M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements de suppression de l’article 8. Il est vrai que le rapport Cesaro pointait bien la complexité de cette notion d’avantages individuels acquis : chacun de ces trois mots est délicat à définir. Permettez-moi de citer ce rapport : « Il ressort de cette analyse que, s’il existe certaines “zones de clarté”, la notion d’avantages individuels acquis est complexe et d’une prévisibilité relative. Celle-ci dépend assez largement des solutions jurisprudentielles existantes ».
Le Gouvernement a fait le choix de centrer les avantages individuels acquis, ou AIA, sur le cœur du cœur de la relation contractuelle qu’est la rémunération, le reste étant le fameux « grain à moudre » cher à André Bergeron. Dans le cadre de la renégociation d’un accord, on met en effet tout sur la table, la rémunération représentant le seul élément intangible.
La commission avait approuvé l’article 8 du projet de loi le 1er juin. Par conséquent, l’avis est défavorable sur ces amendements de suppression dudit article.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. La première question à se poser est celle-ci : pourquoi avons-nous voulu revenir sur les avantages individuels acquis ? Ce projet de loi est le fruit du rapport Mettling, du rapport Combrexelle, du rapport Cesaro, ainsi que du rapport Quinqueton sur la restructuration des branches.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Les rapports peuvent servir à quelque chose !
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’objectif de ce projet de loi est de favoriser le dynamisme des accords. Pour ce faire, il faut lever les flous juridiques qui existent aujourd’hui lorsqu’un accord est dénoncé. La jurisprudence actuelle sur cette question est pléthorique ; c’est pourquoi M. le professeur Cesaro s’est attelé à nous faire des propositions.
Puisque nous sommes aux responsabilités, quand il y a un flou (Exclamations amusées sur plusieurs travées.), faut agir. Comme le disait Mme Martine Aubry, grande ministre du travail, il faut poser les choses.
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Son esprit plane décidément sur nos discussions !
Mme Myriam El Khomri, ministre. Il faut savoir qu’aujourd’hui ni l’employeur ni le salarié ne peuvent savoir quelles sont les clauses qui constituent des avantages individuels acquis, c’est-à-dire ces avantages qui ont été incorporés dans le contrat de travail et doivent être maintenus. La jurisprudence est extrêmement variable et, surtout, peu prévisible. C’est notamment le cas pour les primes et les rémunérations dites « accessoires », pourboires, temps de pauses, etc. Toutes les primes ne sont pas systématiquement considérées comme faisant partie de ces avantages. Pour notre part, nous les incluons dans la rémunération.
À cause de ce flou, la négociation se trouve bloquée ; certains accords d’entreprise ou de branche n’ont pas été renégociés depuis des années parce que ni les entreprises ni les salariés ne savent à quoi s’attendre.
Cette situation est à mes yeux inacceptable alors que nous souhaitons rendre la négociation plus dynamique. Elle est en outre contraire à l’égalité entre les salariés : selon qu’ils vont ou non au contentieux, ils ne sont pas traités de la même manière et ne bénéficient pas des mêmes garanties.
C’est au regard de cette situation que nous avons souhaité clarifier les choses. La loi fixera une règle claire : les avantages individuels acquis consisteront dans le maintien de la rémunération du salarié. Autrement dit, tous les salariés conserveront leur pouvoir d’achat si un accord est dénoncé. Je précise que la base de cette rémunération est large : elle sera la même que celle des cotisations sociales et inclura toutes les rémunérations perçues par le salarié pendant l’année qui précède la fin de l’accord. Le salarié gardera donc le montant équivalent au salaire et à toutes les primes. C’est ainsi que nous entendons également stabiliser la jurisprudence. Seuls l’intéressement et les stock-options ne seront pas pris en compte.
Notre but n’est donc pas de faire du moins-disant social ou de porter atteinte aux droits des salariés ; au contraire, nous posons un système qui respectera l’égalité, apportera de la sécurité juridique et protégera le pouvoir d’achat. En outre, nous favorisons ainsi la conclusion d’accords, c’est-à-dire aussi de nouveaux droits pour les salariés.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 31 rectifié et 47.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 79 rectifié, présenté par M. Husson, Mme Morhet-Richaud, MM. Houel, César et Karoutchi, Mmes Canayer et Imbert, MM. B. Fournier et Commeinhes, Mmes Lamure et Deromedi et MM. Vasselle, Revet, Longuet, Doligé, Rapin et Laménie, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 7, seconde phrase
Supprimer cette phrase.
II. – Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Il est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L’amendement n° 617, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 19 à 27
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Il est prévu d’ouvrir la révision des accords collectifs conclus avec des syndicats représentatifs aux représentants du personnel, qu’ils soient ou non mandatés.
L’extension du mandatement des salariés pour la négociation de tous types d’accords dans les entreprises dépourvues de délégué syndical n’est pas une mesure qui tend à valoriser le syndicalisme dans les entreprises.
Celles et ceux qui dénoncent la faiblesse du nombre de salariés syndiqués ne peuvent pas, dans le même temps, faire comme si l’on ne pouvait pas changer les choses d’une manière différente de celle qui est proposée.
Il me semble extrêmement important d’affirmer que le fait de mandater un salarié ne règle pas les problèmes. En effet, nous savons pertinemment qu’une pression très importante s’exerce sur les salariés, qui sont notamment exposés à la possibilité de perdre leur emploi. Par conséquent, un salarié mandaté peut se montrer beaucoup plus perméable aux pressions de son employeur. Dès lors, ce mécanisme n’aide pas à l’exercice d’un véritable dialogue social pouvant assurer la défense des salariés.
Une confusion des genres s’opère tant au banc de la commission qu’au banc du Gouvernement. Il faudrait, selon eux, dynamiser le dialogue social ; pour autant, on ne crée pas les conditions nécessaires à ce dialogue et, surtout, on continue de faire comme si n’existait aucun lien de subordination dans l’entreprise. Le code du travail a justement été construit pour protéger ceux qui subissent ce lien, à savoir les salariés.
C’est pourquoi nous présentons cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Gruny, MM. Bizet, Commeinhes et Cambon, Mmes Primas, Morhet-Richaud et Cayeux, MM. César et Cornu, Mme Garriaud-Maylam, M. Vaspart, Mme Mélot, MM. Houel, Revet, P. Leroy, Dallier, P. Dominati, Panunzi et Mouiller, Mme Deromedi et MM. Lefèvre, Laménie et Mandelli, est ainsi libellé :
Alinéas 19 à 24
Remplacer ces alinéas par huit alinéas ainsi rédigés :
3° L’article L. 2232-22 est ainsi rédigé :
« Art. L. 2232-22. – Les représentants élus titulaires du personnel au comité d’entreprise ou à la délégation unique du personnel ou à l’instance mentionnée à l’article L. 2391-1 ou, à défaut, les délégués titulaires du personnel peuvent négocier, conclure et réviser des accords collectifs de travail.
« Ces accords peuvent porter sur toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement sur le fondement du présent code et doivent avoir été approuvés par les salariés à la majorité des suffrages exprimés, dans des conditions déterminées par décret et dans le respect des principes généraux du droit électoral.
« La validité de l’accord est subordonnée à sa signature par un ou plusieurs représentants élus titulaires ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d'entreprise ou de la délégation unique du personnel ou, à défaut, des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants.
« À défaut, l’employeur peut soumettre le projet d’accord pour ratification à la majorité des deux tiers du personnel.
« L’employeur communique l’accord à l’autorité administrative compétente. Elle contrôle qu’il n'enfreint pas les dispositions législatives, réglementaires ou conventionnelles applicables. À défaut de réponse dans un délai de deux mois suivant sa transmission, l’accord est réputé validé. » ;
…° Le dernier alinéa de l’article L. 2232-23-1 est supprimé ;
…° À l’intitulé du paragraphe 2 de la sous-section 3 de la section 3 du chapitre II du titre III, le mot : « mandatés » est supprimé ;
La parole est à Mme Jacky Deromedi.
Mme Jacky Deromedi. Cet amendement vise à renforcer la négociation salariale dans les entreprises en autorisant les représentants du personnel, même non mandatés par un syndicat, à négocier et à conclure des accords. La validité de ces accords sera subordonnée à leur signature par un ou des représentants du personnel ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés. À défaut, l’employeur pourra soumettre le projet d’accord pour ratification à la majorité des deux tiers du personnel.
