M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ces trois amendements ont pour objet la suppression de l’article 32, qui tend à améliorer l’organisation des régimes de retraite de base et complémentaire des professions libérales.
Cet article vise en particulier à renforcer le rôle et les moyens de la CNAVPL, à encadrer les compétences et les modalités de nomination de son directeur et à permettre une contractualisation entre l’État et cette même caisse.
Je tiens à préciser, comme le fera certainement Mme la ministre, qu’il n’est en aucun cas question de ponctionner les réserves de la Caisse nationale. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
Mes chers collègues, je n’ai pas beaucoup abusé de la parole pendant ces journées de débat sur le projet de loi garantissant l’avenir et la justice du système de retraites…
M. Jean Desessard. C’est bien dommage !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. J’ai dit l’essentiel, monsieur Desessard !
M. Jean Desessard. Avec clarté !
Mme Christiane Demontès, rapporteur. En cet instant, je voudrais rappeler les limites du dispositif actuel.
La loi d’août 2003 portant réforme des retraites a révisé les règles de fonctionnement du régime de retraite de base des professions libérales, en le transformant, à compter du 1er janvier 2004, en un régime unique proportionnel par points.
L’objectif était d’accroître l’équité du régime de base et de renforcer son pilotage pour lui permettre de faire face aux conséquences du vieillissement démographique de la catégorie professionnelle concernée, vieillissement qui touche d’ailleurs également d’autres professions.
La réforme de 2003 a ainsi cherché à renforcer la CNAVPL en tant que caisse nationale, en lui conférant un rôle d’animateur du réseau des dix sections professionnelles. Force est de constater que, en pratique, le rôle de la Caisse nationale demeure pour le moins limité, celle-ci ne faisant qu’un faible usage de ses compétences, tandis que les sections professionnelles jouissent d’une autonomie historiquement très ancrée. Il existe une forte disproportion de moyens entre la première et les secondes.
Par ailleurs, je rappelle que la CNAVPL est le seul organisme de base à ne pas avoir conclu depuis 2003 – ce n’est pas récent ! – de contrat de gestion avec l’État ou pour lequel une telle contractualisation n’est pas en cours.
Pour toutes ces raisons, et en cohérence avec ce que vous-mêmes, chers collègues de l’UMP, aviez mis en place, la commission émet un avis défavorable sur ces trois amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marisol Touraine, ministre. Je veux à mon tour répondre aux orateurs qui ont exprimé trois inquiétudes, pour autant qu’ils soient de bonne foi. (Exclamations sur les travées de l'UMP.)
La première de ces inquiétudes, c'est que l’État souhaiterait faire main basse sur les réserves de la CNAVPL.
La deuxième, c’est qu’au travers des dispositions que nous vous proposons, nous voudrions mettre en place l’étatisation de cette caisse.
La troisième, c'est que nous chercherions à remettre en question un fonctionnement qui aurait fait ses preuves depuis plusieurs années.
D’abord, comme l’a indiqué Mme le rapporteur, il ne s’agit nullement de ponctionner les réserves constituées par les sections professionnelles, que ce soit au profit des régimes de retraite des professions libérales eux-mêmes ou d’autres régimes. Au contraire, je le dis très fermement, ces réserves sont les garantes de l’équilibre des régimes de retraite complémentaire gérés par les sections en leur permettant de faire face à d’éventuels aléas conjoncturels et démographiques. Le Gouvernement et ceux qui gèrent le régime de retraite n’auraient aucun intérêt à chercher à ponctionner ces réserves.
S’agissant de l’étatisation supposée de la CNAVPL, je vous rappelle que le régime en cause, comme l’ensemble des autres régimes de base et complémentaire, est déjà sous la tutelle de l’État.
M. Gérard Longuet. C’est vrai qu’il peut donner des leçons en matière d’équilibre !
Mme Marisol Touraine, ministre. De ce point de vue, l’article 32 n’apporte pas de modification substantielle à la situation actuelle.
