Mme la présidente. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour présenter l'amendement n° II-449 rectifié bis.
M. Vincent Capo-Canellas. Vous l’avez compris, mes chers collègues, cet amendement, qui fait l’objet d’un large soutien politique, transcendant les différents courants représentés dans cet hémicycle, concerne les difficultés que rencontrent les TPE pour accéder au crédit.
Je précise simplement qu’il s’agit de jouer sur le dispositif de provision pour investissement qui existait auparavant. Il s'agit d’en augmenter le plafond, de manière à permettre aux TPE faiblement capitalisées d’investir davantage.
Mme la présidente. L’amendement n° II-458 n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II-275 rectifié, II-430 rectifié et II-449 rectifié bis ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Ces amendements identiques visent à rouvrir la possibilité qu’avaient les TPE d’inscrire une provision en vue d’un investissement qu’elles devaient réaliser dans les cinq ans.
Ce dispositif ne coûtait pas grand-chose, puisqu’il était réservé aux entreprises nouvelles et donc peu utilisé. Il ne s’est d'ailleurs appliqué que pour les exercices clos avant le 1er janvier 2010.
Il s’agit de le rétablir pour les exercices clos avant le 1er janvier 2021, tout en l’élargissant à l’ensemble des TPE, quand l’ancienne formule ne visait que les TPE nouvellement créées.
Bien évidemment, cette mesure risque d’être onéreuse… J’entends déjà M. le secrétaire d'État nous dire qu’elle coûte trop cher ! Et, effectivement, selon l’évaluation de la commission, elle pourrait coûter plusieurs centaines de millions d’euros.
C'est la raison pour laquelle la commission préfère s’en tenir à ce que le Sénat a d'ores et déjà voté en faveur des PME : le dispositif d’amortissement sur les robots industriels, la prolongation, jusqu’au 31 décembre 2016, du « dispositif Macron », à laquelle le Gouvernement paraît lui-même réfléchir, à en croire un article que je lisais tout à l'heure – il semblerait qu’encore une fois le Sénat ait été en avance !
Par conséquent, la commission sollicite le retrait de ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je ne sais pas si le Sénat est en avance ou en retard… (Exclamations.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il est plutôt en avance, monsieur le secrétaire d'État !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Quoi qu’il en soit, je ne vois pas très bien quel sera le niveau du solde budgétaire à l’issue de ses travaux.
En effet, les sénateurs de la majorité ont déjà réduit les recettes de 4,2 milliards d’euros. Depuis ce matin, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez adopté un certain nombre de dispositions coûteuses, concernant notamment des dépenses fiscales.
J’y insiste, je n’ai vu aucune économie dans les amendements que le Sénat a adoptés sur le présent projet de loi de finances ! Tous ont visé à élargir ou l’assiette, ou le taux, ou la durée de dépenses fiscales.
Je me suis dit que vous alliez vous rattraper sur les dépenses… Or vous vous êtes contentés de rejeter un certain nombre de budgets, la plupart du temps au motif que les crédits n’étaient pas suffisants !
Dans ces conditions, je ne vois plus très bien où nous en sommes… Vous aviez promis un tas d’économies pour gommer le manque à gagner issu de la suppression des 4,2 milliards d’euros. Or, avec les nouvelles dépenses fiscales que vous avez votées, il me semble que le solde s’établira à au moins 5 milliards d’euros !
Vous nous proposez d’ajouter encore quelques centaines de millions d’euros de dépenses ! Ma foi, pourquoi pas ? La suppression des crédits de dépenses rendra le tableau d’équilibre absolument illisible.
Vous avez déjà proposé d’arrêter la rémunération d’un grand nombre de fonctionnaires, notamment ceux de la direction générale des finances publiques, la DGFIP – j’en passe et des meilleures ! On ne comprend goutte à votre construction budgétaire !
Toutefois, monsieur le rapporteur général, je partage votre analyse sur cet amendement. Beaucoup de dispositions en faveur de l’amortissement existent déjà, qu’il s’agisse de matériaux spécifiques – je songe aux robots, par exemple – ou du suramortissement, dont le coût s’élève à 2,5 milliards d’euros par générations successives étalées sur cinq ans, soit 500 millions d’euros par an.
L’élargissement de ce dispositif à toutes les entreprises et à tous les investissements, à l’exception – seul élément de prudence contenu dans cet amendement – de ceux qui portent sur les immeubles et les véhicules, me semble coûteux.
