M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Francis Delattre. … jour de carence à rétablir, etc. Nous affirmons avec la Cour que seule la maîtrise de la masse salariale, accompagnée d’une hausse de la durée effective du travail dans les administrations, permettrait des économies substantielles et renouvelables.
Les magistrats de la Cour des comptes jugent aussi impératif le maintien du gel du point d’indice, alors que, depuis l’installation de M. Valls à Matignon, on entend surtout parler de dépenses nouvelles, dont seul un ersatz figure dans le rectificatif.
Naturellement, on peut comprendre que revenir sur la promesse présidentielle d’une stabilité globale du nombre de fonctionnaires exigerait un peu de lucidité et de courage. Toutefois, le recours aux taxes et impositions pour tenir ou réduire les déficits se révèle désormais inopérant. En effet, en 2013, les augmentations budgétées à hauteur de 30 milliards d’euros n’ont produit que la moitié de cette somme,…
M. Roger Karoutchi. Eh oui !
M. Francis Delattre. … et les mêmes effets en cascade sont prévisibles pour 2014, dans une fourchette de 3 à 4 milliards d’euros supplémentaires.
La situation budgétaire réelle et toutes les annonces médiatiques suscitent donc bien des doutes sur les 50 milliards d’économies annoncées pour les trois prochaines années.
En tout état de cause, l’abus de l’arme fiscale montre aujourd’hui nettement ses limites. De même, une croissance inférieure à 1 % et des dépenses simplement ralenties dans leur croissance ne peuvent que conduire à une nouvelle progression de la dette, qui est loin d’être stabilisée. Et le cap redoutable des 2 000 milliards d’euros est bien en vue !
Mes chers collègues, nous sommes un pays qui vit totalement à crédit dès le 1er octobre de chaque année, et la baisse temporaire des taux d’intérêt ne fait qu’éloigner la prise de conscience d’une telle situation.
Ce budget rectificatif en est une parfaite illustration. Ainsi, un allégement des impôts des familles les plus fragiles est indiscutablement souhaitable aujourd’hui, mais il est financé par de supposés redressements fiscaux, par définition des ressources exceptionnelles, donc non pérennes.
Des amendements adoptés ici même avec une partie de votre majorité, monsieur le secrétaire d'État, y compris des sénateurs socialistes, tendant à rétablir la non-imposition fiscale des heures supplémentaires, à donner à la fois du pouvoir d’achat à des salariés moyens et modestes et de la souplesse aux PME pour gérer leurs carnets de commandes, ont été supprimés au forceps d’un dictat politique stupide.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Absolument ! En nouvelle lecture.
M. Francis Delattre. Voilà la philosophie de votre budget rectificatif. Il nous enfonce un peu plus dans le marasme d’une dette insoutenable et il décourage le travail.
Qu’en est-il de votre grande réforme destinée à redonner de la compétitivité à notre économie en contribuant à la baisse des coûts horaires de la main-d’œuvre ? Le merveilleux crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, chef-d’œuvre de l’actuelle majorité (M. le président de la commission des finances rit.), ressemble à un chef-d’œuvre d’ingénierie fiscale à effets fragmentés. Grâce à Eurostat, c’est incontestable, nous en connaissons exactement les résultats.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il sert à quelque chose !
M. Francis Delattre. Au premier trimestre de 2014, la France affiche une hausse de 1,2 % de ses coûts salariaux par rapport à l’année précédente, donc une hausse supérieure à la moyenne de la zone euro, qui s’élève à 0,9 %, et surtout par rapport à ses concurrents directs : 1,1 % pour l’Allemagne, 0,5 % pour l’Espagne et moins 0,1 % pour l’Italie. Ces pays sont d’ailleurs, sur le plan du commerce extérieur, nos principaux concurrents sur de grands marchés comme le marché fournisseur.
M. Francis Delattre. L’effet CICE a déjà fondu, monsieur le secrétaire d’État. Dans un pays à inflation faible, en situation de chômage massif et où les salaires s’envolent, l’on relève un marché du travail rigide, inadapté aux évolutions et dont la surprotection nuit essentiellement à l’incorporation des jeunes qui veulent travailler. Voilà la situation !
Le CICE ne fera que retarder les efforts et les réformes sur la flexibilité et l’adaptabilité du marché du travail français, tout en alimentant, vous le savez très bien, une autre dette : la dette fiscale.
