M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, je vous rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu mardi prochain 2 février, de seize heures quarante-cinq à dix-sept heures trente, et seront retransmises sur Public Sénat et le site internet du Sénat.
Avant d’aborder le point suivant de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux quelques instants ; nous les reprendrons à seize heures quinze.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)
PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
9
Candidature à une délégation sénatoriale
Mme la présidente. J’informe le Sénat que le groupe Les Républicains a fait connaître à la présidence le nom du candidat qu’il propose pour siéger à la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes en remplacement de M. Alain Houpert, démissionnaire.
Cette candidature a été affichée et la nomination aura lieu conformément à l’article 8 du règlement.
10
Sécurité publique dans les transports collectifs de voyageurs
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. Nous reprenons la discussion de la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la prévention et à la lutte contre les incivilités, contre les atteintes à la sécurité publique et contre les actes terroristes dans les transports collectifs de voyageurs.
Dans la suite de la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 2.
Article 2 (suite)
Mme la présidente. L'amendement n° 31 rectifié, présenté par MM. Bigot, J.C. Leroy, Filleul et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
« Sans préjudice des compétences des inspecteurs et contrôleurs du travail, ils peuvent demander la communication du registre unique du personnel prévu aux articles L. 1221-13 et L. 1221-15 du code du travail et de tous autres registres, livres et documents mentionnés aux articles L. 3171-3, L. 8113-4 et L. 8113-5 du même code ainsi que recueillir, sur convocation ou sur place, les renseignements et justifications nécessaires.
« En présence de l'occupant des lieux ou de son représentant, ils peuvent, entre huit heures et vingt heures, accéder aux locaux dans lesquels est habituellement exercée l’activité des agents des services internes de sécurité visés au premier alinéa ; ils peuvent également y accéder à tout moment lorsque l'exercice de cette activité est en cours. Ils ne peuvent accéder à ceux de ces locaux qui servent de domicile.
« Un compte rendu de visite est établi, dont copie est remise immédiatement au responsable de l'entreprise et adressé aux autorités mentionnées au premier alinéa.
La parole est à M. Jacques Bigot.
M. Jacques Bigot. Je ne suis pas sûr que cet amendement puisse encore s’intégrer dans le texte, l’adoption de l’amendement n° 37 présenté par le Gouvernement ayant modifié la rédaction de l’article 2.
Je vais néanmoins le soutenir, parce qu’il s’agit d’une proposition de modification de l’alinéa 8 – ce qui, à mon sens, devrait pouvoir être possible – qui, si mes souvenirs sont exacts, a reçu un avis favorable de la commission.
L’article 2 de la proposition de loi instaure un encadrement spécifique relatif au contrôle administratif des activités opérationnelles des services de sécurité de la SNCF et de la RATP.
Le présent amendement tend à aligner le régime de contrôle des agents de sécurité des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP sur qui est celui mis en place à l’article L. 611-2 du code de la sécurité intérieure pour le contrôle des activités de surveillance et de gardiennage. Il vise notamment à étendre la possibilité de communiquer les registres uniques du personnel aux inspecteurs et contrôleurs du travail, ainsi que le recours à des mesures particulières de perquisition applicables aux agents des services de sécurité.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Cet amendement tend à renforcer le dispositif adopté par la commission en détaillant le contrôle qui peut être effectué par les agents des forces de l’ordre dans le cadre des missions de contrôle des agents de services internes. La commission émet donc un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée de la réforme de l'État et de la simplification. Vous proposez d’ajouter des dispositions supplémentaires relatives au contrôle administratif des agents du Groupe de protection et de sécurisation des réseaux, le GPSR.
Ces dispositions ne nous semblent pas adaptées au contrôle opérationnel des agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la RATP. En effet, l’article que vous proposez de transposer a été conçu pour s’appliquer au secteur de la sécurité privée, dont certaines entreprises ont pu adopter des pratiques peu respectueuses du code du travail.
Il en va différemment à la SNCF et à la RATP. Il ne nous paraît donc pas nécessaire que les agents de la Surveillance générale, la SUGE, et du GPSR soient soumis à des règles de droit du travail différentes de celles qui sont applicables aux autres agents de la SNCF et de la RATP.
