Sommaire

Présidence de M. Jean-Marc Gabouty

Secrétaires :

Mme Catherine Deroche, M. Joël Guerriau.

1. Procès-verbal

2. Candidature à une mission d’information

3. Loi de finances pour 2018 et loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. – Discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi et d’un projet de loi dans le texte de la commission

Discussion générale commune :

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances

Mme Sophie Taillé-Polian

M. Emmanuel Capus

M. Jean Louis Masson

M. Yvon Collin

M. Julien Bargeton

M. Pascal Savoldelli

M. Bernard Delcros

M. Philippe Dallier

M. Arnaud Bazin

M. Vincent Delahaye

Clôture de la discussion générale commune.

projet de loi de finances pour 2018

Question préalable

Motion n° I-5 de la commission. – M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général ; M. Richard Yung ; M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général ; M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État ; M. Emmanuel Capus ; M. Pascal Savoldelli. – Adoption, par scrutin public n° 48, de la motion entraînant le rejet du projet de loi.

Suspension et reprise de la séance

4. Questions d’actualité au Gouvernement

conférence de consensus sur le logement

Mme Valérie Létard ; M. Édouard Philippe, Premier ministre ; Mme Valérie Létard.

syrie

M. Claude Haut ; M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

france ô

M. Stéphane Artano ; Mme Françoise Nyssen, ministre de la culture.

accueil des réfugiés

M. Guillaume Gontard ; M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur.

droit d’asile

Mme Marie-Pierre de la Gontrie ; M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur.

position de la France sur la protection des données personnelles numériques

M. Jérôme Bignon ; Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice.

bailleurs sociaux

M. Philippe Dallier ; M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires ; M. Philippe Dallier.

situation de jérusalem

M. Richard Yung ; M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce

Mme Marie-Christine Chauvin ; Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.

réorganisation des finances publiques

M. Olivier Paccaud ; M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics ; M. Olivier Paccaud.

situation en autriche

M. Didier Marie ; M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Suspension et reprise de la séance

5. Programmation des finances publiques de 2018 à 2022 – Suite de la discussion et adoption en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Article 1er et rapport annexé (pour coordination)

Amendement n° 1 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’ensemble constitué de l’article et du rapport annexé, modifié.

Articles 2, 3, 3 bis, 4 (pour coordination), 5, 6 bis, 7, 8 (pour coordination), 8 ter et 9 – Adoption.

Article 10

M. Pascal Savoldelli

Adoption de l’article.

Articles 11, 12, 13, 14, 17, 19 bis, 20, 20 bis et 23 bis – Adoption.

Article 24

Amendement n° 2 de M. Arnaud Bazin. – Adoption.

Amendement n° 3 rectifié bis de M. Arnaud Bazin. – Retrait.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État

Adoption de l’article modifié.

Articles 25 bis, 27 ter, 28 et 29 – Adoption.

Vote sur l’ensemble

Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

6. Adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité. – Adoption en procédure accélérée du projet de loi dans le texte de la commission modifié

Discussion générale :

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d’État, ministre de l’intérieur

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé du numérique

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission des lois

M. Dany Wattebled

Mme Maryse Carrère

Mme Brigitte Lherbier

M. Thani Mohamed Soilihi

Mme Esther Benbassa

Mme Laurence Harribey

Mme Sophie Joissains

Clôture de la discussion générale.

Article 1er – Adoption.

Article 2

Amendement n° 14 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles 3 et 4 – Adoption.

Article 5

Amendement n° 15 du Gouvernement. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Article 6 – Adoption.

Article 7

Amendement n° 2 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Retrait.

Adoption de l’article.

Article 8

Amendement n° 13 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Retrait.

Amendement n° 7 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Retrait.

Adoption de l’article.

Articles 9 et 10 – Adoption.

Article 11

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État

Adoption de l’article.

Article 12 – Adoption.

Article 13

Amendement n° 9 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Retrait.

Adoption de l’article.

Articles 14 et 15 – Adoption.

Article 16

Mme Jacqueline Gourault, ministre

Adoption de l’article.

Article 17 – Adoption.

Article 18

Amendement n° 12 rectifié de Mme Maryse Carrère. – Adoption.

Adoption de l’article modifié.

Articles 19, 20, 21, 21 bis (nouveau), 22, 23 et 24 – Adoption.

Vote sur l’ensemble

Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

7. Ordre du jour

Nomination d’un membre d’une mission d’information

COMPTE RENDU INTÉGRAL

Présidence de M. Jean-Marc Gabouty

vice-président

Secrétaires :

Mme Catherine Deroche,

M. Joël Guerriau.

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quatorze heures trente.)

1

Procès-verbal

M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

2

Candidature à une mission d’information

M. le président. J’informe le Sénat qu’une candidature pour siéger au sein de la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays a été publiée.

Cette candidature sera ratifiée si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

3

Loi de finances pour 2018 et loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

Discussion en nouvelle lecture d’un projet de loi et d’un projet de loi dans le texte de la commission

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2018 (projet n° 172, rapport n° 176) et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (projet n° 173, texte de la commission n° 178, rapport n° 177), adoptés par l’Assemblée nationale.

Il a été décidé que ces deux textes feraient l’objet d’une discussion générale commune.

Dans la discussion générale commune, la parole est à M. le secrétaire d’État.

 
 
 

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis pour examiner en nouvelle lecture le projet de loi de finances pour 2018, ainsi que la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, les désaccords constatés entre les deux chambres lors des commissions mixtes paritaires sur ces deux textes étant trop nombreux .

Nos débats seront pour moi l’occasion de revenir sur les causes de ce double échec, qui sont, me semble-t-il, de trois ordres.

Tout d’abord, les deux chambres sont en désaccord sur les équilibres de finances publiques eux-mêmes.

Le Sénat a adopté une trajectoire que nous jugeons moins ambitieuse, avec un ajustement structurel de 0,6 point en 2018, soit 12 milliards d’euros d’efforts supplémentaires à réaliser.

Je dois à la vérité de vous dire, mesdames, messieurs les sénateurs, que le Gouvernement considère que ces chiffres ont peut-être été appréciés de manière rapide. En effet, que signifie un effort structurel fixé à 0,6 point de PIB pour nos concitoyens ? Cela signifie renoncer au dégrèvement de la taxe d’habitation ; cela signifie renoncer à la création de l’impôt sur la fortune immobilière, l’IFI, et à la création du prélèvement forfaitaire unique, le PFU.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. On est d’accord !

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. À supposer même un renoncement à ces trois mesures phares, il resterait encore environ 5 milliards d’euros à documenter. Il s’agit donc, nous le voyons bien, d’une position qui relève plus de l’affirmation d’un positionnement politique que de la bonne gouvernance de nos finances publiques. Nous ne saurions y souscrire.

À l’inverse, la majorité présidentielle, à l’Assemblée nationale, a voulu préserver les grands équilibres de ce texte et tenir ses engagements de campagne. Elle les finance et les rend effectifs, tout en maintenant le niveau d’ajustement structurel programmé en 2018 et les années suivantes.

Je voulais aussi revenir sur la spécificité de nos discussions s’agissant des modalités d’association des collectivités territoriales au redressement des finances publiques. En effet, après les ajouts et les précisions de l’Assemblée nationale et du Sénat en première lecture, les propositions de la mission conduite par votre collègue Alain Richard et le préfet honoraire Dominique Bur doivent permettre d’aller plus loin dans la définition du mécanisme de contractualisation et de reprise financière, dans le cadre de la concertation avec les élus et leurs représentants, concertation offerte et permise par la Conférence nationale des territoires.

Certains d’entre vous étaient d’ailleurs présents à la Conférence nationale des territoires, qui s’est tenue à Cahors, jeudi dernier, sous la présidence du Premier ministre. Nous avons alors pu finaliser dans le dialogue la rédaction de l’amendement à l’article 10 dans la loi de programmation des finances publiques, telle que présentée aujourd’hui.

Deuxième cause de ce double échec : les principaux apports du Sénat en matière de recettes ont naturellement conduit députés et sénateurs à constater leur désaccord, tant étaient manifestes les divergences d’orientation donnée aux deux textes.

Je prendrai plusieurs exemples.

La majorité sénatoriale a ainsi préféré hausser le plafond du quotient familial de 1 527 euros à 1 750 euros par demi-part pour l’impôt sur le revenu 2018, plutôt que de mettre en œuvre, comme nous le proposons, le dégrèvement de la taxe d’habitation dès 2018.

C’est un choix qui nous paraît d’autant plus surprenant qu’il repose sur le double constat, que nous partageons, de l’obsolescence de ses bases,…

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. …  ainsi que de la nécessité de refonder, à terme, la fiscalité locale.

M. Philippe Dallier. Révisez les bases, alors !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Oui, révisez-les !

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. La majorité sénatoriale a également fait le choix de supprimer la trajectoire carbone au-delà de 2018, tandis que l’Assemblée nationale l’a votée, consciente de l’urgence écologique à laquelle nous devons collectivement faire face. Là encore, c’est un choix politique.

Le Sénat a intégralement supprimé l’ISF, sans tenir compte de l’impact d’une suppression sèche de cet impôt, aussi bien sur les finances publiques que sur la structure elle-même de notre économie.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Et l’imposition des bitcoins, des liquidités, des diamants ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Pour le dire autrement, l’idée d’une taxation différentielle de la rente au bénéfice de l’économie productive n’a pas recueilli votre assentiment, en dépit des atouts manifestes qu’elle nous semble présenter.

Enfin, le Sénat a souhaité maintenir le niveau des crédits alloués aux collectivités territoriales dans le cadre de l’ancienne réserve parlementaire, tandis que l’Assemblée nationale avait explicitement prévu sa suppression.

Au final, à l’issue de l’examen de la première partie, le solde budgétaire de l’État s’établissait à moins 86,4 milliards d’euros, soit une dégradation de 3,3 milliards d’euros par rapport à l’équilibre budgétaire présenté dans le projet de loi de finances, lequel tient compte, il est vrai, de l’impact de l’annulation de la taxe à 3 % sur les dividendes.

Troisième cause de l’échec des CMP, et non des moindres : l’examen de la seconde partie de projet de loi de finances.

Comme vous le savez, l’ensemble des votes intervenus sur la seconde partie du projet de loi de finances a conduit, à la suite notamment du rejet des crédits de cinq missions du budget général, à une réduction tout à fait artificielle des dépenses de 51,4 milliards d’euros. C’est ainsi que le texte adopté par le Sénat ne prévoit plus de crédits pour les missions « Travail et emploi », « Sécurités », « Justice », « Immigration, asile et intégration » et « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales». Vous imaginez bien que le Gouvernement le regrette.

Sur la mission « Travail et emploi », je tiens en particulier à rappeler que le Gouvernement triple l’effort budgétaire en faveur de la formation des jeunes et des chômeurs de longue durée.

Sur la mission « Sécurités », nous regrettons l’attitude qui consiste à la fois à reprocher au Gouvernement une hausse insuffisante des crédits de la mission et à décider de n’en voter aucun.

Concernant la mission « Justice », le budget proposé est en hausse de quasiment 4 %, comprenant notamment une augmentation de presque 5 % des crédits de fonctionnement, d’investissement et d’intervention, et la création d’un millier d’emplois. Par ailleurs, la création de 15 000 places de prison supplémentaires demeure une priorité gouvernementale. Elle commencera d’être mise en œuvre dès l’année prochaine, avec l’ouverture de trois établissements. Le choix de rejeter ces crédits est donc d’autant plus surprenant, pour dire le moins.

J’en viens à la question du logement et à l’article 52.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Malgré les efforts sincères du Gouvernement…

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. … pour esquisser un compromis avec les représentants du logement social et la majorité sénatoriale, force est de constater qu’un tel accord restait hors d’atteinte si nous ne voulions pas compromettre notre trajectoire des finances publiques et les grands équilibres du projet de loi de finances. Il reviendra donc à l’Assemblée nationale d’avoir le dernier mot sur cet important sujet.

Je tiens d’ailleurs à rappeler l’événement important qui s’est produit jeudi dernier dans ce dossier : la signature, entre le Gouvernement et une partie substantielle du mouvement HLM – représentant plus de 40 % du parc locatif social –, d’un protocole d’accord sur la base du texte que nous vous présentons aujourd’hui.

Pour conclure, j’aimerais évoquer avec vous une série de convergences qui méritent, malgré tout, d’être relevées.

Je pense tout d’abord à l’avenir de la réforme de la procédure parlementaire conduisant au vote de la loi de finances, notamment au rapprochement de la discussion des dispositions relatives aux recettes, qu’elles soient fiscales ou sociales, lequel, selon le rapporteur général du Sénat, « pourrait permettre au Parlement de porter un regard plus éclairé sur la cohérence d’ensemble de la politique du Gouvernement en matière de prélèvements obligatoires ».

Au-delà de cette remarque procédurale, il suffit de parcourir les différents rapports sénatoriaux sur ces deux textes pour se convaincre des points d’accord qui existent entre les deux chambres.

Là encore, je prendrai plusieurs exemples.

Au sujet de la sincérité de ce projet de loi de finances, le rapporteur général indique, dans le tome I de son rapport, que « le Gouvernement semble s’engager à revenir à une pratique plus conforme au principe de l’autorisation parlementaire des dépenses ».

Si l’on regarde les différentes missions du budget général, je note par ailleurs, à titre d’illustration, que, selon le rapporteur spécial de la mission « Défense », « le budget 2018 comporte différents motifs de satisfaction et devrait permettre de répondre globalement aux besoins des armées ».

De même, selon Emmanuel Capus, rapporteur spécial de la mission « Travail et emploi », les crédits de la mission « seront maintenus à un niveau très élevé » et « permettront le financement des dispositifs en faveur de l’emploi des jeunes et des personnes les moins qualifiées en particulier, via la montée en puissance de la garantie jeunes et le lancement du plan d’investissement dans les compétences ».

Au-delà, à propos des contrats aidés, dont la diminution du volume contribue certes au redressement de nos comptes publics mais peut nourrir des inquiétudes, le rapporteur spécial s’exprime en des termes que nous pourrions partager quand il indique que, « sans contester l’utilité de ces emplois pour les collectivités territoriales et le secteur associatif, ceux-ci ne constituent pas moins des contrats précaires subventionnés et, partant, une réponse de court terme, parfois motivée par des raisons purement statistiques ».

Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, par-delà les positionnements de chacune des deux assemblées et les lignes de partage idéologiques, il y a des prises de position responsables qui, de part et d’autre, auraient pu laisser penser à l’aboutissement d’un consensus, fût-il ponctuel et parcellaire, avec la majorité sénatoriale.

Bien que le Gouvernement regrette que cela ne soit pas le cas, je vous appelle, mesdames, messieurs les sénateurs, à poursuivre malgré tout l’examen du projet de loi de finances pour 2018 et du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, le Gouvernement a appelé à une réforme de la procédure parlementaire pour l’examen des textes budgétaires. Je vous ai dit, monsieur le secrétaire d’État, que nous y souscrivions. Le président de la commission des finances et les commissaires sont prêts à y travailler. Cela devrait permettre de mieux examiner les textes qui nous sont soumis, mais aussi d’éviter certaines erreurs, comme nous le rappelle l’épisode très malheureux de la taxe de 3 % sur les dividendes, erreurs qui traduisent la précipitation dans laquelle parfois sont étudiés les textes budgétaires.

Je le dis clairement, le Gouvernement s’est plus discipliné que ses prédécesseurs sur le projet de loi de finances ; je tiens d’ailleurs à le saluer. Nous avons ainsi eu à examiner beaucoup moins d’amendements déposés en dernière minute ou en séance. De ce point de vue, les choses sont en net progrès.

En revanche, il y a encore de la marge pour améliorer l’examen du projet de loi de finances rectificative. Si le Gouvernement a ainsi plusieurs fois émis des avis favorables, ou des avis de sagesse, c’est pour que nous nous entendions dire que les dispositions ainsi adoptées n’avaient pas l’accord du Gouvernement et qu’elles condamnaient à l’échec de la commission mixte paritaire !

Je dois le dire, nous avons eu parfois du mal à comprendre les résultats de l’interministériel.

Pour ce qui est du projet de loi de programmation des finances publiques, le président de la commission des finances et moi-même étions avec le Gouvernement à Cahors, où les amendements ont été discutés dans des conditions un peu particulières. Le Gouvernement a entrouvert la porte sur certaines avancées - il faut le noter, mais il y a encore du travail à faire  - raison pour laquelle la commission des finances proposera au Sénat de voter des amendements qui vont dans le sens de nos échanges de Cahors.

J’en reviens aux deux textes qui nous occupent, le projet de loi de finances pour 2018 et le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Vous le savez, des divergences importantes sont apparues entre nos deux assemblées. Elles ont conduit, à notre grand regret, à l’échec des deux commissions mixtes paritaires, qui se sont déroulées le 13 décembre dernier.

Les sujets restant en débat sur ces deux textes ne sont cependant pas de même nature ni de même ampleur. La commission des finances vous propose donc de ne pas prendre la même position en nouvelle lecture sur ces deux projets de loi.

Concernant tout d’abord le projet de loi de finances pour 2018, l’Assemblée nationale a heureusement repris certaines dispositions introduites par le Sénat. Sur les 150 articles restant en discussion, 24 articles ont été adoptés dans la rédaction du Sénat ; la suppression de 4 articles a été confirmée.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a modifié 17 articles, tout en conservant certaines modifications apportées par le Sénat. Elle a par exemple adopté, avec des apports du Sénat, l’article 4 sur le taux de TVA applicable aux offres de téléphonie ou internet comprenant un service de presse.

Elle a également adopté, cher Philippe Dallier, l’article 6 ter A relevant à 10 % le taux de TVA pour les logements sociaux à compter du 1er janvier 2018,…

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. … mais aussi l’article 10 quater étendant le bénéfice du taux réduit d’impôt sur les sociétés pour les plus-values de cession de locaux ou de terrains en vue de la construction de logements, et l’article 10 sexies modifiant le régime fiscal et social des zones de revitalisation rurale, ou ZRR.

M. Alain Marc. Excellent !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Aux articles 39 et 39 sexies, l’Assemblée nationale a adopté l’encadrement du montant des frais et commissions susceptibles d’être imputés par les intermédiaires pour le dispositif « Pinel » et la réduction d’impôt « Madelin ». Elle a également adopté plusieurs autres dispositions techniques.

Pour autant, l’Assemblée nationale n’a évidemment pas modifié les dispositions les plus emblématiques du texte, sur lesquelles nous avions marqué notre opposition ; elle a même rejeté bon nombre de nos initiatives.

Elle a d’abord confirmé la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages à l’horizon 2020. Certes, la taxe d’habitation doit être réformée, ou du moins ses bases doivent-elles être révisées. Nous considérons néanmoins que la réforme proposée présente un caractère injuste et apparaît sans doute fragile au plan constitutionnel. Son adoption nous semble, en tous les cas, précipitée. Nous redisons en revanche au Gouvernement notre disposition pour travailler à une nouvelle fiscalité locale.

L’Assemblée nationale n’a pas remis en cause la création de l’impôt sur la fortune immobilière, dont le périmètre est pour le moins incompréhensible, puisque les liquidités, les bitcoins ou les diamants, autant de placements improductifs pour l’économie, en sont totalement exonérés, alors même que l’immobilier, qui contribue, lui, à l’économie réelle, est taxé. Elle a rétabli les surtaxes sur l’or, les yachts ou les voitures de sport, pour tenter de masquer l’incohérence de cette assiette.

L’Assemblée nationale n’a malheureusement pas retenu la proposition du Sénat de relever le plafond du quotient familial. Nous considérons qu’il s’agit pourtant d’une mesure de justice fiscale pour les familles. Elle n’a pas repris non plus nos propositions pour développer les investissements des PME.

Surtout, c’est là où mes regrets sont les plus vifs, monsieur le secrétaire d’État, l’Assemblée nationale a supprimé des dispositions pourtant adoptées à l’unanimité par le Sénat.

Je pense à la responsabilité solidaire des plateformes de commerce en ligne pour le paiement de la TVA. Je ne comprends pas cette position. Il s’agit en l’espèce d’une fraude avérée à la TVA. Nous nous étions inspirés d’un dispositif qui fonctionne au Royaume-Uni, et qui aurait pu recueillir l’assentiment du Gouvernement.

Elle a aussi refusé la création d’une taxe sur les locaux destinés au stockage des biens vendus par voie électronique au profit des commerces de centre-ville. Ne pas taxer les entrepôts des plateformes électroniques, alors même que les commerces de centre-ville doivent s’acquitter de la taxe sur les surfaces commerciales, la TASCOM : cela peut créer une vraie différence de traitement.

L’Assemblée nationale a également entériné une économie sur les aides personnelles au logement, les APL, de l’ordre de 1,5 milliard d’euros d’ici à 2020, en supprimant presque intégralement les APL accession.

Enfin, plus prévisible, elle a rétabli les crédits des cinq missions rejetés par le Sénat et n’a pas donné suite à nos propositions d’économies en dépenses, je pense notamment à nos propositions visant à contenir l’évolution des dépenses de la fonction publique.

Nous considérons donc que le texte qui nous revient de l’Assemblée n’est pas satisfaisant. Même si le Sénat rétablissait son texte en nouvelle lecture, une nouvelle navette ne serait pas de nature à nous rapprocher sur les points de désaccord majeurs. Vous avez d’ailleurs souligné le caractère incompatible de nos deux textes, monsieur le secrétaire d’État.

La commission vous propose donc, mes chers collègues, d’opposer la question préalable sur le projet de loi de finances pour 2018, même si, à titre personnel, je serais tout à fait disposé à revenir pour une nouvelle lecture entre le 25 et le 31 décembre - mais j’ignore si c’est le cas du Gouvernement… (Sourires.)

J’en viens maintenant au projet de loi de programmation des finances publiques.

La situation est assez différente, car, on peut le dire, le Sénat a été davantage entendu.

Ainsi, je me félicite de l’adoption de l’article 8 bis introduit sur notre initiative, qui rappelle les engagements du Président de la République en matière de réduction d’emplois de l’État et de ses opérateurs sur la période quadriennale.

Je me félicite également de la reprise des dispositions ajustant les plafonds des taxes affectées et les plafonds d’emplois à leur réalité, dans un objectif de plus grande sincérité budgétaire. Je regrette à cet égard que d’autres apports, pourtant validés par la commission des finances de l’Assemblée nationale et son rapporteur général, Joël Giraud, tels l’encadrement de la mise en réserve des crédits de l’État ou l’exclusion du ministère des armées des nouvelles dispositions relatives aux restes à payer, aient été supprimés sur l’initiative du Gouvernement. C’est dommage, car un consensus s’était formé sur ces points entre les deux assemblées.

Nous proposerons de rétablir certaines de ces dispositions, qui sont susceptibles de faire consensus entre nos deux assemblées.

Cette nouvelle lecture au Sénat a cependant un objet principal : l’examen du nouvel article 24, qui prévoit de nouvelles modalités de contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales. En effet, le Gouvernement a déposé, au lendemain de la Conférence nationale des territoires, en grande banlieue de Cahors, un nouvel amendement tendant à compléter de manière très substantielle l’article 24 du projet de loi de programmation, pour définir les dépenses réelles de fonctionnement, les critères de modulation du taux maximal d’évolution de ces dépenses, les modalités de reprise financière, ou encore la possibilité d’accorder, par le biais des préfets, un « bonus », qui prendrait la forme d’une majoration de leur taux de subvention au titre de la dotation de soutien à l’investissement local, la DSIL.

Toutes ces dispositions nouvelles paraissent particulièrement fragiles au regard de la règle dite de « l’entonnoir » posée par le Conseil constitutionnel, qui veut que l’on n’élargisse pas les débats après la première lecture dans chaque assemblée. Par ailleurs, des dispositions figurant dans la partie purement programmatique du projet de loi sont transférées dans sa partie normative, ce qui change leur nature.

Quoi qu’il en soit, sans préjuger de la décision du Conseil constitutionnel en cas de saisine éventuelle, nous avons souhaité modifier ces dispositions nouvelles afin de les améliorer, bien que les délais dont nous disposions pour ce faire aient été très réduits.

C’est ainsi que nous proposons d’exclure du périmètre des dépenses de fonctionnement les dépenses contraintes imposées par l’État, qu’elles soient législatives ou réglementaires, l’évaluation, qui doit être la plus objective possible, étant fondée sur les travaux du Conseil national d’évaluation des normes.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Le Gouvernement a lui-même entrouvert cette porte, en évoquant la possibilité d’une évaluation annuelle, sans prévoir de traductions précises pour les collectivités territoriales. Nous avons donc proposé cette disposition visant à défalquer le coût des dépenses nouvelles, législatives ou réglementaires, de l’évolution des dépenses de fonctionnement, de telle sorte que, après évaluation, les contraintes pesant sur les collectivités diminuent.

En clair, les collectivités territoriales doivent être responsables de leurs propres dépenses, et n’ont pas à subir des facteurs exogènes, qui conduiraient à faire dériver les dépenses au-delà des objectifs fixés.

Nous souhaitons également que soit mis en place un véritable bonus pour les collectivités territoriales qui dépassent leurs objectifs. Là encore, la porte a été entrouverte à Cahors. Le ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, s’y était même engagé devant le Sénat. Nous ne souhaitons pas que ce dispositif reste à la seule appréciation du préfet.

Enfin, nous proposons de relever l’objectif d’évolution de la dépense locale de 1,2 % à 1,9 %, afin de tenir compte d’un tendanciel de dépenses plus réaliste – c’était l’objectif du Sénat dès la première lecture.

En conclusion, mes chers collègues, je vous propose d’adopter en nouvelle lecture le texte tel que la commission des finances l’a amendé ce matin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

Mme Sophie Taillé-Polian. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, les deux présents textes illustrent avec une grande clarté à la fois la méthode et le projet profondément libéral de ce quinquennat.

Le double discours permanent et le brouillage des repères sont une marque de fabrique qu’il convient de dénoncer.

En outre, ce qui caractérise l’action du Gouvernement, c’est souvent la brutalité et l’impréparation avec laquelle il conçoit les réformes structurelles. Comme si, pour faire bouger notre pays raillé pour son immobilisme, il fallait commencer par détruire violemment l’existant, sans avoir construit auparavant les bases d’une alternative crédible.

Fait majeur, ce budget va approfondir les inégalités et affaiblir notre modèle social. Au nom d’un monde nouveau, il nous propose un vaste retour en arrière, à rebours de la décentralisation, engageant des réformes portant le sceau des politiques libérales mises en œuvre dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix qui, on le sait de manière encore plus documentée depuis quelques jours, ont produit une augmentation massive des inégalités.

Le « premier de cordée » monte toujours plus haut, équipé jusqu’au bout des doigts, assuré par son capital financier, social et culturel, mais il laisse en bas celui qu’il accuse de n’être pas assez combatif pour grimper, alors que ce dernier ne dispose que de la simple force de ses bras.

Double discours, méthode brutale et augmentation des inégalités sont donc les caractéristiques de ce budget.

L’ultra-communication permanente de ce gouvernement ne saurait nous faire oublier une certaine dualité dans le discours.

Vous dites vouloir lutter, à l’échelon européen, contre l’évasion fiscale, monsieur le secrétaire d’État, mais vous ne saisissez pas nos propositions pour agir dès maintenant.

Prenons l’exemple de la fraude à la TVA pour les plateformes ou de la taxation des GAFA. Pourquoi ne reprenez-vous pas ces propositions votées ici, au Sénat, et de façon consensuelle ?

Vous prétendez lutter, à l’échelon européen, contre le dumping fiscal, mais vous jouez le jeu du nivellement par le bas, en essayant d’atteindre une moyenne européenne que nos voisins s’empresseront bien vite de faire baisser à nouveau.

Vous dites vouloir mettre en œuvre un Grand plan d’investissement. Or il n’apparaît pas, ou peu, en crédits de paiement : moins de 2 milliards d’euros pour 2018, quand vous annoncez 57 milliards d’euros sur cinq ans.

Vous vous targuez de présenter un budget responsable, mais ce budget cache en réalité un vaste plan social, relativement silencieux, que l’État mène dans ses administrations et ses agences. Je pense à l’INRS ; je pense à l’INSEE ; je pense à Pôle emploi ; je pense au CEREMA ; je pense à l’AEFE ; je pense aussi à la DIRECCTE, à l’IRSTEA, à Météo France, à France Télévisions, et j’en passe.

