Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, sur l'article.
M. Vincent Capo-Canellas. Beaucoup de choses ayant été dites, j’essaierai d’être bref.
Je formulerai d’abord trois constats.
Deux risques existent, chacun les identifie. Il s’agit, d’une part, de l’augmentation des impôts locaux. Il serait en effet dommage que l’État, réduisant ses propres dépenses, les collectivités en viennent à augmenter la fiscalité locale, car l’effet serait nul, sauf à nous faire porter localement la responsabilité politique de cette hausse.
Le deuxième risque concerne l’investissement. Nous connaissons tous l’effet d’entraînement des collectivités sur l’économie. Nous risquons donc de subir l’effet récessif d’une telle mesure, cela a été dit.
Parallèlement, le problème de fond tient à l’organisation territoriale de la République française qui est aujourd'hui trop compliquée. On le constate, un certain nombre de collectivités n’y arrivent plus. On a d’abord tenté l’intercommunalité pour essayer de trouver une solution. Maintenant, on envisage une autre idée, celle de la commune nouvelle. Une réflexion sur les départements et l’éventuel transfert des dépenses d’aide sociale est en cours. Tout cela, à l’évidence, n’est pas stabilisé. Si notre discussion sur les recettes et les dépenses des collectivités ne nous conduit pas, demain, à avancer sur le terrain des compétences et de la simplification, cela risque, à terme, de nous mener vers une impasse.
C’est la raison pour laquelle il me semble qu’on ne peut pas déconnecter ces deux aspects. Certes, nous serions à votre place, monsieur le secrétaire d’État, nous aurions la majorité à l’Assemblée nationale, nous serions peut-être amenés à demander aux collectivités de se serrer d’un cran la ceinture. Mais jusqu’où ? Telle est la vraie question.
Permettez-moi de rappeler la conjoncture économique. Au moment où nos décisions modificatives de fin d’année sont d’ores et déjà dans les tuyaux, nous observons une chute vertigineuse des droits de mutation, qui n’est pas neutre financièrement, une chute de la taxe locale d’équipement, tandis que les impôts économiques rapportent moins dans le contexte actuel.
Monsieur le secrétaire d’État, je comprends votre difficulté à boucler le budget. Qui plus est, vous êtes obligé d’opérer alors que la fièvre est là. Le moment choisi n’est pas le meilleur, ni pour les collectivités ni pour l’État. C’est la quadrature du cercle !
Au demeurant, nous avons eu un long débat en commission des finances, et j’imagine que M. le rapporteur général en présentera tout à l’heure les éléments. Nous en avons conclu qu’il ne fallait peut-être pas procéder de manière trop brutale et que, s’agissant de se serrer la ceinture, un cran valait mieux que deux. Nous avons donc proposé une option médiane, qui me semble avoir du sens.
Sur la péréquation, nous avons retenu la même logique. Peut-être, demain, une solution viendra-t-elle d’une remise à plat – cela suppose une analyse claire et transpartisane – de notre conception de la mutualisation, ce qui pourrait nous permettre d’envisager une autre réforme des collectivités que celle qui s’engage aujourd'hui. Une péréquation revisitée dans ses différents aspects peut-elle être la solution ? J’ai entendu les propos de Claude Dilain. Si ma collectivité n’est pas tout à fait dans la même situation que Clichy-sous-Bois, je sais bien – Philippe Dallier l’a rappelé tout à l’heure – que certains territoires, notamment en Seine-Saint-Denis, ont moins de ressources fiscales que d’autres.
La manière de répartir, demain, les ressources reste tout de même l’une des grandes questions. Cela permettra-t-il de gérer l’équation d’ensemble ? Je le souhaite. Mais l’ensemble, peu lisible, n’est compris ni des élus locaux ni de nos concitoyens. Il est donc urgent d’essayer de remettre tout cela en perspective. Peut-être M. le secrétaire d’État pourra-t-il nous y aider par ses réponses.
Au demeurant, la position de la commission me paraît de bon sens : prenons un peu de temps pour opérer cette baisse des dotations, engageons-nous sur ce chemin, même sans plaisir, et essayons de voir comment on peut, demain, trouver des solutions pour les collectivités.
Mme la présidente. L'amendement n° I-209, présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Éric Bocquet.