Quelle est la ligne principale de ce budget, mes chers collègues ? Dettes + dettes = un avenir incertain pour les jeunes générations, qui devront sans aucun doute rembourser celles-ci ! En deux ans, monsieur le secrétaire d’État, vous avez aggravé la dette de 147 milliards d’euros, soit 93,6 % du PIB, c’est-à-dire une augmentation de 5,4 points.
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il faut supporter l’opposition, monsieur le secrétaire d’État !
M. Philippe Marini, président de la commission des finances. Il ne faut pas trop simplifier les choses…
M. Francis Delattre. Monsieur le secrétaire d’État, nous sommes loin de vos discours enflammés de la campagne au sujet d’une dette qui affecterait jusqu’à notre indépendance politique, notre souveraineté.
M. Christian Cambon. Quel échec !
M. Francis Delattre. Avec ce projet de loi de finances rectificative, il y a loin de la coupe aux lèvres.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, le groupe UMP votera avec résolution contre ce projet de loi de finances rectificative pour 2014. (Vifs applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Michèle André.
Mme Michèle André. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, bien que le Sénat soit cantonné, depuis deux ans maintenant, au seul examen de « moitiés » de lois de finances, ne boudons pas notre plaisir de disposer d’une nouvelle discussion générale sur l’une d’entre elles, en cette fin de session parlementaire.
C’est en effet l’un de ces moments qui permet à notre majorité de retracer l’action d’ensemble et de démontrer, par là même, sa cohérence ; je le rappellerai dans un court instant. C’est également pour l’opposition un excellent viatique, puisqu’il offre le confort de ne pas examiner ce qu’il y a de plus complexe dans un texte de loi de finances, à savoir les économies de dépenses publiques.
Je vais y revenir, car, ces derniers jours, l’évocation de certains chiffres par de hauts responsables de l’UMP ne manque pas d’éveiller notre curiosité, de par l’ambition qu’ils sous-tendent et parce que, nous venons de l’entendre à l’instant, ils sont déclamés par ceux qui ont doublé la dette publique de notre pays en quelques années, performance à ce jour inédite et que la crise financière de 2008 n’explique pas à elle seule.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Il faut le dire !
Mme Michèle André. Le texte que nous examinons aujourd’hui en nouvelle lecture comporte l’une des mesures phares de ce premier volet du pacte de responsabilité et de solidarité que le Gouvernement s’est engagé à mettre en œuvre.
Il s’agit d’une mesure massive de réduction de l’impôt sur le revenu, qui produira ses effets dès le mois de septembre prochain pour plus d’un milliard d’euros ; au total, ce sont près de 4 millions de ménages qui verront leur impôt diminuer, dont près de 2 millions cesseront d’être imposables ou ne le deviendront pas. Cette mesure bénéficiera aux ménages modestes et a vocation à être entérinée pour les années à venir, dans un dispositif pérenne qui sera présenté lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2015.
L’UMP nous parle des classes moyennes et de « matraquage fiscal » ; très bien ! Ce que nous constatons, chers collègues de l’opposition, c’est que votre groupe a voté contre cette mesure lors de la première lecture du projet de loi de finances rectificative, voilà quelques semaines. Cherchez bien la cohérence...
Au demeurant, ce vote est en soi cohérent avec ce que vous avez accompli lors du dernier quinquennat en matière de fiscalité. En effet, rappelons-le à chaque occasion, même si cela dérange, soyez rassurés, bilan contre bilan, car, en deux ans, nous avons fait plus que vous en dix ans pour protéger les plus fragiles et les plus modestes d’une fiscalité forte, en demandant aux plus aisés de réaliser des efforts de solidarité.
M. Joël Guerriau. Cela reste à démontrer !
Mme Michèle André. Nous le démontrerons !
M. Christian Cambon. On ne vous croit plus !
Mme Michèle André. Vous aviez instauré le bouclier fiscal, dont le coût a été estimé par la Cour des comptes à près de 3,6 milliards d’euros. Vous aviez détricoté l’impôt de solidarité sur la fortune, gelé le barème de l’impôt sur le revenu.
