M. le président. L’amendement n° 20, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Esther Benbassa.
Mme Esther Benbassa. L’objet de cet amendement est de supprimer l’article 2 de la présente proposition de loi, qui vise à autoriser la mise en demeure d’évacuer les lieux illicitement occupés, en l’absence d’atteinte à l’ordre public, si le préfet propose en contrepartie aux personnes concernées des emplacements disponibles dans un rayon de trente kilomètres.
Dans sa version initiale, l’article 2 de la proposition de loi supprimait purement et simplement les motifs d’ordre public fondant la mise en demeure de quitter les lieux en cas de stationnement illicite. Cela n’était pas acceptable du point de vue des valeurs que défend le groupe écologiste. En effet, l’article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 aurait alors eu pour seule vocation de protéger le droit de propriété.
Cette suppression n’était pas non plus acceptable d’un point de vue constitutionnel, car le Conseil constitutionnel a rappelé, dans sa décision du 9 juillet 2010, que « les mesures de police administrative susceptibles d’affecter l’exercice des libertés constitutionnellement garanties […] doivent être justifiées par la nécessité de sauvegarder l’ordre public et proportionnées à cet objectif ».
Nous avons donc accueilli avec soulagement le rejet de la version initiale de cet article par la commission des lois. Cependant, sur l’initiative de son rapporteur, la commission a complété le dispositif actuel en proposant une solution de rechange : la mise en demeure d’évacuer les lieux en contrepartie d’une proposition effective de stationnement dans une aire située à une distance raisonnable – moins de trente kilomètres – du terrain occupé.
Cette solution est bien plus acceptable que celle qui nous était proposée en premier lieu. Toutefois, nous considérons que la condition d’atteinte à l’ordre public, telle que rappelée par le Conseil constitutionnel, doit être maintenue dans toutes les situations et qu’il ne saurait y avoir d’exception.
C’est la raison pour laquelle nous proposons la suppression de l’article 2.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable.
Nous avons souhaité trouver un équilibre, que cet amendement, ainsi que ceux qui suivront, risquent de remettre en cause. Il me semble préférable d’en rester aux dispositions adoptées par la commission. J’en appelle donc à l’esprit de responsabilité de chacun de nos collègues.
Mme Benbassa propose de maintenir le statu quo, mais il faut penser à ces communes qui essaient de faire en sorte que les choses se passent au mieux en cas d’occupation illicite, en évitant justement l’atteinte à l’ordre public. Ces communes vertueuses, en l’absence d’atteinte à l’ordre public, ne pourrait alors pas obtenir l’évacuation des lieux : reconnaissez, ma chère collègue, que ce type de situation pousse au crime !
Par conséquent, il est logique, en cas d’occupation illicite, quelles que soient les actions engagées pour éviter toute atteinte à l’ordre public, que le maire puisse demander l’évacuation ; sinon, où va-t-on ? C’est la raison pour laquelle, m’appuyant sur le texte initial de cet article, qui n’était pas opérant, j’ai essayé en commission de faire émerger une position d’équilibre.
Je propose d’en rester là et je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, ma chère collègue. J’en appelle également au sens des responsabilités de ceux de nos collègues qui défendront d’autres amendements portant sur cet article : sur cette question, il faut conserver un équilibre entre le respect des droits et la prise en compte du souci des communes vertueuses de réduire le plus possible le risque d’atteinte à l’ordre public. À ce titre, le texte de la commission me semble mériter d’être soutenu.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Les auteurs de cet amendement considèrent qu’il ne saurait y avoir d’exception au principe selon lequel la mise en demeure de quitter les lieux ne peut intervenir en l’absence de trouble à l’ordre public.
Lorsqu’une commune respecte ses obligations en matière de schéma d’accueil des gens du voyage ou lorsqu’elle dispose d’un emplacement provisoire agréé par le préfet, ce dernier peut, à la demande du maire, du propriétaire ou du titulaire du droit d’usage du terrain, mettre en demeure les propriétaires de résidences mobiles qui stationnent irrégulièrement sur ce terrain, qu’il soit public ou privé, de quitter les lieux.
Le délai d’exécution de la mise en demeure, qui peut intervenir sans recours préalable au juge, doit être fixé dans cette mise en demeure et ne peut toutefois être inférieur à vingt-quatre heures, sous réserve de l’exercice d’un recours suspensif devant le juge administratif. Celui-ci statue alors dans le délai de soixante-douze heures à compter de sa saisine.
