M. le président. La parole est à Mme Hélène Lipietz, pour présenter l'amendement n° 338 rectifié bis.
Mme Hélène Lipietz. Dans le régime général, sont actuellement prises en compte, pour le calcul de la pension de l’assuré, les vingt-cinq meilleures années. Or ce mode de calcul pose problème pour les carrières heurtées ou hachées.
Le salaire de référence annuel d’une femme sera ainsi réduit si, au cours de l’année, elle part en congé de maternité. De la même façon, le salaire du parent qui choisira de bénéficier du complément de libre choix d’activité – en réalité, dans 80 % à 90 % des cas, c’est la mère qui est concernée – subira lui aussi une baisse. Enfin, le chômage aura le même effet pervers.
Par leur incidence sur la retraite future, la grossesse et la maternité pénalisent les femmes alors que ce sont nos enfants qui, plus tard, paieront nos retraites !
Il nous semblerait donc particulièrement utile d’étudier l’impact sur les carrières heurtées, notamment pour les femmes, de la prise en compte non pas des vingt-cinq meilleures années, mais des cent meilleurs trimestres. Le nombre absolu de trimestres pris en compte ne varierait pas, mais on pourrait, sur l’ensemble d’une carrière professionnelle, choisir les trimestres les plus favorables.
Cette mesure de justice aurait une grande importance pour les femmes et pour toutes les personnes ayant eu une carrière heurtée, car elle permettrait de prendre réellement en compte toutes les évolutions de leur parcours professionnel. Je le répète, il est particulièrement anormal que les femmes soient pénalisées parce qu’elles mènent à bien des grossesses.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ces deux amendements identiques sont très proches des deux précédents. L’un de ceux-ci ayant été adopté, les amendements présentés par Mmes Pasquet et Lipietz sont satisfaits : j’en demande donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Je partage l’avis de Mme le rapporteur. L’adoption de l’amendement n° 320 rectifié ter satisfait la demande exprimée ici. Par conséquent, je demande également le retrait de ces amendements.
M. le président. Madame Pasquet, l'amendement n° 180 rectifié est-il maintenu ?
Mme Isabelle Pasquet. Lorsque l’on dépose un amendement, on n’est jamais sûr qu’il sera adopté, surtout s’il émane de notre groupe ! (Sourires.) Voilà pourquoi nous avions déposé cet amendement de repli, mais, compte tenu de l’adoption de l’amendement n° 320 rectifié ter, nous le retirons.
M. le président. L'amendement n° 180 rectifié est retiré.
Madame Lipietz, l'amendement n° 338 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Hélène Lipietz. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 338 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 186 rectifié, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 18
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les six mois suivant la promulgation de la loi n° … du … garantissant l’avenir et la justice du système de retraites, le Gouvernement remet au Parlement un rapport étudiant les scénarii permettant de relever le minimum contributif et l’allocation de solidarité aux personnes âgées à hauteur du salaire minimum interprofessionnel de croissance net.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Cet amendement a pour objet de demander au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport étudiant les scénarios permettant de relever le minimum contributif et l’allocation de solidarité aux personnes âgées à hauteur du SMIC net.
La réforme Fillon de 2003 avait inscrit dans la loi un objectif de relèvement du minimum contributif de façon à porter le minimum de pension perçue par un assuré social ayant eu une carrière complète et liquidé sa pension au taux plein à 85 % du SMIC net, et ce à partir de 2008.
Cet objectif a progressivement été abandonné. Il convient de le réaffirmer et de viser un niveau supérieur au seuil de pauvreté, celui du SMIC.
Le rapport Moreau précise que le taux de pauvreté est en nette augmentation chez les plus de 75 ans et que 700 000 femmes de plus de 65 ans vivent sous le seuil de pauvreté en France. Au sein de cette population, les femmes isolées, notamment les veuves, sont surreprésentées.
Le minimum contributif, qui s’élève à 640 euros par mois, ou encore l’ASPA, dont le montant est d’environ 780 euros par mois, se situent en deçà de ce seuil. Une mesure d’augmentation du minimum contributif aura pour effet direct d’améliorer le niveau de pension des femmes et de réduire ainsi l’écart avec les hommes.
Dans le secteur privé, à la fin de décembre 2011, 4,9 millions de retraités du régime général, dont 70 % de femmes, percevaient le minimum contributif.
Dans le secteur public, 52,3 % des femmes retraitées et 32,6 % des hommes retraités perçoivent le minimum contributif garanti.
