M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 208, présenté par M. Le Cam, Mmes Didier, Schurch et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
La France s’engage à défendre au niveau européen une politique énergétique publique, qui soustrait le secteur énergétique de la concurrence libre et non faussée, seule capable de relever les défis en terme de sécurité, de sûreté, d’indépendance énergétique, et de service public de l’énergie.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. L’article 11 bis fait partie des dispositions du projet de loi qui suscitent de vives critiques, car il s’agit pour le Gouvernement d’acter la libéralisation du secteur énergétique. En effet, cet article supprime de manière progressive l’accès aux tarifs réglementés de vente de gaz naturel pour les consommateurs non domestiques dont le niveau de consommation est supérieur à 30 000 kilowattheures par an et instaure un régime de transition pour la suppression des tarifs réglementés de gaz et d’électricité.
Ainsi, monsieur le ministre, vous nous demandez d’inscrire dans la loi la fin de certains tarifs réglementés, dans l’espoir de mettre fin à un contentieux avec la Commission européenne portant sur la question des tarifs réglementés de gaz. Au-delà du fait que nous ne pensons pas que cet article puisse définitivement mettre fin au contentieux relatif à l’énergie, nous sommes inquiets du renoncement qui est acté ici. En effet, cette disposition aurait pu être inscrite dans la loi de privatisation de GDF ou dans la loi NOME, c'est-à-dire portant nouvelle organisation du marché de l'électricité, puisqu’elles procèdent de la même logique.
Au travers de cet amendement, nous rappelons notre vision de la politique énergétique. Si nous défendons une maîtrise publique du secteur énergétique, ce n’est pas par amour du passé, comme certains aiment à caricaturer nos positions, c’est parce que nous considérons que les États garants de l’intérêt général ont seuls la capacité de planifier à l’échelle européenne une politique énergétique assurant la sécurité des réseaux, des approvisionnements, des installations, l’indépendance de l’Europe et la solidarité envers les plus démunis.
Cette maîtrise publique n’est évidemment pas suffisante. C’est pourquoi nous insistons également sur la participation citoyenne et salariée, comme nous avons eu l’occasion de le rappeler la semaine dernière lors du débat sur la production énergétique en France.
Pour notre part, nous ne sommes pas d’accord avec la politique énergétique européenne, monsieur le ministre, et nous vous demandons de porter un autre projet pour une transition réussie au service des populations.
M. le président. L'amendement n° 191, présenté par M. Cointat, est ainsi libellé :
Avant l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au second alinéa de l’article L. 445-4 du code de l’énergie, les mots : « consommant moins de 30 000 kilowattheures par an » sont supprimés.
La parole est à M. Christian Cointat.
M. Christian Cointat. Le principe de réversibilité, c'est-à-dire la possibilité de retour aux tarifs réglementés, auquel les consommateurs domestiques sont particulièrement attachés, est conditionné à une consommation de gaz inférieure à 30 000 kilowattheures. Comme l’a révélé une récente étude menée par une association de consommateurs, cette limitation légale n'est pas comprise par les consommateurs et freine ceux qui sont désireux de changer de fournisseur.
Ce seuil, qui n'a aucune justification économique et qui apparaît comme une discrimination dont sont victimes les plus gros consommateurs de gaz, constitue un indéniable frein au changement de fournisseur et à la stimulation de la concurrence sur le marché du gaz qui peut réellement être favorable aux consommateurs.
Afin d'inciter les consommateurs à faire jouer la concurrence et à mettre un terme à un verrou législatif qui, semble-t-il, ne serait pas applicable dans les faits, il importe de supprimer cette limitation pour les consommateurs domestiques.
M. le président. L'amendement n° 195 rectifié, présenté par M. Merceron, Mme Létard, MM. Amoudry et Capo-Canellas, Mme Férat et M. Tandonnet, est ainsi libellé :
Alinéas 9 à 18
Remplacer ces alinéas par un paragraphe ainsi rédigé :
II. – Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission de régulation de l’énergie et de l’Autorité de la concurrence, précise, dans un délai maximum de deux mois suivant la promulgation de la loi, les conditions d’application du présent article ainsi que celles correspondant à l’article L. 337-9 du code de l’énergie relatif aux consommateurs finals bénéficiant des tarifs réglementés de vente d’électricité jusqu’au 31 décembre 2015.