Encore une fois, les assemblées ont déjà voté un certain nombre de dispositions visant à favoriser l’amortissement.
Le Gouvernement demande le retrait de ces amendements ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Monsieur Laménie, l'amendement n° II-275 rectifié est-il maintenu ?
M. Marc Laménie. Cet amendement étant cosigné par un grand nombre de mes collègues, je ne suivrai pas, contrairement à mon habitude, les recommandations de notre rapporteur général. Je le maintiens, madame la présidente.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-275 rectifié, II-430 rectifié et II-449 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 45
I. – Après le troisième alinéa du a du I de l’article 219 du code général des impôts, sont insérés cinq alinéas ainsi rédigés :
« Est imposé au taux de 25 % le montant net des plus-values à long terme provenant de la cession :
« 1° Des titres de sociétés dont l’actif est, à la date de la cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par une autorisation d’usage de ressources radioélectriques pour la diffusion de tout service de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique délivrée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel dans les conditions prévues à l’article 30-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ;
« 2° Des titres de sociétés contrôlant une société définie au 1° du présent a et dont l’actif est, à la date de la cession, constitué pour plus de 50 % de sa valeur réelle par les titres d’une société mentionnée au même 1°.
« Les quatrième à sixième alinéas du présent a s’appliquent à la première cession de titres suivant la délivrance de l’autorisation mentionnée au 1° entraînant une modification du contrôle direct ou indirect, au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce, de la société titulaire de l’autorisation. Lorsque cette première cession est placée sous le régime prévu aux articles 210 A et 210 B du présent code, la plus-value réalisée lors de la cession ultérieure des titres reçus en contrepartie de l’apport des titres mentionnés aux 1° et 2° du présent a est imposée au taux prévu au IV, à hauteur de la plus-value d’apport de ces derniers titres.
« Les provisions pour dépréciation afférentes aux titres mentionnés aux 1° et 2° du présent a sont soumises au régime applicable à ces mêmes titres. »
II. – Le I s’applique aux cessions entraînant une modification de contrôle agréée à compter du 30 septembre 2015 en application de l’article 42-3 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication. – (Adopté.)
Article 46
I. – La section 2 du chapitre V du titre Ier du livre Ier du code du cinéma et de l’image animée est ainsi modifiée :
1° Après le deuxième alinéa de l’article L. 115-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’application de cette taxe, est regardée comme un éditeur de services de télévision toute personne qui encaisse les revenus liés aux services de télévision diffusés par un éditeur mentionné au premier alinéa, ainsi qu’à leurs activités connexes, notamment les services de télévision de rattrapage, directement ou par l’intermédiaire d’un régisseur de messages publicitaires et de parrainage ou d’un opérateur de communications électroniques mentionné au c du 1° de l’article L. 115-7. » ;
2° Le premier alinéa du 1° de l’article L. 115-7 est complété par les mots : « et de leurs activités connexes » ;
3° Le premier alinéa du 1° de l’article L. 115-9 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « à la fraction du » sont remplacés par le mot : « au » et, après le mot : « service », la fin est supprimée ;
b) Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Le montant cumulé des sommes mentionnées au a du 1° de l’article L. 115-7, à l’exception de celles relatives aux services de télévision de rattrapage, et des sommes mentionnées au b du 1° du même article fait l’objet d’un abattement de 11 000 000 €. » ;
c) Au début de la seconde phrase, les mots : « Ce seuil » sont remplacés par les mots : « Cet abattement » ;
4° À la fin de la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 115-10, les mots : « majoré de 5 % » sont supprimés ;
5° L’article L. 115-13 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « ou les personnes assurant l’encaissement des sommes versées par les annonceurs et les parrains, » sont supprimés ;
b) Le second alinéa est supprimé.
II. – Pour la taxe due au titre de l’année 2016, les acomptes mensuels ou trimestriels prévus au premier alinéa de l’article L. 115-10 du code du cinéma et de l’image animée dus par les redevables mentionnés au troisième alinéa de l’article L. 115-6 du même code, dans sa rédaction résultant de la présente loi, sont au moins égaux, respectivement, au douzième ou au quart du montant obtenu en appliquant un taux de 5,5 % aux versements mentionnés au 1° de l’article L. 115-7 dudit code, hors taxe sur la valeur ajoutée, constatés en 2015.
III. – Les 1° à 3° du I et le II entrent en vigueur à une date fixée par décret, qui ne peut être postérieure de plus de six mois à la date de réception par le Gouvernement de la réponse de la Commission européenne permettant de regarder le dispositif législatif lui ayant été notifié comme conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aides d’État. – (Adopté.)
