Mme Laurence Cohen. Par cet amendement, nous proposons d’instaurer un permis de mise en copropriété, afin de renforcer les garanties offertes aux locataires lors des procédures de congé pour vente.
Afin de parer aux faux débats, précisons qu’il s’agit en l’espèce de porter atteinte non pas au droit de propriété, mais au droit de spéculer abusivement.
La vente à la découpe est une atteinte aux droits des locataires et constitue un véritable détournement de la loi de 1989. Les dispositifs actuels ne protègent pas les locataires des agissements des marchands de biens. En sus, les légères avancées qui interviennent parfois sont remises en cause dans les six mois qui suivent.
Or les marchands de biens piétinent le droit au logement des locataires, contraints d’acheter leur appartement ou de le quitter, grossissant ainsi les rangs des demandeurs de logements et étant bien souvent rejetés extra-muros.
L’article 25 remettant en cause la protection des locataires en cas de vente à la découpe, il nous a semblé opportun de déposer le présent amendement. Rappelons-le, l’idée qui le sous-tend était partagée par l’ensemble de la gauche il n’y a pas si longtemps !
M. Pierre-Yves Collombat. Mais les choses évoluent, il faut se moderniser !
Mme Laurence Cohen. Délivré par le maire ou par le président de l’EPCI, le permis de mise en copropriété serait exigé pour toute opération de division par lots d’un immeuble d’au moins cinq logements.
Il est donc question d’agir sur les causes de l’inflation immobilière, c’est-à-dire la spéculation, et non uniquement sur son effet : la baisse du pouvoir d’achat. N’est-il pas, en effet, de la responsabilité publique d'éviter les dérèglements du marché du logement ?
Les élus locaux doivent pouvoir maintenir la vocation locative des logements et s’opposer éventuellement aux ventes par lots.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Contrairement à ce que vous affirmez, ma chère collègue, le dispositif que vous proposez semble bien porter atteinte au droit de propriété – il s’appliquerait à tout le territoire. Or, une telle atteinte n’est pas justifiée par des motifs d’intérêt général.
En outre, il s’ajoute à des mécanismes existants depuis la loi ALUR qui soumettent à autorisation préalable les travaux conduisant à la création de plusieurs logements dans un immeuble, afin de vérifier que les conditions minimales d’habitabilité sont respectées.
Ce permis de mise en copropriété, qui constitue un mécanisme supplémentaire en matière de conformité des lots divisés à des normes minimales d’habitabilité, paraît donc superfétatoire.
Il semble également attentatoire au droit de propriété de subordonner la délivrance de ce permis de diviser au respect des objectifs de mixité sociale définis dans le programme local de l’habitat.
La commission spéciale a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’article 175 de la loi ALUR prévoyait d’engager une réflexion sur ce sujet, de manière que nous disposions de pistes susceptibles de nous permettre de régler ces questions.
Afin de laisser le temps à cette réflexion d’aboutir, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. L'amendement n° 1385, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Le dernier alinéa de l’article 1115 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« L’exonération des droits et taxes de mutation n’est pas applicable aux reventes consistant en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l’article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation ou celui prévu à l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986. »
La parole est à M. Thierry Foucaud.
M. Thierry Foucaud. Cet amendement tend à revenir sur un avantage fiscal plus qu’anormal, notamment en période de tension sur le marché du logement.
Comme vous le savez, mes chers collègues, les opérations de vente à la découpe sont effectuées non plus par des bailleurs, mais par des investisseurs. Elles correspondent non pas à une réalité économique, mais à des impératifs financiers. Depuis plus de dix ans, les membres de mon groupe alertent sur les risques inhérents à ce genre d’opérations. Et nous n’avons pas toujours été seuls à le faire dans cet hémicycle !
Les ventes à la découpe témoignent incontestablement de la financiarisation du marché du logement. Or la question du logement est trop grave pour que nous tolérions une telle dérive.
