M. Jean-Claude Boulard. Cet amendement porte sur les critères de contribution au FPIC.
Puisqu’un un potentiel financier moyen pour les intercommunalités a été calculé, il eût été logique de prélever lorsqu’on est au-dessus de la moyenne et de ne pas prélever lorsqu’on est en dessous de la moyenne. Or le FPIC commence à opérer des prélèvements à partir de 90 % du potentiel financier moyen.
Par mon amendement, je propose de corriger en deux étapes cette situation en portant ce taux à 95 % en 2015 et à 100 % en 2016. Cela correspond à 2,8 % du montant de l’enveloppe.
La proposition que faisait Louis Nègre à travers son amendement me paraît plus pertinente puisque notre collègue, plutôt que de reporter sur les contributeurs restants les conséquences qui résulteraient du non-assujettissement au FPIC de ceux qui en étaient jusqu’à présent contributeurs, suggérait de réduire à due concurrence le montant de ce fonds. C’est pourquoi, monsieur le président, je souhaite rectifier mon amendement de manière à l’aligner totalement sur celui de Louis Nègre, qui n’a pas été soutenu.
M. le président. Je suis donc saisi d’un amendement n° II-208 rectifié, présenté par M. Boulard et ainsi libellé :
Après l’article 58
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° À la première phrase du 1 du II de l’article L. 2336-1, le nombre : « 780 » est remplacé par le nombre : « 730 » ;
2° Au a du 1° du I de l’article L. 2336-3, le taux : « 90 % » est remplacé par les mots : « 95 % en 2015 et à 100 % en 2016 ».
Veuillez poursuivre, monsieur Boulard.
M. Jean-Claude Boulard. L’objectif est donc de relever en deux étapes de 90 % à 100 % le seuil de potentiel financier agrégé moyen à partir duquel les ensembles intercommunaux sont contributeurs au FPIC, en évitant tout effet de report sur les communes dont le PFIA – potentiel financier agrégé – est supérieur à la moyenne.
Lors de l’examen du projet de loi de finances par l’Assemblée nationale, vous avez jugé cette question pertinente, monsieur le secrétaire d'État. Du reste, elle avait déjà donné lieu à un débat l’année dernière. Je crains que, d’étude en étude, on ne repousse le règlement de cette question.
Environ 200 communautés de communes, y compris des communautés situées en zone rurale, subissent un prélèvement à ce titre. Au moment où augmente la péréquation, il est assez légitime de penser que le prélèvement au titre du FPIC ne peut intervenir que pour les collectivités se situant au-dessus du potentiel financier agrégé moyen par habitant, et ce afin d’éviter toute injustice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement n° II-455 et sur l’amendement n° II-208 rectifié ?
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Par son sous-amendement, M. Bouvard souhaite maintenir le montant du FPIC à son niveau de 2014. Au terme d’une discussion approfondie, nous sommes parvenus à nous entendre sur une position médiane. À titre personnel, je me serais volontiers contenté de l’évolution normale. Cela étant, attendons la publication du rapport au Parlement sur la question.
Il faut instruire à charge et à décharge. Ceux qui sont prélevés au titre du FPIC peuvent aussi être ceux qui doivent contribuer à l’effort financier qui est demandé à l’ensemble des collectivités. Or ce prélèvement au titre de la contribution à l’effort n’est pas spécialement péréquateur puisque toutes les collectivités, qu’elles soient riches ou pauvres, sont traitées de la même façon.
M. Philippe Dallier. Pas tout à fait !
M. Charles Guené, rapporteur spécial. En revanche, force est de constater que les collectivités les plus pauvres ou les moins bien loties ne bénéficieront pas de l’effort d’équité qui était prévu à travers le FPIC.
Si l’on retient un point médian, cela représente déjà un effort pour certains et cela manifeste en même temps la volonté de parvenir à un consensus.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° II-455.