Le Gouvernement a en outre proposé un amendement visant à réécrire l’article 2 de la proposition de loi. Dans ce cadre, le contrôle opérationnel mené par les forces de l’ordre sera davantage axé sur les prérogatives particulières des agents de la SUGE et du GPSR.
Pour ces raisons, je sollicite le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Monsieur Bigot, l'amendement n° 31 rectifié est-il maintenu ?
M. Jacques Bigot. Je le maintiens, madame la présidente, car je pense qu’il peut toujours s’articuler à l’article 2 malgré les modifications qui sont intervenues.
Il me semble logique que les agents de la SNCF et de la RATP, bien qu’ils aient un statut différent de celui des salariés des entreprises privées, soient soumis à ce contrôle, qu’il soit possible de vérifier certains documents et de procéder à des visites domiciliaires. Il s’agirait d’une protection supplémentaire.
Mme la présidente. L'amendement n° 43, présenté par M. Bonhomme, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 10
Insérer deux alinéas ainsi rédigés :
…° Le même chapitre est complété par un article L. 2251-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2251-… – Les compétences dévolues au représentant de l’État dans le département par le présent chapitre sont exercées dans les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que dans les transports en commun de voyageurs par voie ferrée de la région d'Île-de-France, par le préfet de police et dans le département des Bouches-du-Rhône par le préfet de police des Bouches-du-Rhône. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement est devenu sans objet à la suite de l’adoption de l’amendement n° 37 du Gouvernement. Aussi, je le retire, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 43 est retiré.
Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article additionnel après l’article 2
Mme la présidente. L'amendement n° 27, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l'article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le quatrième alinéa de l’article L. 632-2 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 4° De six parlementaires. »
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
M. Jean-Pierre Bosino. La volonté d’extension des compétences du Conseil national des activités privées de sécurité, le CNAPS, ne peut se faire sans un renforcement du contrôle démocratique.
Au vu de l’actualité, malheureusement, nous pensons qu’il est important d’assurer la présence de parlementaires au sein du CNAPS. En effet, l’éthique est aujourd’hui plus que jamais une exigence qui émane avant tout d’une demande citoyenne d’exemplarité ou d’honorabilité. Cela est d’autant plus important que le marché de la sécurité privée est en pleine expansion, son chiffre d’affaires global s’élevant à près de 5 milliards d’euros.
Ce marché compte près de trois mille entreprises, mais parmi celles-ci seulement trente, soit 1 %, emploient plus de 500 salariés et réalisent 55 % du chiffre d’affaires global de la profession. En outre, les marchés publics représentent plus de 25 % du chiffre d’affaires global de la branche et la sous-traitance y est malheureusement une pratique trop courante.
Pour toutes ces raisons, il nous semble pertinent que la représentation nationale puisse siéger au sein du CNAPS.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur. Le fait d’introduire la présence de parlementaires dans ce type d’organismes nous paraît contraire à l’objectif visé.
Les parlementaires disposent en effet d’un pouvoir de contrôle, qu’ils l’exercent dans le cadre d’une commission d’enquête ou dans le cadre du simple droit d’interpellation. Systématiser ce genre de situation reviendrait à congestionner et à dénaturer le travail parlementaire.
La commission émet donc un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 27.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 3
L’article L. 2251-3 du code des transports est ainsi rédigé :
« Art. L. 2251-3. – La tenue et la carte professionnelle dont les agents des services internes de sécurité de la SNCF et de la Régie autonome des transports parisiens sont obligatoirement porteurs dans l’exercice de leurs fonctions ne doivent entraîner aucune confusion avec celles des agents des services publics, notamment des services de police.
« Ces agents peuvent être dispensés du port de la tenue dans l’exercice de leurs fonctions.
« En cas d’intervention, ces agents sont porteurs, de façon visible, de l’un des moyens matériels d’identification dont ils sont dotés, qui ne doivent entraîner aucune confusion avec les moyens utilisés par les agents des services publics.
« Les conditions d’application du présent article sont fixées par voie réglementaire. » – (Adopté.)
Article 3 bis
Le chapitre IV du titre Ier du livre Ier du code de la sécurité intérieure est complété par un article L. 114-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 114-2. – Les décisions de recrutement et d’affectation concernant les emplois relevant du domaine du transport collectif de personnes peuvent être précédées d’enquêtes administratives destinées à vérifier que le comportement des personnes intéressées n’est pas incompatible avec l’exercice des fonctions ou des missions envisagées. L’autorité administrative compétente informe l’employeur du résultat de l’enquête.
