M. le président. L'amendement n° 172 rectifié, présenté par MM. Hérisson et Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 21
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Tout fournisseur de services proposant une offre de services comprenant un terminal est tenu d'informer le consommateur, d'une part, sur le prix du terminal et, d'autre part, sur le prix des services.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 118 rectifié ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Les auteurs de l’amendement soutiennent que le découplage obligatoire des offres de terminaux et de services serait contraire au droit communautaire, en particulier à la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales.
En effet, cette directive interdit aux États membres d’édicter, dans leur droit, des interdictions générales et préventives visant les transactions commerciales. Or, la disposition introduite sur le découplage n’a pas un tel caractère, puisqu’elle est circonstanciée et cible spécifiquement le marché des communications électroniques mobiles.
Par ailleurs, cette mesure nous semble indolore pour les opérateurs, car la pratique du découplage est déjà largement répandue. Elle permet d’apporter plus de transparence sur les prix réels des terminaux et des services tout en maintenant la possibilité de proposer des abonnements de vingt-quatre mois.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Le Gouvernement est favorable à cet amendement parce que l’imposition du découplage ne peut viser que des offres identifiées sur le fondement d’un examen approfondi démontrant le caractère déloyal d’une pratique particulière de couplage d’un opérateur.
De surcroît, ce dispositif, et c’est pourquoi, madame Lamure, vous avez raison de vouloir le supprimer, n’est pas nécessaire. En effet, les évolutions récentes du marché montrent que la quasi-totalité des opérateurs, notamment les grands opérateurs de réseaux, proposent systématiquement une offre découplée pour chaque offre couplée. Cela nous ramène au débat que nous avons eu sur les durées d’abonnement : vingt-quatre mois, douze mois ou sans engagement. Il y a, d’un côté, ceux qui souhaitent, comme le prévoit cet amendement, préserver la liberté des consommateurs, leur permettre de choisir entre les différentes solutions qui leur sont offertes, et, de l’autre côté, ceux qui veulent priver les consommateurs de cette liberté.
M. Gérard Cornu. La contrainte !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Chacun le sait, un certain nombre de consommateurs préfèrent, pour des raisons de simplicité, avoir des offres couplées. Lorsqu’un opérateur propose des offres couplées et des offres découplées, les consommateurs peuvent choisir celles qu’ils souhaitent.
L’interdiction de proposer des offres couplées a été adoptée en commission. Le présent amendement vise à revenir sur cette décision. Je considère pour ma part qu’il est beaucoup plus sage de laisser la liberté aux consommateurs.
M. le président. La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour explication de vote.
Mme Élisabeth Lamure. Dans la pratique, ces dispositions n’apportent rien aux consommateurs puisque l’offre existe déjà ; elles ne contraignent pas non plus l’opérateur puisqu’il propose déjà ces offres. En fait, elles ne font qu’alourdir le texte.
M. Gérard Cornu. Oh là là !
M. le président. L'amendement n° 117 rectifié, présenté par MM. Hérisson, Cornu et César, Mme Lamure et M. Houel, est ainsi libellé :
Alinéa 32
Rétablir ainsi cet alinéa :
« 2° D’informer le consommateur, au moins une fois par an, qu’il se tient à sa disposition pour lui indiquer si, pour une consommation identique de services de communications électroniques, une offre qu’il commercialise serait plus adaptée à ses besoins et lui préciser les conditions de cette offre ; »
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Cet amendement vise à rétablir l’information annuelle du consommateur sur la possibilité qui lui est offerte d’interroger son opérateur pour savoir si une offre plus adaptée à sa consommation est disponible.
Le projet de loi initial avait introduit l’obligation pour les opérateurs d’informer annuellement leurs clients de l’existence d’offres plus adaptées à leur consommation.
L’Assemblée nationale a amélioré ce dispositif afin d’éviter tout risque qu’il puisse se traduire par des démarches trop intrusives de la part de certains opérateurs. Le dispositif modifié avait une vocation d’information. Il permettait au consommateur de bénéficier, s’il le souhaitait, d’un conseil personnalisé.
