même que vous-même et vos collègues du Gouvernement nous expliquez à l’envi qu’elles représentent des gisements d’emplois !
Mais vous n’arriverez pas à nous faire pleurnicher sur les entreprises du CAC 40. Il suffit de voir la tête du P-DG de Total pour savoir qu’il ne subit pas une violence budgétaire insupportable…
Dans le même temps, les PME, elles, sont bien victimes d’une injustice.
Vous vous prévaliez tout à l’heure de la suppression de la taxe professionnelle, en faisant du reste allusion à un ancien Président de la République. Je vous invite à remonter un peu plus loin dans le temps : c’est Voltaire, je crois, qui disait : « Qui n’a jamais changé ne fut qu’un imbécile. » Il n’y a donc pas de religion absolue à cet égard.
Simplement, s’agissant des collectivités locales, il ne vous a pas échappé que l’investissement réalisé par les collectivités territoriales est passé de 75 % à 65 % du total des investissements publics. Et l’on sait ce que cela signifie en particulier pour les entreprises du bâtiment et des travaux publics. Or qui réalise les travaux lorsqu’il s’agit de construire, de moderniser ou de remettre en état les collèges, les ponts, les routes ? Des PME ! Ce sont elles qui pâtissent d’une telle réduction de la voilure !
Face à l’inflexibilité dont vous faites preuve s’agissant de votre ligne politique et budgétaire, le camp de la gauche, par symétrie, ne bougera pas d’un pouce ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Valérie Pécresse, ministre. Je ne peux pas vous laissez dire, monsieur Mirassou, que nous avons choisi les entreprises du CAC 40 et vous, les PME : vous venez en effet de voter un amendement visant à alourdir de 17 milliards d’euros l’impôt sur les sociétés de 120 000 entreprises. Cela fait tout de même 119 960 entreprises qui ne relèvent pas du CAC 40 ! Aujourd’hui, grâce à vous, toutes ces entreprises paieront 50 % d’impôt en plus ! (Vifs applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. Daniel Dubois applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Raffarin, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Raffarin. Comme d’habitude, j’ai écouté avec sympathie les propos de M. Fortassin, car ils sont souvent marqués par la sagesse qui émane de notre France des territoires. En l’occurrence, ils se terminaient par une conclusion que je n’approuve pas.
Madame la ministre, je puis vous l’affirmer, vous êtes convaincante !
Monsieur Bourquin, vous avez évoqué les meetings de l’UMP, comme si vous vous y étiez déjà rendu ! (Sourires. – M. Martial Bourquin fait signe qu’il en a vu ou entendu des retransmissions.) Au demeurant, si l’envie vous en prend, sachez que vous y serez le bienvenu. Vous pourrez le constater, dans cette famille politique, on respecte les opinions différentes, tout en connaissant les limites du raisonnable.
Mes chers collègues, j’ai écouté les différents orateurs qui viennent de s’exprimer et, pas une seule fois, je ne les ai entendus prononcer le mot « crise ». Or savez-vous que l’Europe et le monde sont aujourd’hui au bord de difficultés majeures ?
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. On est dedans !
M. Jean-Pierre Raffarin. L’existence même de la zone euro est extrêmement fragilisée.
Pourquoi sommes-nous dans cette situation ? Pourquoi, depuis 1975, avons-nous, année après année, voté des budgets en déficit, quel que soit le pouvoir en place ? Pourquoi ces déficits n’ont-ils jamais posé problème et pourquoi est-ce le cas aujourd’hui ? La réponse est simple : la croissance mondiale est très affaiblie. Jusqu’à maintenant, tout se passait comme si la croissance était une sorte de garantie sur la dette. Tant qu’il y avait de la croissance, on acceptait le déficit.
Aujourd’hui, le moteur américain, qui était l’un des quatre gros moteurs de notre quadriréacteur vient de s’éteindre. Quant au moteur européen, il est extraordinairement déstabilisé. Le quadriréacteur n’a donc plus que deux moteurs en état de marche : les BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud –, surtout la Chine, et un certain nombre d’autres pays d’Asie.
