M. Ronan Dantec. Madame la ministre, je vous remercie pour la précision de votre réponse.

J’insiste sur l’urgence à ouvrir très rapidement un débat sur l’évaluation du dispositif Censi-Bouvard, qui a un impact dans les zones de montagne et dans d’autres zones touristiques – la Corse, des zones littorales.

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.

M. Jacques Mézard. Madame la ministre, lors de la séance du 13 décembre 2012 où vous interveniez dans le cadre de la proposition de résolution sur l’égalité des territoires que j’avais déposée et qui a été votée à l’unanimité par le Sénat, vous aviez annoncé que vous reviendriez défendre à cette tribune une loi pour l’égalité des territoires. Onze mois se sont écoulés et nous sommes aujourd’hui réunis pour parler de la montagne et de l’aménagement du territoire.

La caractéristique bien connue de la montagne par rapport aux zones de plaine, c’est qu’il faut monter pour y arriver ! (Sourires.) Ce n’est pas la Bretagne, desservie par des voies d’accès rapides ! Notre pays compte encore des territoires difficiles d’accès. Faire du développement lorsqu’on n’arrive pas à accéder à certains territoires – comme le département que j’ai l’honneur de représenter –, cela pose de gros problèmes.

Le 25 octobre 2012, à Bastelica, vous décriviez aux élus de montagne un certain nombre de pistes d’action, annonçant une révision du Schéma national des infrastructures de transport, le SNIT, qui accorderait une claire priorité au renforcement des infrastructures et des réseaux de transport classiques.

Vous promettiez même un effort pour l’entretien des voiries municipales et départementales, dont les coûts sont difficiles à surmonter pour les collectivités locales.

Aujourd’hui, alors que les programmes de modernisation des itinéraires routiers, les PDMI, sont encore en discussion, je souhaiterais connaître la position du Gouvernement pour faciliter l’accès aux territoires enclavés. Cela nous pose, en effet, un réel problème, qu’il s’agisse de la route ou du ferroviaire. Dans les zones non desservies par TGV, sur certaines lignes on met, en empruntant le réseau secondaire, malheureusement beaucoup plus de temps pour arriver à destination qu’il y a un certain nombre de décennies ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées de l’UMP. – MM. Gérard Roche et André Gattolin applaudissent également.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le sénateur Mézard, vous avez eu raison de rappeler les propos qui étaient tenus en mon nom, mais qui n’étaient pas les miens, à Bastelica. Je vais vous répondre précisément.

Pour ce qui est de la loi « égalité des territoires », – je l’ai signalé en réponse à la question de M. Jarlier – un titre « égalité des territoires » figurera dans le projet de loi de mobilisation des régions pour la croissance et l’emploi et de promotion de l’égalité des territoires.

Ce texte, qui sera présenté par ma collègue Marylise Lebranchu, intègre volontairement ce chapitre « égalité des territoires » pour faire en sorte que la question des régions – je fais référence à ce que Mme David disait voilà quelques instants – ne soit pas prise en considération indépendamment de cette question de l’égalité des territoires et de l’attention à porter aux territoires les plus fragiles.

Il en va de même sur la question du réseau secondaire, que vous avez évoqué, ou du réseau existant. À l’issue du travail de révision du SNIT, comme vous avez pu le noter, les arbitrages choisis témoignent d’un vrai choix en faveur de l’investissement pour le réseau existant, notamment du réseau ferroviaire dont la remise à niveau était une priorité. Je pense, en particulier, à certains territoires qui ne peuvent compter aujourd’hui que sur le train pour assurer une desserte suffisamment régulière.

Le désenclavement proprement dit sera envisagé au titre du volet « mobilité » des contrats de plan État-région, les CPER. En effet, la nouvelle génération de contrats de plan est actuellement en discussion et a vocation à être contractualisée l’été prochain.

Dans ce cadre-là, il y aura une déclinaison territoriale des contrats de plan État-région, qui prendront en considération des situations spécifiques. Cette question en fait partie et elle sera donc à l’ordre du jour des discussions qui accompagneront l’élaboration de ces contrats de plan.