« Si le comportement des personnes intéressées est devenu incompatible avec l’exercice des missions pour lesquelles elles ont été recrutées ou affectées, une enquête administrative peut être menée à la demande de l’employeur. L’autorité administrative avise sans délai l’employeur du résultat de l’enquête.
« Un décret en Conseil d’État fixe la liste des fonctions concernées et détermine les modalités d’application du présent article. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 3 rectifié, présenté par MM. Nègre, Revet et Charon, n’est pas soutenu.
L'amendement n° 41, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le chapitre premier du titre III du livre VI de la première partie du code des transports est complété par un article L. 1631-… ainsi rédigé :
« Art. L. 1631-… – Le recrutement, l’affectation ou le maintien d’une personne, au sein d’une entreprise de transport public de personnes, ou d’une entreprise de transport de marchandises dangereuses soumise à l’obligation d’adopter un plan de sûreté, sur une fonction en lien direct avec la sécurité d’un grand nombre de personnes, peut être soumis à l’avis de l’autorité administrative.
« Cet avis indique si le comportement de cette personne donne des raisons sérieuses de penser qu’elle est susceptible, à l’occasion de ses fonctions, de commettre un acte portant gravement atteinte à la sécurité ou à l’ordre publics.
« Il est rendu à la suite d’une enquête administrative qui peut donner lieu à la consultation du bulletin n° 2 du casier judiciaire et de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l’article 26 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, à l’exception des fichiers d’identification.
« La personne concernée est informée qu’elle est susceptible de faire l’objet de l’enquête administrative mentionnée au deuxième alinéa du présent article.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. Il établit notamment la liste des fonctions pour lesquelles la procédure mentionnée au premier alinéa peut être mise en œuvre, ainsi que la liste des traitements automatisés de données pouvant faire l’objet d’une consultation dans ce cadre. »
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Les exploitations de transports collectifs sont de plus en plus souvent confrontées à des phénomènes de radicalisation et se trouvent démunies pour répondre à ce type de risque. Des mesures de criblage existent déjà, mais elles ne concernent que les agents des services de sécurité de la SNCF et de la RATP.
La loi prévoit en effet que les agents de la SUGE et les agents du GPSR font l’objet d’une enquête administrative destinée à vérifier que leur comportement n’est pas incompatible avec l’accomplissement de leur mission. L’article L. 2251-2 du code des transports impose un contrôle de moralité.
Cependant, le sujet dépasse largement le cadre des services internes de sécurité et des opérateurs historiques que sont la SNCF et la RATP. Cette faculté de recourir à des mesures de criblage doit être élargie, nous semble-t-il, non seulement à certaines fonctions sensibles, mais aussi à tous les opérateurs de transport, ainsi qu’au transport de certaines marchandises dangereuses.
Le présent amendement vise donc à réécrire l’article 3 bis sur les enquêtes administratives pouvant être réalisées sur certaines personnes appelées à exercer, dans les entreprises de transport public et de personnes, des fonctions en lien direct avec la sécurité d’un grand nombre de personnes.
Il vise également à clarifier les conditions dans lesquelles l’avis de l’autorité administrative peut être sollicité : en amont du recrutement d’une personne, mais aussi à l’occasion d’une nouvelle affectation ou en cours d’exercice des fonctions de celle-ci. L’autorité administrative pourra donc être sollicitée à ces trois occasions.
Le présent amendement tend par ailleurs à étendre le dispositif aux entreprises de transport de marchandises dangereuses soumises à l’obligation d’adopter un plan de sûreté.
Enfin, il tend à préciser les objectifs de la procédure d’avis : l’avis de l’autorité administrative permet de vérifier que l’agent n’est pas susceptible de commettre, dans l’exercice de ses fonctions, un acte portant gravement atteinte à la sécurité publique, à l’ordre public ou à la sécurité des personnes. Nous proposons donc d’élargir l’objectif de cet avis.
Le décret d’application de cet article sera soumis à l’avis préalable de la CNIL, dès lors qu’est en cause la consultation de fichiers intéressant la sécurité publique ou la sûreté de l’État mentionnés à l’article 26 de la loi de 1978.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur. La commission n’a pas pu se prononcer sur cet amendement.
