M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, réformer le dialogue social s’impose aujourd’hui comme une absolue nécessité. Vous l’avez dit, monsieur le ministre : « Le renforcement du dialogue social en entreprise répond à une exigence démocratique, mais aussi à une exigence d’efficacité économique. Un dialogue social efficace, c’est un climat social qui favorise l’engagement et une motivation plus forte des salariés. Et c’est aussi une entreprise plus compétitive. »
Le dialogue social est en effet l’un des leviers de la performance de nos entreprises, et ce plus encore dans un contexte de crise économique extrêmement violent.
Depuis trois ans, le Gouvernement privilégie le dialogue social comme méthode de travail, ce dont nous devons bien évidemment nous réjouir.
Si nous voulons que la France surmonte cette crise sociale et économique, insupportable pour bon nombre de Français, nous devons nous engager dans la voie d’un dialogue apaisé et faire confiance aux partenaires sociaux, selon les vœux du Président de la République, qui avait déclaré : « Le temps de la négociation n’est pas un temps perdu. C’est un temps gagné sur les malentendus, sur l’immobilisme, sur les conflits. » En témoignent les trois grandes conférences sociales et les cinq accords nationaux interprofessionnels signés depuis 2012.
Certes, les partenaires sociaux n’ont pas, cette fois-ci, trouvé de compromis ; cependant, quatre mois de négociations ont mis en exergue la nécessité d’une réforme. Vous avez rencontré les représentants des organisations syndicales et patronales, et ce texte résulte d’un équilibre trouvé avec les partenaires sociaux.
Cette réforme – je le répète – est indispensable. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, que les formes actuelles du dialogue social sont issues des lois Auroux, adoptées il y a plus de trente ans Si ces lois ont permis, pour reprendre les propos de Jean Auroux, que l’entreprise ne soit plus « le lieu du bruit des machines et du silence des hommes », notre économie et nos entreprises ont changé et le dialogue social doit effectivement évoluer.
Ce texte constitue une avancée. La création des commissions paritaires régionales permettra aux 4,6 millions de salariés des très petites entreprises d’être enfin représentés. C’est une très bonne chose, même si je doute que les délégués puissent exercer leurs missions dans des conditions satisfaisantes avec seulement cinq heures de délégation par mois. Mais c’est un bon début !
La mise en place d’institutions représentatives du personnel mieux adaptées mènera à plus d’efficacité. Reconnaissons que les règles applicables en la matière, élaborées par stratification au fil des années, sont nombreuses et complexes. La délégation unique du personnel, la possible fusion des instances de représentation ou encore la clarification de leurs compétences vont dans le bon sens, tout comme la baisse du nombre de consultations et de négociations obligatoires.
Je me réjouis également des dispositions relatives au compte personnel de prévention de la pénibilité. Il était important de simplifier ce dispositif, dont l’application entraîne un certain nombre de difficultés pour les entreprises. Il représente un progrès social majeur pour les salariés exposés à des travaux pénibles et qui arrivent à l’âge de la retraite dans des conditions physiques dégradées.
S’agissant de l’emploi, il faut saluer la création du compte personnel d’activité, celle du contrat de professionnalisation « nouvelle chance » et, surtout, la mise en place de la prime d’activité, destinée à renforcer le pouvoir d’achat des travailleurs aux revenus modestes.
Le député Christophe Sirugue l’a démontré dans son rapport, la prime pour l’emploi est trop faible, mal ciblée et versée trop tardivement. Le RSA activité, quant à lui, est une véritable usine à gaz : seul un tiers des bénéficiaires potentiels le demande ! Enfin, la coexistence de ces deux dispositifs est un facteur de complexité ; leur fusion en une prime d’activité unique nous semble donc être une bonne chose. Trop de travailleurs restent, malgré leur activité, en deçà du seuil de pauvreté, ce qui n’est pas acceptable.
Je terminerai mon propos en évoquant le régime des intermittents du spectacle, sujet que la commission de la culture connaît bien et sur lequel nous avions beaucoup travaillé en 2013, sous l’égide de notre collègue Maryvonne Blondin.