Enfin, en ce qui concerne la bonne gestion de la CNAVPL, je veux rappeler que les excédents qui ont pu être constitués, et qui sont d’ailleurs extrêmement différents selon les sections professionnelles, tiennent non pas à une bonne gestion – de même que le déficit ne s’explique pas forcément par une mauvaise gestion –, mais à des situations démographiques objectives. Quand la situation démographique est favorable, les résultats financiers le sont aussi !
En revanche, et là je rejoins les propos de Mme le rapporteur, la réforme de 2003 en créant la CNAVPL, avait voulu mettre en place un dispositif de gestion mieux coordonnée, une gouvernance qui soit davantage affirmée et assumée.
Or, au cours des dernières années, un certain nombre de rapports réalisés par l’IGAS et la Cour des comptes ont constaté certains dysfonctionnements, appelant, dans le prolongement de la réforme de 2003, à mettre en place des mécanismes de gestion plus resserrée, qui passe notamment par la conclusion d’une convention d’objectifs et de moyens.
Les dispositions qui vous sont proposées ont bien pour objet d’assurer le bon fonctionnement d’une caisse nationale de sécurité sociale. Il est donc normal que le Gouvernement, que l’État s’en préoccupe.
Je précise que l’actuel article 32 a subi quelques ajustements par rapport à la rédaction initiale. Ces modifications résultent de l’adoption, lors de la discussion du présent projet de loi à l’Assemblée nationale, d’un amendement que le Gouvernement avait déposé afin de tenir compte des échanges que nous avons eus avec la CNAVPL et l’Union nationale des professions libérales, ce dont se sont d’ailleurs félicitées ces dernières dans un communiqué commun du 10 octobre dernier.
Telles sont les raisons pour lesquelles le Gouvernement émet un avis défavorable sur les trois amendements de suppression.
M. le président. La parole est à M. Jean-François Husson, pour explication de vote.
M. Jean-François Husson. Madame la ministre, madame le rapporteur, j’ai écouté avec attention vos réponses. Si l’on en croit vos propos, il ne s’agit nullement de ponctionner les réserves – nous voilà rassurés ! Il ne s’agit pas davantage d’une étatisation, puisque l’État exerce d'ores et déjà une tutelle, qui n’a jamais été contestée. Enfin, la gestion de la caisse serait bonne. En somme, tout va bien, et le Gouvernement n’aurait d’autre objectif que d’en assurer un meilleur fonctionnement.
Dans ces conditions, madame la ministre, pourquoi proposer une nouvelle gouvernance ?
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Pour faire ce que vous aviez prévu en 2003 !
M. Jean-François Husson. Pour ma part, je constate que cette nouvelle gouvernance est beaucoup plus étatique : elle relève de l’économie administrée. Dans le même temps, vous confiez de nouvelles attributions au conseil d’administration. Très honnêtement, on a beaucoup de mal à s’y retrouver !
Le dialogue social a été évoqué. Puisque vous assurez que tout va bien, faites confiance à celles et ceux qui, aujourd'hui, administrent la CNAVPL !
En outre, au début de votre propos, madame la ministre, vous avez mis en cause la bonne foi d’un certain nombre de parlementaires ici présents. Sachez que lorsque nous proposons, dialoguons ou contestons, c’est toujours en toute bonne foi ! Pour ma part, je n’oppose pas votre bonne foi à la nôtre. Respectons les convictions de chacun !
Cela dit, en tant que ministre, vous ne pouvez rester sourde aux appels répétés de celles et de ceux qui, sur ces travées ou à la tête de la CNAVPL, ne rejoignent pas vos propositions d’aujourd'hui.
Enfin, vous voir défendre la réforme de 2003, à laquelle vous vous étiez alors opposée, à l’instar d’un certain nombre de vos collègues de l’actuelle majorité – un peu brinquebalante, notamment au Sénat –, ne manque pas de sel, et me procure un certain plaisir. Il faut avoir un peu de suite dans les idées !