Néanmoins, à titre personnel, j’y suis défavorable dans la mesure où il tend à réécrire quelque chose qui existe déjà.
De plus, la partie concernant l’information de la personne qui est susceptible de faire l’objet de l’enquête administrative mentionnée au deuxième alinéa me paraît dans sa rédaction imprécise et source de confusion, voire contre-productive par rapport à l’objectif affiché.
Mme la présidente. L'amendement n° 33 rectifié, présenté par MM. Bigot, J.C. Leroy, Filleul et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« La personne concernée est informée de l’enquête administrative dont elle fait l’objet.
La parole est à M. Jacques Bigot.
M. Jacques Bigot. Il paraît conforme aux règles d’un État de droit qu’une personne visée par une enquête administrative en soit informée. Il n’y a pas de raison qu’elle ne le soit pas.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur. Défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. J’aimerais avoir une précision. La commission pourrait-elle justifier son avis défavorable sur cet amendement ?
Pour ma part, je rejoins l’argumentaire défendu par notre collègue Jacques Bigot : il me paraît évident d’informer – ni plus ni moins – la personne visée par une enquête administrative. L’avis défavorable de la commission me laisse, je l’avoue, très perplexe.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement prévoit que la personne faisant l’objet d’une enquête administrative est informée de la situation, sur le modèle de ce qui existe pour l’enquête réalisée pour accéder aux points d’importance vitaux de l’entreprise, par exemple.
Néanmoins, il nous paraît contre-productif de prévenir cette personne qu’elle fait l’objet d’une telle enquête, alors même que les conclusions ne sont pas encore connues. En tout état de cause, si l’enquête conclut à un déplacement ou à un licenciement de la personne, celle-ci en sera nécessairement informée.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 3 bis.
(L'article 3 bis est adopté.)
Article additionnel après l'article 3 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Karoutchi et Houel, Mme Mélot, MM. Cornu et Vaspart, Mme Cayeux, MM. Laufoaulu, Doligé, Leleux, Chaize, Cambon, D. Laurent, Lefèvre et Mayet, Mme Primas, MM. Mouiller, Milon et Houpert, Mme Deroche, MM. B. Fournier et Joyandet et Mmes Lopez et Gruny, est ainsi libellé :
Après l'article 3 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre VI du livre II du code de la sécurité intérieure est complété par un chapitre IV ainsi rédigé :
« Chapitre IV
« Partage d’informations en matière de sécurité intérieure
« Art. L. 264. – Le représentant de l’État dans le département, sur la base des informations transmises par les services de police ou de gendarmerie, transmet aux employeurs publics ainsi qu’aux employeurs de secteurs dits sensibles dont la liste est définie par décret en Conseil d’État la liste de ceux de leurs salariés qui font l’objet d’un signalement “fiche S”. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. On le répète depuis ce matin, les transports publics sont, par définition, anxiogènes dans la mesure où ils sont une cible potentielle et facile du terrorisme, qu’il s’agisse du métro, des RER ou des trains. Des attentats dans les transports ont malheureusement eu lieu ailleurs, et notre pays en a également connu dans le passé. C’est donc là un vrai sujet.
Les directions de la SNCF et de la RATP le reconnaissent, elles ne savent pas, ces informations ne leur étant pas communiquées, qui, parmi leurs personnels, notamment de conduite, fait l’objet d’une fiche dite « S » ou « S+ » – il paraît que ces fiches existent maintenant –, qui concerne les personnes susceptibles d’avoir un comportement particulièrement dangereux. Excusez-moi de vous le dire : je ne suis pas sûr que cela contribue à rassurer l’usager !
Dans la mesure où nos services sont au courant des activités non pas de l’ensemble des fichés S, mais des plus dangereux d’entre eux, ne serait-il pas normal d’en informer – elles décideront ensuite de la suite à donner – les entreprises de transport qui emploient certains d’entre eux sans le savoir, dans la mesure où ces derniers peuvent évidemment représenter un véritable danger ?
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur. Bien que je comprenne les motivations qui le sous-tendent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui prévoit la possibilité pour le préfet de transmettre aux employeurs publics et aux entreprises privées de secteurs sensibles les informations relatives au fichage de leurs employés. D’ailleurs, un amendement identique a été repoussé par la commission.
