Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche. Monsieur le sénateur, nos concitoyens, alertés par la communauté scientifique, sont de plus en plus préoccupés par les risques pour la santé liés à l’exposition aux substances chimiques dans la vie quotidienne, en particulier à celles qui ont des propriétés de perturbateurs endocriniens et qui sont présentes dans les produits de consommation.
La France, par l’adoption en avril 2014 de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, a été pionnière dans ce domaine. Nous sommes désormais une force de proposition au niveau européen pour accélérer la mise en œuvre de mesures permettant d’évaluer ces substances et de restreindre, voire d’interdire leur utilisation.
Le bisphénol A est un perturbateur endocrinien avéré et chaque jour de nouvelles études scientifiques viennent nous alerter sur les effets qu’il peut emporter sur la santé.
La loi du 24 décembre 2012, proposée par le député Gérard Bapt, a permis de mettre fin à l’utilisation du BPA dans les contenants alimentaires d’ici au 1er janvier 2015.
Cette mesure d’interdiction a été notifiée à la Commission européenne dès son adoption, il y a bientôt deux ans. La loi adoptée par le Parlement a prévu la rédaction d’un rapport de synthèse des substituts envisageables pour les usages du BPA. Celui-ci a fait apparaitre l’existence de nombreuses possibilités, grâce à la forte mobilisation des industriels depuis deux ans, preuve que des solutions économiques acceptables existent.
Cet élan remarquable, qu’il faut saluer, est un facteur d’innovation pour les entreprises de notre secteur de l’agroalimentaire. Lors de l’adoption de la loi, le débat a porté sur l'interdiction à l’export des produits imprégnés. Les parlementaires ont écarté à juste titre cette éventualité, considérant qu’il n’était pas acceptable de commercialiser hors des frontières des produits jugés impropres sur le territoire national.
Au-delà du caractère moral de cette décision, je suis convaincu que l’avantage qualitatif des produits français pourra être ainsi valorisé à l’export, grâce à la communication sur leur caractère sain. C’est le sens du nouveau modèle de croissance verte promu par le Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Monsieur le secrétaire d’État, je suis un peu déçu par la réponse qui vient de m’être communiquée. Vous me rappelez la préoccupation sanitaire prégnante dans le dossier du bisphénol A, mais sachez que, dès mon arrivée au Sénat, je fus au nombre des rares parlementaires à se préoccuper du sujet. Je mesure donc bien les enjeux de santé publique.
Ma question portait sur la situation de nos industries. Compte tenu du délai très court laissé à nos entreprises pour la mise en œuvre des dispositions de la loi, j’attendais surtout une réponse sur le moratoire et sur les solutions intermédiaires qu’il faut rapidement trouver afin de ne pas, une fois de plus, gêner nos industriels.
Je regrette que l’on ne s’oriente pas dans cette direction.
perspectives catastrophiques pour la récolte d’olives en 2014-2015
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier, auteur de la question n° 896, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le ministre, depuis quelques dizaines d’années, l’oléiculture française est redevenue un secteur dynamique, avec une production moyenne annuelle de 2 000 tonnes d’olives de table et de 5 000 tonnes d’huile d’olive.
Cette production ne satisfait, certes, qu’environ 5 % de la consommation française d’huile d’olive, mais elle fait vivre près de 30 000 oléiculteurs et près de 200 mouliniers et confiseurs, sans compter les retombées économiques qu’elle emporte pour les territoires concernés.
La qualité du travail et les efforts consentis depuis 1994 par la filière oléicole se mesurent d’ailleurs par les reconnaissances en appellation d’origine contrôlée, ou AOC : cinq olives de table, huit huiles d’olive et une pâte d’olive sont concernées.
Or le secteur de l’olive devrait connaître cette année sa plus grave crise depuis 1956, quand le gel des oliviers avait entraîné la quasi-disparition de l’oliveraie française.
Les oléiculteurs s’attendent en effet, dans les semaines à venir, à des pertes de production pouvant aller jusqu’à 80 % de la récolte, notamment en raison d’un développement inhabituellement fort de la mouche de l’olive, bactrocera olea, qui a entraîné la chute au sol d’une importante proportion de fruits.