En deux ans, nous avons revalorisé chaque année les dispositifs de décote sur l’impôt sur le revenu, afin de protéger les plus modestes, nous avons réintroduit de la progressivité dans un dispositif duquel elle avait disparu, avec une tranche supplémentaire à l’impôt sur le revenu, nous sommes revenus sur le gel du barème et nous avons effectivement demandé, parallèlement, un effort aux plus aisés. C’est notre conception de ce qu’est un système fiscal juste, et c’est notre cohérence.
En termes de politique fiscale, nous pouvons bien entendu avoir des projets différents et débattre des dispositifs. Toutefois, il faut être clair quant aux conséquences de ses prises de position : sur la première partie de ce texte, voter contre, c’est s’opposer aux deux mesures qui la structurent et qui consistent en des baisses d’impôt pour les ménages en ayant le plus besoin.
Les principales autres mesures relatives au lancement du pacte de responsabilité et de solidarité sont contenues dans le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, à savoir, pour les entreprises, des allégements de cotisations patronales, et pour les salariés, des allégements de cotisations salariales. Ceux qui disent ne pas voir venir l’application concrète du pacte devraient s’intéresser de plus près à l’examen au Parlement de ces textes, car le pacte est bel et bien en train d’entrer en application, quand, dans le même temps, le CICE est entré en vigueur aussi auprès des entreprises et se traduit directement dans leurs comptes de résultat.
Dans cette séquence de fin de session, nous avons pu, depuis la première lecture du projet de loi de finances rectificative, échanger en séance sur le débat d’orientation des finances publiques et les perspectives tracées par le Gouvernement pour la période 2015-2017. Le « paquet fiscal » portant sur les entreprises montre, s’il en était besoin, que notre stratégie de redressement de la compétitivité est un préalable à la création d’emplois par notre économie.
À ceux qui donnent des leçons d’économie et de compétitivité, j’appelle à un peu de modestie. Rappelons-nous la période allant de 2002 à 2012, avec un déficit commercial qui s’est inexorablement détérioré, aboutissant à un record de 71 milliards d’euros atteint en 2012, et 750 000 emplois détruits dans l’industrie.
Alors, oui, la reprise est aujourd’hui fragile, la croissance se fait attendre, le chômage reste à un niveau très élevé. Toutefois, contrairement à vous, nous avons des actes à mettre en face de nos paroles. Nous mettons en œuvre des mesures pour favoriser un redressement de notre économie, car, après ce premier paquet de dispositions qui entreront en vigueur en 2014-2015, d’autres suivront, comme la diminution du taux d’impôt sur les sociétés à compter de 2017.
Le débat d’orientation des finances publiques a permis de donner des perspectives sur l’autre chantier majeur que nous avons lancé, à savoir celui de la réduction de la dépense publique. Le texte que nous examinons aujourd’hui procède à des réductions supplémentaires de 1,6 milliard d’euros sur le budget de l’État. Entre 2015 et 2017, ce sont 50 milliards d’euros d’économies sur la dépense publique qui seront réalisées. C’est considérable et dans la lignée des efforts historiques déjà accomplis, puisque nous avons réduit le déficit public chaque année depuis notre arrivée au pouvoir.
La voie que nous avons choisie est celle qui ménage également la reprise, encore fragile. Nous avons récemment entendu François Fillon, sous lequel, lorsqu’il était Premier ministre, la dette publique avait progressé de 600 milliards d’euros, nous parler d’un objectif de 100 milliards d’euros d’économies. Certes, « tout ce qui est excessif est insignifiant », mais il paraît évident que, à ce niveau, l’impact récessif serait absolument considérable. Pour que l’on ait un ordre d’idée, cela représenterait l’équivalent de plus du tiers des dépenses de l’État, hors dette et pensions…
Dans ces conditions, quid du détail des économies ? Il paraît évident que, dans un tel scénario, les collectivités locales subiraient une baisse de leurs dotations près de deux fois supérieure à celle que nous avons programmée.
Certes, cette diminution représente déjà un effort considérable pour nos territoires, mais nous avons prévu des mesures d’accompagnement de cette baisse, ce que vous n’aviez pas fait ou pas su faire lorsque vous avez supprimé la taxe professionnelle, avec les conséquences en cascade que l’on sait aujourd’hui.
Bref, se contenter d’examiner les mesures financières relatives aux recettes et faire chuter tout texte financier lors du vote de cette fameuse première partie, via des majorités improbables, permet au moins de ne pas avoir à avancer de propositions concrètes en matière d’économies et de dépenses publiques.
