M. Rémy Pointereau. Le présent amendement vise à inscrire dans la Constitution l’obligation pour l’État de compenser aux collectivités territoriales les conséquences financières des normes nouvelles, législatives ou réglementaires, qui leur sont applicables.
M. Charles Revet. Très bien !
M. Rémy Pointereau. Cette compensation pourrait s’effectuer selon deux modalités : la suppression de mesures représentant une charge équivalente ou l’attribution de ressources financières.
En définitive, le dispositif proposé permettrait l’application du principe prescripteur-payeur à toute norme coûteuse prise dans l’un des domaines de compétences existantes des collectivités territoriales.
Puisqu’il me reste du temps, permettez-moi, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, de vous faire part, à titre d’exemple, du courrier que j’ai reçu de M. le maire et président de la métropole de Châteauroux. À la suite d’une révision du règlement de la Ligue de football professionnel, ce dernier avait mis en place en 2011 un terrain de jeu synthétique pour un montant de 900 000 euros. La Fédération française de football s’était réjouie de cet investissement exceptionnel. Or une modification récente de l’article 117 du règlement précité interdit le déroulement de matchs de football sur les terrains synthétiques pour les Ligues 1 et 2 à compter de la saison 2018-2019. Vous le pensez bien, M. le maire de Châteauroux est très satisfait de cette nouvelle norme !
Voilà un exemple concret des sujets que traitent les collectivités locales, qui n’en peuvent plus de se mettre aux normes de toutes les fédérations françaises sportives.
Nous avons donc travaillé à cette proposition de loi constitutionnelle afin que le principe de compensation des charges applicables aux collectivités territoriales soit inscrit dans la Constitution, tout comme le principe de précaution. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Favorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Alain Vasselle, pour explication de vote.
M. Alain Vasselle. Je ne suis pas intervenu dans la discussion générale, mais nous avons largement débattu de cette proposition de loi au sein de la commission des lois, dont je fais partie.
Cela étant, je me réjouis du dépôt de cet amendement par Rémy Pointereau, et je l’aurais cosigné si j’en avais eu l’occasion, parce qu’il tend à introduire une disposition qui ne figurait pas initialement dans le texte examiné par la commission des lois : celui-ci se contentait de faire référence à l’évaluation nécessaire de nouvelles normes qui seraient introduites à travers un texte législatif. Or si nous nous étions contentés de ces dispositions, cela aurait été à mon sens un coup d’épée dans l’eau.
Mes chers collègues, je rappelle que tout texte de loi doit dorénavant être accompagné d’une étude d’impact. Or, et c’est une difficulté que nous rencontrons aujourd’hui, le Conseil constitutionnel, lorsqu’il examine les textes, s’intéresse peu au contenu de ces études d’impact, pourtant essentielles. Ce sont elles qui permettent d’apprécier la pertinence d’un texte, mais également sa faisabilité lors de son application sur le terrain, dans nos collectivités, nos territoires.
Dans le contexte particulièrement difficile que nous connaissons actuellement, le problème de l’évolution des normes et du poids des charges qu’elles représentent pour nos collectivités nous appelle inévitablement à nous poser la question de savoir si les nouvelles normes ou les nouveaux textes de loi adoptés qui entraînent des charges nouvelles pour nos collectivités font l’objet d’une compensation.
Les exemples sont multiples – je ne les citerai pas – : on a constaté au fil du temps que l’on a transféré du niveau de l’État ou par le biais de normes des charges nouvelles sans qu’aucune compensation financière ait été consentie. Il est un peu facile ensuite de dénoncer la progression trop forte de notre fiscalité et le poids des dépenses de nos collectivités !
M. Antoine Lefèvre. Tout à fait !
M. Alain Vasselle. À travers cet amendement, M. Pointereau fait donc œuvre utile. Je me réjouis que la commission ait émis un avis favorable sur cet amendement, que j’invite la Haute Assemblée à approuver très majoritairement, voire unanimement ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 1er, modifié.
(L'article 1er est adopté.)
Article additionnel après l’article 1er
M. le président. L'amendement n° 5, présenté par M. Vial, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le quatrième alinéa de l’article 72-2 de la Constitution est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après le mot : « territoriales », sont insérés les mots : « ou entre collectivités territoriales » ;
2° À la seconde phrase, les mots : « déterminées par la loi » sont remplacés par les mots : « équivalentes à leur montant estimé » ;
3° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :
« Les ressources ainsi attribuées pour la compensation des transferts, créations ou extensions de compétences font l’objet d’une réévaluation régulière. Les modalités de mise en œuvre du présent alinéa sont fixées par une loi organique. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Le présent amendement vise à modifier l’article 72-2 de la Constitution, afin d’y introduire deux dispositions.
