Mme la présidente. L'amendement n° 31, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Compléter cet alinéa par les mots :
, ainsi que les mises à jour périodiques, selon les modalités fixées par le Conseil national des barreaux
II. – Alinéa 4
Rétablir un 2° ainsi rédigé :
2 ° Après le premier alinéa de l’article 21-1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sur la base des informations communiquées par les conseils de l’ordre en application du 1° bis de l’article 17, le Conseil national des barreaux établit, met à jour et met à disposition en ligne un annuaire national des avocats inscrits au tableau d’un barreau. »
La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Le Gouvernement souhaite rétablir l’article 13 bis A dans sa rédaction issue des travaux de l’Assemblée nationale, laquelle permet la tenue d’une liste nationale des avocats actualisée. Aujourd’hui, celle qui est accessible en ligne repose uniquement sur les informations spontanément données par les conseils de l’ordre. Pour le justiciable comme pour toute autre personne intéressée, y compris au titre d’une enquête –on peut penser à la police ou à la gendarmerie –, pouvoir disposer d’un annuaire fiable, national et actualisé est un atout. Il est prévu de confier sa réalisation au Conseil national des barreaux, cette instance étant déjà chargée d’unifier les règles et les usages d’une profession dont la représentation, entre le Conseil national des barreaux, le barreau de Paris ou la conférence des bâtonniers, est extrêmement morcelée.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Détraigne, rapporteur. Je ne suis pas sûr que le législateur soit réellement compétent pour prévoir la création d’un annuaire professionnel des avocats tenu par le Conseil national des barreaux. Nous pensons que c’est un décret qui devrait fixer les modalités de mise à place de cet annuaire.
Concernant les modalités de transmission et de mise à jour périodique, par les conseils de l’ordre, de la liste des avocats inscrits au tableau, la commission a relevé que, en l’absence de hiérarchie définie par la loi entre les conseils de l’ordre et le Conseil national des barreaux, il n’apparaît pas pertinent de prévoir qu’elles soient fixées par ce dernier.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 13 bis A.
(L'article 13 bis A est adopté.)
Article 13 bis B
Le premier alinéa de l’article 21-1 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Il détermine, en concertation avec le ministre de la justice, les modalités et conditions de mise en œuvre du réseau virtuel indépendant à usage privé des avocats aux fins d’interconnexion avec le “réseau privé virtuel justice”. Il assure l’exploitation et les développements des outils techniques permettant de favoriser la dématérialisation des échanges entre avocats. » – (Adopté.)
Article 13 bis
Le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’organisation judiciaire est complété par un article L. 123-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 123-4. – Par exception à l’article L. 123-1, les fonctionnaires des greffes du tribunal de grande instance, du conseil des prud’hommes et des tribunaux d’instance dont le siège se situe dans la même commune que le tribunal de grande instance ou dans un périmètre, fixé par décret, autour de cette commune, peuvent être affectés, pour nécessité de service, par décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République près ce tribunal, prise après avis du directeur des services de greffe judiciaires, au greffe d’une autre desdites juridictions pour une durée d’au moins six mois. »
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 44 est présenté par MM. Bigot, Richard, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 71 est présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jacques Bigot, pour présenter l’amendement n° 44.
M. Jacques Bigot. Nous avons déjà eu un débat sur la possibilité de mutualiser les personnels des greffes de juridictions différentes au sein d’une même agglomération. Nous connaissons les fortes réticences des organisations représentatives des greffiers. Ce n’est certainement pas le moment de mettre en œuvre une telle mesure.
C’est la raison pour laquelle, conformément à la position de l’Assemblée nationale, nous proposons la suppression de cet article.
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 71.
Mme Cécile Cukierman. La commission des lois a réintroduit l’article 13 bis, qui prévoit que les fonctionnaires des greffes des tribunaux de grande instance, des conseils des prud’hommes et des tribunaux d’instance situés dans un périmètre devant être fixé par décret seront mutualisés.