Je tiens à réaffirmer ici l’attachement du Gouvernement à cette question de l’égalité des territoires. La discussion du titre « égalité des territoires », dans le cadre de l’examen du prochain projet de loi, pourra évidemment donner lieu à un échange entre le Gouvernement et les sénateurs. Et vous savez combien nous apprécions d’échanger avec vous ! (M. André Gattolin applaudit.)

M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard, pour la réplique.

M. Jacques Mézard. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre, même si elle ne m’a pas totalement rassuré. Ce n’est pas en créant des hauts conseils et des comités que l’on trouve des solutions, car on y fait que rabâcher les problèmes !

M. René-Paul Savary. Absolument !

M. Jacques Mézard. Selon nous, pour assurer l’égalité des territoires, il faut faire en sorte de mettre fin à cette fracture territoriale que vous dénonciez vous-même, à juste titre, à l’occasion d’une réponse que vous nous donniez voilà onze mois.

Si je reviens sur la question des services publics et des PDMI, c’est parce qu’il est véritablement indispensable de permettre un accès normal à un certain nombre de territoires qui ont un terrible sentiment d’abandon.

Les gouvernements successifs, de toutes sensibilités, ont oublié qu’il était nécessaire, dans notre pays, de faire l’égalité, non par les discours, mais par les actes.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle.

M. Jean-Claude Carle. Madame la ministre, je souhaiterais appeler votre attention sur les conséquences du décret du 10 mai 2013 définissant les zones d’application de la majoration de la taxe sur le foncier non bâti, la TFNB. Cette mesure est particulièrement pénalisante dans un département de montagne comme la Haute-Savoie.

Ce décret concerne les communes où serait constaté un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements. Dans mon département, ce sont soixante communes qui sont touchées, autour de trois agglomérations.

La mise en œuvre de ces mesures induit une majoration considérable de la TFNB pour les contribuables à partir de 2014. Cette majoration peut s’élever à 4 000, puis à 8 000 euros, pour une parcelle de seulement 800 mètres carrés, par exemple. Peu de propriétaires seront en mesure de la supporter et nombre d’entre eux seront tout simplement contraints de se défaire de leurs biens. C’est de la vente forcée, allant à l’encontre du principe fondamental du droit de propriété.

Nombreux sont mes administrés à m’avoir fait part de leur colère face à ce qu’ils considèrent comme une véritable spoliation, et ce d’autant que les terrains concernés pourraient, au gré des modifications de PLU, devenir non constructibles.

Cette mesure provoque aussi une vague d’inquiétude chez les maires. En effet, la liste des zones en tension a été fixée par les services de l’État, sans aucune concertation avec les élus locaux. Pourtant, c’est vers eux que nos compatriotes se retournent pour exprimer leur indignation et leur exaspération.

Cette décision administrative se voit même appliquée dans des communes ne connaissant aucun problème de logement, certaines étant d’ailleurs relativement éloignées de l’agglomération soumise à cette mesure. Plusieurs maires m’ont apporté leur témoignage en ce sens.

Dans certains cas, l’arrêté du 10 mai est même incompatible avec les SCOT et les contraintes issues des lois Montagne et Littoral.

Je vous demande donc de m’indiquer, madame la ministre, si vous comptez suspendre l’application de ce décret afin de mettre en place des mesures appropriées et supportables par les contribuables, et engager une concertation avec les élus afin de réajuster la liste des communes concernées. (Applaudissements sur les travées de l'UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le sénateur, le décret auquel vous faites allusion est relatif au champ d’application de la taxe annuelle sur les logements vacants. C’est l’article de la loi de finances relatif à la majoration de la taxe sur le foncier non bâti qui y fait référence.

On peut en effet légitimement se poser la question, comme vous le faites, de la pertinence de la référence à un décret qui concerne les logements vacants s’agissant de la majoration de la taxe sur le foncier non bâti.

