Article 10 bis (nouveau)
La seconde colonne du tableau du deuxième alinéa de l’article 86 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 est ainsi modifiée :
1° À la deuxième ligne, le nombre : « 1 962 343 » est remplacé par le nombre : « 1 962 333 » ;
2° À la douzième ligne, le nombre : « 283 164 » est remplacé par le nombre : « 283 154 » ;
3° À la dernière ligne, le nombre : « 1 974 461 » est remplacé par le nombre : « 1 974 451 ». – (Adopté.)
Article 10 ter (nouveau)
L’article 87 de la même loi est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, le nombre : « 365 928 » est remplacé par le nombre : « 365 938 » ;
2° La seconde colonne du tableau du deuxième alinéa est ainsi modifiée :
a) À la quarantième ligne, le nombre : « 1 277 » est remplacé par le nombre : « 1 287 » ;
b) À la quarante et unième ligne, le nombre : « 442 » est remplacé par le nombre : « 452 » ;
c) À la dernière ligne, le nombre : « 365 928 » est remplacé par le nombre : « 365 938 ». – (Adopté.)
TITRE II
DISPOSITIONS PERMANENTES
I. – MESURES FISCALES NON RATTACHÉES
Article 11
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
A. – Avant l’article 278 bis, il est inséré un article 278-0 bis ainsi rédigé :
« Art. 278-0 bis. – La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,5 % en ce qui concerne :
« A. – Les opérations d’achat, d’importation, d’acquisition intracommunautaire, de vente, de livraison, de commission, de courtage ou de façon portant sur :
« 1° L’eau et les boissons non alcooliques ainsi que les produits destinés à l’alimentation humaine à l’exception des produits suivants auxquels s’applique le taux prévu à l’article 278 :
« a) Les produits de confiserie ;
« b) Les chocolats et tous les produits composés contenant du chocolat ou du cacao. Toutefois le chocolat, le chocolat de ménage au lait, les bonbons de chocolat, les fèves de cacao et le beurre de cacao sont admis au taux réduit de 5,5 % ;
« c) Les margarines et graisses végétales ;
« d) Le caviar ;
« 2° Les appareillages, équipements et matériels suivants :
« a) Les appareillages pour handicapés mentionnés aux chapitres Ier et III à VII du titre II et au titre IV de la liste des produits et des prestations remboursables prévue à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale ;
« b) Les appareillages pour handicapés mentionnés au titre III de la liste précitée ou pris en charge au titre des prestations d’hospitalisation définies aux articles L. 162-22-6 et L. 162-22-7 du même code et dont la liste est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de la santé et du budget ;
« c) Les équipements spéciaux, dénommés aides techniques et autres appareillages, dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du budget et qui sont conçus exclusivement pour les personnes handicapées en vue de la compensation d’incapacités graves ;
« d) Les autopiqueurs, les appareils pour lecture automatique chiffrée de la glycémie, les seringues pour insuline, les stylos injecteurs d’insuline et les bandelettes et comprimés pour l’autocontrôle du diabète ;
« e) Les appareillages de recueil pour incontinents et stomisés digestifs ou urinaires, les appareillages d’irrigation pour colostomisés, les sondes d’urétérostomie cutanée pour stomisés urinaires, les solutions d’irrigation vésicale et les sondes vésicales pour incontinents urinaires ;
« f) Les ascenseurs et matériels assimilés, spécialement conçus pour les personnes handicapées et dont les caractéristiques sont fixées par arrêté du ministre chargé de l’économie et des finances ;
« B. – Les abonnements relatifs aux livraisons d’électricité d’une puissance maximale inférieure ou égale à 36 kilovoltampères, d’énergie calorifique et de gaz naturel combustible, distribués par réseaux, ainsi que la fourniture de chaleur lorsqu’elle est produite au moins à 50 % à partir de la biomasse, de la géothermie, des déchets et d’énergie de récupération.
