M. le président. Madame David, qu’en est-il de l’amendement n° 259 ?
Mme Annie David. Je le retire au profit de l’amendement de la commission tel qu’il sera modifié par le sous-amendement n° 310 rectifié bis.
M. le président. L'amendement n° 259 est retiré.
Je mets aux voix le sous-amendement n° 310 rectifié bis.
(Le sous-amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, l'amendement n° 142 rectifié n’a plus d'objet.
Je mets aux voix l'article 56, modifié.
(L'article 56 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 56
M. le président. L'amendement n° 200 rectifié, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Après l'article 56
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... - Un décret fixe par pays la liste des autorités susceptibles de pouvoir certifier des certificats de vie sans nécessité de demander une contre-signature à une autorité française. »
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 199, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
Après l’article 56
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les modalités d’application de l’article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 201, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :
I. - Après l'article 56
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre 1er du titre 5 du livre 3 du code de la sécurité sociale est complétée par une sous-section ... ainsi rédigée :
« Sous-section …
« Dispositions relatives aux carrières effectuées à l’étranger
« Art. L. 351-6-… – Dans le cas d’une carrière effectuée dans plusieurs pays signataires de conventions bilatérales de sécurité sociale avec la France ou dans lesquels le règlement (CE) n° 987/2009 du Parlement européen et du Conseil du 16 septembre 2009 fixant les modalités d’application du règlement (CE) n° 883/2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale s’applique, la durée d’assurance prise en compte pour le calcul du taux de la retraite comprend l’ensemble des périodes d’assurance et de résidence accomplies en France et dans les pays susmentionnés. Un décret fixe les conditions d’application de cette disposition. »
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle et son intitulé ainsi rédigés :
Chapitre …
Favoriser la coordination des conventions bilatérales pour les carrières à l’étranger
Cet amendement n’est pas soutenu.
Article 56 bis (nouveau)
L’article 19 de la loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites est complété par un X ainsi rédigé :
« X. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités particulières d’application du présent article pour les artistes du ballet relevant de la caisse de retraites des personnels de l’Opéra national de Paris.
« Le II du présent article entre en vigueur, pour les assurés mentionnés au premier alinéa du présent X, à compter du 1er janvier 2018. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 56 bis
M. le président. L'amendement n° 95, présenté par Mmes Lepage et Conway-Mouret et MM. Leconte et Yung, est ainsi libellé :
Après l’article 56 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Sous réserve de l’appréciation de la situation locale par les autorités consulaires françaises, les justificatifs d’existence que doivent fournir, au plus une fois par an, les bénéficiaires d’une pension de retraite versée par un organisme français résidant hors de France, peuvent être transmis par voie postale, par télécopie ou par voie électronique.
La parole est à Mme Claudine Lepage.
Mme Claudine Lepage. Produire un justificatif d’existence n’est pas une démarche spécifique aux Français établis hors de France.
En effet, les pensionnés vivant en France peuvent être amenés à présenter une attestation prouvant qu’ils sont bien en vie pour continuer à percevoir leur retraite.
Les moyens de vérification à l’étranger sont plus aléatoires ; les éventuels risques de fraude doivent évidemment être pris en considération. Je comprends donc parfaitement qu’il soit nécessaire de se présenter au consulat de son lieu de résidence pour authentifier la procédure.
Cependant, tous les pays n’ont pas des services postaux fiables. Si le certificat de vie qui doit être produit une fois par an n’arrive pas, ou pas dans les délais, auprès de la caisse de retraite, la suspension du versement de leur unique source de revenus a des conséquences graves, voire dramatiques pour beaucoup de nos retraités à l’étranger.
Dans ces conditions, il serait juste et souhaitable que les pensionnés ayant bien effectué les démarches nécessaires en se rendant au consulat, parfois distant de plusieurs centaines de kilomètres de leur domicile, ne soient pas victimes des aléas dans l’acheminement du courrier de leur pays de résidence.