Il est donc proposé de rétablir cette disposition, qui permet une meilleure gestion par les consommateurs de leurs dépenses de communications électroniques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cet amendement vise à revenir sur les travaux de la commission et à rétablir le texte de l’Assemblée nationale qui oblige l’opérateur à informer régulièrement ses abonnés que des offres plus adaptées à leur consommation sont disponibles.
Nous avions supprimé ce dispositif en commission au profit de dispositions donnant compétence à l’ARCEP de labelliser des sites de comparaisons tarifaires des offres de téléphonie mobile.
Cette mesure nous semble, en effet, offrir davantage de choix et de transparence pour le consommateur, et reposer sur sa seule initiative. De plus, elle ne l’oblige pas à entrer en contact avec son opérateur, évitant ainsi d’être soumis à une quelconque pression commerciale.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Le Gouvernement est très favorable à cet amendement.
Les amendements se succèdent et montrent la déconnexion totale de la majorité sénatoriale de la réalité que vivent les consommateurs,…
M. Gérard Cornu. Oui !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. … qu’il s’agisse des durées d’abonnement – vingt-quatre mois, douze mois ou sans engagement – ou des dispositions sur le découplage que proposait de supprimer M. Cornu.
Maintenant, vous souhaitez supprimer le conseil personnalisé qui pourtant, nous l’avons constaté lors de la préparation du texte, ne plaît pas aux opérateurs.
En effet, le dispositif du conseil personnalisé obligatoire contraint l’opérateur à informer son abonné afin de limiter les cas où l’offre est soit surdimensionnée – lorsque le consommateur paie des minutes de communication qu’il n’utilise pas –, soit sous-dimensionnée – quand le consommateur paie une partie importante de ces minutes hors forfait.
Je le rappelle une nouvelle fois, nous avons préparé ce texte loin des idéologies (Exclamations sur les travées du groupe socialiste-EELV.), mais j’ai l’impression que l’on y revient malheureusement à grande vitesse.
Mme Laurence Rossignol. Ce sont toujours les autres qui font de l’idéologie !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Nous sommes partis des données du baromètre de la DGCCRF – Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – et des plaintes des consommateurs. Tout le monde connaît quelqu’un qui a, pendant de nombreux mois, payé une facture de téléphone pour un forfait trop important dont il n’avait pas le besoin.
Le conseil personnalisé, que vous refusez, permet précisément à l’opérateur d’informer le consommateur sur l’existence d’une offre moins onéreuse, plus adaptée à sa consommation. Le conseil personnalisé est le type même de la mesure dont l’objet est de reprendre le dessus sur les dépenses contraintes.
Le poids du budget consacré à la téléphonie est responsable de la diminution du reste à vivre des ménages, alors même que – tous les chiffres le montrent – le pouvoir d’achat augmente. Veuillez m’excuser si je me montre virulent, mais la suppression du conseil personnalisé est vraiment à côté des réalités que vivent les consommateurs.
M. Gérard Cornu. Complètement !
Mme Évelyne Didier. Mais nous y allons !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. … vous pourriez voir les situations dans lesquelles se trouvent certaines familles…
M. Charles Revet. Vous avez raison !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. … qui paient des factures pour un abonnement ne correspondant pas à leur mode de consommation. Avec ce dispositif, nous sommes à côté de la plaque, si vous me permettez cette expression un peu triviale.
Madame Lamure, votre amendement est un amendement de bon sens. Il colle à la réalité de ce que vivent les consommateurs. Je regrette vraiment que, pour une raison qui m’échappe, peut-être par idéologie,…
M. Roland Courteau. Arrêtez !
M. Maurice Vincent. Ça suffit !
M. Roland Courteau. Vous vous répétez !
M. Claude Bérit-Débat. Cela devient pénible !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Je voudrais bien que vous m’expliquiez les raisons de fond qui vous conduisent à refuser de mettre en place le conseil personnalisé, car ce faisant, vous n’allez pas dans l’intérêt du consommateur. Or, ce texte protège les consommateurs.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Monsieur le secrétaire d’État, je ne suis pas sûr que vous soyez aussi près de la réalité que vous le prétendez.