Ces deux moteurs marchent très fort ; mais eux aussi sont terriblement fragiles. La Chine connaît aujourd’hui un taux de croissance supérieur à 9 %, mais aussi un taux d’inflation supérieur à 6 %. Elle cherche donc à « refroidir » son économie.
Or, si les BRICS, en particulier la Chine, ralentissent, notre situation deviendra extrêmement difficile, car ni l’Amérique ni l’Europe ne peuvent, aujourd’hui, entraîner l’économie mondiale à leur place. C’est pourquoi la crise de la dette est très grave.
Dans ce contexte, comme l’a dit Mme la ministre, nous avons deux priorités.
Nous devons d’abord aider les entreprises françaises à aller chercher la croissance à l’étranger. Dans cette optique opposer les grandes entreprises aux petites est absurde ! En tant que sénateur de la Vienne, je sais ce que c’est que les PME, l’artisanat, tout ce tissu humain dont nous avons besoin. Mais je sais aussi que, pour aller chercher la croissance, il faut éviter d’opposer les « grands » et les « petits ».
Il faut donc, au contraire, leur permettre de travailler ensemble. D’ailleurs, un certain nombre de grandes entreprises, comme Safran, sont exemplaires dans la manière dont elles entraînent des PME dans le sillage de leur croissance.
Au moment où nous devons nous mobiliser pour la croissance, sans laquelle la crise de la dette deviendra plus aiguë encore, il est aberrant d’imposer davantage les entreprises !
Notre seconde priorité est d’inspirer confiance à nos prêteurs. Parce que notre démocratie est endettée – les uns et les autres, je l’ai dit, nous partageons la responsabilité de cette situation –, elle ne dépend pas seulement des électeurs, mais aussi des prêteurs… Or, quand on doit emprunter de l’argent, il faut inspirer confiance à ceux qui prêtent !
Pour cela, nous devons éviter de gaspiller l’argent que nous empruntons. Un certain nombre d’efforts budgétaires sont donc nécessaires si nous voulons, demain, financer nos déficits et notre modèle social. Et, pour préserver la confiance des prêteurs à plus long terme, le meilleur message que nous puissions leur envoyer, c’est l’adoption de la « règle d’or ». Elle signifie en effet que, quelles que soient les erreurs auxquelles nous nous sommes laissés aller dans le passé, nous ne dépenserons pas, à l’avenir, plus que le montant de nos recettes : là, serait la véritable rigueur.
Telles sont les raisons pour lesquelles, mes chers collègues, j’ai trouvé l’argumentation de Mme la ministre convaincante.
Nous devons nous battre pour chercher, dans le monde, la croissance là où elle se trouve. Nous devons aussi envoyer des messages de confiance, car, sans confiance, notre économie et nos emplois – et ceux-ci constituent le paramètre essentiel – seront très fragilisés ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP et de l’UCR.)
M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour explication de vote sur l'amendement n° I-217.
M. Éric Bocquet. Il n’y aurait pas d’alternative : c’est le refrain à la mode en cet automne 2011… Refrain lancinant que je veux, une fois de plus, dénoncer !
Si c’était le cas, à quoi servirait-il que nous débattions en défendant nos engagements respectifs ? À quoi même serviraient l’engagement politique, les partis, la République ?
L’amendement n° I-217 tire les conséquences des modifications apportées par le Sénat, depuis la semaine dernière, au projet de loi de finances ; bien entendu, nous ne pouvons que l’approuver.
Mais nous ne nous faisons pas d’illusions : chacun a compris que cet amendement était éminemment virtuel. Il est clair que le Gouvernement n’acceptera pas les nouvelles recettes que nous proposons de lever au profit du budget général, tant elles sont contraires au sens des efforts qu’il entend imposer aux Français pour redresser les comptes publics.