M. Éric Bocquet. Cet amendement tend purement et simplement à supprimer l’article 9, pour toutes les raisons évoquées par les uns et les autres.
Cet article vise en effet à diminuer une nouvelle fois les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales à hauteur de 3,67 milliards d’euros en 2015.
Tous les arguments développés, nous les reprenons à notre compte. On connaît le poids économique des collectivités dans notre pays : elles portent encore plus de 70 % des investissements publics, et emploient 1,8 million de salariés. Elles constituent donc une réalité forte, y compris au plan économique.
Nous pensons que la réduction des dotations aux collectivités sera contreproductive. Toutes les analyses, malheureusement, le montrent. Nous avons tout lieu de nous inquiéter, pour les années à venir, de l’évolution de leur capacité d’investissement qui ne manquera pas d’affecter le déficit, le chômage et le tissu économique territorial.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Peut-être le groupe CRC devrait-il réfléchir avant de maintenir cet amendement. Certes, si nous l’adoptions, nous réaliserions une économie importante ! Car voter la suppression de l’article 9, c’est tout simplement voter la suppression de la DGF, soit 36,6 milliards d’euros, ce qui me paraît tout de même un peu brutal ! Même le Gouvernement ne va pas jusque-là ! (Sourires.)
Une telle mesure s’avérerait particulièrement fâcheuse pour les collectivités, tandis que le déficit budgétaire s’en trouverait grandement amélioré.
M. François Marc. Cela aidera l’UMP à concrétiser son plan d’économies de 130 milliards d’euros…
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Nous reparlerons, mon cher collègue
Pour m’exprimer plus sérieusement, je rappelle que, sur toutes les travées de notre assemblée, s’est exprimé le souhait que la baisse prévue de 3,67 milliards d’euros soit minorée. On a parlé de l’incidence d’une telle mesure tant sur l’investissement que sur la fiscalité. Globalement, la position qui a prévalu au sein de la commission des finances, mais aussi sur de nombreuses travées, met en avant le nécessaire amoindrissement de l’effort demandé aux collectivités. Pour autant, on ne peut en aucun cas supprimer toutes les dotations de l’État ! Telle serait en effet la conséquence de l’adoption de cet amendement, dont l’adoption reviendrait, je le répète, à supprimer la DGF.
C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Il n’y a pas de meilleur argument que celui qui vient d’être exposé. Supprimer l’article 9 est inenvisageable. Je pense qu’il serait sage, monsieur Bocquet, que vous acceptiez de retirer cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° I-209 est-il maintenu, madame Beaufils ?
Mme Marie-France Beaufils. Il est bien évident que je vais retirer cet amendement. Il y a eu un petit problème technique ! (Sourires.)
M. Philippe Dallier. À 36 milliards d’euros !
Mme Marie-France Beaufils. Nous ne voulions pas supprimer l’article 9 dans son ensemble.
En réalité, nous voulions attirer l’attention sur la base sur laquelle l’État a calculé la baisse envisagée. Il met en avant le fait que les collectivités représentent 20 % de l’ensemble de la dépense publique et en tire la conséquence qu’on doit les faire contribuer à hauteur de 20 % de la dépense publique. À nos yeux, une telle conception soulève un problème. On aurait pu également examiner la situation des collectivités territoriales par rapport à la dette publique : sur ce plan, leur poids n’est que de 10 %. Pourquoi ne s’appuie-t-on pas sur ce chiffre ? En 2014, le secteur public local contribuera au déficit public pour trois dixièmes de point sur 4,4 % du PIB., ce qui représente 7 % de l’effort de réduction des dépenses.
On le constate, selon le point de vue retenu, le critère selon lequel on sollicite l’effort des collectivités territoriales peut être analysé de façon très différente. En l’occurrence, on a retenu la référence la plus défavorable.
Quoi qu’il en soit, la formulation de notre amendement n’était pas bonne.
Mme la présidente. L’amendement n° I-209 est retiré.
