M. Serge Larcher. Monsieur le secrétaire d’État, vous vous doutez bien que cette proposition ne vient pas de nulle part : dans nos territoires d’outre-mer, la profession éprouve une réelle appréhension chaque fois qu’elle doit faire face à des difficultés : elle redoute de ne pas voir fonctionner la solidarité nationale.
C’est de ce constat que découle l’idée initiale : puisque ces soutiens ne viennent pas nécessairement, ne pourrait-on pas dédier une partie des aides à l’outre-mer ?
Vous soulignez que ce dispositif poserait des difficultés quant à l’affectation des fonds européens. J’en ai conscience. Mais admettez du moins l’existence d’un problème ! Nous sommes très souvent confrontés aux aléas climatiques que sont les tempêtes et les cyclones, et quand nous demandons que la solidarité nationale soit activée, force est de constater que nous peinons à nous faire entendre. Telle sœur Anne, nous ne voyons rien venir ! Voilà pourquoi nous souhaiterions obtenir une garantie.
Ces précisions étant apportées, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 81 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'article 15 bis.
(L'article 15 bis est adopté.)
Articles additionnels après l'article 15 bis
Mme la présidente. L'amendement n° 106 rectifié bis, présenté par Mme Des Esgaulx et MM. César, Commeinhes, P. Leroy et Mouiller, est ainsi libellé :
Après l'article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 361-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Au sens de cet article, l'agriculture n'inclut pas la conchyliculture et les cultures marines. »
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Certains aléas et certaines situations sont tout à fait spécifiques à la conchyliculture. Or le dispositif existant est insuffisamment adapté, au point qu’il ne semble plus mobilisable. Pourtant, en la matière, le paramètre climatique est clairement identifié comme étant souvent l’unique responsable.
Un Fonds national de gestion des risques en agriculture, le FNGRA, est bien institué. Mais, en vertu des dispositions en vigueur, l’agriculture n’inclut pas la conchyliculture et les cultures marines.
Tel est le contexte dans lequel s’inscrivent les dispositions que nous proposons. J’ai bien conscience qu’il s’agit là d’un amendement d’appel ; je vais écouter attentivement les propos de la commission et du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis. Le secteur conchylicole bénéficie du régime des calamités agricoles, lequel est géré par le Fonds national de gestion des risques en agriculture, ou FNGRA.
En contrepartie, la taxe additionnelle sur les conventions d’assurances, principale ressource de ce Fonds, s’applique aux assurances contractées par les conchyliculteurs.
Cet amendement prévoit que la conchyliculture soit exclue du régime des calamités agricoles. Ses auteurs estiment que l’aide apportée en cas d’événement climatique grave est trop difficilement mobilisable.
Pour ma part, j’estime que cette stratégie est tout de même dangereuse. Que se passera-t-il en cas de phénomène climatique grave – une tempête, par exemple ? Lors de la tempête Xynthia, qui n’est pas si ancienne, les conchyliculteurs ont pu bénéficier d’indemnisations au titre du régime des calamités agricoles.
Face à des risques de cette nature, il n’existera plus aucune couverture si cet amendement est adopté. Voilà pourquoi la commission des affaires économiques émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Ces dispositions soulèvent plusieurs difficultés.
Tout d’abord, je relève un problème de cohérence, entre cet amendement et un autre, examiné en commission. Sauf erreur de ma part, il s’agissait de sortir les conchyliculteurs du régime des calamités agricoles pour créer un système spécifique. Mais, puisque ce dernier est tombé sous le coup de l’article 40 de la Constitution, il ne faut surtout pas voter le présent amendement ! Faute de quoi, ces professionnels n’auraient plus la moindre aide. (Mme Marie-Hélène Des Esgaulx le concède.) Il me semble que tout le monde en est conscient.
Madame Des Esgaulx, les conchyliculteurs présentent bien une spécificité les conduisant à poser des questions de ce type : la non-prise en compte, au titre du régime des calamités agricoles, d’un certain nombre de difficultés auxquelles ils sont confrontés et qui n’ont pas pour origine les aléas climatiques. Ces situations résultent d’épizooties, d’un certain nombre de difficultés les empêchant d’être pris en charge à ce titre. Voilà pourquoi ces professionnels réfléchissent à la création d’un autre système.
Cette préoccupation est légitime. Néanmoins, lorsque l’on étudie d’autres dispositifs envisageables, on se heurte, même si vous êtes sceptique à cet égard, à un problème relevant du droit européen. On ne saurait en effet déployer un soutien public via un système de taxe.