En effet, cette obligation aurait des effets, semble-t-il, très négatifs sur le fonctionnement du renseignement en France, avec la divulgation des informations contenues dans les fiches S.
Tout l’intérêt de ces fiches réside justement, par nature, allais-je dire, dans le fait que les personnes qui en font l’objet ne le savent pas. L’adoption de cet amendement aurait des effets contraires à ceux qui sont recherchés et risquerait d’affaiblir durablement le renseignement en France.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, sur la base de la même argumentation.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, je suis admiratif ! Enfin, quasi admiratif !
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Merci !
Mme Esther Benbassa. Cela ne se voit pas !…
M. Roger Karoutchi. Alors, il vaut mieux ne rien savoir ? Il est préférable de laisser les services de renseignement agir comme ils le font actuellement ? Mais que dira-t-on si jamais un attentat est commis ? Qu’on ne savait pas ? Mais, mes chers collègues, figurez-vous que la SNCF et la RATP s’empresseront de dire qu’elles n’étaient pas informées !
Nos services de renseignement ne devraient surtout pas diffuser quoi que ce soit ? Mais si l’entreprise ne sait pas qu’elle emploie une personne particulièrement dangereuse, susceptible de commettre un attentat, ne serait-ce que potentiellement, que se passera-t-il en cas de problème ? Que direz-vous alors aux usagers ? Que vous avez agi ainsi pour protéger la qualité des services de renseignement ? Sincèrement, dans quel monde vivons-nous ?
Je respecte la liberté de chacun, mais si c’est de cette façon que vous faites la guerre au terrorisme, excusez-moi de vous le dire, il s’agit franchement d’une guerre en dentelle !
Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Monsieur le sénateur, j’ai du mal à comprendre le cheminement de votre raisonnement.
M. Roger Karoutchi. C’est dommage !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Je vous ai écouté avec attention, et j’essaie de comprendre la cohérence qui est la vôtre d’un article à l’autre, d’un amendement à l’autre. Moi, j’essaie d’être cohérente.
Voilà quelques minutes, je vous ai proposé à l’article 3 bis un amendement concernant ce que nous appelons « le criblage ».
M. Roger Karoutchi. Je n’ai pas voté contre !
Mme Catherine Procaccia. Non, il n’a pas voté contre !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Cela veut dire que vous avez compris le fond de cet amendement et que vous êtes d’accord avec celui-ci.
M. Roger Karoutchi. Voilà !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. Mais peu importe, car, comme vous l’avez constaté vous-même, cet amendement a été repoussé par la Haute Assemblée ! Moi je ne détaille pas les positions de chacun.
Toujours est-il que je vous ai présenté précédemment, au nom du Gouvernement, en essayant d’être pédagogique et précise, un amendement visant à élargir considérablement le processus, afin de bien prendre en compte tous les risques qui peuvent apparaître lors du recrutement, dans l’exercice des fonctions courantes, c'est-à-dire à tout moment – on peut difficilement faire plus large ! –…
M. Roger Karoutchi. Eh oui ! Et je n’ai pas voté contre, je le répète !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. … et lors des mutations.
Avec cet amendement, nous avions veillé à couvrir le champ le plus large pour répondre, monsieur le sénateur,…
M. Roger Karoutchi. C’est pour cette raison que je n’ai pas voté contre !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. … comme il le fallait, à la nécessité de faire preuve de la plus grande vigilance, une vigilance constante, sans relâchement aucun, pour atteindre l’objectif que nous partageons avec vous.
L’amendement que vous proposez prévoit la transmission des fiches S, qui constituent des signalements. Or, comme l’a relevé à juste titre M. le rapporteur, ces fiches doivent rester confidentielles (M. Roger Karoutchi rit) et ne doivent pas être diffusées.
M. Roger Karoutchi. Les personnes fichées peuvent donc conduire des trains, des métros et des RER !
Mme Clotilde Valter, secrétaire d'État. On fournit à l’employeur la liste des personnes faisant l’objet d’un signalement, mais une personne privée n’a pas à connaître les éléments de fond dont disposent les services de renseignement.
Je persiste à penser que, s’il avait été adopté,…
M. Roger Karoutchi. Mais il ne l’a pas été !