Article 46 bis (nouveau)
I. – L’article L. 213-10-9 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le II est complété par un 7° ainsi rédigé :
« 7° Dans la limite d’un maximum de 5 000 mètres cubes par fontaine, les prélèvements destinés exclusivement à l’alimentation en eau des fontaines patrimoniales situées en zone de montagne, à partir d’une ressource classée en catégorie 1, ainsi que la part plafonnée de même manière, destinée à ce même usage, des prélèvements dans une ressource de cette même catégorie pour plusieurs usages. Les fontaines patrimoniales sont celles existant avant 1950. » ;
2° Après le sixième alinéa du V, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’assiette des prélèvements destinés exclusivement à l’alimentation en eau des fontaines patrimoniales situées en zone de montagne, à partir d’une ressource classée en catégorie 2, est fixée forfaitairement à 5 000 mètres cubes par fontaine sauf si elle fait l’objet d’une mesure directe. Le tarif de la redevance est dans ce cas fixé en appliquant l’usage “autres usages économiques”, si l’eau ne subit pas de traitement chimique, hors stérilisation. Ce même tarif est applicable à la part destinée à l’alimentation en eau des fontaines de mêmes caractéristiques que ci-dessus et pour un volume fixé de la même façon, des prélèvements effectués pour plusieurs usages dans une ressource de cette même catégorie. Les fontaines patrimoniales sont celles existant avant 1950. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2016. – (Adopté.)
Article 46 ter (nouveau)
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 3 du I de l’article 257 est abrogé ;
2° L’article 278 sexies est ainsi modifié :
a) Le II est abrogé ;
b) Au 1 du III, les mots : « livraisons à soi-même de » sont supprimés ;
c) Au premier alinéa du 2 du III, les mots : « livraisons à soi-même de » sont supprimés ;
d) Au premier alinéa du 1 du IV, les mots : « livraisons à soi-même de » sont supprimés ;
e) Au 2 du IV, les mots : « livraisons à soi-même de » sont supprimés ;
3° L’article 278 sexies A est ainsi rédigé :
« Art. 278 sexies A. – La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 10 % en ce qui concerne les travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement ou d’entretien des locaux mentionnés aux 2 à 8 du I de l’article 278 sexies, quelle que soit leur ancienneté, y compris sur la part des fournitures de gros équipements mentionnés à l’article 30-00 A de l’annexe IV au code général des impôts, ainsi que sur les travaux d’aménagements d’espaces verts. » ;
4° L’article 284 est ainsi modifié :
a) La première phrase du premier alinéa du II est ainsi rédigée :
« II. – Toute personne qui a acquis ou s’est fait apporter des terrains à bâtir, des logements, le droit au bail à construction ou des droits immobiliers démembrés de logements au taux prévu aux 2 à 12 du I de l’article 278 sexies est tenue au paiement du complément d’impôt lorsque les conditions auxquelles est subordonné l’octroi de ce taux cessent d’être remplies dans les quinze ans qui suivent le fait générateur de l’opération. » ;
b) Le III est abrogé.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
III. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2017.
Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.
L'amendement n° II-225 rectifié quinquies est présenté par MM. Marseille, Delahaye, Kern, Cigolotti, Détraigne, Guerriau, Tandonnet, Bockel et Gabouty, Mmes Gatel, Doineau et Létard et M. L. Hervé.
L'amendement n° II-382 est présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances.
L'amendement n° II-493 est présenté par M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° II-225 rectifié quinquies n’est pas soutenu.
La parole est à M. le rapporteur général, pour présenter l’amendement n° II-382.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je pense que le Gouvernement sera favorable à cet amendement, qui tend à supprimer l’article 46 ter adopté, contre son avis, à l’Assemblée nationale.
Cet article vise à réformer le régime de TVA applicable dans le secteur du logement social, en supprimant le dispositif des livraisons à soi-même. Or cela revient à pénaliser les opérations de construction et de rénovation de logements sociaux, les bailleurs sociaux ne pouvant plus, lorsqu’ils sont maîtres d’ouvrage, bénéficier du taux réduit de TVA à 5,5 %.
Par ailleurs, l’application directe de la TVA pourrait complexifier à l’extrême l’activité des entreprises et des artisans.