La parole est à M. Henri Tandonnet.
M. Henri Tandonnet. Le dernier paragraphe de l'article 11 bis prévoyant déjà un décret d'application, il est par conséquent pertinent de renvoyer à ce décret toutes les mesures d'application et les détails des procédures applicables à la suppression des tarifs réglementés de vente d'électricité et de gaz pour les professionnels, qui sont du domaine réglementaire.
En effet, selon la Constitution, seuls les principes fondamentaux des obligations civiles et commerciales sont déterminés par la loi, les autres dispositions relevant du règlement. Il est donc cohérent de conserver dans la loi uniquement le principe de la suppression des tarifs réglementés de vente de gaz naturel pour les consommateurs non résidentiels résultant du compromis négocié avec la Commission européenne au début de l’année 2013, ainsi que le calendrier correspondant.
M. le président. L'amendement n° 153, présenté par M. César, Mme Lamure et M. Cornu, est ainsi libellé :
Alinéas 9 à 18
Remplacer ces alinéas par un paragraphe ainsi rédigé :
II. - Un décret, soumis à l’avis de l’Autorité de la concurrence, précise, dans un délai maximum de deux mois suivant la promulgation de la loi, les conditions d’application du présent article ainsi que celles correspondant à l’article L. 337-9 du code de l’énergie relatif aux consommateurs finals bénéficiant des tarifs réglementés de vente d’électricité jusqu’au 31 décembre 2015.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
Mme Élisabeth Lamure. Par cet amendement, nous proposons de renvoyer les mesures d’application et les détails des procédures applicables à un décret d’application et de conserver dans la loi uniquement le principe de la suppression des tarifs réglementés de vente du gaz naturel pour les consommateurs non résidentiels.
Ce décret précisera également les modalités visant à préparer la suppression des tarifs réglementés de vente d’électricité pour les professionnels, qui est prévue par la loi NOME.
M. le président. L'amendement n° 325, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 18, seconde phrase
Après le mot :
précise
insérer les mots :
, en tant que de besoin,
La parole est à M. le ministre délégué.
M. Benoît Hamon, ministre délégué. En l’état actuel d’avancement des travaux sur la disparition des tarifs réglementés du gaz et de l’électricité, le Gouvernement n’est pas en mesure de conclure avec certitude à la nécessité d’un texte réglementaire d’application de l’article 11 bis. Peu probable en ce qui concerne la disparition des tarifs réglementés du gaz, qui est déjà très encadrée par cet article du projet de loi, cette nécessité ne pourrait concerner, le cas échéant, que les tarifs réglementés d’électricité.
Toutefois, une concertation approfondie avec les acteurs devra avoir lieu pour étayer un diagnostic solide sur ce point. Aussi l’article 11 bis doit-il prévoir qu’un décret en Conseil d’État viendra préciser « en tant que de besoin » ses conditions d’application.
Tel est l’objet du présent amendement.
M. le président. L'amendement n° 22, présenté par M. Lenoir, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au 9° du II de l’article L. 121-32 du code de l’énergie, les mots : « assurant des missions d’intérêt général » sont supprimés.
La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
M. Jean-Claude Lenoir. L’article L. 121-32 du code de l’énergie prévoit la désignation d’un fournisseur de dernier recours, qui assure la fourniture de gaz pour les clients effectuant une mission d'intérêt général, par exemple les collectivités. La désignation des fournisseurs de dernier recours est réalisée par arrêté ministériel, après appel à candidature auprès de tous les fournisseurs autorisés.
Or l’article 11 bis du présent projet de loi supprime l’accès aux tarifs réglementés de vente pour tous les consommateurs non domestiques dont le niveau de consommation est supérieur à 30 000 kilowattheures par an.
