M. Jacques Genest. Il faut des preuves d’amour ! (Nouveaux sourires.)
M. André Vallini, secrétaire d'État. Je vais vous les donner, monsieur le sénateur ! (Mêmes mouvements.)
L’effort moyen des communes de moins de 500 habitants est de 8 euros par habitant en 2015, alors qu’il est de 55 euros pour les communes de plus de 200 000 habitants.
Pour les petites villes, les bourgs-centres, l’effort moyen des communes de moins de 10 000 habitants est de 12 euros par habitant en 2015, alors qu’il est de 27 euros par habitant pour les communes de plus de 10 000 habitants.
Enfin, pour les 10 000 communes rurales les plus pauvres – certaines sont sûrement en Ardèche ! – et pour les 250 communes urbaines les plus pauvres, les dotations n’ont globalement pas baissé après la péréquation en 2015.
Sans vouloir minorer les difficultés que rencontrent les communes, j’ajoute que le nombre de communes inscrites dans le réseau d’alerte reste stable cette année. Elles sont 1 800 en 2015, contre 1 854 en 2013 et 1 837 en 2014. Elles sont donc un peu moins nombreuses en 2015.
En 2015, le nombre de saisines des chambres régionales des comptes par les préfets pour actes budgétaires en déséquilibre est le même qu’en 2014 : il est de 138. Pour 2015, il y a eu 46 saisines de chambres régionales des comptes pour comptes administratifs en déséquilibre, contre 71 en 2014.
Enfin, les demandes de subventions exceptionnelles à l’État de la part de communes en difficulté sont au nombre de 25 en 2015, contre 23 en 2014.
J’en viens maintenant à l’investissement. C’est un vrai souci que vous avez exprimé les uns et les autres et qui est partagé par le Gouvernement. Nous le savons tous, l’investissement public local représente 70 % de l’investissement public en France.
Personne ne le nie, la baisse de l’investissement public local est forte : il a diminué de 7,8 % en 2014 – 12,4 % pour le bloc communal –, et il semble que, cette année, la réduction sera encore plus sévère, si j’ose m’exprimer ainsi.
Conscient de l’enjeu que représente l’investissement, le Gouvernement a pris en 2015 des mesures qu’il va reconduire et accentuer en 2016. Vous savez que nous allons relever le taux de remboursement du FCTVA de 0,9 point.
Nous avons augmenté la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR, de 200 millions d'euros, la portant à 800 millions d'euros, contre 600 millions d'euros en 2014.
Nous avons créé un fonds pour les maires bâtisseurs de 100 millions d'euros, ce qui représente 2 000 euros par permis de construire dans les zones tendues.
Je pourrais également citer les crédits des contrats de plan État-régions, qui sont à hauteur, pour l’État, de 12,5 milliards d'euros.
Au titre des mesures annoncées en 2015, dont certaines produiront des effets en 2016 et dont quelques-unes sont déjà effectives, je veux notamment mentionner le prêt à taux zéro de la Caisse des dépôts et consignations, qui permet d’anticiper le remboursement de la TVA. Je m’aperçois, comme vous, que cette mesure, très importante, est peu connue par les communes. Dans beaucoup de départements, les maires ignorent encore qu’ils peuvent obtenir, moyennant certes une attente qui dure souvent deux ans, ce remboursement anticipé de la TVA sur les dépenses d’investissement.
Ce remboursement de la TVA par le FCTVA va être étendu aux dépenses d’entretien des bâtiments publics et aussi, grâce au vote des députés, aux dépenses d’entretien de la voirie. Cette mesure, très importante, sera appréciée par les maires, qui l’attendaient depuis longtemps.
Nous avons également décidé de créer un fonds d’investissement de 1 milliard d'euros. Je me souviens que, lorsque le Premier ministre, Mme Lebranchu, M. Eckert et moi-même avons reçu, le 28 mai dernier, le bureau de l’Association des maires de France – M. Baroin, en particulier –, l’AMF avait alors exprimé un certain scepticisme à l’égard de ce fonds de 1 milliard d’euros.