Je suis saisie de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-26, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer le montant :
36 607 053 000 €
par le montant :
37 705 404 068 €
II. – Alinéa 30
Remplacer le montant :
556 019 137 €
par le montant :
660 019 137 €
III. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I et du II, compléter cet article par un V ainsi rédigé :
V – La perte de recettes résultant pour l’État de l'augmentation des concours de l'État aux collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Cette question vient déjà de faire l’objet d’un long débat ; il en fut de même en commission. Tous les orateurs ont exprimé leur crainte face à la baisse de dotation proposée par le Gouvernement, une diminution de 3,67 milliards d’euros dans l’état initial du projet de loi de finances. Le débat portait sur ce qu’il convenait alors de faire.
La position de la commission, que traduit l’amendement que je défends à l’instant en son nom, est un appel à la responsabilité de part et d’autre.
D’un côté, les collectivités doivent faire preuve de responsabilité. En effet, les concours financiers de l’État, de plus de 36 milliards d’euros, sont élevés et les collectivités ne doivent pas être exemptes de participer à l’effort. Concrètement, il ne s’agit pas de refuser toute baisse de dotation. Je me rappelle toutefois les cris entendus lorsque l’on parlait d’une diminution de 200 millions d’euros. Nous sommes loin aussi de l’une des soixante propositions reprise lors du discours de Dijon, selon laquelle il n’était pas du tout question de baisser les dotations aux collectivités. Les temps ont sans doute changé, on est revenu à plus de réalisme, et le sens de la responsabilité conduit à dire que les collectivités doivent participer à l’effort et accepter une réduction de leur dotation.
D’un autre côté, si l’on veut être pleinement responsable, l’État doit aussi assumer une part de responsabilité.
Accepter de faire preuve de responsabilité signifie, pour l’État, mesurer les conséquences des baisses de dotation. Sur ce point, la commission a eu un long débat et s’est montrée sensible à deux risques.
Le premier, qui est souligné dans le rapport, concerne la baisse de l’investissement public local. Cela a été dit et redit, l’investissement public ne représente que 2,1 % des dépenses publiques de l’État. Donc, plus des trois quarts sont assurés par les collectivités et, si les dotations baissent, nécessairement, les investissements diminueront. Vous l’avez tous relevé, mes chers collègues, le rapport l’indique, comme d’autres travaux. Je pense notamment à ceux de la Banque Postale, selon lesquels cette baisse des dotations aura pour conséquence un repli de l’investissement public de 7,4 %. Mais je pourrais aussi citer ceux de la Fédération nationale des travaux publics, qui chiffre le risque en termes d’emplois, estimant à plus de 37 000 le nombre d’emplois menacés par la baisse de l’investissement, ou encore le tout récent rapport de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et à la décentralisation.
J’y insiste, le premier risque est la baisse de l’investissement des collectivités, qui sera une conséquence mécanique de la diminution des dotations de l’État puisque les collectivités se trouvent soumises à des contraintes – GVT, ou glissement vieillissement technicité, et autres mesures décidées unilatéralement – qui, quels que soient les efforts de gestion accomplis, conduisent naturellement à une augmentation de leurs dépenses.
Le second risque est une hausse des taux des impôts locaux estimée à plus de 5 milliards d’euros. Les chiffres du Gouvernement le démontrent d’ailleurs. Autrement dit, même si elles ne le veulent pas, les collectivités seront contraintes d’augmenter ces taux. Apparaîtra alors un risque de transfert de l’impopularité des augmentations d’impôt vers les collectivités.
Tels sont les deux principaux arguments qui incitent la commission à la prudence avant d’envisager une baisse d’une telle ampleur : 3,67 milliards d’euros l’année prochaine, 11 milliards sur trois ans, auxquels il convient d’ailleurs ajouter la somme de 1,5 milliard d’euros déjà engagée.
Concrètement, la commission, guidée par ce sens des responsabilités dont je parlais, accepte que les collectivités participent à l’effort… mais à la condition que l’État fasse, lui aussi, preuve de responsabilité en n’imposant pas en permanence de nouvelles charges aux collectivités.
En la matière, nous nous sommes référés à un travail relativement incontestable : celui de la Commission consultative d’évaluation des normes. Je vous rappelle que cette instance, dont le secrétariat est assuré par la direction générale des collectivités locales, est pluraliste. Elle a établi un rapport qui n’est guère contesté dans lequel elle considère que le coût des mesures qui s’imposent aux collectivités locales – elle les a examinées avec précision – s’élevait pour celles-ci à plus de 1,2 milliard d’euros en 2013. Sont visées la réforme des rythmes scolaires, les normes relatives à la fonction publique, les normes en matière sociale et autres, un ensemble de normes issues de plus de deux cents textes.
