Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, je vous prie d’excuser l’absence de Xavier Bertrand, qui se trouve actuellement à Mulhouse, aux côtés du Président de la République, pour les vœux au monde de la santé.
Les établissements d’aide à domicile entrent, comme tout établissement privé ou public occupant au moins vingt salariés, dans le champ de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés. Selon les données recueillies auprès de l’AGEFIPH, environ 350 établissements sont aujourd’hui concernés ; ils accueillent plus de 650 personnes handicapées.
Le Gouvernement a conscience des difficultés des associations d’aide à domicile que vous évoquez. Elles sont en effet communes à un certain nombre d’établissements, dès lors qu’ils sont situés sur des territoires qui ne correspondent pas à des bassins importants de population, ce qui est bien souvent le cas en milieu rural.
Les dispositions régissant l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés sont inspirées par la double volonté d’assurer l’égalité des chances entre ces personnes et les autres catégories de travailleurs et de permettre à toute personne handicapée qui est en mesure de travailler de trouver un emploi. L’insertion professionnelle des personnes handicapées est en effet l’une des priorités du Gouvernement.
Toutefois, afin de répondre aux préoccupations soulevées, la loi prévoit également, outre l’embauche directe de personnes présentant un handicap, quatre modalités pour permettre à ces entreprises d’acquitter partiellement ou totalement leur obligation d’emploi.
Premièrement, il est possible de conclure des contrats de fournitures, de sous-traitance ou de prestations de services avec des structures adaptées ou des structures du milieu de travail protégé. Selon les données fournies par l’AGEFIPH, les structures d’aide à domicile ont recours à cette modalité, mais de manière encore relativement peu importante.
Deuxièmement, l’accueil en stage de personnes handicapées est prévu.
Troisièmement, la conclusion ou l’application d’un accord de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement qui repose sur une approche pluriannuelle de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés négociée et maîtrisée à l’intérieur de l’entreprise est autorisée.
Quatrièmement, une contribution au Fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés géré par l’AGEFIPH peut être versée. Comme vous l’avez indiqué, cette contribution est modulée à la baisse pour les entreprises qui choisissent l’emploi direct et le maintien dans l’emploi de travailleurs handicapés, notamment les plus lourdement handicapés.
Ces différentes modalités ont pour objectif de prendre en considération la diversité des situations, notamment la spécificité des associations d’aide à domicile.
M. le président. La parole est à M. Daniel Laurent.
M. Daniel Laurent. Madame la ministre, je vous remercie de votre réponse, mais j’insiste !
En milieu rural, les quatre modalités que vous avez rappelées ne répondent pas aux problèmes des associations d’aide à domicile : d’une part, elles les pénalisent financièrement, comme vous l’avez souligné, et, d’autre part, il ne leur est pas toujours possible de recruter des personnes handicapées pouvant occuper les postes qui leur sont proposés. Cette difficulté, qui est réelle, mérite une attention toute particulière du Gouvernement.
recommandations de la cour des comptes relatives à la régulation de l'installation des médecins
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 1414, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
M. Hervé Maurey. Dans son dernier rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale remis au mois de septembre 2011, la Cour des Comptes déplore la redondance des aides accordées par l’État, les collectivités territoriales et l’assurance maladie en matière de lutte contre la désertification médicale. Elle souligne leur coût important et s’interroge sur leur efficacité.
En effet, alors que la France n’a jamais compté autant de médecins – plus de 216 000 –, des territoires entiers connaissent un dramatique phénomène de désertification médicale, qui touche particulièrement les territoires ruraux. Ainsi, le département de l’Eure dont je suis l’élu est le moins bien doté en termes de médecins, avec une densité de 101,2 médecins généralistes en exercice pour 100 000 habitants, dont plus d’un tiers sont âgés de plus de cinquante-cinq ans, contre 226,9 à Paris.
Les causes de ce phénomène, qui touche aussi certains quartiers périphériques de grandes agglomérations, sont multiples et connues : féminisation de la profession, baisse de l’intérêt pour l’exercice libéral, faible attractivité de la médecine générale, augmentation de la demande de soins,...