En tout état de cause, vous l’avez compris, nous ne cautionnerons jamais le recul qu’opère le texte en matière de gestion de la caisse par les personnes intéressées.
M. Antoine Lefèvre. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Gérard Longuet, pour explication de vote.
M. Gérard Longuet. Les rapports de l’IGAS et de la Cour des comptes méconnaissent profondément les réalités économiques des professions libérales. C’est le fond du malentendu.
Mme Christiane Demontès, rapporteur. Ce malentendu vous arrange !
M. Gérard Longuet. Par la loi de 2003, nous avons créé la CNAVPL, mais nous avons maintenu les dix sections professionnelles, une fraction importante des professions libérales présentant la particularité d’être réglementées. Les liens entre l’organisation d’une profession, l’accès à son exercice, sa démographie et, par conséquent, l’équilibre de son régime de retraite sont extrêmement étroits.
J’appuierai ma démonstration sur deux exemples : celui des médecins et celui des avocats.
L’accès à l’enseignement supérieur des jeunes qui se dédient aux études de médecine est géré par l’État, alors que l’accès à la profession d’avocat est complètement libre. La situation de ces deux professions est donc très différente : dans un cas, l’État régule la démographie et prend des responsabilités et, dans l’autre, il n’intervient pas.
La liberté d’accès à la profession d’avocat a pour conséquence une démographie très largement positive. Si ces effectifs croissants permettent à cette section professionnelle de ne pas rencontrer de problèmes en matière de retraite, ils engendrent des difficultés pour ce qui concerne les conditions d’exercice de la profession. Ainsi, les revenus de certains avocats se sont singulièrement dégradés, et les très jeunes avocats – je rappelle que la moyenne d’âge des avocats inscrits au barreau de Paris est inférieure à trente-cinq ans – connaissent des situations matérielles difficiles et disposent de capacités contributives limitées.
À l’inverse, en organisant un certain malthusianisme des professions médicales, l’État consolide la situation économique de chaque médecin, en vertu de la loi de l’offre et de la demande. Le fait que la population médicale soit jeune et pas assez nombreuse peut sembler dangereux en matière de retraite, mais c’est peut-être un avantage en termes de confort pour la profession.
Au demeurant, un grand nombre de professions se situent dans des situations intermédiaires.
Avocats et médecins ont également des perspectives différentes pour ce qui concerne la durée de leur carrière : beaucoup de médecins s’arrêtent d’exercer plus tôt. Il faut dire que la relation d’un médecin avec son patient est sans doute plus exigeante que ne l’est celle d’un avocat avec son client. A contrario, la maturité, la confiance en soi et la sagesse qui se développent avec l’âge permettent de poursuivre plus longtemps des métiers de conseil.
J’en viens à l’objet de mon intervention.
Le régime de retraite que doit gérer chaque section professionnelle est lié à l’équilibre économique ainsi qu’à l’organisation de la profession. C'est pourquoi la CNAVPL rencontre des difficultés extraordinaires pour tout coordonner. Aujourd'hui, le nombre de professions libérales en dehors de toute réglementation se multiplie, notamment dans le secteur du « bien-être », pour lequel la demande est forte ; je pense, par exemple, à la sophrologie. Ces professions peuvent-elles bénéficier des mêmes règles en matière de retraite que celles dont l’accès est extraordinairement réglementé à l’extérieur de la profession ? Je ne le pense pas.
C’est en raison de cette complexité que nous défendons le principe de la responsabilité des sections professionnelles et refusons tout mécanisme de compensation systématique et automatique entre l’ensemble des sections. La CNAVPL ne peut être prisonnière de la politique de telle ou telle section, qui s’imposerait aux autres.