En outre, ces opérations emportent une autre conséquence immédiate : le transfert des habitants modestes vers la périphérie des grandes villes. Loin de favoriser la mixité sociale, elles provoquent une véritable déstabilisation.
L’article 1115 du code général des impôts prévoit que, sous condition de réalisation des ventes dans un délai de deux ans à compter de l’acquisition d’un bien, les marchands de biens bénéficient d’une exonération de droits de mutation.
Aujourd’hui comme hier, nous souhaitons revenir sur cette mesure discutable, sinon scandaleuse, singulièrement en période de difficultés pour les finances publiques.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Vous proposez de remettre en cause le régime fiscal prévu à l’article 1115 du code général des impôts. Une telle mesure pourrait entraîner des effets pervers et entraver des opérations de rénovation. C’est la raison pour laquelle la commission spéciale y est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Dans l’objectif de limiter les effets d’une imposition en cascade, le législateur a prévu une exonération des droits et taxes sur les mutations d’immeubles s’inscrivant dans une activité commerciale d’achat en vue de la revente destinée à faciliter l’ajustement des marchés foncier et immobilier.
Afin d’éviter la rétention foncière, ce régime de faveur est enserré dans une durée maximale de revente fixée à cinq ans et réduite à deux ans dans le cas de reventes par lots déclenchant le droit de préemption du locataire, dites « ventes à la découpe ».
Monsieur le sénateur, votre proposition visant à ne plus appliquer cette exonération au profit de ces ventes aurait pour effet de renforcer la rétention foncière des immeubles initialement taxés et freinerait la rénovation des logements et leur remise rapide sur le marché. En outre, elle renchérirait le prix d’acquisition de l’immeuble, et donc sans doute le prix de vente proposé aux locataires dans le cadre du droit de préemption.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement vous suggère de retirer cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Foucaud, l'amendement n° 1385 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Oui, madame la présidente.
Madame la secrétaire d’État, vous savez que ces ventes à la découpe constituent un scandale. Le groupe politique, dont la tendance est la même que la vôtre d’ailleurs, comme nous et nos amis écologistes, est depuis longtemps intervenu dans cet hémicycle sur ce sujet.
Ces opérations de financiarisation ne profitent pas au logement social, ni même au logement intermédiaire, dont il était question cet après-midi.
Les résidents sont forcés de fuir vers la périphérie selon des logiques strictement liées à l’argent – le rapport va passer de cent à cinq cents – et non pour des raisons liées au logement, en particulier social. Je souhaite donc que vous votiez en faveur de cet amendement, mes chers collègues.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 25, modifié.
(L'article 25 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 25
Mme la présidente. L'amendement n° 1386, présenté par Mme Assassi, M. Le Scouarnec et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 101 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion est abrogé.
La parole est à M. Patrick Abate.
M. Patrick Abate. Le présent amendement vise à supprimer l’article 101 de loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion. Avec cet article, qui est relatif au statut de résident temporaire, on a vraiment affaire au must de la déréglementation : c'est l’UberPOP des relations entre les propriétaires ou gestionnaires de biens et les locataires !
Le statut de résident temporaire prévoit un contrat locatif d’exception renouvelable tous les trois mois, ainsi que la possibilité d’expulser l’occupant, y compris pendant la trêve hivernale, sans relogement, et l’obligation pour ce dernier de surveiller des locaux vacants tout en payant un loyer pouvant tout de même atteindre 200 euros.
Il faut se remémorer l’historique de ce statut. C'est une entreprise d’origine néerlandaise nommée Camelot qui a lancé au départ cette drôle de relation contractuelle. Une recherche menée sur un moteur internet bien connu relative à la façon d’éviter de payer des impôts en utilisant l’article 101 de la loi de 2009 nous conduit, tout de suite après le site de Légifrance, sur le site de Camelot. Je vous invite à vérifier par vous-même, mes chers collègues ! Je devais être l’un des rares à ne pas connaître ce site, mais on est vraiment, je le répète, dans l’UberPOP du logement.