Or il devient réalité, se décomposant en deux parties de 500 millions d'euros. La première partie est destinée à la réalisation de projets de priorité nationale – transition énergétique, logements fléchés sur les investissements locaux, répartis par les préfets de région et les préfets de département, en concertation, bien sûr, avec les élus locaux.
La deuxième partie, donc également de 500 millions d'euros, se décompose de la façon suivante : 200 millions d'euros, qui correspondent à la reconduction de l’augmentation de la DETR – 200 millions d'euros de plus en 2015, à nouveau 200 millions d'euros de plus en 2016 – et 300 millions d'euros pour les investissements dans les bourgs-centres et les petites villes.
Enfin, nous avons décidé d’alléger les normes comptables, ce qui va permettre aux collectivités de dégager plus de capacités d’autofinancement et, donc, de favoriser l’investissement en allongeant la durée de l’amortissement de certains investissements et en modifiant l’amortissement des subventions d’équipement que les communes versent aux associations.
Voilà ce que je voulais vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, avant de laisser la parole à Mme la ministre.
M. le président. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme il est bientôt minuit, je vous propose de prolonger notre séance pour terminer le débat.
Il n’y a pas d’observation ?...
Il en est ainsi décidé.
Vous avez la parole, madame la ministre.
Mme Marylise Lebranchu, ministre de la décentralisation et de la fonction publique. Mesdames, messieurs les sénateurs, j’entends les critiques concernant la réforme de la dotation globale de fonctionnement. Nous sommes partis de principes simples, rappelés par un certain nombre d’entre vous, sur lesquels je reviendrai en répondant à chacun.
Comment supprimer les écarts de ressources injustifiés ? Comment programmer la disparition progressive de parts figées et leur substituer des parts attribuées en fonction de critères objectifs en sachant, par exemple, que l’outre-mer recevait 59 euros en moyenne par habitant, contre 153 euros par habitant en métropole, ce qui était totalement injuste ?
Comment accroître l’efficacité de la dotation globale de fonctionnement ? Comment concentrer davantage la péréquation sur les communes et les intercommunalités en difficulté ? Plus de 34 000 communes sur 36 000 bénéficiaient de la dotation de solidarité rurale, ou DSR, ce qui était sans doute un peu anormal.
Au cours des débats qui ont eu lieu depuis plusieurs années, il était également apparu que beaucoup d’entre vous s’inquiétaient de la situation des bourgs et des villes, évoquant des charges excessives. Ces constats importants figuraient dans différents rapports du Sénat.
L’idée était ensuite de renforcer la lisibilité en rendant possible un vrai débat démocratique, mais devant vous.
Nous pensions toutefois que s’en tenir aux parts figées, c’était signer la fin d’une histoire, l’histoire de ces échanges nombreux sur le point de savoir ce qui est juste ou injuste, ce qui est souhaitable ou non.
C'est la raison pour laquelle nous avons entamé ce processus de réforme que tout le monde me dit trouver très rapide. Non, mesdames, messieurs les sénateurs ! Je vous rappelle, sous le contrôle de M. le président Larcher, qu’après le changement de majorité intervenu au sein de la Haute Assemblée, nous avons sollicité un certain nombre d’entre vous pour désigner un ou deux représentants des groupes majoritaires du Sénat. Nous avons bien évidemment commencé par le président du groupe qui était encore à l’époque l’UMP et du président de l’UDI-UC. Il était normal de leur laisser du temps pour désigner leurs représentants.
La fin de non-recevoir nous est parvenue tard, c’était à la fin du mois de novembre, rappelez-vous. Certains ont argumenté sur le fait que leur groupe parlementaire pensait inopportun de travailler dans le cadre d’une mission parlementaire, au motif que cela risquait de les enfermer. Tel n’a jamais été le cas ! Quand on est membre d’une mission parlementaire, justement, et que l’on est en désaccord avec le rapport de celui qui porte la mission, on a le droit de faire mention par écrit de son avis divergent.