Les différences doivent être reconnues. Le conseil d’administration de la CNAVPL doit pouvoir choisir son dirigeant, lequel doit être capable de comprendre la complexité de l’ensemble des professions libérales. En effet, ces dernières, qui se caractérisent aujourd'hui par une diversité extraordinaire, ne sauraient être régulées par une personnalité extérieure. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Tout va très bien, madame la ministre. Tout va très bien ! (Sourires.) Cependant, les acteurs de terrain nous font part d’un certain nombre de problèmes…
Je salue la façon dont vous avez mené la négociation avec les professions libérales ! D’aucuns se demandent comment le Gouvernement a pu se mettre à dos 800 000 libéraux…
Permettez-moi de vous lire des extraits de deux courriers pris au hasard parmi les nombreux que je reçois.
Le premier évoque « un article 32 qui nous est proposé sans concertation », « un traitement avec une urgence qui ne se justifie pas », « le procès d’une gouvernance qui a fait ses preuves », « une réforme sur fond d’idéologie administrative, qui a montré ses limites », « trop de mensonges pour manipuler les parlementaires ».
Le second fait allusion à « une réforme qui nie le principe même du dialogue, de la concertation et de la démocratie », à « des propositions sur les modalités de gestion qui n’ont pas trouvé d’écoute ». Or il s’agit de propositions formulées par les différents partenaires de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales.
On le constate, ces courriers témoignent d’un malaise. Ils témoignent aussi de la volonté de ces professionnels d’engager la discussion, d’accepter le dialogue et de consentir des efforts supplémentaires. Comme l’a très bien décrit notre collègue Gérard Longuet, les professions concernées ont montré qu’elles se prenaient actuellement en main pour gérer leur système de retraite.
Madame la ministre, s’il n'y a pas de volonté d’étatisation, puisque la tutelle de l’État s’exerce déjà, pourquoi proposer que le directeur de la CNAVPL soit nommé par le Gouvernement ? Cela ne se justifie pas ! Il faut laisser à la caisse la liberté de formuler des propositions à l’État, qui devra les accepter. C’est tellement simple !
C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons cautionner ce que vous proposez et souhaitons la suppression de l’article 32. (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. La parole est à M. Claude Domeizel, pour explication de vote.
M. Claude Domeizel. Le groupe socialiste votera contre ces amendements de suppression, pour les raisons qu’a évoquées Mme le rapporteur, et sur lesquelles je ne m’étendrai pas plus longtemps.
Pour ma part, je m’interroge.
Certains suspectent le Gouvernement de vouloir faire main basse sur les 15 milliards d’euros de réserves dont disposerait la CNAVPL.
Je dois dire qu’en écoutant Mme la ministre la question qui m’est spontanément venue aux lèvres est : pourquoi pas ?
M. Gilbert Barbier. Ben voyons ! Et comment paie-t-on les retraites ?
M. Claude Domeizel. J’avais cru comprendre que notre système par répartition était basé sur la solidarité : solidarité entre les générations et entre les régimes.
C’est d’ailleurs pour cette raison que le système de compensation avait été créé, en 1974 : ceux qui avaient des possibilités devaient aider ceux qui étaient en difficulté. C’est du moins ce que j’avais compris.
Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale et l’ai très souvent répété, je suis de ceux qui considèrent que ce système de compensation doit être revu, les capacités financières des différents régimes n’ayant pas été prises en compte lors de sa création.
Ainsi, le ratio de dépendance démographique de la Caisse nationale des industries électriques et gazières ne lui permet normalement pas d’acquitter les 50 ou 60 millions d’euros qu’elle verse chaque année ! La Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales, la CNRACL, que les sénateurs connaissent bien, a payé 60 milliards d’euros depuis 1974, et 1,4 milliard d’euros rien qu’en 2012. Pourtant, ne disposant plus d’aucune réserve, elle ne pourra plus supporter le moindre prélèvement en 2017. Ces deux régimes vont au-devant de difficultés. Dans le même temps, la CNAVPL verse 700 millions d’euros : je reconnais que c’est une somme considérable, mais je rappelle que ce régime détient 15 milliards d’euros !