Au-delà du double discours, il y a aussi l’utilisation récurrente d’une méthode brutale qui consiste à casser un système avant même de préparer la construction du suivant.

Pensons aux coups portés aux bailleurs sociaux, tout d’abord.

Vous prétendez avoir l’ambition d’une réforme d’ampleur du financement du logement social, qui passe par la baisse des APL et sa compensation par la réduction des loyers applicables dans le parc social.

Si seulement, plutôt que d’annoncer une grande réforme du logement et de faire passer des mesures budgétaires qui risquent de provoquer un effondrement de l’offre, vous aviez pris le temps de mettre en place une véritable concertation avec les bailleurs sociaux et avec les élus !

Le Sénat a joué son rôle d’alerte en faisant une contre-proposition. Vous n’avez pas pris en compte ses travaux lors de la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale. On peut même dire que, in fine, loin de répondre à la fragilité financière de nombre de bailleurs sociaux, vous l’organisez !

Les conséquences sur le logement social comme sur l’accession sociale à la propriété - autrement dit, la crise du logement qui s’annonce -, seront très graves.

Il en va de même pour les contrats aidés. Sans proposer de solution alternative à court terme, ni aux personnes bénéficiaires ni aux collectivités, vous en supprimez une large part. Vous précarisez des personnes éloignées de l’emploi, pour qui la réinsertion professionnelle, et donc sociale, était concrète. Vous déstabilisez les collectivités territoriales et les associations dans la mise en œuvre de leurs actions.

En contrepoint, vous annoncez une grande réforme de la formation professionnelle, sans toutefois avoir pris soin d’en fixer le cadre ou le financement en amont.

Pour les collectivités territoriales, même chose ! Vous mettez en place un dégrèvement de la taxe d’habitation – dégrèvement que nous avons obtenu de haute lutte, le projet de départ était bien pire ! –, préfigurant sa suppression, et décidez de sa compensation sans réellement la garantir à l’avenir.

Disons-le clairement : il s’agit pour l’État de contrôler les recettes des collectivités.

Vous souhaitez aussi contrôler leurs dépenses, à travers la contractualisation que les préfets vont mettre en œuvre, rétablissant de ce fait le contrôle a priori des budgets des collectivités.

Cette brutalité a poussé les élus à se mobiliser. Vous avez alors été obligés de préciser, ce qui n’était pas prévu initialement, qu’une grande réforme de la fiscalité locale se préparait, qu’il ne fallait donc pas s’inquiéter.

La même brutalité a aussi obligé le Premier ministre à faire des modifications importantes sur la contractualisation, allant bien au-delà de la simple précision. N’aurait-il pas été plus raisonnable de commencer par là ? Une réflexion large et collective aurait certainement permis d’éviter l’arrivée dans le débat parlementaire, au stade de la nouvelle lecture, du nouveau dispositif de contractualisation liant l’État et les collectivités.

S’agissant d’une mesure aussi importante, est-il acceptable que le travail parlementaire soit ainsi réduit à une heure pour l’Assemblée nationale et une journée pour le Sénat ?

Je veux m’arrêter ici quelques instants sur les modifications introduites dans le projet de loi de programmation des finances publiques, conséquences de la précipitation manifestée sur ce thème par le Gouvernement.

Sur le fond de l’article 24, l’exclusion d’une partie des dépenses liées aux allocations individuelles de solidarité peut apparaître à première vue comme une avancée pour les départements. Mais ici on retrouve le double discours, car, en réalité, l’objectif de réduction, la cible finale de 13 milliards d’euros, est maintenu ! Si ces dépenses ne sont pas intégrées dans l’effort à fournir, celui-ci devra donc être concédé sur d’autres postes de dépenses départementales, ou reporté sur d’autres collectivités territoriales.

Pour ce qui concerne le mécanisme de correction, auparavant uniquement mentionné dans son principe, il est maintenant précisé.

Au final, votre démarche est habile, mais ne nous leurrons pas sur son résultat. L’objectif de contenir les dépenses de fonctionnement à 1,2 % en valeur, c’est-à-dire au niveau de l’inflation les premières années et en deçà du niveau de l’inflation en fin de période de programmation, ne pourra que conduire à des efforts de réduction des dépenses considérables pour les collectivités territoriales. Cela ne manquera pas d’affaiblir le service public local.

Aux mesures impréparées, sinon brutales, s’ajoutent des mesures fiscales injustes, qui entraîneront inexorablement un accroissement des inégalités.

Après avoir augmenté la CSG, vous décidez de supprimer la presque totalité de l’impôt de solidarité sur la fortune, et de mettre en place une flat tax pour les revenus du capital ; je note d’ailleurs que l’Assemblée nationale a rejeté l’amendement du Sénat visant à éviter l’optimisation fiscale qui en découlera et qui risque de coûter beaucoup plus cher au budget de l’État.

Concrètement, pour les 100 premiers contribuables à l’ISF, le gain des deux premières mesures est évalué à 1,5 million d’euros par an et par contribuable. Pour un impact macroéconomique très faible, on accroît ainsi les inégalités. La théorie du ruissellement, que vous dites ne pas suivre tout en reprenant tous les arguments y afférents, est un leurre.

Accroissement des inégalités, toujours : qui va payer l’augmentation de la fiscalité écologique ? Ce sont les bas revenus qui dépassent le seuil très bas de l’accès au chèque énergie, soit 7 700 euros par an et par unité de consommation.

Les effets positifs d’une fiscalité écologique seront socialement injustes.

Ainsi, vous réduisez la part des efforts demandés aux plus riches, vous accentuez celle demandée aux plus modestes et, dans le même temps, vous affaiblissez les services publics. La pression que vous mettez sur les collectivités et certains ministères va fragiliser les services publics essentiels. Les réduire va inexorablement conduire à une augmentation des inégalités.

Nous ne pouvons pas agir comme si nous ignorions que la baisse de la fiscalité des hauts revenus s’accompagnait toujours d’un accroissement des inégalités. Le dernier rapport des économistes autour de Thomas Piketty nous le confirme.

M. François Bonhomme. Que de références !

Mme Sophie Taillé-Polian. Sur le long terme, l’économie ne peut bien fonctionner que si la croissance est équitablement répartie. Le modèle français repose sur une redistribution des revenus après impôt et sur un accès à la protection sociale et aux services publics.

En copiant le modèle anglo-saxon – fiscalité favorable aux plus riches, flexibilisation du marché du travail, etc. –, vous attaquez l’équilibre de notre système. Pour quelques hypothétiques points de PIB, vous orientez notre société vers plus de précarité et d’inégalités.

Mes chers collègues, face à ce budget initialement marqué à droite, la majorité sénatoriale a pratiqué une surenchère – légère ! – sur bon nombre de sujets, notamment sur l’ISF.

L’Assemblée nationale est presque revenue au texte initial. Mais l’orientation libérale de ce projet de budget nous fait craindre un modèle anglo-saxon.

Le groupe socialiste auquel j’appartiens et au nom duquel je m’exprime s’oppose à la société du risque que vous prônez.

Le risque, ce n’est qu’un jeu pour ceux qui ont un patrimoine bien garni, un carnet d’adresses bien rempli, des diplômes bien fournis.

Mais le risque peut aussi être un voyage sans retour vers la pauvreté pour ceux qui n’ont comme filet de sécurité que la sécurité sociale et comme unique patrimoine le service public. (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus.

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui, à nouveau et conjointement, les projets de loi de programmation des finances publiques pour la période 2018-2022 et de loi de finances pour 2018.

À nouveau, et malheureusement sans surprise, les deux commissions mixtes paritaires n’ont pu se mettre d’accord sur les articles restant en discussion. Ce blocage nous laisse un goût d’occasion manquée.

Dans le cas du projet de loi de finances, nous avions déploré que le Sénat adopte une position de principe et renonce à l’opportunité d’améliorer le texte dans un sens acceptable par la majorité présidentielle. Nous regrettons également que l’Assemblée nationale ait supprimé de bonnes mesures, adoptées par notre assemblée sous les auspices du rapporteur général, telles que le rehaussement du plafond du quotient familial ou les dispositions concernant la fiscalité du numérique.

Nous saluons toutefois l’adoption définitive de certains des amendements que nous avions déposés : ceux relatifs à la fiscalité énergétique ; l’amendement sur les critères de classement en zone de revitalisation rurale, cher à notre collègue Alain Marc ; l’amendement sur l’assurance des installations d’énergie marine renouvelable. Notre groupe a ainsi pleinement contribué à l’élaboration de ce projet de loi de finances.

Nous espérions que cette seconde lecture puisse sauver ce qui pouvait encore l’être et qu’elle soit l’occasion d’un débat plus apaisé. Il semble que tel ne sera pas le cas.

Je ne reviendrai pas sur le projet de loi de finances pour 2018. Il a déjà fait l’objet de nombreux débats et nous a permis d’exposer maintes fois notre position en faveur d’une approche constructive, équilibrée et pragmatique des différentes réformes envisagées.

Nous avons toujours la même exigence aujourd’hui : l’équilibre entre la création de l’IFI, l’instauration de la flat tax et le dégrèvement de la taxe d’habitation est certes imparfait, mais il constitue un compromis politique et économique robuste entre la nécessité de réorienter l’épargne vers notre économie et la restitution de pouvoir d’achat à nos concitoyens. C’est également un équilibre fragile. Le Sénat l’a déjà rompu au détriment des classes populaires et des classes moyennes. Nous n’aurions pu que nous opposer à une nouvelle tentative allant dans ce sens.

La nouvelle version du projet de loi de programmation des finances publiques contient, elle, des nouveautés substantielles.

La Conférence nationale des territoires, enceinte nouvelle qui semble permettre de vraies avancées de fond, a débouché sur deux amendements du Gouvernement.

Si on peut déplorer le caractère précipité et tardif de leur dépôt, ils traduisent néanmoins des discussions de longue haleine qui ont eu lieu ici même au Sénat, à l’Assemblée nationale, entre les associations d’élus et le Gouvernement, et dans le cadre, enfin, de la mission conduite par notre collègue Alain Richard et Dominique Bur.

C’est l’honneur du Premier ministre, Édouard Philippe, que d’avoir su écouter et entendre les différentes parties prenantes pour proposer un mécanisme de contractualisation plus respectueux des réalités locales et des propositions faites par notre assemblée. Je note que M. le rapporteur général vient d’indiquer que des portes avaient été entrouvertes ; c’est tout dire !

Nous pensons que plusieurs décisions vont dans le bon sens. Par exemple, les nouvelles marges de souplesse autour du taux d’évolution standard des dépenses de fonctionnement constituent incontestablement un instrument de flexibilité bienvenu.

Le « bonus » accordé aux collectivités respectant les objectifs fixés, sous forme de bonification des dotations d’investissement, constitue une incitation à la vertu et rompt avec la logique essentiellement punitive du précédent texte.

L’abandon de la « règle d’or renforcée » contenue dans la première version du projet de loi de programmation, qui prévoyait le déclenchement d’une procédure de surveillance des collectivités dont le rapport entre l’encours de dette et l’épargne brute dépassait les onze à treize ans, est quant à elle une mesure de bon sens, plus favorable à l’investissement.

La meilleure prise en compte, enfin, de la structure des dépenses des départements pour tenir compte de leur dynamique particulière semble constituer une reconnaissance opportune des spécificités propres aux différents niveaux de collectivités.

Tous ces éléments sont le fruit d’une méthode de gouvernement qui nous convient : concertation, analyse et action résolue.

Néanmoins, nous croyons que la logique consistant à faire peser lourdement l’effort de maîtrise de la dépense publique sur les collectivités locales manque son but. D’une part, elle méconnaît la dynamique de la dépense et de l’endettement, qui est d’autant plus problématique au niveau de l’État et des organismes de sécurité sociale. D’autre part, elle masque le fait que les efforts inscrits dans cette loi de programmation sont globalement insuffisants pour combler notre retard sur les autres pays de la zone euro, et en particulier sur l’Allemagne.

Cela ne signifie pas que les collectivités doivent être exemptées de l’effort national d’assainissement des finances publiques. Elles doivent prendre leur juste part, et elles en ont conscience.

Cela signifie qu’il ne faut pas se tromper de combat et que d’autres priorités devraient figurer, monsieur le secrétaire d’État, en haut de votre agenda. Je veux parler de la baisse des effectifs dans la fonction publique, de l’effort structurel en dépense, trop faible pour réduire durablement le déficit public, et, enfin, du désendettement de l’État, qui devrait, lui, faire l’objet des fameuses « règles d’or renforcées » !

Ces deux textes constituent donc un premier pas en direction du nouveau monde de sincérité et de responsabilité qu’on nous a promis. Néanmoins, ils prouvent également que ce nouveau monde ne se décrète pas : il se construira patiemment, résolument, à force de courage et dans l’action. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

Mme Nathalie Goulet. Inch’ Allah !

M. le président. La parole est à M. Jean Louis Masson.

M. Jean Louis Masson. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, lors des explications de vote en première lecture, j’avais indiqué que la version proposée par l’Assemblée nationale, et donc par le Gouvernement, comportait des aspects positifs et négatifs. J’avais constaté par ailleurs que la version du Sénat comportait, également, des aspects positifs et négatifs. C’est la raison pour laquelle je m’étais abstenu.

En effet, dans la version de l’Assemblée nationale, j’étais radicalement hostile à la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des Français et à son maintien pour 20 % d’entre eux. Dans celle du Sénat, j’étais défavorable à un certain nombre de dispositions, notamment le passage à trois jours du délai de carence pour les agents de la fonction publique en cas d’arrêt maladie, et surtout l’augmentation de 40 % des indemnités des maires de grande ville et des présidents de conseil départemental.

On nous propose aujourd’hui d’adopter une motion tendant à opposer la question préalable. Or c’est le moyen pour le Sénat d’esquiver ses responsabilités.

Présenter une telle motion, c’est un moyen de laisser les choses passer, sans se prononcer d’un côté ou de l’autre, et de se donner bonne conscience. Je suis opposé à cette procédure et je ne la cautionne pas. Le système est en effet machiavélique : si l’on vote contre la motion, cela doit signifier que l’on est pour la version du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, ce qui n’est pas mon cas. Face à cette situation, je préfère m’abstenir.

