M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 27 :
Nombre de votants | 346 |
Nombre de suffrages exprimés | 346 |
Pour l’adoption | 159 |
Contre | 187 |
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 18, modifié.
(L'article 18 est adopté.)
Article 19
Le deuxième alinéa du III de l’article L. 441-2-3 du code de la construction et de l’habitation est ainsi rédigé :
« Le représentant de l’État dans le département désigne chaque demandeur au service intégré d’accueil et d’orientation prévu à l’article L. 345-2-4 du code de l’action sociale et des familles aux fins de l’orienter vers un organisme disposant de places d’hébergement présentant un caractère de stabilité, de logements de transition ou de logements dans un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale correspondant à ses besoins et qui sera chargé de l’accueillir dans le délai fixé par le représentant de l’État. L’organisme donne suite à la proposition d’orientation, dans les conditions prévues aux articles L. 345-2-7 et L. 345-2-8 du même code. En cas d’absence d’accueil dans le délai fixé, le représentant de l’État dans le département désigne le demandeur à un tel organisme aux fins de l’héberger ou de le loger. Au cas où l’organisme vers lequel le demandeur a été orienté ou à qui il a été désigné refuse de l’héberger ou de le loger, le représentant de l’État dans le département procède à l’attribution d’une place d’hébergement présentant un caractère de stabilité ou d’un logement de transition ou d’un logement dans un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale correspondant à ses besoins. Le cas échéant, cette attribution s’impute sur les droits à réservation du représentant de l’État. En Île-de-France, il peut aussi demander au représentant de l’État d’un autre département d’effectuer une telle proposition ; en cas de désaccord, la proposition est faite par le représentant de l’État dans la région. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 551, présenté par Mme Schurch, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le III de l’article L. 441-2-3 est ainsi rédigé :
« III. – La commission de médiation peut également être saisie, sans condition de délai, par toute personne qui, sollicitant l'accueil dans une structure d'hébergement, un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale, n'a reçu aucune proposition adaptée en réponse à sa demande. Si le demandeur ne justifie pas du respect des conditions de régularité et de permanence du séjour mentionnées au premier alinéa de l’article L. 300-1, la commission peut prendre une décision favorable uniquement si elle préconise l’accueil dans une structure d’hébergement. La commission de médiation transmet au représentant de l'État dans le département la liste des demandeurs pour lesquels doit être prévu un tel accueil dans une structure d'hébergement, un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale et précise, le cas échéant, les mesures de diagnostic ou d'accompagnement social nécessaires.
« Le représentant de l'État dans le département désigne chaque demandeur au service intégré d'accueil et d'orientation prévu à l'article L. 345-2-4 du code de l'action sociale et des familles aux fins de l'orienter vers un organisme disposant de places d'hébergement présentant un caractère de stabilité, de logements de transition ou de logements dans un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale correspondant à ses besoins et qui sera chargé de l'accueillir dans le délai fixé par le représentant de l'État. L'organisme donne suite à la proposition d'orientation, dans les conditions prévues aux articles L. 345-2-7 et L. 345-2-8 du même code. En cas d'absence d'accueil dans le délai fixé, le représentant de l'État dans le département désigne le demandeur à un tel organisme aux fins de l'héberger ou de le loger. Au cas où l'organisme vers lequel le demandeur a été orienté ou à qui il a été désigné refuse de l'héberger ou de le loger, le représentant de l'État dans le département procède à l'attribution d'une place d'hébergement présentant un caractère de stabilité ou d'un logement de transition ou d'un logement dans un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale correspondant à ses besoins. Le cas échéant, cette attribution s'impute sur les droits à réservation du représentant de l'État. En Île-de-France, il peut aussi demander au représentant de l'État d'un autre département d'effectuer une telle proposition ; en cas de désaccord, la proposition est faite par le représentant de l'État dans la région.
« Les personnes auxquelles une proposition d'accueil dans une structure d'hébergement, un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale a été adressée reçoivent du représentant de l'État dans le département une information écrite relative aux dispositifs et structures d'accompagnement social présents dans le département dans lequel l'hébergement, le logement de transition, le logement-foyer ou la résidence hôtelière à vocation sociale est situé et, le cas échéant, susceptibles d'effectuer le diagnostic ou l'accompagnement social préconisé par la commission de médiation. »
La parole est à M. Gérard Le Cam.