Dans ces conditions, vous comprendrez, mes chers collègues, que je me pose des questions. Je le répète, il est urgent de revoir ce système de compensation, qui est absolument injuste. S’il était peut-être adapté en 1974, il ne l’est plus du tout aujourd'hui ; il est à bout de souffle. (Mme Gisèle Printz applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour explication de vote.
M. Gilbert Barbier. Les propos de M. Domeizel sont particulièrement instructifs.
M. Jean-François Husson. Oui !
M. Gilbert Barbier. D’un côté, Mme la ministre nous assure qu’il n’est surtout pas question de toucher aux 15 milliards d’euros dont dispose la CNAVPL. De l’autre, le parti socialiste déclare qu’on va les récupérer rapidement…
M. Claude Domeizel. Mes propos n’engagent que moi !
M. Gilbert Barbier. En réalité, le Gouvernement s’obstine à vouloir supprimer le principe fondamental de l’autonomie de gestion de la Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales, allant jusqu’à ce que certains appellent – peut-être à tort, mais ce n’est pas loin de la vérité – une « étatisation », en raison des nouvelles modalités de nomination de son directeur.
Pour ce faire, le Gouvernement invoque une prétendue mauvaise gestion de la caisse, plus particulièrement de la Caisse autonome de retraite des médecins de France, la CARMF, à laquelle, on le sait, certains médecins et syndicats s’opposent et reprochent cette mauvaise gestion.
Je rappelle tout de même que, selon la Cour des comptes, la pérennité de la caisse est assurée jusqu'en 2040. Certes, on peut toujours le contester…
Le projet de loi prévoit également d'enfermer la CNAVPL dans le cadre d’un contrat déterminant des objectifs de gestion qui semble particulièrement superfétatoire.
Comme notre collègue Gérard Longuet l'a rappelé, nous avons affaire à dix caisses différentes, qui ont chacune leurs propres problèmes. Il a évoqué le cas des médecins et des avocats. Des fusions surviennent parfois– par exemple celle de la caisse des chirurgiens-dentistes avec celle des sages-femmes. C'est pourquoi l'on ne peut pas fixer les évolutions d'une manière figée dans un contrat d'objectifs et de gestion.
Aujourd'hui, chacune des dix caisses gère librement les régimes complémentaires et les régimes supplémentaires – notamment l'ASV, l'avantage social vieillesse –, la Caisse nationale gérant le régime de base. Le système actuel, tout à fait particulier, comporte une entraide au sein de la CNAVPL.
Par ailleurs, il est singulièrement choquant qu’il ne puisse être mis fin aux fonctions du directeur de la CNAVPL, choisi parmi trois noms proposés par le ministre chargé de la sécurité sociale, qu’à la majorité des deux tiers du conseil d'administration. Ce dernier comprend les présidents de chacune des dix caisses, si bien que le directeur susvisé devrait être en mesure d'exercer ses fonctions pendant cinq ans tout en ayant six opposants dans son conseil d'administration, puisqu'il en faut sept pour pouvoir, éventuellement, le démettre. Il me paraît vraiment difficile qu’un tel système puisse fonctionner…
Par ailleurs, un avantage doit être souligné : si certains régimes rencontrent des difficultés, les conditions de cotisation sont modifiées.
En réalité, je vois surtout dans la réforme que souhaite le Gouvernement une opposition fondamentale au fonctionnement par points des régimes en cause !
Et j’en reviens au début de notre discussion : vous n’admettez pas, madame la ministre, l'avancée que représenterait une retraite par points, possibilité que souhaitait pourtant étudier la majorité des membres de la Haute Assemblée. C'est là le nœud fondamental de notre désaccord.
Pour toutes ces raisons, les membres de mon groupe voteront en faveur des trois amendements de suppression. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
Mme Isabelle Debré. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’irai dans le sens des propos des précédents orateurs. Je ne représente pas les professions libérales, mais nombre de leurs représentants nous ont sollicités.
L’article 32 pose un réel problème, car la réforme qu’il prévoit a été élaborée sans la moindre concertation avec le conseil d'administration de la CNAVPL, comme l'ont souligné les pharmaciens et d'autres professionnels du secteur de la santé.
