M. le président. La parole est à M. Cyril Pellevat.
M. Cyril Pellevat. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, madame Bouchart, mes chers collègues, je suis heureux d’avoir l’occasion d’expliquer devant vous les raisons qui me poussent à défendre cette proposition de loi.
Le principe de l’inviolabilité du domicile est le prolongement de la liberté individuelle, qui constitue l’un des principes fondamentaux du droit français. Il est garanti par la Constitution et figure explicitement dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 comme l’un des quatre droits naturels et imprescriptibles de l’homme.
Or, aujourd’hui, il est toujours plus facile d’occuper illégalement un domicile que de mettre un terme à une occupation illégale. En tant qu’élus, nous connaissons tous ces situations difficiles pour les propriétaires victimes de ces infractions.
Ce texte n’est pas problématique, comme certains se plaisent à le dire, en évoquant par exemple, à tort, la trêve hivernale, qui ne s’applique pas pour les logements squattés : il vise simplement à préciser l’infraction de violation de domicile et non pas à mettre en place une nouvelle procédure d’expulsion des squatteurs dérogatoire du droit commun.
C’est donc bien la sagesse de cette proposition de loi, telle que rédigée par la commission, qui m’engage.
J’en veux pour preuve la suppression de l’article 2, qui facilitait la procédure d’expulsion par voie de décision administrative en permettant au maire, lorsqu’il ne réussissait pas à contacter le propriétaire ou le locataire du logement occupé illégalement, de demander au préfet de mettre l’occupant en demeure de quitter les lieux.
Si cette écriture pouvait attribuer un droit nouveau au maire, il est vrai qu’elle engageait, une fois encore, la responsabilité des édiles, déjà bien mise à l’épreuve, et je parle en connaissance de cause. Cette disposition a donc été écartée, avec sagesse.
J’évoquerai ensuite, et tout simplement, la clarté et la précision qu’apporte l’article 1er de cette proposition de loi à la rédaction de l’article 226-4 du code pénal. Cette rédaction permet en effet de lever toute ambiguïté concernant la nature continue de l’infraction de violation de domicile. Ainsi, les forces de l’ordre peuvent intervenir au titre du flagrant délit tout au long du maintien dans les lieux, quelle qu’en soit sa durée.
La rédaction proposée aujourd’hui distingue deux phases de l’infraction de violation de domicile : l’introduction dans le domicile d’autrui et le fait d’y rester.
Si l’introduction dans le domicile d’autrui, pour être sanctionnée, doit se faire à l’aide de « manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte », en revanche, le maintien dans le domicile à la suite de l’introduction illégale serait sanctionné en tant que tel, sans qu’il soit nécessaire que ce maintien soit le fait de nouvelles « manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte ».
Cette proposition de loi, si elle est adoptée, permettra, tout simplement, de donner des moyens d’action plus précis aux propriétaires confrontés à ces situations.
Je voterai donc ce texte empreint de sagesse et de bon sens, et je vous encourage à faire de même. (Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. André Vallini, secrétaire d'État. La discussion générale a été intéressante, car elle a montré que les points de vue n’étaient pas si éloignés. Même à la gauche de l’hémicycle, on convient qu’il y a bien un vrai problème juridique.
Certes, le problème est avant tout social, du fait du manque de logements, et la seule réponse pénale au problème que pose Mme Bouchart ne saurait être considérée comme suffisante.
Nous allons maintenant passer à la discussion des articles et des amendements ; il me semble qu’un consensus peut être trouvé sur ce texte amendé par la commission.