Ceux qui se prêtent à ce jeu seront toujours perdants, et cela nous renforce dans notre conviction que la voie que nous avons empruntée est celle de l’équilibre et du redressement progressif de notre pays, qui ne peut être mené à bien qu’au prix de réformes conduites dans le temps.
De nouveau, monsieur le secrétaire d’État, nous vous confirmons que nous voterons ce projet de loi de finances rectificative pour 2014, qui propose, notamment, de réduire le montant de l’impôt pour 4 millions de nos concitoyens parmi les plus modestes. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, si l’on doit résumer en quelques mots ce projet de loi de finances rectificative, je dirai que le Gouvernement fait ce qu’il a à faire : il met en œuvre le pacte de responsabilité et de solidarité pour 2014, comme il le fera, j’en suis sûre, en 2015.
En outre, ainsi que vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État, ce texte est parcouru par un autre fil rouge : celui de la maîtrise de la dépense. Nous tenons ainsi les deux bouts de la chaîne : pacte de responsabilité et de solidarité, d’un côté, maîtrise des dépenses, de l’autre.
En première lecture, nous avons assisté à un débat sur la définition du solde structurel qui a été intéressant et très animé à l’Assemblée nationale. Le Gouvernement est finalement revenu à la définition qui avait été initialement retenue, après, il faut le souligner, que M. le rapporteur général eut proposé à la commission des finances du Sénat de revenir à cette position de sagesse.
Parmi les décisions prises à l’Assemblée, certaines étaient attendues, et d’autres moins.
Ainsi, le dispositif du péage de transit, qui vient se substituer à l’écotaxe, était attendu. Nous n’avons pu en débattre en séance plénière, mais la commission a apporté son soutien au Gouvernement sur cette mesure très attendue.
Moins attendu était le débat sur la taxe de séjour, mais, là encore, comme M. le rapporteur général l’a rappelé, la commission s’était mise d’accord sur une proposition de conciliation relative à l’augmentation de la taxe de séjour votée par les députés et de concertation avec les professionnels avant toute mise en œuvre.
Concernant le péage de transit, il restera au Gouvernement et à vous-même, monsieur le secrétaire d’État, à résoudre un problème délicat, car, comme vous l’avez dit à l’Assemblée nationale, il va falloir trouver les financements complémentaires pour l’AFITF, l’agence de financement des infrastructures de transport de France.
Vous avez en effet reconnu qu’un problème se poserait dès le début de 2015. Nous vous donnons donc rendez-vous à la fin du mois de septembre à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances initiale pour 2015.
Pour revenir à la question de la taxe de séjour, dont l’initiative, cette fois, était parlementaire, et non gouvernementale, la commission avait proposé d’attendre au moins la remise du rapport Rabin-Woerth, ce qui n’a pas empêché une discussion sur le sujet à l’Assemblée nationale.
Finalement, sur proposition du Gouvernement, l’Assemblée nationale a voté la suppression du dispositif proposée en nouvelle lecture. Étant francilienne, je retiens que vous vous êtes engagé, monsieur le secrétaire d’État, au nom du Gouvernement, à trouver une solution, toujours dans le projet de loi de finances initiale pour 2015, afin de dégager 140 millions d’euros de contribution au financement des infrastructures de transport ferroviaire, sur la base de propositions intégrant la taxe de séjour réformée. Cet engagement a d’ailleurs été confirmé par le Premier ministre lors d’un conseil des ministres.
Je me réjouis donc particulièrement de cet engagement, d’autant qu’il avait été pris par le précédent Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. Du reste, Manuel Valls connaît bien le problème, car il est lui-même élu francilien, et il est parfaitement conscient de ce que le réseau ferroviaire doit être rénové, mais aussi développé.
Je crois donc que la proposition de la commission des finances, sur l’initiative de François Marc, est, en fin de compte, partiellement satisfaite. Par conséquent, avançons !
Pour finir, fidèle à sa tradition de travail « haut de gamme » – sans vouloir vexer nos collègues députés, nous avons une appétence particulière pour les problématiques qui dépassent nos frontières, notamment pour tout ce qui touche à l’Europe – la commission des finances du Sénat s’inquiète beaucoup des distorsions entre les systèmes régissant la vie des sociétés au sein de l’Union européenne et de la zone euro, notamment dans le domaine de la fiscalité applicable aux entreprises.