Si des modifications ont été apportées au dispositif de l’article, le changement d’affectation n’intervenant que par décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République près ce tribunal, après avis du directeur des services de greffe judiciaires, il n’en demeure pas moins que les critiques opposées à cette mesure restent pertinentes.
Comme l’a souligné le rapporteur de l’Assemblée nationale, les organisations syndicales de fonctionnaires des greffes ont émis de très vives réserves sur la question de la fusion des greffes. Une pétition en faveur de la suppression de l’article 13 bis a d’ailleurs recueilli plusieurs milliers de signatures. Elle rappelle que la mise en place de cette mutualisation a été faite sans encadrement ni concertation préalable.
Cette disposition nous apparaît excessive et ne constitue d’ailleurs pas une condition du succès du service d’accueil unique des justiciables. Sa mise en œuvre pourrait aussi conduire à un assèchement – si je peux m’exprimer ainsi – des effectifs de fonctionnaires dans les tribunaux d’instance ou dans les conseils des prud’hommes pour pallier le manque de personnel des tribunaux de grande instance, jugés prioritaires.
Enfin, selon le rapporteur de l’Assemblée nationale, cette disposition est susceptible d’entraîner une contrainte de mobilité importante pour les greffiers concernés lorsque, bien que situés dans la même ville ou dans un périmètre autour de la ville siège du tribunal, les tribunaux d’instance, les conseils des prud’hommes et les tribunaux de grande instance ne se trouvent pas sur le même site.
Pour toutes ces raisons, nous proposons nous aussi la suppression de l’article 13 bis.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Détraigne, rapporteur. Je souhaite tout d’abord rappeler que la mesure en question traduit une préconisation figurant dans plusieurs rapports d’information et reprise lors du colloque consacré à la justice du XXIe siècle qui s’est tenu à l’UNESCO.
Il ne s’agit évidemment pas de considérer les greffiers comme des « pions », pour reprendre un mot utilisé par certains d’entre eux. Ainsi, ils ne seront pas déplacés au jour le jour, mais pour une durée donnée, par exemple de six mois, et toujours au sein d’un périmètre bien défini. Cela représentera, me semble-t-il, plutôt un enrichissement de leur fonction qu’une contrainte. Un certain nombre de précautions ont été inscrites dans le texte.
Pour ces raisons, je ne peux qu’émettre un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Je n’étais pas hostile a priori à cette disposition introduite par le Sénat, qui vise en effet à remédier à une difficulté d’organisation patente des juridictions, liée dans une large mesure à une carence en matière d’effectifs de greffiers. Je signale d’ailleurs que, ce matin même, l’École nationale des greffes a accueilli une nouvelle promotion de plus de 400 élèves, encore plus nombreuse que celle de l’année dernière.
Monsieur le rapporteur, vous êtes devenu particulièrement « populaire » dans tous les greffes de France, où l’amendement « Détraigne » a été très discuté ! En arrivant à la chancellerie, j’ai reçu les quarante-quatre organisations syndicales représentant les personnels du ministère ; une trentaine d’entre elles m’ont parlé du « 13 bis », qui, je suis au regret de vous le dire, fait l’unanimité contre lui…
J’avoue avoir été convaincu par les arguments qu’elles ont développés. Je me souviens en particulier d’un greffier extrêmement spécialisé en matière prud’homale, qui me disait que, si on le « bombardait » dans un greffe où cette compétence ne trouverait pas à s’employer, ce serait au détriment des justiciables. Ainsi, ce qui pouvait d’abord apparaître comme un élément de fluidité pourrait finalement se révéler être plutôt un facteur de fragilisation des services que l’on est en droit d’attendre des greffiers.
Néanmoins, je crois que ce sujet mérite réflexion et qu’il ne faut pas fermer la porte à des évolutions. C’est pourquoi nous préparons, en concertation avec les organisations syndicales concernées, un décret ménageant un assouplissement des conditions de délégation des agents des greffes au sein du ressort d’une même cour d’appel.