M. le président. Monsieur Bouvard, le sous-amendement n° II-455 est-il maintenu ?
M. Michel Bouvard. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° II-455 est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements nos II-64 et II-208 rectifié ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement a clairement indiqué tout à l’heure que de très nombreuses demandes lui sont adressées pour maintenir la péréquation, qui satisfait tout le monde et qui, je le rappelle, est née d’une initiative sénatoriale sous la précédente législature. C’est pourquoi le Gouvernement ne souhaite pas ralentir la progression du FPIC.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° II-64, qui tend à ralentir la progression du FPIC, et sur l’amendement n° II-208 rectifié, qui a un objet identique, mais en allant un peu plus loin, et qui tend également à modifier les seuils d’entrée dans la catégorie des ensembles intercommunaux contributeurs.
Il est indiscutable que l’amendement n° II-208 rectifié aurait pour effet de réduire le montant global du FPIC. Certes, il y a lieu de s’interroger sur le seuil d’assujettissement au prélèvement, qu’il est proposé de porter à 0,95, au lieu de 0,9. Ce relèvement entraînerait une plus forte concentration des contributions à droit constant. La contribution est actuellement de 21 euros par habitant ; en relevant le seuil, elle passerait à 25 euros par habitant, ce qui nous paraît excessif, sauf à diminuer l’effet péréquateur et redistributeur.
À ce stade, le Gouvernement y est défavorable.
Je vous rappelle que vos collègues députés ont voté un amendement prévoyant un rapport sur le FPIC. Vous en disposerez probablement bientôt.
Disons-le aussi, l’évolution du FPIC ne peut être déconnectée d’une évolution – que le Gouvernement appelle de ses vœux – de la DGF. Aussi, il me semble prématuré de toucher à ces paramètres.
M. le président. L’avis de la commission sur l’amendement n° II-208 rectifié n’a pas été exprimé. Je sollicite donc un des deux rapporteurs spéciaux…
M. Jean Germain, rapporteur spécial. À titre personnel, je suis défavorable à une diminution du FPIC, à quoi tend l’amendement n° II-208 rectifié. Au demeurant, cet amendement est incompatible avec l’amendement n° II-64 de la commission.
Sur le fond, l’auteur de l’amendement propose que seuls les ensembles intercommunaux dont le PFIA moyen par habitant est supérieur à 95 % en 2015 et à 100 % en 2016 de la moyenne nationale puissent être prélevés au titre du FPIC.
En 2014, on compte 994 ensembles intercommunaux et communes isolées qui sont prélevés au titre du FPIC. En élevant le seuil du potentiel fiscal à 95 %, quatre-vingts EPCI ou communes isolées actuellement contributeurs seraient exclus du prélèvement. En l’élevant à 100 %, cent trente EPCI ou communes isolées supplémentaires en seraient exclus. Ainsi, en deux ans, ce sont 20 % des contributeurs qui seraient exclus du prélèvement au titre du FPIC. Certains EPCI contribuant de façon importante seraient exclus du prélèvement : le poids de leur contribution se reporterait alors sur les autres EPCI.
La commission est donc défavorable à cet amendement, dont l’adoption aurait pour conséquence de concentrer davantage les prélèvements sur un nombre plus faible d’ensembles intercommunaux.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Boulard, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Boulard. La péréquation opère sur des territoires dont le potentiel financier moyen est inférieur à la moyenne nationale.
M. Philippe Dallier. Eh oui !
M. Jean-Claude Boulard. Une péréquation, cela consiste à prendre à ceux dont la richesse est supérieure à la moyenne au profit d’autres territoires, selon certains critères. Avec le FPIC, on prélève sur des territoires dont la richesse est inférieure à la moyenne ! Et sous prétexte qu’ils sont nombreux, il ne faudrait rien toucher !