Je vous demande donc d’adopter cet amendement, qui a pour objet d’autoriser la transmission du certificat de vie à la caisse de retraites en France par télécopie ou par voie électronique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Roche, rapporteur. Avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Madame la sénatrice, le Gouvernement est sensible au problème que vous soulevez. Nous mesurons bien les difficultés que rencontrent les personnes confrontées à ces demandes.
C'est d’ailleurs la raison pour laquelle la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 avait déjà largement assoupli les délais relatifs à la production des certificats d’existence pour les pensionnés résidant à l’étranger. En outre, nous avons engagé un vrai travail de simplification.
Pour autant, ce qui rend ce travail plus exigeant et plus complexe, c’est la nécessité de s’assurer du contrôle du versement des pensions en garantissant la validité et l’authenticité des certificats transmis.
Le rapport prévu par l’article 45 de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l’avenir et la justice du système de retraites permettra de proposer des solutions aux difficultés liées à la perception d’une pension de retraite à l’étranger.
Le Gouvernement sollicite donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
Nous travaillons sur ce dossier, qui est complexe. Nous sommes obligés de faire preuve de vigilance quant aux mesures de contrôle des certificats d’existence.
M. le président. Madame Lepage, l'amendement n° 95 est-il maintenu ?
Mme Claudine Lepage. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je remercie Mme la secrétaire d’État des engagements qu’elle vient de prendre ; je lui fais naturellement confiance pour travailler sur le sujet.
Cela étant, le fait d’ouvrir la possibilité de transmettre les certificats de vie par voie électronique à partir du consulat me semble une mesure de bon sens. Je ne vois pas en quoi cela remettrait en cause l’authenticité de tels documents.
Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 95 est retiré.
Article 57
Pour l’année 2015, les objectifs de dépenses de la branche Vieillesse sont fixés :
1° Pour l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale, à 224,0 milliards d’euros ;
2° Pour le régime général de la sécurité sociale, à 120,9 milliards d’euros. – (Adopté.)
M. le président. Nous allons maintenant examiner par priorité les deux articles du titre V.
Titre V (priorité)
DISPOSITIONS RELATIVES AUX ORGANISMES CONCOURANT AU FINANCEMENT DES RÉGIMES OBLIGATOIRES
Article 63 (priorité)
I. – Au début du 2° de l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale, les mots : « Une partie, fixée par la loi de financement de la sécurité sociale, » sont remplacés par les mots : « Une fraction, fixée par décret, qui ne peut être inférieure à 50 %, ».
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2016.
III. – Pour l’année 2015, les dépenses de prise en charge mentionnées au 2° de l’article L. 135-2 du code de la sécurité sociale sont fixées à 3,4 milliards d’euros pour le régime général, à 400 millions d’euros pour le régime des salariés agricoles et à 100 millions d’euros pour le régime social des indépendants.
M. le président. L'amendement n° 80, présenté par M. Roche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 2
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Gérard Roche, rapporteur.
M. Gérard Roche, rapporteur. C’est au législateur qu’il revient de fixer chaque année, en loi de financement de la sécurité sociale, le transfert du Fonds de solidarité vieillesse au régime général, au régime des salariés agricoles et au régime social des indépendants au titre de leurs dépenses de minimum contributif.
Comme je l’expliquais, le dispositif monte en puissance avec la prise en charge des cotisations chômage.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. Monsieur le rapporteur, je comprends tout à fait votre souhait que le Parlement ne soit pas dessaisi.
Toutefois, il faut se souvenir que le dispositif voté les années précédentes était censé être transitoire. En réalité, les régimes n’étaient pas en mesure de fournir des indications précises quant aux montants. Le Parlement votait donc une somme qui était jugée approximativement suffisante pour répondre aux besoins.
Entre-temps, nous avons fait des efforts et obtenu des avancées dans les systèmes d’information. Les régimes ont pu mettre en place un suivi distinct en comptabilité des prestations versées par les régimes au titre du minimum contributif.