Nous avons donc perdu deux mois et demi puisque, du coup, c’est en janvier seulement que la mission a pu entamer ses travaux. Le choix s’est porté sur Jean Germain – je le salue là où il est –, qui a fait acte de candidature à l’époque, alors qu’il aurait, lui aussi, préféré qu’un représentant d’une autre famille politique soit désigné. Un tel pluralisme, gage d’une démarche irréprochable, aurait été de surcroît plus intéressant pour conduire les travaux de la mission, notamment les auditions.
Nous avons donc accepté de commencer ainsi ; nous n’avions de toute façon pas le choix. Le 16 juillet, nous avons présenté le projet de réforme au Comité des finances locales, plutôt qu’à votre commission des finances ; c’est, à titre personnel, le reproche que je pourrais me faire. Toujours est-il que cette présentation offrait un choix entre trois scénarios de réformes envisageables ; pour montrer l’impact de chaque scénario, nous avions réalisé des simulations sur un échantillon de 41 communes et leurs EPCI respectifs.
Ce document devait être discuté, mais le CFL a refusé ces simulations – c’est son droit le plus absolu – et ne les a pas fait distribuer. Je ne m’explique toujours pas ce qui s’est passé ce jour-là ; c’est un exemple des chaos de l’histoire.
Nous sommes donc repartis avec nos scénarios et nos simulations. Nous avons malgré tout continué d’en discuter avec les uns et les autres, nous avons réfléchi à ce que pouvait être une réforme de la DGF et nous avons finalement choisi de travailler sur le scénario n° 2, avec une DGF locale, dont les simulations donnaient les meilleurs résultats. Néanmoins, devant l’ampleur des remarques qui nous étaient faites, devant, parfois, des oppositions catégoriques, nous avons, en octobre, transmis tous les résultats, distincts de ceux qui avaient été inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016.
Cette réforme aurait pu être applicable dès cette année et je continuais d’ailleurs à défendre sa mise en place cet automne. En effet, il me paraissait important que, dans le cadre de la réforme intercommunale, ceux qui choisissaient les nouveaux périmètres des intercommunalités puissent le faire sur la base de la nouvelle épure de la DGF. Cela aurait été plus facile et plus sain que de mener des simulations à partir de la DGF actuelle et de parts figées qui, comme il a été rappelé, doivent évoluer.
Néanmoins, le Premier ministre a pris acte du fait que, à l’Assemblée nationale comme au Sénat et au sein de la plupart des associations d’élus, beaucoup estimaient qu’il était plus facile de fixer les périmètres d’abord, et d’appliquer la réforme ensuite.
Je m’engage d’ailleurs, avec André Vallini, à effectuer sur quelques cas des simulations doubles. Il serait juste, en effet, que nous puissions simuler à la fois l’ancienne DGF et la nouvelle, afin que les élus, comme M. Baroin le disait avec juste raison, aient une vision pluriannuelle. Je remarque cependant qu’au moment où l’on nous demande une telle vision pluriannuelle, on nous met dans l’impossibilité de la réaliser ; c’est un peu délicat. Nous-mêmes et nos services nous tiendrons toutefois à la disposition des élus pour cela.
D’ailleurs, une projection pluriannuelle sur trois ans, fondée sur une application de la réforme au 1er janvier 2017, avait été faite : nous avions pu ainsi prolonger nos estimations, à l’attention de ceux qui voulaient bien regarder les documents.
Pour autant, le Premier ministre, tout comme il l’avait fait devant le refus opposé par un groupe sénatorial de désigner un de ses membres pour travailler à la mission sur la réforme de la DGF, mais aussi lorsqu’il avait fait le choix, pour la loi NOTRe, d’aboutir par le débat à un texte de consensus, a entendu les parlementaires et a proposé de reporter cette réforme d’une année.