Le locataire est précaire ; il risque sa vie, puisqu’il est censé surveiller une résidence. Les personnes intéressées, qui, au cours de leurs pérégrinations, tombent par hasard sur un logement vacant, comme un château, sont même encouragées à le signaler sur UberPOP… pardon ! sur Camelot et à se porter volontaire pour le surveiller.
Bien évidemment, il s’agit d’une forme de travail dissimulé, organisé au détriment d’entreprises, comme les sociétés de gardiennage, qui, elles, payent leurs impôts et appliquent le droit du travail ; elles sont ainsi soumises à une concurrence déloyale.
Le statut de résident temporaire crée une insécurité juridique majeure. Je vous invite à lire les conditions ce type de contrat : il faut être non-fumeur, français ou, au moins, originaire d’un pays de l’Union européenne, en bonne santé, certificat médical à l’appui… Toutes ces conditions dérogent de manière extraordinaire au droit du travail. Ce contrat va donc à l’encontre de nos grands principes.
Compte tenu de ces éléments, je ne serais pas étonné, mes chers collègues, que vous votiez à l’unanimité en faveur de cet amendement visant à l’abrogation de ce statut tout à fait moyenâgeux. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. Monsieur Abate, je suis, pour ma part, étonnée que vous puissiez proposer d’abroger un dispositif permettant à la fois d’éviter toute occupation sauvage de locaux inoccupés et de répondre à une demande de logement. Celle-ci est certes temporaire, mais, vous le savez, elle existe bel et bien, compte tenu des difficultés d’accès au logement et des évolutions sociétales que constituent la mobilité et la décohabitation.
Ce mécanisme, instauré dans un premier temps de manière expérimentale, a été prolongé jusqu’en 2018 par la loi ALUR. Il fait l’objet de contrôles a posteriori effectués par les services de l’État. Encadré comme il l’est et testé à titre expérimental, il me semble aller dans un sens plutôt positif.
Pour toutes ces raisons, la commission spéciale émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. L’avis est également défavorable. Ce dispositif avait été institué à titre expérimental. Compte tenu de son bilan globalement positif, le Gouvernement estime nécessaire de le renouveler pour cinq années supplémentaires, jusqu’au 31 décembre 2018.
Mme la présidente. La parole est à M. Patrick Abate, pour explication de vote.
M. Patrick Abate. Dont acte ! Effectivement, ce dispositif a été prorogé à titre expérimental dans le cadre de la loi ALUR et un bilan biannuel doit être établi.
Je ne remets pas en cause le caractère positif de la mesure, mais de quoi parle-t-on ? S’il s’agit du caractère positif du gardiennage pour certaines habitations vacantes exposées à des situations d’insécurité, comme les squats, je n’en doute pas.
Néanmoins, madame la corapporteur, ce type de dispositif ne peut, en aucune manière, être une réponse aux problèmes de logement que nous connaissons. Il s’agit d’un « service » qui est rendu dans le cadre d’un pseudo-contrat de travail. Je me demande bien ce qu’il y a de positif là-dedans…
Mme la présidente. Les amendements identiques nos 418, 589, 593 et 600 ne sont pas soutenus.