Une part importante de la population serait donc concernée par un relèvement du minimum contributif. Une telle disposition permettrait d’améliorer les conditions de vie de ces personnes, ce qui nous paraît plus que nécessaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Les auteurs de cet amendement demandent la remise, par le Gouvernement, d’un rapport sur les modalités d’un relèvement du minimum contributif et de l’ASPA au niveau du SMIC.
Pour les raisons que j’ai déjà exposées à l’occasion de l’examen d’autres amendements, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 186 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 19
I. – L’article L. 742-6 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° (nouveau) Au 1°, après la référence : « L. 622-5 », est insérée la référence : « ou à l’article L. 723-1 » ;
2° Le 5° est ainsi rétabli :
« 5° Les conjoints collaborateurs mentionnés à l’article L. 121-4 du code de commerce qui, ayant été affiliés à titre obligatoire au régime d’assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions soit artisanales, soit industrielles et commerciales, soit libérales, en application de l’article L. 622-8 du présent code, soit au régime d’assurance vieillesse des avocats en application du deuxième alinéa de l’article L. 723-1, cessent de remplir les conditions de l’affiliation obligatoire. Les modalités d’application de cette disposition, notamment les délais dans lesquels les intéressés doivent demander leur affiliation, sont déterminées par décret. »
II. – L’article L. 722-17 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les conjoints collaborateurs d’exploitation ou d’entreprise agricole définis au premier alinéa de l’article L. 321-5 peuvent adhérer volontairement à l’assurance vieillesse mentionnée à l’article L. 722-15, dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article. » ;
2° Au second alinéa, la référence : « premier alinéa » est remplacée par la référence : « présent article ».
M. le président. La parole est à M. Dominique Watrin, sur l'article.
M. Dominique Watrin. Le groupe CRC votera en faveur de l’adoption de cet article, dans la continuité de notre vote sur la réforme de 2010.
Les niveaux de pension des conjoints collaborateurs de chef d’entreprise commerciale, artisanale, agricole ou libérale sont tellement faibles que tout doit être mis en œuvre pour permettre leur progression. Je note d’ailleurs que les conjoints en question sont le plus souvent des conjointes.
Lorsqu’elle est évoquée, cette question fait souvent l’objet d’un consensus au sein de notre assemblée. J’espère qu’il en ira de même pour cet article, qui tend de fait à réparer une injustice de taille.
En effet, en l’état actuel des choses, l’affiliation personnelle et obligatoire des conjoints collaborateurs à l’assurance vieillesse volontaire cesse en cas de divorce ou lorsque le chef d’entreprise part à la retraite ou décède et que le conjoint ne reprend pas la direction de l’entreprise. Cela signifie qu’il ne s’agit pas d’une affiliation en nom propre, ce qui rend les conjoints collaborateurs particulièrement dépendants.
Le groupe CRC, qui se prononce pour la défamiliarisation de toutes les prestations sociales, ne peut donc que soutenir cette démarche. C’est pourquoi, malgré les limites du dispositif, qui ne permettra pas à lui seul d’augmenter sensiblement les pensions des conjoints collaborateurs, nous voterons cet article.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 205, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 2242-5-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 2242-5-1. – Les entreprises d’au moins onze salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité professionnelle mentionné à l’article L. 2242-5. Les modalités de suivi de la réalisation des objectifs et des mesures de l’accord sont fixées par décret. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Début janvier 2012, le Gouvernement, conscient du fait que la question des inégalités de rémunération entre les femmes et les hommes ne se limitait pas à la sphère des grosses entreprises, lançait le site internet Ega-pro.fr pour informer les PME et les salariés sur les enjeux de l’égalité salariale entre hommes et femmes.
Ce site donne en quelque sorte aux TPE et aux PME une « feuille de route » quant à la mise en place des nouvelles obligations s’imposant à elles en matière d’égalité salariale, en insistant sur la construction d’un diagnostic.
En effet, depuis le 1er janvier 2012, toutes les entreprises ayant un effectif d’au moins cinquante salariés sont tenues de négocier un accord collectif relatif à l’égalité professionnelle.
Si cette obligation n’a pas été étendue aux entreprises dont l’effectif est compris entre onze et cinquante salariés, cela ne signifie pas pour autant qu’elles soient exemptes de toutes critiques en la matière.
Ainsi, comme le rappelait avec raison le rapport d’information de la Haute Assemblée sur le projet de loi relatif à l’égalité salariale entre les hommes et les femmes, « dans les TPE, un homme employé à temps complet perçoit en moyenne 1 940 euros, une femme 1 790 euros, soit environ 8 % de moins ».