Cela permettra à l’ensemble des entreprises d’accéder à la négociation salariale. C’est particulièrement vrai dans les ETI, les entreprises de taille intermédiaire, où 73 % des élus majoritaires ne sont pas affiliés à un syndicat représentatif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Sur l’amendement n° 617, la commission a émis un avis défavorable. En effet, le droit en vigueur autorise le salarié mandaté à signer des accords. En revanche, il est muet sur sa capacité à conclure des accords ; la loi Rebsamen n’avait pas inscrit dans ce domaine le terme de « révision ». Ces deux volets sont pourtant indissociables.
Quant à l’amendement n° 11 rectifié, il est largement satisfait par l’article 10 A, introduit par la commission dans ce texte. La commission demande par conséquent le retrait de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. L’avis est défavorable sur ces deux amendements. Concernant l’amendement n° 617, je rappellerai que, lorsqu’un salarié est mandaté, l’accord est ensuite soumis au référendum. En outre, un salarié mandaté est un salarié qui est protégé, et ce d’autant plus qu’il est soutenu par une organisation syndicale. Notre objectif est quand même de ne pas exclure une grande partie des entreprises et de notre tissu économique de la négociation. Si nous voulons que, lors des élections dans les très petites entreprises, à la fin de cette année, les organisations syndicales puissent s’implanter dans ces entreprises, nous ne pouvons pas pour autant exclure pour ces entreprises la capacité de pouvoir négocier des accords. Le mandatement est l’une des manières de parvenir à cette fin. Par ailleurs, les salariés mandatés sont formés par une organisation syndicale.
Une réflexion similaire s’applique à l’amendement n° 11 rectifié. Un salarié mandaté est appuyé par une structure syndicale et peut être formé. Il n’a donc pas le même poids que s’il était seul.
M. le président. Je vais mettre aux voix l’amendement n° 11 rectifié.
Mme Jacky Deromedi. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 11 rectifié est retiré.
L'amendement n° 618, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 28 et 29
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Les alinéas 28 et 29 introduisent dans le code du travail un nouvel article afin que des salariés non élus, mais mandatés par un syndicat représentatif, puissent conclure des accords sur toutes les mesures pour lesquelles le code du travail renvoie à la négociation collective, alors que l’actuel article restreint le champ de ces accords aux seules mesures dont la mise en œuvre est expressément subordonnée par la loi à la conclusion d’un accord collectif.
Or ce type de négociations garantit une sécurité moindre par rapport à la représentation collective des salariés. Et donc l’élargir à des négociations plus larges pouvant concerner la durée et l’organisation du temps de travail ou encore les accords de préservation et de développement de l’emploi aura immanquablement des impacts lourds et décisifs sur les conditions de travail.
En 2008, au moment des discussions de la loi portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail portée par Xavier Bertrand, nous avions déjà alerté sur les conséquences d’un texte qui, en définitive, a ouvert la porte aux dérégulations sur la négociation d’accords par des salariés mandatés, sur des sujets très larges.
Aujourd’hui, l’introduction proposée va encore plus loin en élargissant les négociations à « toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement », alors même que le projet de loi supprime le principe de faveur.
Mes chers collègues, cela risque d’entraîner une rupture d’égalité entre les entreprises d’un même secteur d’activité et la précarisation des conditions de travail des salariés concernés par cette négociation dérogatoire.
C’est pourquoi nous vous proposons d’adopter cet amendement de suppression des alinéas 28 et 29 de l’article 8.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Les auteurs de cet amendement, mais aussi d’autres collègues de la commission siégeant sur des travées différentes, critiquent cette possibilité, prévue à cet alinéa, de mandater un salarié afin de conclure des accords sur tous les sujets traités par le code du travail, et formulent des griefs à son encontre.
Il n’en demeure pas moins que nous avons tenu à ménager cette possibilité, même si nous ouvrons de nouveaux canaux de discussion et de dialogue, comme on le verra avec les articles 10 A et suivants.
La commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L'amendement n° 620, présenté par M. Watrin, Mmes Cohen, David, Assassi et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 35, première phrase
Après la seconde occurrence du mot :
dénoncé,
insérer les mots :
les avantages individuels qu’ils ont acquis, dont
II. – Alinéa 39, première phrase
Après la seconde occurrence du mot :
cause,
insérer les mots :
les avantages individuels qu’ils ont acquis, dont
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. Cet amendement vise à compléter les dispositions des alinéas 35 et 39 lorsque la convention ou l’accord a été dénoncé et n’a pas été remplacé.
