M. Charles Revet. Ce n’est pas facile !
Mme Ségolène Royal, ministre. Pourtant, j’ai engagé d’âpres négociations avec les acteurs concernés, et il est de ma responsabilité de vous présenter, mesdames, messieurs les sénateurs, cet amendement, que vous êtes libres d’adopter ou non – je le comprends parfaitement.
Pour ma part, j’aurai tenu ma parole à l’égard de la collectivité corse : j’ai exigé certaines choses et j’ai obtenu des engagements. Certes, M. Nègre a parfaitement raison, il conviendra de tout mettre sur la table, de poser des conditions et de contrôler le respect des engagements.
Je le répète, il s’agit là d’une dynamique positive et, sur de tels sujets, il faut savoir avancer, sans en rabattre sur les grands principes. Or je ne pense pas être allée en ce sens. Dans le cadre de la loi Littoral, il est plus pernicieux d’avoir des décharges ou des installations sauvages que des installations contrôlées, car les collectivités territoriales et les élus sont incités à agir pour être exemplaires. Ils imaginent même des solutions auxquelles ils n’avaient pas pensé avant d’être contraints à entrer dans cette logique.
Cela dit, après avoir écouté vos observations, je propose de rectifier l’amendement du Gouvernement, en supprimant les termes : « ou, à défaut, du conseil municipal de la commune concernée par l’ouvrage ou par l’installation, ». C’est une précision inutile et inopportune, car, en Corse comme outre-mer, un syndicat regroupe l’ensemble des communes du territoire.
Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un amendement n° 279 rectifié, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – Le code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 146-4, il est inséré un article L. 146-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 146-4-… – En Corse, par dérogation aux dispositions du premier alinéa du I de l’article L. 146-4, les ouvrages et installations nécessaires au traitement ou au stockage des déchets, relevant de l’article L511-1 du code de l’environnement et qui sont incompatibles avec le voisinage des zones habitées, peuvent être implantés en dehors des espaces proches du rivage après délibération favorable de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme et après avis du conseil des sites de Corse.
« Les ouvrages et installations mentionnés au premier alinéa ne peuvent pas être implantés s’ils sont de nature à porter atteinte aux sites et paysages remarquables.
« Le présent article s’applique sans préjudice de l’obligation pour le territoire de mener une politique ambitieuse de transition vers une économie circulaire, visant à améliorer notablement la prévention des déchets. » ;
2° Après le sixième alinéa de l’article L. 156-2, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 156-2, les ouvrages et installations nécessaires au traitement ou au stockage des déchets, relevant de l’article L511-1 du code de l’environnement et qui sont incompatibles avec le voisinage des zones habitées, peuvent être implantés en dehors des espaces proches du rivage après délibération favorable de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme et après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites.
« Les ouvrages et installations mentionnés au premier alinéa ne peuvent pas être implantés s’ils sont de nature à porter atteinte aux sites et paysages remarquables.
« Les dispositions des deux alinéas précédents s’appliquent sans préjudice de l’obligation pour le territoire de mener une politique ambitieuse de transition vers une économie circulaire, visant à améliorer notablement la prévention des déchets. »
La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Madame la ministre, je n’interviendrai pas sur le fond, car je ne suis pas un spécialiste en la matière, tant s’en faut.
En revanche, je connais un peu la procédure parlementaire. Or, sincèrement, en vertu de la règle dite « de l’entonnoir », qui s’applique tant aux parlementaires qu’au Gouvernement, vous ne pouvez pas présenter un tel amendement en nouvelle lecture. Certaines dérogations peuvent être possibles, à l’image des dérogations à la loi Littoral que vous demandez (Sourires.), pour ce qui concerne l’article 40 de la Constitution, mais il ne saurait y avoir de dérogation pour le Gouvernement sur ce point !
En clair, cela signifie que cette disposition sera censurée en cas de recours devant le Conseil constitutionnel. Aussi, comme je ne suis absolument pas convaincu que tous mes collègues voteront cet amendement, donc auront intérêt à ne pas faire de recours, je vous invite, madame la ministre, à bien vouloir le retirer, dans l’attente d’un autre véhicule législatif.