Nous avons entendu tout à l’heure le témoignage de notre collègue Philippe Kaltenbach,…
Un sénateur de l’UMP. Ce n’était pas Philippe Kaltenbach !
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. … Gilbert Roger, veux-je dire.
M. Philippe Dallier. Ils ne se reconnaissent plus ! (Sourires sur les travées de l’UMP. – Mme Nathalie Goulet sourit également.)
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Comment imaginer qu’un opérateur se tire une balle dans le pied en offrant à un client un nouvel abonnement qui lui serait défavorable ? Ce que vous proposez, c’est un conflit d’intérêt.
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Par les temps qui courent, mieux vaut faire attention. (M. Gérard Cornu s’exclame.) Écoutez, monsieur Cornu, vous n’avez de cesse de politiser notre discussion. Je n’ai jamais été ingrat sur un terrain et je vous assure que je n’ai pas besoin d’arbitre pour régler ces problèmes.
M. Gérard Cornu. Oh là là !
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. Vous connaissez mon « tropisme » pour les autorités indépendantes… Vous savez que je suis debout sur les freins dès qu’il s’agit de leur prétendue indépendance. Je préfère confier à l’ARCEP le soin d’établir des comparaisons, indépendantes,…
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Daniel Raoul, président de la commission de l'économie. … que pourront consulter des personnes qui sont parfois démunies face aux attrape-nigauds, aux arnaques à l’abonnement.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Monsieur le président de la commission, si, l’opérateur va dans certains cas aller contre son intérêt, car la loi l’y oblige.
L’objet de l’amendement n° 117 rectifié vise précisément à inscrire cette obligation dans la loi en insérant dans l’article 3 un alinéa ainsi rédigé : « D’informer le consommateur, au moins une fois par an, qu’il se tient à sa disposition pour lui indiquer si, pour une consommation identique de services de communications électroniques, une offre qu’il commercialise serait plus adaptée à ses besoins et lui préciser les conditions de cette offre ; ».
L’opérateur a donc l’obligation d’aller vers le consommateur et de l’informer si, en fonction de sa consommation, il peut lui proposer une offre plus adaptée.
Ce n’est pas compliqué : si l’on inscrit dans la loi l’obligation pour l’opérateur d’aller vers le consommateur, le problème est réglé ; dans le cas contraire, on passe à côté de la réalité de ce vivent les consommateurs.
M. le président. La parole est à M. Gérard Cornu, pour explication de vote.
M. Gérard Cornu. Monsieur le président de la commission, vous n’êtes pas sans connaître la loi Chatel, puisque vous l’avez suivie, et vous savez très bien que le cas cité tout à l’heure ne peut pas se produire. (M. le président de la commission de l'économie s’exclame.) Vous m’avez interpellé, permettez-moi de vous répondre !
En matière de télécommunications, vous voulez restreindre la liberté du consommateur. Vous voulez qu’il achète plus cher son téléphone portable puisque vous limitez la durée de l’abonnement à douze mois. Maintenant, vous refusez de l’informer. (Signes de dénégation sur plusieurs travées du groupe socialiste-EELV.) Tout de même !
Monsieur le rapporteur, je n’ai toujours pas compris pourquoi vous refusez cet amendement, mais peut-être allez-vous m’apporter des explications supplémentaires. Pour le moment, j’ai vraiment l’impression que, sur des sujets comme celui-ci où l’on souhaite améliorer l’information du consommateur, vous voulez détricoter ce qui a été bien fait à l'Assemblée nationale. Dès que nous proposons de rétablir une disposition sensée qui a été adoptée par l’Assemblée nationale, vous votez contre. Pourtant, nous aurions tous intérêt à accroître l’information du consommateur.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. Je suis, moi aussi, favorable à cet amendement, pour une raison très simple : certains opérateurs le font déjà ! Quand vous dépassez votre forfait, ce qui peut arriver par exemple quand vous voyagez à l’étranger, comme c’est assez souvent mon cas, votre opérateur vous informe, par texto ou appel téléphonique, du dépassement. Régulièrement, vous recevez aussi des propositions pour ajuster votre forfait.