Nombre de nos concitoyens ont été scandalisés par certaines des dispositions qui ont été votées. Je le répète, l’augmentation de 40 % des indemnités des maires de grande ville et des présidents de conseil départemental ne passe absolument pas ! Beaucoup de personnes m’ont contacté à ce sujet pour s’en plaindre, à juste titre.

Il y a là un véritable problème. Au moment où l’on demande partout de serrer les boulons, je ne vois pas pourquoi on augmenterait de 40 % – et non de 2 ou 3 % ! – ces indemnités. (MM. Vincent Delahaye et René-Paul Savary sexclament.) Certains sont pour, d’autres non. Quant à moi, je suis radicalement contre et, je le dis, c’est un scandale !

Mme Nathalie Goulet. C’est à enveloppe constante !

M. le président. La parole est à M. Yvon Collin.

M. Yvon Collin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, autant le dire d’emblée : je regrette que les commissions mixtes paritaires ne soient pas parvenues à établir des versions communes du projet de loi de finances et du projet de loi de programmation.

Cette année, le Sénat, comme d’habitude, a pourtant consacré beaucoup de temps et d’efforts à l’examen du budget. Il a pleinement exercé, comme d’habitude, sa fonction de législateur. L’absence d’accord avec l’Assemblée nationale empêchera, malheureusement, qu’une grande partie de ce travail trouve une juste concrétisation.

Vendredi, les députés ont rétabli leurs versions des projets de loi et supprimé la plupart des modifications apportées par la Haute Assemblée, notamment celles adoptées sur l’initiative de mon groupe.

Environ 60 articles restent en discussion dans le projet de loi de finances et 30 articles dans le projet de loi de programmation. Si quelques rares mesures ont dès le début fait consensus, comme la réduction du taux d’impôt sur les sociétés, aucun accord n’a été trouvé sur les mesures les plus emblématiques, qui sont aussi celles auxquelles nos concitoyens sont particulièrement sensibles : dégrèvement de la taxe d’habitation, flat tax, impôt sur la fortune immobilière, contractualisation, etc. Sur des sujets moins médiatiques, comme la compensation de la taxe professionnelle, les agences de l’eau ou les réseaux consulaires, il n’y a pas eu davantage d’accords.

La majorité sénatoriale, il faut le reconnaître, porte sa part de responsabilité dans cet échec. En rejetant les missions « Sécurités », « Justice », « Immigration, asile et intégration », « Travail et emploi », « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » – des missions au cœur de la puissance publique –, elle s’est elle-même privée de proposer un véritable budget alternatif et responsable. Je le regrette très profondément.

Pour ce qui concerne les grandeurs macroéconomiques, le déficit public s’établirait l’an prochain à 2,8 % du PIB, contre 2,9 % attendus cette année. La trajectoire à l’horizon 2022 prévoit une poursuite de la baisse, concentrée toutefois sur la fin du quinquennat, avec une remontée en 2019, du fait de la transformation du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, en baisse de charges. Cette évolution globalement positive, quoique modeste dans son ambition, reste tributaire des évolutions de la conjoncture et de chocs contentieux, comme l’invalidation de la taxe additionnelle sur les dividendes.

Les réformes de la taxe d’habitation et de l’impôt sur la fortune auront concentré l’attention des médias. Le dégrèvement de la taxe d’habitation continue de susciter une vive opposition chez les élus locaux, car elle questionne, légitimement, l’autonomie financière des collectivités. Elle crée aussi une différence de traitement entre les 80 % des contribuables exonérés et les 20 % restants. En outre, la réforme ne résout pas vraiment le problème des bases, qui servent toujours au calcul des taxes foncières. À quand une vraie remise à plat du système fiscal local ? Enfin, la question des compensations reste en suspens.

La suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, remplacé par la seule imposition du patrimoine immobilier, est l’une des mesures les plus clivantes du texte. Son coût n’est pas négligeable, puisqu’il s’élèverait à quelque 4 milliards d’euros dès l’an prochain.

La transformation de l’ISF en IFI doit créer un choc d’attractivité. Il est vrai que si les paradis fiscaux ont fait beaucoup parler d’eux dernièrement, à juste titre, la France véhicule aussi – il faut le reconnaître – l’image d’un pays tributaire d’un système fiscal lourd et complexe. Le radical de cœur que je suis, attaché à la dimension citoyenne de l’impôt, ne peut que se désoler de cette situation. Toutefois, le Gouvernement devrait être plus soucieux de stabilité fiscale.

Concernant la programmation pour 2018-2022, les principales mesures, à savoir les articles 10 et 24, sont toujours en discussion. En première lecture, le Sénat avait pourtant apporté des précisions utiles au principe de contractualisation. Il avait notamment donné des garanties aux collectivités en imposant des engagements financiers de la part de l’État. La règle d’or « renforcée » avait été supprimée, car jugée injustifiée alors que l’endettement des collectivités territoriales ne représente qu’une faible partie de l’endettement public.

Ce matin, la commission des finances, dans son immense sagesse, a partiellement rétabli son texte de première lecture. Nous réexaminerons tout à l’heure ce projet de loi, auquel le RDSE est favorable, en espérant trouver davantage de points d’accord avec l’Assemblée nationale.

Néanmoins, je veux saluer les aspects indéniablement positifs du projet de loi de finances, tels que le maintien et même la légère augmentation des dotations aux collectivités, qui contrastent avec l’austérité du quinquennat précédent, les progrès introduits dans l’imposition des plateformes internet et des entreprises du numérique, mais aussi la poursuite du soutien à l’investissement public local…

Sur le projet de loi de finances, la commission a choisi de présenter une motion tendant à opposer la question préalable. Le RDSE est opposé par principe à ce dispositif qui interrompt le débat parlementaire. C’est pourquoi nous voterons contre cette motion, comme nous le faisons toujours. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton.

M. Julien Bargeton. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il est trop tard dans la procédure parlementaire pour « refaire le match » sur ces deux textes complémentaires : le projet de loi de finances pour 2018 et la trajectoire pluriannuelle des finances publiques 2018-2022. Leurs commissions mixtes paritaires respectives ont échoué, et nous revoilà en nouvelle lecture où rien ne se dira, je le crains, de bien neuf, car les positions sont à présent claires.

Tout d’abord, la majorité sénatoriale a décidé de voter un projet de loi de finances à la découpe. La fiscalité du capital ? On prend. La réforme de la taxe d’habitation ? On ne prend pas. La fiscalité des entreprises et la transformation du CICE ? On prend. Le budget de la mission « Travail et emploi » et les crédits en faveur de l’apprentissage ? On ne prend pas.

Cela clignote comme une guirlande de Noël, mais cela sent surtout le sapin pour notre débat (Exclamations amusées.) qui risque hélas ! d’être victime d’une motion tendant à opposer la question préalable. Notre groupe ne soutiendra pas cette motion, tant elle fait peu de cas de la réalité des échanges.

Je regrette qu’il revienne à l’Assemblée nationale de trancher ce débat.

Il y a une légère contradiction entre la volonté affichée de réduire davantage les déficits et la crédibilité des pistes d’économies du côté de la majorité sénatoriale.

Par piste d’économies, je n’entends pas les milliards d’euros de réduction du fait du rejet de cinq budgets, mais des propositions de maîtrise plus solides et surtout plus plausibles. Nous n’approuvons pas cette politique du rabot qui n’a pas fait ses preuves dans le passé, qui a d’ailleurs été une des limites de la révision générale des politiques publiques et qui, je le crois, peut même nourrir la défiance de nos concitoyens – au même titre que l’excès de dépense publique est de nature, elle aussi, à faire naître le scepticisme, car la qualité de certains services publics n’est pas à la hauteur des attentes, et ce non par absence de ressources, mais parce que leur gestion pourrait être plus efficace.

La confiance ne se décrète pas, mes chers collègues, mais elle peut néanmoins être encouragée par certains choix politiques. La Conférence nationale des territoires, qui s’est tenue jeudi dernier à Cahors, en est une illustration. Elle mérite que l’on s’y attarde un peu, en particulier au sein de notre assemblée, parce que ses conclusions ont modifié l’autre texte, celui relatif à la trajectoire des finances publiques.

Les relations financières entre l’État et les collectivités territoriales ont besoin d’être rénovées. Encore une fois, il aurait été plus facile d’annoncer une baisse aride et injuste des dotations pour 2018, 2019 et 2020. Une partie de notre assemblée fait mine d’avoir oublié la période dont nous sortons à peine. Le Gouvernement a préféré dialoguer et contractualiser la maîtrise des dépenses de fonctionnement pour les 340 collectivités dont le budget excède 60 millions d’euros.

Qu’il me soit permis ici de saluer le remarquable travail mené par notre collègue Alain Richard et le préfet Dominique Bur à la demande du Premier ministre, dans un délai contraint et sur un sujet aussi délicat. Concrètement, 99 % des collectivités ne sont pas concernées par cette contractualisation. Plutôt que de pousser avec retard des cris d’orfraie, alors que les coupes aveugles dans les dotations se sont arrêtées, soyons collectivement au rendez-vous de ce nouveau pacte financier.

La contractualisation qui devra intervenir au premier semestre 2018 reposera sur un objectif contraignant de maîtrise des dépenses de fonctionnement – les fameux 1,2 % refusés ici –, objectif qui pourra être adapté en fonction de la situation de la collectivité et sur deux objectifs indicatifs, à savoir l’évolution du besoin de financement et la trajectoire de désendettement.

La confiance n’exclut pas le contrôle : cela ne me choque pas qu’une collectivité ne respectant pas sa trajectoire de maîtrise de dépenses se voie opposer un mécanisme de correction. Très concrètement, la collectivité se verrait appliquer une reprise financière de 75 % du dépassement, dans la limite de 2 % des recettes réelles de fonctionnement. Il faut noter que pour les collectivités refusant d’entrée de jeu de contractualiser avec l’État, la reprise financière s’élèverait à 100 % du dépassement, ce qui constitue une incitation persuasive.

Que l’on puisse critiquer tel ou tel aspect du dispositif retenu, je le conçois, c’est le jeu. Mais on ne peut pas mégoter ou chipoter chaque fois qu’une proposition est sur la table, sauf à tenir un double discours qui consiste, en réalité, à s’opposer à toute forme encadrée de maîtrise de la dépense locale.

Le dialogue continue, il porte et portera encore ses fruits. Par exemple, les préoccupations des départements en matière d’allocations individuelles de solidarité ont été entendues par le Gouvernement, et c’est pourquoi une partie des dépenses de solidarité seront exclues de l’objectif de 1,2 % d’évolution des dépenses. Dominique Bussereau, qui n’est pas éloigné de la majorité sénatoriale, a salué cette évolution.

L’État a bien conscience que la situation financière de certains départements doit être assainie. C’est pourquoi le collectif budgétaire prévoit un fonds exceptionnel de 100 millions d’euros.

L’Assemblée des communautés de France, présidée par Jean-Luc Rigaut, lui aussi peu éloigné de vos travées, a appelé ses membres à contractualiser avec l’État.

Pour les régions, Hervé Morin est revenu à la table des négociations et a estimé qu’il y avait désormais une base de discussion acceptable entre l’État et les régions.

Jean-Luc Moudenc, qui me semble avoir l’étiquette Les Républicains et qui préside France Urbaine, s’est montré favorable aux annonces de Cahors.

Alors oui, une partie de l’Association des maires de France est déjà en campagne municipale, en tout cas certains de ses dirigeants historiques. D’autres sont plus constructifs, comme en atteste la mission sur l’évolution de la fonction publique territoriale que vous aviez confiée, monsieur le secrétaire d’État, à Philippe Laurent.

Le Premier ministre n’a pas parlé que de froideur comptable dans le hangar glacial de Cahors, mais aussi de projets ambitieux : un nouvel élan pour améliorer l’accès à internet pour nos territoires ruraux, un assouplissement du calendrier de transfert de la compétence eau, un plan de 5 milliards d’euros pour revitaliser le centre des villes moyennes, ou encore l’encouragement à l’expérimentation au niveau local. Ces textes rendent possible une vraie décentralisation, que nous appelons de nos vœux. Reconnaissons que nous avons plutôt assisté au cours de la dernière décennie à un long entracte.

La République a rendez-vous avec ses territoires, comme nous le verrons en 2018. Ce projet en pose les premières pierres. En cohérence avec ses votes passés et afin de soutenir ce pacte financier, La République En Marche ne votera pas le texte tel qu’amendé par le Sénat, mais la version originale. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.

M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi de finances pour 2018 porte clairement la signature de la nouvelle majorité présidentielle. Mais, plus que tout, elle n’est que la première « levée » de la loi de programmation. Une levée qui n’est dénuée ni de fausses cartes ni de mesures que l’on peut présenter comme autant d’atouts mis sur la table par le Gouvernement.

Quitte à filer la métaphore, demandons-nous qui sont les maîtres du jeu.

Clairement, il y a quelque chose qui unifie, quoi qu’on en dise, ces deux textes. Vos propos, monsieur le secrétaire d’État, l’ont d’ailleurs confirmé, même si vous avez évoqué une ligne de partage idéologique…

Le premier élément, c’est le carcan de l’Union européenne : tant dans la loi de programmation que dans la loi de finances, il faut se conformer aux règles fixées par la Commission européenne. Cette même Commission qui a fait du rêve européen le cauchemar d’une société inégalitaire, d’une croissance aux fruits mal partagés, d’une puissance centrifuge qui pèse sur la souveraineté de notre peuple comme sur l’unité de certains de pays membres.

L’Europe ne sait même pas lutter contre la fraude fiscale qui se déroule sous ses yeux, et même dans son arrière-cour. Cette Europe, qui n’est toujours pas sociale, est suspendue au fil de la finance.

Venons-en au deuxième élément, celui qui, telle la deuxième mâchoire de l’étau, unit les deux textes : l’appétit des marchés financiers.

Parce que c’est bien beau les critères européens, la convergence des politiques publiques et budgétaires, etc. Mais il faut tout de même dégager des marges pour que les marchés y trouvent leur compte… Et force est de constater que le tribut électoral exigé par les marchés financiers qui ont fait élire Emmanuel Macron a été largement payé.