Comme l’a rappelé tout à l’heure notre collègue Philippe Marini, président de la commission des finances, la Cour de justice européenne nous offre l’occasion de nous pencher à nouveau sur ces problèmes, avec sa décision du 12 juin dernier qui consacre une nouvelle forme d’intégration fiscale, de nature horizontale cette fois, entre « sociétés sœurs », et non plus seulement entre « sociétés filles ».
J’ai déposé l’amendement n° 36, à l’article 5 octies, pour relever que la concurrence fiscale en matière d’imposition des sociétés au sein de l’UE et, a fortiori, au sein de la zone euro, est une guerre nuisible et que le droit national de la fiscalité est devenu une arme redoutable, qui confère à l’évidence des avantages comparatifs à certains pays.
La Commission européenne, par la voix de son nouveau président, s’est d’ailleurs engagée à examiner de près certains atouts attractifs dont disposent quelques pays, notamment les Pays-Bas.
Certes, nous en disposons nous aussi : je pense, par exemple, au crédit d’impôt recherche, qui, je crois, fait partie à juste titre des mesures sanctuarisées par le Gouvernement. Néanmoins, en France, le régime fiscal des entreprises est plutôt dissuasif.
Un pays de la zone euro est le champion toutes catégories en matière d’attractivité des sièges sociaux, des filiales filles et, désormais, des sociétés sœurs : je veux parler des Pays-Bas.
Je ne crois pas que nous pourrons débattre de cet amendement, qui est identique à celui qui a été déposé par Philippe Marini (M. le président de la commission des finances acquiesce.), car il s’agit d’un amendement d’appel : il est urgent, en effet, de mettre fin à ces pratiques d’optimisation fiscale, dès lors que la jurisprudence de la Cour de justice européenne s’impose à tous et partout.
Du reste, même aux États-Unis, le Congrès commence à s’émouvoir de voir les sociétés américaines les plus productives partir s’installer aux Pays-Bas. Faudra-t-il que, une fois encore, le droit imposable à tous nous vienne d’outre-Atlantique, comme en témoigne, tout récemment, le projet de loi autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement français et le Gouvernement américain en vue d’améliorer le respect des obligations fiscales à l’échelle internationale et de mettre en œuvre la loi FATCA ?
Ce que je propose, à l’instar de mon collègue Philippe Marini, c’est d’anticiper en permettant aux filiales productives, celles qui essaiment dans nos territoires, celles qui créent des emplois, de bénéficier de l’intégration fiscale. Il s’agit surtout d’entreprises industrielles, qui participent à la compétition mondiale et qui sont souvent performantes.
À cet égard, je salue l’annonce toute récente par Jean-Yves Le Drian de la fusion dans l’industrie – ô combien stratégique – des chars d’assaut entre le français Nexter et l’allemand KMW. Si la holding qui naîtra de cette fusion devrait être domiciliée aux Pays-Bas, il faut, au moins, en prévision de cet accord extrêmement important de création d’une société européenne dans le domaine de la défense, que les sociétés productives sœurs en France bénéficient de la jurisprudence de la Cour de la justice européenne.
Il ne faut pas trop tarder ! C’est le sens de cet appel, et j’espère que le Gouvernement l’entendra. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je voudrais apporter quelques éléments de réponse, non exhaustifs, aux remarques et aux questions qui ont été formulées par les différents orateurs.
Je reviens tout d’abord sur trois questions quelque peu transversales qui ont été évoquées et que M. le rapporteur général a pointées de façon tout à fait exhaustive.
Tout d'abord, concernant l’apprentissage, nous avons mis en place, pour un coût de 200 millions d’euros, une mesure que je m’étais d’ailleurs contenté d’esquisser en première lecture, puisque, si je me souviens bien, je vous avais rejoints au Sénat à la sortie de la séance liminaire de la conférence sociale à laquelle j’avais participé, de sorte que je ne pouvais évidemment pas vous faire des annonces précises.
Dans un premier temps, ces 200 millions d’euros seront prélevés sur la part régionale du financement de l’apprentissage ; puis, ils seront compensés en loi de finances initiale par des recettes dynamiques, comme l’a opportunément expliqué M. le rapporteur tout à l’heure.