Cette procédure administrative se substitue à la procédure judiciaire, qui constitue le droit commun. Elle vise, pour les communes qui ont satisfait à leurs obligations en matière de schéma d’accueil des gens du voyage, à accélérer sensiblement la procédure d’expulsion des occupants illicites, tout en garantissant le respect des droits fondamentaux tant des propriétaires que des gens du voyage.
Toutefois, en l’état des dispositions actuellement en vigueur, le préfet doit justifier, à l’appui de sa mise en demeure de quitter les lieux, de l’existence d’un risque de trouble à l’ordre public créé par le stationnement illicite, en tenant compte du contexte local, ce qui n’est pas toujours aisé, notamment lorsque l’occupation est récente.
Le texte initial de la proposition de loi supprimait tout encadrement de la mise en demeure ; celle-ci pouvait intervenir du seul fait de l’occupation illicite, en l’absence de conditions tenant à l’ordre public, mais également en l’absence des garanties liées à l’accueil. Elle risquait par là même d’encourir la critique du juge constitutionnel.
La nouvelle rédaction de l’article 2, issue d’un amendement déposé en commission par le rapporteur, répond à cette critique, puisqu’elle rétablit la condition d’atteinte à l’ordre public figurant dans le texte actuel et ajoute une nouvelle possibilité de mise en demeure, distincte de la première, mais soumise à la condition de la garantie d’un accueil sur une aire de stationnement située dans un rayon de trente kilomètres autour du lieu d’installation.
Il faut rappeler que les mesures de police administrative susceptibles d’affecter l’exercice des libertés constitutionnellement garanties, au nombre desquelles figure la liberté d’aller et venir, doivent en principe être justifiées par la nécessité de sauvegarder l’ordre public et proportionnées à cet objectif.
Il est toutefois possible de soutenir que l’objet de la mise en demeure est bien, dans tous les cas, la préservation de l’ordre public, troublé du seul fait d’une occupation illicite, souvent massive et durable. En ce sens, l’atteinte portée aux libertés peut être proportionnée, si une possibilité effective de stationnement existe à proximité.
Cette nouvelle possibilité d’évacuation constituerait une avancée notable pour les communes ayant satisfait à leurs obligations en termes d’accueil des gens du voyage, mais elle doit alors se combiner avec d’autres dispositions visant à les contraindre en la matière, afin de garantir l’accueil effectif des gens du voyage. À notre sens, ce type de disposition ne peut se concevoir qu’au sein d’un texte construit autour d’un équilibre rigoureusement pensé. Le Gouvernement s’en remet par conséquent à la sagesse du Sénat sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Michel, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Michel. Nous ne pourrons voter cet amendement, qui prévoit la suppression pure et simple de l’article 2 tel qu’il a été récrit par la commission.
En effet, la version initiale de cet article supprimait tout motif d’ordre public pour procéder à l’évacuation des lieux illicitement occupés. Il s’agissait d’un assouplissement tout à fait excessif et, de plus, manifestement contraire à la Constitution.
Le rapporteur a préféré compléter le dispositif de l’article 2 en proposant que la mise en demeure d’évacuer les lieux, même dans le cas où il n’existe pas de trouble manifeste à l’ordre public, soit possible en contrepartie d’une proposition effective de stationnement dans une aire située à une distance de trente kilomètres au plus du terrain illicitement occupé.
Selon le rapporteur, cette modification permet d’atteindre un équilibre entre la prise en compte des préoccupations des communes vertueuses et le respect de l’aspiration légitime des gens du voyage à pouvoir accéder à un emplacement pour stationner leur caravane.
À la suite des auditions qu’il a organisées, le rapporteur a rappelé les difficultés, pour les communes en règle au regard du schéma d’accueil des gens du voyage, d’obtenir le respect des règles locales de stationnement. Il a indiqué que certaines communes sont doublement sanctionnées du fait de leur volonté de prendre en charge au mieux la question des campements sauvages : à cette fin, elles installent notamment des sanitaires sur le terrain occupé, mais, ce faisant, elles atténuent les atteintes à la salubrité, la sécurité et la tranquillité publiques. Or, le juge administratif apprécie la notion d’atteinte à l’ordre public de manière restrictive, en exigeant l’existence de troubles avérés.
Par ailleurs, le rapporteur a rappelé la jurisprudence du Conseil d’État, qui fait droit au refus du préfet d’apporter le concours de la force publique au motif que l’évacuation causerait un trouble plus grand à l’ordre public que celui qui est porté à ce dernier par l’occupation illicite.