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi tendant à préciser l’infraction de violation de domicile
Article 1er
L’article 226-4 du code pénal est ainsi modifié :
1° Les mots : « ou le maintien » sont supprimés ;
2° Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le maintien dans le domicile d’autrui à la suite de l’introduction visée au premier alinéa, hors les cas où la loi le permet, est puni des mêmes peines. »
M. le président. L'amendement n° 2 rectifié quater, présenté par Mme Bouchart, M. Duvernois, Mme Duchêne, M. J. Gautier, Mme Procaccia, MM. Gilles et Buffet, Mme Deroche et MM. Carle, Cambon et J.P. Fournier, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 226-4 du code pénal est ainsi rédigé :
« Art. 226-4. – L’introduction dans le domicile d’autrui ou dans un immeuble d’habitation, ou qui le devient de fait, à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
« Le maintien dans le domicile d’autrui ou dans un immeuble d’habitation, ou qui le devient de fait, à la suite de l’introduction visée au premier alinéa, hors les cas où la loi le permet, est puni des mêmes peines. »
La parole est à Mme Natacha Bouchart.
Mme Natacha Bouchart. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, je présenterai en même temps les trois amendements que j’ai déposés sur le texte de la commission.
La commission des lois est connue pour sa grande sagesse, mais il y a la réalité du terrain, et elle s’impose à nous.
Je comprends bien les positions des uns et des autres, et, contrairement à certains, je ne verserai pas dans l’agressivité, car je sais trop ce que c’est, pour les populations, de subir au quotidien le phénomène des squats.
Même si, je le sais, ces amendements ne peuvent pas être votés en l’état aujourd’hui, je sais qu’un jour on ouvrira les yeux et on aura le courage, qui nous manque aujourd’hui, de faire face collectivement à ces situations réelles en reprenant les idées que je défends ici.
Je regrette aussi le procès instruit par certains contre les maires, dans l’exercice de leurs fonctions. On refuse de leur donner certaines responsabilités, alors qu’ils montrent au quotidien qu’ils sont capables d’en assumer beaucoup. Pour ma part, j’ai le sentiment de représenter les maires non seulement de mon département, mais également de toute la France, et je suis très fière, en leur nom, ou au moins au nom d’une grande majorité d’entre eux, de maintenir ces amendements ; leur adoption faciliterait bien la vie de nos édiles, notamment en ce qui concerne leurs relations avec le préfet, qu’il n’est pas bon de prendre pour cible en permanence, comme certains l’ont fait une bonne partie de l’après-midi.
J’en viens plus précisément à la présentation de mes amendements.
L’amendement n° 2 rectifié quater est tout à fait dans l’esprit de la proposition de loi. Nous avons évoqué, dans la discussion générale, l’élargissement du dispositif au-delà du seul domicile. Il est vrai que le domicile est le cœur de la vie privée, mais l’occupation illicite de logements ou d’immeubles vacants, comme des hangars ou des usines désaffectés, risque de devenir un problème aigu si le dispositif législatif visant à lutter contre la violation de domicile est renforcé sans prendre en compte ces autres types de locaux.
L’amendement n° 3 rectifié quater ans a pour objet de prévoir que, dans le cadre de ses pouvoirs de police, lorsqu’il aura connaissance de l’occupation du domicile de l’un de ses administrés ou de l’occupation d’un immeuble d’habitation, ou qui le devient de fait, le maire pourra, après avoir cherché par tous les moyens à contacter le propriétaire ou le locataire du logement occupé, demander au préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux.
Enfin, l’amendement n° 1 rectifié quater, qui tend à modifier l’intitulé de la proposition de loi, est la conséquence de l’amendement n° 2 rectifié quater.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 2 rectifié quater ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. L’amendement n °2 rectifié quater tend effectivement à étendre aux immeubles vacants le régime prévu à l’article 226-4 du code pénal pour le domicile.
À cet égard, je ne peux que reprendre les explications qui ont été données en commission.
Sur le fond, je comprends tout à fait la position de notre collègue. À la limite, on pourrait même souhaiter que cet article couvre l’ensemble du champ des bâtiments susceptibles de faire l’objet de telles intrusions.