Dès lors, en vertu du droit européen actuel, la seule mutualisation possible serait purement privée. Il s’agirait d’une démarche d’ordre mutualiste, qui n’exigerait d’ailleurs pas de mesures législatives.
Le problème est posé. Mais, en l’occurrence, la situation, relevant notamment de la procédure parlementaire, impose à mon sens le retrait de cet amendement.
Mme la présidente. Madame Des Esgaulx, l’amendement n° 106 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Je le répète, il s’agissait d’un amendement d’appel.
Je remercie M. le secrétaire d’État des explications qu’il m’a apportées et je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 106 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 107 rectifié bis, présenté par Mme Des Esgaulx et MM. César, Commeinhes, P. Leroy et Mouiller, est ainsi libellé :
Après l’article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre V du livre VI du code rural et de la pêche maritime est complété par une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« Dispositions relatives aux espèces aquacoles
« Art. L. 653-… – Afin de garantir une gestion équilibrée des ressources, et notamment de garantir la diversité génétique et la durabilité des gisements coquilliers, le comité national de la conchyliculture mentionné à l’article L. 912-6 peut définir des mesures de gestion.
« Un décret détermine les règles selon lesquelles ces mesures peuvent être adoptées. »
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Si le Comité national de la conchyliculture est en capacité d’instituer des mesures de gestion pour la protection des gisements, nous souhaitons, à travers cet amendement, nous assurer que ces missions couvrent également la reproduction et l’amélioration génétique des animaux d’élevage.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à confier au Comité national de la conchyliculture un pouvoir réglementaire en matière de reproduction et d’amélioration génétique des huîtres, moules et autres espèces entrant dans son champ de compétences.
Certes, dans le cadre de ses missions définies à l’article L. 912–7 du code rural et de la pêche maritime, ce Comité peut prendre diverses mesures de gestion qui s’imposent à ses membres, dans le but de protéger les gisements conchylicoles.
Toutefois, il paraît difficile de lui donner la main sur la reproduction et l’amélioration génétiques.
En effet, ces domaines présentent une dimension de santé publique justifiant que le pouvoir réglementaire reste, en la matière, aux mains de l’État et plus particulièrement des services vétérinaires, par le biais de la Direction générale de l’alimentation.
Aussi, la commission des affaires économiques émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. L’article L. 912–7 du code rural et de la pêche maritime donne compétence au Comité national de la conchyliculture pour organiser la gestion équilibrée des ressources, comme l’indique l’amendement que vous proposez, madame Des Esgaulx.
Les règles relatives à l’amélioration génétique des animaux d’élevage sont, quant à elles, précisées aux articles L. 653–1 et L. 653–2 du même code, lesquels renvoient à la partie réglementaire le soin de fixer l’organisation entre les différentes parties ainsi que les obligations générales.
Par ailleurs, l’article L. 653–3 de ce code pose le principe d’un agrément par l’État pour définir les programmes de sélection et d’amélioration génétiques, lorsque celui-ci n’est pas délivré par un établissement public.
À l’heure actuelle, ce dispositif d’agrément ne couvre pas les coquillages, mais son fonctionnement impose des moyens suffisants permettant de conduire des programmes génétiques et des contrôles tout en conservant les ressources.
Sur le fond, je comprends la demande que vous formulez et je peux souscrire à l’objectif énoncé : améliorer encore les liens entre les professionnels et leur institut ou leurs centres techniques de référence.
Néanmoins, il ne me paraît pas possible d’émettre, en l’état, un avis favorable sur cet amendement. La portée de ces dispositions est peu précise quant aux missions que le Comité national de la conchyliculture aurait à conduire concrètement en matière génétique et pour la gestion de la ressource.
Avant de confier à cette instance une mission d’une telle envergure, il me semble nécessaire d’étudier son impact, en particulier financier, sur son fonctionnement.
Cela étant, je suis disposé à examiner le renforcement de la prise en compte des recommandations du Comité national de la conchyliculture en matière d’orientation génétique.
Dans l’attente de ce travail complémentaire sur ce sujet sensible, que nous pourrons mener en collaboration avec les professionnels, je vous invite à retirer cet amendement.
Mme la présidente. Madame Des Esgaulx, l’amendement n° 107 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de l’avancée que vous nous annoncez.
Je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 107 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 108 rectifié bis, présenté par Mme Des Esgaulx et MM. César, Commeinhes, P. Leroy et Mouiller, est ainsi libellé :
Après l’article 15 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 1° du I de l’article L. 611-19 du code de la propriété intellectuelle est ainsi rédigé :
« 1° Les races animales, ainsi que les souches d’espèces conchylicoles captées dans le milieu naturel. Une souche consiste en un groupe d’organismes de la même espèce possédant certains traits différentiels basés sur leur parenté ; ».