Ainsi, les montants de ces prestations différentielles seront retracés séparément des autres composantes des avantages de base d’ici à 2016. Ils ne seront plus évalués sur une base seulement statistique.
C’est cette évolution que traduit la mesure soumise à votre vote. Le montant de la prise en charge sera désormais exprimé en pourcentage de la dépense engagée par les régimes, cette clef étant fixée par décret.
Pour autant, et j’espère ainsi vous rassurer, le législateur n’est pas dessaisi : il demeure garant de l’équilibre entre le financement par les régimes et la contribution du Fonds de solidarité vieillesse. En effet, il est prévu que la prise en charge ne pourra pas être inférieure à 50 %.
Pour toutes ces raisons, je sollicite le retrait de votre amendement, monsieur le rapporteur. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur, l'amendement n° 80 est-il maintenu ?
M. Gérard Roche. C’est le dernier amendement que je présentais dans ce cadre ; je ne voudrais pas partir sur une mauvaise impression. (Sourires.)
Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 80 est retiré.
Je mets aux voix l'article 63.
(L'article 63 est adopté.)
Article 64 (priorité)
Pour l’année 2015, les prévisions des charges des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de sécurité sociale sont fixées ainsi qu’il suit :
(En milliards d’euros) |
|
Prévisions de charges |
|
Fonds de solidarité vieillesse |
19,6 |
M. le président. Nous reprenons le cours normal de notre discussion et en revenons aux articles du titre III.
Titre III
DISPOSITIONS RELATIVES AUX DÉPENSES DE LA BRANCHE ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES
Article 58
I. – Le montant de la contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante est fixé à 380 millions d’euros au titre de l’année 2015.
II. – Le montant de la contribution de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles du régime général de la sécurité sociale au financement du Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante est fixé à 693 millions d’euros au titre de l’année 2015.
III. – Le montant du versement mentionné à l’article L. 176-1 du code de la sécurité sociale est fixé à un milliard d’euros au titre de l’année 2015.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 260 est présenté par Mmes David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 287 est présenté par Mme Archimbaud, MM. Desessard, Gattolin, Placé et les membres du groupe écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante est constitué également d’une contribution, due pour chaque salarié ou ancien salarié à raison de son admission au bénéfice de l’allocation de cessation anticipée d’activité. Cette contribution est à la charge de l’entreprise qui a supporté ou qui supporte, au titre de ses cotisations pour accidents du travail et maladies professionnelles, la charge des dépenses occasionnées par la maladie professionnelle provoquée par l’amiante dont est atteint le salarié ou l’ancien salarié.
La parole est à M. Dominique Watrin, pour présenter l’amendement n° 260.
M. Dominique Watrin. La liste des établissements, actuellement fixée par arrêté ministériel, dans lesquels il faut avoir travaillé pour avoir droit à une cessation anticipée d’activité du fait de l’amiante est beaucoup trop restrictive selon nous, et il est urgent de la réactualiser.
Du fait de ce caractère restrictif, en effet, tous les salariés en contact avec l’amiante n’ont pas accès au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA. En accompagnant mieux ces salariés et en ouvrant la liste des établissements concernés, on permettra à un plus grand nombre d’entre eux de prétendre à ce fonds, ce qui exige évidemment de nouvelles recettes.
Dans cette perspective, cet amendement a pour but de rétablir la contribution des entreprises au financement des fonds de l’amiante mise en place par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et supprimée dans la loi de finances pour 2009. Il s’agit donc, vous l’aurez compris, à la fois de dégager des moyens et de responsabiliser les entreprises dont les salariés travaillent au contact de l’amiante.
Cet amendement a été refusé à l'Assemblée nationale au motif que cette contribution ne rapportait pas assez : 68 millions d’euros en 2005, l’année de sa mise en œuvre, 21 millions d’euros en 2006 et 33 millions d’euros en 2007, alors que le triple était attendu lors de la mise en œuvre de cette contribution, soit 120 millions d’euros.