Pour ces raisons, nous souhaitons la suppression de cet article 46 ter, adopté par les députés contre l’avis de la commission des finances de l’Assemblée nationale et, je le répète, du Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° II-493.
M. Thierry Foucaud. Une fois n’est pas coutume, nous partageons l’avis de M. le rapporteur général (Exclamations.),…
M. Claude Raynal. C’est un grand moment !
M. Thierry Foucaud. … qui a parfaitement défendu cet amendement !
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement n’était pas favorable à l’adoption de cette disposition à l’Assemblée nationale. Faisant preuve d’une grande cohérence, comme à son habitude, il est favorable à ces amendements de suppression. (Sourires.)
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-382 et II-493.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. En conséquence, l'article 46 ter est supprimé.
Article additionnel après l'article 46 ter
Mme la présidente. L'amendement n° II-505 rectifié bis, présenté par Mmes Keller, Debré et Estrosi Sassone, MM. de Raincourt, Bockel, Bignon, Vaspart, Chaize, César et Joyandet, Mmes Garriaud-Maylam et Micouleau, MM. Soilihi, Grosperrin, Milon, Mouiller, Commeinhes, Bouchet, Gournac et Grosdidier, Mmes Deromedi et Gruny, MM. D. Robert, Charon, B. Fournier, Husson, Delattre et Bizet et Mmes Mélot et Giudicelli, est ainsi libellé :
Après l’article 46 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 278 sexies du code général des impôts est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Les livraisons d’immeubles à usage professionnel situés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville définis à l’article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine et dans les zones franches urbaines – territoire entrepreneurs définies au B du 3 de l’article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d’orientation pour l’aménagement et le développement du territoire. »
II. – Le I s’applique à compter du 1er janvier 2017.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Fabienne Keller.
Mme Fabienne Keller. Ma collègue Jacky Deromedi et moi-même avons souhaité présenter cet amendement relatif aux quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Vous le savez, chers collègues, depuis neuf ans déjà, le taux réduit de TVA de 5,5 % s’applique pour la construction de logements en accession dans ces quartiers, ainsi qu’à une bande élargie de 300 mètres autour de ces derniers.
Cet amendement vise tout simplement à étendre ce dispositif aux opérations immobilières d’entreprise, afin d’assurer une meilleure mixité.
Nous le savons, l’emploi vient difficilement dans ces quartiers. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons l’encourager.
Faciliter la construction d’immobilier d’entreprise accueillant, bien sécurisé, bien aménagé est un facteur d’attractivité. Les quinze points de TVA que nous proposons, par cet amendement, de faire gagner à certains professionnels, notamment ceux qui ont besoin d’une surface importante, permettront d’améliorer l’attractivité et de conforter la vitalité de ces quartiers, souvent fragiles en termes d’emploi.
Il est important que les jeunes qui grandissent dans les quartiers fragiles côtoient l’emploi et les entreprises, qu’ils aient l’occasion de voir des camionnettes circuler, des personnes travailler, comme autant de repères dans leur parcours.
L’activité économique est essentielle à l’équilibre du rythme de vie des quartiers prioritaires de la politique de la ville.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On ne peut que partager les propos de Fabienne Keller sur l’intérêt d’implanter des immeubles à usage professionnel dans les quartiers prioritaires de la ville…
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Quand on commence comme ça, c’est souvent mauvais signe… (Sourires.)
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Et vous en savez quelque chose, monsieur le secrétaire d’État ! (Nouveaux sourires.)
Tout dispositif visant à abaisser le taux de TVA doit être conforme à la directive communautaire. Or le droit communautaire prévoit l’applicabilité du taux réduit pour la construction ou la rénovation de logements sociaux. A priori, les locaux à usage professionnel n’y semblent pas éligibles.
C'est la raison pour laquelle la commission demande le retrait de cet amendement dont le coût, qu’elle n’a pu chiffrer, semble élevé.
Peut-être le Gouvernement aura-t-il une analyse différente de la sienne ?
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le Gouvernement se doit de vous rappeler, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’il y a lieu de respecter les règles communautaires, notamment en matière de TVA.
Vous avez adopté un amendement voilà quelques instants dont j’ai dit qu’il était complètement contraire au droit européen. Vous pouvez continuer. Cela a déjà été fait par le passé, et nous le payons encore, très cher.
Comme l’a rappelé le rapporteur général, les dispositions de cet amendement sont clairement contraires au droit européen : seuls les logements ayant un caractère social peuvent être éligibles au taux réduit de TVA. Les immeubles à destination des entreprises, des professionnels que vous ciblez sont donc en dehors du champ prévu.