Mais cet amendement a aussi valeur de manifeste : celui, paradoxalement, de la nouvelle majorité sénatoriale. Il démontre en effet que d’autres choix sont possibles, y compris pour améliorer le solde des comptes publics.
Les mesures votées par le Sénat rapporteraient près de 30 milliards d’euros de recettes supplémentaires. Ce surcroît de recettes proviendrait pour les deux tiers d’une augmentation du produit de l’impôt sur les sociétés : même si elle représente près d’un point de PIB, cette hausse ne le rendrait pas vraiment insupportable pour les entreprises…
Plus de 3 milliards d’euros proviendraient d’une hausse de l’impôt sur le revenu, en particulier d’une augmentation de la taxation des plus hauts revenus et des revenus financiers.
La remise en ordre de l’impôt de solidarité sur la fortune rapporterait près de 2 milliards d’euros. N’est-il pas nécessaire que les plus riches patrimoines contribuent à l’effort commun ?
Près de 2 milliards d’euros, enfin, proviendraient de la remise en cause, au nom de la même logique, de certains allégements consentis ces derniers temps sur la fiscalité du patrimoine.
En somme, les initiatives de la gauche sénatoriale et, en son sein, du groupe CRC, que je représente, ont largement conduit à montrer que des ressources importantes permettant de répondre aux exigences de redressement des comptes publics et de financement de l’action publique pouvaient être mobilisées sans qu’il soit nécessaire de rançonner encore et toujours les plus modestes et les familles populaires.
On cherche de l’argent pour redresser les comptes publics ? Eh bien, manifestement il y en a ! Tel est l’enseignement qu’il faut tirer de nos débats, dont cet amendement tire les conséquences.
J’observe, pour conclure, que la diminution du déficit à 55,1 milliards d’euros en 2012 – et encore ce chiffre ne tient-il pas compte, je crois, du produit de la taxe sur les transactions financières –, combinée aux mesures prises dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale tel qu’il a été voté par le Sénat, placerait notre pays sur la voie du respect des critères européens de discipline budgétaire !
Nous n’allons évidemment pas les défendre ; mais avouez que le fait est assez cocasse pour être relevé !
M. le président. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble constitué de l'article 31 et de l’état A annexé.
(L'article 31 et l’état A annexé sont adoptés.)
Seconde délibération
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Conformément à l’article 47 bis de notre règlement, je demande, avant que nous procédions au vote sur l’ensemble de la première partie, une seconde délibération de l’article 6 du projet de loi de finances.
M. le président. En application de l’article 47 bis, alinéa 1, du règlement, la commission des finances demande qu’il soit procédé à une seconde délibération de l’article 6.
La seconde délibération est de droit lorsqu’elle est demandée par la commission des finances.
Nous allons donc procéder à cette seconde délibération.
Je rappelle au Sénat les termes de l’article 43, alinéa 6, du règlement :
« Dans sa seconde délibération, le Sénat statue seulement sur les nouvelles propositions du Gouvernement ou de la commission, présentées sous forme d’amendements, et sur les sous-amendements s’appliquant à ces amendements. »
Article 6 (supprimé)
M. le président. Je rappelle que l’article 6 a été rejeté par le Sénat et que cet article se trouve ainsi, de fait, supprimé.
L'amendement n° A-1, présenté par Mme Bricq, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° L’article L. 1613-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« En 2012, ce montant est égal à 41 466 752 000 €. » ;
2° L’article L. 3334-1 est ainsi modifié :
a) Les quatrième et cinquième alinéas sont supprimés ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« En 2012, le montant de la dotation globale de fonctionnement des départements mise en répartition est augmenté de 64 millions d’euros par rapport à 2011. » ;
3° La dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 4332-4 est complétée par les mots : « et, en 2012, le même montant est augmenté de 13 millions d’euros par rapport à 2011 ».
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. L’amendement n° A-1 rétablit l’article 6 dans la version initialement proposée par le Gouvernement : c’est celle qui figurait dans le projet de loi de finances présenté en conseil des ministres le 28 septembre dernier.