Lorsque, dans le même temps, vous ponctionnez l’encours de précaution de l’ONIAM à hauteur d’une vingtaine de millions d’euros parce que ses réserves sont jugées excessives, alors que l’on ne connaît même pas le nombre de victimes à venir, prétendre que la contribution patronale au FCAATA ne rapporte pas assez est pour le moins incompréhensible.
Je souligne que 91 % des maladies de l’amiante ayant donné lieu à un arrêt de travail se sont accompagnées de la reconnaissance d’une incapacité permanente. C’est pourquoi il est normal et logique que les employeurs participent à ce fonds.
Tel est le sens de l’amendement, que nous vous proposons d’adopter.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour présenter l'amendement n° 287.
M. Jean Desessard. Mon amendement étant identique à celui que vient de présenter M. Watrin, nos arguments vont se rejoindre.
Le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, créé en 1999, est indispensable pour que les milliers de travailleurs exposés à l’amiante au cours de leur vie professionnelle aient la possibilité d’arrêter leur activité de façon anticipée. Pour vous donner un chiffre concret, plus de 30 000 personnes étaient indemnisées par ce fonds à la fin de 2010.
Quelles sont les conditions pour recevoir cette allocation ? Être victime d’une maladie professionnelle liée à l’amiante ou avoir travaillé dans des établissements à risque élevé figurant sur les listes d’établissements fixées par arrêté. Cette liste est toutefois très restreinte et ne couvre absolument pas l’ensemble des travailleurs malades de l’amiante ou qui risquent très fortement de l’être.
Tous les établissements dont les travailleurs ont été exposés à l’amiante doivent contribuer à alimenter le Fonds. Avec cet amendement, nous demandons que la contribution des entreprises au financement des fonds de l’amiante, qui avait été créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 et supprimée en 2009, soit rétablie. Il faut s’assurer que son recouvrement soit facilité et éviter les écueils qui avaient mené à sa disparition il y a cinq ans.
Nous demandons cela pour deux raisons : d’abord, parce qu’il est normal que les entreprises responsables contribuent ; ensuite, pour que tous les travailleurs puissent avoir enfin accès à l’allocation de cessation d’activité anticipée des travailleurs de l’amiante.
L’extension de l’accès à cette allocation est une mesure fondamentale de justice sociale pour des milliers d’artisans, intérimaires, fonctionnaires, travailleurs du désamiantage ou chargés des diagnostics qui sont malades de l’amiante, ou risquent de l’être, et qui ne peuvent pas être indemnisés.
Cette mesure avait déjà été préconisée en octobre 2005 dans le rapport de la mission commune d’information du Sénat sur l’amiante. Pourtant, le rapport du comité de suivi rendu public en juillet dernier montre bien que rien n’a encore été fait, dix ans après !
Il ne faut plus attendre, au vu du nombre de personnes potentiellement concernées !
C’est pourquoi je vous demande, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, à moins que Mme la secrétaire d’État n’ait déjà un décret en préparation (Sourires.), auquel cas nous retirerions l’amendement, après la lecture du décret en question, comme cela s’est produit précédemment. (M. Dominique Watrin applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Gérard Dériot, rapporteur de la commission des affaires sociales pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Comme l’ont rappelé MM. Watrin et Desessard, à l’origine, il était prévu que les entreprises qui avaient utilisé de l’amiante participent au financement du FCAATA. Il s’agissait de donner une préretraite aux personnes qui avaient été en contact, dans leur travail, avec l’amiante.
M. Jean Desessard. Très bien !
M. Gérard Dériot, rapporteur. Cette disposition figurait dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.
Mais, en 2009, nous avons voté – autant que je m’en souvienne à une quasi-unanimité – la suppression de cette cotisation parce que nous nous sommes rendu compte que les fonds ne rentraient pas. En effet, bon nombre d’entreprises qui auraient dû cotiser soit avaient disparu, soit contestaient en justice leur contribution. Les choses traînaient et, par ailleurs, cela coûtait fort cher.