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il s’agit d’un amendement auquel je tiens tout particulièrement.
M. Charles Revet. Nous aussi !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. À mes yeux, le patrimoine génétique des souches d’espèces conchylicoles captées dans le milieu naturel ne saurait faire l’objet d’appropriation, y compris par tout organisme ou entreprise à l’origine de souches sélectionnées, placées dans le milieu considéré et ayant pu émettre des gamètes susceptibles d’avoir contribué à la genèse des naissains captés.
Le patrimoine génétique des souches conchylicoles trouvées en milieu ouvert doit rester une propriété publique inaliénable.
J’insiste sur ce point : il est essentiel que la loi rappelle le caractère inaliénable des ressources présentes dans le milieu naturel. Là est la force d’un bassin naisseur, comme celui d’Arcachon, qui me tient particulièrement à cœur, ou celui de Marennes-Oléron, lequel, désormais, se situe également dans la région dont je suis l’élue !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis. À travers cet amendement, il s’agit de modifier l’article L. 611–19 du code de la propriété intellectuelle, qui énonce un principe de la première importance : l’interdiction de déposer des brevets sur les races animales.
Cet amendement vise à préciser que les souches d’espèces conchylicoles captées en milieu naturel ne sont pas appropriables.
On ne peut qu’être d’accord avec cette règle de non-appropriation des ressources naturelles. Mais ce principe de non-brevetabilité des espèces figure précisément dans le code de la propriété intellectuelle. Aussi, il me paraît inutile de compliquer la rédaction de l’article précité, lequel, je le répète, fixe un principe fondamental qu’il faut conserver.
De surcroît, la notion de souche d’espèces conchylicoles mériterait d’être explicitée : la rédaction proposée pourrait susciter une incertitude juridique pour les écloseries.
Pour ces raisons, l’avis est défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. Il est important que chacun puisse le rappeler : dans cet hémicycle, nous tous, j’en suis persuadé, sommes très attachés à la non-brevetabilité des espèces sauvages. Le Gouvernement réitère son engagement à cet égard.
Au reste, le code de la propriété intellectuelle exclut déjà cette possibilité. Il précise que seules les inventions peuvent être brevetées.
Plus précisément, cela vient d’être souligné, l’article L. 611–19 du code de la propriété intellectuelle proscrit les brevets sur les races animales, le croisement ou la sélection des animaux. Un coquillage est une race animale. La précision rédactionnelle de l’amendement est donc, de notre point de vue, sans portée juridique par rapport au droit positif et ne ferait que rendre plus difficilement lisible le texte applicable.
Aussi, je demande le retrait de cet amendement, qui se trouve déjà satisfait. Si des interrogations subsistaient, la réponse du Gouvernement et la nature de nos échanges devraient rassurer ceux qui se sont interrogés sur la lecture pouvant être faite de l’article L. 611–19.
Mme la présidente. Madame Des Esgaulx, l'amendement n° 108 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Non, je vais le retirer, madame la présidente.
Le dossier mérite néanmoins d’être mûrit et l’amendement retravaillé. Monsieur le secrétaire d'État, si vos propos ont beaucoup de force et ne manqueront pas d’être entendus, il faut cependant insister de nouveau sur le caractère inaliénable des ressources présentes dans le milieu naturel. Une telle précision n’est pas superfétatoire.
Je retire l’amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 108 rectifié bis est retiré.
Article 16
(Non modifié)
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport portant sur les possibilités et les conditions, pour les pêcheurs et les aquaculteurs, d’une diversification de leur activité par le tourisme, notamment le pescatourisme et la commercialisation directe des produits de la pêche, transformés ou non.
Mme la présidente. L'amendement n° 44, présenté par Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par les mots :
, et par leur participation à des programmes de recherche et de science participative telle que la collecte de macro et micro déchets.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Mme Évelyne Didier. Je voudrais dire un mot sur l’amendement précédent, qui vient d’être retiré. Nos discussions rejoignent le débat que nous avons eu lors de l’examen du texte sur la biodiversité, notamment en ce qui concerne la question du brevetage du vivant. Il est effectivement important de préciser ce point, car tout dépend de ce que l’on met sous le mot inventions.
Pour ce qui est de l’amendement n° 44, madame la présidente, je considère qu’il est défendu.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis. Il s’agit d’élargir le rapport sur le pescatourisme et la diversification des activités des pêcheurs demandé à l’article 16.
Il est prévu que le rapport porte aussi sur un autre aspect de la diversification de l’activité des pêcheurs : leur contribution à la recherche scientifique sur l’état des ressources halieutiques et leur contribution au ramassage des déchets en mer.