Comme vous l’avez justement dit, des inquiétudes se sont exprimées à cette occasion. Je voudrais donc réaffirmer l’engagement du Gouvernement à préserver l’agriculture, en particulier périurbaine, et les surfaces agricoles.

Les sénateurs et les députés qui ont participé voilà quelques semaines au débat sur la loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové ont pu constater l’engagement du Gouvernement en faveur de la préservation des terres agricoles et naturelles, et contre leur surconsommation.

Les communes n’ont pas pu anticiper ce dispositif de majoration, issu d’un vote de mars 2012, et donc s’en approprier le fonctionnement, qui peut en effet sembler complexe. Nous avons donc fait en sorte que cette disposition ne s’applique pas au 1er janvier 2014. Ainsi, chaque commune pourra en mesurer les conséquences et nous éviterons les effets induits négatifs sur les terrains agricoles cultivés.

Je le répète, l’objectif du Gouvernement est bien de préserver l’agriculture, y compris de proximité et périurbaine, mais aussi d’éviter la rétention foncière et la spéculation portant sur des terrains constructibles vacants, conservés par leur propriétaire en attente de l’augmentation du prix du foncier.

C’est le seul objectif de cette disposition. C’est parce que cette dernière n’y répond pas de façon tout à fait satisfaisante à ce stade et suscite des inquiétudes que le Gouvernement a décidé qu’elle ne s’appliquerait pas au 1er janvier 2014.

L’objectif, j’y insiste, est d’éviter la rétention foncière de terrains constructibles en zone constructible, et absolument pas de fragiliser les agriculteurs, en particulier en secteur périurbain. Les choses sont très claires sur ce point, monsieur le sénateur.

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour la réplique.

M. Jean-Claude Carle. Je remercie Mme la ministre de sa réponse, ainsi que de la décision qu’elle a prise de reporter cette mesure pour prendre en compte les inquiétudes des élus et des agriculteurs et pour éviter les effets pervers induits et protéger les terres agricoles.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou.

M. Jean-Jacques Mirassou. Madame la ministre, voilà cinq mois, en Haute-Garonne, de terribles inondations ont dévasté les cantons de Saint-Béat, Bagnères-de-Luchon, et touché gravement ceux de Barbazan, Montréjeau, et dans une moindre mesure celui de Saint-Gaudens.

La réactivité du Président de la République, du Gouvernement et des collectivités territoriales a permis de faire face à l’urgence en mobilisant des mécanismes d’aide, tout en débloquant des sommes très importantes destinées à financer les travaux prioritaires.

Pour autant, ce qui reste à réaliser est énorme, et ce dans de multiples domaines. C’est du reste ce qu’a exprimé la population locale à l’occasion de la venue du préfet de région dans le Comminges, avec un mélange d’impatience, de colère et de désarroi. En effet, à Saint-Béat – de loin, la commune la plus touchée du massif pyrénéen –, à Luchon ou à Marignac, beaucoup d’interrogations subsistaient.

Ainsi, les indemnisations que les victimes des inondations étaient en droit d’attendre du secteur assurantiel n’ont pas été versées – loin s’en faut ! –, et ce pas plus aux habitants qu’aux commerçants.

Pire, certains sinistrés, au moment même où je parle, ont reçu des courriers émanant de leur compagnie d’assurance, et tendant à résilier d’une manière unilatérale leur contrat d’assurance. L’autorité du Gouvernement doit, selon moi, pouvoir jouer sur ce dossier.

S’agissant des travaux susceptibles d’être différés, le Gouvernement est également sollicité pour mettre en œuvre une coordination rapide en ce qui concerne le montage financier, et en s’affranchissant, si possible, de certaines règles habituelles.

Pour ce qui est du moyen et du long terme, il s’agit de reconstruire et de retrouver des capacités de développement local au travers d’une nouvelle politique économique permettant aux collectivités de se réinventer un avenir. À l’évidence, ce challenge ne pourra être relevé par les seuls acteurs locaux et exige un engagement sans faille de la part de l’État. C’est à ce prix que la population sinistrée reprendra espoir et évacuera le sentiment d’injustice qu’elle éprouve aujourd’hui pour elle-même et pour son territoire.