Cette situation est doublement inacceptable. D’une part, elle aggrave les inégalités dans l’accès aux soins entre nos concitoyens : selon le lieu où l’on habite, le droit à la santé n’est pas le même, ce qui est tout à fait contraire au pacte républicain de notre pays qui, justement, repose sur l’égalité. D’autre part, elle entraîne une surconsommation manifeste de soins dans les zones surmédicalisées. À ce titre, je m’étonne que le Président de la République, dans son discours de Bordeaux du 15 novembre dernier intitulé « Préservation de notre modèle social et lutte contre les fraudes à la sécurité sociale », n’ait pas évoqué ce sujet.
Dès le mois de mai 2009, lors de l’examen du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, j’ai défendu devant la Haute Assemblée des amendements visant, comme le recommande la Cour des comptes, à réguler l’installation des médecins. Force est de constater qu’ils n’ont été soutenus ni par la droite ni par la gauche, à quelques exceptions près...
Au mois d’avril 2011, lors de l’examen de la proposition de loi dite « Fourcade », j’ai rappelé ma conviction selon laquelle tenter de régler le problème de la désertification médicale uniquement par des mesures incitatives était une démarche coûteuse et inefficace.
La Cour des Comptes n’affirme pas autre chose quand elle souligne qu’« une action publique efficace en faveur d’une meilleure répartition géographique apparaît comme une exigence impérieuse ». C’est pourquoi elle recommande une révision de l’avenant n° 20 à la convention médicale pour, a minima, moduler la prise en charge des cotisations sociales des médecins, y compris ceux déjà installés, en fonction de leur répartition territoriale et plafonner les aides perçues.
Aussi, j’aimerais connaître le coût des mesures dites incitatives mises en place tant par l’État que par les collectivités territoriales ou par l’assurance maladie ainsi que leur retour sur investissement. Par ailleurs, je souhaiterais savoir quelles suites le Gouvernement entend donner à ce très intéressant rapport de la Cour des comptes.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, les solutions à apporter au problème de la démographie médicale sur le territoire, telles que les mesures incitatives existantes, l’augmentation depuis plusieurs années du numerus clausus et le rééquilibrage entre médecine générale et médecine de spécialité, ont été complétés par des mesures portant sur l’installation des praticiens libéraux.
Ainsi, en application de l’article 46 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, les missions régionales de santé ont été chargées de définir des zones différenciées en fonction de la densité des professionnels de santé, et non plus en fonction du nombre de zones déficitaires en professionnels de santé. Cela est de nature à permettre aux dispositifs conventionnels de s’appliquer dans les zones sous-dotées. Cette compétence est désormais exercée par les agences régionales de santé.
En ce qui concerne la régulation démographique des médecins libéraux, l’avenant n° 20 à la convention nationale médicale de 2005 prévoit un dispositif incitatif visant à encourager l’installation en exercice regroupé des médecins dans les zones très sous-dotées. Celui-ci prévoit une majoration de 20 % de l’activité des médecins dans ces zones. Selon les estimations de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés, cet avenant aurait permis l’installation de 773 médecins en zones déficitaires en 2010.
Ce dispositif a été repris avec quelques aménagements par la nouvelle convention médicale de 2011, approuvée par arrêté du 22 septembre 2011, qui prévoit deux nouvelles options : la première, dite « démographie territoriale », a pour objectif d’encourager les médecins à s’installer, à maintenir leur cabinet de groupe ou à être organisés en pôles dans les zones à faible densité en professionnels de santé pendant trois ans ; la seconde, dite « santé solidarité territoriale », tend à inciter les médecins qui n’exercent pas en zones sous-dotées à venir prêter main-forte aux médecins y exerçant, au moins vingt-huit jours par an.
Les médecins qui adhéreront à la première option percevront une aide à l’investissement d’un montant de 5 000 euros par an pour une installation au sein d’un groupe et d’un montant de 2 500 euros par an si elle s’effectue au sein d’un pôle. Par ailleurs, ils recevront une aide proportionnelle à leur activité dans la zone sous-dotée : 10 %, dans la limite de 20 000 euros, s’ils exercent au sein d’un groupe, et 5 %, dans la limite de 10 000 euros, si c’est dans le cadre d’un pôle.
Les médecins qui adhéreront à la seconde option bénéficieront d’une rémunération complémentaire d’un montant de 10 % de leur activité dans la zone sous-dotée, dans la limite de 20 000 euros, et de la prise en charge des frais de déplacement.
Il est vrai que les options « démographie territoriale » et « santé solidarité territoriale » ne comportent pas de modulation de la prise en charge des cotisations pour les médecins qui s’installent en zone sous-dotée, comme vous l’indiquez dans votre question. Je rappelle que ces mesures relèvent de la seule compétence des partenaires conventionnels, qui n’ont pas jugé opportun de mettre en place une telle modulation.