Cette disposition, je le répète, est irrecevable au titre de la règle de l’entonnoir et risque d’être censurée par le Conseil constitutionnel si un recours est engagé. Je vous invite donc à trouver un autre moyen pour faire en sorte qu’elle entre en vigueur.
Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Madame la présidente, je demande une suspension de séance de cinq minutes, afin que les membres de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable puissent se retrouver au salon Victor-Hugo et statuer sur l’irrecevabilité de cet amendement.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à onze heures cinquante, est reprise à midi.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Madame la présidente, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, qui vient de se réunir, a constaté l’irrecevabilité de l’amendement n° 279 rectifié, comme ce fut le cas pour un amendement quasiment identique déposé par M. Joseph Castelli, sénateur de Corse. La règle de l’entonnoir s’appliquant, cet amendement n’est pas recevable.
Formellement, notre décision doit être validée par la commission des affaires économiques, qui ne peut se réunir pour le moment, son président étant absent, me semble-t-il.
Deux solutions sont possibles : soit Mme la ministre accepte de retirer son amendement, soit je demande la réserve du vote de cet article, afin de permettre à la commission des affaires économiques de se réunir cet après-midi.
J’indique à la Haute Assemblée qu’un texte, au sein duquel cet amendement pourrait être repris, sera déposé prochainement. Il s’agit d’un DDADUE, c'est-à-dire d’un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière de développement durable, qui doit être examiné en urgence par l’Assemblée nationale dès le mois de septembre prochain.
Le retrait de cet amendement permettrait de sécuriser le dispositif gouvernemental. En effet, si celui-ci, une fois inséré dans le texte que nous examinons aujourd'hui, est « retoqué » par le Conseil constitutionnel, le Gouvernement aura tout perdu. Il vaut donc mieux qu’il retire cet amendement, pour le réintroduire dans le DDADUE qui sera examiné par l’Assemblée nationale, puis par le Sénat dès le mois d’octobre prochain. Si le Gouvernement ne veut pas le faire, je le répète, je demanderai la réserve, afin que la commission des affaires économiques puisse entériner notre position.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. Je me réjouis du débat intervenu à propos de cet amendement. Je m’étais engagée à le présenter, et je n’ai qu’une parole. Pour autant, je regrette que M. Joseph Castelli ne soit pas là.
M. Jean-Claude Requier. Il est favorable à l’amendement ! (Sourires.)
Mme Ségolène Royal, ministre. Je le sais bien ! Toutefois, si je veux bien porter des propositions, je souhaiterais, dans la mesure où il ne s’agit pas de sujets faciles, que les élus concernés soient présents en séance pour faire valoir leurs arguments ! Pour moi, il s’agit de prendre mes responsabilités en encourageant le traitement correct des déchets et en protégeant les espaces naturels.
M. Castelli avait déposé un amendement identique, déclaré irrecevable au titre de la règle de l’entonnoir. Ces dispositions ne doivent donc rien au hasard ; elles ont déjà été introduites, notamment à l’Assemblée nationale. Toutefois, l’amendement en question ayant été alors déposé sur un article déjà adopté conforme, il n’a pas pu être examiné en séance, ce qui explique cette procédure quelque peu problématique.
Je veux que les choses soient bien claires. Un jugement du tribunal administratif a annulé une décision de construction d’un site de traitement. Aujourd'hui, les déchets sont stockés de façon précaire, avec un système de balles, voire exportés sur le continent. On ne peut pas ne pas voir les problèmes qui existent !
Il est trop facile, pour le mouvement associatif local, de fermer les yeux, de se mettre la tête dans le sable ou dans la balle de déchets (Sourires.), et de dire : « Débrouillez-vous ! » Je ne suis pas pour ce genre d’écologie. Le refus de décision entraîne une situation pire pour l’environnement ; ce n’est donc pas une bonne façon de faire.