Je tiens à préciser que, hier, par son vote, le Sénat n’a pas supprimé la dotation globale de fonctionnement. À l’article 15, en effet, il a voté le montant de la DGF pour l’année 2012 – ce montant est même supérieur de 77 millions d’euros à celui qui figurait dans la version du projet de loi de finances adoptée par l’Assemblée nationale. Du reste, la DGF telle qu’elle a été votée par le Sénat figure bien dans l’amendement récapitulatif n° I-217 déposé par le Gouvernement et que nous venons d’adopter.
Une seconde délibération est néanmoins nécessaire, car déterminer le montant de la DGF n’est pas tout ; il faut aussi fixer les modalités de sa répartition. Or c’est l’article 6 qui prévoit la ventilation des 77 millions d’euros supplémentaires de DGF : 64 millions d’euros seront affectés aux départements et 13 millions d’euros aux régions.
Nous proposons, pour l’augmentation de la DGF, un montant et une répartition identiques à ceux qui figuraient dans la version du projet de loi de finances initialement présentée par le Gouvernement.
Dès lors que le Sénat a considéré qu’il fallait une DGF en 2012 et qu’il en a fixé le montant, le rétablissement de l’article 6 doit être considéré comme une mesure de cohérence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Valérie Pécresse, ministre. Le Gouvernement est un peu perplexe devant cet amendement.
Le Sénat a refusé l’effort supplémentaire de 200 millions d’euros que le Gouvernement demande aux collectivités territoriales. C’est une position que nous n’approuvons pas. Pourtant, ces 200 millions d’euros représentent seulement 1/1 000 du budget consolidé des collectivités territoriales !
L’État, pour sa part, consent un effort supplémentaire de 1,5 milliard d’euros. Nous demandons aussi un effort à l’assurance maladie et à l’ensemble du système de soins. (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. Claude Haut. Ce sont les Français qui font les efforts !
M. François Marc. Le fardeau est déjà très lourd !
Mme Valérie Pécresse, ministre. C’est pourquoi nous n’approuvons pas votre refus de faire contribuer les collectivités territoriales à l’effort national.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
Je reconnais néanmoins que vous avez voté une mesure d’économie assez radicale,…
M. Jean-Jacques Mirassou. Ça, c’est votre interprétation !
Mme Valérie Pécresse, ministre. … car 41 milliards d’euros de DGF en moins, cela contribuerait très largement au rétablissement des finances de l’État ! Mais ce n’est pas ainsi que le Gouvernement envisage de l’obtenir !
M. Claude Haut. Vous nous dites ça à nous, mais c’est vers la droite de l’hémicycle qu’il faut vous tourner !
M. François Marc. Ce sont vos amis qui sont responsables de cet état de chose !
M. Jean-Pierre Caffet. Eh oui, c’est l’UMP qui a supprimé la DGF !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. L’amendement n° A-1 peut-être envisagé sur le plan de la cohérence technique ou sur celui de la cohérence politique. Essayons, mes chers collègues, de le considérer successivement de ces deux points de vue.
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Attention, la casuistique est en route…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Sur le plan de la cohérence technique, Mme le rapporteur général a raison : il faut mettre en harmonie l’article 6 avec l’article 15. Celui procède en effet à une totalisation, laquelle résulte en principe de l’addition de chacune des parties. Si l’article 6 est vide alors que l’article 15 est plein, il y a une incohérence.
D’un point de vue politique, le bref échange auquel nous avons procédé ce matin, en commission des finances, a permis à chacun de faire des choix cohérents.
Certains ont souhaité transformer très substantiellement la première partie du projet de loi de finances, essentiellement les dispositions relatives aux recettes. Ils ont prévu d’accroître massivement les recettes fiscales, en particulier le produit de l’impôt sur les sociétés. Ces choix de stratégie fiscale leur appartiennent et peuvent être discutés.
Les mêmes se sont refusé à participer à l’effort d’économie auquel, madame le ministre, vous nous avez appelés.