Enfin, des contrats d’engagement de service public pour les étudiants et internes en médecine ont été créés en 2009. Ils prévoient le versement à leur profit d’une allocation mensuelle de 1 200 euros jusqu’à la fin des études médicales en contrepartie de leur engagement à exercer dans une zone où l’offre de soins est insuffisante à l’issue de leurs études. Pour assurer la montée en charge de ce dispositif, 400 nouveaux contrats ont été mis en place à la rentrée 2011.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey.
M. Hervé Maurey. Madame la ministre, vous avez rappelé l’attachement du Gouvernement aux mesures incitatives en décrivant les dispositifs mis en place à cet effet.
Pour ma part, je pense que de telles mesures ne suffiront pas à régler les problèmes de démographie médicale que connaît aujourd’hui notre pays. Je suis sûr que, dans quelques années, nous serons conduits à prendre des décisions plus fortes, la situation ne cessant de se dégrader.
La Cour des comptes rappelle d’ailleurs qu’un certain nombre de pays, comme l’Allemagne, l’Autriche, l’Angleterre ou la Suisse ont déjà fait ce choix. Son rapport précise également que la négociation qui prévoit la régulation de l’installation des infirmières donne d’ores et déjà des résultats positifs.
À défaut de vous convaincre, ce à quoi je ne m’attendais pas ce matin, j’aurais au moins aimé avoir une réponse à une question purement statistique, factuelle : puis-je enfin savoir quel est le coût total des mesures incitatives mises en place par l’État, les collectivités et la Caisse nationale d’assurance maladie ? Malheureusement, cette interrogation semble taboue, couverte par je ne sais quelle loi du silence. Je la réitère donc !
diminution des moyens attribués à l'ap-hp et devenir de son patrimoine
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, auteur de la question n° 1542, adressée à M. le ministre du travail, de l’emploi et de la santé.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ma question porte sur la situation très préoccupante que connaît l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l’AP-HP.
Dès le mois d’octobre, j’avais alerté M. Xavier Bertrand sur la situation particulière de l’hôpital Sainte-Périne, où le personnel, à bout, s’était mis en grève. À cet égard, je rappelle que les employés hospitaliers n’ont que le droit de se déclarer en grève, sans cesser le travail dans les faits.
Cet établissement est un hôpital gériatrique où se trouvent beaucoup de personnes en situation de dépendance. Le Gouvernement ne cesse de proclamer son intérêt pour cette question, sans pour autant que ses déclarations soient suivies d’effets.
En l’espèce, le nombre de personnels soignants a été divisé par deux en quelques années. Il manque aujourd’hui vingt infirmières ! Les personnels considèrent que la vie de ces personnes âgées dépendantes est en danger, compte tenu du manque d’effectifs. Sachez par ailleurs que des souris courent dans les chambres des patients.
Je précise que je n’ai toujours pas reçu de réponse de M. le ministre.
Plus globalement, à l’échelle de l’AP-HP, une somme de 35,9 millions d’euros provenant de l’assurance maladie est gelée, ce qui grève les missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation, les MIGAC.
Les familles sont obligées de se présenter aux urgences en raison de la décision prise par l’agence régionale de santé de l’Île-de-France de fermer les nuitées du SAMU social. Les missions du service public de santé sont pourtant de prendre en charge toutes les personnes, a fortiori les plus pauvres.
Le budget de l’AP-HP a par ailleurs subi une coupe de 40 millions d’euros pour la prise en charge des personnes étrangères bénéficiaires de l’aide médicale de l’État, l’AME, ce qui n’empêche pas les personnes en grandes difficultés de se rendre aux urgences des hôpitaux.
La convergence tarifaire T2A intra et extra-sectorielle, le taux du coefficient de transition, la baisse des tarifs de remboursement et la péréquation régionale plombent toutes les prévisions d’équilibre budgétaire de l’AP-HP.
Cet étranglement se traduira encore par la suppression de 1 000 emplois en 2012, alors même que cette institution souffre d’un manque d’effectif chronique. L’exemple de Sainte-Périne peut donc plus ou moins se décliner dans de nombreux autres établissements.
On en est au quatrième plan d’économies. À chaque fois, il en résulte la suppression de 1 000 emplois supplémentaires par an, le tout dans un contexte où 30 % de la population avoue renoncer aux soins, faute de moyens et de structures d’accueil dédiées.