Cela dit, compte tenu de l’absence du sénateur Joseph Castelli et des arguments avancés dans le cadre d’un débat clairement posé, je vais retirer l’amendement, la situation ayant vocation à évoluer. Nous verrons si nous pourrons raccrocher ces dispositions à un autre texte. Nous verrons si, d’ici là, la collectivité aura pris des engagements encore plus fermes. Une délibération claire sur l’engagement du territoire dans une logique « zéro gaspillage zéro déchet », ainsi que la mise à plat des solutions de rechange au projet initial, permettrait de gagner du temps.
Quoi qu’il en soit, je vous remercie de cet échange, qui nous a permis d’insister sur l’existence d’un problème réel, difficile à régler. Il est selon moi de notre responsabilité de nous atteler à cette tâche, même si, par confort politique, je pourrais très bien m’abriter derrière la loi Littoral, qui s’impose.
Je suis obligée de prendre en considération la cohérence de notre action, une absence de décision rendant le problème encore plus difficile. Franchement, réexporter les déchets sur le continent ou les stocker de façon précaire sur une dalle de goudron – c’est ce qui se passe aujourd'hui – n’est guère satisfaisant.
Mme la présidente. L’amendement n° 279 rectifié est retiré.
La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Je tiens à remercier Mme la ministre de sa décision. J’ajoute qu’il ne faut surtout pas voir dans notre position une négation du problème. Au contraire, nous en sommes bien conscients.
Au cours de la réunion de la commission, nous avons émis le souhait de nous rendre sur place, afin d’examiner la situation. (Mme la ministre s’exclame.) Pas forcément au cours d’un week-end : ce peut être en semaine, en faisant l’aller-retour dans la journée !
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Notre dessein n’est pas du tout celui que vous sous-entendez, madame la ministre. Il s’agit uniquement de mieux appréhender la situation et d’être pleinement informés lorsque vous présenterez de nouveau ce dispositif, afin de vous aider, si nécessaire, à le faire adopter.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 19, modifié.
(L'article 19 est adopté.)
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Article 19 bis AA
(Non modifié)
Après le 7° du II de l’article L. 541-10 du code de l’environnement, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les objectifs liés à la contribution des éco-organismes à la mise en place de dispositifs de consigne pour recyclage et réemploi. » – (Adopté.)
Article 19 bis A
Au plus tard le 1er janvier 2018, les producteurs ou détenteurs de déchets d’ustensiles jetables de cuisine pour la table en matières plastiques, à l’exclusion des ménages, mettent en place un tri à la source de ces déchets et, lorsque ces déchets ne sont pas traités sur place, une collecte séparée de ces déchets.
Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret.
Mme la présidente. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Longeot et Kern, Mmes Billon et Doineau, MM. Zocchetto et Médevielle, Mme Morin-Desailly, MM. Delahaye et Bockel, Mme Joissains et M. Canevet, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement vise à supprimer l’article 19 bis A. En effet, la mise en œuvre de cette filière de tri, hors ménages, semble complexe. Je suis surpris que ce dossier revienne aujourd'hui en nouvelle lecture, puisque nous avions, tous groupes confondus, modifié cet article en adoptant un amendement déposé par M. le rapporteur.
Au cours de la discussion, j’avais félicité Mme la ministre de la cohérence de ses propos, tenus aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, une telle mesure revêtant un caractère antisocial, notamment, vous le savez bien, dans les hôpitaux, les prisons et les avions. Les compagnies d’aviation se battent contre cette décision, qui posera des problèmes considérables. Je plaide donc pour la sagesse : plutôt que de disparaître, les entreprises doivent pouvoir changer leurs méthodes.
Permettez-moi de citer le numéro 44 du journal du conseil régional de Franche-Comté. On y vante les mérites d’une entreprise, Guillin Emballages, qui compte plus de 2 000 collaborateurs. Alors même qu’on se réjouit des emplois créés dans ce secteur, on décide, pour première récompense, de mettre un terme à son activité ! D’un point de vue non seulement économique, mais aussi environnemental, ce n’est pas raisonnable, dans la mesure où aucun produit de substitution n’a encore été trouvé.