Pour en revenir au cas de notre collègue Roger, s’il s’était adressé à la questure comme tout le monde, cela ne lui serait pas arrivé !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Notre idée est tout de même assez simple : pour nous, l’ARCEP, qui est un organisme impartial, est plus à même d’encadrer ces comparaisons que les opérateurs eux-mêmes. Cela me semble frappé au coin du bon sens !
M. le secrétaire d’État a évoqué une obligation légale. En cas de non-application de cette disposition législative, les opérateurs seront-ils sanctionnés ?
Mme Évelyne Didier. Même le Gouvernement n’applique pas la loi !
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Monsieur Cornu, vous cherchez à nous provoquer en disant que, avec la loi que nous nous apprêtons à voter, les consommateurs payeront plus chers leurs forfaits.
M. Gérard Cornu. C’est la réalité !
M. Claude Bérit-Débat. Vingt-quatre mois ou douze mois ? Nous sommes en présence d’un système de marché : vous savez très bien que tous les opérateurs proposeront demain des offres sur douze mois. Avec la concurrence, vous verrez que les tarifs baisseront.
M. Gérard Cornu. On verra !
M. Claude Bérit-Débat. Comme vous l’avez fait tout au long de l’examen des amendements en commission, vous n’arrêtez pas de nous casser les oreilles en disant : « Concurrence ! Concurrence ! Concurrence ! C’est le pouvoir d’achat ! »
M. Gérard Cornu. On dit simplement la vérité !
M. Claude Bérit-Débat. Eh bien, justement, nous donnons la possibilité à des opérateurs de proposer des offres qui feront baisser les prix. Alors ne vous dédisez pas et essayez d’être cohérent avec vous-même ! (M. Gérard Cornu s’esclaffe.)
Par ailleurs, monsieur Cornu, si je dois choisir entre un opérateur et l’ARCEP, qui est un organisme indépendant, pour me faire conseiller, je préfère l’ARCEP, comme M. le rapporteur.
Voilà pourquoi nous avons proposé la durée de douze mois et pourquoi nous ne voulons pas aujourd'hui voter cet amendement. Nous souhaitons nous en tenir au texte que nous avons coécrit, après avoir entendu un certain nombre de consommateurs sur cette question.
Arrêtez donc de chercher à nous culpabiliser ! Tout à l’heure, vous nous accusiez d’être déjà entrés en campagne électorale. Si demain vous dites que c’est à cause de la majorité de gauche au Sénat qu’on paye plus cher, nous démontrerons que c’est tout le contraire !
M. Gérard Cornu. Ce sont les consommateurs qui jugent !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Mesdames, messieurs les sénateurs, sortons des questions de la campagne électorale !
M. Claude Bérit-Débat. C’est vous qui les avez évoquées, à plusieurs reprises !
M. Claude Bérit-Débat. Depuis le début de l’après-midi, cela a été dit !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Cela a peut-être été dit sur certaines travées, mais ne dites pas que je l’ai dit ! Je vous mets au défi de trouver dans le compte rendu de nos débats une parole de ma part sur ce thème.
Contrairement à ce que vous avez affirmé, monsieur le rapporteur, une sanction administrative – une amende de 3 000 euros à 15 000 euros par infraction – a bien été prévue, à l’article 10. Croyez-moi, ce système est bien plus efficace que de renvoyer le consommateur au comparateur de l’ARCEP.
Une obligation légale pèserait sur l’opérateur, qui serait obligé de proposer à son abonné, le cas échéant, des offres plus intéressantes. S’il ne respecte pas cette obligation ou s’il détourne le dispositif, il risque une sanction administrative. Croyez-moi, le consommateur est bien mieux protégé avec ce système qu’avec le dispositif dont vous avez parlé à l’instant. (Mme Samia Ghali s’exclame.)
Bien sûr, vous avez le droit de voter ce que vous voulez,...