En fait, la difficulté résulte purement et simplement de l’application du droit. Comme on l’a vu, il n’y a aucune difficulté sur le plan civil, l’interprétation faite par la Chancellerie dans sa circulaire étant parfaitement claire à cet égard. En revanche, force est de constater qu’une difficulté d’application est apparue à la suite du vote de la loi DALO, qui, dans son article 38, a créé un régime dérogatoire en passant de la compétence du juge judiciaire à celle du préfet, qui est une autorité administrative.
Or nous voyons bien que cet article 38 trouve son fondement dans les dispositions de l’article 226-4 du code pénal, lequel trouve lui-même son fondement dans la jurisprudence et la doctrine civile pour ce qui est de l’interprétation de la notion de « domicile ».
Face à cette forme d’emboîtement, si vous me permettez l’expression, ma chère collègue, soit nous en restons à une interprétation stricte, et nous aurons le bonheur de voir les préfets obligés d’appliquer le dispositif que nous nous apprêtons à adopter, alors que, aujourd’hui, ils se replient sur cette règle prétorienne des quarante-huit heures, soit nous étendons l’ensemble du dispositif, au risque de le fragiliser.
C’est la raison pour laquelle, tout en comprenant votre position au fond, je ne peux qu’en rester à la position exprimée par la commission en demandant le rejet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d'État. Le présent amendement aurait pour conséquence, s’il était adopté, de dénaturer complètement la violation de domicile. Ce délit vise en effet, comme son nom l’indique, à protéger non la propriété, mais le domicile des individus, en tant qu’élément assurant, plus largement, la protection de leur vie privée.
Il figure du reste dans le livre II du code pénal, lequel réprime les atteintes à la personne, et non dans le livre III, qui sanctionne les atteintes aux biens. Plus précisément, il se trouve dans le chapitre VI de ce livre II, qui a pour objet de punir les atteintes à la personnalité, avec, par exemple, les délits d’atteinte à la vie privée ou de violation du secret des correspondances.
Il n’apparaît donc ni souhaitable ni cohérent d’étendre l’incrimination à l’occupation d’immeubles d’habitation qui ne seraient pas considérés comme des « domiciles », ou, à plus forte raison, de hangars ou d’usines désaffectés.
Il convient, en outre, de relever que la notion « d’immeuble d’habitation le devenant de fait » est particulièrement imprécise. Il en résulte que le texte proposé apparaît contraire au principe constitutionnel de légalité des délits, qui exige, vous le savez, une prévisibilité suffisante de la loi pénale.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Natacha Bouchart, pour explication de vote.
Mme Natacha Bouchart. Monsieur le président, je vais retirer cet amendement, ainsi que les suivants, non sans avoir souligné la qualité du travail réalisé en commun.
Je retiens la proposition, faite par Mme Procaccia, de rappeler à l’administration que le délai de quarante-huit heures est définitivement nul et non avenu.
J’aurais souhaité, il est vrai, aller plus loin, c’est-à-dire étendre le dispositif au-delà du seul domicile. J’avais également à cœur de préciser le rôle du maire, qui est important. Cependant, je dois admettre que je suis satisfaite de cette avancée, fruit du dialogue avec les uns et les autres.
Je retire donc l’amendement n° 2 rectifié quater.
M. le président. L’amendement n °2 rectifié quater est retiré.
La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote sur l’article.
Mme Samia Ghali. Je suis satisfaite du retrait de l’amendement. Mme Bouchart a bien compris que le texte de la commission visait le squat d’un logement, lequel n’est pas de même nature que le squat d’un lieu ouvert.
Vous avez déclaré bien connaître la situation, chère collègue, mais, croyez-moi, je vis ces questions au quotidien dans le territoire où je suis élue.
À mon sens, les problèmes sont surtout dus à l’application de la loi par les préfets, qui, malheureusement, même quand la justice demande des expulsions, font traîner les procédures en longueur, sous le prétexte d’enquêtes sociales, qui n’ont en fait jamais lieu, alors qu’elles seraient très utiles. Cette attitude contribue à cristalliser les tensions dans les quartiers, dans les villes, ce qui n’est bon ni pour les uns ni pour les autres.