Il est donc extrêmement important que soit mise en place, dans toutes les entreprises, une politique en matière d’égalité. Il s’agit non seulement d’un objectif, mais aussi d’une ambition importante que promeut le groupe CRC au travers de l’examen de tous les textes qui nous sont soumis.
Dès lors, nous ne pouvons nous satisfaire d’une situation où l’égalité n’est pas respectée de fait, d’autant que les mesures d’augmentation salariale dont les femmes pourraient bénéficier grâce à l’adoption de notre amendement renforceraient leurs moyens de consommer ou, tout simplement, de vivre mieux.
M. le président. L'amendement n° 206, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 2242-5-1 du code du travail les mots : « ou, à défaut d’accord, par les objectifs et les mesures constituant le plan d’action défini dans les rapports prévus aux articles » sont supprimés.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. L’article L. 2242-5-1 du code du travail dispose que les entreprises d’au moins cinquante salariés sont soumises à une pénalité à la charge de l’employeur lorsqu’elles ne sont pas couvertes par un accord relatif à l’égalité professionnelle ou, à défaut d’accord, par les objectifs et les mesures constituant le plan d’action défini dans les rapports prévus aux articles L. 2323-47 et L. 2323-57 du même code.
Il faut bien reconnaître que, jusqu’à présent, en dépit des nombreuses lois existantes, l’égalité professionnelle est très souvent la grande absente des politiques des entreprises.
Manque de volontarisme, machisme ambiant : les habitudes et les mentalités sont difficiles à faire évoluer. Certes, la loi que nous avons adoptée dernièrement sur l’initiative de la ministre des droits des femmes peut contribuer à améliorer la situation, mais, là encore, nous avons exprimé nos doutes.
Pour nous, l’égalité n’a que trop attendu. Il n’est plus possible de trouver sans cesse des excuses pour ne pas appliquer la loi dans les entreprises. Il est impératif de franchir un palier à cet égard.
C’est la raison pour laquelle l’alinéa du code du travail permettant une nouvelle fois aux entreprises d’échapper à la mise en place d’un accord en constituant un plan d’action moins ambitieux ne nous satisfait pas.
En effet, s’il n’y a pas accord du fait de l’employeur, c’est sans doute parce que ce dernier aura estimé que les mesures proposées sont trop ambitieuses. Dans ce cas, il est probable que le plan d’action qu’il proposera pour échapper à la pénalité sera adapté à sa conception de l’égalité et à son idée de la mise en œuvre de ce principe au sein de son entreprise.
Il est en effet très peu probable que l’accord ne soit pas signé parce que l’employeur aurait jugé que ses mesures ne vont pas assez loin. En disant cela, je ne veux pas caricaturer les employeurs, qui ne sont pas tous de mauvais élèves en matière d’égalité. Ainsi, le palmarès rendu public lors de la semaine de l’égalité professionnelle permet de décerner un encouragement à Orange : certes dirigée par un homme, cette entreprise remporte la palme en matière de féminisation des instances dirigeantes.
Toutefois, pour quelques entreprises qui prennent enfin conscience des enjeux, combien de chantiers sont encore devant nous : temps partiel, évolution de l’emploi et des qualifications, formation, salaires…
En tenant ces propos, je ne m’éloigne absolument pas du projet de loi sur les retraites : nous suivons notre logique, car c’est en agissant en amont que l’on pourra abolir les inégalités de pension entre les femmes et les hommes ; c’est en agissant en amont, c’est-à-dire sur l’égalité salariale, que nous pourrons, dès 2015, dégager 5 milliards d’euros de recettes nouvelles pour notre système des retraites et 10 milliards d’euros à l’horizon 2020.
Pour nous, la volonté affichée par la ministre des droits des femmes d’instaurer une égalité professionnelle pleine et entière doit également se traduire dans ce projet de loi sur les retraites. C’est l’un des objectifs du présent amendement, que nous vous invitons à adopter.
M. le président. L'amendement n° 209, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au deuxième alinéa de l’article L. 2242-5-1 du code du travail, le taux : « 1 % » est remplacé par le taux : « 5 % ».
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Depuis l’entrée en vigueur de la loi n° 83-635 du 13 juillet 1983 sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, dite « loi Roudy », l’employeur est tenu, dans les entreprises de 300 salariés et plus, de soumettre chaque année pour avis au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, soit directement, soit, si elle existe, par l’intermédiaire de la commission de l’égalité professionnelle, un rapport écrit sur la situation comparée des conditions générales d’emploi et de formation des femmes et des hommes dans l’entreprise.