M. Gérard Le Cam. Cet amendement de réécriture de l’article 19 vise à permettre à la commission de médiation de prendre des décisions favorables au titre du DALO-hébergement sans exigence de régularité et de permanence, à la condition qu’elle préconise comme type d’accueil un hébergement.
Il s’agit de mettre un terme aux disparités constatées entre les positions adoptées par les commissions de médiation, dont certaines exigent le respect des conditions de régularité et de permanence dans tous les cas, quand bien même les personnes qui seront accueillies dans un hébergement bénéficieront du principe d’inconditionnalité prévu par le code de l’action sociale et des familles pour l’hébergement.
Notre amendement tend ainsi à donner une traduction à un principe républicain et à poser le caractère universel du droit à l’hébergement pour toute personne présente sur le territoire national.
M. le président. L'amendement n° 198, présenté par Mme Schurch, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
L’attribution de telles places ne peut se faire sur des territoires situés en zone urbaine sensible ni sur des communes disposant d’une part de logements sociaux supérieure à 50 %, sans l’accord du maire.
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement se justifie par son texte même, tant notre proposition est frappée au coin du bon sens et de la justice sociale. Ne pas ajouter de la misère à la misère, tel est notre objectif.
L’article 19 a pour objet de faciliter l’hébergement des personnes reconnues prioritaires au titre du droit au logement opposable.
Cependant, n’oublions pas les limites de ces procédures, en particulier dans les zones tendues en matière d’hébergement.
L’instauration de l’obligation de répondre à la demande d’hébergement n’a pas été accompagnée des moyens de construire en nombre suffisant les structures d’accueil nécessaires pour satisfaire les besoins de nos concitoyens.
Par ailleurs, il existe encore de très nombreuses disparités territoriales en termes d’engagement des communes dans cette action.
Dans ces conditions, tout doit être fait pour que, lorsque le préfet procède à l’attribution d’une place d’hébergement au titre du droit à l’hébergement opposable, le DAHO, il ne dirige pas le bénéficiaire vers une commune située dans une zone urbaine sensible ou disposant d’un nombre de logements sociaux représentant plus de 50 % du parc. En effet, bien souvent, ces communes rencontrent déjà de graves difficultés pour répondre aux besoins et aux attentes de leur population. Elles ne pourraient donc accueillir dans de bonnes conditions des personnes relevant du DAHO, particulièrement fragiles et en grande difficulté.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Dilain, rapporteur. La commission est favorable à l’amendement n° 551, considérant que l’hébergement est bien un droit inconditionnel.
En revanche, elle est défavorable à l’amendement n° 198.
Tout à l’heure, en réponse à M. Dallier, j’ai dit que j’étais favorable à la disposition introduite à l’Assemblée nationale par M. Pupponi, qui posait déjà quelques problèmes. L’étendre aux villes qui comptent au moins 50 % de logements sociaux ne serait pas raisonnable, d’autant que l’expression « logement social » n’est pas qualifiée. Il existe en effet de nombreux types de logements sociaux, et je m’inscris en faux contre l’idée selon laquelle le logement social concernerait uniquement les pauvres. Je rappelle que 70 % de la population, voire davantage dans certains départements, est éligible au logement social.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 551, dans la mesure où il vise bien l’hébergement, et non pas le logement.
En revanche, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 198.
Soumettre la mise en œuvre d’un dispositif de droit, qui peut d’ailleurs donner lieu à condamnation de l’État, à l’accord du maire pose problème. On ne peut pas adresser des injonctions contradictoires au pouvoir exécutif. Le Parlement a voté la loi instituant le DALO : il ne peut pas simultanément freiner la mise en œuvre de ce droit en instaurant des contraintes lourdes. Notre pays compte 46 000 personnes reconnues prioritaires au titre du DALO : je suis opposée par principe à ce que l’on ampute les moyens d’action de l’État tout en lui imposant d’organiser un droit déjà très difficile à mettre en œuvre.
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote sur l'amendement n° 551.
M. Daniel Dubois. Vous aviez prévu de transférer la mise en œuvre du DALO aux territoires. Vous ne le faites pas dans ce texte : dans lequel le ferez-vous ?
Les collectivités auront les mêmes difficultés que l’État à assumer cette compétence. L’État n’arrive pas à assurer l’effectivité de ce droit, alors il transfère sa mise en œuvre aux territoires. C’est formidable du point de vue de l’équilibre et de l’équité !