On peut donc comprendre que la commission des lois se soit attelée à apporter des réponses aux communes de bonne foi, qui se trouvent démunies face à des situations génératrices de tensions, et qu’elle ait retenu le principe d’une mise en demeure d’évacuer les lieux, sous la condition de la présentation d’une offre de stationnement effective et proche
Le groupe socialiste n’a pas déposé d’amendement de suppression de cet article et ne votera donc pas l’amendement n° 20, mais il a souhaité assouplir encore le dispositif, pour le rendre véritablement compatible avec la jurisprudence constitutionnelle, ce qui n’est pas encore le cas à notre avis, en proposant d’élargir le périmètre de la mesure – c’est l’objet de notre amendement n° 57 – ou de renvoyer sa définition à un décret – c’est l’objet de notre amendement n° 58, que j’ai, par là même, défendu.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 4 rectifié, présenté par Mme Troendlé, MM. Carle, Doligé, Lenoir, Gilles, Leleux, de Legge et Cambon, Mme Masson-Maret, MM. Milon, Bizet, Gournac, Lefèvre et Grignon, Mmes Boog et Debré, MM. B. Fournier, Mayet, P. André, Couderc et Dufaut, Mmes Giudicelli et Mélot, M. Reichardt, Mme Bruguière, MM. Cléach, du Luart, Billard et Charon et Mme Deroche, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le deuxième alinéa du II de l’article 9 de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage est supprimé.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. J’ai bien entendu l’appel du rapporteur à notre sens des responsabilités : c’est dans un esprit de responsabilité que je défends cet amendement visant à supprimer le deuxième paragraphe de l’article 9 de la loi du 5 juillet 2000, qui dispose que la mise en demeure ne peut intervenir que si le stationnement est de nature à porter atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques.
Dans le respect du droit de propriété, une mise en demeure par le préfet doit pouvoir intervenir dès qu’un stationnement illicite est constaté par le propriétaire ou le titulaire du droit d’usage du terrain.
M. le président. L'amendement n° 58, présenté par M. J.P. Michel et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après les mots :
par les mots
rédiger ainsi la fin de cet article :
ou dès lors qu’il existe, dans un périmètre défini par décret, une aire d’accueil spécialement aménagée et offrant des capacités d’accueil suffisantes.
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement a déjà été défendu, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 29, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après les mots :
aire d’accueil située
insérer les mots :
dans le département ou, à défaut,
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. La gestion des conflits occasionnés par les occupations illégales de terrains publics ou privés par des gens du voyage nécessite évidemment un certain sens de l’écoute et de la diplomatie.
Plus vite nous irons vers la mise en œuvre des orientations de chaque schéma départemental et mieux nous préviendrons les effets toujours désastreux des occupations illégales.
Cela dit, il nous semble important de rappeler que le rôle du préfet, en matière de résolution de ces problèmes, demeure crucial. Cet amendement tend donc à rappeler et à marquer clairement la nécessité d’offrir une solution de rechange en cas d’occupation illégale, dans le cadre des disponibilités offertes par les schémas départementaux d’accueil des gens du voyage, afin de résoudre le conflit temporairement créé.
Faudra-t-il, dans cet esprit, aller jusqu’à concevoir des aires d’accueil d’une capacité légèrement supérieure aux mouvements observés ? En tout cas, chacun appréciera, en fonction de l’expérience acquise depuis quatorze ans, ce qu’il convient de faire dans le cadre de l’évaluation des schémas.
Toujours est-il que nous devons, en toutes circonstances, privilégier les solutions locales fondées sur le dialogue et la volonté de résolution des difficultés rencontrées. Tel est le sens de cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 57, présenté par M. J.P. Michel et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Remplacer le nombre :
30
par le nombre :
50
La parole est à M. Jean-Pierre Michel.
M. Jean-Pierre Michel. Cet amendement a déjà été défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. Je renouvelle, monsieur Lefèvre, mon appel à la responsabilité de chacun. Nous sommes là pour élaborer la loi, pas un communiqué de presse ! L’objectif est de parvenir à rédiger une disposition qui soit opérante et de nature à passer le filtre du Conseil constitutionnel.
À cet égard, M. le ministre a lu tout à l’heure la décision du Conseil constitutionnel aux termes de laquelle « les mesures de police administrative susceptibles d’affecter l’exercice des libertés constitutionnellement garanties, au nombre desquelles figure la liberté d’aller et venir, composante de la liberté personnelle protégée par les articles II et IV de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, doivent être justifiées par la nécessité de sauvegarder l’ordre public et proportionnées à cet objectif ».
Par conséquent, votre amendement n° 4 rectifié va totalement à l’encontre de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. En l’adoptant, nous irions droit dans le mur !