Par ailleurs, le sous-financement budgétaire de l’AP-HP l’a conduite à un taux d’endettement de 35 %. Derrière ce pourcentage, c’est la santé des gens qui est dramatiquement hypothéquée.
Pour toutes ces raisons, l’État doit faire face à ses obligations en matière de santé publique. L’AP-HP, qui accueille sept millions de patients dans trente-huit hôpitaux à Paris et dans le reste de l’Île-de-France, était réputée, non seulement pour ses performances, ce qui est certes toujours le cas, mais également pour ses capacités d’accueil des populations, sans distinction de fortune. Or, sur ce dernier point, permettez-moi de tirer la sonnette d’alarme.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Xavier Bertrand, retenu à Mulhouse, auprès du Président de la République, pour les vœux au monde de la santé.
En préambule, je souhaite rappeler quelques éléments de contexte.
L’activité d’hospitalisation de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris augmente faiblement, dans un environnement très concurrentiel. Le déficit de cette structure est important et a tendance, contrairement à la plupart des autres centres hospitaliers universitaires, à se creuser. Il faut cependant préciser que les recettes de l’AP-HP ont augmenté de façon continue entre 2008 et 2011, de plus de 3 % pour les recettes liées à l’assurance maladie et de plus de 8,3 % pour les autres produits de l’activité hospitalière, dont l’aide médicale de l’État.
Ce dernier dispositif a subi non pas une coupe budgétaire, comme vous le sous-entendez, mais les conséquences de la nouvelle tarification des dépenses facturées par les hôpitaux dans ce cadre. Le rapport remis à la fin de 2010 par l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, sur l’AME montrait de grandes disparités dans sa tarification et préconisait l’application d’une tarification sur la base de la T2A. Une initiative parlementaire a conduit à l’adoption de cette tarification lors d’un collectif budgétaire adopté à l’été 2011, qui entre en vigueur en 2012.
Le Gouvernement a proposé, lors des débats, de tenir compte de la précarité des personnes bénéficiant de l’aide médicale de l’État et des surcoûts qu’elle représente pour les hôpitaux. Sur sa proposition, le Parlement a prévu le principe d’une majoration des tarifs de la T2A, de nature à diminuer les pertes des hôpitaux. Un arrêté l’a fixée à 30 %.
Le Gouvernement a donc trouvé une solution équilibrée, conciliant une tarification de droit commun, tout en tenant compte de la spécificité des bénéficiaires de l’aide médicale de l’État et des coûts supplémentaires qu’ils entraînent pour les hôpitaux.
Concernant les hôpitaux qui en subissent le plus les conséquences, notamment l’AP-HP, le ministre de la santé a demandé à ses services d’étudier les possibilités de compensation, en lien avec les fédérations hospitalières.
S’agissant des crédits des missions d’intérêt général et à l’aide à la contractualisation, leur gel partiel a permis la maîtrise de l’Objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM. Le ministre de la santé tient à rappeler qu’il y a eu un dégel de 100 millions d’euros en fin d’exercice 2011, dont 9,2 millions d’euros accordés à l’AP-HP.
D’une manière générale, le regroupement engagé dès 2009 des trente-huit hôpitaux en douze groupes hospitaliers est clairement la mesure centrale de la modernisation de l’offre de soins de l’AP-HP et de l’amélioration de sa performance. C’est dans ce cadre que doivent se poursuivre les efforts de réorganisation d’activités et de mutualisation des ressources.
Enfin, le contexte financier actuel impose également une meilleure valorisation du patrimoine de l’AP-HP, qui compte parmi les plus importants de France. Mieux utiliser ses biens immobiliers revient à repenser son organisation pour agir davantage, dans des espaces optimisés. En outre la cession ou la location d’actifs permet à l’AP-HP de dégager des moyens pour financer ses futurs investissements, au bénéfice des conditions de travail et de l’accueil des patients. L’AP-HP s’est engagée dans cette politique, qui rejoint celle de l’État à l’égard de son propre patrimoine.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Borvo Cohen-Seat.
Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Madame la ministre, vous m’avez seulement répondu sur l’un des aspects de ma question. En revanche, vous ne dites rien sur la pénurie d’emplois.