De ce fait, la commission propose de défalquer de la baisse de dotation retenue par le Gouvernement le coût des charges que l’État a transférées aux collectivités au titre de l’année 2013. L’examen dans quelques instants de sous-amendements permettra de compléter la réflexion.
Mes chers collègues, je vous invite à aller dans le sens de l’amendement de la commission et non à vous rallier à la proposition qui vise à étaler la diminution dans le temps, sur quatre ans au lieu de trois ans. En effet, pourquoi alors ne pas prévoir un étalement sur cinq, voire six ans ?
La position de la majorité de la commission tend, à mon avis, à responsabiliser bien davantage. Nous avons eu de nombreux débats sur le sujet ; je pense notamment au rapport Doligé ou au rapport Lambert-Boulard. Les gouvernements successifs se sont engagés à de multiples reprises à cesser de mettre de nouvelles normes à la charge des collectivités, mais ces beaux engagements n’ont pas trouvé de traduction dans les faits. Chaque jour, on continue à produire de la norme qui s’impose aux collectivités et qui concerne les certificats phytosanitaires pour les employés communaux un jour, la dangerosité du travail ou la pollution de l’air dans les classes le lendemain. Ces engagements n’ont aujourd’hui qu’une valeur de pétition de principe.
En abordant la question d’un point de vue budgétaire, c’est-à-dire en traduisant concrètement dans les chiffres le coût de ces normes – il y a pour cela la Commission consultative d’évaluation des normes, mais aussi le comité des finances locales, des associations, notamment l’Association des maires de France qui se réunira à partir de demain –, nous inciterons à plus de responsabilité et il sera peut-être, enfin, mis un coup de frein réel à la norme.
Je suis sans doute un peu long dans la présentation de cet amendement, mais je vous invite vraiment à le soutenir, mes chers collègues. Il a été adopté par la majorité de la commission. Il s’agit d’un amendement de responsabilité : responsabilité des collectivités, qui acceptent de participer à l’effort ; responsabilité de l’État, qui prend en considération l’incidence des baisses de dotation sur les taux d’imposition et sur l’investissement, et n’impose pas de nouvelles normes sans tenir compte de leur coût.
Donc, en défalquant le coût occasionné par la mise en œuvre de ces normes, nous devrions aboutir à amoindrir de 1,2 milliard d’euros la baisse des dotations à l’égard des collectivités.
Nous aurons ce débat par la suite, mais je dirai un mot sur la péréquation, sujet d’ailleurs déjà abordé par certains. Le présent amendement est aussi un amendement de prudence à l’égard de la péréquation, car nous sommes dans une phase intermédiaire.
Tout d’abord, élément nouveau, nous allons connaître une baisse de dotation sans précédent : après 200 millions d’euros, 1,2 milliard d’euros, nous passerons à 3,67 milliards d’euros l’année prochaine et à 11 milliards d’euros sur trois ans. On change de dimension et il convient, bien évidemment, d’en mesurer l’incidence sur chaque collectivité.
Ensuite, François Marc l’a dit, on nous annonce différentes réformes, dont celle de la DGF, par exemple. Est-ce bien le moment, sans en avoir mesuré les conséquences pour chaque collectivité – et je pense aux propos de Michel Bouvard et de Philippe Dallier – de faire monter en puissance la péréquation tant verticale qu’horizontale ? Nous parlerons du FPIC lors de l’examen de la deuxième partie du présent projet de loi, mais la commission appelle à la prudence dans le domaine de la péréquation verticale.
Il s’agit non pas de revenir sur la péréquation, mais de veiller à garder le rythme, à ne pas l’augmenter. À mon sens, il serait extrêmement imprudent en cette période de grande incertitude, alors que nous n’avons pas encore pleinement mesuré les conséquences des choix qui seront faits en matière de baisse de dotation, de faire monter en puissance la péréquation au-delà de ce qui serait raisonnable.
C’est la raison pour laquelle la commission propose un mécanisme qui réduit l’effort supplémentaire de moitié.