Ces deux activités faisaient l’objet d’aides dans le cadre des contrats bleus, qui n’existent plus aujourd’hui. Élargir la réflexion à ces deux questions me paraît intéressant, même s’il s’agit clairement d’un sujet distinct de celui de la diversification par les activités touristiques.
La commission a émis un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Évelyne Didier, pour explication de vote.
Mme Évelyne Didier. Les bateaux participent souvent à des prélèvements ou à des ramassages. C’est donc une façon de favoriser la diversification de l’activité pour une bonne cause, qui est à la fois scientifique et environnementale.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Article 17
(Suppression maintenue)
Article 18
(Non modifié)
Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° et 2° (Supprimés)
3° Le II de l’article L. 211-3 est ainsi modifié :
a à c) (Supprimés)
d) Il est ajouté un 9° ainsi rédigé :
« 9° Fixer les dispositions particulières applicables à la protection des ressources conchylicoles et piscicoles. Ces dispositions peuvent prévoir une surveillance renforcée de la qualité physique, chimique, biologique, bactériologique et microbiologique des eaux, ainsi que toute mesure de lutte contre les pollutions. » ;
4° (Supprimé)
5° Le 3° de l’article L. 213-1 est complété par les mots : « et conchylicoles » ;
6° Le II de l’article L. 321-1 est ainsi modifié :
a) Au 4, après le mot : « sylvicoles, », sont insérés les mots : « des activités aquacoles, » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le respect de l’objectif de développement durable, l’action des collectivités publiques en matière de planification contribue à la réalisation de cette politique d’intérêt général. »
Mme la présidente. La parole est à M. Roland Courteau, sur l'article.
M. Roland Courteau. L’article 18 vise à renforcer l’arsenal juridique à la disposition des pouvoirs publics pour faire respecter un niveau élevé de qualité des eaux. C’est là une excellente disposition, car en matière de ressources conchylicoles et piscicoles aucun développement n’est possible sans maîtrise de la problématique de la qualité des eaux et sans maîtrise des pollutions. En effet, ces activités sont sensibles aux variations du milieu naturel.
L’examen de cet article me donne donc l’occasion d’évoquer un sujet très préoccupant : celui des pollutions en Méditerranée. Cette mer est en danger, car elle est victime de l’héritage des pollutions passées, elle est atteinte par les pollutions présentes et elle sera soumise, à l’horizon d’une génération, à une pression de pollution d’origine anthropique de plus en plus forte dont les conséquences seront démultipliées par les effets attendus du changement climatique.
D’ores et déjà, les scientifiques notent un plancton de moins bonne qualité, suite à la modification des paramètres climatiques et à l’accroissement des pollutions.
Certes, la France est loin d’être le mauvais élève de la classe, mais les vingt et un pays riverains doivent se sentir concernés. Or ce n’est pas forcément le cas, malgré les efforts de la convention de Barcelone et du plan d’action pour la Méditerranée ; 44 % des villes des rives sud et est n’ont pas de réseau d’épuration.
Le rapport que j’ai produit au sein de l’OPECST n’incite pas à l’optimisme. La rive nord n’est pas exempte de critiques : PCB et DDT déversés par les fleuves, déballastages et dégazages des navires, qui répandent jusqu’à 150 000 tonnes de résidus pétroliers par an, sacs plastiques, pollutions émergentes telles que celles qui sont liées aux résidus de médicaments que nous consommons et qui ne sont pas dégradés par les stations d’épuration, etc.
Comment s’étonner que le développement et la croissance des espèces soient perturbés ?
Une mobilisation de l’ensemble des États riverains s’impose, et bien plus fortement que celle que nous constatons aujourd'hui, faute de quoi, d’ici à vingt-cinq ans, le point de non-retour sera franchi. Dans ce cas, inutile d’envisager le développement de l’aquaculture et de la pêche.
Je n’ignore pas que le problème devra être réglé à une autre échelle. J’ai néanmoins tenu aujourd'hui à sensibiliser le Sénat sur ce point, qui me paraît essentiel. (Mme Odette Herviaux applaudit.)
Mme Évelyne Didier. Très juste !