Il paraît donc nécessaire de compléter ce dispositif en prévoyant, comme c’est déjà le cas pour l’électricité conformément à l’article L. 333-3 du code de l’énergie, un dispositif de fourniture de gaz de dernier recours pouvant bénéficier à l’ensemble des clients.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’amendement n° 208 tend, de facto, à supprimer l’article 11 bis. Il ne peut recevoir un avis favorable de la commission, car cet article, résultant de discussions avec la Commission européenne, permet de maintenir l’accès au tarif réglementé du gaz naturel pour les particuliers tout en le supprimant progressivement pour les professionnels au-delà d’un certain niveau de consommation. En conséquence, la commission émet un avis défavorable.
L’amendement n° 191 vise à étendre à tous les consommateurs de gaz la possibilité de revenir au tarif réglementé. Non seulement cette mesure reviendrait sur des arbitrages opérés dans le cadre de la loi visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre, mais elle serait difficilement compatible avec les autres dispositions de l’article 11 bis. Je viens de l’indiquer, ce dernier organise la disparition progressive de l’accès au tarif réglementé pour les usagers consommant plus de 30 000 kilowattheures par an. La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
Par ailleurs, l’Assemblée nationale a fait le choix, confirmé par la commission des affaires économiques du Sénat, de préciser dans ce projet de loi les dispositions transitoires permettant de mettre en application ce dispositif le plus rapidement possible.
Les amendements nos 195 rectifié et 153 tendent à remplacer ces dispositions par un décret en Conseil d’État. Or il serait difficile d’assurer la rédaction de ce décret dans les deux mois, comme visent à l’imposer ces amendements. J’ajoute que, parallèlement, la suppression des tarifs réglementés sera effective, pour certains consommateurs, trois mois après la publication du présent texte.
Il me semble donc préférable de nous rallier à l’amendement n° 325, présenté par le Gouvernement. Celui-ci tend à maintenir dans ce projet de loi les dispositions transitoires permettant de préparer le basculement vers une offre de marché. Dans ce cadre, un décret en Conseil d’État précisera, en tant que de besoin, les conditions d’application de l’article 11 bis.
En conséquence, je demande le retrait des amendements nos 195 rectifié et 153, au profit de l’amendement n° 325.
Enfin, les dispositions de l’amendement n° 22 font écho à des discussions menées en commission. Le dispositif que cet amendement tend à mettre en œuvre nous paraît intéressant. Aussi la commission souhaite-t-elle, sur ce sujet, connaître l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. L’amendement n° 208 vise à remplacer l’article 11 bis par un article relatif aux engagements de la France en matière de politique énergétique publique.
Je rappelle que l’article 11 bis permet la mise en œuvre de l’accord conclu au mois de janvier 2013 par les autorités françaises et la Commission européenne au sujet de l’extinction progressive des tarifs réglementés. La législation européenne l’impose, et nous avons dû avancer sur quelques mesures afin d’éviter un recours de la Commission devant la Cour de justice de l’Union européenne.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voyez quels acquis nous obtenons via cet accord : ce dispositif maintient les tarifs réglementés pour les petits professionnels et les consommateurs résidentiels. Qui plus est, il présente une grande progressivité. Le calendrier fixé permet une extinction par paliers, étalée jusqu’à la fin de l’année 2015, pour les entreprises les moins consommatrices. Le Gouvernement travaille avec l’ensemble des acteurs concernés afin que la transition s’opère dans les meilleures conditions.
Je le rappelle, la France défend, à l’échelle européenne, une position équilibrée en matière d’énergie. Celle-ci repose sur trois objectifs complémentaires : la compétitivité des prix de l’énergie pour les ménages et les entreprises, la sécurité de l’approvisionnement et la protection de l’environnement.
Dans une certaine mesure, l’ouverture des marchés contribue pleinement à l’atteinte de ces différents objectifs. Ainsi, dans le domaine du gaz, elle a permis l’émergence de nouveaux modes d’indexation des contrats, plus favorables aux consommateurs, alors que ces contrats étaient jusqu’à présent indexés sur les seuls produits pétroliers.