Tout au long de l’année 2014, le développement végétatif des olives a été contrarié par des conditions météorologiques très défavorables, qui ont facilité le développement des parasites.
De plus, le respect de la réglementation en matière d’application de pesticides s’est traduit par une impossibilité de lutter efficacement contre la présence permanente de la mouche de l’olive, y compris pour les exploitants en agriculture biologique.
En conséquence, la plupart des territoires français de la production d’olives vont connaître un volume de récolte très réduit et des rendements en huile extrêmement faibles. Tout cela va provoquer d’importantes difficultés économiques pour l’ensemble de la filière, en particulier dans les territoires dont les productions sont reconnues soit en appellation d’origine contrôlée soit en indication géographique protégée.
Permettez-moi, monsieur le ministre, d’insister plus particulièrement sur la situation des oléiculteurs du Nyonsais et des Baronnies, que je connais bien : ces exploitants risquent d’être vraiment sinistrés, en raison de la spécificité de leur production d’olives de bouche, reconnue depuis 1994 par l’AOP « olive noire de Nyons ». Cette production requiert en effet une récolte plus tardive et est plus exigeante quant à l’aspect des fruits que celle des olives à huile.
Aussi, monsieur le ministre, je souhaite que vous m’indiquiez les moyens que vous entendez mettre en œuvre pour apporter une aide économique aux oléiculteurs, ainsi qu’aux membres des structures de la filière organisée, notamment à ceux du Nyonsais et des Baronnies, afin de leur permettre d’affronter cette période : elle s’annonce délicate non seulement pour l’ensemble de la filière mais aussi, au-delà, pour l’activité économique des territoires concernés.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, vous avez évoqué les circonstances assez exceptionnelles qui touchent cette année la production d’olives, notamment celles qui sont reconnues en AOP comme l’olive noire de Nyons, que vous connaissez bien.
Il apparaît assez clairement de ce que nous disent les services que cette situation est liée à un été particulièrement pluvieux et peu chaud. La mouche de l’olive a donc sévi avec une acuité beaucoup plus grande que d’ordinaire. Cet insecte n’étant malheureusement pas répertorié dans la catégorie des nuisibles, il n’est pas possible de mobiliser le Fonds national agricole de mutualisation sanitaire et environnementale.
Que peut-on faire ?
On peut réfléchir aux meilleurs moyens de s’organiser pour lutter et préparer l’avenir. Les services de mon ministère seront disponibles pour rencontrer les producteurs, afin de discuter de ce qui peut être fait.
Dans l’immédiat, pour répondre aux difficultés économiques, les directions départementales sont mobilisées, au titre du Fonds d’allégement des charges financières et des demandes d’exonération de taxe foncière sur le non bâti, afin de permettre aux producteurs de traverser cette période difficile et d’assurer, demain, la pérennité des exploitations.
Voilà ce que l’on va faire. Voilà ce que l’on peut faire. Voilà ce que l’on doit faire, face à ce phénomène qui touche, cette année, non seulement la France, mais aussi l’Italie et l’Espagne, des pays ayant connu à peu près la même situation climatique. Les pertes de production au niveau européen sont assez significatives, notamment en France. C’est pourquoi nous devons être mobilisés.
Je le répète, les services de mon ministère recevront les producteurs pour discuter de l’avenir et, dans le même temps, nous nous mobilisons dans l’immédiat pour apporter des solutions aux producteurs, afin d’éviter que cette situation conjoncturelle n’ait des conséquences économiques dramatiques pour la plupart d’entre eux.
Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre Monier.
Mme Marie-Pierre Monier. Monsieur le ministre, je vous remercie d’avoir pris en compte les problèmes auxquels sont confrontés nos oléiculteurs et la filière oléicole dans son ensemble.
Permettez-moi de reprendre plusieurs des points que vous avez développés.
Vous avez parlé du report des charges et d’une exonération de la taxe sur le foncier non bâti. Je sais que cela répond à une attente des exploitants en monoculture : c’est en effet la demande que m’a récemment faite une oléicultrice qui ne récoltera cette année que 54 litres d’huile d’olive, au lieu de 800 à 1 000 litres habituellement.
