M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. À la lecture de l’article 1er dans le texte de la commission, je ne vois pas de difficulté majeure à ajouter, après l’alinéa 9, les deux alinéas proposés par Mme Cukierman. Je voterai donc l’amendement n° 72.
M. le président. En conséquence, les amendements identiques nos 55 rectifié bis et 166 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Monsieur Hervé, l'amendement n° 167 rectifié est-il maintenu ?
M. Loïc Hervé. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Desessard, l'amendement n° 290 est-il maintenu ?
M. Jean Desessard. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 167 rectifié et 290.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur Longeot, l'amendement n° 56 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Jean-François Longeot. Oui, monsieur le président.
M. le président. Monsieur Bertrand, l'amendement n° 272 rectifié est-il maintenu ?
M. Alain Bertrand. Oui, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 56 rectifié bis et 272 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L'amendement n° 100, présenté par MM. Roux, Duran, Jeansannetas, Richard et Guillaume, Mme Cartron, MM. Raoul et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Madrelle et Miquel, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 7
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« … De contribuer à la valorisation de tous les atouts de la montagne, en soutenant la recherche appliquée, l’expérimentation, l’innovation, l’animation locale et l’assistance technique nécessaires à la mise en œuvre de projets de développement global, ainsi que la diffusion des expériences et des techniques adaptées au milieu montagnard ;
La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Cet amendement vise à préciser, dans les finalités de l’action de l’État en faveur de la montagne, la nécessité de valoriser les atouts de ces territoires. En effet, si l’économie de montagne souffre souvent de handicaps, il n’en reste pas moins qu’elle dispose d’atouts majeurs qu’il faut préserver et valoriser.
Tel était l’objet principal du fonds d’intervention pour l’autodéveloppement en montagne, dont l’article 80 de la loi de 1985 définissait clairement « la mission prioritaire et permanente ». Malheureusement, la suppression du FIAM a entraîné l’abrogation de l’article et sa définition très claire de la notion d’autodéveloppement.
Il convient donc de rétablir dans cet article cette finalité essentielle de la valorisation des atouts des territoires montagnards afin que la maîtrise des crédits destinés à favoriser le développement local soit assurée par les populations concernées et par leurs élus.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. Cet amendement vise à ajouter un objectif général relatif à la valorisation des atouts de la montagne, au soutien aux projets de développement global et à la diffusion des expériences et techniques adaptées à la montagne.
L’ajout est un peu redondant avec d’autres objectifs, comme celui sur l’exercice de nouvelles responsabilités ou les innovations. Par ailleurs, le contenu exact de cet objectif ne me paraît pas très clair. Je suggère donc le retrait ; sinon l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. La nécessité de valoriser tous les atouts des territoires n’est effectivement pas précisée en tant que telle. Cette omission est volontaire, car une énumération de thèmes fait courir le risque d’un oubli ou de se voir opposer ceux qui ne sont pas cités. La proposition de principe sur la valorisation des atouts des territoires me semble donc plus efficace.
Je m’en remets à votre sagesse, monsieur le sénateur, pour savoir si vous voulez suivre le rapporteur et retirer cet amendement. Je comprends l’esprit qui vous anime, mais je pense que votre proposition risque d’aller à l’encontre du but que vous recherchez.
M. le président. Monsieur Roux, l'amendement n° 100 est-il maintenu ?
M. Jean-Yves Roux. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 100 est retiré.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 182 rectifié est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye, Delcros, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle.
L'amendement n° 297 est présenté par Mme Espagnac.
L'amendement n° 428 est présenté par MM. Carle et Savin.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 8
Remplacer les mots :
et artisanales liées à la montagne ou présentes
par les mots :
, le tourisme hivernal et estival, et l’artisanat liés à la montagne ou présents
La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l’amendement n° 182 rectifié.
M. Loïc Hervé. Cet amendement tend à préciser l’importance que revêt le tourisme tant hivernal qu’estival pour le développement économique des territoires de montagne.
Notre territoire national abrite des sites touristiques absolument exceptionnels. À cet égard, les stations de montagne sont autant d’acteurs clés pour le tourisme qui génèrent plusieurs milliards de dépenses touristiques. Je rejoins en cela le plaidoyer pro domo de notre collègue Michel Bouvard. Leur activité contribue fortement au dynamisme économique, ainsi qu’à l’aménagement du territoire.
Le tourisme dans les territoires de montagne représente une source d’emplois non délocalisables et de valorisation du patrimoine. Ce secteur constitue un véritable atout, qu’il convient de conserver et de renforcer. Les stations de montagne en tant que telles doivent faire l’objet d’une politique ambitieuse pour répondre aux enjeux stratégiques auxquels sont confrontés leurs élus : la situation budgétaire, la diversification des activités, la modernisation, les investissements.