Le 14 octobre dernier, nous avons transmis les simulations aux intéressés, M. Baroin le premier. Elles différaient des précédentes sur un point : la DGF était abondée de 109 millions d’euros, ce qui correspond à la somme nécessaire pour que la métropole du Grand Paris – la MGP – et celle d’Aix-Marseille-Provence ne soient pas financées par la DGF des autres ; j’avais en effet pris devant vous cet engagement.
Le 21 octobre, à 9 heures 50, M. Mézard nous a effectivement demandé de lui communiquer ces simulations. Nous lui avons répondu à 11 heures 52 – nous avons tous les courriels –, mais il nous a fait savoir à 14 heures 40 qu’il les avait déjà. En effet, ces simulations étaient disponibles ici dans de nombreux bureaux ; M. Mézard avait donc pu se les procurer dans l’intervalle.
Le 30 octobre, nous avons refait ces simulations en détail pour les communes de la MGP, sans impact, bien sûr, pour les autres communes. Des fiches d’analyse ont d’ailleurs été transmises aux parlementaires pour leur permettre d’en prendre connaissance avant le débat ; elles ont été envoyées le vendredi soir à l’Assemblée nationale et le dimanche midi au Sénat, mais députés comme sénateurs les ont naturellement trouvées en revenant le lundi 2 novembre. Enfin, ces mêmes fiches d’analyse comprenaient également les résultats d’une variante pour les communes de la MGP.
Nous avions donc de quoi discuter. D’ailleurs, lors de la discussion de l’article 58 du projet de loi de finances pour 2016, un vrai débat sera rendu possible par toutes ces simulations et, en particulier, celles qui ont d’ores et déjà été commentées par les uns et les autres.
Monsieur Baroin, vous êtes revenu sur la baisse des dotations ; André Vallini vous a répondu. Je tiens cependant à préciser que, contrairement à ce que vous avez déclaré, cet article 58 n’est pas le fruit d’un amendement nuitamment déposé. Non, monsieur le sénateur, il a été déposé le 15 juillet et a été publié dans le projet de loi de finances avec des variantes à la demande des uns et des autres, en particulier s’agissant des métropoles. Nous avons entendu les demandes de variantes, car il était important de répondre aux questions posées.
Dès le 16 juillet, tout était donc disponible, d’autant que nous avions aussi réuni alors l’instance de Dialogue national des territoires. Néanmoins, monsieur Baroin, vous n’aviez pas pu y assister, pas plus d’ailleurs que la plupart des présidents d’association d’élus qui nous avaient pourtant beaucoup demandé cette réunion ; un seul d’entre eux était présent, alors que nous étions trois membres du Gouvernement à la disposition des élus, avec nos fiches, nos simulations et nos projections. Cela a eu lieu le 16 juillet, et non nuitamment à l’Assemblée nationale. Je tenais à le redire à cette tribune pour que chacun soit correctement informé. Nous avions alors répondu aux questions à mon sens les plus importantes.
Mesdames, messieurs les sénateurs, cette réforme est nécessaire : j’entends peu de parlementaires et peu de maires affirmer que tout va bien quant à la DGF.
Je rappellerai par ailleurs que les simulations sont effectuées par la Direction générale des collectivités locales, et non par Bercy. Il ne faut donc pas mettre au compte des uns les défauts des autres. (M. Philippe Dallier s’exclame.) Nous assumons, pour notre part, les éventuels défauts de nos simulations. Vous-même, monsieur Baroin, qui avez été ministre du budget, savez à quel point la DGCL tient à ce travail : même si elle le partage avec Bercy, elle en est toujours propriétaire ; tel est son droit le plus strict parce que – pardonnez-moi l’expression – elle est là pour ça !
Cette réforme est donc juste. Certes, monsieur Baroin, on peut avoir un débat sans fin sur la baisse des dotations. Cela dit, un de vos collègues députés, membre du parti Les Républicains et occupant des fonctions éminentes à l’Assemblée nationale, nous a clairement fait savoir en commission des finances que votre parti, s’il revenait au pouvoir, ne reviendrait pas sur la baisse des dotations, qui constitue selon lui une nécessité absolue.