Il faut donc que la sagesse l’emporte et que nous procédions à la suppression de l’article 19 bis A. Des solutions doivent être trouvées pour mettre en place le recyclage.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Cet amendement vise à supprimer l’obligation de tri à la source des déchets d’ustensiles de vaisselle en plastique à partir de 2018. Il est contraire à la position adoptée par le Sénat en première lecture et au texte adopté par la commission en nouvelle lecture.
Il est important, selon nous, de favoriser la récupération de ce gisement de déchets, aujourd'hui non valorisé, ou seulement par des initiatives ponctuelles éparses.
J’ajoute que, concernant le tri des ustensiles de vaisselle en plastique, les compagnies aériennes sont intervenues auprès de moi pour souligner que des textes de niveau international interdisaient ce tri sélectif. Bien évidemment, à partir du moment où un texte supranational s’impose, nous sommes obligés de le suivre. Pour autant, que ce soit dans les hôpitaux ou les prisons, rien n’empêche de faire un tri sélectif.
Finalement, le but de la démarche, c’est de consommer ce type d’ustensiles le moins possible. Toutefois, il convient d’abord de procéder à leur récupération, en créant une filière des industries bioplastiques.
La commission a donc émis un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L'amendement n° 217, présenté par MM. Dantec, Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 541-10-5 du code de l’environnement est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« III. – Au plus tard le 1er janvier 2020, il est mis fin à la mise à disposition à titre onéreux ou gratuit des ustensiles jetables de cuisine pour la table en matière plastique, sauf pour les ustensiles compostables et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du premier alinéa du présent III. Il fixe notamment la teneur biosourcée minimale des ustensiles de cuisine mentionnés au même alinéa et les conditions dans lesquelles celle-ci est progressivement augmentée. Il prévoit également les exceptions à l’interdiction de l’utilisation des ustensiles de cuisine en matière plastique. »
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. J’estime qu’une partie de l’argumentaire présenté à l’instant par M. Longeot se tient.
Pour ma part, je ne vois absolument pas à quoi pourrait ressembler un tri à la source dans la campagne, car ces ustensiles sont principalement utilisés au cours des pique-niques. Inscrire dans la loi qu’on organisera un tri à la source des fourchettes et des couteaux se baladant dans la campagne, ce n’est pas viable économiquement. On ne va pas installer, sur l’ensemble du territoire, des personnes chargées de récupérer les couteaux, les fourchettes et les gobelets qui traînent !
Je propose donc que l’on en revienne à la version discutée préalablement. Globalement, elle est très proche de la proposition du Gouvernement ; c’est même presque une copie conforme. À un moment donné, il faut cesser d’utiliser, en pique-nique, à la campagne, du plastique non recyclable et non dégradable. Tel est le point fondamental.
En effet, mes chers collègues, il s’agit d’une pollution extrêmement importante. Observez les aires d’autoroutes. Observez les camping-cars qui partent en Europe et disséminent ce plastique. Vous les voyez, ces déchets ! Ce n’est pas parce qu’on va installer une poubelle spécifique pour les récupérer que cela atténuera l’atteinte environnementale. Il faut dire stop à cette pollution. Les ustensiles en question doivent devenir biodégradables.
Tel était le sens de la position initiale du Gouvernement. On fixe la date butoir à 2020, ce qui laisse cinq ans pour trouver des solutions technologiques. Cela signifie que les entreprises de ce secteur ont cinq ans pour rester leaders, avec des produits conformes à l’enjeu environnemental.
Certes, dans les avions, les couteaux en plastique sont nécessaires. Il suffit de prévoir un certain nombre d’exceptions, d’ailleurs inscrites dans l’article, pour les avions et les hôpitaux.