J’ajoute la question du climat et de son évolution puisque nous sommes à la mi-décembre et que l’inquiétude pour la saison est très grande actuellement en montagne.
M. le président. L’amendement n° 297 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Michel Savin, pour présenter l'amendement n° 428.
M. Michel Savin. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. La commission a jugé que la précision apportée par ces amendements identiques était utile pour renforcer la place du tourisme dans les grands principes de la loi Montagne. Elle a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Vous voulez, messieurs les sénateurs, faire une mention complémentaire aux activités liées au tourisme à l’alinéa 8. J’appelle votre attention sur le fait que cette demande est satisfaite à l’alinéa 10 : les activités liées au tourisme, estival comme hivernal, font l’objet d’un alinéa séparé, témoignant, comme vous le souhaitez, de l’importance de ce secteur d’activité.
Je vous invite donc à retirer vos amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable, ces amendements étant satisfaits deux alinéas plus loin.
M. le président. Monsieur Hervé, l'amendement n° 182 rectifié est-il maintenu ?
M. Loïc Hervé. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 182 rectifié est retiré.
Monsieur Savin, l'amendement n° 428 est-il maintenu ?
M. Michel Savin. Oui, monsieur le président.
M. le président. L'amendement n° 101, présenté par MM. Roux, Duran, Jeansannetas, Richard et Guillaume, Mme Cartron, MM. Raoul et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Camani, Cornano et Filleul, Mme Herviaux, MM. J.C. Leroy, Madrelle et Miquel, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 19
Après les mots :
transition numérique
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
et le développement de services numériques adaptés aux usages et contraintes de populations de montagne ;
La parole est à M. Jean-Yves Roux.
M. Jean-Yves Roux. Le développement du numérique constitue évidemment un point central pour les territoires de montagne. Les attentes de nos concitoyens sont très fortes en la matière, tant les enjeux sont importants.
Les parlementaires de montagne que nous sommes sont très attachés au développement de services adaptés aux populations de montagne, en priorité pour la formation à distance, la santé, l’accès aux services publics, la facilitation des démarches administratives, le tourisme. Ce sont tous des enjeux cruciaux pour notre développement.
Tel est l’objectif de cet amendement, qui vise à préciser dans les grandes finalités de l’action de l’État en faveur de la montagne le développement de services numériques adaptés aux usages et contraintes de populations de montagne.
Par le biais de cet amendement, je souhaite également promouvoir la création d’un observatoire des usages numériques en montagne permettant de s’assurer de l’adéquation de l’offre de services et d’explorer les usages émergents, innovants et reproductibles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. Cette mention permet de compléter l’objectif général de transition numérique, en soulignant l’importance du développement de services numériques adaptés. Elle est cohérente avec le contenu de l’article 9 du projet de loi sur ce sujet. La commission a donc émis un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Dans la mesure où l’article 1er est programmatique, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. L'amendement n° 165 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti et Delcros, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« … De favoriser les coopérations interrégionales et les programmes européens. »
La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. Cet amendement a pour objet d’intégrer la question des coopérations interrégionales et des programmes européens dans le projet de loi.
Cela a été dit, les dimensions européenne et frontalière sont très présentes dans les territoires de montagne. Des programmes européens sont conduits d’une région alpine à l’autre. Il s’agit donc de ne pas oublier la dimension interrégionale, intereuropéenne entre les différents États.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. Venant du même territoire que M. Hervé, je partage l’objectif sur le fond, mais l’article 2 du projet de loi vise déjà la promotion du développement de la montagne auprès de l’Union européenne, notamment dans la politique européenne de cohésion et dans les conventions ou accords transfrontaliers. Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Le Gouvernement est du même avis que la commission, les enjeux européens étant évoqués noir sur blanc à l’article 2 et les questions de coopération interrégionale à l’article 7.
Il est précisé, à l’article 2, que « L’État, les collectivités territoriales et leurs groupements, dans le cadre de leurs compétences respectives, promeuvent auprès de l’Union européenne et des instances internationales concernées la reconnaissance du développement équitable et durable de la montagne comme un enjeu majeur ».
L’article 7 dispose que « La convention interrégionale de massif est un contrat conclu, pour chaque massif, entre l’État et les régions concernées. Elle traduit les priorités de l’action de l’État et des régions concernées en faveur du développement économique, social et culturel, de l’aménagement et de la protection du massif, et prévoit les mesures et les financements mis en œuvre dans ce cadre ».