« La puissance maximale prise en compte correspond à la totalité des puissances maximales souscrites par un même abonné sur un même site ;
« C. – La fourniture de logement et de nourriture dans les maisons de retraite et les établissements accueillant des personnes handicapées. Ce taux s’applique également aux prestations exclusivement liées, d’une part, à l’état de dépendance des personnes âgées et, d’autre part, aux besoins d’aide des personnes handicapées, hébergées dans ces établissements et qui sont dans l’incapacité d’accomplir les gestes essentiels de la vie quotidienne ;
« D. – Les prestations de services exclusivement liées aux gestes essentiels de la vie quotidienne des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes qui sont dans l’incapacité de les accomplir, fournies par des associations, des entreprises ou des organismes déclarés en application de l’article L. 7232-1-1 du code du travail, dont la liste est fixée par décret, à titre exclusif ou à titre non exclusif pour celles qui bénéficient d’une dérogation à la condition d’activité exclusive selon l’article L. 7232-1-2 du même code ;
« E (nouveau). – La fourniture de repas par des prestataires dans les établissements publics ou privés d’enseignement du premier et du second degrés. » ;
B. – 1. Aux articles 278 bis, 278 ter, 278 quater et 279, le taux : « 5,50 % » est remplacé par le taux : « 7 % » ;
2. Au premier alinéa des articles 278 sexies et 278 septies, le taux : « 5,5 % » est remplacé par le taux : « 7 % » ;
C. – Aux II et III de l’article 278 sexies, après les mots : « taux réduit », sont insérés les mots : « de 7 % » ;
D. – L’article 279 est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa du b bis est ainsi rédigé :
« concerts ; »
2° Le b bis a est ainsi rétabli :
« b bis a. Le prix du billet d’entrée donnant exclusivement accès à des concerts donnés dans des établissements où il est servi facultativement des consommations pendant le spectacle et dont l’exploitant est titulaire de la licence de la catégorie mentionnée au 1° de l’article D. 7122-1 du code du travail. Un décret fixe les modalités d’application de ces dispositions ; »
3° Le b sexies est ainsi rétabli :
« b sexies. Les prestations correspondant au droit d’utilisation des animaux à des fins d’activités physiques et sportives et de toutes installations agricoles nécessaires à cet effet ; »
4° Le second alinéa du b octies est ainsi modifié :
a) Au début de la première phrase, les mots : « Le taux réduit n’est pas » sont remplacés par les mots : « Le taux prévu à l’article 278 est » ;
b) À la deuxième phrase, après les mots : « taux réduit », sont insérés les mots : « de 7 % » ;
5° Le m est complété par les mots : « qui relèvent du taux prévu à l’article 278 » ;
6° Il est ajouté un n ainsi rédigé :
« n. Les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate, à l’exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques qui relèvent du taux prévu à l’article 278. » ;
E. – L’article 279-0 bis est ainsi modifié :
1° Au 1, après les mots : « au taux réduit », sont insérés les mots : « de 7 % » ;
2° Au début du 2, les mots : « Cette disposition n’est pas applicable » sont remplacés par les mots : « Par dérogation au 1, le taux prévu à l’article 278 s’applique » ;
3° Au 2 bis, les mots : « La disposition mentionnée au 1 n’est pas applicable » sont remplacés par les mots : « Par dérogation au 1, le taux prévu à l’article 278 s’applique » ;
F. – Le premier alinéa de l’article 279 bis est ainsi rédigé :
« Les taux réduits de la taxe sur la valeur ajoutée ne s’appliquent pas : » ;
G. – Le c de l’article 281 quater est ainsi rétabli :
« c. De la vente de billets imposée au taux réduit de 7 % dans les conditions prévues au b bis a de l’article 279. » ;
H. – Aux premier et second alinéas de l’article 298 octies, après les mots : « taux réduit », sont insérés les mots : « de 7 % » ;
I. – Les 1° et 2° de l’article 278 bis, l’article 278 quinquies, le troisième alinéa du a et le b decies de l’article 279 sont abrogés ;
J. – L’article 296 est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est complété par les mots : « , la taxe sur la valeur ajoutée est perçue » ;
2° Les deuxième et troisième alinéas sont ainsi rédigés :
« 1° a) Au taux réduit de 2,10 % pour les opérations visées aux articles 278-0 bis à 279-0 bis et à l’article 298 octies ;
« b) Au taux normal de 8,50 % dans les autres cas ; »
K. – Le 2° du 1 du I de l’article 297 est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, après le mot : « visées », est insérée la référence : « au 1° du A de l’article 278-0 bis et » ;
2° Au dernier alinéa, les références : « a à b decies » sont remplacées par les références : « B et C de l’article 278-0 bis et aux a à b nonies ».