Vous comprendrez, madame la ministre, que je m’adresse à vous en ce qui concerne vos responsabilités en matière d’égalité des territoires. Mon intervention est d’ailleurs plus une interpellation, une sollicitation, qu’une question.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le sénateur Mirassou, je suis tout à fait consciente des conséquences terribles de ces inondations. Beaucoup des sujets que vous évoquez ne dépendent pas directement des attributions du ministère de l’égalité des territoires et du logement, mais je vais bien évidemment essayer de vous apporter les éléments de réponse que vous attendez.

Sachez en premier lieu que la mobilisation de l’État ne faiblit pas depuis le mois de juin.

Tout d’abord, des fonds ont été mobilisés en urgence pour aider les collectivités.

En juillet dernier, 12,5 millions d’euros ont été délégués dans les trois départements les plus touchés par les inondations afin de permettre aux collectivités d’engager les travaux les plus urgents.

En parallèle, une mission interministérielle a été rapidement diligentée pour évaluer le montant des dégâts, qu’elle chiffre, dans les quatre départements touchés, à 113,3 millions d’euros.

Le 22 octobre dernier, le Premier ministre a annoncé que l’État contribuerait aux travaux de réparation à hauteur de 65,9 millions d’euros, soit un taux d’indemnisation de 58 % des dommages. C’est un niveau de prise en charge exceptionnel.

Concernant les particuliers et les commerçants, l’arrêté de classement en catastrophe naturelle du 28 juin dernier, qui inclut les communes de Saint-Béat, Bagnères-de-Luchon, Barbazan et Montréjeau, devrait permettre une indemnisation plus rapide.

J’ai bien entendu, monsieur le sénateur, votre interpellation sur la résiliation unilatérale des contrats par les compagnies d’assurance. Il s’agit d’une faculté ouverte aux assureurs, sur laquelle nous allons nous pencher en concertation avec vous.

Je sais que, sur le terrain, la situation est urgente et que le manque à gagner des commerçants met en péril la survie de certains d’entre eux. Nous faisons tout ce qui est en notre pouvoir pour que ces interventions aillent le plus rapidement possible.

Pour ce qui concerne la remise en marche de l’économie locale, le camping de Saint-Béat a effectivement été fermé pour des raisons de sécurité. C’est toutefois une simple mesure préventive. Le préfet étudie actuellement toutes les possibilités – sécurisation du site ou relocalisation – pour permettre une réouverture au plus vite.

Les services de l’État sont extrêmement mobilisés sur place et bien évidemment à votre disposition pour vous accompagner et étudier toute nouvelle question qui se poserait, comme celle qui est relative à la résiliation des contrats d’assurance.

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Mirassou, pour la réplique.

M. Jean-Jacques Mirassou. Je vous remercie, madame la ministre, de nous apporter des réponses en matière d’urgence de court terme, et de dresser des perspectives à moyen et long termes.

Bon nombre de mes collègues ont insisté sur la spécificité des zones de montagne, qui connaissent d’ores et déjà des difficultés au quotidien lorsque tout va bien, et a fortiori lorsque survient un événement tel que celui s’est produit en Comminges.

Je ne doute pas une seconde que la puissance publique répondra à l’appel que j’ai lancé.

(M. Jean-Claude Carle remplace M. Jean-Pierre Bel au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. Jean-Claude Carle

vice-président

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial.

M. Jean-Pierre Vial. Madame le ministre, le très haut débit constitue une infrastructure au cœur de l’avenir des territoires. Or la montagne connaît à cet égard une situation spécifique dont les handicaps ne sauraient être, une nouvelle fois, sous-estimés.

Après les zones d’ombre, les zones blanches et les zones grises, le haut débit n’a pas encore trouvé sa couleur !