Au bénéfice de cette indication, je donne un avis favorable aux amendements visant à supprimer l’article 13 bis.
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Yves Détraigne, rapporteur. Dans toutes les juridictions que j’ai l’occasion de visiter, on me parle de cette mesure… Les greffiers s’y opposent, craignant de devenir taillables et corvéables à merci, même avec les précautions que nous avons prévues. En revanche, pour les présidents de juridiction, c’est une très bonne mesure, qui permettra d’apporter de la souplesse dans la gestion des effectifs. Je maintiens donc que l’idée n’est pas mauvaise ! Son inscription dans la loi ne signifie pas que les chefs de juridiction pourront du jour au lendemain déplacer les greffiers au gré des urgences et de la charge de travail des différents tribunaux de la ville. Il faudra une circulaire d’application…
M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Et du discernement !
M. Yves Détraigne, rapporteur. Je suis certain que le ministre fera preuve de beaucoup de discernement en préparant cette circulaire !
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.
M. Jacques Bigot. Une évolution est effectivement nécessaire, mais nous sommes confrontés à un problème général d’organisation de la justice, avec des différences entre greffiers et magistrats. Ainsi, l’autorité fonctionnelle au sein des juridictions est une question complexe.
Comme le garde des sceaux l’a lui-même reconnu, il faut revoir tout cela, mais il serait prématuré de le faire aujourd’hui. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous demande de soutenir notre amendement de suppression.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 44 et 71.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 13 bis.
(L'article 13 bis est adopté.)
Article 13 ter
(Supprimé)
Mme la présidente. L’amendement n° 45, présenté par MM. Bigot, Richard, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après le chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’organisation judiciaire, il est inséré un chapitre III bis ainsi rédigé :
« Chapitre III bis
« Les juristes assistants
« Art. L. 123-5. – Des juristes assistants sont institués auprès des juridictions. Peuvent être nommées en qualité de juristes assistants auprès des magistrats des tribunaux d’instance, des tribunaux de grande instance et de première instance, des cours d’appel ainsi qu’à la Cour de cassation les personnes titulaires d’un diplôme de doctorat en droit ou sanctionnant une formation juridique au moins égale à cinq années d’études supérieures après le baccalauréat avec deux années d’expérience professionnelle dans le domaine juridique et que leur compétence qualifie particulièrement pour exercer ces fonctions. Ces juristes assistants sont nommés, à temps partiel ou complet, pour une durée maximale de trois années, renouvelable une fois. Ils sont tenus au secret professionnel et peuvent accéder aux dossiers de procédure pour l’exercice des tâches qui leur sont confiées. Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Jacques Bigot.
M. Jacques Bigot. Comme je l’ai déjà indiqué en commission, je ne comprends pas que celle-ci ait supprimé la possibilité, introduite à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement, de recruter des juristes assistants.
Dans n’importe quelle entreprise, le souci de rationalité amène à recourir, pour accomplir certaines tâches et soulager les cadres, à des collaborateurs formés et moins bien rémunérés.
Or, dans les juridictions, on voit des magistrats taper eux-mêmes les rapports avant les audiences et les décisions, faire des recherches, bref accomplir des tâches qui pourraient, comme cela se pratique dans d’autres pays, être confiées à des gens chargés de les assister dans leur travail.
Certes, il existe aujourd’hui la possibilité de recourir à des assistants de justice. Ce sont souvent des étudiants recrutés à temps partiel – par exemple pour vingt heures par semaine – qui préparent le concours de l’École nationale de la magistrature ou l’entrée dans la profession d’avocat. Ils ne sont donc pas incompétents, mais ils n’ont pas une formation extrêmement poussée.