En revanche, j’y reviens, le squat d’un logement et le squat d’une usine délaissée ne sont quand même pas du même ordre. Aussi, le retrait de l’amendement me satisfait et je voterai l’article ainsi rédigé.
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié quater, présenté par Mme Bouchart, M. Duvernois, Mme Duchêne, M. J. Gautier, Mme Procaccia, MM. Gilles et Buffet, Mme Deroche et MM. Carle, Cambon et J.P. Fournier, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le premier alinéa de l’article 38 de la loi n° 2007-290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre de ses pouvoirs de police, lorsque le maire a connaissance de l’occupation du domicile d’un de ses administrés ou de l’occupation d’un immeuble d’habitation, ou qui le devient de fait, dans les conditions déterminées au premier alinéa, il peut, après avoir cherché par tous moyens à contacter le propriétaire ou le locataire du logement occupé, demander au préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux. »
La parole est à Mme Natacha Bouchart.
Mme Natacha Bouchart. Je considère que cet amendement a été défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Je ferai trois observations, les deux premières reprenant les motifs qui ont incité la commission à supprimer l’article 2 et la troisième venant renforcer les arguments que j’ai développés pour demander à notre collègue de retirer l’amendement n° 2 rectifié quater.
Tout d’abord, ma chère collègue, vous proposez de confier au maire la possibilité de saisir le préfet au titre de l’article 38 de la loi DALO. Or, nous le savons très bien, dans le type de situation qui a été évoqué cet après-midi, les relations entre le maire et le préfet sont telles que l’on peut considérer que le préfet est déjà saisi sur interpellation du maire et qu’il n’est pas nécessaire de consacrer une disposition spéciale à cette saisine.
Ensuite, en voulant faire ce « cadeau » au maire, vous lui conférez certes un droit, mais vous lui faites surtout courir un risque. En effet, vous autorisez le maire à se substituer à un propriétaire qui n’a pas exprimé sa position, puisque c’est la raison même pour laquelle on accorde cette possibilité au maire. Imaginez les mises en cause auxquelles vous exposez le maire, en termes de responsabilité, soit parce qu’il aura agi, soit parce qu’il n’aura pas agi. Or nous pouvons considérer que, dans l’état actuel du droit, rien n’empêche le maire d’interpeller le préfet pour mettre en œuvre l’article 38 de la loi DALO.
Enfin, beaucoup plus grave, ma dernière observation a trait à l’extension de ce droit de saisine du maire non seulement aux domiciles et aux logements, mais aussi aux immeubles vacants. Sur ce point, je tiens à souligner les risques d’inconstitutionnalité que nous ferions courir au dispositif de l’article 38 de la loi DALO, qui nous paraît déjà relativement fragile.
Lors de la réunion de la commission, nous avons évoqué le fait que des dispositions très proches de celles dont nous discutons aujourd’hui ont déjà été censurées par le Conseil constitutionnel. Je suis convaincu que, si le Conseil constitutionnel était saisi aujourd’hui des dispositions de l’article 38 de la loi du 5 mars 2007 dans sa rédaction actuelle, nous pourrions déjà nous interroger ; mais si nous modifiions l’article 38 dans le sens souhaité par l’auteur de l’amendement, il ne fait pas de doute que nous nous exposerions à une censure !
Nous pensons donc que le droit actuel, malgré ses limites, présente un réel avantage en raison de la possibilité déjà ouverte par la loi DALO, raison pour laquelle je demande à l’auteur de cet amendement de bien vouloir le retirer, pour ne pas fragiliser davantage cette disposition.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. André Vallini, secrétaire d’État. Je souscris à l’ensemble des arguments que vient de développer M. le rapporteur et je n’ajouterai que deux observations.
En premier lieu, les conditions d’application des dispositions que vous proposez, madame la sénatrice, sont extrêmement floues. Votre proposition de loi ne détermine pas précisément les preuves que le maire devra fournir au préfet pour justifier sa demande.