Tel est le sens de son amendement, qui est marqué au sceau de la responsabilité. Il devrait avoir une vertu pédagogique à l’égard des différents ministères qui sont, tous les jours, producteurs de normes.
Mme la présidente. Les sous-amendements nos I-417 et I-418 sont identiques.
Le sous-amendement n° I-417 est présenté par M. Retailleau et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.
Le sous-amendement n° I-418 est présenté par M. Zocchetto et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC.
Ces deux sous-amendements sont ainsi libellés :
I. – Amendement n° I-26, alinéa 5
Remplacer le montant :
37 705 404 068 €
par le montant :
37 905 404 068 €
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter l’amendement n° I-26 par deux paragraphes ainsi rédigés :
... – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Dallier, pour présenter le sous-amendement n° I-417.
M. Philippe Dallier. Ce sous-amendement vise à aller un peu plus loin que ce que propose la commission, afin d’intégrer une partie du coût de la réforme des rythmes scolaires.
Le Gouvernement, qui a voulu cette réforme, a tout bonnement décidé de demander aux collectivités locales de la financer. Or cette demande nous paraît presque être la négation de l’égalité républicaine à l’école. Faire porter le poids de la réforme à des communes de richesse variable a des conséquences connues : dans les communes riches, la réforme sera d’un certain niveau ; dans les autres, ce sera différent. Ne serait-ce que pour cette raison, nous étions opposés à l’idée.
Pour en revenir à l’enveloppe de la DGF pour l’année 2015, nous proposons d’intégrer le coût de la réforme des rythmes scolaires. Des chiffres compris entre 660 millions d’euros et 1 milliard d’euros ayant été évoqués, nous avons coupé la poire en deux, en l’estimant à 800 millions d’euros, que nous avons déduits de la proposition faite par la commission.
Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour présenter le sous-amendement n° I-418.
M. Vincent Delahaye. Les membres du groupe UDI-UC partagent l’optique de responsabilité évoquée par M. le rapporteur général.
Personnellement, j’aurais souhaité aller plus loin, car il m’aurait semblé normal de proportionner l’effort demandé aux collectivités à celui que s’impose l’État. Ce dernier diminue ses dépenses de 1,8 milliard d’euros, et il est demandé aux collectivités un effort de 3,7 milliards d’euros – en fait, il convient d’ajouter à cette somme celle de 1,5 milliard d’euros de l’an dernier, soit 5,2 milliards d’euros par rapport à 2013. Si nous prenions en compte la baisse des dépenses de l’État en 2013 et faisions le même effort, nos soucis budgétaires ne seraient sans doute pas complètement derrière nous mais, en tout cas, ils seraient en voie de résolution.
On demande donc aux collectivités locales un effort colossal alors que leurs recettes ne sont pas dynamiques. Or le Gouvernement en est resté à la décennie 2000-2010 qui a connu un dynamisme certain des recettes territoriales. Tout à l’heure ont été cités les droits de mutation, mais la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, la CVAE, qui a remplacé une partie de la taxe professionnelle, n’est pas très dynamique non plus. Même les territoires qui ont quelques moyens ont eu des surprises avec l’évolution à la baisse non négligeable de celle-ci. Je pense donc que l’effort démesuré qui est demandé mériterait d’être corrigé dans des proportions bien plus fortes.
Cela étant, nous nous sommes ralliés à la position de la commission. Prenons en considération les augmentations de dépenses qui sont imposées par l’État, qu’elles concernent les retraites, la revalorisation des catégories B et C ou la réforme des rythmes scolaires. À l’égard de cette dernière, l’évaluation de la dépense est incertaine. Son coût selon nous devrait s’établir autour de 800 millions d’euros et non de 600 millions d’euros. Ce sont ces 200 millions d’euros d’écart que nous prenons en compte dans notre amendement.
Monsieur le secrétaire d’État, si le Gouvernement souhaite aider les collectivités territoriales à réduire leurs dépenses, ce qui lui permettrait également de diminuer l’ensemble des dépenses publiques, il serait bon qu’il propose un gel de l’application de certaines normes ou un moratoire sur la mise en place d’autres qui nous obligent à des dépenses complémentaires. Cela étant, nous pouvons, sur le fond, comprendre la nécessité de certaines mesures.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Les deux sous-amendements ont le mérite de nous pousser à la précision, puisque, concrètement, il nous faut évaluer le coût de ces dépenses nouvelles.