I bis (nouveau). – Aux premier et second alinéas de l’article L. 334-1 du code du cinéma et de l’image animée, le taux : « 5,5 % » est remplacé par le taux : « 7 % ».
II. – Les I et I bis s’appliquent aux opérations pour lesquelles la taxe sur la valeur ajoutée est exigible à compter du 1er janvier 2012. Toutefois, pour les livraisons de logements sociaux neufs à usage locatif visées au 2 du I de l’article 278 sexies du code général des impôts ainsi que pour les livraisons à soi-même de ces mêmes logements, le I du présent article s’applique aux opérations bénéficiant d’une décision favorable prise dans les conditions prévues aux articles R. 331-3 et R. 331-6 du code de la construction et de l’habitation à compter du 1er janvier 2012. De même, pour les livraisons de logements visées au 4 du I de l’article 278 sexies du code général des impôts ainsi que pour les livraisons à soi-même de ces mêmes logements, le I du présent article s’applique aux opérations bénéficiant d’une décision d’agrément prise par le représentant de l’État dans le département à compter du 1er janvier 2012.
M. le président. La parole est à M. Michel Le Scouarnec, sur l'article.
M. Michel Le Scouarnec. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le groupe CRC a déposé un amendement de suppression de cet article qui relève le taux de TVA réduit de 5,5 % à 7 %.
Nous sommes en effet opposés de manière globale à cette mesure, puisque cette augmentation aura pour principale conséquence de peser sur les finances des ménages modestes ou les plus pauvres, ainsi que sur l’emploi, en particulier dans le secteur du bâtiment. Le relèvement du taux sera, de fait, préjudiciable à la croissance.
Le principe est donc, dans son ensemble, inacceptable, mais je voudrais ici évoquer la menace spécifique qu’il fait peser sur les biens culturels, c’est-à-dire le spectacle et les livres, qui ont un rôle si important.
Tout d’abord, la mesure pose des problèmes de calendrier : la saison 2011–2012 est entamée et les billets des spectacles ont été vendus, avec des comptes fondés sur l’ancienne TVA à 5,5 %. Les structures de spectacle vivant fonctionnant avec des abonnés et des réservations à l’avance seront donc pénalisées par un manque à gagner important, dans un contexte budgétaire précaire.
En outre, pour les livres déjà imprimés, la question de la répercussion de la hausse se pose. Si elle n’est pas répercutée, les éditeurs supporteront exclusivement la charge de ce coût, et si elle l’est, ce seront les lecteurs, ce qui n’ira pas sans poser des problèmes de mise en œuvre. En effet, les prix sont souvent imprimés sur la quatrième de couverture des livres et fixés en amont par l’éditeur au nom du prix unique.
Cela étant, ces problèmes transitoires n’occultent pas la question de fond : quels que soient les aménagements provisoires retenus, la hausse de TVA sur les biens culturels aura pour conséquence d’augmenter le coût d’accès à la culture dans des secteurs déjà fragilisés. Cette augmentation de la TVA fragilisera un système à l’équilibre précaire, remettant en cause la rémunération des auteurs et le coût d’accès à la culture pour les spectateurs et lecteurs.