L’article 20 du présent projet de loi vise à pérenniser ce régime en inscrivant dans le code du travail le principe de l’existence de règles spécifiques d’indemnisation du chômage des salariés intermittents du spectacle. À chaque renégociation de l’assurance chômage, les artistes et les techniciens du spectacle redoutent que les annexes VIII et X ne soient remises en cause. Aussi, je souscris pleinement à cette avancée sociale pour les centaines de milliers de salariés du spectacle vivant qui, je le rappelle, participent largement au rayonnement de la culture française.
Mais nous aurons aussi l’occasion d’évoquer la modernisation du dialogue social au sein même de nos assemblées parlementaires, autour du statut de nos collaborateurs.
Vous l’aurez compris, la position que les membres de mon groupe et moi-même adopterons sur l’ensemble du texte dépendra, bien évidemment, des débats que nous aurons toute la semaine dans cet hémicycle. (Applaudissements sur les travées du RDSE et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.
M. Jean-Marc Gabouty. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi a certes une portée limitée au regard de l’ensemble du domaine qu’il pourrait couvrir ; il contient néanmoins quelques dispositions importantes.
Le texte initial du Gouvernement, monsieur le ministre, aurait pu constituer une base sérieuse de discussion ; il a malheureusement été rigidifié et complexifié lors de son examen à l’Assemblée nationale. C’est la raison pour laquelle la commission des affaires sociales du Sénat a introduit un certain nombre d’améliorations et d’assouplissements.
Il me paraît indispensable, pour l’examen de ce texte, de conserver comme fil conducteur le souci de simplification et de flexibilité nécessaire au bon fonctionnement des entreprises, en particulier des PME et des TPE.
La responsabilisation des partenaires sociaux passe aussi par l’acceptation d’objectifs de simplicité et de performance.
Parmi les grands sujets abordés, la simplification du dialogue social, la création d’un compte personnel d’activité, le renforcement de la médecine du travail, la simplification du compte pénibilité et la création d’une prime d’activité peuvent permettre, sans doute, de progresser vers des dispositifs largement consensuels dans les domaines de l’amélioration du fonctionnement des entreprises et de la prise en compte des intérêts des salariés.
Ainsi, la création de la prime d’activité, qui vise à fusionner deux aides existantes, le RSA et la prime pour l’emploi, nous semble une orientation intéressante ; il faudra toutefois surmonter quelques difficultés de mise en œuvre, comme la référence aux revenus réels et la bonne coordination des intervenants, mais aussi assurer la stabilisation de l’enveloppe financière, fixée à 4,1 milliards d’euros.
Les simplifications apportées au compte pénibilité et aux instances de représentation du personnel des établissements de plus de cinquante salariés répondent, quant à elles, à l’allégement des contraintes et à la modernisation que nous avions fortement encouragés.
Les modifications envisagées quant à la gestion du « 1 % logement » me laissent plus sceptique. En effet, même si une gestion centralisée, sous prétexte de mutualisation et d’un meilleur contrôle, semble avoir l’aval des partenaires sociaux, ce dispositif ne suscitera pas nécessairement plus d’efficacité et de réactivité au regard des besoins des territoires. L’expérience passée de la Foncière logement, lancée il y a une quinzaine d’années, n’est pas un modèle probant en termes de production adaptée de logements sociaux.
Le sujet qui génère parmi nos collègues le plus d’inquiétude, voire d’opposition, est la création, prévue à l’article 1er, de commissions régionales interprofessionnelles, ou CPRI, pour les entreprises de moins de onze salariés.
Elles ne détenaient dans le texte gouvernemental qu’un vague rôle d’information et de proposition ; cependant, l’Assemblée nationale a élargi leurs prérogatives, leur a offert un rôle de médiation, voire de négociation, et a donné à leurs membres la possibilité d’intervenir dans les entreprises.
La commission des affaires sociales du Sénat est partiellement revenue au texte initial et a soumis la possibilité de création de ces instances à des accords de branche nationaux. Sur ce modèle, il existe d’ailleurs déjà des commissions interprofessionnelles régionales dans les secteurs de l’artisanat et de l’agriculture.
M. Jean-Marc Gabouty. Fût-elle issue d’une bonne intention, l’institution de ces commissions perpétue un mal bien français, présent dans presque chaque projet de loi : la création constante de nouvelles structures administratives – haute autorité, haut comité, commission ceci ou cela – dénuées de tout rôle opérationnel, ce qui en fait de vrais comités Théodule !