Nous avons donc estimé qu’il valait mieux supprimer une cotisation, certes due par les entreprises, mais qui ne rapportait rien et dont le recouvrement posait problème.
Je vous rappelle que la contribution pour les maladies professionnelles et accidents du travail est financée uniquement par les entreprises, les cotisations étant payées par l’ensemble des entreprises. Or, il faut bien le reconnaître, étant donné la situation économique générale, il n’est pas forcément judicieux de leur imposer une cotisation supplémentaire. J’ai rappelé l’ensemble des raisons pour lesquelles, à mon avis, le moment serait mal choisi pour rétablir à la charge des entreprises une cotisation qui ne servirait finalement pas à grand-chose, sauf à pénaliser certaines d’entre elles, et à entraîner des charges beaucoup plus importantes que le produit de la cotisation prévue à l’origine.
Je rappelle qu’en 2006 ou en 2007 j’avais proposé d’augmenter la cotisation payée par les entreprises, mais, l’année suivante, le rendement avait été encore moins élevé... Vous voyez que cette proposition ne se justifie pas puisque, de toute façon, le Fonds est alimenté par l’ensemble des entreprises.
Voilà pourquoi j’ai émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Laurence Rossignol, secrétaire d'État. L’article 58 du présent projet de loi fixe à 693 millions d'euros par an la contribution de la branche accidents du travail et maladies professionnelles au Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, ce que l’on appelle en général « la préretraite amiante ».
Ces deux amendements identiques visent à rétablir la contribution acquittée par les entreprises et les entreprises productrices d’amiante.
Comme M. Dériot l’a expliqué, si, à un moment donné, cette contribution a été abandonnée, c’est parce qu’elle présentait trop de défauts, le principal étant la difficulté de son recouvrement et la faiblesse de son produit. Elle avait comme autre inconvénient d’être un frein à la reprise des sites.
Or, mesdames, messieurs les sénateurs, l’amiante étant interdite depuis 1997, plus on s’éloigne de la période d’utilisation intensive de l’amiante, moins le rétablissement de la contribution aurait de sens.
Cela étant, et j’attire votre attention sur ce point, cela n’enlève rien à la responsabilisation des employeurs dans le cas de l’amiante, qui continue d’exister. C’est le sens de vos amendements : les entreprises qui ont fait travailler des salariés dans des conditions d’exposition à l’amiante ayant eu des conséquences sanitaires terribles doivent être appelées, aujourd'hui, à les dédommager. C’est toute l’utilité de la reconnaissance de la faute inexcusable, qui concerne dans près de 40 % des cas des maladies professionnelles imputables à l’amiante.
Par conséquent, la notion de faute inexcusable rend la maladie professionnelle encore plus responsabilisante pour l’entreprise.
Pour toutes ces raisons, nous pensons que le rétablissement de cette contribution n’aurait pas les résultats escomptés, hormis sur le plan symbolique, et les salariés victimes de l’amiante n’y trouveraient pas d’avantages supplémentaires en termes de prise en charge et de réparation de leurs souffrances.
M. le président. La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.
M. Francis Delattre. Madame la secrétaire d’État, l’amiante a malheureusement une nouvelle actualité dans la gestion de nos communes. Depuis dix ans, en effet, nous menons des opérations de désamiantage et ceux qui, ici, gèrent des communes savent que toutes leurs voiries ou presque sont imprégnées d’amiante. Or les entreprises qui ont à intervenir sur la voirie commencent par nous demander une étude générale afin d’évaluer les risques pour leurs propres employés. (MM. Claude Dilain et Jean Desessard opinent.)