Il est essentiel toutefois de prendre en compte les autres exploitations, celles qui ne sont pas en monoculture. Dans le Nyonsais, on trouve également de la vigne et d’autres productions encore.
J’ai également bien noté votre proposition de rencontrer les producteurs. Il est important de penser à soutenir la filière tout au long de l’année prochaine. En effet, cette situation est malheureusement une bombe à retardement pour les mouliniers et les confiseurs, qui souffriront d’un manque de stocks dans le courant de l’année prochaine et perdront de ce fait des parts de marché, qu’ils devront reconquérir.
Peut-être pourrons-nous évoquer ces difficultés jeudi prochain, en marge des assises de la ruralité à Nyons, auxquelles vous assisterez, monsieur le ministre… (M. le ministre opine.)
Quoi qu’il en soit, je vous remercie, monsieur le ministre, de l’attention que vous portez à ce dossier.
conséquences sanitaires et économiques de la progression de la besnoitiose bovine
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, auteur de la question n° 910, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.
M. Jean-Yves Roux. Ma question porte sur les conséquences sanitaires et économiques de la progression de la besnoitiose bovine.
Encore inconnue il y a quelques années dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, la besnoitiose bovine, qui a été identifiée dans la région en 2005, s’est répandue très rapidement dans les cheptels bovins des Alpes-de-Haute-Provence.
Cette maladie parasitaire vectorielle est inoffensive pour l’homme, mais fait des ravages dans les troupeaux de mon département. La maladie était jusqu’à présent identifiée dans le sud de l’Europe et, en France, au sud d’une ligne Nantes-Lyon. Quelques cas viennent aussi d’être détectés en Allemagne.
La contamination se fait le plus souvent par l’intermédiaire d’insectes comme les taons, qui transmettent directement les parasites d’un bovin à l’autre. Un animal infecté reste porteur à vie du parasite.
La besnoitiose peut circuler deux à trois ans dans un cheptel avant que les premiers cas cliniques n’apparaissent. Même en l’absence de cas cliniques, il peut y avoir des animaux infestés dans le troupeau. Il n’est pas rare de constater que 75 % des animaux du troupeau sont touchés. Or un animal contaminé perd toute valeur économique !
Cette maladie peut entraîner des pertes lourdes, car la majorité des animaux peuvent être concernés en quelques mois, avec un taux de mortalité qui se situe régulièrement entre 7 % et 10 %.
À l’heure actuelle, il n’existe en Europe ni traitement ni vaccination préventive. On ne peut donc empêcher la propagation de la maladie de manière véritablement efficace que par l’abattage des troupeaux infectés.
L’un des agriculteurs de mon département, en plein désarroi face aux pertes économiques qu’il subit – son troupeau a été ravagé –, m’a interpellé.
Les pertes sont sévères et les conséquences économiques majeures dans les exploitations touchées.
Des actions de terrain sont menées pour soutenir et informer les éleveurs.
Il est aujourd’hui indispensable d’apporter une réponse de grande ampleur à ce problème, car le monde de l’élevage est très inquiet.
Aussi, vous est-il possible, monsieur le ministre, de nous apporter quelques éclaircissements sur le soutien que vous pourriez apporter en matière de recherche sanitaire, afin, notamment, d’améliorer les outils de diagnostic, d’étudier la possibilité de développer un vaccin, d’améliorer l’identification des animaux porteurs de parasites et d’établir un plan de maîtrise de la maladie ?
De plus, cette maladie n’étant pas réglementée, quel soutien financier peut-on envisager pour ces agriculteurs qui se battent au quotidien pour faire vivre l’élevage dans nos territoires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Monsieur le sénateur, vous avez évoqué, vous aussi, une maladie qui n’est pas réglementée. Il n’est donc pas possible de mobiliser les fonds prévus au titre des maladies réglementées, qui ont des conséquences sur les humains.
La besnoitiose exige une forte implication de la recherche, car ses conséquences peuvent être extrêmement lourdes, comme l’illustre l’exemple que vous avez pris d’un agriculteur de votre département. Comme pour d’autres maladies, il s’agit donc de trouver des solutions pérennes.