Nous proposons d’ouvrir la possibilité de recruter de juristes assistants, qui seraient mieux rémunérés que les assistants de justice ou que les auditeurs de justice en formation à l’ENM. Il s’agirait principalement de doctorants en droit ; on sait que les facultés en produisent beaucoup et qu’ils ne trouvent pas nécessairement d’emploi… Au terme de leur contrat de trois ans, pouvant être renouvelé une fois, ils pourraient demander à intégrer la magistrature sans avoir à passer toutes les épreuves de l’ENM. On sait que le corps de magistrats va fondre dans les années à venir si l’on ne procède pas à des recrutements importants.
En conclusion, il s’agit à mon avis d’un très bon dispositif, qui va dans le sens d’une amélioration du fonctionnement de la justice. Je crains, monsieur le garde des sceaux, qu’il n’ait pas été suffisamment expliqué aux membres de la commission des lois du Sénat. Je souhaite que le rapporteur puisse changer d’avis sur ce sujet !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Yves Détraigne, rapporteur. Cet amendement vise à rétablir la création d’un corps de juristes assistants.
Aujourd’hui, les magistrats des juridictions judiciaires peuvent être aidés par des assistants de justice, voire, en matière pénale, par des assistants spécialisés.
La commission des lois est favorable, dans le principe, aux mesures visant à alléger la charge de travail des magistrats pour leur permettre de se recentrer sur les missions qui constituent leur cœur de métier. Cependant, pour éviter de complexifier encore davantage l’organisation judiciaire, peut-être vaudrait-il mieux commencer par renforcer le nombre et le rôle des actuels assistants de justice.
Monsieur le garde de sceaux, si vous réussissez à obtenir les moyens budgétaires qui pour l’heure vous manquent, nous pourrons alors envisager la création d’un corps de juristes assistants ! Mais, à ce stade, cela semble prématuré.
En outre, on peut s’interroger sur le statut de ces juristes assistants. L’article 13 ter ne précise pas quel serait exactement leur rôle : comment s’articulerait-il avec celui des assistants de justice ? On le voit, un certain nombre de questions se posent. C’est pourquoi la commission a émis un avis défavorable sur l’amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Nous nous félicitons tous que les magistrats, qui sont énormément sollicités, soient de plus en plus aidés pour accomplir leurs nombreuses missions. Plus nous pourrons renforcer l’équipe du magistrat, plus celui-ci pourra se concentrer sur l’acte de juger.
Dans cette perspective, différentes catégories de personnels ont été créées.
Les assistants spécialisés, au nombre de soixante-quinze, sont mis à la disposition de la justice par une autre administration. Il peut s’agir, par exemple, d’inspecteurs des impôts. Leur vocation est d’apporter leur technicité aux pôles de l’instruction, aux magistrats du parquet et aux juridictions interrégionales spécialisées.
Les assistants de justice, quant à eux, sont souvent, comme l’a dit M. Bigot, des étudiants de niveau bac+4 ou master 2 se destinant à la magistrature ou à la profession d’avocat. Ils sont aujourd’hui 950 dans toute la France. Ils ne peuvent pas travailler plus de 80 heures par mois, mais leur concours est indispensable.
Enfin, nous souhaitons créer une troisième catégorie, celle des juristes assistants. Leur fonction est bien définie : il leur reviendra notamment de produire, pour le compte du magistrat, des analyses juridiques approfondies ou d’effectuer des tâches de documentation. Nous comptons en recruter 245. Eux aussi contribueront à alléger la charge de travail des magistrats.
Il importe cependant de veiller à la bonne insertion de ces personnels dans l’organisation des juridictions. Il ne s’agit pas que chacun fasse tout et n’importe quoi. En tout état de cause, je donne un avis favorable à l’amendement n° 45.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Mézard, pour explication de vote.
M. Jacques Mézard. Comme je l’ai déjà indiqué en commission des lois, cet amendement visant à créer des juristes assistants, dont le niveau de recrutement serait le doctorat en droit ou une formation juridique de cinq ans assortie de deux années d’expérience, me laisse dubitatif. Seule une minorité de magistrats sont docteurs d’État en droit…
La solution la plus raisonnable et la plus simple, monsieur le garde des sceaux, consisterait à créer davantage de postes de magistrat et à faciliter plus encore l’accès des docteurs en droit à l’École nationale de la magistrature.