Aux termes de l’article L. 2323-57 du code du travail, ce rapport doit notamment comporter une analyse permettant d’apprécier, pour chacune des catégories professionnelles de l’entreprise, la situation respective des femmes et des hommes en matière d’embauche, de formation, de promotion professionnelle, de qualification, de classification, de conditions de travail, de rémunération effective et d’articulation entre l’activité professionnelle et l’exercice de la responsabilité familiale. Il recense par ailleurs les mesures prises au cours de l’année écoulée en vue d’assurer l’égalité professionnelle, les objectifs prévus pour l’année à venir et la définition qualitative et quantitative des actions à mener à ce titre, ainsi que l’évaluation de leur coût.
Pourtant, selon le rapport d’information de la délégation aux droits des femmes de l’Assemblée nationale, plus de la moitié des entreprises n’ont pas élaboré de rapport de situation comparée.
La HALDE et la délégation aux droits des femmes du Sénat ont elles aussi émis des recommandations à l’adresse du Gouvernement, pour l’inviter à aller plus loin en matière d’équilibre professionnel et salarial.
Le Gouvernement ambitionne de résoudre la question des inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes en sanctionnant les entreprises qui ne se soumettent pas à l’obligation visée. Il s’agirait de leur imposer de verser au Fonds de solidarité vieillesse un montant égal au maximum à 1 % des rémunérations et gains. Ce montant serait néanmoins apprécié en fonction des efforts constatés dans l’entreprise.
Le groupe CRC souhaite aller plus loin et propose que ce taux soit porté à 5 %. En effet, ce n’est que si nous instaurons un dispositif volontariste et contraignant que les entreprises prendront conscience de la nécessité de parvenir à l’égalité entre hommes et femmes, toujours annoncée mais trop rarement réalisée.
M. le président. L'amendement n° 208, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Avant le dernier alinéa de l’article L. 2242-5-1 du code du travail, est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le montant de la pénalité est doublé si l’entreprise a déjà fait l’objet d’une sanction identique dans les quatre années qui précèdent. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Afin d’atteindre l’égalité professionnelle, ce qui contribuera à sauver notre système des retraites, nous proposons de doubler la pénalité qui incombe à une entreprise en cas d’absence d’accord en matière d’égalité, lorsque cette même entreprise a déjà fait l’objet d’une sanction pour le même motif au cours des quatre années précédentes.
Notre objectif est là encore de renforcer l’ambition de ce projet de loi et de le mettre en accord avec l’objectif commun à tous les membres de cette assemblée – du moins je l’espère – en matière d’égalité professionnelle.
Nous n’avons que trop souvent dressé le constat que des entreprises n’avancent pas sur ces questions, par manque de volonté, ainsi que, ne nous le cachons pas, par idéologie. Il existe des entreprises récidivistes, à l’instar de certains partis politiques, qui préfèrent payer des pénalités plutôt que de mettre en place des accords favorisant l’égalité.
Notre message doit être clair et ferme, et je crois que le doublement de la pénalité peut aider à dépasser certaines réticences ou résistances.
Le respect des obligations fixées par la loi doit être incontournable. Sinon, on risque de devoir constater, dans quelques années, que les lois se succèdent mais que les inégalités perdurent, voire s’approfondissent.
L’écart salarial de 27 % entre les femmes et les hommes n’est pas le fruit du hasard, ni le résultat d’une différence de compétence. Il est le fruit d’une culture de l’entreprise où l’égalité passe sans cesse au second plan, où les inégalités sont intériorisées, où les femmes sont la plupart du temps cantonnées dans des fonctions peu valorisées. Tout cela est bien évidemment entretenu, consciemment ou non, par des schémas préétablis, dans lesquels le pouvoir est d’abord masculin.
Si l’on souhaite équilibrer davantage les choses, dans l’intérêt des deux sexes, et établir un meilleur partage des fonctions et des responsabilités, qu’il s’agisse de la sphère privée ou de la sphère publique, la loi doit être respectée à la lettre.
À cette fin, la pénalité doit dissuader de contourner la loi. Nous proposons donc son doublement en cas de récidive. Il s’agit bien de sanctionner des entreprises qui ne respectent pas la loi, qui persistent dans cette attitude et l’assument !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ces quatre amendements visent tous à pénaliser les entreprises qui n’ont pas élaboré d’accord ou de plan d’action en matière de promotion de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, voire qui n’ont même pas établi de rapport de situation comparée.