Il y a, d’abord, la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune : ce cadeau de 5 milliards d’euros aux plus riches coûtera 15 000 euros par contribuable concerné !

Il y a, ensuite, le prélèvement forfaitaire unique. Nous n’avons pas vraiment goûté cette disposition, qui nous a semblé offrir aux revenus du capital un avantage fiscal inconsidéré. Ce prélèvement, c’est un peu Retour vers le futur !

Rappelez-vous, monsieur le rapporteur général, notre débat amical de la semaine dernière sur la chaîne Public Sénat. Vous avez affirmé que le prélèvement forfaitaire unique concernerait des revenus ayant déjà supporté l’impôt sur les sociétés. À ce moment-là, un vieux souvenir m’est revenu…

Ce PFU, que vous avez approuvé, m’a paru bien plus fort que l’ISF-PME de Nicolas Sarkozy ou son relèvement des plafonds d’exonération des donations, et bien plus fort encore qu’Édouard Balladur et ses stock-options sans délai de portage minimal. Mes chers collègues, la grande nouveauté du PFU, c’est de reproduire le schéma exact de l’avoir fiscal de Valéry Giscard d’Estaing, issu de la loi du 12 juillet 1965… Quelle innovation !

Ce texte avait été présenté au Sénat par le secrétaire d’État au budget d’alors, Pierre Dumas. Permettez-moi de le citer : « Le texte visait un triple objectif : faciliter le développement de l’épargne et le financement des investissements ; permettre de reconstituer un marché financier contribuant activement à l’équipement du pays ; faire disparaître les obstacles qui contrarient le développement et la rénovation des structures industrielles. »

Monsieur Bargeton, toute ressemblance du discours d’hier avec celui d’aujourd’hui n’est sans doute que pure coïncidence !

Monsieur le rapporteur général, par un amendement dont je ne suis pas certain qu’il sera retenu par l’Assemblée nationale, vous avez voulu mettre en place un système anti-abus, pour éviter que l’incitation à se payer en actions ne soit trop forte. Vous avez notamment visé les cadres dirigeants d’entreprise et vous êtes interrogé sur leur taux de détention du capital. Vous avez fixé de fait une norme à 10 % de ce dernier. Mais qui est visé ? Je connais assez l’économie générale des grands groupes du CAC 40 pour savoir que votre amendement ne trouvera que fort peu – pour ne pas dire pas du tout – d’occasions de s’appliquer, à part peut-être dans une célèbre entreprise auvergnate de pneumatiques, dont la forme sociale est un peu particulière… Qu’on y songe !

Les administrateurs du groupe Danone, par exemple, détiennent moins de 1 % du capital de celui-ci, même si Franck Riboud aura touché en 2016 plus de 540 000 euros de dividendes, s’ajoutant aux 2 petits millions d’euros de sa rémunération fixe annuelle… Paradoxalement, monsieur le rapporteur général, ce sont plutôt les PDG de grosses PME ou d’entreprises de taille intermédiaire qui seraient gênés aux entournures par les mesures que vous préconisez.

Que souhaitez-vous ? Que ces entreprises s’ouvrent au financement par les marchés, au risque d’être victimes de je ne sais quels raids d’affairistes ? Là-dessus, pour faire bon poids, notre collègue Delahaye, qui interviendra dans un instant, a déposé un amendement visant à réduire le taux d’imposition séparée des plus-values.

Au début de l’année 2017, la revue populiste Le Cri du contribuable parlait de l’avoir fiscal comme d’une bonne mesure. Elle aura donc été entendue par le nouveau Président de la République et son « nouveau monde », un président dont les promesses semblent ainsi venir de quelques rangs poussiéreux. La nouveauté tarde à se manifester !

La discussion de la seconde partie du budget n’a pas été meilleure. J’en garde un souvenir particulier : la majorité sénatoriale nous a proposé d’alléger l’imposition des plus-values de la finance immobilière en prenant 2 milliards d’euros dans la caisse des organismes d’HLM, c’est-à-dire, in fine, dans la poche des locataires.

Le ton est donné ; nous ne voterons aucun des deux textes qui nous sont soumis. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Bernard Delcros. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai déjà eu l’occasion de le dire, nous partageons pour l’essentiel les grands objectifs de ce budget sous-tendu par la force de la volonté politique et des engagements tenus : maîtrise de la dépense publique, résorption des déficits, désendettement du pays, orientation de l’épargne vers le financement de nos entreprises en vue d’ouvrir une nouvelle voie pour tenter de relever le défi de l’emploi quand tant d’autres solutions ont montré leurs limites, stabilisation des concours financiers aux collectivités territoriales.

En première lecture, le Sénat a conduit un travail de fond, apportant des améliorations qui nous semblaient justes, aux uns et aux autres, en fonction de nos sensibilités et de la connaissance que chacun d’entre nous a des réalités du terrain. Cela a été dit, de nombreux articles ont pu être votés conformes par les deux assemblées.

Toutefois, le débat a aussi mis en évidence des divergences sur des points essentiels qui ont rassemblé une majorité de sénateurs et rendent aujourd’hui un accord global impossible.

Pour ma part, je regrette – je le dis en toute objectivité – qu’un certain nombre de mesures adoptées par le Sénat, parfois simples et pragmatiques, notamment en faveur des territoires les plus fragiles, n’aient pas été retenues par le Gouvernement. Mes collègues en ont déjà cité quelques-unes, mais je voudrais évoquer d’autres dispositifs concernant plus particulièrement la ruralité, qui, vous le savez, me tient à cœur : le prêt à taux zéro, pour lequel nous demandions un traitement équitable de tous les primo-accédants, qu’ils soient ruraux ou urbains ; la prime à l’aménagement du territoire, aide directe versée aux petites et moyennes entreprises dans les territoires les plus fragiles et dont nous demandions simplement le maintien au niveau de 2017 ; le FISAC, le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce, essentiel au maintien du tissu de services en milieu rural.

Concernant ces dispositifs, nous avons fait des propositions concrètes et réalistes qui n’engageaient pas nécessairement de dépenses supplémentaires pour l’État. Elles méritaient à mon sens d’être mieux prises en compte et pouvaient facilement faire l’objet d’un consensus.

D’une façon plus générale, monsieur le secrétaire d’État, le groupe Union Centriste est attaché à des valeurs sur lesquelles nous ne transigerons pas, mais sur le fondement desquelles nous pourrons aussi vous apporter un soutien sans équivoque.

Parmi ces valeurs figure le juste équilibre entre réalisme économique, prenant en compte le contexte économique mondial que nous connaissons, et solidarité sociale et territoriale, l’État devant pleinement jouer son rôle de régulateur. C’est même une des missions essentielles de l’État que de veiller à ce que les transformations de notre société ne laissent pas au bord du chemin les moins agiles ou les plus fragiles de nos concitoyens. Il faut également un projet résolument tourné vers une nouvelle étape de la construction européenne : c’est seulement à cette échelle que nous pourrons faire face aux grands défis auxquels nos sociétés sont confrontées.

Enfin, une majorité des membres de notre groupe votera en faveur de l’adoption de la motion tendant à opposer la question préalable, considérant qu’une nouvelle lecture n’apporterait rien de plus et relèverait même, dans le délai imparti, d’une mission impossible.

Pour terminer, je veux, en tant que membre de la commission des finances, remercier tout spécialement son président, Vincent Éblé, et son rapporteur général, Albéric de Montgolfier, pour la qualité des travaux qu’ils mènent au sein de cette commission, auxquels nous avons plaisir à participer. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires. – M. Julien Bargeton applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier.

M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, mon propos portera sur le projet de loi de finances pour 2018 ; Arnaud Bazin traitera du projet de loi de programmation des finances publiques.

Le candidat à l’élection présidentielle Emmanuel Macron nous promettait une rupture, seule capable, selon lui, de sortir le pays d’une crise qui n’a que trop duré.

Je crois pouvoir dire que nous partageons cette analyse, mais nous divergeons manifestement non seulement sur l’intensité et la profondeur de la rupture nécessaire, mais aussi sur les moyens à mettre en œuvre.

L’examen de ce premier budget du quinquennat le démontre à l’évidence. Du fait de son manque d’ambition, celui-ci ne peut constituer l’amorce du redressement dont la France a besoin. Trois éléments suffisent à le démontrer : en 2018, les dépenses de l’État continueront de progresser ; le déficit du budget également, de près de 7 milliards d’euros ; quant à la réduction du nombre de fonctionnaires, elle sera limitée à 1 600 dans le périmètre de l’État.

Notre analyse est que la France a un double besoin, urgent, car nous sommes toujours à la traîne en Europe en matière de chômage, de croissance, tandis que nous sommes au sommet, et même souvent champions du monde, en matière de déficit public et de dette…

D’une part, il nous faut relancer l’économie en créant un véritable choc de compétitivité par une baisse massive de charges de nature à redonner des marges à nos entreprises, sans lesquelles toute amélioration durable sur le front de l’emploi est hors de portée.

D’autre part., il nous faut stabiliser, voire diminuer, les impôts et taxes pesant sur les ménages, notamment ceux qui ont été le plus touchés depuis 2012 par des hausses massives de la fiscalité.

Au rebours du sempiternel débat opposant politique de l’offre et politique de la demande, nous affirmons qu’il est urgent de mener les deux conjointement.

C’est la raison pour laquelle nous avions proposé des mesures en faveur de nos entreprises, des PME, de l’innovation, mais aussi du pouvoir d’achat des retraités, des familles et des propriétaires, notamment, grands oubliés de votre politique.

Mais il nous faut aussi, en même temps,…

M. Roger Karoutchi. Oui, en même temps…

M. Philippe Dallier. … et c’est bien là que les choses se compliquent, réduire fortement notre déficit public, afin d’enrayer la spirale infernale d’une dette qui ne cesse d’augmenter et nous menace toujours comme une épée de Damoclès.

Pour baisser les impôts et les charges pesant sur les entreprises et les particuliers tout en diminuant le déficit public, afin de réduire la dette, il n’y a pas d’autre moyen que d’engager des réformes structurelles, seules à même de faire baisser les dépenses de l’État.

Ces réformes, où se trouvent-elles dans ce projet de loi de finances ? Malheureusement, nous n’en voyons pas ! Mais peut-être le Gouvernement espère-t-il que, l’an prochain, une conjoncture meilleure que celle qui est anticipée dans ce PLF permettra de limiter la hausse du déficit ? Ce serait un pari risqué.

Nous ne considérons pas que la dépense publique soit, par nature, toujours trop élevée, mais, à l’évidence, nous ne pouvons plus la financer par l’emprunt ou par l’impôt.

Nous le savons, revenir à l’équilibre des comptes publics demandera des efforts importants. Cependant, l’Allemagne l’a fait : pourquoi en serions-nous incapables ?

Malheureusement, l’effort est reporté en fin de quinquennat et les mesures annoncées sont toujours aussi faiblement documentées.

C’est pourquoi nous avions proposé des mesures importantes d’économies dès l’an prochain. Or rien n’a été retenu par l’Assemblée nationale. Après une commission mixte paritaire écourtée, nous avons assisté à un détricotage en règle, par les députés de La République En Marche, de l’ensemble des mesures adoptées par le Sénat, qui a eu manifestement le grand tort de ne pas s’aligner sur la ligne imposée par l’exécutif.

Où est donc ce « nouveau monde » dont l’émergence a été claironnée, à grand renfort de communication, où est cet esprit « constructif » quand la majorité présidentielle supprime méticuleusement toutes les mesures adoptées par l’autre chambre, y compris celles qui l’ont été à la quasi-unanimité ?

Je pense par exemple aux mesures relatives à l’économie collaborative, qui est ici un sujet consensuel. Même notre article visant à lutter contre la fraude à la TVA sur les plateformes en ligne a été supprimé, alors qu’il avait été adopté à l’unanimité, y compris donc par les sénateurs de La République En Marche, avec un avis de sagesse du Gouvernement ! C’est à n’y rien comprendre !

Nous avons bien compris que les députés de La République En Marche avaient très peu de marge de manœuvre. Le Sénat est-il donc également considéré comme une simple chambre d’enregistrement ?

En fait, les seules économies, dans ce budget pour 2018, viennent de la suppression d’un trait de plume de plusieurs dizaines de milliers de contrats aidés, ainsi que de la réduction des aides personnalisées au logement, les APL, à hauteur de 1,9 milliard d’euros, dont 400 millions d’euros du fait de la baisse de 5 euros pour tous décidée l’été dernier et 1,5 milliard d’euros pris en fait dans la poche des bailleurs sociaux par le biais de la diminution des loyers – quoi de plus facile…

Comment ne pas constater également que la rédaction de l’article 52 adoptée en seconde lecture à l’Assemblée nationale ne tient aucun compte des débats du Sénat, non plus que de l’évolution – certes tardive – des positions du monde HLM, notamment celles des offices ?

Le seul apport du Sénat aura donc été de transcrire le recours à une augmentation de la TVA à hauteur de 700 millions d’euros, ce que l’Assemblée nationale n’avait pas eu le temps de faire, puisque l’idée avait été avancée lors de l’examen en première lecture de la seconde partie du projet de loi de finances à l’Assemblée nationale.

Tout le reste, tout le temps passé ici à débattre par nos collègues siégeant sur toutes les travées, n’aura donc servi à rien.

Quant au seul point sur lequel nous avions cru pouvoir obtenir satisfaction avec une quasi-certitude, parole de ministre à l’appui –Jacques Mézard était au banc du Gouvernement –, à savoir la préservation de l’APL accession, il est passé à la trappe comme le reste de nos propositions. Et comment ne pas pointer le ridicule de la mesure qui a finalement été retenue par l’Assemblée nationale ? L’APL accession est en fait maintenue, pour deux ans seulement, mais en zone III, c’est-à-dire en zone détendue, seulement dans l’ancien et pour les seuls allocataires de l’APL, les allocataires de l’allocation de logement familiale et de l’allocation de logement sociale étant exclus de son bénéfice. Avec ces critères, savez-vous, mes chers collègues, combien de ménages bénéficieront désormais de l’APL accession ? L’équivalent de moins de 5 % de ceux qui y étaient précédemment éligibles ! Si ce n’est pas là une simple mesure d’affichage et de communication, alors qu’est-ce ?