Compte tenu du faible investissement budgétaire accordé, en 2012, au spectacle vivant comme à la lecture, il nous paraît impératif, au nom de l’exception culturelle, de maintenir un taux de TVA réduit à 5,5 % sur ces biens.
M. le président. La parole est à M. François Marc, sur l'article.
M. François Marc. Nous touchons, avec cet article 11, une dimension plus politique de ce projet de loi de finances rectificative. Jusqu’à présent, ce collectif budgétaire a suscité une forme d’unanimité – je pense au FACE, par exemple –, laquelle sera difficile à trouver sur cet article, puisqu’il tend à augmenter le taux de TVA réduit de 5,5 % à 7 %.
Hier, lors de la discussion générale, nous avons pu entendre un certain nombre de propos des ministres présents, du président de la commission des finances, de l’orateur du groupe UMP, visant à culpabiliser l’opposition. Le pays se trouve dans une situation difficile, le Gouvernement cherche des solutions pour s’en sortir et les seules explications qui sont données au Parlement tendent à rendre la gauche coupable d’une hypothétique faute, d’une supposée incompétence, etc.
À mon sens, il faut surtout retenir que la droite a beaucoup de mal à remettre en cause les choix fiscaux qu’elle a faits depuis plusieurs années.
Rappelez-vous, il n’y a pas si longtemps, cette politique fiscale était qualifiée, ici au Sénat, de « cocktail gagnant ». Certains se souviennent de cette formule utilisée au sujet du « paquet fiscal » et de son fameux « bouclier », restée dans les annales de la Haute Assemblée.
Aujourd’hui, il est difficile d’assumer la réalité : le « cocktail gagnant » s’est transformé…
M. Francis Delattre. En choc fiscal !
M. François Marc. … en une piquette tout à fait imbuvable !
En définitive, la question qui se pose aujourd’hui est celle des responsabilités.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Regardez devant et pas derrière !
M. François Marc. Justement, j’y viens, monsieur le président. On ne peut pas faire de préconisations pour l’avenir sans avoir fait un diagnostic correct.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. On s’en sort mieux que les autres ! Comment l’expliquez-vous ?
M. François Marc. Mes chers collègues, dans le diagnostic, il convient de déterminer où sont les responsabilités. Pourquoi l’endettement s’est-il accru de 500 milliards d’euros pendant ce quinquennat ? (Exclamations sur les travées de l’UMP.) Il ne serait pas mauvais de se poser des questions sur un certain nombre de décisions fiscales prises pendant cette période.
Face à cette situation d’urgence dans laquelle nous nous trouvons, la préconisation du Gouvernement est d’augmenter le taux de TVA sur les produits jugés globalement de première nécessité, que tout un chacun peut consommer, mais qui sont consommés de façon beaucoup plus significative par les ménages modestes.
À cet égard, je tiens à dire que les choix faits en matière de TVA vont pénaliser plus lourdement nos concitoyens les moins aisés, puisque, chacun le sait, les impôts indirects représentent 11 % du budget d’un ménage du premier décile, contre 3 % pour un foyer fiscal relevant du dernier décile.
Telle est la situation résultant des arbitrages du Gouvernement pour combler le trou des finances publiques, provoqué par des décisions malheureuses prises en matière fiscale. Ce sont les ménages les plus pauvres qui vont être sollicités pour payer.
Pour terminer mon propos, je voudrais rapprocher deux chiffres, ou plutôt utiliser le même chiffre pour comparer deux mesures.
Nous avons voté ici même, il y a quelques mois, une baisse des ponctions au titre de l’ISF. Les redevables de ce dernier ont vu leur impôt allégé de 1,9 milliard d’euros. (M. Alain Gournac s’exclame.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Entièrement payés par d’autres assujettis à l’ISF !
M. François Marc. Mes chers collègues, combien va rapporter cette hausse de TVA supportée par les plus modestes ? Elle permettra de récolter une somme équivalente, comprise entre 1,8 milliard et 1,9 milliard d’euros !