J’ajoute que le dispositif de récupération de la TVA sur les loyers peut s’avérer intéressant pour les professionnels en question.
Si cet amendement était maintenu, le Gouvernement y serait défavorable.
Mme la présidente. Madame Keller, l'amendement n° II-505 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Fabienne Keller. Je veux insister sur l’intérêt d’aménager ces quartiers de manière équilibrée et diverse.
J’entends le raisonnement sur l’incompatibilité éventuelle de mon amendement avec le droit communautaire, mais j’aimerais en être certaine avant de le retirer. Il me semble que l’Europe a bon dos. Je m’étonne qu’elle empêche d’encourager la mixité !
Cet écart de TVA à la construction, monsieur le secrétaire d’État, permettrait de créer une offre nouvelle et de qualité, d’encourager une dynamique, qu’il s’agisse de pépinières ou de locaux définitifs !
Est-il possible, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur général, d’avoir des certitudes sur cette incompatibilité, ainsi que des pistes sur l’évolution des textes ?
Je ne me résous pas à l’idée que l’Europe empêche de développer la mixité sociale dans nos quartiers fragiles !
Mme la présidente. La parole est à M. le secrétaire d'État.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Je voudrais vous apporter quelques précisions, madame Keller.
Tout d’abord, on n’a jamais de certitude sur une question tant que la Cour de justice de l’Union européenne n’a pas rendu d’arrêt. Pour autant, la lecture que nous faisons de la directive ne laisse pas de place au doute : les locaux à usage professionnel ne sont pas éligibles au taux réduit.
S’agissant ensuite de la mixité, je vous rappelle que nous avons déjà adopté, à destination des entreprises se trouvant soit dans les zones franches urbaines, soit dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, des dispositifs d’exonérations fiscales en matière d’impôt sur les bénéfices ou d’impôt foncier – je pense à la cotisation foncière des entreprises, ou CFE, et à la taxe foncière sur les propriétés bâties, ou TFPB. Ces dispositifs souscrivent à votre objectif, que nous partageons.
S’agissant enfin des évolutions futures, j’ai déjà eu l’occasion de dire que la Commission réfléchissait à une évolution des règlements communautaires relatifs à la TVA. Les premiers travaux commenceront au début de l’année prochaine. On peut donc s’attendre à ce que fin 2016, ou début 2017, une nouvelle directive puisse faire évoluer la réglementation européenne relative aux taux de TVA.
Certes, la France pourrait alors faire valoir un certain nombre de propositions, mais je préfère rester prudent, par souci de réalisme. En l’état actuel des traités, les évolutions de fiscalité en la matière doivent en effet être décidées à l’unanimité des États membres.
Cela reste une piste d’évolution, le cas échéant. Si la Commission décidait d’inclure ce type d’investissements dans l’éligibilité à un taux réduit, pourquoi pas ? Toujours est-il que je ne vois pas d’issue positive avant, au mieux, le début de l’année 2017.
Mme la présidente. Dans ces conditions, madame Keller, l'amendement n° II-505 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Fabienne Keller. Oui, madame la présidente.
Mme la présidente. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
M. Claude Raynal. Je suis un peu étonné du tour que prennent nos débats.
M. Cardoux, voilà quelques instants, avait une posture révolutionnaire. Il voulait renverser la table européenne !
Je crois que la Haute Assemblée gagnerait beaucoup à ne pas adopter d’amendements allant, de manière claire, à l’encontre des règlements européens. (Mme Fabienne Keller marque sa désapprobation.)
Le rapporteur général vous l’a indiqué de manière certaine, madame Keller. Je ne crois pas qu’il faille continuer dans cette voie.
Chaque fois que l’on nous oppose le droit européen, quelles qu’en soient les raisons, il faut l’admettre et travailler de nouveau la question.
Ces règlements européens ont été adoptés à l’unanimité, ce qui signifie que notre pays les agrée. Nous ne pouvons revenir dessus que dans le cadre d’une réflexion européenne et non en adoptant un amendement qui nous exposera immanquablement à des pénalités, sauf à ne pas être crédibles et à compter sur l’Assemblée nationale pour rectifier les choses et nous ramener dans le droit. Or je ne crois pas qu’il s’agisse d’une bonne manière de légiférer.
Vous maintenez votre amendement, mais j’espère que le Sénat ne l’adoptera pas.
Mme la présidente. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.