La perpétuation des fonctions de l’AP-HP est aujourd'hui en grand danger. Vous avez parlé de la forte concurrence qui règne dans ce secteur. Les personnes qui ne peuvent avoir accès à l’hôpital ont bien évidemment tendance à aller se faire soigner dans des cliniques. Cela fait le bonheur de la Générale de santé, qui, chacun le sait, rachète, notamment à Paris, la plupart des cliniques et des établissements mutualistes, lesquels pratiquent allégrement les dépassements d’honoraires. Le libre choix existe bel et bien à Paris pour ceux qui ont de l’argent !
Vous avez évoqué la vente du patrimoine. Or le personnel est très inquiet. Si l’État brade le patrimoine public de la France pour payer les dettes, l’AP-HP, quant à elle, vend non seulement des hôpitaux, mais aussi des logements proches des établissements hospitaliers. Pourtant, il est très important de pouvoir loger les personnels hospitaliers à des loyers accessibles, c'est-à-dire publics, si l’on veut leur donner la possibilité, à eux qui ont de faibles revenus et des horaires décalés, d’avoir, comme cela est souhaitable, une vie familiale.
Vous savez enfin que ces personnels ont du mal à prendre leurs jours de RTT, alors qu’ils en auraient bien besoin, et qu’ils cumulent, de ce fait, 1,2 million de jours non pris ! Le fait que l’AP-HP se sépare de logements destinés aux personnels, dont la gestion – je vous l’accorde – n’est pas toujours très bonne, ajoute encore aux difficultés du personnel, alors que, au contraire, l’AP-HP, aidée par l’État, devrait favoriser le logement des personnels à horaires décalés à proximité des établissements.
retraite des français ayant travaillé dans plusieurs pays
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia, auteur de la question n° 1451, adressée à M. le ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
M. Robert del Picchia. Je voudrais appeler l’attention sur la situation de nos compatriotes qui ont fait une partie de leur carrière à l’étranger, dans deux ou plusieurs pays, c'est-à-dire soit dans un pays européen et dans un pays avec lequel la France a signé une convention bilatérale de sécurité sociale, soit dans deux pays avec lesquels la France a signé une telle convention. Pour eux, il s’avère que, au moment de la liquidation de la retraite, la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV, ne prend en considération qu’un seul de ces pays.
Prenons l’exemple d’une personne qui a commencé sa carrière en France pendant deux ans avant de partir travailler vingt ans en Belgique, puis vingt ans aux États-Unis. Sur ces quarante-deux années de travail, la CNAV ne retiendra que vingt-deux annuités : les deux années en France et les vingt années en Belgique ou les vingt années aux États-Unis. Alors qu’elle aura effectué une carrière complète et qu’elle devrait donc pouvoir bénéficier du taux plein, cette personne n’aura droit pour le calcul de sa retraite qu’au taux réduit, et même au taux minimum.
Cette situation, qui concerne un très grand nombre d’expatriés, est extrêmement pénalisante.
La direction de la sécurité sociale justifie sa position en expliquant que les champs d’application des conventions bilatérales concernent uniquement les deux pays signataires de chaque convention. Nous ne contestons pas cette évidence ! Mais elle en déduit qu’il n’est pas possible de cumuler les conventions sans l’accord des différentes parties à ces conventions ; c’est ce point que nous contestons.
La France ne demande pas l’accord de ses partenaires précédents avant de signer une nouvelle convention avec un autre pays. Si elle négocie un accord avec le Brésil, elle ne demande pas l’autorisation de l’Allemagne avec qui elle a signé une convention. De la même façon, elle n’a pas à demander l’accord d’un pays pour prendre en compte les périodes accomplies dans un autre pays, que ce soit d’ailleurs de façon cumulée ou pas, cette décision découlant du seul fait de l’accord avec le nouveau pays et n’ayant pas d’impact sur les partenaires précédents.
Lorsqu’un doute existe sur l’application des textes de loi ou des traités, il revient aux tribunaux de trancher et de donner leur interprétation, ce qu’ils ont fait.
Dans un jugement du 22 février 2002, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Caen s’est clairement prononcé en faveur du cumul des conventions, expliquant que « retenir le raisonnement inverse à l’instar de la caisse régionale d’assurance maladie, aboutirait à ne reconnaître au salarié qui aurait travaillé dans de nombreux pays étrangers, que la validation d’une seule période de travail dans l’un de ces pays ».