Je suis saisie de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1457 rectifié, présenté par M. Delattre, Mme Imbert, MM. Carle, Laufoaulu, Vasselle, Mouiller, J. Gautier, Portelli, D. Laurent, Bouchet, Milon et Calvet, Mme Mélot, MM. G. Bailly, Pierre, Mandelli et Laménie, Mme Gruny, MM. Houel et Perrin, Mme Primas et MM. P. Leroy, Leleux, Cardoux et Trillard, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le V de l’article 156 bis du code général des impôts est ainsi rédigé :
« V. – Le bénéfice des dispositions de l’article 156 propres aux immeubles classés ou inscrits au titre des monuments historiques, ou ayant reçu le label délivré par la Fondation du patrimoine en application de l’article L. 143-2 du code du patrimoine, n’est pas ouvert aux immeubles ayant fait l’objet d’une division à compter du 1er janvier 2009 sauf si :
« 1° Cette division fait l’objet d’un agrément délivré par le ministre chargé du budget, après avis du ministre chargé de la culture, lorsque l’immeuble a fait l’objet d’un arrêté de classement, en tout ou en partie, au titre des monuments historiques, d’une inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, ou de la délivrance du label de la Fondation du patrimoine en application de l’article L. 143-2 du code du patrimoine, au moins douze mois avant la demande d’agrément ;
« 2° Le bénéfice est affecté, dans les deux ans qui suivent la demande d’agrément mentionnée au 1° du présent article, à l’habitation pour au moins 75 % de ses surfaces habitables portées à la connaissance de l’administration fiscale.
« Les immeubles ou fractions d’immeubles destinés à une exploitation à caractère commercial ou professionnel ne sont pas considérés comme affectés à l’habitation. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Mouiller.
M. Philippe Mouiller. La réforme de 2009 avait assaini le régime fiscal des monuments historiques et posé les bases d’un équilibre vertueux : droit de regard des administrations de la culture et du budget contre le maintien d’un avantage dérogatoire.
L’article 90 de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 a modifié ce dispositif de soutien aux immeubles classés et inscrits au titre des monuments historiques. L’objectif affiché par le Gouvernement était de modifier le régime d’incitation fiscale relatif aux monuments historiques, afin de recentrer le bénéfice de la déduction des déficits sur le revenu global sur des projets immobiliers clairement identifiables et principalement orientés vers la réhabilitation ou la construction de logements.
La mesure adoptée a eu des effets désastreux, puisque, en dépit de l’absence de toute étude d’impact et de débat étayé, deux tiers des monuments historiques en copropriété ont été exclus du bénéfice fiscal de ce régime. Ainsi, l’ensemble des immeubles inscrits à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques, de même que ceux qui dépendent de la Fondation du patrimoine, ne peuvent désormais plus prétendre à l’agrément ministériel autorisant leur division.
Dans ce contexte, les abus invoqués ne sauraient raisonnablement être imputés à l’administration, souveraine en la matière.
L’amendement n° 1457 rectifié tend à rétablir la possibilité de diviser les immeubles inscrits et labellisés, dans le cadre de projets destinés à la réhabilitation ou la création de logements, sous contrôle de l’agrément ministériel.
L’État, les collectivités locales ou les établissements publics sont les premiers propriétaires de ces immeubles. Au regard du contexte actuel, il convient de faciliter ces cessions. Sinon, faute de pouvoir vendre ces biens dans le cadre de projets facilitant la création de logements, et donc la mise en copropriété, ces acteurs en subiraient pour toujours les charges sans en retirer une quelconque utilité en contrepartie.
Mme la présidente. L'amendement n° 968 rectifié, présenté par MM. Guené, Baroin, Milon, Calvet, Commeinhes, B. Fournier, Leleux et Legendre, Mmes Des Esgaulx et Deseyne, MM. Trillard, Danesi et de Legge, Mme Deromedi, MM. Bignon et Lefèvre, Mme Lamure et MM. De Montgolfier, Pierre, Béchu, J.C. Leroy, Doligé, Sido, Paul, Charon, Vasselle, Longuet, Laménie, César et de Nicolaÿ, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La première phrase du V de l’article 156 bis du code général des impôts est ainsi modifiée :
a) Après les mots : « arrêté de classement », sont insérés les mots : « ou d’une inscription » ;
b) Après les mots : « monuments historiques », sont insérés les mots : « ou de la délivrance du label de la Fondation du patrimoine en application de l’article L. 143-2 du code du patrimoine, ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Charles Guené.
M. Charles Guené. Cet amendement, cosigné par plusieurs de mes collègues, est presque identique à celui qui vient d’être présenté ; aussi, j’insisterai sur l’intérêt du dispositif proposé davantage que sur son mécanisme.