Dans le même temps, la France reste fidèle au service public de l’énergie. Cet attachement fort se traduit, notamment, par le maintien des tarifs réglementés pour les petits consommateurs à côté des offres de marché, par l’existence des tarifs sociaux pour les consommateurs en situation de précarité, ou encore par la péréquation tarifaire, qui permet aux consommateurs d’électricité de payer le même prix partout en France.
Vous le constatez, les préoccupations exprimées via le présent amendement sont pleinement prises en compte par le Gouvernement. Par ailleurs, le contenu juridique de cette disposition n’est pas, à nos yeux, suffisamment solide.
Je demande donc le retrait de l’amendement n° 208 ; à défaut, j’émettrais un avis défavorable.
L’amendement n° 191 vise à supprimer, à l’article L. 445-4 du code de l’énergie, le seuil des 30 000 kilowattheures par an, en deçà duquel un consommateur final de gaz naturel peut revenir à tout moment au tarif réglementé. Il s’agit d’un seuil d’irréversibilité, permettant de distinguer lesdits usagers des consommateurs qui, eux, ne peuvent plus revenir aux tarifs réglementés de vente une fois qu’ils y ont renoncé.
Ce dispositif est essentiel pour garantir la conformité du dispositif au droit européen et l’extinction progressive des tarifs réglementés pour les professionnels. Le seuil de 30 000 kilowattheures par an équivaut à deux fois la consommation annuelle moyenne des ménages chauffés au gaz naturel. Il couvre l’essentiel des consommations domestiques, à l’exception de cas très marginaux, à savoir les très grandes demeures.
En 2013, la France s’est engagée auprès de la Commission européenne à supprimer par étapes les tarifs réglementés de vente du gaz naturel pour les consommateurs non domestiques, afin de mettre un terme à un contentieux. C’est sous réserve de l’instauration de ce seuil de 30 000 kilowattheures que la Commission a accepté le maintien des tarifs réglementés pour une catégorie ciblée de consommateurs. À nos yeux, sa suppression reviendrait à envoyer un très mauvais signal au Conseil constitutionnel et à la Commission. Elle remettrait en cause la parole de la France et créerait un très fort risque de contentieux.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 191.
L’amendement n° 153 a quant à lui pour objet de renvoyer à un décret soumis à l’Autorité de la concurrence l’ensemble des modalités de mise en œuvre de la fin des tarifs réglementés de vente de gaz naturel et d’électricité pour les consommateurs non domestiques.
Les modalités de mise en œuvre de la fin des tarifs réglementés du gaz naturel – mentionnées à l’article 11 bis du présent texte – ont été fixées de manière consensuelle, à l’issue d’une longue phase de concertation avec les professionnels concernés et la Commission de régulation de l’énergie, la CRE.
À nos yeux, il n’y a pas lieu de rédiger un tel décret d’application. En effet, les modalités d’application de cette mesure sont précisément définies par le présent article. L’entrée en vigueur de certaines dispositions d’information des clients, en particulier, devra être très rapide. L’élaboration d’un texte réglementaire risquerait de la retarder. Les fournisseurs ont besoin d’une bonne visibilité globale sur le dispositif prévu dès la promulgation du présent texte, au regard du calendrier contraint de la disparition des tarifs réglementés, notamment pour le gaz naturel.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement, de même qu’à l’amendement n° 195 rectifié.
Enfin, l’amendement n° 22 tend à généraliser, pour la fourniture de gaz, le dispositif du fournisseur de dernier recours, en l’étendant au consommateur non domestique, lequel n’assume aucune mission d’intérêt général.
Dans le contexte de la suppression des tarifs réglementés pour le gaz naturel, la fourniture de dernier recours prévue par le code de l’énergie vise exclusivement à maintenir la continuité d’approvisionnement des clients prioritaires assurant des missions d’intérêt général, en cas de défaillance du fournisseur – qu’il s’agisse d’une rupture d’approvisionnement, d’une faillite, etc.
Or étendre ce dispositif à tous les consommateurs non domestiques ne répondrait nullement aux véritables enjeux liés à la disparition des tarifs réglementés, à savoir la continuité d’approvisionnement des clients n’ayant pas modifié aux échéances leur contrat de fourniture au tarif réglementé, et la nécessité de garantir que tous les clients puissent obtenir un fournisseur.