Les missions que l’on voudrait donner à ces commissions régionales doivent plutôt être directement assurées par les branches professionnelles. Celles-ci ont en effet la possibilité de créer des instances régionales de ce type pour tout ce qui concerne les négociations collectives, l’organisation du travail ou la formation continue.
Les autres fonctions à caractère promotionnel de ces nouvelles commissions, notamment la mise en valeur des métiers, peuvent aussi relever des compagnies consulaires.
Ainsi, beaucoup de dirigeants et de salariés de ces établissements de moins de onze salariés jugent ces CPRI inutiles, voire déconnectées des réalités du travail au quotidien. Il s’agit en quelque sorte d’un dialogue social fictif. On peut assez raisonnablement estimer que, dans des entreprises de cette taille, le dialogue social doit s’instaurer directement entre le chef d’entreprise et les salariés : dans la grande majorité des cas, ils se côtoient et ont des échanges quotidiens.
Enfin, quel paradoxe que d’assurer – c’est en théorie l’objectif de ce dispositif -, une meilleure représentation du personnel pour les TPE de moins de onze salariés que pour celles de onze à vingt-cinq salariés, dont un quart seulement ont des délégués du personnel !
C’est la raison pour laquelle certains membres de notre groupe et de la majorité sénatoriale ont déposé un amendement de suppression de l’article 1er.
On pourrait aussi s’interroger sur certaines mesures – vous n’en êtes pas responsable, monsieur le ministre – telles que la possibilité pour un salarié de refuser de faire valoir ses droits à la retraite jusqu’à l’âge de soixante-dix ans, alors qu’il dispose déjà de tous ses droits pour percevoir une retraite à taux plein. Encore une fois, quel paradoxe au vu de la situation actuelle de l’emploi et, surtout, vis-à-vis des nouvelles générations !
À l’heure où l’on attend encore des résultats tangibles du choc de compétitivité, même si nous avons quelques espoirs en la matière, il est important, monsieur le ministre, d’envoyer des signes encourageants aux acteurs économiques, en particulier à ceux qui travaillent dans les PME et les TPE, et de leur apporter certaines garanties de simplicité et de stabilité qu’il est peut-être encore possible de renforcer dans ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme la rapporteur applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Patricia Schillinger.
Mme Patricia Schillinger. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le texte présenté aujourd’hui s’inscrit dans la continuité des actions du Gouvernement en faveur du dialogue social. Le Gouvernement n’a cessé, ces trois dernières années, d’accorder une place centrale au dialogue social dans l’élaboration et la mise en œuvre de ses politiques en matière d’emploi, de travail et de formation professionnelle.
Ces trente dernières années, le processus constant de mondialisation dans lequel notre économie est engagée a placé ses acteurs en situation de concurrence accrue et les encourage à rechercher une rentabilité des capitaux à court terme.
Comme nous l’avions souligné, avec mon collègue Joël Bourdin, dans notre rapport sur le pacte social, ce libéralisme a engendré une plus grande flexibilité du travail, et a ainsi profondément bouleversé le pacte social dans l’entreprise. Bien souvent, les jeunes et les seniors sont les premiers à subir les mécanismes du marché. Un véritable malaise s’est installé progressivement dans l’entreprise : d’un côté, les inégalités salariales qui se creusent ; de l’autre, les salaires stagnent.
Cette situation est liée au développement d’emplois atypiques, à la persistance du chômage, à l’effet des restructurations du tissu d’entreprises et à l’envolée des plus hautes rémunérations salariales.
Dans le même temps, en France, trop peu de salariés adhèrent à un syndicat ; ils sont donc peu représentés.
Face à ce constat, le Gouvernement, dès sa prise de fonctions, s’est attaché à mettre en œuvre les mesures de nature à favoriser le marché du travail, avec la loi relative à la sécurisation de l’emploi, qui comprend, par exemple, le compte personnel de formation, les droits rechargeables pour les demandeurs d’emploi et la modulation des cotisations patronales selon les contrats, ainsi que la loi relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. Il a également pris des mesures concernant la lutte contre la concurrence sociale déloyale, ainsi que plusieurs dispositions relatives aux conseils de prud’hommes et à l’inspection du travail. Par ailleurs, il a créé le pacte de responsabilité et de solidarité.