M. Pierre-Yves Collombat. Bien sûr ! Vous faites la même politique ! La droite l’a votée !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Dès lors, je constate que, si vous ne portez pas la baisse des dotations, du moins vous la défendez : c’est absolument transpartisan.
Pour autant, madame Beaufils, cette baisse des dotations n’est pas liée uniquement à ce qui nous est demandé par Bruxelles.
Je crois que la grande question qui nous est posée collectivement est celle de la souveraineté nationale. Nous avons la chance, aujourd’hui, de bénéficier de taux d’intérêt extrêmement bas, mais nous ne sommes pas certains qu’ils resteront aussi bas dans le futur. Il est vrai que la dette publique, qui a augmenté de 600 milliards d’euros, est celle de nos enfants et, surtout, de nos petits-enfants.
M. Pierre-Yves Collombat. Pitié ! Faites-nous grâce de cet argument !
M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Monsieur Collombat, je réponds à Mme Marie-France Beaufils. Aujourd’hui, les taux d’intérêt sont indéniablement très bas ; en revanche, vous ne pouvez pas savoir – personne ne le peut – ce qu’ils seront dans dix ou quinze ans. Il faut donc être prudent !
La question de la souveraineté nationale, qui pourrait d’ailleurs être plus souvent débattue, est donc ici cruciale. En effet, malheureusement, on a tendance à blâmer l’Europe en oubliant que la France elle-même a des questions à se poser.
M. Pierre-Yves Collombat. La souveraineté nationale ? Dites plutôt l’inféodation !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Vous avez mentionné très justement et avec force, madame Beaufils, les ghettos de la misère. M. Dallier a, lui aussi, évoqué cette hyper-richesse qui, dans la région parisienne, côtoie l’hyper-pauvreté, et ce de façon extrêmement violente. Nous occupant des collectivités locales, nous avons tous fait le tour de ces communes : il est en effet très pénible de constater cet énorme contraste et cette ghettoïsation à l’œuvre.
Le problème à résoudre n’est donc pas technique ; il est éminemment politique. À vrai dire, toute baisse de la dépense publique est toujours excessive : c’est le b.a.-ba de l’économie.
Vous avez rappelé, madame Beaufils, la baisse réelle des dotations perçues par vos communes entre 2011 et 2014. Certes, cette baisse doit être ramenée aux recettes réelles de fonctionnement ; néanmoins, il est vrai qu’elle n’est pas juste, alors que nous essayions précisément d’être plus justes.
Monsieur Raynal, vous avez rappelé la nécessité de réformer. Un amendement dont l’adoption nous obligerait à repartir de zéro n’aurait pas de sens, me semble-t-il, puisque nous avons maintenant sur la table tous les éléments pour débattre et réfléchir. Le choix est devant vous : soit totalement rejeter la réforme, mais beaucoup risquent de le regretter dans dix ans, soit l’adopter, y compris avec des ajustements. En tout cas, rejeter complètement cette perspective avec tout le travail effectué et mis à la disposition des parlementaires serait vraiment dommage.
Vous avez raison, monsieur Raynal, de parler de DGF négative ; cela peut effectivement conduire à des remboursements. Nous avons même envisagé de redonner des DGF à des communes riches pour qu’elles puissent participer à la péréquation, comme vous l’avez lu dans les documents.
Tout ce que vous avez dit est donc juste. La DGF, selon vous, est péréquatrice ; vous avez raison, mais les écarts croissants de ressources fiscales entre les collectivités doivent être aussi pris en compte.
Vous vous interrogez par ailleurs sur le fait que, pour la répartition de la dotation de centralité, l’indice de population est porté à la puissance 5. Dès le mois de juillet, vous aviez remarqué que la prise en compte des centralités secondaires faisait défaut lorsque la différence entre le nombre d’habitants était trop forte. Effectivement, c’est bien l’une des questions posées. Néanmoins, vous êtes élu dans une quasi-métropole où, par sa population, la commune centre relègue très loin derrière les autres communes. La détermination des charges pour les communes en question représente donc un réel problème. Nous nous retrouverons donc lors de ce débat, et vous déposerez peut-être des amendements.