M. Roland Courteau. Heureusement !
M. Claude Bérit-Débat. Et de l’assumer !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. … mais vous devez être bien conscients des différences entre les deux systèmes.
Vous proposez, pour votre part, un dispositif fondé sur l’ARCEP. Or, si cette instance de régulation maîtrise parfaitement les questions techniques relatives aux télécommunications, elle n’est pas spécialisée dans la défense des consommateurs. De surcroît, vous n’avez pas prévu de sanctions.
Nous avons prévu, de notre côté, dans le projet de loi un dispositif – vous avez voulu le supprimer et je n’ai toujours pas compris pourquoi – qui permet de protéger réellement les consommateurs en faisant peser sur l’opérateur une obligation dont le non-respect fait l’objet d’une sanction.
Mme Samia Ghali. Mais c’est impossible !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur, je vous demande simplement de m’expliquer pourquoi vous voulez supprimer ce dispositif.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Nous devrions peut-être nous arrêter là… Je vais juste prendre un dernier exemple : en tant que consommateur, je préfère m’informer sur les comparaisons de tarifs dans les revues 60 millions de consommateurs ou Que Choisir que dans les plaquettes comparatives distribuées par Leclerc ou Intermarché.
Mme Nathalie Goulet. Ce n’est pas incompatible !
Mme Catherine Procaccia. L’un n’empêche pas l’autre !
M. Alain Fauconnier, rapporteur. Cela me semble plus impartial. La comparaison entre notre dispositif et celui que vous proposez relève du même ordre d’idées.
M. Roland Courteau. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Alors que la libéralisation des télécommunications devait, selon certains, contribuer à améliorer la situation, je constate que les Français dépensent de plus en plus d’argent pour leurs communications. Il faut quasiment être polytechnicien afin de pouvoir comparer les offres. J’ai un mal fou à le faire et pourtant je ne crois pas être l’une des plus sottes !
Par ailleurs, il faut différencier ce qui procède d’une offre commerciale, c'est-à-dire d’un service volontairement offert par un prestataire comme Orange ou SFR à ses clients, et une obligation légale.
Pour ma part, j’ai reçu régulièrement d’Orange, qui a été mon prestataire avant que je ne devienne sénatrice, des propositions pour prendre un forfait moins cher, car le mien n’était pas adapté à mes besoins. Or, la plupart du temps, en contrepartie de telles propositions, la durée de l’abonnement est rallongée !
Mme Samia Ghali. Bien sûr !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je le comprends, car l’objectif est de me garder comme cliente. Quand on leur fait une telle offre, la plupart des consommateurs ne prennent pas le temps de la réflexion : ils ne voient que la baisse des tarifs qui leur est proposée et se réengagent. Que les prestataires proposent des offres pour améliorer leurs relations commerciales avec leurs clients, soit !
Si on instaure une obligation légale, il faut vérifier que l’information donnée est neutre et bien encadrée.
Mme Évelyne Didier. Effectivement !
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Sinon l’opérateur dira à ses clients qu’il les informe « conformément à la loi », et ces derniers penseront que l’information qui leur est donnée est forcément sûre.
Pour ma part, j’estime qu’il est bon d’inciter les opérateurs téléphoniques à respecter cette obligation, à condition que le cadre légal soit totalement balisé. Pour rendre le dispositif objectif, il n’existe à ce jour qu’un seul moyen : l’ARCEP, même si je reconnais que l’information n’est pour l’instant pas très lisible. Si un effort doit être fait, c’est pour rendre comparables les offres au travers des outils publics d’information des consommateurs.
Voilà la raison pour laquelle je ne crois pas que cet amendement soit positif : il fera naître beaucoup d’ambiguïté dans le dispositif et rendra l’État complice d’un système sans certitude que l’information donnée est totalement fiable et objective.
Mme Évelyne Didier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. J’ai fini par comprendre pourquoi vous êtes opposés à notre dispositif : vous confondez deux sujets.