Je le rappelle, pour assurer la continuité d’approvisionnement, le présent article met en œuvre un dispositif transitoire très encadré, élaboré en étroite collaboration avec tous les acteurs concernés.
De surcroît, une réflexion est en cours pour évaluer la nécessité de mesures spécifiques ciblant les clients professionnels qui se heurteraient à des difficultés pour trouver un fournisseur. Je songe notamment aux clients peu attractifs ou faisant face à des difficultés financières.
La mesure que cet amendement tend à mettre en œuvre dénaturerait totalement la notion de « fournisseur de dernier recours », qui ne reposerait plus sur aucune considération d’intérêt général. Elle ne serait pas adaptée pour améliorer réellement le dispositif d’accompagnement de la disparition des tarifs réglementés du gaz, au regard des problèmes concrets qui se posent.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur l'amendement n° 22.
M. le président. Monsieur Cointat, l’amendement n° 191 est-il maintenu ?
M. Christian Cointat. Monsieur le ministre, je vous remercie des explications détaillées et pertinentes que vous nous avez fournies au titre de cet amendement. Je me demandais si le seuil de 30 000 kilowattheures ménageait une marge de manœuvre suffisante pour la consommation des ménages. Étant donné qu’il représente le double de ladite consommation moyenne – à quelques exceptions près, mais quelle est la règle qui n’en souffre pas ? – je suis rassuré sur ce point.
De surcroît, nous devons prendre en compte l’organisation qu’il convient de respecter dans ce domaine, compte tenu des normes européennes. J’en conviens tout à fait.
Dans ces conditions, je suis satisfait de la réponse qui m’a été apportée, et je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 191 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 195 rectifié.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour explication de vote sur l'amendement n° 22.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le ministre, votre réponse ne m’a pas convaincu. Cet amendement vise à étendre la fourniture de gaz au titre du dernier recours à l’ensemble des entreprises et des professionnels susceptibles de subir des difficultés.
De quels problèmes et de quels usagers s’agit-il ? Prenons l’exemple d’un boulanger. Là où il se trouve, cet artisan assume une mission d’intérêt général. Imaginons qu’il éprouve des difficultés, que son contrat de fourniture de gaz ait été rompu à cause des dettes qu’il a contractées, mais qu’il puisse continuer à exercer son métier. Las, il ne trouve pas de fournisseur. La solution que je propose permet de maintenir – pour un temps certes assez court, mais prévenant malgré tout une rupture brutale – la fourniture de gaz et, partant, d’assurer la poursuite des activités de cet artisan.
Ce dispositif vaut également pour un petit atelier ou une entreprise de taille modeste qui, brusquement, se verrait privée de ce combustible, nécessaire à son fonctionnement.
La solution que je propose via cet amendement s’apparente à ce qui existe déjà pour l’électricité. Elle est, à mes yeux, dictée par le bon sens. Et je ne suis absolument pas convaincu que cette disposition dénaturerait l’article 11 bis !
Mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait que de nombreuses missions d’intérêt général sont, aujourd’hui, assumées par des entreprises on ne peut plus nécessaires dans le monde rural. Aussi, je vous invite sincèrement à adopter cet amendement, malgré l’avis négatif du Gouvernement.
M. Alain Gournac. Très bien !
M. le président. Je mets aux voix l'article 11 bis, modifié.
(L'article 11 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 11 bis
M. le président. L'amendement n° 307, présenté par M. Lenoir, est ainsi libellé :
Après l’article 11 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 111-75 du code de l’énergie, les mots : « La Commission de régulation de l'énergie veille à ce que les fournisseurs d'électricité» sont remplacés par les mots : « La Commission de régulation de l'énergie veille à ce que chaque gestionnaire de réseau public de distribution d’électricité d’une part, les fournisseurs d'électricité d’autre part, ».
La parole est à M. Jean-Claude Lenoir.