En second lieu, il existe un risque d’atteinte aux droits de l’occupant légitime, dès lors que le maire aurait la possibilité de saisir le préfet sans l’accord du propriétaire ou du locataire.
Pour l’ensemble de ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour explication de vote.
Mme Catherine Procaccia. Je tenais à remercier M. le rapporteur de ses explications juridiques, parce que nous n’appartenons pas tous à la commission des lois et que nous n’avons pas tous nécessairement les compétences de ses membres !
Si j’ai cosigné cet amendement, c’est parce que le maire est la personne vers laquelle on se tourne le plus rapidement. Imaginez des personnes âgées qui trouvent leur logement squatté en rentrant chez elles – un cas s’est encore produit récemment dans le Val-de-Marne ; à qui s’adressent-elles sinon à leur maire, faute de savoir quoi faire ? Dans ces conditions, permettre au maire de saisir le préfet ne me paraissait pas choquant.
Certes, le maire peut déjà aider les personnes concernées en leur indiquant qu’elles ont la possibilité de saisir le préfet dans le cadre de l’article 38 de la loi DALO, mais il me paraissait important de lui permettre de le faire lui-même, sans qu’il en ait l’obligation.
Dans un certain nombre de communes, il n’est pas rare de voir des personnes âgées partir plusieurs mois, ne serait-ce que pour séjourner chez leurs enfants. L’occupant peut donc ne pas être informé du fait que son logement est squatté et, même si l’on organise une veille entre voisins, on ne peut pas toujours savoir qui entre chez les uns ou chez les autres. Le maire est donc l’autorité la plus proche et la plus en mesure d’intervenir.
Cet amendement me paraissait donc aller dans le bon sens, mais M. le rapporteur nous a expliqué en quoi il était mal rédigé. Quoi qu’il en soit, il me semble que l’on ne peut pas balayer complètement l’idée que le maire doive jouer un rôle d’appui pour obtenir l’expulsion de squatteurs. Dans le cadre de l’article 38 de la loi DALO, c’est au propriétaire ou au locataire qu’il appartient de saisir le préfet. Or j’ai pu me rendre compte, au cours des derniers mois, que ces personnes ignorent le plus souvent que cette possibilité leur est ouverte.
M. le président. Madame Bouchart, l’amendement n° 3 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Natacha Bouchart. Compte tenu des explications qui ont été données et pour ne pas fragiliser davantage le dispositif, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 3 rectifié quater est retiré.
L’article 2 demeure donc supprimé.
Intitulé de la proposition de loi
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié quater, présenté par Mme Bouchart, M. Duvernois, Mme Duchêne, M. J. Gautier, Mme Procaccia, MM. Gilles et Buffet, Mme Deroche et MM. Carle, Cambon et J.P. Fournier, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet intitulé :
Proposition de loi visant à lutter contre la violation de domicile et l’occupation illicite d’immeubles d’habitation
La parole est à Mme Natacha Bouchart.
Mme Natacha Bouchart. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Dans la suite logique des explications données sur les deux premiers amendements, je tiens à insister sur le fait que cette proposition de loi vise bien à préciser les modalités d’exécution du droit existant et non à changer ce dernier.
La commission souhaite donc que cet amendement soit retiré.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Madame Bouchart, l’amendement n° 1 rectifié quater est-il maintenu ?
Mme Natacha Bouchart. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.
M. Jean-Yves Leconte. Je tiens à saluer l’esprit qui a présidé à nos échanges. Mon intervention en discussion générale était très juridique, peut-être trop, parce que l’interprétation de la flagrance, telle qu’elle résulte de la circulaire de la Chancellerie, était relativement complexe.
Le texte de la proposition de loi, après les travaux de la commission et la discussion en séance publique, ne vise plus que la violation de domicile, dont il fait un délit continu. De ce fait, même si j’ai annoncé précédemment que le groupe socialiste s’abstiendrait, je sens qu’un certain nombre de mes collègues souhaiteraient pouvoir le voter en l’état.