Du reste, je souhaite que la liste des intercommunalités concernées soit diffusée ; le débat serait alors moins abstrait. On s’apercevrait que des territoires ruraux qu’on peut tenir pour pauvres sont touchés par ce prélèvement. D’où ma proposition d’exonérer du prélèvement au titre du FPIC les collectivités dont le PFIA est inférieur à la moyenne nationale. Afin de parer à tout effet de report sur les collectivités dont le PFIA est, lui, supérieur, je propose de réduire à due concurrence, soit 50 millions d’euros, le montant total du FPIC.
Plaider en faveur de la péréquation et la justifier alors qu’on prélève sur des territoires dont la richesse se situe en dessous de la moyenne, c’est totalement contradictoire ! En outre, on prélève au profit de territoires dont l’effort fiscal est inférieur à la moyenne nationale ; cela aboutit à faire ce que j’appelle de la péréquation à l’envers !
Mme Sophie Primas. Absolument !
M. Jean-Claude Boulard. Or il ne me paraît pas très pertinent de continuer à faire de la péréquation à l’envers. (Applaudissements sur les travées de l'UMP. – M. Vincent Delahaye applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Tout le monde se souvient dans quelles conditions le FPIC a été créé : la taxe professionnelle a été réformée à la hussarde et il a ensuite fallu trouver des mécanismes pour rééquilibrer la situation des collectivités. C’est ainsi que le FPIC fut créé par l’ancienne majorité. (Protestations sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. Vincent Delahaye. Vous refaites un peu l’histoire !
M. François Marc. Non, c’est bien la réalité, personne ne peut le contester !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Mais vous n’êtes pas revenus sur le FPIC !
M. François Marc. Le principe et les mécanismes du FPIC ont suscité, au Sénat, des discussions sans fin. La commission des finances y a longuement travaillé et, à deux ou trois reprises, lors de la préparation des exercices budgétaires suivants, nous avons remis l’ouvrage sur le métier afin d’affiner les critères et les pourcentages et, ainsi, aboutir à un dispositif plus acceptable.
Nous avons atteint un équilibre puisque, grâce à des mécanismes qui diffèrent pour le prélèvement et la répartition, de nombreux EPCI prélevés reçoivent une contrepartie. On ne peut donc pas dire que tous les EPCI subissent un prélèvement net.
Pour en revenir au principe qui est ici en jeu et qui se fonde sur la volonté de développer en quatre ans une répartition horizontale des richesses, l’adoption de cet amendement irait clairement à l’encontre de l’objectif, partagé, de faire en sorte que cette péréquation horizontale atteigne progressivement 1 milliard d’euros.
Dans cette période difficile de « disette budgétaire », pour reprendre une expression qui fait aujourd’hui florès, j’ai le sentiment qu’il nous faut être attentif aux plus modestes. Or ce mécanisme de péréquation, malgré ses imperfections – et je concède volontiers qu’il en subsiste dans ce dispositif, même si elles sont résiduelles –, permet d’apporter un peu d’oxygène aux plus démunis. Or c’est quand même sa finalité !
Il en va de même en ce qui concerne la péréquation verticale, qui a été renforcée par le Gouvernement. Il était juste, à mon avis, dans cette période où l’on baissait globalement les dotations, de renforcer la péréquation verticale, tout comme la péréquation horizontale.
Au groupe socialiste, nous sommes attachés à ce que soit préservé le rythme de progression tel qu’il a été défini et programmé sur quatre exercices. Nous considérons que cet amendement va à l’encontre de cette volonté commune et qu’il faut donc le rejeter.
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, pour explication de vote.
M. Vincent Delahaye. Je me retrouve plus dans l’argumentaire de Jean-Claude Boulard que dans celui de François Marc,...
M. Philippe Dallier. Moi aussi !
M. Vincent Delahaye. … qui réécrit un peu l’histoire à sa façon.
Je pense qu’il y avait effectivement à l’origine du FPIC une volonté de solidarité entre les communes. Je ne remets pas en cause le principe de cette péréquation et je partage cette volonté. Mais les anomalies décrites par notre collègue Jean-Claude Boulard sont réelles et posent vraiment question.