En faisant ces choix, la majorité sénatoriale assume une ligne politique, certainement cohérente – c’est à elle, en tout cas, de l’apprécier –, qui consiste à augmenter le produit fiscal en accroissant les prélèvements sur les classes moyennes et, surtout, sur les entreprises – particulièrement à travers l’impôt sur les sociétés.
Pour notre part, nous partageons le point de vue du Gouvernement : il est nécessaire de partager les efforts de manière équilibrée entre les recettes et les dépenses.
Nous avons considéré que les dépenses publiques, celles de l’État, celles de la sécurité sociale et même celles des collectivités territoriales, ne pouvaient pas être sanctuarisées. C'est la raison pour laquelle nous avons approuvé les modifications apportées par l'Assemblée nationale au texte initial du Gouvernement, notamment l’effort de 200 millions d'euros qui est demandé aux collectivités territoriales.
Mes chers collègues, par souci de cohérence technique, l'opposition sénatoriale aurait pu voter cet amendement n° A–1, que soutiennent la majorité des membres de la commission ; par cohérence politique, elle votera contre. Voilà exactement la situation à cette heure.
Attendons la fin de l’examen de ce projet de loi de finances pour pouvoir porter une appréciation d'ensemble sur le texte final qui nous sera soumis et sur les modifications qu’il aura subies. Toujours est-il que, pour la première fois depuis fort longtemps, je voterai contre l’ensemble de la première partie et l'article d'équilibre en raison des transformations dont ce texte a fait l’objet.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Nous n'allons pas reprendre le débat sur les collectivités locales, qui nous a déjà occupés, fort utilement et de façon tout à fait justifiée, pendant plus de deux heures, hier.
Tant nos collègues de l'opposition que ceux de la majorité ont fait valoir leurs arguments, ainsi qu’il sied à un débat démocratique. Cela permet à chacun de prendre conscience que, de part et d'autre de cet hémicycle, nous avons une vision différente du territoire.
Pour autant, je ne peux vous laisser dire que nous refusons que les collectivités territoriales prennent leur part à l’effort général qui est demandé à l’ensemble des agents économiques. Si nous avions voulu faire preuve d’irresponsabilité, madame la ministre, il nous aurait suffi de refuser le gel des dotations financières et de faire « sauter » l'enveloppe fermée de ces dotations.
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Ce n'est pas ce que nous avons fait ! Il n’en est pas moins vrai que nous refusons que vous vous défaussiez sur les collectivités de vos responsabilités dans l'aggravation des déficits depuis dix ans, particulièrement depuis juillet 2007.
Le « paquet TEPA » coûte encore aux finances de la France 9,3 milliards d'euros chaque année. Si vous aviez vraiment voulu réduire le déficit de l'État, vous auriez dû résolument emprunter la voie que nous avons tracée.
S’agissant de la convergence entre la France et l'Allemagne, monsieur Raffarin, compte tenu des prévisions de croissance – je parle des vraies prévisions de croissance – dans nos deux pays pour 2012 et 2013, la zone euro sera bien avancée quand cette croissance sera quasi nulle, voire négative. On pourra alors parler de convergence négative et c’est l’avenir de l’Union européenne qui sera en jeu.
Ne faites pas un mauvais procès à ceux qui ont à cœur de défendre les collectivités locales (Exclamations sur les travées de l’UMP.)…
Mme Christiane Hummel. Nous aussi !
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. … au moins autant que vous, et ne leur reprochez pas de prendre leurs responsabilités.
Il est clair que nous n’avons pas la même vision que vous s’agissant des efforts en matière d’économies que doivent consentir les collectivités locales.
De plus, je reproche au Gouvernement de ne pas avoir eu le courage d'assumer ses choix et de s’être défaussé sur le Parlement en lui demandant de trouver 200 millions d'euros. Nous contestons cette façon de procéder. C'est au Gouvernement de prendre ses responsabilités ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC. – Protestations sur les travées de l’UMP.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Désormais, on y voit plus clair ! Les masques sont tombés !