Comment ne pas pointer l’incohérence de vos décisions en matière de logement ?

Vous allez ponctionner, par la baisse des loyers, de 1,7 milliard à 1,9 milliard d’euros sur les bailleurs sociaux ; on ne sait d’ailleurs pas très bien quel est le montant exact, faute d’évaluation précise, certains bailleurs parlant même de plus de 2 milliards d’euros, car il y aura un effet d’aubaine pour certains locataires, qui verront leur loyer baisser alors qu’ils ne sont pas allocataires de l’APL. De l’autre côté, vous incitez ces mêmes bailleurs à vendre 40 000 logements par an pour retrouver des fonds propres, puisque vous leur en retirez, et vous supprimez l’APL accession. Voilà une vraie politique de gribouille sur un sujet pourtant essentiel pour notre économie et pour les Français !

Pour toutes ces raisons, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous ne voyons pas l’intérêt de poursuivre l’examen de ce projet de loi de finances pour 2018. Le groupe Les Républicains soutiendra donc la proposition de notre commission des finances d’opposer la question préalable à ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le projet de loi de programmation des finances publiques a été très substantiellement modifié en nouvelle lecture à l’Assemblée nationale, au lendemain de la Conférence nationale des territoires, qui s’est tenue le 14 décembre dernier. La contractualisation entre l’État et les collectivités territoriales a été précisée.

En première lecture, toutes les demandes de précision étaient renvoyées par le Gouvernement à la Conférence nationale des territoires, au cours de laquelle une concertation avec les élus locaux devait avoir lieu.

En réalité, l’amendement du Gouvernement était déjà rédigé pour la nouvelle lecture prévue le lendemain même à l’Assemblée nationale. Les marges de manœuvre de la Conférence nationale des territoires étaient par conséquent très limitées, et la tenue de cette conférence s’est apparentée de facto à une opération de communication du Premier ministre, laissant à penser que les élus gardaient tout de même la main. Il s’est agi en réalité d’un écran de fumée, ce qui a conduit l’Association des maires de France à refuser d’y participer, aucun « pacte de confiance » n’étant, selon elle, aujourd’hui envisageable.

Dans ces conditions, nous pouvons nous interroger sur une méthode qui consiste à introduire en nouvelle lecture un amendement de six pages, au contenu largement normatif, alors que les lois de programmation sont censées être indicatives…

Une nouvelle fois, avec Emmanuel Macron, nous sommes dans le marketing politique : il s’agit de vendre son produit en deux fois en faisant croire à une concertation, alors que le détail de la contractualisation, qui était déjà dans les cartons du Gouvernement, aurait pu figurer dans le texte initial, être débattu dès la première lecture, puis amendé au cours de la navette. Peut-être un compromis aurait-il même pu alors être trouvé en commission mixte paritaire, dans un esprit constructif.

Les marges de manœuvre en nouvelle lecture, avec un texte profondément remanié par des amendements gouvernementaux, sont désormais plus réduites.

Il apparaît ainsi inédit et incongru, pour ne pas dire abscons, que la commission mixte paritaire sur le projet de loi de programmation ait échoué, au motif notamment que le texte serait détaillé et un compromis peut-être trouvé le lendemain, lors d’une réunion extérieure au Parlement.

À l’issue de la Conférence nationale des territoires, la nouvelle mouture du projet de loi de programmation présentée par le Gouvernement reprend certaines propositions du Sénat. Cependant, beaucoup de points essentiels demeurent insatisfaisants.

Les collectivités contractantes devront réduire leurs dépenses de 13 milliards d’euros durant le quinquennat, soit un effort supérieur à celui de 11 milliards d’euros imposé durant la présidence de François Hollande. Certes, cet effort sera réalisé dans le cadre d’une contractualisation proposée par l’État, mais son caractère léonin rétablit de fait une tutelle sur les collectivités territoriales. Si le contrat imposé par l’État n’est pas respecté, une reprise financière sera opérée, et si la collectivité refuse de signer le contrat, la sanction sera plus lourde encore.

L’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales retenu par le Gouvernement afin de réaliser 13 milliards d’euros d’économies sur cinq ans est donc de 1,2 % par an en valeur, comme dans le texte initial. La modification apportée par le Sénat et les observations de sa commission des finances n’ont pas été retenues : le taux de 1,2 % était fixé par rapport à une évolution tendancielle des dépenses des collectivités sous-estimée ; en réalité, la trajectoire prévue par le projet de loi de programmation représente un effort, pour les collectivités territoriales, de l’ordre de 21 milliards d’euros, et non de 13 milliards d’euros.

L’objectif d’une baisse de 13 milliards d’euros des dépenses des collectivités territoriales sur le fondement d’hypothèses d’évolution tendancielle de la dépense locale plus sincères avait conduit la commission des finances du Sénat à fixer l’objectif d’évolution des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales à 1,9 % par an, au lieu de 1,2 %. Nous regrettons que ce taux n’ait pas été retenu.

Le taux de 1,2 % pourra être revu à la baisse ou à la hausse pour chaque collectivité territoriale qui contractualise, en fonction de trois critères.

Si la prise en compte dans ces critères de la démographie et des efforts déjà réalisés avait été proposée par le Sénat, celle des nouvelles normes imposées par l’État n’a pas été retenue, ce qui était pourtant essentiel.

Concernant les départements, le Gouvernement a repris la proposition du Sénat de déduire les allocations individuelles de solidarité, dont l’évolution n’est pas contrôlable par les conseils départementaux, de l’évaluation de l’évolution de leurs dépenses de fonctionnement. Mais les dépenses liées à la prise en charge des mineurs étrangers non accompagnés, dont le coût est croissant, ne sont pas prises en compte, ce que nous regrettons vivement.

Nous regrettons également que la sanction financière en cas de non-respect du contrat soit particulièrement lourde, avec une reprise financière de 75 %, et même de 100 % pour les collectivités territoriales concernées par la contractualisation qui auront refusé de signer ! Cela s’apparente à une baisse des dotations déguisée.

Nous regrettons également que le dispositif du bonus soit très peu détaillé. Il est juste précisé que, en cas de respect des objectifs contractuels, le préfet pourra accorder aux communes et EPCI signataires « une majoration du taux de subvention pour les opérations bénéficiant de la dotation de soutien à l’investissement local ». Mais il s’agit d’une simple possibilité. Un contrat est pourtant censé engager les deux parties. De surcroît, le flou est total quant au pourcentage de majoration. En outre, monsieur le secrétaire d’État, quid des départements et des régions ?

Nous nous félicitons toutefois de la prise en compte de la suppression par le Sénat de la « règle d’or renforcée », à savoir le contrôle de la capacité de désendettement des collectivités territoriales : cet objectif est désormais incitatif et non plus contraignant. Cette nouvelle règle prudentielle fondée sur la capacité de désendettement faisait en effet peser le risque d’une véritable tutelle de l’État sur le recours à l’emprunt, avec des conséquences réelles sur l’investissement local.

Comme vous pouvez le constater, mes chers collègues, ce texte qui nous revient de l’Assemblée nationale comporte encore trop d’éléments insatisfaisants. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains soutiendra et votera les amendements présentés par notre commission des finances, dont l’adoption permettra d’assurer un meilleur équilibre entre responsabilité et liberté des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur quelques travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention portera sur le projet de loi de programmation des finances publiques, Bernard Delcros ayant traité du projet de loi de finances.

Cette loi de programmation des finances publiques a au moins le mérite d’exister ! Au sein du groupe Union Centriste, nous estimons qu’il s’agit plutôt d’un exercice de style, assez théorique. Comme lors du quinquennat de François Hollande, on nous promet, en début de mandat, un retour à l’équilibre en cinq ans. Nous n’y croyons pas.

Comme je l’avais fait remarquer en première lecture, le texte est fondé sur des estimations de croissance beaucoup trop optimistes pour la période 2020-2022, en désaccord avec le consensus des économistes.

Surtout, on nous propose au travers de ce projet de loi de programmation de reporter les efforts sur les dépenses en fin de période. Or nous qui avons presque tous dirigé des collectivités, nous savons que c’est en début de mandat que les efforts et les réformes doivent être faits.

Par ailleurs, les économies à faire sur les dépenses ne sont pas documentées. Depuis des années, on nous annonce des économies sur le budget de l’État, mais on ne les voit jamais venir. Cela nous rend sceptiques et dubitatifs sur la sincérité de cette loi de programmation qui prévoit un retour à l’équilibre dans cinq ans.

Le texte établit la répartition des efforts entre l’État, la sécurité sociale et les collectivités locales. Je le redis ici au nom du groupe Union Centriste, nous n’avons jamais été opposés à ce que l’on demande des efforts aux collectivités locales, mais nous avons toujours souhaité que ces efforts soient équitables au regard de ceux de l’État,…

M. Michel Canevet. C’est vrai.

M. Vincent Delahaye. … ce qui n’a pas été le cas durant la période précédente. Nous aimerions que cela change.

Entre la première et la deuxième lecture, des améliorations ont été apportées par le Gouvernement. Retenir une évolution des dépenses des collectivités locales en tendance, comme pour l’État, constitue déjà un progrès, même si nous ne sommes pas forcément d’accord sur la manière de calculer.

En revanche, le montant de l’effort demandé –13 milliards d’euros sur un total de 60 milliards d’euros – nous paraît excessif. En effet, l’endettement des collectivités locales ne représente que 8 % de l’endettement global de la France (Mme Sophie Joissains applaudit.), et leurs budgets sont en excédent, contrairement à celui de l’État.

Nous nous interrogeons sur la prétendue contractualisation, qui en réalité s’apparente plutôt à un encadrement autoritaire des dépenses des 340 collectivités les plus importantes. Nous aurions aimé avoir davantage de détails, notamment sur la modulation de 0,15 % du critère de l’évolution démographique pour les collectivités ayant déjà fait des efforts ou sur le bonus devant récompenser les collectivités qui auront respecté l’encadrement des dépenses. Tout cela reste assez flou, monsieur le secrétaire d’État.

Pour conclure, si le texte a évolué, les prévisions de croissance nous semblent beaucoup trop optimistes et nous aurions aimé davantage de prudence et de réalisme. Nous soutiendrons les amendements du rapporteur général, pour aboutir à une loi de programmation plus juste à l’égard des collectivités territoriales. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La discussion générale commune est close.

projet de loi de finances pour 2018

 
 
 

M. le président. Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable sur le projet de loi de finances pour 2018.

Question préalable

 
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
Question préalable (fin)

M. le président. Je suis saisi par M. de Montgolfier, au nom de la commission des finances, d’une motion n° I-5.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement du Sénat ;

Considérant que dans sa nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2018, l’Assemblée nationale n’a pas retenu la proposition du Sénat de relever le plafond du quotient familial, alors même qu’il s’agit d’une mesure de justice fiscale pour les familles après les hausses d’imposition répétées du précédent quinquennat ;

Considérant qu’elle a confirmé la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages à l’horizon 2020, malgré le caractère injuste et précipité de cette mesure, qui réduit le pouvoir fiscal des communes et présente d’importants risques constitutionnels en maintenant l’impôt sur 20 % des contribuables qui acquittent d’ores et déjà 83 % de l’impôt sur le revenu ;

Considérant que l’Assemblée nationale n’a pas remis en cause la création de l’impôt sur la fortune immobilière qui pénalisera l’investissement locatif et concentrera l’imposition sur les ménages relevant du haut de la classe moyenne supérieure, alors même que la suppression totale de l’impôt de solidarité sur la fortune, adoptée par le Sénat, aurait été une mesure simple, lisible et de nature à redonner de l’attractivité à notre territoire ;

Considérant qu’elle a, en nouvelle lecture, rétabli les multiples surtaxes sur l’or, les yachts ou les voitures de sport, qui apparaissent comme autant de contre-feux dérisoires aux critiques légitimes sur l’incohérence de l’assiette du nouvel impôt sur la fortune immobilière ;

Considérant qu’elle n’a pas retenu des dispositions pourtant adoptées à l’unanimité par le Sénat telle la responsabilité solidaire des plateformes de commerce en ligne pour le paiement de la taxe sur la valeur ajoutée et la possibilité de collecter la taxe sur la valeur ajoutée à la source par « paiement scindé » ce qui a pour objet la lutte contre la fraude fiscale ;

Considérant que bien qu’ayant entériné le relèvement de taux de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % à 10 % pour la construction et la rénovation des logements sociaux, l’Assemblée nationale n’a que partiellement suivi le Sénat pour trouver une solution plus soutenable pour l’ensemble des bailleurs sociaux, en entérinant une économie sur les aides personnelles au logement de 1,5 milliard d’euros d’ici 2020, et en supprimant quasi intégralement les aides personnelles au logement « accession » ;

Considérant enfin qu’elle n’a pas modifié les crédits des cinq missions rejetées par le Sénat (« Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » ; « Immigration, asile et intégration » ; « Justice » ; « Sécurités » ; « Travail et emploi ») ni donné suite à ses propositions d’économies en dépenses, notamment par l’augmentation du temps de travail dans la fonction publique alors même que la masse salariale de l’État a augmenté de 5,8 % en 2017, un montant inédit sur les quinze dernières années ;

Le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi de finances pour 2018, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture (n° 172, 2017-2018).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. le rapporteur général, pour la motion.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’ai déjà largement évoqué cette motion dans mon propos liminaire. Nous n’avons pas réussi à aboutir à un accord en commission mixte paritaire. Le Gouvernement vient de nous confirmer, par la voix du secrétaire d’État, que le texte allait dans une très large mesure être rétabli à l’Assemblée nationale. Nous ne pouvons donc pas nous mettre d’accord sur des dispositions que nous considérons comme absolument essentielles. Je pense notamment au quotient familial ou à la taxe d’habitation. Encore une fois, nous ne considérons pas que cette dernière soit l’impôt le plus juste, mais elle méritait mieux : plutôt que de l’amputer d’une partie de son montant, nous aurions pu nous entendre sur la nécessité d’élaborer une réforme fiscale d’envergure.

L’Assemblée nationale n’a pas non plus entendu les arguments du Sénat sur l’impôt sur la fortune immobilière, qui frappera l’avertissement productif alors même que des investissements totalement improductifs seront exclus de l’assiette de l’imposition.