Votre amendement étant satisfait, je vous invite à le retirer.
M. le président. Monsieur Hervé, l'amendement n° 165 rectifié est-il maintenu ?
M. Loïc Hervé. Oui, parce que je n’ai pas tout à fait la même lecture que M. le rapporteur et M. le ministre. Il s’agit non pas de promouvoir la montagne auprès des institutions européennes, mais bien d’encourager la coopération de région à région, comme cela se produit actuellement en montagne. Nous traitons de relations horizontales, alors que les articles 2 et 7 portent sur des relations verticales.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. Nous évoquons là des actions complémentaires : d’une part, il y a la nécessité de promouvoir au niveau européen la politique de la montagne, ce qui a été fait lorsqu’il a été question de la politique de cohésion de l’Union européenne, afin que les traités européens reconnaissent la spécificité des territoires de montagne ; d’autre part, il y a la coopération transfrontalière, qui est le sujet qui nous préoccupe.
Monsieur le ministre, les territoires frontaliers sont souvent des territoires de montagne victimes de ce que j’ai l’habitude d’appeler le syndrome de la terre plate, en référence à l’époque où l’on pensait que la terre était plate et que l’on tombait arrivé au bout.
Les documents administratifs souffrent souvent de ce syndrome. Je prendrai l’exemple du comité de massif des Alpes. Pour un classement de zones naturelles ou pour la création de zones Natura 2000 sur des communes en vue de protéger telle ou telle espèce, il est intéressant, en territoire frontalier, de savoir ce qui est fait de l’autre côté de la frontière en termes de protection de l’environnement. Or la DREAL est incapable de fournir un document sur ce qui est classé sur le versant italien ou suisse, c'est-à-dire immédiatement de l’autre côté de la frontière, ou sur le versant espagnol des Pyrénées.
Nous devons effectivement avoir des approches transfrontalières, mais aussi encourager les coopérations entre régions frontalières sur des politiques communes, ce qui permet d'ailleurs d’obtenir des financements européens, les programmes transfrontaliers étant bien dotés.
Nous ne sommes donc pas en opposition. Peut-être cet article n’est-il pas l’endroit le plus judicieux pour faire figurer cette notion, mais celle-ci est distincte et complémentaire de la promotion au sein de l’Union européenne.
M. le président. L'amendement n° 231, présenté par MM. Savin, Calvet et Joyandet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Perrin, Raison, Darnaud, Saugey et Genest, Mme Giudicelli et MM. Chaize, A. Marc et Reichardt, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« … Prendre en compte la représentation des habitants et des territoires dans l’organisation de la République. »
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. L’organisation territoriale de la République à tendance à imposer une uniformité calquée sur le modèle urbain, basé essentiellement sur la loi du nombre, source de recentralisation et d’éloignement. Or cette conception de l’organisation de la République accentue le mouvement de retrait de la montagne dans la gouvernance territoriale qui risque de perdre ainsi, outre ses relais habituels, toute visibilité et représentation au sein des exécutifs régionaux, départementaux et intercommunaux.
Alors que l’article 1er du projet de loi actualise les principes et les objectifs de la politique nationale de la montagne, cet amendement gagne tout son sens. Son objet est de prendre en considération la représentation des territoires et pas exclusivement le critère démographique fondé sur le nombre d’habitants dans l’organisation de la République.
Ce débat s’inscrit notamment dans celui des découpages de circonscriptions.
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. Michel Savin. Celles-ci sont de plus en plus urbaines pour des questions d’équilibre démographique. Il n’y aura bientôt plus que très peu d’élus ruraux ou montagnards au sein de nos assemblées d’élus !
M. Alain Bertrand. Eh oui !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. L’objectif 1 bis vise déjà à prendre en compte la diversité des territoires et les disparités démographiques à titre général. Le présent amendement me semble donc satisfait.
Par ailleurs, il est risqué de faire référence à l’organisation de notre République ici, car ce genre de disposition peut poser des difficultés d’ordre constitutionnel.
Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. L’article 1er de la Constitution dispose que la France est une République décentralisée, ce qui implique la prise en compte de la diversité des territoires et de leurs habitants.
Votre proposition monsieur le sénateur, fait totalement obstacle à la règle en vertu de laquelle les assemblées locales doivent être composées sur des bases essentiellement démographiques. Elle est donc contraire à la Constitution. Une seule dérogation existe : la loi garantit au moins un siège à chaque commune dans les intercommunalités.
Ce n’est peut-être pas le moment ni le lieu de nous lancer dans une révision constitutionnelle. Comme le rapporteur, je demande le retrait de l’amendement ; sinon, le Gouvernement émettra un avis défavorable, celui-ci étant clairement inconstitutionnel.
M. le président. Monsieur Savin, l'amendement n° 231 est-il maintenu ?
M. Michel Savin. Le Conseil constitutionnel, comme pour l’ensemble des dispositions législatives, peut censurer une telle insertion. Cependant, il peut aussi ne pas le faire, et la portée de cet amendement serait alors un engagement fort pour nos territoires de montagne.
Pour ma part, je ne pense pas qu’il faille anticiper une censure dont le caractère n’est pas certain. C'est la raison pour laquelle je maintiens cet amendement, malgré l’avis défavorable de la commission et du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Alain Bertrand, pour explication de vote.
M. Alain Bertrand. Cela fait vingt-cinq ans que je pense qu’il est urgent de modifier la Constitution, les élus représentant les citoyens, certes, mais aussi les territoires. Sinon, on finira par aboutir, comme l’a dit notre collègue Savin, à ce que des territoires ne soient plus représentés dans les assemblées.
La Lozère, par exemple, n’aurait pas de conseiller régional si une correction n’avait pas été introduite dans la loi. Le Conseil d’État a admis, dans la limite de 25 %, un mix entre la représentation des citoyens et celle des territoires. Nous devons néanmoins rester très vigilants, car comment des conseillers régionaux à Toulouse, à Bordeaux ou à Lyon peuvent-ils porter seuls ou à deux la voix d’un territoire rural dans une assemblée de 150, voire de 250 membres ? Dans le même temps, nous, les ruraux, observons avec stupéfaction les grandes villes compter six à dix députés, six à neuf sénateurs. Cette situation introduit un trouble.
Certes, ce n’est peut-être pas le jour ni le lieu, comme l’a indiqué M. le ministre, mais, un jour ou l’autre, il faudra réviser la Constitution pour que les représentants du peuple représentent le peuple et les territoires.
M. le président. La parole est à M. Alain Marc, pour explication de vote.
M. Alain Marc. Nous ne méconnaissons pas, bien sûr, la jurisprudence du Conseil constitutionnel, mais cet amendement nous permet aussi de marquer, comme vient de le faire notre collègue Bertrand, notre attachement à nos territoires. N’oublions pas que certains territoires, c’est le cas dans mon département, ont une densité de cinq habitants au kilomètre carré, soit deux fois moindre qu’au Sahel. Il ne faut pas mésestimer cet aspect.
Cet amendement, même s’il devait être retiré, me paraît marquer un point d’arrêt à une représentation qui serait strictement démographique. Il s’agit d’un appel : il faudra se saisir de cette question pour changer enfin la Constitution sur ce point.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. Je tiens à remercier notre collègue Michel Savin d’avoir déposé cet amendement, mais aussi de le maintenir, car le sujet est important.
Je croyais que nous discutions d’un texte sur la montagne. Si nous sommes tous attachés à l’égalité des citoyens devant le suffrage, si nous partageons tous les objectifs de la Constitution, nous devons en même temps regarder la réalité telle qu’elle est, à savoir l’appauvrissement de la représentation des territoires dans les assemblées locales, voire au Parlement.
Je préside une intercommunalité qui a vu, de par la jurisprudence Commune de Salbris, un accord local complètement réduit à néant et certaines communes de montagne n’être plus représentées que par leur maire, ce qui est insuffisant pour des territoires immenses. Nous avons tous défendu, dans nos différents plaidoyers pour la montagne, le territoire, la richesse économique, la capacité d’accueil… Et nous ne serions pas capables d’assurer la représentation de ces territoires par leurs élus ?
Ces territoires représentent un patrimoine, un potentiel, une réalité économique considérables. Notre devoir, en tant que membres de la Haute Assemblée, est de marquer un coup d’arrêt, comme vient de le dire mon collègue Alain Marc, à la logique d’affaiblissement croissant de nos collectivités locales et de leurs assemblées délibérantes quand il s’agit de représenter à la fois la ruralité et la montagne.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Nous remercions les auteurs de cet amendement de poser la problématique de la représentativité des élus, renvoyée de projet de loi en projet de loi. Effectivement, la Constitution est ainsi rédigée, mais le principe d’une Constitution n’est-il pas d’être le meilleur texte pour permettre aux femmes et aux hommes de vivre et de s’administrer sur le territoire de la République ? Elle est donc amenée à évoluer pour répondre aux besoins, aux défis, aux enjeux de demain.
Nous ne sommes pas opposés à la question soulevée par cet amendement. Toutefois, est-ce au détour d’un amendement, y compris dans le présent projet de loi Montagne, qu’il faut modifier la Constitution ? Je ne le pense pas. Une telle modification nécessite de réfléchir à l’harmonisation entre l’exigence du principe même de la démocratie, qui est un homme, une voix, et donc la représentativité des élus par rapport au nombre d’habitants, et le fait que, principe de réalité oblige, cela vient d’être rappelé, lorsque des territoires sont dépourvus d’élus dans leur diversité…
M. Loïc Hervé. Très bien !
Mme Cécile Cukierman. … les femmes et les hommes qui y vivent ne sont pas représentés, parce qu’il en est ainsi de la nature humaine. Ce n’est pas faire offense que de poser ce principe.
Nous défendons systématiquement, pour renforcer la démocratie, démocratie de la représentativité des hommes et des territoires, le fait que nous ayons besoin de plus d’élus. Ce n’est pas un handicap en soi que plus d’élus représentent plus et mieux les populations et les territoires.
Sans faire de faux procès ou employer la langue de bois, nous ne sommes pas opposés à cet amendement. Cependant, nous nous abstiendrons, parce que nous pensons qu’il soulève des questions qui vont au-delà de la représentativité dans les territoires de montagne.
Des élections, présidentielle et législatives, auront bientôt lieu. Laissons la nouvelle majorité proposer une véritable réforme constitutionnelle prenant en compte tous ces éléments !
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. La cohésion de notre pays et ses équilibres écologiques reposent sur deux piliers : des zones urbaines à très forte concentration d’habitants et des espaces ruraux, qui disposent certes d’une démographie moins importante, mais qui détiennent des richesses naturelles dont la France a besoin.
Nous devons arrêter la spirale dans laquelle nous sommes engagés et qui aboutirait à ce que seuls les territoires dont la population est importante auraient droit à la parole ou pourraient contribuer au débat public. Il faut afficher une autre volonté : tous les territoires doivent être représentés et apporter aux débats, tant locaux que nationaux, la richesse de leur point de vue.
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je m’associe à cet amendement, car, pour les écologistes, les territoires doivent former un équilibre avec les villes afin d’assurer le respect de la diversité de la faune et de la flore. C’est pourquoi ces territoires doivent être correctement représentés.
Dans le cas où cette proposition serait contraire à la Constitution, sa durée de vie sera, de toute façon, relativement réduite… Je la voterai cependant comme un appel.
La question des circonscriptions électorales a été mentionnée. Je ne sais pas s’il s’agissait des circonscriptions législatives, mais, en ce qui me concerne, je pense que les territoires doivent être fortement représentés au Sénat, tandis que l’Assemblée nationale doit plutôt obéir à une logique démographique. Le Sénat est bien l’assemblée des territoires et, à partir de là, il doit avoir le dernier mot sur un certain nombre de sujets, en particulier pour tout ce qui concerne la préservation de la montagne ou pour ce qui a justement trait aux territoires comme l’écologie.
Je voterai cet amendement pour bien affirmer le fait qu’au niveau du Sénat il faut maintenir une représentation plus importante des territoires, même si cela ne correspond pas pleinement à la démographie.
On me dit souvent : « À quoi sert le Sénat, puisque l’Assemblée nationale a toujours le dernier mot ? » Certes, nous sommes utiles, car nous améliorons les textes, mais nous devons aussi redéfinir le rôle de notre assemblée, en particulier sur tous les sujets liés aux territoires.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Giraud, pour explication de vote.
Mme Éliane Giraud. Il me semble, en écoutant les différentes interventions, que cet amendement nous emmène très loin… Il pose certes une question de fond, mais on ne peut pas la régler comme cela.
La France compte à la fois des sites urbains et des territoires ruraux et de montagne, si bien que les politiques publiques doivent être définies de manière complexe et fine. En outre, l’intérêt des habitants dépasse en fait le territoire sur lequel ils vivent. Lors de la dernière réunion de la délégation aux collectivités territoriales du Sénat, nous avons examiné cette question à l’occasion d’une table ronde à laquelle participait notamment André Rossinot. Nous y avons bien vu l’intérêt de faire travailler les gens ensemble et de développer la contractualisation.
Nous devons avoir une approche concrète des besoins de nos concitoyens, et nous ne pouvons pas régler leurs problèmes par des logiques cloisonnées. Voilà pourquoi cet amendement – au ton plaintif – ne me convient pas. Le grand pouvoir des montagnards, qui tient d’abord à leur force de conviction et à la biodiversité importante de leurs territoires, en serait finalement limité.
Cet amendement est très restrictif et porte une vision de l’aménagement du territoire que je ne souhaite pas défendre.