M. le président. En conséquence, l'article 19 est ainsi rédigé et l'amendement n° 198 n'a plus d'objet.
Article 20
(Non modifié)
Le IV du même article L. 441-2-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la commission de médiation, saisie d’une demande d’hébergement ou de logement dans un établissement ou un logement de transition, un logement-foyer ou une résidence hôtelière à vocation sociale dans les conditions prévues au III, estime qu’un tel accueil n’est pas adapté et qu’une offre de logement doit être faite, elle peut, si le demandeur remplit les conditions fixées aux deux premiers alinéas du II, le désigner comme prioritaire pour l’attribution d’un logement en urgence et transmettre au représentant de l’État dans le département cette demande aux fins de logement, dans le délai fixé au cinquième alinéa du même II. » – (Adopté.)
Article 20 bis
(Non modifié)
Le I du même article L. 441-2-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un représentant de la personne morale gérant le service intégré d’accueil et d’orientation dans le département peut assister à la commission à titre consultatif. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 20 bis
M. le président. L'amendement n° 158, présenté par MM. Labbé, Placé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 20 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant la fin de l’année 2014, le Gouvernement transmet au Parlement un rapport dressant le bilan des dispositifs existants de logement adapté et proposant les pistes d’évolution, notamment législative, susceptibles de garantir le développement d’initiatives innovantes et adaptées à la situation des populations les plus fragiles.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. L’amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Dilain, rapporteur. La commission est défavorable à cet amendement visant à demander la remise d’un rapport, d’autant que nous disposons déjà de données sur le sujet.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Cécile Duflot, ministre. Par coordination avec la position que j’ai adoptée tout à l’heure à propos de l’amendement de M. Dallier, je ne puis opposer un avis défavorable. Je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. L’accès à un logement autonome ne constitue parfois qu’un objectif de long terme pour les populations les plus fragiles.
De nombreux dispositifs innovants existent, qui prévoient des solutions intermédiaires permettant la prise en compte des difficultés particulières auxquelles sont confrontés certains publics.
Il conviendrait de dresser un bilan de la mise en œuvre de ces mesures, d’étudier les conditions de leur développement, ainsi que les éventuelles évolutions législatives à envisager pour sécuriser celui-ci.
La commission des affaires sociales avait approuvé cet amendement, cette demande de rapport étant hautement justifiée.
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud, rapporteur pour avis.
Mme Aline Archimbaud, rapporteur pour avis de la commission des affaires sociales. Demander au Gouvernement la remise d’un rapport est effectivement la seule façon que nous ayons trouvée, au sein de la commission des affaires sociales, de soulever la question de l'accès au logement autonome des personnes les plus fragiles.
Des efforts très importants vont être consentis pour construire ou mobiliser des logements à cette fin, mais nous savons tous très bien, pour être confrontés à cette réalité dans nos départements, que certaines personnes en situation de grande précarité, si elles ne sont pas à la rue, vivent dans des baraquements – je n’ose employer le mot « logements » à leur propos – totalement indignes. Il faut se dire les choses en face : quelles que soient les avancées permises par le présent texte, le problème ne sera pas résolu en quelques mois.
L’idée est donc tout simplement de recenser les actions qu’il est possible de mener, notamment avec les associations, les réseaux de l’économie sociale et solidaire. Un certain nombre de ces acteurs sont prêts à se mobiliser sur cette question, pour trouver des moyens de mettre en place des solutions de logement tout à fait transitoires, certes, mais tout de même préférables à ce que l’on connaît aujourd’hui.
Les pouvoirs publics pourraient, me semble-t-il, s’appuyer sur l’initiative associative. Il s’agit de recenser les ressources qui existent dans ce domaine. Comment pourrait-on passer des conventionnements ? Je sais qu’un certain nombre de grands réseaux caritatifs ou solidaires y sont prêts. Comment, dans le court terme, peut-on répondre à des situations que l’on ne rencontre pas qu’en Seine-Saint-Denis ? Des solutions vont être apportées au travers de la loi, mais nous savons bien que leur mise en œuvre ne sera pas immédiate.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Lenoir. Régulièrement, des demandes de rapport sont formulées. Certaines d’entre elles sont tout à fait justifiées, notamment celle de Philippe Dallier, tout à l’heure, qui se référait d’ailleurs à un rapport plus ancien.