Surtout, le contexte actuel n’est plus celui dans lequel a été créé ce fonds de péréquation. (Mme Sophie Primas, M. Albéric de Montgolfier et M. Michel Bouvard applaudissent.)
M. Philippe Dallier. Bien sûr !
M. Vincent Delahaye. On nous demande par ailleurs des efforts considérables. Le Sénat s’est efforcé de les atténuer, mais ils restent malgré tout très importants. Cela a déjà été dit, mais il faut y insister, la répartition de cet effort est déjà en lui-même une péréquation puisque l’effort est fonction du total des recettes de fonctionnement des collectivités. Par conséquent, celles qui ont plus de recettes sont plus prélevées.
Mme Sophie Primas. Absolument !
M. Vincent Delahaye. C’est logique !
Si rien de nouveau ne s’était produit, on pourrait se dire qu’il n’y a pas à revenir sur ce qui a été décidé, mais, précisément, il existe une donnée nouvelle.
Pour ma part, j’étais assez proche de la position exprimée à travers l’amendement « Nègre-Boulard », si j’ose ainsi m’exprimer. Nous en avons beaucoup discuté et nous avons décidé – mais j’avoue que je n’étais pas totalement convaincu – que ce serait peut-être un message par trop « anti-péréquation ». L’arrangement qui a été trouvé consiste donc à laisser progresser la péréquation, mais en atténuant cette progression.
En effet, nous ne sommes pas anti-péréquation, mais nous souhaitons qu’un rapport – et je me réjouis que l’Assemblée nationale se soit prononcée en ce sens – permette de faire le point sur toutes ces questions, qui sont forcément liées à la réforme annoncée de la DGF des communes et des intercommunalités. Il faudra bien se garder d’oublier ces dernières parce qu’il y a des inégalités dans la DGF intercommunale bien supérieures à celles que l’on peut constater en ce qui concerne la DGF communale.
Je vais suivre la commission et voter l’amendement de compromis qui a été mis au point, mais l’amendement qu’avait déposé notre collègue Louis Nègre et les arguments qu’a avancés notre collègue Jean-Claude Boulard sont loin de me laisser insensible.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. Les conditions dans lesquelles a été construite la péréquation n’étaient pas celles que connaissent aujourd’hui les collectivités territoriales.
À titre personnel, je suis absolument opposée aux péréquations. Il s’agit d’un mécanisme qui, sous couvert d’aide sociale,…
Mme Michèle André, présidente de la commission des finances. Comment cela, « d’aide sociale » ?
Mme Sophie Primas. … est tout à fait contre-productif pour les départements et les collectivités qui créent de la richesse et qui ne se voient plus du tout encouragés à les poursuivre. Je pense que l’on est allé beaucoup trop loin dans les systèmes de péréquation.
M. Michel Bouvard. Ah oui !
Mme Sophie Primas. C’est pourquoi je voterai l’amendement de M. Boulard.
M. François Marc. N’allez pas trop loin tout de même !
Mme Sophie Primas. On manque d’une vision globale sur les collectivités territoriales. En tout cas, baisse des dotations, augmentation des charges obligatoires et augmentation des péréquations verticales et horizontales conduisent à des situations ubuesques dans mon département.
Ainsi, au sein de la communauté d’agglomération de Mantes en Yvelines, les communes de Mantes-la-Jolie et de Mantes-la-Ville, qui connaissent de très graves difficultés, sont de grosses contributrices au FPIC. C’est absolument incompréhensible ! Il en va de même, toujours dans mon département, pour Trappes ou pour Chanteloup-les-Vignes.
Nous en arrivons à appauvrir les pauvres ! Vraiment, cela ne peut pas continuer ! (M. Michel Bouvard applaudit.)