Cela étant, mesdames, messieurs les sénateurs, l’élevage, ce ne sont pas que des maladies ! N’oublions donc pas les actions générales en cours au travers de la réforme de la politique agricole commune, des compensations de handicaps naturels ou encore des aides dites « couplées ».
Vous m’interrogez sur un problème sanitaire, qui a des conséquences sanitaires. Une recherche est engagée sur cette maladie. Nous allons tout faire pour trouver des solutions, mais rien n’est évident. Vous posez une question au ministre de l’agriculture que je suis, mais, sur de tels sujets, je suis obligé de m’adresser aux chercheurs et aux vétérinaires.
Il nous faut donc nous organiser.
Aussi, je demanderai que des réflexions soient conduites, en vue de mettre en place des politiques préventives à différents titres, afin de limiter le développement de cette maladie.
Mais cette maladie peut avoir également des conséquences économiques extrêmement lourdes pour une exploitation lorsqu’un troupeau est décimé. Ainsi que je l’ai indiqué précédemment pour l’olive, nous devons trouver des solutions économiques en matière d’allégements de charges pour favoriser la pérennisation de l’activité.
Surtout, il convient de ne pas remettre en cause les élevages, qui souffrent déjà. Ce n’est jamais facile, mais, si les exploitants sont en plus confrontés à ce type de maladie, ils doivent être aidés.
C’est pourquoi les services de l’État sont mobilisés sur ce sujet comme sur d’autres, pour mettre en place des mesures d’allégement de charges et de report, qui sont indispensables, je le répète, pour assurer la pérennité économique de l’élevage.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse et du soutien que vous apportez aux éleveurs.
fermeture de régiments
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat, auteur de la question n° 901, adressée à M. le ministre de la défense.
Mme Françoise Férat. Ma question porte sur la dissolution du 1er régiment d’artillerie de marine et sur le départ de l’état-major de la 1ère brigade mécanisée de Châlons-en-Champagne et leurs conséquences économiques et sociales.
Depuis de nombreuses années, notre région, et plus particulièrement la Marne, a payé un lourd tribut aux efforts de restructuration de l’armée, à l’occasion, d’une part, de sa professionnalisation et, d’autre part, de sa modernisation, avec la suppression du 13e régiment du génie d’Épernay, du 402e régiment d’artillerie de Châlons-en-Champagne – déjà -, et de la base aérienne 112 de Reims. Or, aujourd’hui, outre les deux unités militaires châlonnaises, est prévue la suppression du site de stockage de munitions de Connantray-Vaurefroy – environ 100 postes – et du centre de ravitaillement en essence de Bouy, soit 39 postes.
Soyons clairs, monsieur le ministre : je souscris à la logique de réduction de la dépense publique, et la baisse des effectifs en est l’un des moyens. Toutefois, l’objectif du Gouvernement est de supprimer 12 % des emplois militaires en France. Or, à Châlons-en-Champagne, ces emplois disparaissent dans leur intégralité !
Vous le savez, cette décision est un vrai choc économique et social pour une ville qui subit une telle mesure. Mais ce choc est double lorsque cette ville est située dans la seule région de France – la seule ! – à perdre des habitants.
Je ne peux pas comprendre que l’État accompagne cette déprise démographique ! Est-ce une action équilibrée et juste d’aménagement du territoire ?... Non !
Il n’est pas juste de supprimer 1 250 emplois, sans compter les 800 emplois indirects – 3 000 habitants sont concernés –, dans une ville de 45 000 habitants qui est en décroissance démographique. Il est des territoires ultra-urbains où l’État peut opérer des réductions d’effectifs sans compromettre la démographie et le dynamisme économique local.
Cette « double peine » pourrait devenir triple si Châlons-en-Champagne perdait en plus son statut de capitale administrative régionale, avec ses 1 000 autres emplois.
Monsieur le ministre, je demande que l’État joue son rôle d’aménagement du territoire !
Aussi, je souhaite revenir sur les engagements du Gouvernement à propos d’un plan de compensations exemplaire commandé par le Premier ministre. Des mesures de soutien et d’investissement doivent être prises dans la Marne.