En revanche, ce que vous dites sur la fin de l’État est un peu dur à entendre. On a besoin d’État, mais pas forcément de cette façon-là.
Il faudra aussi qu’un débat soit un jour organisé sur l’unicité de l’action publique. État, collectivités territoriales, hôpitaux publics, la fonction publique est une et constitue le socle solide de la Nation. Vous avez raison de poser le principe ainsi et il faudra que, partant de cette idée que nous avons en partage, nous trouvions des solutions pour la mettre en pratique.
M. Dantec était très naturellement attendu sur la COP 21, notamment par l’un de ses collègues. (Sourires.) Il a néanmoins également abordé dans son intervention le besoin de ressources des communes, l’idée de la solidarité, ainsi que la nécessité de bénéficier de marges de manœuvre pour assurer, par exemple, la transition énergétique. C’est tout le sens du milliard d’euros fléché, qui prend en compte notamment cette transition énergétique.
L’idée de budgets annexes est intéressante. Une proposition similaire a été formulée à l’Assemblée nationale, mais uniquement sur l’eau, l’assainissement et les déchets, afin que, dans les recettes réelles de fonctionnement, il y ait aussi des prestations. Il faut donc étudier ces idées ; c’est un exercice difficile, puisqu’aucune simulation n’atteste encore leur pertinence, mais nous nous engageons devant vous à continuer d’y travailler.
De même, nous nous intéressons à la réorientation de l’investissement public vers les équipements que vous qualifiez d’utiles, c’est-à-dire utiles à la planète, utiles à la vie, utiles à la proximité.
Nous essayons d’offrir aux communes rurales la possibilité de participer à ce mouvement, grâce, par exemple, à la dotation d’équipement des territoires ruraux, la DETR.
Monsieur Mézard, vous qui attendiez M. Dantec sur le sujet de la COP 21, vous voulez surtout, pour reprendre votre image, éviter que l’on ne rajoute une couche à la pâte feuilletée des distorsions actuelles.
Pour ce qui est des simulations, monsieur Mézard, nous vous transmettrons tous nos courriels et vous pourrez constater, les heures d’envoi faisant foi, que, de fait, nous étions prêts. Je ne sais pas ce qui s’est produit ce jour-là entre 11 heures 52 et 14 heures 40, mais nous étions naturellement prêts à diffuser par courriel ces documents.
Une courte parenthèse est ici utile : nombreux sont ceux qui nous ont demandé l’ensemble des simulations. À l’échelle de 36 000 communes, cela représente un énorme pavé que nous ne saurions fournir à chacun. Nous tenons à votre disposition une clef USB par groupe politique, elle contient l’ensemble des simulations ; vous y avez d’ailleurs eu accès.
Monsieur Mézard, vous bénéficiez donc à présent d’une telle clef USB.
M. Pierre-Yves Collombat. On en fait quoi ? C’est illisible !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Je viendrai la lire avec vous, monsieur Collombat, il n’y a pas de problème ! (Sourires.)
M. Pierre-Yves Collombat. Bien volontiers, madame la ministre ! (Nouveaux sourires.)
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Sur la hausse de la péréquation et la remise en cause juste des parts figées, monsieur Mézard, nous avons des préoccupations communes, mais je vois que je ne pourrai pas vous convaincre ce soir.
M. Jacques Genest. Ce n’est pas la peine !
M. François Bonhomme. Ce n’est pas la bonne heure ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Monsieur Guené, sur la méthode et le calendrier, vous avez été très critique, mais vous avez apprécié que les métropoles acquièrent une reconnaissance. Il est vrai que toutes ces modalités étaient difficiles à mettre en œuvre, mais nous sommes maintenant parvenus à un dispositif assez bien construit. Je retiens néanmoins vos remarques sur la nouvelle gouvernance.