Sur ce sujet important, nous sommes nombreux, dans cette assemblée, à partager les constats et les analyses de nos collègues du groupe CRC.
Toutefois, ces amendements trouveront mieux leur place au sein du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, qui doit revenir en deuxième lecture au Sénat, que dans un texte relatif aux retraites, même si, on le sait, les inégalités constatées dans le travail – salariales, notamment – se reportent, au moment de la retraite, sur le niveau des pensions.
La commission émet un avis défavorable sur les quatre amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Michèle Delaunay, ministre déléguée. Ces amendements relèvent davantage du projet de loi pour l’égalité entre les femmes et les hommes, voté au Sénat en première lecture le 17 septembre dernier.
L’amendement n° 206 contrevient, de surcroît, au principe de liberté conventionnelle garanti par la Constitution.
Le Gouvernement est donc également défavorable à ces quatre amendements.
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote sur l’amendement n° 206.
M. Gérard Longuet. Mme le rapporteur l’a indiqué avec autorité : si le sujet mérite réflexion, d’autres rendez-vous législatifs nous permettront de mieux le traiter. Croyez bien, chers collègues du groupe CRC, que nous ne sommes pas opposés par principe à un tel débat. Nous souhaitons simplement le mener dans un contexte qui permette d’aboutir.
Dans la mesure où l’article que nous examinons porte sur les retraites des conjoints collaborateurs, ces amendements sont des cavaliers législatifs.
M. le président. L’amendement n° 210, présenté par Mmes Cohen, Gonthier-Maurin et Cukierman, M. Watrin, Mmes David et Pasquet, M. Fischer et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Un rapport du Gouvernement est remis au Parlement avant le 30 juin 2014 sur les conditions dans lesquelles les veuves d’aides familiaux ou de collaborateurs d’exploitations ou d’entreprises agricoles décédés avant le 31 décembre 2010 peuvent obtenir une pension de réversion.
La parole est à Mme Isabelle Pasquet.
Mme Isabelle Pasquet. Cet amendement a pour objet d’engager une réflexion sur la situation des veuves d’aides familiaux ou de collaborateurs d’exploitations ou d’entreprises agricoles décédés avant le 31 décembre 2010.
En effet, depuis la réforme des retraites de 2010, le bénéfice de la pension de réversion est attribué dans les seuls cas où le conjoint est décédé postérieurement au 1er janvier 2011. Aujourd’hui, nous devons porter notre attention sur la situation des personnes dont le conjoint est décédé avant le 31 décembre 2010.
Si nous élargissons le bénéfice de la pension de réversion à ces veuves, nous mettrons fin à une injustice, certes, mais surtout nous apporterons une réponse sociale à des femmes qui vivent, pour une grande majorité d’entre elles, dans une situation de grande précarité.
L’article 90 de la loi n° 2010-1330 portant réforme des retraites a, bien sûr, répondu à une demande légitime, mais il n’est pas allé assez loin : en posant comme date limite le 31 décembre 2010, il exclut de fait une partie des veuves du bénéfice de son dispositif. Or nous connaissons tous l’apport de ces femmes au travail quotidien au sein des exploitations ; nul ne se hasarderait à le mettre en doute. Chacun de nous, dans son département, a très certainement été interpellé sur leur situation, par les intéressées elles-mêmes ou par les organisations professionnelles. Malheureusement, nous sommes actuellement démunis pour leur répondre.
Il est donc temps de faire un nouveau pas vers la reconnaissance pleine et entière du statut de ces femmes, vers la reconnaissance de la place qu’elles ont tenue au sein des exploitations. Mes chers collègues, nous vous proposons aujourd’hui de le faire en demandant au Gouvernement la remise d’un rapport sur les conditions dans lesquelles les veuves d’aides familiaux ou de collaborateurs d’exploitations ou d’entreprises agricoles décédés avant le 31 décembre 2010 pourraient obtenir une pension de réversion. Ce rapport pourrait être réalisé au cours du premier semestre de l’année prochaine et remis au Parlement avant le 30 juin 2014. Il nous permettrait ensuite de proposer, en toute connaissance de cause, les conditions d’ouverture du droit à la pension de réversion, afin de répondre au plus vite à la demande de ces femmes.
Il ne fait nul doute que, dans la situation de crise à laquelle doit faire face notre agriculture, une telle avancée serait considérée comme un message fort.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. L’article 13 bis du projet de loi prévoit déjà la remise au Parlement d’un rapport sur les pensions de réversion. Par conséquent, cet amendement me semble satisfait, madame la sénatrice. Pour autant, la commission souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.