Nous avons bien noté les engagements pris par le Gouvernement au travers du plan « France très haut débit ». Il a ainsi été souligné que ce service devrait s’appuyer sur toutes les technologies permettant d’apporter le plus rapidement possible le meilleur débit à tous nos concitoyens via différentes technologies.

Nul ne peut le contester, le déploiement d’un tel réseau ne peut être envisagé sans un engagement et un investissement lourds des collectivités ; à défaut, un tel déploiement ne serait pas envisageable en dehors des zones AMII.

Il est donc nécessaire de donner aux collectivités un certain nombre d’assurances tant sur les moyens financiers que sur les dispositifs techniques et réglementaire.

Le premier engagement est bien évidemment d’ordre financier. Si le Gouvernement dit assumer sa part avec une contribution de 3,3 milliards d’euros de subvention, encore convient-il que les territoires puissent avoir l’assurance que le handicap de la montagne sera pris en compte dans les critères d’accompagnement de l’État.

La deuxième question concerne le déploiement des technologies nécessaires, qui pourrait faire craindre aux collectivités de s’engager dans des investissements lourds, avec des risques importants.

Il s’agit notamment de l’activation et du maintien du réseau cuivre, qui suscitent de nombreuses interrogations, et des risques de substitution ou de l’investissement dans les fibres optiques, dont l’usage pourrait être évité par les opérateurs.

La troisième garantie est d’ordre réglementaire et concerne l’activation des réseaux de fibre optique, qui ne saurait être laissée à la seule discrétion des opérateurs.

Parmi les priorités des collectivités en matière de desserte du très haut débit, il y a bien sûr les espaces économiques, dont les stations touristiques sont une composante forte.

Pouvez-vous préciser les conditions dans lesquelles l’opérateur d’un réseau d’initiative publique, un RIP, peut intervenir sur le segment entreprises, notamment sur les secteurs où il existe déjà une offre de gros, y compris à l’intérieur du périmètre des zones d’intervention conventionnée AMII ? Pouvez-vous aussi préciser quelles sont les modalités d’attribution des aides de l’État au titre du plan « France très haut débit » sur le segment de marché entreprises dans ces zones géographiques ?

Enfin, une bonne part des zones prioritaires imposées aux opérateurs pour le déploiement de la couverture 4G est située en secteur de montagne.

Est-il possible d’imposer aux opérateurs titulaires des licences 4G de s’engager sur une départementalisation de leur calendrier de couverture, notamment pour l’échéance intermédiaire de 2017, ne faisant référence qu’à des objectifs chiffrés au niveau national, sans cartographie précise ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Cécile Duflot, ministre. Monsieur le sénateur Vial, je tiens tout d’abord à rappeler que le plan « France très haut débit » introduit des éléments prenant en compte la spécificité des territoires difficiles à équiper, comme les zones de montagne.

Les taux d’intervention ont en effet été majorés et les critères de calcul tiennent compte de la dispersion de l’habitat comme du taux de ruralité, ce qui permet de coller à la réalité des coûts, notamment dans les territoires de montagne. Le périmètre des dépenses éligibles est en outre assez large, car il comprend les réseaux de collecte et les raccordements finaux.

Ce programme « France très haut débit » concerne en priorité le déploiement de la fibre au plus près de l’usager, ce qui constitue une première étape du déploiement du réseau optique. Les équipements d’activation du réseau cuivre ne sont pas financés par l’État et la collectivité reste maîtresse du choix de la technologie qu’elle déploie.

En ce qui concerne précisément le basculement du cuivre vers la fibre, le Gouvernement a par ailleurs créé une mission spécifique, dont la conduite a été confiée à M. Paul Champsaur, ancien président de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP.

Sur le cas particulier que vous avez cité du segment marché entreprises dans les zones AMII, conformément à la réglementation européenne, les aides de l’État ne soutiennent les RIP que sur les territoires dépourvus d’initiative privée. Il faut absolument rentrer dans ce cadre, quoi que nous en pensions.