Ensuite, pour ce qui est de la taxe de séjour, nous n’avons pas eu l’occasion d’en débattre longuement, mais je vous confirme les intentions du Gouvernement : celui-ci s’engage à financer le STIF, le Syndicat des transports d’Île-de-France, à hauteur de 140 millions d’euros par an pour réaliser les investissements prévus.
Enfin, le troisième sujet qui a été évoqué est l’écotaxe, ou plutôt le péage de transit qui l’a remplacée. Il sera effectivement nécessaire de trouver des recettes complémentaires, puisque le produit du péage du transit, tel qu’il est calibré, déduction faite de la négociation qui est en cours pour sortir, le moins mal possible, d’un funeste contrat avec une société privée que vous connaissez, ne sera pas suffisant, à l’évidence, pour financer l’AFITF.
Toutefois, le problème se poserait non pas en 2014 – il semblerait que nous puissions passer le cap de la fin de l’année, sous réserve de ne pas engager de nouveaux projets –, mais en 2015. Il faudra trouver des sources de financement de remplacement, et nous aurons l’occasion d’en discuter lors de l’examen du projet de loi de finances initiale.
Je reviens un instant sur la taxe de séjour. Je veux simplement rappeler, parce que cela a été tout même peu dit, que les députés ont seulement offert aux collectivités territoriales la faculté d’augmenter la taxe de séjour.
Je tiens à le préciser, car, quand on lit la presse, quand on entend les débats et les discours des uns et des autres, on a l’impression que l’Assemblée nationale aurait proposé d’augmenter la taxe de séjour. C’est tout à fait inexact ! Vous connaissez mieux que quiconque, ici, au Sénat, les modalités de fonctionnement de la taxe de séjour. En l’espèce, le texte en cause fixait des plafonds à ne pas dépasser, ce qui ne voulait pas dire qu’il y aurait nécessairement augmentation de la taxe.
Pour preuve, c’est à l’occasion du débat à l’Assemblée que nombre de nos concitoyens ont appris l’existence de cette taxe.
M. François Marc, rapporteur général de la commission des finances. Tout à fait !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. En effet, il existe beaucoup de communes qui ont des hôtels, mais qui, pour autant, ne perçoivent pas cette taxe.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vais vous présenter ce que le Gouvernement entend faire pour l’avenir en la matière. Toutefois, on nous instruit parfois de mauvais procès et, en l’occurrence, il faut bien préciser qu’il y a simplement une faculté qui est donnée aux collectivités locales, si elles le souhaitent, d’augmenter leur taxe de séjour, puisque le produit de cette imposition leur revient. Il ne faut pas se lasser de le rappeler, car, si l’on en croit la lecture de certains articles de presse, cela ne semble pas évident pour tout le monde !
Je précise que le cas de la surtaxe, si j’ose dire, qui est consacrée au financement des transports est entièrement différent. (Mme Nicole Bricq acquiesce.)
En tout cas, il faut que nous travaillions sur la taxe professionnelle, et le Gouvernement souhaite soumettre des propositions au Parlement dans son ensemble, afin d’arriver à une position qui tienne compte du fait que, pour des hôtels d’une certaine catégorie, les taux actuels ne correspondent pas à grand-chose ; je pense aux grands hôtels de luxe, nombreux en Île-de-France et à Paris, qui paient des taxes de séjour ridiculement faibles.
Il faudra ensuite réfléchir au mode de calcul du taux de cette taxe : est-ce qu’on raisonne en termes de catégories d’établissement ou de manière proportionnelle ? Quoi qu’il en soit, je répète que cette taxe est purement facultative pour les collectivités.
Pardonnez-moi d’être un peu long. Je sais que les chances sont réduites de voir ce débat aller à son terme, mais je ne voudrais pas que des débats soient éludés et je tiens à rétablir certaines vérités.
Le président Marini a posé un certain nombre de questions légitimes, dont l’une a, du reste, été reprise par Nicole Bricq.
Au sujet de la charge de la dette, il a commis une erreur, et M. Delattre a commis la même à sa suite. L’économie dégagée grâce aux faibles taux d’intérêt au titre de la charge de la dette est actuellement estimée à 1,8 milliard d’euros, mais cette somme n’a pas été incluse dans les 4 milliards d’euros d’économies. Affirmer qu’elle l’a été est faux !