M. Roger Karoutchi. Et pourquoi pas aussi dans les trains ? (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Ronan Dantec. Le dispositif me semble donc complet. C’est la raison pour laquelle je vous propose, mes chers collègues, d’adopter les dispositions prévues par cet amendement, qui sont totalement cohérentes. À défaut, nous ne répondrons pas au problème posé par une pollution extrêmement importante.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Par cet amendement, il s’agit de rétablir l’interdiction de la vaisselle jetable en plastique.
Or la commission a estimé que l’interdiction pure et simple n’était pas une bonne solution, et ce pour plusieurs raisons.
Premièrement, la réglementation européenne proscrit ce type d’interdictions de mise sur le marché et le caractère nécessaire et proportionné de la mesure n’a pas été préalablement démontré.
Deuxièmement, il n’existe pas vraiment d’alternative compostable viable pour les couverts et la vaisselle, compte tenu de leurs usages. Nous sommes confrontés à des problèmes de résistance à la chaleur et de contact alimentaire. Les produits de substitution existants incorporent généralement beaucoup plus de matière – je pense notamment aux gobelets –, mais présentent un bilan environnemental, sur l’ensemble de leur cycle de vie, moins bon que les produits en plastique léger actuels.
Troisièmement, la fabrication de ces produits représente près de 700 emplois en France. La position retenue par la commission est donc plutôt de prévoir la mise en place par les producteurs ou détenteurs de ces déchets d’un tri à la source.
Cette obligation permet à la fois de favoriser les ustensiles réutilisables et d’assurer une valorisation des déchets restants. Je suis donc en désaccord avec l’argumentation des auteurs de l’amendement, qui indiquent que ces plastiques seront incinérés. Nous nous inscrivons bien dans la hiérarchie de traitement des déchets définie au niveau européen et nous avons par ailleurs voté l’extension des consignes de tri des plastiques pour recyclage.
Le texte est donc un compromis qui améliore la situation, sans être contraire au droit européen, et qui tient compte du problème de l’emploi en France.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Les incivilités existent. Et comme nous ne voulons pas les traiter, nous interdisons. Mes chers collègues, je vais vous faire une proposition : aujourd’hui, des avions fonctionnent à l’énergie solaire. Supprimons donc l’aviation au kérosène !
M. Hervé Poher. Cela ne vole pas haut… (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Je partage l’avis de notre rapporteur. L’Assemblée nationale a introduit dans le texte le recours à ces produits s’ils sont biosourcés. Toutefois, fabriquer un couvert en matière biosourcée demande d’augmenter les quantités de produits pour les rendre plus rigides, car ils ne présentent pas la même résistance. Il est donc faux de dire que ces produits sont compostables.
Restons-en là, ne soyons pas dogmatiques. Pourquoi penser que nos concitoyens ne sont pas sensibles aux questions environnementales ? J’habite dans un département très touristique. Je ne trouve pas des cuillères et fourchettes dans tous les fossés de mon département !
M. Ronan Dantec. Les ramassez-vous vous-même ? (Sourires.)
M. Gérard Miquel. Nos concitoyens sont très sensibles au problème de l’environnement. Ils ne jettent pas n’importe où ces produits !
M. Ronan Dantec. Je vais venir en vacances dans votre département, alors ! (Nouveaux sourires.) Y mange-t-on avec les doigts ?
M. Gérard Miquel. Vous pourrez alors le constater vous-même, cher monsieur Dantec !
Mme la présidente. La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour explication de vote.
Mme Chantal Jouanno. Nous avons déjà abordé cette question lors du Grenelle de l’environnement : nous avions alors envisagé un bonus-malus sur ce type d’ustensiles.