En premier lieu, des dotations budgétaires fortes doivent être consenties. Pouvez-vous me confirmer le déblocage important des crédits d’un fonds de restructuration militaire ? À quelle hauteur sera-t-il ?
En second lieu, le territoire marnais attend des mesures en termes de relocalisation d’emplois. Quelles décisions l’État va-t-il prendre ou quelles orientations va-t-il donner pour ce qui concerne le transfert d’agences ou d’administrations d’État, ainsi que les investissements d’entreprises de défense dont l’État est actionnaire ou donneur d’ordre, à l’instar de ce qui s’est fait dans le département voisin de la Meuse ?
Le Gouvernement pourrait également inciter à des transferts d’activité pour l’aéroport de Paris-Vatry, situé précisément dans l’agglomération de Châlons-en-Champagne !
Vous pourriez également orienter les politiques que vous soutenez vers la Marne, tels le programme d’investissements d’avenir ou le plan de relocalisation visant à rapatrier des activités sur le territoire national.
Monsieur le ministre, les élus, les entreprises et les habitants de la Marne attendent des engagements précis de l’État sur ces questions d’aménagement du territoire, de compensations financières et d’investissements économiques.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice, je vous prie, tout d’abord, de bien vouloir excuser l’absence de M. le ministre de la défense, empêché.
En tant que porte-parole du Gouvernement, je veux vous dire que je mesure parfaitement l’intensité du choc que représente, pour un territoire, la fermeture d’un régiment, avec les conséquences que vous avez évoquées.
Le ministre de la défense a signé, le 15 octobre dernier, une décision ministérielle présentant toutes les restructurations pour 2015 et la suppression de 7 500 postes prévus dans la loi de programmation militaire.
Conformément à ses engagements, il a veillé à ce que cette réduction d’effectifs touche le moins possible d’unités opérationnelles. L’essentiel porte sur les structures organiques, l’environnement et l’administration du ministère. Il s’est notamment attaché à ce qu’il y ait le moins possible de dissolutions de garnison.
Les choix graves que le ministre de la défense a dû faire correspondent à un impératif capacitaire réfléchi, qui découle des besoins de l’armée de terre de demain.
En effet, les forces terrestres devront disposer d’unités adaptées à la diversité, à la durée et au durcissement des opérations. Offrant une capacité opérationnelle de 66 000 hommes projetables, l’armée de terre comprendra sept brigades interarmes.
Deux de ces brigades devront être aptes à l’entrée en premier sur un théâtre d’opération et au combat de coercition face à un adversaire équipé de moyens lourds.
Deux autres brigades, plus légères, devront être capables d’intervenir dans des milieux très spécifiques ou difficiles ou, très rapidement, en complément de l’action des forces spéciales.
Enfin, trois brigades multirôles seront prioritairement équipées et entraînées pour la gestion de crise.
Cette réarticulation des forces terrestres, guidée par le principe de différenciation des forces en fonction des missions qu’elles sont appelées à remplir, implique donc la dissolution du seul régiment d’artillerie non doté d’équipements lourds ou spécifiques, ou non implanté sur un camp.
C’est dans ce contexte global qu’il a fallu faire le choix douloureux de la dissolution du 1er régiment d’artillerie de marine et de l’état-major de la 1ère brigade mécanisée, à Châlons-en-Champagne.
Le ministre de la défense et le Gouvernement sont bien conscients de l’impact économique et social négatif que ces mesures auront pour la ville de Châlons-en-Champagne. Le Premier ministre, ainsi que le ministre de la défense, s’en est entretenu très récemment avec le député-maire de Châlons-en-Champagne.
Ils ont évoqué les lourdes et légitimes préoccupations des élus locaux, et le Premier ministre a souhaité que soit élaboré, au plus vite, pour la ville de Châlons-en-Champagne, un plan d’exception, afin de compenser autant que possible cette suppression d’emplois, avec toutes les conséquences qu’elle implique.
Ce plan d’accompagnement exceptionnel sera mis en œuvre par le préfet de la région Champagne-Ardenne, préfet de la Marne, mandaté par le Premier ministre.