On peut aussi regretter que l’Assemblée nationale n’ait pas retenu un certain nombre d’avancées que le Sénat avait pourtant adoptées à l’unanimité. Je pense notamment aux dispositions relatives à la fiscalité numérique ou à la lutte contre la fraude à la TVA. À ce sujet, nous avions proposé d’instaurer une responsabilité solidaire des plateformes, qui aurait permis de s’assurer du paiement effectif de la TVA quand celle-ci est collectée par des vendeurs en ligne.

Je ne parlerai pas longuement de l’article 52 du projet de loi de finances ; un certain nombre de collègues, siégeant sur toutes les travées, s’étaient fortement investis pour trouver une solution en matière de logement. A certes été retenue l’augmentation, de 5,5 % à 10 %, de la TVA sur le logement, mais nos autres avancées n’ont malheureusement pas été conservées, alors que nous pouvions aboutir à une solution relativement consensuelle.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a rétabli les crédits d’un certain nombre de missions que nous avions rejetés, sans pour autant considérer les pistes d’économies que nous avions proposées, par exemple en ce qui concerne la fonction publique territoriale.

En conclusion, compte tenu des divergences existantes, je crains malheureusement qu’une nouvelle lecture ne permette pas de concilier les points de vue entre l’Assemblée nationale et le Sénat. C’est la raison pour laquelle la commission des finances vous propose, mes chers collègues, d’adopter cette motion tendant à opposer la question préalable, afin d’éviter un débat que nous considérons comme inutile. Sinon, nous nous retrouverons entre Noël et le 31 décembre pour une nouvelle lecture complète. J’y suis, pour ma part, prêt, mais je ne sais pas si nos collègues sont tous dans ce cas… (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, contre la motion.

M. Richard Yung. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme d’un calendrier parlementaire chargé. Le texte qui revient aujourd’hui devant notre assemblée est, malgré ce que vous en dites, monsieur le rapporteur général, enrichi du dialogue parlementaire, enrichi de débats qui ont souvent franchi les limites de l’hémicycle, enrichi de notre expérience.

En particulier, sur la question du logement, des mesures présentées sur l’initiative du sénateur Dallier, très engagé sur ce dossier, et soutenues avec conviction par une majorité d’entre nous ont été ancrées dans le texte : c’est le cas du relèvement du taux de TVA à 10 % pour la plupart des opérations réalisées dans le cadre de la politique sociale du logement. D’autres mesures importantes ont été conservées, comme celle qui, à l’article 4, vise à préciser le régime de calcul de la TVA pour la presse en ligne.

Sur ce dernier sujet, comme sur l’évolution économique en général, le Sénat montre son engagement en faveur de la nouvelle économie. Nous avons su, de manière transpartisane, mettre sur la table et discuter des mesures qui, même si elles n’ont pas toutes été adoptées, serviront de base aux textes futurs – je pense en particulier aux dispositions issues du rapport du Sénat relatif à la fiscalité de l’économie collaborative.

Mes chers collègues, nous avons aujourd’hui un choix à faire : soit nous poursuivons le débat et mettons en avant l’expertise du Sénat pour attirer l’attention du Gouvernement et des médias sur les problèmes quotidiens des Français, soit nous mettons fin à la discussion sur le projet de budget de l’État, qui est, je le rappelle, au fondement même de l’existence du Parlement.

Même si l’arrêt de la discussion budgétaire au Sénat n’aurait pas de conséquence particulière sur le processus budgétaire, il signifierait tout de même que nous nous défaussons sur l’Assemblée nationale ; voilà ce que nous afficherions en adoptant la motion tendant à opposer la question préalable. Au fond, cela signifierait que le Sénat n’existe pas, ne compte pas. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Cécile Cukierman. Vu comme il a été respecté à l’Assemblée nationale, ça ne change rien ! Les députés ont décidé de s’asseoir sur notre travail !

M. Xavier Iacovelli. Dites-le au Gouvernement, il est présent !

M. Richard Yung. C’est le sens de ce que vous vous apprêtez à voter, mes chers collègues ! Il ne sert à rien de crier, c’est la vérité ! (Non ! sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. Patrick Kanner. C’est un peu court !

M. Martial Bourquin. C’est votre vérité !

M. Richard Yung. Ce sera interprété ainsi par le pays ! Rappelez-vous : lorsque, l’année dernière, vous avez bloqué d’emblée la discussion du projet de loi de finances, cela a eu des répercussions dans le pays. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. René-Paul Savary. Le budget était insincère !

M. Patrick Kanner. Les socialistes étaient au pouvoir, à ce moment-là ! Vous avez retourné votre veste !

M. le président. Mes chers collègues, seul l’orateur a la parole !

M. Richard Yung. L’option proposée par le rapporteur général me paraît hautement dommageable pour notre institution.

Elle est dommageable, en premier lieu, du point de vue institutionnel, parce que la navette a prouvé son utilité. Quand la commission mixte paritaire n’aboutit pas aux conclusions que vous souhaitez, vous refusez la discussion ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Toutes les CMP ne retiennent pas l’ensemble des propositions du Sénat, vous le savez très bien.

En première lecture, notre assemblée a adopté conformes 91 articles, ce qui représente plus de la moitié du texte transmis par l’Assemblée nationale. Ensuite, l’Assemblée nationale a adopté conformes 45 articles issus des travaux du Sénat. Faisons les comptes : à ce stade, les deux chambres sont d’accord sur près des trois quarts du texte. (Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) Nous ne sommes pas d’accord sur tout ? Ce n’est pas une raison pour abandonner la discussion.

En second lieu, refuser le débat est dommageable pour notre institution au regard de l’opinion. Nous devons en être conscients. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Un sénateur du groupe Les Républicains. Godillot !

M. le président. Mes chers collègues, veuillez respecter l’orateur et faire silence.

M. Richard Yung. Il y en a eu d’autres, des godillots !

Les Français, nous le savons, mettent en question le bicamérisme quand ils consultent la presse, quand ils découvrent certaines pratiques indignes, quand le Sénat refuse la discussion sur le budget de l’État ou de la sécurité sociale.

M. Guy-Dominique Kennel. Et vous, vous refusez de l’entendre !

M. Richard Yung. Nous sommes tous ici les premières cibles lorsque le Sénat s’entête dans une posture politique. (Huées sur les travées du groupe Les Républicains.) Bien sûr, il n’y aura pas d’accord avec l’Assemblée nationale. Est-ce anormal ? Non, c’est la règle de la démocratie ; par conséquent, qui s’en étonnerait ?

En conclusion (Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.), parce que le groupe La République En Marche croit aux vertus du dialogue et souhaite proposer aux Français l’image d’une seconde chambre qui relit, corrige et peaufine, nous voterons contre cette motion.

M. Laurent Duplomb. En marche arrière !

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. J’ai bien entendu les arguments contre la motion. Je pourrai la retirer si j’obtiens une réponse positive aux deux questions suivantes.

Premièrement, le Gouvernement est-il prêt à émettre un avis favorable ou de sagesse sur un certain nombre d’amendements du Sénat ?

Deuxièmement, les collègues qui s’apprêtent à voter contre la motion sont-ils disposés à siéger le 26 ou le 27 décembre ?

M. Richard Yung. Bien sûr, même le 25 !

M. Martial Bourquin. Si c’est pour supprimer la flat tax, je viens ! Et si c’est pour rétablir l’ISF, je viens même le jour du Nouvel An !

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Dont acte, mais le Gouvernement ne semble pas décidé à donner un avis favorable à un certain nombre d’amendements du Sénat. J’ai donc quelques doutes sur l’opportunité de retirer la motion.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. L’avis du Gouvernement sur la motion est naturellement défavorable, puisqu’il souhaite que le débat puisse se poursuivre.

Le Gouvernement a donné des avis favorables ou de sagesse à certains amendements du Sénat, issus de tous les groupes, mais il n’est pas seul à décider. À ce stade de la procédure, il s’agit d’une discussion entre les deux assemblées. La CMP ayant échoué, vous savez parfaitement quelle sera la procédure s’il y a des divergences entre elles après la nouvelle lecture. Le Gouvernement s’en tiendra évidemment aux positions qu’il a défendues au cours de la première lecture, quelles que soient les circonstances et la suite de la procédure.

Par ailleurs, je ne me prononcerai pas sur la seconde question, ne voulant pas contribuer à gâcher les vacances du rapporteur général !

M. le président. La parole est à M. Emmanuel Capus, pour explication de vote.

M. Emmanuel Capus. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, j’entends les arguments du rapporteur général. Je déplore, comme lui, que l’Assemblée nationale n’ait pas retenu certaines dispositions que nous avions adoptées à l’unanimité ou presque, notamment le relèvement du plafond du quotient familial, sachant que la précédente majorité a beaucoup tapé sur les familles.

Pour autant, j’observe également que le Sénat a tout de même, sinon fait preuve de jusqu’au-boutisme, du moins été un peu loin en supprimant purement et simplement l’ISF, alors même que, comme l’a indiqué notre collègue Gérard Longuet, aucun parlementaire de droite n’avait soutenu cette position depuis 1986.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale ne pouvait évidemment pas davantage suivre le Sénat sur la suppression pure et simple de la réforme de la taxe d’habitation.

Enfin, sur un plan plus personnel, je note, monsieur le rapporteur général, que la commission des finances motive le dépôt de cette motion tendant à opposer la question préalable par le fait que les crédits de la mission « Travail et emploi » n’ont pas été modifiés par l’Assemblée nationale. Il faut rester cohérent, monsieur le rapporteur général ! En effet, les crédits de cette mission ont été adoptés sans aucune réserve par la commission des finances du Sénat à deux reprises, les 7 et 23 novembre, avant que, en séance publique, à l’occasion d’un pataquès incompréhensible, le groupe Les Républicains ne change d’avis et ne les rejette ! Ces crédits étaient tout à fait satisfaisants et nous l’avons toujours souligné en commission des finances. Il faut être clair sur ce point.

Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et territoires s’abstiendra.

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. La question qui se pose n’est pas celle du calendrier, monsieur le rapporteur général. Il s’agit plutôt d’une question de posture.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit de la capacité du Gouvernement à évoluer !

M. Pascal Savoldelli. La majorité sénatoriale essaie de donner l’impression de se démarquer de la majorité présidentielle, mais ce n’est pas facile !

Certains veulent supprimer tout de suite en totalité l’impôt de solidarité sur la fortune, quand d’autres, plus modérés, reprennent une très vieille proposition, populiste à mes yeux, consistant à passer par l’étape intermédiaire d’un impôt sur l’immobilier. Cependant, in fine, ils vont tous dans la même direction.

Cette orientation n’est guère réjouissante : son coût, qui sera supporté par les salariés et les couches moyennes, devait être initialement de 3,2 milliards d’euros, puis on est passé à 4,2 milliards d’euros, et enfin la majorité du Sénat a alourdi encore la facture pour la porter à 5 milliards d’euros !

Sur la question de l’exonération de la taxe d’habitation, il y aurait aussi beaucoup à dire. Il est précisé, dans le texte de la motion, que cette mesure « présente d’importants risques constitutionnels en maintenant l’impôt sur 20 % des contribuables qui acquittent d’ores et déjà 83 % de l’impôt sur le revenu ».

Il y a dans le dépôt de cette motion un aspect tacticien, éloigné des préoccupations des gens. Nous ne la voterons pas, parce que cette dimension tacticienne et politicienne exclut une partie de la population française.

Comment se fait-il que, dans notre beau pays, 80 % des contribuables ne paient que de 16 % à 17 % de l’impôt sur le revenu ? Répondre à cette question amène à révéler comment vit la majorité des femmes, des hommes et des jeunes. Cette réalité est d’une tout autre portée que cette motion très politicienne !

M. le président. Je mets aux voix la motion n° I-5, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l’adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi.

Je rappelle en outre que l’avis du Gouvernement est défavorable.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

(Le scrutin a lieu.)

M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)

M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 48 :

Nombre de votants 345
Nombre de suffrages exprimés 332
Pour l’adoption 197
Contre 135

Le Sénat a adopté.

En conséquence, le projet de loi de finances pour 2018 est rejeté.

Je vais suspendre la séance afin de permettre à la commission des finances de se réunir pour examiner les amendements déposés sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

La parole est à M. le président de la commission.

M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Je précise que la commission des finances se réunit immédiatement dans sa salle habituelle. Il n’y a que trois amendements sur ce texte, nous aurons donc achevé leur examen avant les questions d’actualité au Gouvernement.

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures quarante-cinq.)

M. le président. La séance est reprise.

Question préalable (début)
Dossier législatif : projet de loi de finances pour 2018
 

4

Questions d’actualité au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que la séance est retransmise en direct sur Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.

Au nom du bureau du Sénat, j’appelle chacun de vous, mes chers collègues, à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat, le respect des uns et des autres, ainsi que celui du temps de parole, afin que chaque orateur puisse bénéficier de la diffusion complète de sa question et de la réponse.

conférence de consensus sur le logement

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme Valérie Létard. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre et porte, à quelques jours à peine de la Conférence nationale des territoires et au terme d’un débat budgétaire douloureux, voire décevant, sur un sujet ô combien cher à nos collectivités et à nos concitoyens, celui du logement, de son financement et de sa nécessaire réforme.

Le Sénat s’était efforcé de réaliser un travail collectif, transpartisan, afin d’atténuer les conséquences du choix du Gouvernement de baisser les loyers de 1,5 milliard d’euros pour compenser la réduction sur trois ans des aides personnelles au logement, les APL, choix qui a entraîné un recul de plus de 10 milliards d’euros de l’investissement dans la construction et la rénovation de logements. À l’Assemblée nationale, le Gouvernement a néanmoins souhaité maintenir, de façon abrupte, sa vision, en réinstaurant la même contrainte financière au détriment du monde du logement, faisant fi des propositions pourtant consensuelles du Sénat.

Demain, monsieur le Premier ministre, démarre le premier temps fort de la conférence de consensus sur la réforme du logement et l’équilibre des territoires souhaitée, à juste titre, par le président Gérard Larcher et acceptée par le Président de la République.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous, après cet épisode malheureux de la discussion budgétaire, nous assurer que l’investissement que vont consentir les deux chambres du Parlement, le monde du logement et les collectivités sera véritablement pris en compte et nourrira le projet de loi que le Gouvernement déposera au printemps prochain ? Pouvez-vous nous garantir que cette concertation ne sera pas qu’un prétexte pour faire accepter l’inacceptable ? Nous comptons sur vous, monsieur le Premier ministre, et sur le Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.