La cour d’appel de Caen a confirmé cette interprétation dans un arrêt de principe du 28 mars 2003. Elle a affirmé que, si le champ d’application des conventions bilatérales ne vise, par définition, que les deux pays signataires, aucune règle issue du droit national, communautaire ou international ne s’oppose à l’application conjointe de deux accords bilatéraux. En outre, la cour d’appel a précisé qu’aucune règle, ni même aucune contrainte d’ordre technique, n’imposait à l’assuré d’effectuer un choix entre le bénéfice de l’un ou de l’autre.
Aucune règle de droit ne s’oppose au cumul des conventions bilatérales. Ce qui n’est pas interdit étant autorisé, cela signifie que des mesures législatives supplémentaires ne sont pas nécessaires pour appliquer le cumul. La CNAV peut donc appliquer sans délai la décision de la cour d’appel. Nous demandons qu’elle applique cette jurisprudence !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Nadine Morano, ministre auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Monsieur le sénateur, vous avez interrogé Xavier Bertrand sur la situation des Français ayant travaillé dans plusieurs pays signataires d’une convention bilatérale de sécurité sociale avec la France et sur la reconnaissance dans le calcul de leur pension de vieillesse d’une partie seulement des trimestres validés dans ces pays.
Les conventions bilatérales de sécurité sociale signées par la France avec des pays étrangers reposent sur les deux principes fondamentaux de réciprocité et d’exportabilité des pensions de retraite acquises. En effet, le pays signataire d’une convention bilatérale avec la France s’engage à reconnaître la même durée d’assurance vieillesse que la France et à rendre exportable la pension de retraite due sur ces bases.
Une convention bilatérale ne peut donc inclure un pays tiers qu’avec l’accord des deux signataires, et non uniquement de la France. Pour cette raison, de nombreuses conventions bilatérales ne reconnaissent pas encore, à ce stade, les périodes d’activité effectuées dans des pays tiers.
Cependant, les conventions de sécurité sociale signées ou modifiées récemment prennent en compte cette préoccupation puisqu’elles intègrent les pays tiers, dès lors qu’ils sont liés par convention aux deux pays signataires. C’est le cas, par exemple, des conventions signées récemment avec l’Uruguay et l’Inde. Cette préoccupation sous-tend ainsi la dynamique actuelle d’élaboration des conventions et s’étend même progressivement aux conventions déjà signées, comme, par exemple, celle avec le Maroc.
Par ailleurs, il convient de rappeler que les Français expatriés qui le souhaitent peuvent cotiser volontairement à l’AVV, l’assurance vieillesse volontaire, qui permet une reconstitution parfaite des droits à l’assurance vieillesse de l’affilié, quel que soit le pays où il se trouve.
Enfin, la loi portant réforme des retraites de novembre 2010 prévoit un droit à l’information des assurés expatriés en matière de retraite. En conséquence, un groupe de travail a été mis en place sur ce sujet en avril 2011 au sein du groupement d’intérêt public connu sous le nom de GIP Info Retraite. Il traitera, notamment, de la manière optimale d’informer les futurs expatriés de leurs droits ainsi que de leur possibilité d’adhérer à l’AVV.
Le Gouvernement sera particulièrement attentif aux conclusions prochaines de ce groupe de travail ainsi qu’à leur mise en œuvre.
M. le président. La parole est à M. Robert del Picchia.
M. Robert del Picchia. Madame la ministre, votre réponse est parfaite sur le papier. Mais je voudrais vous faire remarquer que peu de Français travaillent dans les pays signataires des nouvelles conventions que vous avez mentionnées.
Il me paraît nécessaire de modifier les conventions signées avec les quelques pays dans lesquels vivent de nombreux Français. Nos expatriés contribuent à défendre le rayonnement de la France à l’étranger dans les domaines culturel, économique et commercial. Or pénaliser de la sorte leur retraite n’encouragera pas nos concitoyens à s’expatrier.
J’ai récemment évoqué cette question avec l’un de vos collègues qui s’occupe également de la question des Français à l’étranger. Il partage mon opinion selon laquelle cette situation ne peut pas durer. Ce qui a déjà été fait en termes d’information est une bonne chose, mais il faut aller plus loin, car ceux qui ont déjà cotisé dans deux pays étrangers successifs sont, je le répète, pénalisés. Nous devons trouver une solution.
permanence des soins dans le sud des hauts-de-seine
M. le président. La parole est à M. Philippe Kaltenbach, auteur de la question n° 1466, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du ministre du travail, de l'emploi et de la santé, chargée de la santé.