De plus, M. Barbier et d'autres collègues ont estimé que se profilait la mainmise de l’État sur les régimes de retraite des professions libérales dans la volonté de nommer le directeur de la Caisse nationale par décret. Cette nomination devrait être de la responsabilité du conseil d'administration, qui a toute légitimité.
De surcroît, je crains une fusion des caisses des libéraux…
C’est pourquoi je voterai les amendements de suppression de l’article 32.
M. le président. La parole est à M. René Beaumont, pour explication de vote.
M. René Beaumont. Après les brillantes interventions de membres de la commission des affaires sociales – je pense à Gérard Longuet, à Jean-Noël Cardoux, à René-Paul Savary et à Jean-François Husson –, je n’avais pas l'intention d'intervenir. Cependant, en ma qualité, depuis une dizaine d'années, d’administrateur de la caisse autonome de retraite et de prévoyance des vétérinaires, profession que j’exerce, l'intervention de M. Domeizel m’y force.
M. Claude Domeizel. Allez-y, je vous en prie !
M. René Beaumont. Au cours des débats qui se sont déroulés sur le présent projet de loi et que j’ai suivis de nombreux soirs, en particulier la semaine dernière, vous m’avez semblé, monsieur Domeizel, sincère, honnête et assez franc.
M. Claude Domeizel. Poursuivez encore !
M. René Beaumont. Mais aujourd'hui, votre franchise vous a perdu, tout le monde l'a remarqué : alors que Mme le rapporteur et Mme la ministre viennent de nous dire de ne pas nous inquiéter car aucun prélèvement ne sera effectué sur les réserves de la CNAVPL, vous, vous nous dites qu’il faudra piocher dans nos régimes par souci de solidarité ! Vous avez l'air de nous accuser de ne pas être solidaires… Mais la solidarité doit s'exercer dans des conditions à peu près égales, vous en conviendrez.
M. Claude Domeizel. Mais oui !
M. René Beaumont. Or, actuellement, les professionnels libéraux travaillent tous jusqu'à soixante-cinq ans, voire soixante-sept ans à l’instar des vétérinaires – cette mesure sera d’ailleurs généralisée à partir de 2020. Et vous voulez qu’ils fassent preuve de solidarité envers ceux qui s'arrêtent de travailler à cinquante ans, cinquante-deux ans ou cinquante-cinq ans !
M. Claude Domeizel. Mais de qui parlez-vous ?
M. René Beaumont. C'est une solidarité désorganisée ! C'est du vol du travail des uns au profit d’autres qui n’auront pas assez travaillé ! (Protestations sur les travées du groupe socialiste.) C'est scandaleux !
M. Claude Domeizel. Ce sont vos propos qui sont scandaleux !
M. René Beaumont. On puise directement dans les poches des travailleurs indépendants pour servir les retraites de ceux qui ne travaillent pas assez ! (Mêmes mouvements.)
M. Claude Domeizel. Encore une fois, de qui parlez-vous ?
M. René Beaumont. Mais telle est la réalité ! Quant à la solidarité, tout comme vous – pas plus, pas moins -, je tiens à l'organiser, mais dans des conditions équitables ! (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 295, 355 et 380 rectifié.
J'ai été saisi de deux demandes de scrutin public émanant, l'une, du groupe UDI-UC et, l'autre, du groupe UMP.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici le résultat du scrutin n° 41 :
Nombre de votants | 347 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 185 |
Contre | 159 |
Le Sénat a adopté. (Bravo ! sur les travées de l'UMP.)
En conséquence, l’article 32 est supprimé et les amendements nos 296, 403, 297, 310, 402, 415, 298, 300, 356, 309, 388 rectifié, 416, 299, 404, 301 rectifié et 302 n’ont plus d'objet.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes.