Enfin sur la question de la 4G, les obligations des opérateurs sont bien départementalisées puisque le taux de couverture devra être de 99,6 % de la population nationale en 2027 et d’au moins 90 % de la population de chaque département français en 2024 et 95 % en 2027. Il y a donc bien un objectif départementalisé.

En outre, l’accélération de ce déploiement est envisageable, sur tel ou tel territoire, suivant des modalités à identifier entre opérateurs et collectivités. Je veillerai à ce que cette mobilisation soit menée, en particulier dans les territoires ruraux où le déploiement de la 4G pour des usages fixes ou mobiles est encore plus important et urgent.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vial, pour la réplique.

M. Jean-Pierre Vial. Je vous remercie, madame le ministre, de vos réponses extrêmement précises, notamment sur le premier point en ce qui concerne l’aide de l’État avec un taux majoré, que j’ai bien noté.

Sur la situation du cuivre, j’ai noté qu’une mission avait été confiée à M. Champsaur. Cette question est tout à fait importante, car les décisions qui seront prises – vous connaissez les inquiétudes des élus sur ce sujet, compte tenu de ce qui a été dit – constitueront bien évidemment un élément non négligeable dans le choix des schémas mis en place par les collectivités.

Je voudrais insister sur les zones d’entreprises dans les secteurs couverts, les zones AMII. Il est tout de même pour le moins paradoxal que les opérateurs puissent déclarer préempter un territoire sur lequel les zones économiques constituent une priorité, alors même que les collectivités n’ont que très peu de garanties, pour ne pas dire aucune.

M. le président. La parole est à M. Pierre Bernard-Reymond.

M. Pierre Bernard-Reymond. Madame la ministre, la plus flagrante des inégalités de territoire, c’est celle qui naît de l’enclavement.

À cet égard, l’exemple du département des Hautes-Alpes est très significatif. Qu’il s’agisse du projet de tunnel ferroviaire franco-italien sous le col du Montgenèvre ou de l’autoroute A51, dernier chaînon manquant autoroutier à réaliser entre Grenoble et Gap sur les itinéraires Genève-Marseille et Lyon-Nice, ce n’est qu’une longue histoire de promesses non tenues et d’espoirs déçus.

Décidée en 1987, annulée par M. Gayssot, réinscrite par son successeur, cette autoroute a fait l’objet d’un débat public favorable en 2004. Promise par le candidat Hollande, elle a été reportée par la commission Duron au-delà de 2050.

Quand on se moque des populations à ce point, il ne faut pas s’étonner qu’elles se révoltent et que les bonnets rouges fleurissent sur notre territoire ! En effet, vous avez ignoré l’axe Gap-Grenoble dans le schéma des infrastructures de transport, mais, pour la mise en place de l’écotaxe, vous n’avez pas oublié la route actuelle, la route Napoléon, qui est à peu près dans l’état où l’a laissé l’Empereur !

Ce projet autoroutier, conforme à l’article 10 de la loi Grenelle 1, devait générer 2 000 vrais emplois par an pendant six ans et, en acceptant de longues durées de concessions, il pouvait être financé entièrement par le secteur privé. Plutôt que d’inciter les entreprises et les collectivités à créer de faux emplois pour redresser la courbe du chômage avant la fin de l’année, n’eut-il pas été préférable de susciter des investissements d’avenir tel que celui-ci ?

Mais je ne viens pas demander une nouvelle fois au Gouvernement de tenir ses engagements. Je lui propose de s’alléger de ce dossier en le décentralisant auprès d’un groupement des quatre départements les plus concernés : l’Isère, la Drôme, les Hautes-Alpes et les Alpes-de-Haute-Provence, dont les présidents, trois d’entre eux étant socialistes, sont tous très favorables à cette réalisation.

L’égalité des territoires par la décentralisation, par l’investissement et par la création d’emplois, n’est-ce pas un beau programme, madame la ministre ? (Mme Christiane Kammermann et M. René-Paul Savary applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.