Autrement dit, en cette période de Noël, donc de cadeaux, on s’aperçoit que la politique du Gouvernement, une fois ajoutées toutes les décisions prises depuis quatre mois, aura consisté à alléger de 1,9 milliard d’euros la charge fiscale des plus riches…
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est faux !
M. François Marc. … et à faire supporter aux plus modestes une charge fiscale supplémentaire du même montant, au travers de la hausse du taux réduit de TVA.
M. Francis Delattre. Vous ne savez même plus ce qu’est un pauvre !
M. François Marc. Mes chers collègues, voilà où nous mènent les arbitrages du Gouvernement en matière fiscale ! (Protestations sur les travées de l’UMP.)
C’est tout à fait injuste, inégalitaire et, partant, inacceptable ! Je compte sur Mme la rapporteure générale pour nous proposer des solutions de nature à remédier à de telles inégalités. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV et du groupe CRC, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 3 est présenté par Mme Bricq, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° 83 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure générale, pour présenter l’amendement n° 3.
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Il s’agit d’un amendement de suppression.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Évidemment !
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. François Marc est revenu sur l’iniquité fiscale caractérisant la politique gouvernementale des cinq dernières années.
Monsieur le président de la commission des finances, cet amendement de suppression prouve justement que nous regardons l’avenir.
Cette hausse du taux réduit de TVA lève un tabou, puisque, jusqu’à présent, vous aviez refusé toute mesure généralisée. Or celle-là en est une, qui frappera plus durement ceux du bas de l’échelle que ceux du haut.
Cette décision est surtout le signe avant-coureur de ce qui pourrait se passer dans un proche avenir. J’ai bien étudié les travaux de l’UMP : …
M. Francis Delattre. Très bien !
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. … à défaut d’employer le terme de TVA sociale, sans doute par crainte de rejet, ce parti utilise des circonvolutions pour qualifier ses projets en la matière. Mais qu’on l’appelle « TVA sociale », « TVA emploi » ou « TVA anti-délocalisations », le principe est le même et ne laisse pas de nous inquiéter, surtout quand je vois que la proposition aujourd’hui la plus achevée et structurée est celle qui est présentée par le MEDEF.
À l’évidence, si vous augmentez la TVA, vous le ferez de façon très significative, au moins de 4 points, comme le recommande le MEDEF, pour alléger les charges patronales pesant sur le coût du travail. Notre projet fiscal est différent.
M. Francis Delattre. C’est pourtant ce qu’a fait le SPD allemand !
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Nous sommes en France, monsieur Delattre !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il faut regarder ce qui se passe ailleurs !
M. Francis Delattre. Que proposez-vous ?
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. Le moteur de la consommation est essentiel. Alors qu’une récession s’annonce en 2012, voire en 2013, que notre taux de chômage s’élève à 10 %, on y réfléchit à deux fois avant d’avancer dans cette voie.
De façon plus pragmatique, nous constatons que beaucoup d’amendements de nos collègues, de tous les groupes – je peux vous en faire le recensement, si vous le souhaitez –,…
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. On peut en faire l’économie ! Chaque corporation passe au guichet !
Mme Nicole Bricq, rapporteure générale de la commission des finances. … visent à exonérer de cette hausse un certain nombre de secteurs, de services, bref, un certain nombre d’intérêts catégoriels !
Nous aurons donc des demandes reconventionnelles. Le Gouvernement lui-même, au travers des amendements nos 203 et 204, tend à revenir, pour certains biens ou services, sur la mesure qu’il a instaurée voilà quelques semaines.
Si je résume, l’affaire est donc mal engagée, tant pour des motifs de philosophie fiscale opposant la gauche et la droite que pour des raisons de politique macroéconomique.
De surcroît, le Gouvernement sera amené à accepter des demandes catégorielles d’exonération.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, j’ajoute un dernier élément auquel vous ne pouvez qu’être sensible. Dans certains secteurs économiques, les assujettis à la TVA devront tenir une double comptabilité pour faire le départ entre les ventes à emporter et les ventes sur place. Cette réforme aura certainement du mal à passer chez les commerçants, notamment les petits.