L'amendement n° 296, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après la première occurrence du mot :
sociale
insérer les mots :
au titre du régime de base
L'amendement n° 403, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« 4° De coordonner et d’assurer la cohésion de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales, de donner son avis aux administrations intéressées au nom de l'Organisation autonome d'assurance vieillesse des professions libérales et plus généralement de la représenter auprès des pouvoirs publics, des autres organisations de protection sociale ainsi qu’auprès des chambres et des ordres professionnels, associations, syndicats professionnels et leurs unions et fédérations, etc. ; »
L'amendement n° 297, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
Les amendements nos 310 et 402 sont identiques.
L'amendement n° 310 est présenté par M. Beaumont.
L'amendement n° 402 est présenté par M. Barbier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
«7° De s’assurer des équilibres de gestion par la recherche de maîtrise des coûts de gestion et de la coordination efficace des systèmes d’information de l’organisation mentionnée à l’article L. 641-1.
L'amendement n° 415, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 7° D’assurer la cohérence et la coordination des systèmes d’information de l’organisme mentionné à l’article L. 641-1.
L'amendement n° 298, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après le mot :
arrêter
insérer les mots :
, en cohérence avec les systèmes d’information des sections professionnelles,
L'amendement n° 300, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 641-3-1.- I. – Le directeur est nommé par décret sur la base d’une liste proposée par le conseil d'administration de la caisse nationale.
L'amendement n° 356, présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Alinéa 14
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 641-3-1. – I. – Le directeur est nommé par décret du ministre chargé de la sécurité sociale à partir d'une liste de trois noms proposée par le conseil d'administration de la caisse nationale d'assurance vieillesse des professions libérales. Il est révoqué par le conseil d'administration de la caisse à la majorité des deux tiers de ses membres.
L'amendement n° 309, présenté par M. Beaumont, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
« Art. L. 641-3-1. – I. – Le directeur est nommé par décret, pour une durée de cinq ans renouvelable, sur proposition du conseil d’administration à partir d’une liste de deux noms proposée par le conseil d'administration de la caisse nationale.
L'amendement n° 388 rectifié, présenté par MM. Barbier, Mézard et Bertrand, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
« Art. L. 641-3-1.- I. - Le directeur est nommé par décret, pour une durée de cinq ans renouvelable, à partir d’une liste de trois noms proposée par le Conseil d'administration de la caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales.
L'amendement n° 416, présenté par Mme Demontès, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Supprimer les mots :
renouvelable une fois
L'amendement n° 299, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Alinéa 14, première phrase
Supprimer les mots :
une fois
L'amendement n° 404, présenté par M. Barbier, est ainsi libellé :
Alinéa 14, seconde phrase
Remplacer les mots :
des deux tiers
par le mot :
simple
L'amendement n° 301 rectifié, présenté par Mme Deroche et MM. Milon et Savary, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 18
Supprimer les mots :
et de six représentants d’organisations syndicales interprofessionnelles des professions libérales
II. – Alinéa 21
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Un décret fixe les conditions d’application du présent article. » ;
L'amendement n° 302, présenté par MM. Longuet et Cardoux, Mmes Boog, Bruguière, Bouchart, Cayeux, Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Giudicelli, MM. Gilles et Husson, Mme Hummel, MM. Fontaine, de Raincourt, Laménie et Milon, Mme Kammermann, M. Pinton, Mme Procaccia, MM. Savary, Beaumont, Bordier et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 27
Rédiger ainsi cet alinéa :
4° Le dernier alinéa de l’article L. 641-5 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
II. – Alinéa 28
Supprimer cet alinéa.
Article 32 bis (nouveau)
I. – L’article L. 723-3 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Après la première occurrence du mot : « par », la fin de la seconde phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « la Caisse nationale des barreaux français. » ;
2° À la première phrase du troisième alinéa, la deuxième occurrence du mot : « à » est remplacée par les mots : « au versement à ladite caisse d’ » et le mot : « ladite » est remplacé par les mots : « cette même ».
II. – Le présent article entre en vigueur à compter du 1er janvier 2014.