Mme la présidente. L'amendement n° 114 rectifié, présenté par Mme Des Esgaulx et MM. D. Laurent, César, Commeinhes, Mouiller et P. Leroy, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rétablir les 1° et 2° dans la rédaction suivante :
1° Au 2° de l’article L. 161-1, après le mot : « eaux », sont insérés les mots : « et des zones protégées au titre de la Directive cadre sur l’Eau et de la Directive cadre stratégie pour le milieu marin, ainsi que toutes les autres directives pertinentes en matière de protection de l’environnement marin. » ;
2° Après le 4° du I de l’article L. 161-1, il est inséré un 5° ainsi rédigé :
« 5° Affectent les zones protégées que constituent les zones de productions conchylicoles et de production conchylicole et aquacole, les ressources conchylicoles et les activités associées, notamment ceux impliquant des restrictions d’activités telles que l’interdiction temporaire de mise en marché à des fins de protection de la santé humaine. »
La parole est à Mme Marie-Hélène Des Esgaulx.
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Il s’agit ici de mentionner les eaux conchylicoles à l’article L. 161–1 du code de l’environnement.
Si la définition des eaux concernées par les dommages causés à l’environnement est généralement considérée comme suffisamment large pour comprendre les zones protégées par les directives, une telle mention n’est pas contradictoire.
D’une manière générale, cet amendement pose la question du préjudice écologique et de ses compensations : vaste sujet !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Michel Le Scouarnec, rapporteur pour avis. À travers cet amendement, il s’agit de revenir à la rédaction initiale de la proposition de loi, qui visait à mieux prendre en compte la conchyliculture dans la définition des dommages causés à l’environnement.
Or les députés ont rejeté cette rédaction, considérant qu’il convient de conserver une définition générique des objectifs de protection des eaux, qui comprennent les eaux conchylicoles.
Je partage cette analyse : la reconnaissance spécifique des détériorations qui affectent les zones de production conchylicole et aquacole n’est pas nécessaire dans la mesure où les eaux conchylicoles sont déjà incluses dans la protection des eaux prévue à l’article L. 161–1 du code de l’environnement.
Il convient de ne pas trop complexifier la rédaction de la loi en créant des sous-catégories alors que la loi pose un principe général de protection des eaux.
La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Alain Vidalies, secrétaire d'État. La définition des eaux concernées par les dommages causés à l’environnement est déjà très large et comprend bien les zones protégées par les directives communautaires.
Concernant Natura 2000, les directives « Habitats » et « Oiseaux » visent à protéger les milieux et espèces remarquables. Le 3° du I de l’article L. 161–1 du code de l’environnement cite déjà ces milieux et espèces remarquables. Il est donc inutile de rajouter une référence à ces directives pour la protection de la qualité de l’eau au 2° de cet article.
De surcroît, les eaux conchylicoles et aquacoles sont déjà protégées au titre des articles L. 161–1 et L. 211–1 du code de l’environnement. La qualité des eaux est par ailleurs recherchée et préservée par le biais des plans d’action pour le milieu marin, et la qualité des eaux littorales est protégée par la directive-cadre sur l’eau.
Ainsi, les dommages environnementaux, les détériorations affectant les zones de productions conchylicole et aquacole, notamment celles qui impliquent des atteintes à ces productions, sont déjà couverts par les politiques publiques.
L’objectif visé par cet amendement étant déjà atteint par le droit positif, le Gouvernement suggère le retrait de l’amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Mme la présidente. Madame Des Esgaulx, l'amendement n° 114 rectifié est-il maintenu ?
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Oui, je le maintiens, madame la présidente.
Il me paraît préférable de soumettre au vote cet amendement, même si je crois connaître le résultat.
La qualité des eaux conchylicoles doit être une préoccupation majeure. Je vous renvoie, monsieur le secrétaire d'État, à toutes les discussions, à tous les comptes rendus sur les parcs naturels marins. Ils font la preuve que ce que je dis est très important et que les choses ne vont pas de soi. Aujourd'hui, la protection de ces zones n’est pas suffisamment considérée comme une préoccupation majeure. Sinon, pourquoi crée-t-on des parcs naturels marins ?
M. Roland Courteau. Eh oui !
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. J’ai bien entendu vos remarques. Vous affirmez que c’est couvert, c’est intéressant, on pourra s’en servir. Or, en réalité, lorsque nous sommes confrontés à la difficulté, on s’aperçoit qu’il n’en est rien. J’ai connu des drames comme ceux de l’Erika : nous n’avons rien obtenu de particulier sur les eaux conchylicoles !
Cette reconnaissance me semble donc importante, voire majeure. J’ai bien compris que je devais me battre contre la commission et le Gouvernement. Pauvre de moi et pauvres ostréiculteurs !
M. Alain Gournac. Quelle est malheureuse ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Mais cette question mérite que je livre un tel combat : il faut affirmer que la protection des eaux conchylicoles est une préoccupation majeure. Ou alors revenez sur votre politique de création de parcs naturels marins !