J’ajoute cependant que mon intervention soulignait quelques fragilités qui, si cette proposition de loi devait prospérer, mériteraient malgré tout d’être étudiées dans la suite de la procédure parlementaire.
En tout état de cause, dans la mesure où cette proposition de loi se concentre sur la violation de domicile, délit qui mérite d’être combattu – sur ce point, j’ai indiqué que la loi ALUR avait peut-être fragilisé le dispositif que Mme Procaccia avait introduit avec l’article 38 de la loi DALO –, je crois pouvoir dire qu’un certain nombre de collègues du groupe socialiste voteront en sa faveur. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Samia Ghali, pour explication de vote.
Mme Samia Ghali. Je suis heureuse de pouvoir voter cette proposition de loi, puisque Mme Bouchart a accepté de retirer tous ses amendements, ce qui a contribué à éclaircir la situation.
Sur tous nos territoires, la situation vécue par ceux qui subissent des squats est bien douloureuse et les maires se trouvent démunis quand ils essaient de les aider. J’ai vu des élus de tous bords politiques qui, confrontés à cette situation, essayaient de trouver des solutions, parfois pour éviter des débordements.
Comme je l’ai dit, il serait sage que nous puissions avoir un débat plus large sur ce type de question. D’une part, les attentes des demandeurs de logements, qui sont sincères et vivent une vraie souffrance, ne peuvent pas trouver de réponse avec la loi DALO – c’est un leurre ! Or il faut que nous puissions agir en leur faveur. D’autre part, nous avons affaire à des squatteurs souvent organisés pour utiliser les faiblesses du droit français, et je rejoins en partie ce qu’a dit Mme Estrosi Sassone à cet égard.
Je le répète, les préfets ont une grande responsabilité dans l’application de la loi. J’insiste sur ce point, monsieur le secrétaire d’État. Certains ont évoqué le risque que cette proposition de loi n’alourdisse la responsabilité des maires, et ce n’est évidemment pas le but, mais il convient de rappeler aux préfets qu’il leur appartient de faire respecter la loi.
Je suis donc heureuse de pouvoir voter ce texte avec vous, mes chers collègues. (M. Jean-Pierre Sueur applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Ce texte nous satisfait, puisque les deux amendements introduits par M. le rapporteur en commission répondaient tout à fait à notre attente. Par ailleurs, Mme Bouchart a accepté de retirer ses amendements en séance publique et le texte adopté par la commission sera donc soumis à notre vote sans modification.
Mais ne cédons pas à la tentation du manichéisme. Dans la société où nous vivons, il faut faire preuve d’une grande prudence : il n’y a pas toujours les bons d’un côté et les mauvais, de l’autre, et nous savons que les problèmes qui nous occupent aujourd’hui sont très délicats à résoudre.
Le groupe du RDSE votera donc cette proposition de loi. Ce faisant, nous répondons à l’appel d’un maire, ce qui est de la mission du Sénat, représentant des collectivités territoriales, en particulier des communes.
M. Jean-Louis Carrère. Bravo !
M. Jacques Gautier. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. André Vallini, secrétaire d’État. Je souhaite indiquer à Mmes Bouchart et Procaccia que je transmettrai leurs suggestions et leurs demandes à mes collègues ministres de l’intérieur et de la justice, afin qu’ils donnent des instructions aux préfets, pour l’un, aux parquets, pour l’autre.
J’avais indiqué à la tribune que le Gouvernement s’en remettait à la sagesse de votre assemblée. Après avoir entendu Jean-Yves Leconte et Samia Ghali, je constate une fois de plus que la sagesse est vraiment très grande dans cet hémicycle ; par conséquent, le Gouvernement ne peut que se sentir conforté dans sa volonté de la laisser s’exprimer.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble de la proposition de loi visant à faciliter l’expulsion des squatteurs de domicile.
(La proposition de loi est adoptée.)