Le projet de loi actuellement en discussion s’inscrit dans la continuité des précédentes mesures en ce qu’il apporte un renouveau dans le dialogue social. Il vise, en effet, à accorder de nouveaux droits aux salariés et à leurs représentants, à simplifier le dialogue social, à le rendre plus efficace et, surtout, à valoriser le travail ; on ne peut que s’en féliciter.
En outre, le Gouvernement considère que le dialogue social dans l’entreprise peut être réformé dans une logique gagnant-gagnant. Moderniser le dialogue social, c’est, ne l’oublions pas, permettre à l’entreprise de réaliser de meilleures performances.
Le projet de loi comporte donc un certain nombre d’avancées, notamment pour les 4,6 millions de salariés des TPE, auxquels il offre – enfin ! – une représentation au travers des commissions paritaires régionales. Celles-ci permettront d’encadrer le dialogue social dans toutes les entreprises, même les plus petites, de le rendre effectif, plus clair et, globalement, responsable. Lors de la discussion de ce texte, nous défendrons des amendements visant à rétablir l’obligation de créer ces commissions, et non de les rendre facultatives.
Une commission régionale interprofessionnelle, composée de dix salariés et de dix employeurs de TPE, sera instaurée dans chacune des treize futures grandes régions et outre-mer. Ces commissions pourront donner des conseils aux salariés et aux employeurs en matière de droit du travail et auront également des fonctions d’information et de concertation en matière d’emploi et de formation. Elles n’auront évidemment aucun droit d’ingérence dans la marche des entreprises, mais permettront aux salariés de très petites entreprises de bénéficier, eux aussi, d’une forme de représentation.
Cette disposition suscite des inquiétudes auprès de certains employeurs, au motif que des personnes étrangères pourraient accéder à l’entreprise. Aussi, je souhaite rappeler que les membres de ces commissions n’auront accès à l’entreprise que sur autorisation de l’employeur : le dernier mot revient donc bel et bien à ce dernier.
Ce texte reconnaît l’engagement des syndicalistes et de tous les élus.
Les taux de syndicalisation relevés par l’OCDE pour les années 2012 et 2013 sont très révélateurs : plus de 50 % en Belgique et dans les pays du Nord, 37 % en Italie, 18 % en Allemagne et en Espagne contre, malheureusement, 7,5 % en France, soit à peine plus qu’en Estonie…
Pour lutter contre la crise des vocations syndicales, laquelle est, comme vous le savez, préjudiciable au dialogue social, il est donc prévu de valoriser les parcours professionnels des élus et des délégués syndicaux dans les entreprises, en élargissant les heures de délégation, mesure dont on ne peut que se féliciter.
Le dialogue social sera également plus paritaire : la parité hommes-femmes est renforcée, ainsi que le respect des obligations des entreprises en matière d’égalité professionnelle, mais ma collègue Anne Emery-Dumas développera plus longuement ce point.
Je salue l’avancée réalisée par nos collègues de l’Assemblée nationale quant à la présence des salariés dans les conseils d’administration. En effet, en supprimant la condition de la mise en place du comité d’entreprise pour les entreprises de plus de cinquante salariés, le dispositif relatif aux administrateurs sera réellement effectif, car ceux-ci pourront être présents dans les holdings employant moins de cinquante salariés, qui sont souvent le haut lieu des décisions.
En ce qui concerne la participation des administrateurs salariés, certains d’entre nous proposeront de revenir sur le seuil retenu par l’Assemblée nationale, c’est-à-dire mille employés, contre cinq mille.
Autre avancée de ce texte, un minimum de vingt heures de formation par an est prévu pour les administrateurs salariés.
De plus, ce projet de loi permet de rendre le dialogue social plus efficace. Les dix-sept obligations en matière d’information et de consultation du comité d’entreprise seront désormais regroupées en trois grands rendez-vous, qui porteront sur la situation économique et sociale de l’entreprise, ainsi que sur les orientations stratégiques.
Ce projet de loi prévoit aussi d’adapter les règles de la représentation au nombre de salariés de l’entreprise. Ainsi, la délégation unique du personnel, qui permet déjà de regrouper les délégués du personnel et le comité d’entreprise dans les entreprises comprenant entre cinquante et deux cents salariés, sera élargie aux entreprises comptant moins de trois salariés et englobera le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT. Il s’agit bien d’un regroupement et non d’une fusion : chaque institution conserve l’ensemble de ses attributions. Ainsi, le CHSCT garde la personnalité morale et aura toujours la capacité d’ester en justice.