Le vecteur principal de ce plan d’accompagnement sera un contrat de redynamisation du site « défense ». Le comité de site, qui associera l’ensemble des acteurs locaux concernés, sera réuni avant la fin du mois de novembre.
Dans cet accompagnement du territoire vers la reconversion, le ministère de la défense restera un partenaire responsable et déterminé.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. En entendant votre réponse, monsieur le ministre, qui se veut tout aussi rassurante que le courrier que M. Le Drian m’a personnellement adressé et que l’engagement pris par le Premier ministre, je veux croire que le Gouvernement a pris la mesure de nos difficultés.
La compassion est importante, monsieur le ministre, mais nous avons surtout besoin d’être aidés, car une création de richesses est indispensable pour compenser autant qu’il est possible les conséquences de la fermeture décidée. Une dotation la plus élevée possible, c’est évidemment très bien, mais nous avons surtout besoin de moyens pour développer l’ensemble du secteur marnais.
Ma question avait aussi pour but de vous assurer, monsieur le ministre, de la détermination de tous les acteurs dans la défense de ce dossier : habitants, entreprises et forces économiques, acteurs politiques de toutes tendances, nous sommes tous solidaires et tous résolus face à ce qu’il faut bien appeler une catastrophe pour la ville, pour le département et au-delà, car elle aura des répercussions dans l’ensemble de la région.
Monsieur le ministre, je vous demande de transmettre ce message : nous ne nous résignerons pas !
reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour les communes de l'ardèche
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Genest, auteur de la question n° 913, adressée à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jacques Genest. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur, mais je sais que M. Le Foll, qui le représente ce matin dans notre hémicycle, est très au fait des problèmes du monde rural et du climat.
Je souhaite, pour commencer, m’associer à la douleur des habitants du Gard et de la Lozère, qui ont eu à déplorer cinq victimes lors des violentes inondations des 14 et 15 novembre ; j’ai une pensée spéciale pour la famille qui a été terriblement endeuillée.
Monsieur le ministre, l’Ardèche a été très durement éprouvée au cours de l’année 2014, particulièrement depuis cet été : les spécialistes du climat s’accordent à considérer que, avec quatre épisodes cévenols en deux mois, cette année est tristement exceptionnelle.
L’Ardèche a d’abord été frappée les 17 et 18 septembre 2014, puis entre les 9 et 13 octobre par une crue qualifiée de « vicennale ». Les services du département, au lendemain des événements du mois d’octobre, estimaient déjà à plus de 10 millions d’euros le montant des dégâts pour l’année 2014.
Or, deux semaines plus tard, les 3 et 4 novembre, l’Ardèche a connu de nouvelles et violentes intempéries. Dans certains endroits, il est tombé en quelques heures l’équivalent d’un mois de précipitations, ce qui a entraîné les crues de la Deûme et de la Cance. Routes départementales hors d’usage, glissements de terrain, bâtiments inondés, équipements dévastés, coupures d’électricité : tel est le lourd bilan pour soixante-dix-neuf de nos communes rurales.
Cette triste série vient de connaître encore un nouvel épisode, puisque notre département a été lui aussi très affecté par le tragique épisode des 14 et 15 novembre, que j’ai rappelé au début de mon intervention.
Par un arrêté publié le mardi 4 novembre, l’État a reconnu l’état de catastrophe naturelle au bénéfice de cent quatorze communes ardéchoises touchées en septembre et en octobre. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette décision, qui va permettre aux particuliers d’être indemnisés dans des délais raisonnables.
Toutefois, un problème demeure, qui suscite l’inquiétude des élus ardéchois : les collectivités territoriales doivent faire face, dans un contexte financier déjà fragilisé, à une série de sinistres qui ont durement affecté leurs infrastructures.
Ma question est donc simple et relaie l’inquiétude des élus ardéchois : monsieur le ministre, quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour les aider à affronter cette situation ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Le Foll, ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement. Avant de vous répondre, monsieur le sénateur, je tiens à m’associer, avec l’ensemble des membres de la Haute Assemblée, à la douleur des familles de nos cinq compatriotes disparus lors des récentes intempéries. À la suite du Président de la République, du Premier ministre et du ministre de l’intérieur, je les assure, en ma qualité de porte-parole du Gouvernement, de la sympathie de l’ensemble de mes collègues.