M. Dantec propose de rétablir dans le texte les dispositions prises à l’origine par le Gouvernement. À cet égard, madame la ministre, je comprends mal votre position, mais je pense que vous allez nous éclairer. Vous aviez probablement décidé d’inscrire ces dispositions dans le texte sur la base d’analyses de cycles de vie attestant d’un bilan environnemental positif, réalisées soit par la Direction générale de la prévention des risques, la DGPR, soit par l’Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l’ADEME. Dès lors, pourquoi rejeter un amendement qui vise à rétablir votre texte ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Ségolène Royal, ministre. Madame Jouanno, sauf erreur de ma part, nous revenons au texte de l’Assemblée nationale, qui prévoyait l’interdiction des gobelets et des assiettes, mais non des couverts, pour les raisons qui viennent d’être exposées.
Tout d'abord, le fléau, si l’on prend en compte les volumes produits, vient effectivement des gobelets et des assiettes en plastique. Ensuite, pour réaliser des couverts biodégradables, il faut intégrer beaucoup plus de matière, afin de les rendre suffisamment rigides. Enfin, si nous interdisons les assiettes et les gobelets en plastique non biodégradables, la réduction en volume des couverts suivra naturellement ; les choses se feront toutes seules, en quelque sorte ; en revanche, imposer cette interdiction serait trop brutal.
Il faut donc être pragmatique. Ce retour au texte de l’Assemblée constitue un juste équilibre par rapport à la position initiale du Sénat, qui ne proposait aucune interdiction. Par ailleurs, le processus de substitution et de fabrication de produits biodégradables est manifestement lancé.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote. (Marques d’impatience sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Ronan Dantec. J’entends la volonté du Gouvernement de revenir au texte initial de l’Assemblée nationale, qui est légèrement différent de celui que je propose.
Je retire donc mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 217 est retiré.
L'amendement n° 14, présenté par M. Longeot, Mmes Billon et Doineau et M. Zocchetto, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer l'année :
2018
par l'année :
2020
La parole est à M. Jean-François Longeot.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission du développement durable ?
M. Louis Nègre, au nom de la commission du développement durable. Cet amendement vise à repousser de deux ans, de 2018 à 2020, l’entrée en vigueur de l’obligation de tri à la source des déchets de vaisselle plastique. J’y insiste : nous ne parlons plus d’interdiction de ces produits, mais bien de tri à la source.
La date de 2018 laisse aux professionnels suffisamment de temps – plus de deux ans et demi – pour s’organiser. La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 19 bis A.
(L'article 19 bis A est adopté.)
Article 19 bis B
(Non modifié)
La France a pour objectif de découpler progressivement sa croissance de sa consommation de matières premières. À cet effet, elle se fixe comme objectif une hausse de 30 %, de 2010 à 2030, du rapport entre son produit intérieur brut et sa consommation intérieure de matières. Dans le même temps, elle vise à une diminution de sa consommation intérieure de matières par habitant. – (Adopté.)
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Article 19 bis
I. – L’article L. 541-10-5 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
2° Il est ajouté un II ainsi rédigé :
« II. – Il est mis fin à la mise à disposition, à titre onéreux ou gratuit :
« 1° À compter du 1er janvier 2016, de sacs de caisse en matières plastiques à usage unique destinés à l’emballage de marchandises au point de vente, sauf pour les sacs compostables en compostage domestique et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées ;
« 2° À compter du 1er janvier 2017, de sacs en matières plastiques à usage unique destinés à l’emballage de marchandises au point de vente autres que les sacs de caisse, sauf pour les sacs compostables en compostage domestique et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent II. Il fixe notamment la teneur biosourcée minimale des sacs en matières plastiques à usage unique mentionnés au 2° et les conditions dans lesquelles celle-ci est progressivement augmentée. Il fixe également les modalités d’information du consommateur sur la composition et l’utilisation des sacs vendus ou mis à sa disposition. »
II. – (Non modifié)
III. – (Non modifié) À compter du 1er janvier 2017, l’utilisation des emballages plastiques non biodégradables et non compostables en compostage domestique pour l’envoi de la presse et de la publicité adressée ou non adressée est interdite.
IV. – Le Gouvernement remet au Parlement un rapport, au plus tard le 1er janvier 2018, sur l’impact économique et environnemental de la mise en œuvre des I et II du présent article.