Je compte, monsieur le secrétaire d'État, sur votre volonté, certainement très sincère, de réexaminer tous ces systèmes de péréquation et de voir comment sont arbitrées les dotations. Nous ne pouvons pas continuer à subir les effets pervers de la péréquation. Et de surcroît, nous qui faisons partie de la région parisienne, nous devons aussi contribuer au fonds de solidarité des communes de la région d’Île-de-France.
Les situations deviennent de plus en plus tendues. J’en appelle donc à vous, monsieur le secrétaire d'État, pour que ces situations soient étudiées rapidement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je voudrais expliquer à nouveau la position de compromis trouvée par la commission des finances.
Aucun des auteurs des amendements que nous examinons n’est contre la péréquation. En revanche, des doutes sérieux s’expriment sur le rythme de progression, car, comme cela a été dit par plusieurs collègues, certaines situations sont totalement aberrantes puisque des communes pauvres se retrouvent contributrices nettes à la péréquation et, élément nouveau, les dotations sont en baisse.
M. Michel Bouvard. Eh oui !
M. Jean-Claude Boulard. Tout à fait !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Comme l’a très bien dit Charles Guené, la combinaison de la baisse des dotations et de la forte progression de la péréquation conduit à des phénomènes aberrants, et risque de peser de plus en plus sur l’investissement.
Je lisais à l’instant les chiffres qui viennent d’être livrés par la Fédération nationale des travaux publics : la baisse de l’activité du fait de l’effondrement de la commande publique pourrait conduire à une perte de l’ordre de 16 000 emplois. Il est bien évident que les communes qui risquent de voir leurs capacités d’autofinancement se réduire, voire devenir négatives, du fait de leur contribution au FPIC, ne pourront que renoncer à investir !
Il faut donc faire très attention aux effets induits par la baisse des dotations et par une montée en puissance trop brutale de la péréquation que le FPIC est censé réaliser ! Nous risquons d’avoir des conséquences dramatiques, y compris sur l’investissement.
La solution apportée par le sous-amendement qui vient d’être retiré aurait consisté à s’en tenir au niveau de 2014. La position de la commission des finances a consisté à trouver une solution de compromis, à laquelle je me rallie. Je regrette presque que le sous-amendement ait été retiré, mais la proposition retenue par la commission est inspirée par la prudence ; en tout cas, elle est plus que raisonnable. Du reste, les explications de M. le secrétaire d'État m’ont encore plus convaincu qu’il fallait voter l’amendement de la commission : lui-même a reconnu qu’il y avait là un vrai problème et qu’un rapport allait traiter de ces questions.
La prudence absolue consisterait à geler la situation en attendant le résultat de ce travail et du rapport qui sera rendu pour bien mesurer les effets d’une montée en puissance de la péréquation. Donc, en attendant les conclusions du rapport, restons très circonspects quant à la montée en puissance du FPIC. C’est la raison pour laquelle il faut, a minima, voter l’amendement de la commission, qui vise non pas à tuer la péréquation ni à la ralentir, mais à freiner légèrement le rythme de sa progression, afin d’éviter des effets trop brutaux qui pourraient avoir des conséquences dramatiques sur l’investissement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Je précise tout d’abord que je suis favorable à la péréquation en tant que telle.
Cela étant, il faut regarder aussi les résultats de ce que nous avons voté et se rappeler le contexte dans lequel nous l’avons voté. Quand François Marc nous dit que la décision de créer le FPIC a été la conséquence de la réforme de la taxe professionnelle, je ne peux pas être d’accord avec lui. Les deux étaient concomitantes, mais la création du FPIC ne découlait pas directement de la réforme : cela faisait longtemps que l’on parlait de créer un mécanisme de péréquation. Cela s’est fait au même moment, mais ce n’était pas une résultante.
Il reste que ce que nous avons créé est une machine infernale qui écrase les communes et les intercommunalités moyennes. On en voit les effets venir au fil du temps avec la progression de l’enveloppe consacrée au FPIC.