En réalité, les dispositions que comporte cet amendement auraient mérité de figurer dès l’origine dans le présent projet de loi. Elles intéressent grandement les collectivités locales, car elles pourraient être génératrices d’investissements et de création de logements.
Comme cela vient d’être expliqué, la seconde loi de finances rectificative pour 2014 a bouleversé la réforme de 2009, qui avait établi un équilibre assez consensuel entre les parties s’agissant des bâtiments des monuments historiques.
L’exclusion du bénéfice fiscal a bouleversé totalement l’équilibre économique du système, particulièrement les opérations dépendant de la Fondation du patrimoine et concernant les anciennes casernes, les gares, les hospices, bref tous les bâtiments qui permettent aux collectivités locales de créer du logement, alors que les petites opérations, pourtant très peu créatrices de logements, ont été préservées.
Le système mis en place, loin de produire des économies, dégrade en réalité la situation budgétaire à la fois de l’État et des collectivités locales.
Je ne m’étendrai pas davantage sur ce sujet. Néanmoins, je me réserve la possibilité d’intervenir en explication de vote si jamais je n’avais pas été assez convaincant, notamment auprès de Mme la secrétaire d'État.
Mme la présidente. L'amendement n° 419 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 1457 rectifié et 968 rectifié ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur. La commission spéciale est favorable à l’amendement n° 968 rectifié, qui vise à réintégrer dans le champ de la dépense fiscale les copropriétés de monuments inscrits et labellisés. La réintégration des monuments historiques inscrits et des immeubles labellisés par la Fondation du patrimoine constituera en effet un signal positif pour le secteur du bâtiment et permettra de mener à terme des projets d’intérêt public dans nos territoires.
Je demande donc aux auteurs de l’amendement n° 1457 rectifié de bien vouloir le retirer au profit de l’amendement n° 968 rectifié, dont la rédaction me paraît plus aboutie.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Carole Delga, secrétaire d'État. Messieurs les sénateurs, vous proposez, par vos amendements, de revenir sur les aménagements apportés par la seconde loi de finances rectificative pour 2014 au régime fiscal des monuments historiques. Je ne suis pas favorable à ces propositions.
Comme vous le savez, la réforme de la fin de l’année dernière a eu pour objet de clarifier et de rendre objectifs les critères d’octroi de l’agrément. Elle a ainsi permis d’offrir une meilleure visibilité sur l’éligibilité des projets de division de monuments historiques à l’aide fiscale sous le régime de l’agrément. En effet, la réalisation de la majorité des projets de réhabilitation d’immeubles protégés était compromise par l’impossibilité pour les promoteurs de justifier des précédentes conditions de l’agrément relatif à l’intérêt patrimonial du monument et à l’importance des charges relatives à son entretien.
Par ailleurs, le second objectif de cette réforme était de réorienter, en concertation avec le ministère de la culture, ce dispositif fiscal sur les bâtiments classés au titre des monuments historiques, dont la préservation a paru la plus souhaitable pour le patrimoine culturel national.
De plus, la réhabilitation de ces bâtiments classés s’avère très coûteuse pour leur propriétaire, à savoir les collectivités locales. Des mesures transitoires ont été prévues dans le cadre de la réforme susvisée, afin de sauvegarder l’aide publique aux projets suffisamment aboutis pour faire l’objet d’une demande d’agrément.
Je souligne que, pour les années 2013-2014, moins de 20 projets par an ont donné lieu à une demande d’agrément, sur les 46 000 immeubles protégés en France. Nous sommes donc loin du bouleversement qui a pu être évoqué.
J’observe, enfin, que votre position irait au-delà d’un simple rétablissement du dispositif antérieur et de l’objectif visé par ce dernier, puisque les immeubles inscrits au titre des monuments historiques ou bénéficiant du label de la Fondation du patrimoine seraient agréés sous la seule condition d’une affectation au logement, quel que soit le montant des charges d’entretien.