Mais, en l’occurrence, je renvoie les auteurs de la demande à la commission de contrôle de l’application des lois, qui a été constituée après le dernier renouvellement du Sénat et désigne régulièrement deux rapporteurs – un sénateur de la majorité et un sénateur de l’opposition – pour étudier de telles questions. Pourquoi demander au Gouvernement de mobiliser un certain nombre de moyens, notamment humains, pour réaliser un travail que nous pouvons accomplir nous-mêmes à moindre coût ?
Je suis donc contre cet amendement et j’invite chacune et chacun d’entre nous à adresser ce genre de requêtes, tout à fait justifiées au demeurant dans certains cas, à la commission présidée par M. Assouline.
M. le président. La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour explication de vote.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Nous ne voterons pas l’amendement n° 158, mais nous comprenons la demande de Mme Archimbaud et de la commission des affaires sociales.
À l’évidence, les associations prennent des initiatives novatrices, des réponses concrètes sont données, mais ce n’est pas un rapport du Gouvernement qui permettra de les recenser. Connaissant notre administration, je ne suis guère convaincue qu’elle soit suffisamment affûtée pour appréhender la diversité de l’innovation sociale en la matière…
En revanche, il me semble, madame Archimbaud, que vous pourriez solliciter le nouveau Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées, qui lui a l’habitude de travailler avec les réseaux associatifs. Sans doute accepterait-il volontiers d’inclure dans son rapport annuel un panorama des solutions d’urgence pertinentes pouvant être mises en œuvre.
Je me permets de vous faire cette suggestion, car je doute vraiment que l’administration soit en mesure d’établir un tel rapport !
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. Monsieur Lenoir, j’avais déjà proposé, sous forme de boutade – mais peut-être n’étiez-vous pas présent en séance à ce moment-là –,…
M. Jean-Claude Lenoir. Cela m’étonnerait ! (Sourires.)
M. Daniel Raoul, président de la commission des affaires économiques. … de missionner la commission présidée par notre collègue Assouline pour élaborer un rapport sur le nombre et l’utilité des rapports demandés ! (Très bien ! sur diverses travées.)
M. Pierre-Yves Collombat. Un métarapport !
M. le président. Monsieur Labbé, l'amendement est-il finalement maintenu ?
M. Joël Labbé. Après les échanges intéressants et fructueux qui viennent d’avoir lieu, il me paraît sage de le retirer.
M. le président. L'amendement n° 158 est retiré.
Article 20 ter (nouveau)
Au premier alinéa de l’article L. 345-2-2 du code de l’action sociale et des familles, le mot : « et » est remplacé par le mot : « ou ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 20 ter
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 201 rectifié, présenté par Mme Schurch, M. Le Cam et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 20 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 642-1 du code de la construction et de l’habitation, après le mot : « morale », sont insérés les mots : « ou une personne physique détentrice d’un patrimoine immobilier de cinq logements et plus ».
La parole est à Mme Mireille Schurch.
Mme Mireille Schurch. Cet amendement vise à étendre le champ d’application éventuelle des procédures de réquisition prises en matière de logement dès lors que la commune où se situent les biens immobiliers visés relève d’une zone de forte tension immobilière et foncière. Il s’agit de mettre des logements vacants à disposition des demandeurs.
Par cet amendement, nous proposons que les logements soumis à réquisition puissent appartenir tant à des personnes morales qu’à des personnes physiques, dès lors que celles-ci seraient propriétaires d’au moins cinq logements.
L’adoption de cette disposition, nous en sommes bien conscients, remettrait en question l’esprit et la lettre de l’article L. 642-2 du code de la construction et de l’habitation, qui exclut les sociétés civiles associant des personnes de la même famille du champ des processus de réquisition.
Bien évidemment, on nous objectera sans doute les difficultés que posent l’interprétation d’une telle mesure et la définition du nombre de logements appartenant aux personnes physiques concernées. Une même personne pouvant être propriétaire de plusieurs logements situés dans des lieux différents, on peut envisager de fixer pour principe que ne seront pris en compte que les logements vacants situés dans une zone tendue.
Je fais observer, à ce propos, que la déclaration de revenus fonciers de quelque propriétaire que ce soit permet de mesurer aisément la réalité du patrimoine possédé et sa localisation.