À l’époque, je m’en souviens très bien, lorsque nous avions décidé que pouvaient être prélevées les intercommunalités et les communes isolées dont le potentiel financier était à 0,80 de la moyenne, on nous avait répondu qu’il ne fallait pas s’inquiéter, que c’était un double mécanisme, que l’on pouvait être prélevé d’un côté et bénéficiaire de l’autre. Cela a été fait sans véritable simulation et, quelques années après, on constate que les intercommunalités ou les communes isolées qui sont encore en dessous de la moyenne sont toujours contributrices nettes.
C’est le système tel qu’il a été créé qui n’est pas satisfaisant. Ce n’est pas l’idée de péréquation. Cette idée, je la soutiens
Entre la DSU et le FSRIF en Île-de-France – je le dis peut-être pour la quinzième fois dans cet hémicycle ! –, on arrive à des résultats complètement aberrants : vous pouvez bénéficier de la DSU, être contributeur au FPIC pour trois ou quatre fois le montant et être neutre en ce qui concerne le FSRIF. Cela suffit à démontrer que ce que nous avons mis en place est peut-être bon dans son principe, mais que les règles de prélèvement et de redistribution ne sont pas bonnes.
Quand, de surcroît, les communes ou les intercommunalités les plus riches sont écrêtées, à enveloppe constante, le poids redescend sur celles qui sont en dessous. On écrase donc les communes et intercommunalités moyennes. Voilà le résultat que l’on obtient !
Combiné à la chute de la DGF, avec l’ampleur que nous lui connaissons maintenant, cela devient insoutenable pour nombre de ces collectivités. La conséquence est exposée dans le rapport qui a été rendu au nom de la délégation aux collectivités territoriales : dans trois ans, les deux tiers des communes de plus de 10 000 habitants seront dans une situation financière calamiteuse.
Voilà le résultat de ce que nous avons fait !
Donc, monsieur le secrétaire d'État, j’appelle de mes vœux cette grande réforme de la DGF et de la péréquation. Peut-être parviendrons-nous enfin à mettre en place un système bien plus équitable que celui que nous avons aujourd’hui.
M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Nous partageons tous, sur toutes les travées, l’idée que les systèmes tant de péréquation que de répartition de la baisse des dotations ne sont pas parfaits.
M. Philippe Dallier. C’est sûr !
M. Claude Raynal. Je pense que, en la matière, on pourrait avancer dans les années qui viennent.
Pour ce qui est de la question qui nous est posée, même si j’ai eu un doute, j’ai bien entendu notre collègue Delahaye nous dire que la péréquation se faisait déjà puisque, dans la baisse des dotations de l’État, finalement, ce sont les communes les plus riches qui perdent le plus.
M. Francis Delattre. Elles sont écrêtées !
M. Claude Raynal. Des débats qui se sont tenus entre les collectivités, en particulier dans toutes les associations d’élus, sur les moyens de répartir la baisse des dotations de l’État, il est résulté très clairement qu’on se servirait, pour faire de la péréquation, non pas de la baisse des dotations de l’État, mais des recettes réelles de fonctionnement…
M. Philippe Dallier. C’est bien de la péréquation !
M. Claude Raynal. … et que, parallèlement, le FPIC procéderait à cette opération de péréquation.
M. Philippe Dallier. Ah !
M. Claude Raynal. Je voudrais insister sur un point important : contrairement à ce qui a été dit, la DGF pèse beaucoup plus sur les communes pauvres, car elle représente une part prépondérante du budget de celles-ci, alors que ce n’est pas du tout le cas pour les communes riches.
De ce point de vue, je vous encourage à rester dans la logique que l’on a toujours retenue avec les communes : d’un côté, la perte des dotations de l’État liée aux recettes réelles de fonctionnement, et, de l’autre, le maintien du FPIC. C’est sur cet ensemble qu’il nous faut rester unis.