Il s’agit, d’une part, d’élargir le principe d’une compensation pour le transfert d’une compétence entre collectivités territoriales, même si la loi NOTRe a adapté les principes déjà prévus pour le transfert d’une compétence entre l’État et les collectivités territoriales à ce cas d’espèce.
Il s’agit, d’autre part, d’introduire le principe d’une réévaluation régulière de la compensation des transferts, créations et extensions de compétences. En effet, si la compensation obéit à des règles précises, elle s’avère souvent déconnectée, dans les années suivant le transfert, des charges effectivement supportées par les collectivités territoriales, comme en témoignent les compétences sociales des départements. Ainsi, en prévoyant le principe d’une réévaluation régulière définie par une loi organique, chaque collectivité territoriale bénéficiera de ressources de compensation qui lui permettront d’exercer les compétences qui lui sont transférées, étendues ou créées.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je soutiens la proposition de M. le rapporteur.
L’enjeu financier lié au poids des normes a déjà été largement souligné. Il faut mesurer aussi que la multitude des normes et des contraintes financières auxquelles les collectivités territoriales sont soumises, sans forcément percevoir les compensations nécessaires, est une source de tracas quotidiens pour les élus de base.
La confiance est essentielle dans les relations entre les autorités publiques, surtout à l’heure où l’on parle beaucoup de transparence, de bonne information et de bonne communication. En vérité, il faut un partenariat de confiance entre l’État et l’ensemble des collectivités territoriales !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi constitutionnelle, après l’article 1er.
Article 2
Après l’article 88-7 de la Constitution, il est inséré un article 88-8 ainsi rédigé :
« Art. 88-8. – Les mesures assurant la transposition d’un acte législatif européen n’excèdent pas les objectifs poursuivis par cet acte. »
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par M. Vandierendonck et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. René Vandierendonck.
M. René Vandierendonck. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Vial, rapporteur. Défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi constitutionnelle, je donne la parole à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.
M. Rémy Pointereau. Je remercie les membres de la commission des lois et tous mes collègues qui s’apprêtent à voter cette proposition de loi constitutionnelle.
Monsieur Vandierendonck, vous avez affirmé, en défendant la motion tendant à opposer la question préalable, que ce texte avait été conçu dans l’improvisation, ce dont témoignerait sa réécriture complète par la commission des lois, et qu’il ne répondait pas à l’objectif recherché. Reconnaissez que, pour une improvisation, le résultat n’est pas si mauvais !
Mme Catherine Troendlé. En effet !
M. Rémy Pointereau. J’ajoute que votre propos n’était pas très aimable pour vos collègues auteurs de la proposition de loi constitutionnelle. Je ne vous en estime pas moins, mais je constate que, d’habitude, vous êtes beaucoup plus élégant et modéré !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi constitutionnelle tendant à favoriser la simplification du droit pour les collectivités territoriales et à encadrer la transposition des directives européennes.
En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.
Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 120 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 336 |
Pour l’adoption | 187 |
Contre | 149 |
Le Sénat a adopté. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.)
23
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant n’est pas parvenue à l’adoption d’un texte commun.
24
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 13 janvier 2016 :
De quatorze heures trente à dix-huit heures trente :
Proposition de résolution tendant à limiter le poids de la réglementation applicable aux collectivités territoriales et à simplifier certaines normes réglementaires relatives à l’urbanisme et à la construction présentée en application de l’article 34-1 de la Constitution (n° 198 rectifié, 2015-2016).
Proposition de loi visant à instaurer un Jour de Mémoire pour perpétuer notre histoire, sensibiliser les jeunes aux sacrifices de leurs anciens et aux valeurs républicaines de la nation française (n° 145, 2015-2016) ;
Rapport de M. Claude Kern, fait au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication (n° 271, 2015-2016) ;
Résultat des travaux de la commission (n° 272, 2015-2016).
De vingt et une heures à une heure :
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, d’expérimentation territoriale visant à faire disparaître le chômage de longue durée (n° 246, 2015-2016) ;
Rapport de Mme Anne Emery-Dumas, fait au nom de la commission des affaires sociales (n° 266, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 267, 2015-2016).
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire (n° 245, 2015-2016) ;
Rapport de Mme Chantal Jouanno, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 268, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 269, 2015-2016).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures trente-cinq.)
Le Directeur du Compte rendu intégral
FRANÇOISE WIART