On pourra également nous objecter que la réquisition de logements vacants ne saurait constituer une solution à la crise du logement et que ce n’est pas en accroissant le nombre de logements susceptibles d’être réquisitionnés que l’on résoudra le problème. Nous sommes également d’accord, toutefois il n’aura échappé à personne, je pense, que nous n’avons jamais fait de la réquisition une panacée ; c’est simplement un outil supplémentaire dans l’arsenal législatif pour mettre un terme à l’excès des intérêts particuliers qui engendre le mal-logement dans notre pays, en particulier dans les zones tendues.
M. le président. L'amendement n° 670, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Après l’article 20 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article L. 642-1 du code de la construction et de l’habitation, après les mots : « une personne morale », sont insérés les mots : « ou une personne physique détentrice d’un patrimoine immobilier de cinq logements et plus dans la même commune ».
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Les amendements nos 670, 668 et 669 sont des amendements d’appel.
Madame la ministre, vous avez eu l’occasion de découvrir combien la procédure de réquisition est difficile à mettre en œuvre. Pour autant, je voudrais vous féliciter de l’initiative que vous avez prise, parce que la menace de réquisition est plus efficace que la procédure de réquisition. En effet, elle a incité les propriétaires de nombreux logements vides à prendre des mesures concrètes : vente, location, conclusion d’un bail solidaire… Cela a permis de mobiliser le parc vacant, ce qui était bien l’objectif visé.
Cela étant, deux textes se superposent.
Le premier, une ordonnance de 1945, si j’ai bonne mémoire, prise dans une période de reconstruction dans l’urgence, donne un pouvoir spécifique aux maires en la matière. Toutefois, à l’époque, il n’était pas encore question de décentralisation, et les relations entre les communes et l’État n’étaient pas ce qu’elles sont aujourd'hui. D’ailleurs, le texte fait référence aux services municipaux d’hygiène et de santé, qui n’existent plus en tant que tels.
Le dispositif de cette ordonnance de 1945 n’est pas efficace. Pourtant, certaines collectivités locales voudraient le mettre en œuvre. Je m’y suis essayée, quand j’étais maire, mais j’ai pu constater qu’il était d’une complexité labyrinthique et d’une efficacité insuffisante au regard des efforts à déployer.
Le second texte, c’est la loi relative à la lutte contre les exclusions, qui comporte un dispositif prévoyant des attributaires.
L'amendement n° 670 prévoit que les personnes morales ne seront pas seules à pouvoir être soumises à la procédure de réquisition. Les personnes physiques possédant cinq logements et plus situés dans une même commune seront concernées. On ne peut plus parler, à ce niveau, de petits propriétaires.
L'amendement n° 668 vise à permettre que des associations, et non pas forcément des organismes d’HLM, puissent être désignées attributaires, afin de rendre le dispositif plus opérationnel pour les réquisitions de faible ampleur.
Enfin, l'amendement n° 669 vise à modifier les délais accordés aux propriétaires. En effet, ceux-ci arguent souvent qu’ils doivent réaliser des travaux dans leur logement et l’on découvre, trois ou quatre ans plus tard, que rien n’a été fait.
Pour autant, compte tenu de la complexité de ce dossier, ces simples amendements ne sont pas de nature à régler totalement les problèmes. Je suis convaincue, comme un certain nombre d’entre nous ici, qu’il faut repenser cette législation tout en respectant le droit à la propriété mais en permettant, dans des cas manifestement aberrants, la mobilisation des logements vacants. Je déposerai une proposition de loi à cette fin. La réquisition demeure un outil républicain. L’intérêt public commande de ne pas se satisfaire que certains, au mépris des besoins des autres, laissent durablement vacante une partie du parc de logements. Il y a moyen, dans certains cas d’abus, de faire appel à la réquisition comme réponse ultime. Convaincre est préférable – et nous disposons à cet égard d’une série d’outils qui doivent être mieux mobilisés –, mais contraindre est parfois nécessaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Claude Dilain, rapporteur. Nous abordons une série d’amendements concernant la réquisition, sujet qui, je le signale, n’est abordé nulle part dans le texte qui nous a été transmis par l’Assemblée nationale.
En l’absence d’étude d’impact, il est très difficile à la commission, qui n’a pu en outre procéder à aucune audition, de porter un jugement pertinent sur ces amendements. Il s’agit néanmoins d’un sujet important, l’engagement d’une procédure de réquisition étant lourde de conséquences. Mme Lienemann l’a dit, il s’agit d’amendements d’appel. Je vais laisser Mme la ministre répondre.
Sans préjuger du fond, la commission des affaires économiques a décidé d’émettre un avis défavorable sur l’ensemble des amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?