Autre avancée concernant la santé au travail et la pénibilité, je citerai la suppression de la transmission, chaque année, à compter de 2020, de la fiche individuelle de pénibilité à la Caisse nationale d’assurance vieillesse, la CNAV. Cette fiche sera transformée en une fiche d’exposition : des référentiels de branche seront négociés et élaborés par poste de travail et par métier. C’est la Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail, la CARSAT, qui comptabilisera les droits.
Je tiens également à saluer le vote de l’Assemblée nationale concernant la reconnaissance du burn-out. La commission des affaires sociales ayant supprimé cette reconnaissance, nous proposerons un amendement tendant à préserver la possibilité de reconnaître certaines pathologies psychiques comme maladies professionnelles.
Une autre grande avancée de ce texte tient également à la création d’une prime d’activité à compter du 1er janvier 2016, afin d’encourager l’activité et le retour à l’emploi. Ce sont 5,6 millions de personnes, dont 1,2 million de jeunes, qui seront éligibles à cette prime. Cette nouvelle prime cible les travailleurs dont le revenu est compris entre 900 et 1 300 euros par mois. Un suivi de l’impact de cette mesure est également prévu. Ainsi, la nouvelle prime, qui est ouverte aux jeunes et dont l’accès sera plus simple, sera versée chaque mois. Ceux qui travaillent, mais qui ne gagnent pas assez pour vivre correctement, pourront alors assumer les charges nouvelles entraînées par une reprise d’activité.
La mesure concernant le compte personnel d’activité scellera l’avènement de la sécurité sociale professionnelle réclamée par les syndicats depuis trente ans. Ce compte d’activité regroupera tous les droits reconnus au salarié, c’est-à-dire les comptes formation, pénibilité, épargne-temps, ainsi que le suivi tout au long de la carrière professionnelle.
Pour en finir avec les crises successives relatives au statut des intermittents du spectacle, le Gouvernement reconnaît la légitimité du caractère exceptionnel de l’intermittence et créer un nouveau mode de négociation des règles en matière d’assurance chômage, de manière à prévenir, au travers du dialogue social, la survenance de nouvelles crises.
Pour lutter contre le chômage de longue durée, le Gouvernement met en place le contrat « nouvelle chance ». Ce nouvel outil, mieux adapté aux demandeurs d’emploi peu qualifiés, constituera une passerelle pour le retour à l’emploi, après une formation de vingt-quatre mois maximum.
En matière de dialogue social, j’ajouterai l’importance d’une formation pour les managers. Monsieur le ministre, il faut insister sur le dialogue et la confiance. Il convient de mettre du dialogue social là où il n’y en a pas, et, pour ce faire, les directions des ressources humaines doivent avoir une vision stratégique du dialogue social. Il faut accompagner les managers et les salariés en leur donnant des informations, des explications pour une bonne compréhension des objectifs et de la stratégie d’entreprise, en somme, pour un rêve partagé. C’est essentiel.
Par ailleurs, nous devons aussi, au Sénat et à l’Assemblée nationale, promouvoir le dialogue social pour faire avancer la situation des collaborateurs des parlementaires. Ceux-ci n’ont toujours pas de convention collective, alors que le dialogue social permet principalement d’édicter des conventions collectives. En tant qu’employeur, il est crucial d’organiser notre représentation collective. Monsieur le ministre, vous connaissez très bien cette question, et il nous faudra bien un jour avancer en la matière.
Pour conclure, ce texte constitue un véritable progrès social : il garantit la représentation de tous les salariés ; il vise à soutenir l’activité des travailleurs modestes, avec la création de la prime d’activité ; il tend à favoriser le retour à l’emploi et poursuit l’effort engagé pour sécuriser les parcours professionnels des travailleurs, qu’ils aient un emploi ou qu’ils soient en recherche d’emploi.
Notre pays doit se moderniser en matière de dialogue social.
Le dialogue social n’est pas un frein à la compétitivité, et simplification ne signifie pas recul des droits des salariés.