Mme la présidente. La parole est à M. le garde des sceaux.
M. Jean-Jacques Urvoas, garde des sceaux. Monsieur Mézard, nous faisons les deux : nous formons de plus en plus de magistrats, puisque la nouvelle promotion de l’ENM est encore plus nombreuse que celle de l’an passé, qui était elle-même plus fournie que la précédente.
Durant cette législature, nous aurons ainsi créé 2 086 postes de magistrat, contre 840 durant la précédente. Notre ambition est de combler les vacances de postes ; aujourd’hui, 450 postes demeurent vacants : si nous poursuivons l’effort de recrutement, nous parviendrons à les pourvoir dans les années à venir.
Toutefois, cela ne veut pas dire qu’il faille laisser les magistrats accomplir des tâches qui ne relèvent pas des missions pour lesquelles ils ont été formés. Permettre au magistrat de se concentrer sur le règlement des litiges suppose de le décharger des travaux que nous souhaitons confier aux juristes assistants, à savoir les analyses juridiques approfondies, la recherche documentaire affinée…
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.
M. Jacques Bigot. J’ajouterai que, outre l’acte de juger, y compris en appel, des dossiers de plus en plus complexes, il y a aussi celui de rédiger ! Le juriste assistant pourra parfaitement prérédiger, pour le compte du magistrat, le rapport en vue de l’audience ou la décision de justice. Cela va au-delà de la mission des assistants de justice, qui sont souvent des étudiants travaillant à temps partiel et découvrant un monde judiciaire qu’ils quitteront dès qu’ils auront réussi un concours.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Il est question, dans l’amendement, non pas uniquement des docteurs en droit, mais aussi des personnes ayant suivi cinq années d’études juridiques.
Mme la présidente. En conséquence, l’article 13 ter demeure supprimé.
Chapitre III
Dispositions tendant à l’amélioration de l’organisation et de la compétence des juridictions répressives
Article 14
(Pour coordination)
(Suppression maintenue)
Article 14 bis
I. – (Supprimé)
II. – (Non modifié) Le chapitre Ier et le II de l’article 30 de la loi n° 2007-291 du 5 mars 2007 tendant à renforcer l’équilibre de la procédure pénale sont abrogés.
III et IV. – (Supprimés)
V (nouveau). – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Le chapitre III du titre Ier du livre Ier est ainsi modifié :
a) L’intitulé est complété par les mots : « et de la collégialité de l’instruction : juridiction d’instruction du premier degré » ;
b) Au début, est insérée une section 1 intitulée : « Du juge d’instruction » et comprenant les articles 49 à 52-1 ;
c) Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Du collège de l’instruction
« Art. 52-2. – La présente section est applicable au traitement des affaires mentionnées :
« - à l’article 704 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 704-1 ;
« - à l’article 706-2 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’avant-dernier alinéa du I du même article ;
« - à l’article 706-16 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 706-17 ;
« - aux articles 706-73 et 706-73-1 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 706-75 ;
« - à l’article 706-167 quand a été exercée la compétence concurrente prévue à l’article 706-168.
« Art. 52-3. – Un collège de l’instruction est chargé, lorsqu’il est saisi soit à l’initiative du juge d’instruction en charge de la procédure, soit sur requête du procureur de la République, soit sur demande d’une partie déposée selon les modalités prévues par l’avant-dernier alinéa de l’article 81, de prendre une des ordonnances mentionnées à l’article 52-5.
« Art. 52-4. – Le collège de l’instruction est composé de trois juges d’instruction, dont le juge saisi de l’information, président.
« Les deux autres juges sont désignés par le président du tribunal de grande instance. Celui-ci peut établir à cette fin une ordonnance de roulement.