Telles sont les raisons pour lesquelles je vous suggère de retirer vos amendements ; à défaut, j’y serai défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Mouiller, acceptez-vous de retirer l'amendement n° 1457 rectifié au profit de l'amendement n° 968 rectifié ?
M. Philippe Mouiller. Oui, madame la présidente. J’ai bien noté que l’amendement de M. Guené était mieux rédigé ! (Sourires.)
Mme la présidente. L'amendement n° 1457 rectifié est retiré.
Monsieur Guené, l’amendement n° 968 rectifié est-il maintenu ?
M. Charles Guené. Oui, madame la présidente, car je ne suis pas convaincu par les arguments de Mme la secrétaire d'État, ce dont elle doit se douter.
Cela étant, je tiens à remercier mon collègue d’avoir bien voulu se rallier à cet amendement.
Quoi qu’il en soit, il y a là un intérêt financier, y compris pour l’État. Il ressort de l’étude que nous avons effectuée que les bâtiments en cause restent une charge à la fois pour l’État et pour les collectivités locales et que le dispositif modifié ne permet pas de les rediviser et de les réaffecter.
Vous avez certes indiqué, madame la secrétaire d’État, que relativement peu de bâtiments ont été concernés jusqu’à présent, mais la modification du régime a tout de même fortement perturbé les collectivités. Quoi qu’il en soit, l’investissement qui pourrait être effectué en l’espèce permettra à la fois de développer, naturellement, la construction, de réaliser l’encaissement sur les ventes, d’éviter des frais d’entretien souvent fastidieux et de bénéficier de recettes de taxe foncière et de taxe d’habitation.
À mes yeux, dans la période actuelle, caractérisée par de fortes contraintes pesant sur les collectivités locales, nous serions bien inspirés, mes chers collègues, de voter en faveur de cet amendement.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 25.
L'amendement n° 133 rectifié bis, présenté par MM. de Montgolfier, Revet, Husson et Perrin, Mme Deseyne, MM. Saugey, de Nicolaÿ, Longuet, Pierre, Paul, Karoutchi, Calvet, Raison et Commeinhes, Mme Des Esgaulx, M. César, Mme Lopez, MM. Leleux et Legendre, Mmes Deromedi, Micouleau, Gruny et Duchêne, MM. Doligé, Mandelli et Bignon, Mme Imbert, MM. B. Fournier, Lefèvre, Darnaud, Morisset, Genest, Charon et Milon, Mme Lamure, MM. Gremillet, Laménie, Grand, Houpert et Grosdidier et Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Après l’article 25
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I.- L’article 244 quater C du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Le crédit d’impôt prévu au I est applicable aux propriétaires de monuments historiques classés ou inscrits relevant du régime fiscal prévu au 3° du I et au 1°ter du II de l’article 156. »
II.- Les dispositions du I ne s'appliquent qu'aux sommes venant en déduction de l'impôt dû.
III - La perte de recettes résultant pour l'État des I et II est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Charles Revet.
M. Charles Revet. Le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE, est un dispositif mis en place à la fin de l’année 2012 qui a pour finalité de faire baisser le coût de la masse salariale, afin que les entreprises puissent financer l’amélioration de leur compétitivité et réinvestir dans de nouveaux projets.
Les propriétaires gestionnaires de monuments historiques qui détiennent 50% du patrimoine national protégé sont des acteurs de premier ordre de la filière du tourisme, parce qu’ils participent activement à l’attractivité des territoires par le développement d’offres culturelles et de services innovants.
Filière économique, sociale et dynamique, les monuments historiques concourent de manière significative à la croissance.
Du fait de leur mission de service public de conservation et de mise en valeur du patrimoine national, les propriétaires amenés à embaucher du personnel qualifié doivent pouvoir bénéficier de ce crédit d’impôt, afin de développer l’emploi, bien que n’étant pas des entreprises.