M. Jean-Claude Lenoir. Cet amendement est lié à l'article 11 bis, mais, pour des raisons formelles, il vise à insérer un article additionnel. Il s’agit d’inciter, sous le contrôle de la Commission de régulation de l’énergie, la CRE, chaque gestionnaire de réseau, d’électricité comme de gaz, à jouer un rôle de tiers de confiance, dans un contexte très précis, que je rappellerai brièvement.
Les consommateurs de gaz et d’électricité, pour se préparer à l’échéance de la disparition des tarifs réglementés de vente, doivent être en mesure de recenser l’ensemble de leurs consommations, site par site. Or la démarche ne se révèle pas simple et les transmissions d’informations par l’opérateur historique sont souvent aléatoires.
L’accès transparent des consommateurs à leurs données de consommation est un élément essentiel au bon fonctionnement du marché. À l’ère des tarifs réglementés, la répartition des rôles entre le gestionnaire de réseau et le fournisseur historique pouvait s’expliquer, ce dernier étant officiellement le point d’entrée unique du consommateur. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, du fait de l’ouverture des marchés.
La répartition des rôles entre ERDF et les fournisseurs avait été imaginée dans un contexte très différent, avec des volumétries plus faibles pour les clients quittant les tarifs réglementés de vente et des clients de plus grande taille.
Le consommateur est propriétaire de ses données de consommation, et le gestionnaire de réseau en est le dépositaire naturel, puisqu’il est gestionnaire des outils de comptage, opérateur de télé-relève et chargé de publier les données.
Le fournisseur, choisi par le consommateur, est mandaté par lui pour accéder à ses données de comptage, mais il ne doit pas bénéficier d’une exclusivité d’accès ni être l’interlocuteur obligé du consommateur. Celui-ci doit pouvoir saisir la CRE si le gestionnaire de réseau de distribution ne le met pas en mesure d’accéder directement à ses propres données.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Alain Fauconnier, rapporteur. L’article L. 111-75 du code de l’énergie prévoit que les fournisseurs d’électricité mettent à la disposition de leurs clients leurs données de consommation sous une forme accessible et harmonisée au niveau national.
Cette disposition est cohérente avec la pratique selon laquelle le fournisseur constitue l’interlocuteur naturel du client, même pour des questions qui relèveraient en fait du gestionnaire de réseau de distribution. Confier à deux opérateurs différents la responsabilité de transmettre au client les données de consommation risque d’introduire de la confusion. Il est donc prématuré, selon moi, d’inscrire cette disposition dans la loi.
La commission demande par conséquent le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Benoît Hamon, ministre délégué. Pardonnez-nous, monsieur Lenoir, mais l’avis du Gouvernement est semblable à celui de la commission.
Vous fixez comme objectif de rendre les gestionnaires de réseaux publics de distribution d’électricité responsables, au même titre que les fournisseurs, de la mise à disposition aux clients de leurs données de consommation, sous le contrôle de la CRE.
L’accès transparent des consommateurs à leurs données de consommation est, en effet, un élément nécessaire au bon fonctionnement du marché, notamment dans la perspective de la disparition des tarifs réglementés de vente, qui emportera, pour les clients, la nécessité d’utiliser ces données pour choisir l’offre de marché la plus adaptée à leur profil.
Le décret n° 2001-630 relatif à la confidentialité des informations détenues par les gestionnaires de réseaux autorise déjà ceux-ci à transmettre les données de consommation au consommateur. Ce décret permet également à un fournisseur tiers mandaté par le consommateur d’accéder à l’historique des données de consommation, afin qu’il soit en mesure de formuler une offre.
De plus, dans le cadre de la suppression des tarifs réglementés par les consommateurs non résidentiels, la CRE a envisagé une réflexion avec l’ensemble des acteurs – consommateurs, gestionnaires de réseaux, fournisseurs – sur la mise à disposition des données de consommation par les gestionnaires de réseaux de distribution. Elle pourrait être amenée à en faire évoluer les modalités à l’avenir.
Monsieur Lenoir, votre amendement nous paraissant satisfait, je vous demande de le retirer. À défaut, je serais contraint d’émettre un avis défavorable.