« Lorsque l’information fait l’objet d’une cosaisine, le ou les juges cosaisis font partie du collège de l’instruction. Si plus de trois juges ont été désignés dans le cadre de la cosaisine, l’ordre de leur désignation détermine leur appartenance au collège, sauf décision contraire du président du tribunal de grande instance.
« Lorsque, dans un tribunal de grande instance, le nombre de juges d’instruction ne suffit pas pour composer le collège, l’un des membres du collège peut être désigné parmi les autres juges du siège du tribunal.
« Les membres du collège de l’instruction sont désignés lors de la saisine de celui-ci ; cette désignation vaut également pour les autres saisines qui peuvent intervenir dans le cadre de la même information.
« Les désignations prévues au présent article sont des mesures d’administration judiciaire non susceptibles de recours.
« Art. 52-5. – Lorsqu’il est saisi dans les conditions prévues à l’article 52-3, le collège de l’instruction est compétent pour prendre une des ordonnances suivantes :
« 1° Ordonnance statuant sur la demande d’une personne mise en examen tendant à devenir témoin assisté en application de l’article 80-1-1 ;
« 2° Ordonnance statuant sur une demande d’acte déposée en application des articles 81, 82-1, 82-2 et 167 ;
« 3° Ordonnance statuant sur les demandes des parties déposées après l’avis de fin d’information en application du quatrième alinéa de l’article 175 ;
« 4° Ordonnance statuant sur les demandes relatives au respect du calendrier prévisionnel de l’information, en application de l’article 175-1 ;
« 5° Ordonnance procédant au règlement de l’information en application des articles 176 à 183 ; la demande tendant à la saisine du collège doit alors intervenir dans le délai mentionné au quatrième alinéa de l’article 175.
« Art. 52-6. – Les décisions du collège de l’instruction prévues par l’article 52-5 sont prises par ordonnance motivée signée par le président du collège et mentionnant le nom des deux autres juges faisant partie du collège.
« Art. 52-7. – Les juges du collège de l’instruction ne peuvent, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales qu’ils ont connues en cette qualité. » ;
2° Au troisième alinéa de l’article 84, après les mots : « du juge chargé de l’information », sont insérés les mots : « ou d’un juge membre du collège de l’instruction » et les mots : « d’instruction » sont supprimés ;
3° L’article 183 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les ordonnances rendues par le collège de l’instruction en application de l’article 52-6 sont notifiées conformément aux dispositions du présent article. » ;
4° À l’intitulé de la section 12 du chapitre Ier du titre III du livre Ier, après les mots : « d’instruction », sont insérés les mots : « ou du collège de l’instruction ou du juge des libertés et de la détention » ;
5° Après l’article 186-5, il est inséré un article 186-6 ainsi rédigé :
« Art. 186-6. – Les articles 186 à 186-5 s’appliquent aux appels formés contre les ordonnances rendues par le collège de l’instruction. »
VI (nouveau). – Le V du présent article entre en vigueur le 1er janvier 2017.
Mme la présidente. L’amendement n° 46, présenté par MM. Bigot, Richard, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 38
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jacques Bigot.
M. Jacques Bigot. Cet amendement vise à supprimer les dispositions relatives à la collégialité de l’instruction introduites par la commission des lois.
À la suite de l’émoi suscité par l’affaire d’Outreau, on a voulu introduire de la collégialité dans l’instruction pour remédier à la grande solitude du juge d’instruction, mais en oubliant l’existence de la chambre de l’instruction, qui est composée de plusieurs magistrats, de surcroît expérimentés puisqu’ils siègent en cour d’appel.
Dans le même temps, le rôle du procureur et celui du juge des libertés et de la détention se renforcent De ce fait, le juge d’instruction voit le sien se réduire. En outre, des pôles de l’instruction, reposant sur un travail en collégialité, ont été mis en place pour traiter certaines affaires.
Finalement, la mise en œuvre de la collégialité de l’instruction se heurtant à des problèmes techniques, matériels et de moyens, il faut savoir y renoncer. L’Assemblée nationale a eu ce courage ; je souhaite que le Sénat l’ait également !