M. Baroin a quitté l’hémicycle, mais je tiens à lui répondre. La principale difficulté a consisté à savoir s’il fallait une dotation globale de fonctionnement pour les intercommunalités. Faut-il reposer la question de la gouvernance des intercommunalités ? Faut-il ouvrir le débat, y compris pour les grandes métropoles, d’un suffrage universel pour les agglomérations ? Cette hypothèse reçoit une fin de non-recevoir absolue. Or qu’est-ce que la nouvelle gouvernance, sinon ?
C’est un grand sujet que celui de la gouvernance ; la question est aujourd’hui prématurée, mais je ne doute pas qu’elle sera posée de nouveau par les générations futures, ou peut-être même avant.
Monsieur Capo-Canellas, vous êtes également revenu sur la question de la ruralité et de la centralité et sur la fameuse strate 9 de la DGF, qui concerne les villes moyennes. La réforme était-elle favorable aux bourgs et aux petites villes ? Oui. L’était-elle aux grandes villes ? Oui. En revanche, beaucoup se sont demandé si les strates des 10 000-14 999 habitants et des 15 000-19 999 habitants ne posaient pas problème.
Vous le savez, un découpage par strates a été décidé, pour que les résultats soient les plus justes possible et que vous puissiez lire facilement les simulations. Je note avec vous que c’est sur ces strates que les difficultés se concentrent.
M. Pierre-Yves Collombat. Et la dotation forfaitaire ?
Mme Marylise Lebranchu, ministre. On ne peut pas parler d’« intercommunalités palliatives ». Ce n’est pas le mot juste.
M. François Bonhomme. C’est stigmatisant !
M. Pierre-Yves Collombat. Les communes aussi !
Mme Marylise Lebranchu, ministre. Seulement, je constate que, si tout le monde pose cette question, au moment de voter, il n’y a plus personne ! Dans cet hémicycle épars, mesdames, messieurs les sénateurs, dix d’entre vous peut-être seraient prêts à discuter d’une autre façon de lire les intercommunalités.
Les réglages se feront en temps réel. Je ne peux pas aller au-delà de ce qui semble acceptable par les commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, qui se sont réunies et dont on connaît les positions.
Monsieur Botrel, comme beaucoup, vous avez insisté sur les simulations concernant les petites villes et avez proposé un coefficient effort fiscal/ revenu moyen – cela avait d’ailleurs été demandé par l’un de vos collègues qui siège au Comité des finances locales. Nous avons procédé à de telles simulations, elles ne donnaient pas du tout des résultats justes : pour les communes extrêmement riches, ce coefficient était beaucoup plus élevé que pour d’autres. Je dois avouer que nous avons nous-mêmes été surpris par le fait que cet effort fiscal rapporté au revenu moyen, qui serait le seul juste, révolutionnerait la dotation globale de fonctionnement et favoriserait des communes riches. Cela montre tout l’intérêt des simulations.
Monsieur Collombat, vous avez parlé de la fraction péréquatrice de la DGF, soulignant qu’elle servait à faire oublier ce qu'allaient y perdre certains. Oui, la ruralité a des charges. Pour ma part, j’avais demandé que ce que j’appelle les « mètres carrés précieux » – les terres agricoles, les espaces naturels, les périmètres de captage, le zonage NDs, Natura 2000, les parcs, etc. – soient pris en compte pour calculer la dotation globale de fonctionnement. On s’est alors aperçu qu’en rapportant le nombre d’habitants à la superficie on obtenait le coefficient de ruralité.
C’est pourquoi, après beaucoup d’hésitations, nous avons choisi ce ratio, qui donne la densité d’un territoire, c'est-à-dire la ruralité des communes de montagne ou des communes ayant des bois ou des grands périmètres de protection.
Vous avez dit que 75 euros, c’était beaucoup et que les communes de 3 500 habitants perdaient plus que les autres. Ces observations montrent bien que vous avez eu les simulations.