Dans cette situation, le code du travail prévoit actuellement qu’une nouvelle convention ou qu’un nouvel accord intervient dans un délai d’un an à compter de l’expiration du préavis et que « les salariés des entreprises concernées conservent les avantages individuels qu’ils ont acquis, en application de la convention ou de l’accord, à l’expiration de ce délai ».
Dans la rédaction qui nous est proposée, les avantages individuels acquis sont uniquement remplacés par « une rémunération dont le montant annuel, pour une durée de travail équivalente à celle prévue par leur contrat de travail, ne peut être inférieur à la rémunération versée lors des douze derniers mois ».
Au-delà de la rémunération, ce sont aussi les congés, les repos, qui constituent une amélioration des conditions de travail ou du statut du salarié en tant qu’individu.
De plus, les avantages individuels acquis sont un élément important du rapport de force dans les négociations dont les entreprises souhaitent s’affranchir avec le concours du Gouvernement et de la majorité sénatoriale. En effet, en l’état actuel du droit, cela favorise la négociation collective puisque la seule façon pour l’employeur d’éviter le maintien des avantages individuels acquis est la conclusion d’un accord de remplacement. Alors qu’avec le seul maintien de la rémunération, l’intérêt de l’employeur à négocier est moindre. La notion d’avantages acquis a pu être juridiquement considérée comme insuffisamment précise, comparativement à la notion de rémunération.
C’est pourquoi, à travers cet amendement, nous vous proposons de mentionner les deux notions – les avantages individuels acquis, dont la rémunération –, afin de s’assurer qu’il n’y aura pas de perte de droits pour les salariés.
La rédaction de ces deux alinéas nous paraît incomplète et nous vous proposons donc de la parfaire en adoptant cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. La commission, pour des raisons identiques à celles que nous avons précédemment avancées, émet également un avis défavorable sur cet amendement, qui vise à étendre la notion d’avantages individuels acquis. Elle souhaite conserver l’épure du projet gouvernemental.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Avis défavorable, pour les raisons que j’ai indiquées tout à l’heure.
M. le président. L'amendement n° 451 rectifié, présenté par Mmes Billon et Lamure, MM. Bouchet, Cadic, Canevet et Danesi, Mme Morhet-Richaud, MM. Adnot et P. Dominati, Mme Primas et M. Vaspart, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 52
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 2511-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Une convention ou un accord peut suspendre, pendant toute sa durée, l’exercice du droit de grève en vue d’appuyer des revendications professionnelles ressortant du champ de ladite convention ou dudit accord. Lorsque plusieurs salariés souhaitent exercer leur droit de grève dans ces circonstances, ils demandent à l’employeur d’organiser une consultation des salariés, le cas échéant par voie électronique, dans les cinq jours suivant la notification de la demande. La grève est autorisée si elle recueille l’approbation d’au moins la moitié des salariés de l’entreprise. »
La parole est à M. Olivier Cadic.
M. Olivier Cadic. Plusieurs membres de la délégation aux entreprises ont souhaité déposer cet amendement d’appel afin que nous prenions enfin le temps de nous interroger sur les objectifs du dialogue social et sur ce qui pourrait aider les entreprises françaises.
À la demande de la délégation, l’IFO, institut munichois réputé d’études économiques, a dressé une analyse comparée sur les pouvoirs et la représentativité des représentants des salariés dans l’entreprise en France et en Allemagne. Il montre que notre pays est malheureusement champion européen de la grève, avec 139 jours de travail perdus pour 1 000 employés, contre 18 pour l’Allemagne, où l’organisation des grèves est contrainte par le champ et la durée les accords collectifs.
Aujourd’hui, nous constatons tous le caractère nocif des grèves à répétition. Les premières victimes en sont les TPE, les PME et tous leurs salariés, qui nous le font d’ailleurs savoir !
Par cet amendement, nous proposons simplement de nous inspirer du modèle allemand – Mme Bricq en a parlé tout à l’heure – et d’offrir aux partenaires sociaux la possibilité – il ne s’agit absolument pas de les y obliger – de prévoir une clause de paix sociale dans les accords collectifs.