La zone cévenole, comme vous l’avez rappelé, a connu de manière consécutive quatre épisodes climatiques difficiles en quelques semaines seulement. Le drame qui s’est produit il y a quelques jours confirme que ces intempéries deviennent récurrentes : elles frappent non seulement par leur fréquence, mais aussi et surtout par leur intensité. Ce constat nous renvoie à la question globale du réchauffement climatique et de la lutte contre le dérèglement climatique.
Par un arrêté interministériel du 4 novembre, publié le 7 novembre, cent vingt-sept communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle, l’intensité anormale de l’agent naturel ayant pu être démontrée sur le fondement des rapports météorologiques et hydrologiques fournis dans des délais extrêmement brefs. Trente autres dossiers ont été ajournés dans l’immédiat, dans l’attente de données météorologiques et hydrologiques complémentaires ; bien entendu, ils feront l’objet d’un réexamen lors de la prochaine séance de la commission interministérielle relative à l’indemnisation des victimes de catastrophe naturelle.
Les habitants des communes reconnues en état de catastrophe naturelle pourront bénéficier de l’extension de garantie ouverte par les décisions de reconnaissance ; elle permettra d’assurer une indemnisation rapide des personnes et des acteurs territoriaux, notamment les entreprises, qui ont été touchés.
S’agissant des intempéries de début novembre, la préfecture de l’Ardèche avait reçu hier environ quatre-vingts demandes adressées par les communes. Les démarches sont en cours pour obtenir dans les délais les plus courts les rapports techniques, notamment ceux de Météo France et de la direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement, afin de permettre, là aussi, la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour les communes qui relèvent de ce dispositif.
Au-delà de la procédure de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, le ministre de l’agriculture que je suis tient à vous préciser, monsieur le sénateur, que les dossiers de reconnaissance de l’état de calamité agricole pour les agriculteurs de votre département touchés par les intempéries seront étudiés rapidement et avec toute l’attention nécessaire. Soyez donc assuré que, en ce qui concerne les dégâts subis par les agriculteurs, qui sont un problème important, nous engageons l’ensemble des procédures nécessaires.
Le ministre de l’intérieur et moi-même saluons la mobilisation de l’ensemble des services de l’État, des collectivités territoriales et des élus : leur engagement a permis d’éviter que ces intempéries n’aient des conséquences encore plus graves.
S’agissant des dégâts subis par les communes, sur lesquels vous avez insisté, la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, le ministre des finances et des comptes publics, le ministre de l’intérieur et moi-même avons saisi nos inspections respectives pour qu’elles constituent une mission chargée d’évaluer les dégâts subis par les collectivités locales : en fonction des dégâts subis par chacune des communes, des investissements seront nécessaires.
Cette mission, qui a été formée, se rendra très prochainement en Ardèche et dans les autres départements frappés par les intempéries de septembre et d’octobre pour évaluer les dommages subis par les collectivités et envisager les modalités du soutien de l’État. Son rapport est attendu pour la fin de cette année ou le début de l’année 2015 ; nous avons voulu des délais courts pour pouvoir ensuite activer dans les meilleurs délais les dispositifs d’aide aux collectivités territoriales.
Sur le fondement de ce rapport, il conviendra de déterminer les dispositifs les mieux adaptés, en prenant en compte leurs délais de mobilisation.
Enfin, le préfet de l’Ardèche et l’ensemble des services de l’État sont évidemment à la disposition des collectivités pour examiner leur situation et trouver rapidement les solutions les plus adaptées.
Comme vous le constatez, monsieur le sénateur, avec les ministres de l’intérieur, de l’agriculture et des finances, c’est l’ensemble du Gouvernement qui est pleinement attentif et mobilisé pour apporter des réponses, notamment aux collectivités, après des intempéries dont vous avez rappelé à juste titre l’exceptionnelle intensité.