D’après le rapport de la Commission consultative d’évaluation des normes, devenue depuis le Conseil national d’évaluation des normes, grosso modo, trois ministères sont coûteux en termes de normes : le ministère de la fonction publique, qui a produit 42 textes sur la fonction publique pour 582 millions d’euros ; le ministère de l’éducation nationale, qui représente 32 % du total, soit 600 millions d’euros à lui seul ; enfin, le ministère des affaires sociales et de la santé, qui a produit 41 textes, pour 566 millions d’euros.
La Commission consultative considère que le coût net total, pour une année pleine, de l’ensemble des mesures examinées en 2013 s’élève à 1 853 445 406 euros - ses calculs sont vraiment très précis, et je m’honore d’être suppléant au sein de cette instance.
De cette somme, il convient de défalquer un certain nombre d’économies, pour 181 794 338 euros, et des recettes, à hauteur de 469 300 000 euros. Par conséquent, globalement, à l’euro près, le coût net est de 1 202 351 068 euros.
Les deux sous-amendements posent la question tout à fait essentielle du coût de la réforme des rythmes scolaires, qui va largement occuper le congrès des maires dont je vous rappelle qu’il s’ouvre demain.
La réforme a été évaluée par la CCEN à 600 millions d’euros pour l’année 2013 et le chiffrage mérite donc d’être affiné pour 2014.
Les auteurs des deux sous-amendements ont, eux, considéré que le coût de la réforme des rythmes scolaires était sans doute beaucoup plus proche de 800 millions d’euros, voire de 1 milliard d’euros. Or cette évaluation est relativement partagée par des associations telles que l’Association des maires de France et l'Assemblée des départements de France s’agissant du coût des transports. La réalité est certainement plus proche de 1 milliard d’euros que de 600 millions d’euros.
Je remercie le groupe de l’UDI-UC d’avoir souligné que notre approche aurait pu être différente mais, si nous souscrivons à cette logique de responsabilité consistant à défalquer le coût des normes nouvelles imposées aux collectivités, cela mérite cette précision.
Concrètement, il s’agit donc, par ces sous-amendements, de relever l’évaluation du coût des rythmes scolaires pour la passer de 600 millions d’euros à 800 millions d’euros et de minorer de 200 millions d’euros supplémentaires la baisse des dotations.
Par conséquent, ces deux sous-amendements sont très utiles et continuent à s’inscrire dans la logique de l’amendement n° I-26 de la commission.
Un petit débat s’est tenu au sein de la commission, qui, à l’issue d’un vote, je dois être honnête, était plutôt défavorable à cette proposition. (M. Jean Germain fait un signe de dénégation.) Nous pourrons en débattre, mais à titre personnel, je m’en remets à la sagesse du Sénat. En effet, si l’on indique un coût, il faut qu’il soit le plus précis et le plus juste possible. Or, à mon sens, le coût réel de la réforme des rythmes scolaires est plus proche de 1 milliard d’euros que de 600 millions d’euros.
Je suis président de conseil général par ailleurs, et 1,2 million d’euros pour un département moyen, c'est un aller et retour supplémentaire chaque mercredi sur tous les trajets scolaires visés.
M. Michel Bouvard. J’en ai pour 1 million d’euros !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Si vous multipliez cette somme par cent départements en France, vous pouvez avoir une idée du coût total simplement pour les départements. On pourrait ajouter les dépenses des communes, mais je vais m’arrêter là.
J’aurais dû ajouter, pour être complet, qu’une mission commune d’information sénatoriale s’est penchée sur le coût de la réforme des rythmes scolaires et que nous sommes en phase avec ses travaux.
Cette proposition permet d’affiner le travail. Si on reste dans la logique pure d’un rapport N-1 du bilan définitif de la Commission consultative d’évaluation des normes, on doit s’en tenir aux chiffres de la CCEN. Si l’on veut se rapprocher de la réalité, on doit prendre en compte ces sous-amendements.
Telle sont les raisons pour lesquelles, à titre personnel, je le redis, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.