Et parce que les engagements pris par les syndicats ne doivent pas pouvoir empêcher le droit de grève des salariés, nous prévoyons un aménagement leur permettant, malgré une telle clause dans un accord collectif, d’exercer leur droit dans la mesure où la majorité des salariés l’approuvent par voie de consultation.
Avec cet amendement, je vous invite à aller au-delà de l’approche purement juridique et à aborder la question de la paix sociale, car nous ne pouvons pas continuer à battre le record des jours de grève en Europe sans nous demander comment changer cette situation, qui constitue un véritable handicap pour la France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Comme on dit : c’est du lourd ! (Rires.)
Le constat que dressent Mme Billon et les cosignataires de cet amendement sur le nombre de jours de grève en France n’est pas contestable. Mais il est vrai que nous sommes souvent fiers de cette exception française.
M. Robert del Picchia. Eh oui !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Cela étant, les précédentes majorités qui se sont succédé depuis 2002 ont tenté de concilier à la fois l’exercice du droit constitutionnel de grève et le droit au travail notamment en mettant en place un certain nombre de mécanismes de type service minimum, mécanisme d’alerte, etc.
S’agissant d’un sujet aussi important, la commission a estimé qu’il fallait s’en tenir aux équilibres existants.
Mme Evelyne Yonnet. Cela vaut mieux !
Mme Éliane Assassi. C’est bien !
M. Jean-Baptiste Lemoyne, rapporteur. Soucieuse que l’Euro 2016 se termine bien (Sourires.), elle sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
Mme Evelyne Yonnet. Bravo !
M. Yves Daudigny. Quelle sagesse ! (Nouveaux sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Myriam El Khomri, ministre. Sans surprise, le Gouvernement émet également un avis défavorable.
L’exercice du droit de grève fait l’objet du septième alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Pour ma part, je suis favorable à des négociations pour prévenir les grèves comme cela se fait dans une entreprise de transport public comme la RATP. C’est donc ce type de démarche qu’il faut privilégier. En revanche, permettre à un accord d’interdire une grève, comme vous le proposez, n’est pas envisageable. J’entends que le droit de grève soit respecté.
Mme Éliane Assassi. Comme quoi, le football est fédérateur ! (Sourires.)
M. le président. Monsieur Cadic, pour la bonne tenue de l’Euro… (M. Philippe Dallier s’esclaffe)
M. Olivier Cadic. Je peux comprendre les commentaires que je viens d’entendre. Simplement, dois-je rappeler que le ministre de l’économie déplorait encore récemment l’impact de ces grèves à répétition (Mme Nicole s’exclame.) sur nos TPE et nos PME ? Il est intéressant de voir ce qu’il en est outre-Rhin, comment le droit de grève est encadré. Je ne parle même pas de la Suisse, où les règles sont encore différentes.
Cela étant dit, il faudra bien, tôt ou tard, en discuter, édicter des règles.
Tout à l’heure, il était question d’un rapport d’évaluation ; voilà un sujet intéressant : quelles mesures pourraient nous aider à réduire le nombre de jours de grève et quelles actions permettraient d’obtenir un tel résultat ?
Puisque j’avais bien précisé qu’il s’agissait d’un amendement d’appel, personne ne sera surpris que je le retire.
Mme Nicole Bricq. Dommage ! (Sourires.)
M. le président. L'amendement n° 451 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 8.
(L'article 8 est adopté.)
Article 9
I A. – Le dernier alinéa des articles L. 2314-11, L. 2314-20, L. 2314-31, L. 2324-13, L. 2324-18 et L. 2327-7 du code du travail est ainsi rédigé :
« La décision de l’autorité administrative peut faire l’objet d’un recours devant le juge judiciaire, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. »
I. – L’article L. 2322-5 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La décision de l’autorité administrative peut faire l’objet d’un recours devant le juge judiciaire, à l’exclusion de tout autre recours administratif ou contentieux. »
II. – Après le troisième alinéa de l’article L. 2232-22 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« La commission se prononce sur la validité de l’accord dans un délai de quatre mois à compter de la transmission de celui-ci ; à défaut, l’accord est réputé validé. »
II bis. – Le 1° bis de l’article L. 2323-8 du même code est ainsi modifié :
1° Après le mot : « personnelle », sont insérés les mots : « et familiale » ;
2° Le mot : « respective » est remplacé par le mot : « comparée ».