La commission des lois propose une rédaction visant à tenir compte de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Elle prévoit notamment un périmètre relativement restreint pour l’offre d’emplacements disponibles, afin de ne pas porter atteinte à la liberté d’aller et venir, tout en maintenant la possibilité de demander une évacuation en cas d’atteinte avérée à l’ordre public : cela demeure tout de même indispensable !
Il nous appartient d’élaborer un texte qui ne soit pas un simple coup de clairon : il doit permettre une avancée significative et opérationnelle, sans encourir la censure du Conseil constitutionnel. C’est pourquoi je vous demande, monsieur Lefèvre, de bien vouloir retirer cet amendement. Sinon, cela révèlerait que votre motivation n’est pas réellement d’élaborer une loi qui permette d’améliorer les choses.
Mme Catherine Troendlé. Bien sûr que nous sommes dans une démarche d’amélioration !
M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. Eh bien non, ma chère collègue, si vous maintenez un tel amendement, qui va à l’encontre de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, c’est que vous ne voulez pas changer les choses ! Cela signifie que votre seule préoccupation est d’obtenir un effet d’affichage ! La commission des lois, en revanche, est animée par un souci d’efficacité : c'est la raison pour laquelle nous avons voulu prendre en compte la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
M. Jean-Louis Carrère. On va leur expliquer !
M. Jean-Yves Leconte, rapporteur. L’amendement n° 58 de M. Jean-Pierre Michel vise à prévoir que le périmètre soit défini par décret. Là encore, j’en appelle au respect des exigences constitutionnelles. Proposer de renvoyer à un décret la définition du périmètre de relogement en l’absence d’atteinte à l’ordre public semble quelque peu audacieux, compte tenu de la jurisprudence que j’ai évoquée. Il est préférable de fixer le périmètre par la loi, afin de bien encadrer le dispositif. C'est la raison pour laquelle la commission est défavorable à l’amendement n° 58.
Concernant l’amendement n° 29, madame Cukierman, sa rédaction élargit le périmètre où doit se situer l’aire d’accueil à l’ensemble du département : la solution de réinstallation proposée pourra se trouver à plus de 100 kilomètres du terrain occupé de façon illicite, et ne saurait plus dès lors être qualifiée de « locale ». Je crains en outre qu’une telle disposition ne passe pas le filtre du Conseil constitutionnel. Par conséquent, votre amendement me semble contreproductif.
Enfin, la commission est favorable à l’amendement n° 57, qui vise à porter de trente à cinquante kilomètres le périmètre dans lequel pourra être située l’aire d’accueil faisant l’objet de la proposition de stationnement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, ministre délégué. Le premier critère d’efficacité, pour le législateur, est de voter des textes qui soient conformes à la Constitution et à la jurisprudence constitutionnelle. C’est en ayant cette exigence à l’esprit qu’il faut examiner les amendements qui nous sont soumis, car ils portent manifestement sur des sujets touchant à des principes constitutionnels, rappelés par le Conseil constitutionnel lui-même dans sa décision du 9 juillet 2010.
De ce point de vue, l’adoption de l’amendement n° 4 rectifié aurait des conséquences très lourdes. Il vise en effet à supprimer la condition d’atteinte à la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publiques permettant au préfet de mettre en demeure les gens du voyage occupant illicitement un terrain. La suppression de cette condition poserait à l’évidence, selon nous, un problème d’équilibre au regard de la décision précitée du Conseil constitutionnel.
En conséquence, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 4 rectifié.
L’amendement n° 58, présenté par M. Michel, relève de la même problématique : ses auteurs pensent que son dispositif, plus nuancé, pourrait franchir le cap du contrôle de constitutionnalité, mais cela reste extrêmement aléatoire !
Ainsi, monsieur Michel, le Gouvernement s’interroge sur le renvoi à un décret de la détermination du périmètre dans lequel devra se situer l’aire d’accueil. Il nous semble que se pose, là aussi, une difficulté d’ordre constitutionnel, voire un problème de compétence négative du législateur. En effet, si la distance est considérée comme un élément essentiel, le législateur ne peut pas renvoyer sa définition au pouvoir réglementaire. Compte tenu de cette difficulté manifeste, j’émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable.
Le même raisonnement vaut pour l’amendement n° 29. La constitutionnalité des rédactions proposées est, à ce stade, aléatoire : j’invite chacun à la prudence. Nous reprendrons ce débat sur le périmètre pertinent ; il est légitime, mais, en l’état, pour les raisons précédemment exposées, le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’amendement n° 29.