M. le président. La parole est à M. Éric Doligé, pour explication de vote.
M. Éric Doligé. Monsieur Marc, vous avez dit qu’il faudrait faire un effort pour arriver à 1 milliard d’euros sur trois ou quatre ans. Or, je vous le rappelle, on nous a annoncé d’un seul coup un prélèvement global de 11 milliards d’euros. Par conséquent, les conditions ont effectivement changé ! Nous rencontrons maintenant quelques difficultés pour faire face à ce prélèvement réparti sur toutes les collectivités, à l’abondement du FPIC, à la péréquation des DMTO, etc.
Par ailleurs, on a essayé d’instaurer un dispositif à peu près équilibré – en tout cas, c’est ce l’on pensait à l’époque – et, finalement, on a mis en place des mécanismes de compensation tels que certains peuvent contribuer d’un côté et recevoir d’un autre. Dans les collectivités, on n’y comprend plus rien !
Par exemple, on vous annonce que vous recevrez une dotation, puis quelques semaines après, que vous allez au contraire participer aux dotations globales. Il peut même arriver – c’est le cas des DMTO – qu’on vous prélève plus que ce que vous allez recevoir, avec des dotations ou des prélèvements forfaitaires. .
Pour ma part, j’estime qu’il faut essayer de remettre les choses à plat et contenir la progression de ces prélèvements, afin de limiter les risques financiers pour un certain nombre de collectivités qui ne vont plus être en mesure de financer leur budget pour 2015. Nous sommes en train de travailler sur la préparation de nos budgets et nous avons les plus grandes difficultés !
Je me rallierai à la proposition de la commission des finances. Il faut bien considérer que les conditions d’aujourd’hui ne sont pas les mêmes que celles d’autrefois. Soyons clairs : les budgets étaient plus faciles à établir voilà trois ans !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Charles Guené, rapporteur spécial.
M. Charles Guené, rapporteur spécial. Comme l’a dit M. le rapporteur général, la sagesse consiste à s’en tenir à l’amendement n° II-64. Si chacun fait part de ce qui n’est en réalité qu’un ressenti, nous n’en sortirons pas. Attendons un rapport circonstancié sur chacun des éléments, car les deux prélèvements dont nous parlons s’effectuent dans deux cadres différents.
L’amendement n° II-208 rectifié est intellectuellement sympathique, mais je voudrais vous mettre en garde, mes chers collègues : le FPIC est un dispositif dont on a dit qu’il fallait absolument le revoir, mais il faut éviter de le « pincer » au niveau à la fois du prélèvement et de la redistribution. En effet, la moyenne qui détermine le seuil entre contribution et prélèvement repose à l’heure actuelle, vous le savez, sur des éléments souvent obsolètes, telles les valeurs locatives. Dès qu’on se rapproche de la moyenne, on marche sur des œufs ! Il faut qu’on y prenne garde. D’ailleurs, lorsqu’il s’agira du reversement, la commission adoptera la même attitude.
En pinçant ce système, on aboutirait, à la limite, à ce que très peu versent à très peu ! En l’espèce, si l’on remonte le niveau à partir duquel le prélèvement s’opère, sachant que la somme prélevée sera toujours la même et que le nombre de contributeurs sera bien inférieur, ceux-ci risquent d’avoir une surprise assez désagréable. Je ne suis pas certain que ceux qui auraient la tentation de soutenir ce type d’amendement seraient franchement séduits par le résultat final...
Il vaut donc mieux attendre des éléments sérieux et ne pas chercher d’emblée à casser un système, aussi critiquable soit-il, car on ne sait pas vraiment ce qu’il en résulterait.
Donc, encore une fois, la proposition de M. Boulard, reprise de celle de M. Nègre, est très intéressante, mais il conviendra de l’étudier de près dans le cadre des travaux que nous mènerons après que nous aurons eu connaissance du rapport qui doit être élaboré sur le sujet.