Vous nous parlez de concurrence, de la manière de comparer les différentes offres des opérateurs, afin de déterminer quelle est la meilleure. Sur ce point, je vous le dis franchement : je n’ai rien contre un accès simplifié au comparateur de l’ARCEP. Mais ce n’est pas le sujet ! Nous parlons, nous, des opérateurs qui doivent proposer à leurs clients un abonnement mieux adapté à leur consommation. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.) Madame Lienemann, écoutez-moi.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Je vous écoute, monsieur le secrétaire d’État.
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. J’aurais pu ne pas débattre de cette question et vous indiquer simplement que le fait que vous refusiez cette disposition n’était pas très grave dans l’optique de la lecture à l’Assemblée nationale. Mais le sujet est trop important pour que je n’essaye pas de vous convaincre, car nous parlons là de consommateurs qui portent plainte ou qui saisissent la DGCCRF au sujet de dépenses contraintes. Car, vous l’avez très bien dit, les dépenses de téléphonie, qui n’existaient pas il y a quelques années, représentent aujourd'hui une part extrêmement importante du budget des ménages.
Notre objectif est d’éviter que certaines personnes ne soient obligées d’assumer mois après mois des factures liées à des forfaits téléphoniques qui ne correspondent pas à leurs besoins réels.
M. Gérard Cornu. Il faut les informer !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Nous voulons instituer une obligation pesant sur l’opérateur : il serait obligé de proposer à ses clients – nous ne sommes pas là dans la concurrence entre opérateurs – une offre qui corresponde mieux à leurs besoins. Par exemple, un client qui paye 150 euros par mois va se voir proposer, compte tenu de sa consommation régulière, de ne plus payer que 80 euros par mois : l’intérêt est direct pour le consommateur.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Oui, mais on prolonge son contrat !
Mme Samia Ghali. Si !
M. Frédéric Lefebvre, secrétaire d'État. Avec notre dispositif, ce n’est pas nécessairement le cas !
Vous vous placez dans le cas où un consommateur est en discussion avec son opérateur pour savoir s’il prolonge le contrat, sous l’empire de la législation actuelle. Or nous proposons de créer une obligation légale, qui n’existe donc pas pour le moment.
Nous voulons inventer un système qui oblige l’opérateur à aller vers son client pour lui proposer un abonnement mieux adapté à sa consommation réelle. De cette façon, des économies pourront être réalisées par les consommateurs, notamment les plus modestes, qui éviteront ainsi qu’une partie de leur reste à vivre ne soit captée par des dépenses de téléphonie. (Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.)
La solution la plus raisonnable serait de conserver la disposition que vous avez votée – elle ne me choque pas – concernant le comparateur de prix. Nous pouvons conserver le rôle de l’ARCEP si vous estimez que cet organisme est le mieux placé pour garantir une plus grande transparence. Nous sommes là dans le cas de la concurrence entre opérateurs pour connaître les offres les moins chères, comme le disait M. le rapporteur.
Nous proposons, pour notre part, de faire échapper un client qui a déjà un abonnement chez un opérateur à une « surfacturation » découlant d’un forfait qui ne correspondrait pas à ses besoins réels.
Si vous acceptiez l’amendement de Mme Lamure, nous pourrions avoir les deux systèmes, l’un pour comparer les offres des opérateurs et l’autre pour permettre au consommateur de reprendre la main.
Certains consommateurs modestes ont des forfaits inadaptés, avec parfois, vous le savez bien, deux ou trois abonnements par famille. D’après les commissions de surendettement, ces situations ont quelquefois des conséquences absolument dramatiques pour les consommateurs. Il serait vraiment dommage de se passer d’une disposition comme celle-là.
En tout cas, si vous ne votiez pas cet amendement, je demanderais évidemment à l'Assemblée nationale de rétablir cette disposition, avec d’autres d’ailleurs. Mais je tenais à prendre le temps de vous expliquer le dispositif car il me semblait que vous n’en aviez pas mesuré toute la portée. Je le répète, il s’agit non pas de faire jouer la concurrence entre opérateurs, mais d’éviter que les clients d’un opérateur ne payent des forfaits ne correspondant pas à leur consommation.
M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote.