Mme la présidente. La parole est à M. Cyril Pellevat, pour le groupe Les Républicains.
M. Cyril Pellevat. Ainsi que cela a été rappelé, y compris par Mme la secrétaire d’État, en 2012, parmi les nombreuses promesses de campagne du candidat François Hollande figurait celle-ci : l’accès à la santé étant un droit fondamental, personne en France ne doit se trouver à plus de trente minutes d’un service d’urgence. M. Hollande a été élu, et les cinq années de son mandat sont bientôt écoulées : force est de constater que cette promesse n’a pas été tenue.
La proposition de loi que nous examinons ce jour est inspirée de cette promesse.
La problématique des déserts médicaux est, certes, cruciale, mais elle n’est pas nouvelle. Nous savons qu’il faut garantir un accès aux soins de qualité pour l’ensemble de la population, sur tout le territoire. Les enjeux sont la garantie d’un droit fondamental à la santé pour tous, mais aussi la garantie du principe de continuité du service public et du principe de l’égalité devant le service public de santé, sans oublier l’enjeu de la vitalité des territoires, notamment en zones de montagne ou rurales.
À plusieurs reprises dans cet hémicycle, au cours de différents débats, nous avons souligné le manque de médecins en milieu rural. Nous nous penchons aujourd’hui sur l’aspect logistique et sur la question des transports, notamment par voie aérienne, via l’hélicoptère.
Nous devons toujours le garder à l’esprit : ce n’est pas au milieu rural de s’adapter à l’offre de soins ; c’est à l’offre de soins de s’adapter au milieu rural et aux besoins des populations ; c’est à l’offre de soins de s’adapter à nos montagnes. Pour cela, l’hélicoptère constitue un atout évident, une nécessité ; c’est un Haut-Savoyard qui vous le dit, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues !
Une meilleure organisation des transferts via l’hélicoptère est nécessaire. C’est l’objet de cette proposition de loi. Nous ne pouvons qu’être d’accord avec cette volonté. L’implantation des moyens aériens pour le transport sanitaire peut être améliorée.
Le texte initial d’Alain Bertrand, de Jacques Mézard et des membres du groupe du RDSE visait à mettre en place une stratégie nationale d’utilisation du transport sanitaire héliporté, déclinée à l’échelon régional par les agences régionales de santé.
Il synthétisait le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS, de 2016 sur les revues de dépenses des hélicoptères de service public. Ce document préconisait des pistes d’optimisation et de mutualisation des appareils, après un état des flottes d’hélicoptères dédiées aux missions de service public. L’objectif était de déterminer le budget annuel des hélicoptères étatiques et privés, afin de rationaliser le maillage sur le territoire, mais également de réduire les coûts.
Comme l’ont mentionné les orateurs précédents, il convient de distinguer le transfert primaire, qui consiste en la prise en charge des personnes pour les transporter vers les services d’urgence, du transfert secondaire, soit un transfert programmé entre établissements de santé pour une prise en charge adéquate du patient.
L’objet de la proposition de loi initiale était de permettre le transfert primaire ou secondaire au centre hospitalier universitaire, ou CHU, en moins de trente minutes.
La commission, sur une initiative de M. le rapporteur, Gilbert Barbier, a réécrit l’article unique de ce texte en reprenant une disposition que nous avions adoptée dans le cadre du texte sur la montagne, avec une distinction entre le transfert primaire et le transfert secondaire, pour lequel la durée du temps de parcours n’est pas pertinente.
La rédaction initiale de la proposition de loi, qui prévoyait la gestion des transports sanitaires héliportés par les agences régionales de santé, conduisait à transférer une part importante des hélicoptères de la sécurité civile aux SAMU ; selon le rapporteur, c’était difficilement acceptable sur le terrain.
Ce texte ne répondait pas à l’objectif des trente minutes et semblait trop contraignant par rapport à la régionalisation. Il aurait impliqué la mutualisation des hélicoptères des SAMU et des appareils de la sécurité civile gérés par les ARS et dont l’utilisation est déclenchée par le médecin régulateur.
Or il convient de s’interroger sur les moyens pour l’ARS d’avoir autorité sur les appareils de la sécurité civile lorsque ceux-ci concourraient à des missions de police ou à des entraînements, soit 25 % de leurs vols. Qu’adviendrait-il de la continuité du service public durant ces périodes d’absence ?
Le nouvel article unique, adopté en commission, prévoit donc deux principes : d’une part, une gestion mutualisée des hélicoptères susceptibles d’assurer le transport sanitaire, par un service placé auprès du Premier ministre, afin de garantir leur répartition équitable sur le territoire ; d’autre part, une gestion territoriale coordonnée avec celle des transports sanitaires terrestres, ainsi que la compétence du médecin régulateur pour décider de la nécessité d’un transport sanitaire héliporté.
Le groupe Les Républicains est favorable au texte ainsi rédigé. Ses membres voteront donc en faveur de cette proposition de loi.
Toutefois, j’aimerais mentionner certains sujets sur lesquels m’ont alerté des professionnels de mon département, sujets qui n’ont pas été abordés dans cet hémicycle et qui devront être pris en compte dans la stratégie nationale d’utilisation du transport sanitaire héliporté. Je pense ainsi à la possibilité d’augmenter la capacité opérationnelle des hélicoptères du SAMU.
En effet, dans le service privé, il n’est aujourd'hui pas possible d’avoir recours à des moyens utiles, comme les jumelles de vision nocturne ou encore le treuillage. Ces moyens sont uniquement utilisés dans le service public, la gendarmerie et la sécurité civile. Avec le développement actuel et l’opérationnalité des services, il serait bien de fournir ces moyens au secteur privé ; cela simplifierait de nombreux secours. Ce sont des savoir-faire que les sociétés maîtrisent du fait des qualifications de leurs pilotes et des missions de secours à personne en montagne. De tels outils sont mis à leur disposition dans des pays voisins, comme la Suisse, depuis 1990, ainsi que l’Italie ou l’Autriche. Il est regrettable qu’ils ne soient pas exploités en France. En Haute-Savoie, alors que nous avons des domaines franco-suisses, notamment les Portes du Soleil, nous n’avons pas la même qualité de services de part et d’autre de la frontière ; c’est tout de même dommage.
L’importance du transport sanitaire héliporté pour les territoires de montagne, dont fait partie mon département, la Haute-Savoie, est incontestable.
Je saisis enfin l’occasion pour saluer tous les professionnels des secours en montagne, qui sont très fortement sollicités pendant la saison hivernale sur tous les domaines skiables. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour le groupe du RDSE.
M. Pierre-Yves Collombat. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, j’aurais mauvaise grâce à ne pas remercier le rapporteur et, plus largement, la commission des affaires sociales, qui l’a suivi. Ses propositions s’inscrivent en effet directement dans la logique du rapport que Catherine Troendlé et moi-même avons commis voilà quelques mois. Son intitulé, Secours à personne : propositions pour une réforme en souffrance, dit assez clairement que beaucoup reste à faire si l’on entend vraiment déployer au mieux les potentialités de notre service public du secours à personne, lequel ne manque pas d’atouts.
Les maux dont il souffre sont d’abord l’imparfaite coordination des responsabilités entre des acteurs multiples, aux moyens financiers divers et, surtout, encore trop enfermés dans des logiques institutionnelles trop souvent élevées au rang de « culture ». D’ailleurs, à en juger par l’intervention de Mme la secrétaire d’État, ces acteurs ont de solides appuis au plus haut niveau…
Constatons notamment l’absence de liens institutionnels forts – les concertations ne sont pas des « liens institutionnels forts » – entre les trois principaux acteurs : le ministère de la santé qui a ses propres exigences, souvent d’ailleurs guidées par un souci d’économies, les services départementaux d’incendie et de secours, ou SDIS, et la sécurité civile. Pour couronner le tout, l’organisation théorique et réglementaire ne correspond que de loin à la réalité des rôles effectifs de chacun sur le terrain. Je reste à la disposition de ceux qui en douteraient.
On comprend donc que la proposition de confier la gestion des secours héliportés à un « service placé auprès du Premier ministre » intégrant l’ensemble des parties prenantes ne pouvait que nous satisfaire. Elle rejoint en effet, sur une question particulière, notre proposition générale d’instituer auprès du Premier ministre une « autorité responsable de l’application du référentiel portant sur l’organisation du secours à personne et de l’aide médicale urgente ».
Même à propos des seuls moyens héliportés, confier cette tâche au seul ministère de la santé à travers les ARS n’aurait été ni possible ni souhaitable vu le nombre d’acteurs à intervenir et, surtout, l’importance du rôle de la sécurité civile.
En effet, à ce jour, les SAMU et la sécurité civile, pour ne rien dire de la gendarmerie et des douanes, disposent chacun de moyens d’intervention héliportés propres, implantés et utilisés selon une logique leur appartenant.
Pour les Héli-SMUR, notons 45 appareils loués auprès d’opérateurs privés ; cela a été évoqué.
Pour la sécurité civile, relevons 35 hélicoptères EC145 équipés pour assurer des soins d’urgence. Ils sont capables d’intervenir en milieu difficile et la nuit, ainsi que de réaliser des hélitreuillages, ce qui est rarement le cas des appareils des Héli-SMUR.
Le secours à personne représente 80 % des missions de la sécurité civile. Cela donne une idée de la place qu’il occupe pour la sécurité civile ; ce n’est pas un passe-temps annexe. Cela se retrouve également pour les SDIS, bras terrestres du dispositif.
Comme cela a été rappelé, nous devons à l’Histoire le fait que les interventions de secours en haute montagne, qui font largement appel à l’hélicoptère, soient assurées par la gendarmerie.
Mettre en place une coordination entre les intervenants potentiels par une autorité extérieure aux intérêts et routines des acteurs, mais tenant compte des réalités de terrain et des solutions mises au point localement est d’autant plus nécessaire que cette autorité pourra alors décliner une doctrine globale du déploiement du service public du secours à personne garantissant qu’aucun point du territoire ne sera oublié.
C’est en tout cas ainsi que j’interprète le deuxième alinéa de l’article unique de la proposition de loi : « Ce service établit les règles d’implantation des appareils afin de garantir une couverture optimale du territoire et un accès aux services d’urgence en moins de trente minutes. »
Une autre disposition de la proposition de loi rejoint les préoccupations figurant dans notre rapport : considérer les moyens d’intervention dont on dispose, terrestres et aériens, comme un tout, en laissant – en tout cas, je l’interprète ainsi – le soin à la régulation de décider quel est le vecteur le mieux approprié dans chaque situation particulière.
Ainsi avons-nous proposé la généralisation, sur l’ensemble du territoire, de plateformes communes d’appel 15-18. Sans confondre les compétences et les responsabilités de chacun des acteurs, notamment celles des médecins régulateurs en matière de diagnostic et de soins, cela permettrait l’élaboration d’une culture commune en matière d’urgence et, surtout, l’utilisation au mieux des moyens disponibles.
J’en viens aux moyens héliportés. À nos yeux, compte tenu de son expérience et de sa capacité à mobiliser des moyens extérieurs en cas de catastrophe, l’échelon territorial de mutualisation et d’emploi « le plus adapté », pour reprendre les termes de la proposition de loi, est la zone de défense.
Autant dire que cette proposition de loi, dont j’espère qu’elle pourra continuer sa route, vient à point pour rappeler que, dans les territoires ruraux et les îles bretonnes, l’hélicoptère reste le seul moyen permettant de répondre aux cas les plus graves, ceux pour lesquels les délais d’acheminement jusqu’au centre où ils pourront être traités sont décisifs. C’est aussi cela, « l’égalité réelle ».
La concentration des moyens médicaux dans les villes, au nom de la qualité des plateaux techniques et de l’efficacité des soins, serait une tromperie si seuls les citadins pouvaient en bénéficier. (Applaudissements sur les travées du RDSE, du groupe écologiste, du groupe socialiste et républicain et du groupe CRC.)
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Yves Roux, pour le groupe socialiste et républicain.
M. Jean-Yves Roux. Je remercie très sincèrement Alain Bertrand et les membres du groupe du RDSE, auteurs de la présente proposition de loi, d’avoir mis en lumière le quotidien de nombreux ruraux et montagnards : le transport sanitaire héliporté.
Comme l’ont très justement fait remarquer les précédents orateurs, cette proposition de loi répond à deux enjeux majeurs, auxquels je ne peux qu’être sensible : faire progresser l’accès réel à un hôpital à moins de trente minutes du lieu de prise en charge de l’urgence sanitaire ; améliorer la coordination des transports sanitaires héliportés.
L’accès de la population à des soins de premiers secours en moins de trente minutes était et demeure une priorité du Gouvernement. Il s’agissait de l’un des engagements du pacte territoire-santé 1, lequel a, à ce titre, été reconduit dans le cadre du deuxième pacte territoire-santé. Je suis heureux que cet objectif, indispensable à une politique d’aménagement du territoire efficace, ait commencé à se traduire dans les faits. Je suis pour autant très attentif à ce que cet objectif puisse reposer sur un diagnostic plus précis, prenant en compte la topographie des territoires, les variations de populations, mais aussi la totalité des acteurs du transport sanitaire héliporté, disponible et formé.
Le transport sanitaire héliporté revêt ainsi une signification toute particulière en montagne, en milieu rural et dans les îles. Je crois utile de le rappeler, en montagne, la distance moyenne pour accéder à un SAMU ou un SMUR est de vingt-sept kilomètres, soit trente à quarante-cinq minutes par la route, contre quinze à trente-cinq minutes par hélicoptère.
Certains départements, comme le mien, les Alpes-de-Haute-Provence, sont particulièrement concernés. La prise en charge de l’urgence sanitaire et l’objectif d’accessibilité à moins de trente minutes passent donc nécessairement par l’hélicoptère.
Nous disposons à ce jour de nouveaux outils législatifs et réglementaires pour prendre en compte les spécificités territoriales et affiner les implantations de moyens en conséquence.
L’instruction du 24 novembre 2016 relative à l’actualisation du diagnostic des populations situées à plus de trente minutes d’un accès aux soins urgents a donné aux ARS la mission d’« actualiser le diagnostic pour 2015 et 2016 des populations situées à plus de trente minutes d’un accès aux soins urgents et de mesurer les progrès effectués. » Le diagnostic final est attendu pour la fin du premier semestre de cette année.
En parallèle, la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne a introduit la possibilité pour les ARS de compléter plus précisément cette évaluation. L’article 1434-3 du code de la santé publique précise que le schéma régional de santé « comporte, le cas échéant, un volet consacré aux besoins de santé spécifiques des populations des zones de montagne, notamment en termes d’accès aux soins urgents et d’évacuation des blessés, et tenant compte des spécificités géographiques, démographiques et saisonnières de ces territoires. »
À n’en pas douter, la stratégie nationale de transport sanitaire héliporté que les auteurs de la présente proposition de loi appellent de leurs vœux devrait tirer le plus grand bénéfice de ces diagnostics réactualisés.
J’en viens à la coordination des moyens mis en œuvre. Je crois effectivement efficace de privilégier non une mutualisation, mais une véritable coordination, permettant d’agir en complémentarité des savoir-faire comme des équipements.
À ce titre, l’ARS ne me paraît pas le seul échelon pertinent pour aboutir, en temps normal comme en temps de crise sanitaire grave, à la mise en place d’une stratégie de transport héliporté pleinement opérationnelle.
Vous me permettrez, mes chers collègues, de regretter ainsi que le rôle des acteurs de la sécurité civile ne soit pas mieux identifié et n’ait pas fait l’objet d’auditions plus poussées.
La sécurité civile, dont il faut louer la très grande technicité et la parfaite connaissance des territoires, est en effet indispensable à la mise en œuvre de stratégies territoriales de transport sanitaire par hélicoptère pleinement efficientes.
Les hélicoptères de la sécurité civile peuvent très bien réaliser des missions de secours à personne. Mais, inversement, les hélicoptères SAMU ne peuvent pas effectuer de missions de secours, à plus forte raison de secours complexe : durant la nuit, pendant des périodes d’intempéries météorologiques, par exemple.
En effet, même si ces missions ne sont pas les plus nombreuses « quantitativement », elles sont fondamentales. Seuls les hélicoptères de la sécurité civile et de la gendarmerie peuvent les réaliser.
De la même manière, la sécurité civile et l’armée sont en première ligne en cas de drame sanitaire de grande ampleur. Mon département a malheureusement été le théâtre du crash de la Germanwings qui a mobilisé, durant de nombreux jours, tous les acteurs de secours en montagne, à une très grande échelle, bouleversant aussi le recours plus quotidien au transport sanitaire héliporté.
Il y a donc, je le crois, nécessité de mieux prendre en compte ces savoir-faire, comme la spécificité des flottes utilisées, dans la mise en œuvre des futurs schémas d’implantation territoriale de transport sanitaire par hélicoptère.
La coordination de deux directions, l’une relevant de l’organisation des soins, l’autre de la sécurité civile, avec, en cas de besoin, un commandement bicéphale, me paraît dans ce contexte plus pertinente.
Enfin, une plus grande efficacité de la coordination du transport sanitaire héliporté passera aussi nécessairement par un accès suffisant et itinérant à la téléphonie mobile, y compris dans les territoires les plus isolés. C’est une bataille que nous devrons mener en parallèle. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC, du groupe écologiste et du RDSE.)
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour le groupe Les Républicains.
M. Daniel Chasseing. Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous débattons ce soir, sur l’initiative d’Alain Bertrand, de Jacques Mézard et des membres du groupe du RDSE, concerne un aspect important du dispositif sanitaire en France.
L’objet de ce texte est de mettre en place une stratégie nationale d’utilisation du transport sanitaire héliporté, ce qui doit permettre une prise en charge homogène, sur tout le territoire, de l’urgence sanitaire en moins de trente minutes.
Permettez-moi de vous rappeler le fonctionnement de la prise en charge de l’urgence ; certes, vous devez bien le connaître à présent. (Sourires.)
Le service d’aide médicale urgente, ou SAMU, est le centre de régulation où sont gérés les appels du 15, provenant d’un proche, du médecin traitant, des pompiers ou de l’ambulancier. C’est le médecin régulateur qui va, selon la gestion de l’appel, mettre en place les moyens pour prendre en charge l’urgence de la façon la plus adéquate possible pour la survie du patient. Le médecin régulateur, avec le médecin traitant ou les pompiers, dira, en fonction de certains critères – tension artérielle, état de la conscience, oxygénation du sang, glycémie… –, s’il est possible de transporter la personne concernée par ambulance ou véhicule de secours aux asphyxiés et aux blessés, le VSAB, quitte à appeler en cas de problème, ou s’il faut ordonner un Héli-SMUR.
Le service mobile d’urgence et de réanimation, ou SMUR, est une équipe composée d’une voiture avec pilote, d’un médecin urgentiste et d’une infirmière urgentiste. Cette équipe intervient au domicile du malade ou du blessé ou va à la rencontre de l’ambulance ou du VSAB des pompiers à un endroit du trajet défini préalablement.
Si le blessé ou le malade est dans un état très grave, avec des présomptions de dégradation des fonctions vitales rapide, en fonction des critères transmis, le médecin régulateur décidera d’envoyer un Héli-SMUR, service mobile d’urgence et de réanimation par hélicoptère. Dans ce cas, en milieu rural notamment, mais pas seulement, cela représente 25 % des transports en hélicoptère ; c’est la mission primaire. Les 75 % restants sont faits entre un hôpital secondaire et un CHU pour assurer la prise en charge d’un malade dans un service spécialisé.
Le transport en hélicoptère est donc bien géré par le médecin régulateur. Ce mode de transport peut être capital en zone rurale ou hyper-rurale, c’est-à-dire dans les territoires isolés, d’accès difficile, pour des blessés ou des personnes souffrant de maladies graves.
Pour un AVC, une intervention en neurologie doit avoir lieu dans les trois heures. En cas de polytraumatisme, la vie du malade est en jeu, avec une hémorragie interne. Je pourrais également évoquer les cas d’infarctus ou de décompression cardio-respiratoire. Quelquefois, il peut s’agir d’un choc anaphylactique dû à une piqure de guêpe, de la simple ingestion de médicaments ou d’un aliment, ou encore d’une septicémie. Si le SAMU ou l’hélicoptère arrivent, le malade va être sauvé par une simple injection d’adrénaline.
L’utilisation de l’hélicoptère peut permettre de sauver une personne. Les trente minutes peuvent effectivement être un objectif, mais c’est surtout en fonction de la difficulté de la route, de la gravité extrême du cas en cause et de la décompensation rapide pouvant entraîner le décès que les actions lourdes, comme le recours à l’hélicoptère, vont être engagées.
J’ai évoqué l’emploi de l’Héli-SMUR en zone hyper-rurale, mais le cas peut aussi se présenter dans les grandes métropoles.
Comment mettre en place ce transport par hélicoptère sur tout le territoire ?
Dans son article unique, le texte initial de la proposition de loi prévoyait que l’ARS contrôlait « les transports sanitaires héliportés au même titre que tous les autres moyens de la santé notamment en termes d’implantation, de fonctionnement, de financement et de qualité des soins. » C’est la préconisation du professeur Pierre Carli. Il s’agit effectivement d’une solution pour que tous les territoires de la République soient desservis.
Mais, dans son rapport adopté par la commission des affaires sociales, le rapporteur, Gilbert Barbier, homme sage et d’expérience, indique : « On estime en effet que près de la moitié des hélicoptères de la sécurité civile sont en pratique employés pour des activités de transport sanitaire. Ce sont des appareils plus polyvalents avec des pilotes hautement entraînés et habilités notamment au vol de nuit. »
Par conséquent, comme cela a été dit par de nombreux orateurs, la solution d’une gestion des Héli-SMUR par les ARS aboutirait à transférer une part importante des hélicoptères de la sécurité civile aux SAMU. C’est cohérent sur le plan sanitaire, mais très difficile à mettre en place sur le terrain. Gilbert Barbier préconise la solution proposée par Catherine Troendlé et Pierre-Yves Collombat dans leur rapport d’information fait au nom de la commission des lois : mutualiser tous les hélicoptères de la sécurité civile et ceux de la santé au moyen d’un service unique rattaché au Premier ministre. La gestion serait effectuée à l’échelon régional.
L’objectif est le même que celui de la proposition de loi initiale : assurer un maillage territorial et garantir l’accès des malades aux urgences le plus rapide possible. J’ai donc voté en faveur de l’amendement proposé par Gilbert Barbier et adopté majoritairement par la commission.
Mes chers collègues, les Français doivent être égaux en matière de soins comme ils le sont en droit, quel que soit le territoire sur lequel ils demeurent. Je voterai évidemment pour l’article unique de cette proposition de loi, amendé par la commission. L’objectif est de garantir le plus vite possible la répartition équitable du transport sanitaire héliporté sur l’ensemble du territoire de la République.
C’est un maillon essentiel de la prise en charge de l’urgence, certes, en milieu urbain, mais aussi, et surtout, en milieu rural. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.)
Mme la présidente. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi visant à mettre en place une stratégie nationale d'utilisation du transport sanitaire héliporté
Article unique
Les hélicoptères affectés aux structures mobiles d’urgence et de réanimation et ceux affectés aux missions de sécurité civile font l’objet d’une gestion mutualisée par un service placé auprès du Premier ministre.
Ce service établit les règles d’implantation des appareils afin de garantir une couverture optimale du territoire et un accès aux services d’urgence en moins de trente minutes.
L’emploi des appareils est décidé au niveau territorial le plus adapté en coordination avec les possibilités de transports terrestres, en fonction des règles et contraintes de sécurité de la circulation aérienne et dans le respect des compétences des médecins régulateurs des services d’aide médicale urgente.
Mme la présidente. Je vais mettre aux voix l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi.
Je rappelle que le vote sur l’article unique a valeur de vote sur l’ensemble de la proposition de loi.
Y a-t-il des demandes d’explication de vote ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’article unique constituant l’ensemble de la proposition de loi visant à mettre en place une stratégie nationale d’utilisation du transport sanitaire héliporté.
(La proposition de loi est adoptée. – Applaudissements.)
M. Alain Bertrand. Merci à toutes et à tous !
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Thierry Foucaud.)