II ter (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2325-5-1 du même code sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, l’employeur peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité d’entreprise. L’employeur réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
III. – L’article L. 2326-5 du même code est complété par un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les réunions de la délégation unique du personnel peuvent se dérouler en visioconférence, dans les conditions prévues à l’article L. 2325-5-1, y compris lorsque l’ordre du jour comporte des points relevant uniquement des attributions des délégués du personnel. »
III bis A (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2327-13-1 du même code sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, l’employeur peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité central d’entreprise. L’employeur réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
III bis. – Aux articles L. 2363-6 et L. 2373-3 du même code, la référence : « L. 2353-27 » est remplacée par la référence : « L. 2353-27-1 ».
IV. – Au premier alinéa de l’article L. 2323-9 du même code, après les mots : « informations au comité d’entreprise », sont insérés les mots : « et au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ».
V. – Le livre III de la deuxième partie du même code est ainsi modifié :
1° Après l’article L. 2323-26, il est inséré un article L. 2323-26-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2323-26-1. – Le seuil de trois cents salariés mentionné au présent chapitre est réputé franchi lorsque l’effectif de l’entreprise dépasse ce seuil pendant les douze derniers mois, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
« L’employeur dispose d’un délai d’un an à compter du franchissement de ce seuil pour se conformer complètement aux obligations d’information et de consultation du comité d’entreprise qui en découlent. » ;
2° À l’article L. 2325-14-1, la référence : « à la présente sous-section » est remplacée par la référence : « au présent chapitre ».
VI. – Au premier alinéa de l’article L. 2323-60 du même code, les mots : « communique au comité d’entreprise » sont remplacés par les mots : « met à la disposition du comité d’entreprise, dans les conditions prévues à l’article L. 2323-9, ».
VII. – L’article L. 2327-15 du même code est ainsi modifié :
1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’il y a lieu de consulter à la fois le comité central d’entreprise et un ou plusieurs comités d’établissement, un accord peut définir l’ordre et les délais dans lesquels le comité central d’entreprise et le ou les comités d’établissement rendent et transmettent leurs avis. » ;
2° Le début du dernier alinéa est ainsi rédigé : « À défaut d’accord, l’avis de chaque comité d’établissement est rendu et transmis au comité central d’entreprise et l’avis du comité central d’entreprise est rendu dans… (le reste sans changement) ;
VII bis (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2334-2 du code du travail sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, le président peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité de groupe. Il réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
VII ter (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2341-12 du code du travail sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, le chef de l’entreprise dominante peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité d’entreprise européen. Il réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
VII quater (nouveau). – Les deux premières phrases de l’article L. 2353-27-1 du code du travail sont remplacées par deux phrases ainsi rédigées :
« Sauf disposition contraire d’un accord collectif, le président peut recourir à la visioconférence pour réunir le comité de la société européenne. Il réunit le comité au moins deux fois par an sans recourir à la visioconférence. »
VIII. – L’article L. 4616-3 du même code est ainsi modifié :
1° Après la première occurrence du mot : « travail », la fin du dernier alinéa est ainsi rédigée : « un accord peut définir l’ordre et les délais dans lesquels l’instance de coordination et le ou les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail rendent et transmettent leur avis. » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« À défaut d’accord, l’avis de chaque comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail est rendu et transmis à l’instance de coordination des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et l’avis de cette dernière est rendu dans des délais fixés par décret en Conseil d’État. »
IX. – Le chapitre II du titre IX du livre III de la deuxième partie du même code est complété par un article L. 2392-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 2392-4. – Par dérogation aux dispositions prévoyant la répartition en établissements distincts prévues aux articles L. 2314-31, L. 2322-5 et L. 2327-7, l’accord mentionné à l’article L. 2391-1 peut déterminer le nombre et le périmètre du ou des établissements distincts pour les élections de la ou des instances regroupées conformément à cet accord dans l’entreprise. Par dérogation aux dispositions prévoyant la répartition en établissements distincts prévues aux articles L. 2314-31 et L. 2322-5, l’accord mentionné à l’article L. 2391-3 peut déterminer le périmètre du ou des établissements distincts pour l’élection de la ou des instances regroupées conformément à cet accord dans l’établissement. »
X. – Le III du présent article est applicable aux entreprises mentionnées au VI de l’article 13 de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi dans lesquelles l’employeur a décidé le maintien de la délégation unique du personnel.