Contrairement à ce que l’on constate chez nos voisins européens, en Allemagne ou dans les pays d’Europe du Nord, le dialogue social et la participation des salariés aux instances de décision sont souvent perçus par les employeurs français comme des contraintes, et non pas comme une plus-value. Nous devons donner un nouvel élan aux relations avec les partenaires sociaux. Cette démarche est d’autant plus pertinente que la Commission européenne a récemment annoncé qu’elle souhaitait, au lendemain de la crise, redonner une impulsion aux relations avec les partenaires sociaux. Ces relations sont déterminantes dans la mise en place d’une nouvelle gouvernance économique.
Ce projet de loi a, je le sais, suscité des inquiétudes dans les TPE et les PME. Mais, je le répète, ce qui prime dans ce texte, c’est la volonté du Gouvernement de favoriser l’activité et l’emploi dans les entreprises. Les mesures permettant de faciliter l’embauche du premier salarié, d’assouplir l’utilisation des contrats de travail, de lever les inquiétudes liées au recours aux prud’hommes, de lutter contre la fraude et d’encourager à franchir les seuils, sont autant de dispositions en faveur des entreprises et de l’emploi.
Jamais auparavant on n’avait vu un gouvernement s’engager si fortement en ce domaine. Alors, oui, ce texte marque véritablement un progrès ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Aline Archimbaud.
Mme Aline Archimbaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviendrai sur le début du projet de loi, laissant mon collègue Jean Desessard s’exprimer sur la suite du texte.
Alors que nous connaissons une situation économique et sociale très difficile, le texte dont nous débattons aujourd’hui nous semble fondamental, car il définit les cadres de la démocratie en entreprise, du dialogue entre salariés et employeurs, garant de la qualité de vie au travail et de la bonne santé de tous, y compris des entreprises.
Ce dialogue doit pouvoir concerner tous les salariés. À cet égard, nous saluons la création des commissions paritaires régionales interprofessionnelles, qui, bien que dotées de modestes moyens, permettront à 4,6 millions de travailleurs de pouvoir être représentés. Nous nous félicitons également des articles visant à sécuriser les parcours syndicaux et, plus généralement, à développer la démocratie sociale.
Nous sommes, en revanche, bien plus réservés, pour deux raisons au moins, sur les modalités de création des délégations uniques du personnel, les DUP : les comités d’entreprise, les délégués du personnel et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail vont être rapprochés, pour ne pas dire fusionnés.
Mme Aline Archimbaud. Tout d’abord, il nous semble paradoxal de permettre la création des DUP sur la seule volonté de l’employeur dans les entreprises de moins de trois cents salariés et de la conditionner à un accord d’entreprise dans celles de plus de trois cents salariés. Pourquoi prévoir la possibilité d’une décision unilatérale, alors que nous parlons de favoriser le dialogue social ? Comment peut-on confier une mission de dialogue et de concertation à une instance qui serait créée sans dialogue ni concertation ?
Dans toutes les entreprises, salariés et employeurs doivent pouvoir se mettre d’accord sur le fonctionnement de l’instance représentative. Nous souhaitons donc que la création de cette DUP dépende d’un accord d’entreprise, quel que soit le nombre de salariés.
Ensuite, la dilution des capacités d’action du CHSCT nous inquiète. Cette instance nous semble pourtant indispensable ; ces dernières années, les exemples de son utilité n’ont pas manqué dans tous les secteurs d’activité comme l’hôtellerie, l’industrie ou encore le service public. Qu’il s’agisse de conditions de travail trop difficiles, qui entraînent, notamment, des troubles musculo-squelettiques, qu’il s’agisse de cadences trop élevées, de contacts mal protégés avec des substances chimiques ou dangereuses, le CHSCT joue un rôle fondamental de lanceur d’alerte et de protecteur contre les risques au travail, qui peuvent être, par ailleurs, mal évalués.
Je le répète, le mieux-être au travail et la santé des salariés ne peuvent que favoriser la qualité du travail et la bonne santé de l’entreprise.
Le regroupement en DUP ne doit pas se faire au détriment des prérogatives spécifiques, et essentielles, du CHSCT. On le sait bien, les trois instances concernées n’ont pas les mêmes objectifs, et le CHSCT ne doit pas être le parent pauvre de ce regroupement.
Vous l’avez compris, nous tenions à souligner les points positifs de ce projet de loi, mais aussi les sujets d’inquiétude. Nous nous prononcerons sur l’ensemble en fonction du débat. (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et du groupe CRC.)