Nous souhaitons donc supprimer cet article 11, pour clarifier le débat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste-EELV.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour présenter l'amendement n° 83.
Mme Marie-France Beaufils. Le groupe CRC a exprimé son opposition de fond et de principe à la hausse du taux réduit de la TVA, lors de la discussion générale.
Le Gouvernement propose la création d’un nouveau taux réduit de 7 %, qui a d’ailleurs existé dans le passé, touchant un certain nombre de biens et de services aujourd’hui soumis au taux de 5,5 %.
Cette hausse programmée de la fiscalité indirecte est l’exemple même de la mesure injuste sur le plan social et inefficace, dans un contexte économique déjà largement marqué par la récession.
La philosophie générale du présent projet de loi de finances rectificative est de solliciter trois catégories d’impôt.
En premier lieu, le texte touche la fiscalité indirecte, avec cette hausse de la TVA, censée apporter 1,9 milliard d’euros aux comptes publics. J’appuie totalement les propos de François Marc, cette somme est d’un montant équivalant à celui que représente l’allégement de l’ISF décidé en cours d’année.
En deuxième lieu, il prévoit le gel du barème de l’impôt sur le revenu, qui va dégager 1,75 milliard de recettes en 2012, deux fois plus en 2013 – si, toutefois, vous étiez en mesure de poursuivre votre politique –, sans compter les économies réalisées sur les droits connexes. À cet égard, je vous rappelle, comme nous l’avons précisé hier lors de la discussion générale, que l’impact de cette mesure, en termes, notamment, de taxe d’habitation ou de prestations sous conditions de ressources telles que les allocations de logement, portera directement sur les populations les plus modestes.
En troisième lieu, la hausse, au demeurant modique et plus faible que celle de 1995, de l’impôt sur les sociétés s’élèvera à 1,1 milliard d’euros.
Cette règle des trois tiers est appliquée de manière très inégale, au détriment des familles. À l’évidence, ce sont les ménages qui vont ainsi être les plus sollicités pour le redressement des comptes publics. Le partage de la charge fiscale nouvelle s’avère donc particulièrement inégal et nous ne pouvons l’accepter, surtout que les revenus les plus élevés sont simplement égratignés.
Vous le savez fort bien, la hausse de la TVA est une hausse régressive, d’autant que les biens et services à 5,5 % passant à 7 % sont souvent plutôt consommés par les plus modestes. Cette mesure ne peut par conséquent correspondre aux exigences de justice fiscale et sociale qui sont les nôtres. La seule vraie justice en la matière résulte de l’impôt progressif, en particulier de l’impôt sur le revenu.
Nos collègues de la majorité gouvernementale demandaient tout à l’heure ce que nous proposions. Je leur rappellerai que, pendant la discussion du projet de loi de finances initial, nous avons largement présenté des propositions montrant que d’autres solutions fiscales sont possibles. Elles ont été chiffrées, le ministère de l’économie et des finances a évoqué un montant de 29 milliards d’euros.
M. Francis Delattre. Vingt milliards d’euros de plus sur les entreprises !
Mme Marie-France Beaufils. J’ai bien entendu le Gouvernement, mais j’ai aussi écouté M. Borloo, ce matin, sur France Inter… Comme nous, il fait le constat que les sociétés financées au moyen du leveraged buy-out, le LBO, pourraient mieux contribuer au titre de l’impôt sur les sociétés. Je trouve tout de même assez remarquable que des personnalités annonçant vouloir soutenir le Président de la République, s’il se représente, fassent la même analyse que nous !
Or la limitation de l’avantage fiscal lié aux opérations de type LBO est la mesure phare que nous avons proposée dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2012 : son application rapporterait à l’État presque 20 milliards d’euros de recettes supplémentaires !