En ce qui concerne l’amendement n° 57, ses auteurs ont pris davantage de précautions en proposant d’élargir à cinquante kilomètres le périmètre considéré, afin d’être en conformité avec la proposition de loi Raimbourg. Cela n’infirme pas totalement le raisonnement que j’ai tenu, mais le dispositif est sans doute plus acceptable au regard de la Constitution, sans que l’on puisse toutefois avoir de certitude à cet égard. Dans ces conditions, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je rappelle que la proposition de loi de MM. Pierre Hérisson et Jean-Claude Carle a été inscrite par la conférence des présidents dans le cadre de l’espace réservé au groupe UMP, d’une durée de quatre heures.
À dix-huit heures trente, les quatre heures sont écoulées. Je me vois donc dans l’obligation d’interrompre l’examen de ce texte.
Il appartiendra à la conférence des présidents d’inscrire la suite de la discussion de cette proposition de loi, ainsi que la suite de la discussion de celle de MM. Jean-Pierre Leleux et Jean-René Lecerf, à l’ordre du jour d’une prochaine séance.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures trente, est reprise à dix-huit heures trente-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.)
PRÉSIDENCE DE M. Jean-Pierre Bel
M. le président. La séance est reprise.
8
Dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes
M. le président. L’ordre du jour appelle le dépôt du rapport annuel de la Cour des comptes.
Huissiers, veuillez faire entrer M. le Premier président de la Cour des comptes.
(M. le Premier président de la Cour des comptes est introduit dans l’hémicycle selon le cérémonial d’usage.)
M. le président. Monsieur le Premier président, c’est un très grand plaisir de vous accueillir comme chaque année dans cet hémicycle pour la remise du rapport annuel de la Cour des comptes.
Je tiens une nouvelle fois à saluer les relations étroites et fructueuses que le Sénat entretient depuis de nombreuses années avec votre institution, qui, conformément à l’article 47-2 de la Constitution, assiste le Parlement dans sa mission de contrôle de l’action du Gouvernement, de contrôle de l’exécution des lois de finances et de l’application des lois de financement de la sécurité sociale, ainsi que dans l’évaluation des politiques publiques.
Chacun aura pu le constater, la Cour des comptes est un acteur essentiel dans le débat public. Elle contribue par ses observations, les plus objectives possible, non seulement à éclairer les parlementaires dans leurs choix, mais aussi à informer l’opinion publique sur la situation des comptes publics et la gestion des services publics.
La remise du rapport annuel de la Cour est toujours très attendue. Je n’oublie pas pour autant les autres publications qui fournissent également de précieuses informations et dont vous rendez régulièrement compte devant nos commissions. En octobre dernier, la Cour a ainsi publié pour la première fois un rapport consacré aux finances publiques locales auquel la Haute Assemblée, représentante des collectivités territoriales, a été particulièrement attentive et qui a donné lieu à l’audition dans nos murs du président de la quatrième chambre.
Les commissions des finances et des affaires sociales de notre assemblée bénéficient chaque année de votre concours et de l’excellence de votre expertise pour l’exercice de leur fonction de contrôle. Comme vous, elles sont très vigilantes sur les suites données aux enquêtes que vous avez réalisées à leur demande et elles organisent, en présence des représentants de la Cour, des réunions « pour suite à donner » avec les rapporteurs de la commission et les représentants des organismes contrôlés.
Je forme le vœu que les relations entre le Sénat et la Cour continuent de se développer, et je salue, à ce titre, la mise en place d’un nouvel instrument de coopération par la dernière loi de programmation militaire, qui prévoit la transmission à toutes les commissions permanentes du Parlement, chacune dans leur domaine respectif de compétence, de toutes les communications adressées par la Cour des comptes aux membres du Gouvernement.
Autre volet d’une coopération confiante et fructueuse entre nos deux institutions : la signature, au mois de juillet dernier, de la convention conférant à la Cour des comptes, à partir de l’exercice 2013, la mission de certifier les comptes du Sénat. Les travaux de la mission d’audit des comptes de l’exercice 2013 ont débuté au mois de septembre dernier et s’achèveront au mois de mai prochain, avec la remise du rapport de certification. Ainsi, dans le respect du principe de l’autonomie des assemblées, auquel nous sommes très attachés, nous pourrons mieux répondre, ensemble, à l’exigence de transparence, de clarté et de sincérité des comptes, qui fonde la confiance de nos concitoyens dans leurs institutions.
Monsieur le Premier président, je vous donne maintenant la parole.
M. Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes. Monsieur le président, j’ai l’honneur de vous remettre le rapport public annuel de la Cour des comptes. (M. le Premier président remet à M. le président du Sénat le rapport annuel de la Cour des comptes.)
M. Rémy Pointereau. Vous l’avez dédicacé ?