Mais pourquoi trouve-t-on des traces d’amiante dans le bitume d’aujourd’hui ? Parce que les graviers issus de la démolition de bon nombre de bâtiments contenant de l’amiante ont été retraités et incorporés, naturellement avec le pétrole et tout le reste, dans le bitume.
C’est un cercle infernal !
Aujourd’hui, pour l’ensemble des communes, c’est un vrai problème. Les études de voirie ne coûtent pas moins de 300 000 ou 400 000 euros et, si vous n’avez pas l’étude qui révèle le degré d’amiante, les entreprises refusent d’intervenir. Or ceux qui font du bitume, du « noir » comme ils disent, je peux vous dire que nous les connaissons tous, ce sont toujours les mêmes ; on les retrouve d’ailleurs plus ou moins derrière toutes ces réglementations et ce sont les premiers à venir trouver les maires pour réclamer ces études au nom de la protection de leurs propres salariés.
L’amendement de mon ami écologiste est donc presque d’actualité. Peut-être ne pouvons-nous pas le voter in extenso, mais il n’en reste pas moins que nous sommes confrontés à un vrai problème de coût. Lorsqu’il faut intervenir sur une voirie en mauvais état qui recèle de l’amiante, cela coûte moitié plus cher.
Nous sommes au Sénat, où l’on traite habituellement des problèmes des collectivités territoriales. Or voilà un cas concret.
J’aimerais donc que la commission étudie une solution nous permettant, chers collègues, de faire face à cette situation nouvelle. Car, là, nous allons avoir besoin d’un fonds, ne serait-ce que pour comprendre l’origine du problème.
Il est tout de même incroyable que le recyclage ait été utilisé en partie pour fabriquer un bitume qui aujourd'hui contient de l’amiante. Il faut réagir !
M. le président. La parole est à M. Gérard Dériot, rapporteur.
M. Gérard Dériot, rapporteur. Monsieur Delattre, la contribution dont nous parlons ici a exclusivement pour objet d’alimenter le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante. Or le FCAATA s’adresse à ceux qui sont aujourd’hui en vie et leur nombre va d'ailleurs en diminuant d’année en année. C’est le signe que certains des travailleurs qui ont été en contact avec l’amiante sont malheureusement décédés, mais aussi qu’il y a de moins en moins de personnes contaminées.
La récente découverte qui a été faite de la présence d’amiante dans les bitumes utilisés pour la voirie pose en effet un problème. Mais on ne va pas dès aujourd’hui faire bénéficier de l’allocation de cessation anticipée d’activité ceux qui aujourd’hui travaillent sur les voiries de ce type ! D’autres solutions seront trouvées ultérieurement pour indemniser ces personnes, si nécessaire.
Les fonds amiante n’ont pas non plus pour objet d’aider les entreprises ou les collectivités à se débarrasser de l’amiante. Ils servent exclusivement à indemniser les personnes qui sont contaminées…
M. Francis Delattre. Ou qui vont l’être !
M. Gérard Dériot, rapporteur. … ou qui, ayant travaillé au contact de l’amiante, vont l’être dans un certain nombre d’années. Il sera temps de revoir cette question ; le Fonds existe et est alimenté, et l’argent disponible servira à ceux qui sont dans la situation de pouvoir prendre leur retraite.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. J’ai particulièrement apprécié l’intervention de mon collègue Francis Delattre, qui souligne que le problème est encore plus grave parce que récurrent. On croit en avoir fini avec l’amiante, mais on s’aperçoit, en raison de nos modes de recyclage, que le risque de contamination perdure.
Je pense comme lui qu’il serait très intéressant, au-delà même de ces amendements, de créer une commission pour examiner le problème à l’échelle de l’ensemble des secteurs d'activité dont les salariés risquent d’être contaminés par l’amiante.
La commission des affaires sociales pourrait, me semble-t-il, s’emparer de cette idée pour ne pas s’en tenir aux difficultés actuelles, mais justement envisager les problèmes que l’amiante pourrait poser à l’avenir.