M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur la politique du logement à la veille de la conférence de consensus et à l’issue d’un débat budgétaire qui, selon vous, aurait été peu satisfaisant.

Vous êtes une spécialiste reconnue du sujet ; je parlerai donc avec prudence. J’imagine que c’est contrainte et forcée par le temps limité qui vous est imparti pour vous exprimer que vous avez réduit la portée de la réforme que nous envisageons à un aspect qui, s’il n’est pas inexact, est – vous aurez, je pense, l’objectivité de le reconnaître – très incomplet…

En effet, vous auriez aussi pu évoquer, madame la sénatrice, les contreparties que nous prévoyons en faveur des acteurs du logement social ; vous ne l’avez pas fait.

Vous auriez aussi pu évoquer, madame la sénatrice, les avancées, nombreuses, proposées par le Gouvernement au cours de la discussion ; vous ne l’avez pas fait.

Vous auriez aussi pu évoquer le fait que la discussion s’est tenue non seulement dans cet hémicycle, ce qui est bien naturel, mais également à l’occasion de très nombreuses rencontres avec les acteurs du monde du logement social et un grand nombre de sénateurs, dont vous-même, pour leur permettre de juger de l’ensemble des propositions que nous formulions.

Après un débat, le Sénat a considéré, comme c’est son droit le plus strict, qu’il n’était pas en mesure d’accepter ce que nous proposions.

Je considère que nous avions une obligation de discuter, une obligation d’expliquer quel était l’objectif de notre réforme, et je crois pouvoir conclure des débats qui se sont tenus que cet objectif a été compris ; je pense même pouvoir dire qu’il est, à bien des égards, partagé.

Reste à mettre en œuvre cette réforme indispensable, une fois que le Parlement aura adopté le budget. Certains acteurs du logement social ont signé l’accord que nous leur proposions. Même ceux qui ne l’ont pas fait ont tous indiqué qu’ils partageaient les objectifs que nous fixions.

Puis viendra la conférence de consensus proposée par le président du Sénat, que nous avons acceptée et dont nous avons défini en commun l’ordre du jour. Nous l’abordons, avec M. le ministre de la cohésion des territoires, dans un esprit ouvert et confiant, mais aussi avec détermination. Chacun doit vouloir aboutir au consensus. Nous sommes déterminés à avancer et nous espérons que le débat avec les membres du Sénat et l’ensemble des acteurs du logement nous permettra de définir les bonnes pistes, les bons instruments pour ce faire.

Bien souvent, en effet, on s’arrête aux difficultés. Alors même que tout le monde s’entend sur l’objectif à atteindre, les décisions à prendre font parfois un peu peur et rebutent un certain nombre d’acteurs. Je le répète, nous sommes, mesdames, messieurs les sénateurs, déterminés à avancer. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à Mme Valérie Létard, pour la réplique.

Mme Valérie Létard. Monsieur le Premier ministre, pour aboutir à un consensus, à un compromis, il faut que chacun, Parlement et Gouvernement, consente à faire un pas. Il s’agit de produire une synthèse au bénéfice des territoires et de nos concitoyens. Nous espérons que cette conférence de consensus débouchera sur un véritable compromis. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. –Mme Marie-Thérèse Bruguière applaudit également.)

syrie

M. le président. La parole est à M. Claude Haut, pour le groupe La République En Marche. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. Claude Haut. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

Hier soir, le dirigeant syrien Bachar al-Assad s’en est pris vivement à la France, l’accusant de soutenir le terrorisme dans la région. Ces propos sont inacceptables. En luttant contre un seul ennemi, Daech, notre pays a été cohérent depuis le début du conflit syrien.

Comme l’a justement précisé le Président de la République, nous ne pourrons construire de paix durable ou parvenir à une solution politique sans la Syrie et les Syriens. Mais les propos tenus par Bachar al-Assad ne semblent pas aller dans le sens de l’émergence d’une issue internationale positive pour la région.

La France fait aujourd’hui partie d’une coalition internationale qui est la seule entité capable de gagner en Syrie, quand toutes les autres parties font preuve d’ambiguïtés. En conséquence, les propos de M. Assad nous paraissent tout à fait déplacés.

Par ailleurs, rappelons que le rôle de Bachar al-Assad dans la situation que connaît aujourd’hui la Syrie ne doit pas être minimisé.

C’est la raison pour laquelle nous ne devons avoir aucune complaisance à l’égard du régime syrien, ennemi de son propre peuple et responsable de la mort de près de 400 000 personnes depuis le début de la guerre. Comme l’a justement affirmé le ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, « quand on a passé son temps à massacrer son peuple, on a généralement un peu plus de discrétion ».

Si nous entendons construire un processus de paix qui conduise à une véritable stabilité du pays, nous nous devons de réunir les parties autour de la table et de poser les bases d’une transition politique et démocratique durable.

Or le dernier cycle de pourparlers entre le régime syrien et l’opposition, organisé sous l’égide de l’Organisation des Nations unies, s’est achevé jeudi à Genève sans avoir permis aucune avancée. Ainsi, toutes les tentatives de sortir du conflit syrien ont échoué.

Monsieur le secrétaire d’État, j’aimerais savoir quel rôle la France entend jouer dans la mise en place des moyens diplomatiques qui permettront d’assurer une véritable transition en Syrie. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur, vous avez résumé la situation avec des mots justes, face à ceux, insultants, de Bachar al-Assad. On sait combien notre pays a souffert, ces dernières décennies, d’un terrorisme parfois exporté par cet État.

Qu’en est-il aujourd’hui ? Après six hivers de guerre, la situation évolue rapidement sur le terrain militaire. La campagne contre Daech, qui est notre priorité absolue, est en passe de se terminer. La France s’était mobilisée dès septembre 2014, étant le deuxième pays à frapper Daech depuis les airs. La reprise de Raqqa et de Mossoul a répondu aux attaques menées sur notre territoire.

Aujourd’hui, Daech est acculé dans des poches de résistance, mais il reste à gagner la paix, à faire en sorte qu’une véritable stabilité s’instaure. S’il s’agit encore d’une gageure, nous ne devons pas baisser les bras.

Il faut parvenir à embrayer sur une solution politique pour construire la paix dans la durée, comme l’a dit ce matin le Président de la République, en ajoutant que des initiatives seront prises dans le cadre du processus que la France souhaite voir émerger au début de l’année prochaine.

Genève est le cadre légitime. D’autres initiatives se sont fait jour ces derniers mois, à Astana ou à Sotchi. Une initiative n’a de sens que si elle offre la perspective d’une transition vers des élections et l’élaboration d’une constitution, bref d’un transfert des pouvoirs, car on ne peut se satisfaire de la situation actuelle.

Nous appelons la Russie à jouer pleinement son rôle d’influence auprès du régime. La France, quant à elle, n’épargnera aucun effort pour trouver une solution politique à la crise syrienne. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Robert del Picchia applaudit également.)

france ô

M. le président. La parole est à M. Stéphane Artano, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

M. Stéphane Artano. Ma question s’adresse à Mme la ministre de la culture.

L’audiovisuel public fait actuellement l’objet de toutes les attentions, avec 80 millions d’euros d’économies supplémentaires demandés aux entreprises du secteur, la fuite malheureuse d’un rapport qui propose la suppression de France Ô, le basculement de France 4 sur le numérique et, dernièrement, les propos peu amènes prêtés au Président de la République devant des députés, propos qu’il a précisés tout récemment sur France 2.

Il est tout à fait louable de vouloir moderniser pour relever les nouveaux défis du numérique et de l’accès à la culture et à la création. Pour autant, cela ne doit pas faire oublier la mission éducative de l’audiovisuel public.

Le manque de concertation inquiète légitimement nos concitoyens, attachés au service public, ainsi que des personnels, en métropole et dans les outre-mer, qui voient les choses se dessiner au gré des articles de presse, ne sachant où se décide précisément cette réforme. Il importe donc de définir rapidement une vision stratégique et un calendrier précis pour cette réforme que nous appelons de nos vœux.

Pour alimenter votre réflexion, les entreprises du secteur vous ont remis leurs propres propositions en novembre dernier. Parmi celles de France Télévisions figure le renforcement significatif du caractère régional de France 3, à l’instar de ce qui existe déjà en outre-mer grâce aux neuf chaînes du réseau Outre-Mer 1ère, chaînes de proximité de plein exercice.

J’aimerais aller un peu plus loin et connaître la philosophie de votre ministère sur la valorisation et le partage en métropole des cultures des outre-mer pour tous les publics.

Sur le fond, avez-vous retenu certaines des propositions formulées par France Télévisions, notamment en matière de régionalisation ? Nous confirmez-vous que la suppression de France Ô est définitivement écartée et que cette chaîne conservera sa vocation dans le groupe ?

Enfin, le Président de la République a annoncé une grande concertation. Vous évoquez vous-même des arbitrages en février ou mars prochains. Pourriez-vous nous préciser le calendrier de la réforme ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Françoise Nyssen, ministre de la culture. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez sur l’avenir de la chaîne France Ô, dans le cadre de la réforme de l’audiovisuel public.

La présence de France Télévisions sur l’ensemble des territoires ultramarins au travers du réseau des chaînes Outre-Mer 1ère est une force de notre service public audiovisuel sur laquelle nous devons nous appuyer davantage.

Concernant France Ô, il est de la mission du service public de faire connaître au plus large public les actualités, la création, le patrimoine et les cultures de ces territoires. Ces dernières années, cette mission était principalement assurée par France Ô, dont la ligne éditoriale a été recentrée sur sa vocation ultramarine.

En réalité, la véritable question est celle de la présence des outre-mer sur toutes les antennes nationales de France Télévisions, afin notamment de leur assurer une plus grande visibilité. Cela vaut en matière d’information comme de création audiovisuelle. Je veux d’ailleurs saluer ici la qualité des fictions et des documentaires produits par le service public sur les territoires ultramarins. Ces contenus mériteraient d’être davantage exposés sur l’ensemble des antennes nationales.

Cette réflexion s’inscrit dans le cadre des travaux sur la transformation de l’audiovisuel public que le Président de la République a appelée de ses vœux et que nous avons lancée. Je rencontrerai encore l’ensemble des directeurs de l’audiovisuel public le 21 décembre prochain. Nous menons une vaste concertation, notamment avec la représentation nationale. Nous espérons pouvoir vous remettre les premiers résultats de ce travail en début d’année prochaine. À ce stade, aucune décision n’a été arrêtée. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

accueil des réfugiés

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Guillaume Gontard. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Monsieur le ministre d’État, j’ai assisté samedi dernier à Briançon aux états généraux des migrations. Pour l’occasion, rappelant la totale solidarité que requiert cette pratique, une cordée de 330 personnes s’est déployée le long du col de l’Échelle, là même où les panneaux « France » ont étrangement été retirés pour égarer les migrants.

Après avoir échappé à l’esclavage en Libye, après avoir évité la noyade en Méditerranée, hommes, femmes et enfants entreprennent par milliers la traversée des Alpes, à peine vêtus, malgré le froid, malgré la neige qu’ils découvrent pour la première fois.

Jamais depuis Hannibal la traversée des Alpes n’aura été aussi périlleuse. Mais le Gouvernement français, aveuglé par les chiffres et sans considération aucune pour la souffrance humaine, ramène à la frontière, par moins 10 degrés, ces gens à peine vêtus.

Comme partout sur le territoire, associations et citoyens se mobilisent pour le respect de la vie humaine, pour que l’on ne transforme pas les Alpes en cimetière. Certains ont même été condamnés pour leur humanité. Samedi, la police était d’ailleurs là pour relever les plaques d’immatriculation des encordés…

« Je ne veux plus, d’ici la fin de l’année, avoir des hommes et des femmes dans les rues, dans les bois. Je veux partout des hébergements d’urgence. » a dit le Président de la République. Or l’État gaze les migrants et leurs biens, lacère leurs tentes ou brûle leurs couvertures.

Étape supplémentaire dans l’indignité, votre circulaire du 12 décembre dernier autorise désormais la police à traquer les réfugiés jusque dans les hébergements d’urgence, provoquant l’ire des ONG. Indigne et absurde, cette mesure jettera dans les rues des gens qui, pour survivre, pourraient commettre l’irréparable.

Le Défenseur des droits dénonce un « tournant politique déplorable en termes de respect des droits et des libertés fondamentales ». Le Gouvernement lui répondra bientôt par un projet de loi Asile et immigration qui prévoit un doublement de la durée légale de rétention.

Monsieur le ministre d’État, cette politique respecte-t-elle le devoir et l’honneur de la France, invoqués solennellement par le Président de la République le 23 juin dernier ? (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Joël Labbé applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Non, monsieur le sénateur, la politique de la France n’est pas indigne.

Oui, nous accueillons beaucoup de celles et de ceux qui ont droit à l’asile. Ce matin encore, j’accueillais un certain nombre de réfugiés venant du Darfour et de l’Érythrée.

Mais, comme l’a dit le Président de la République, autant nous devons accueillir celles et ceux qui sont victimes de la guerre ou de persécutions politiques dans leur pays, autant nous ne pouvons accueillir l’ensemble des migrants économiques. (Mme Éliane Assassi proteste. – Applaudissements sur quelques travées du groupe Les Républicains.)

Nous présenterons un projet de loi visant à réduire à six mois la durée d’examen de la demande d’asile, de manière à pouvoir très vite accueillir celles et ceux qui auront vocation à s’installer en France et éloigner les autres. (M. Pierre Laurent proteste.)

Mesdames, messieurs les sénateurs, le nombre de non-admissions aux frontières s’est élevé à 100 000 cette année. Qui pense que nous aurions pu accueillir ces 100 000 personnes en sus des 95 000 qui ont déposé une demande d’asile en 2016 ? C’est impossible ! Il aurait fallu construire une ville entière, ce qui est totalement irréaliste ! Nous avons le sens des responsabilités ! (Vifs applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)

droit d’asile

M. le président. La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour le groupe socialiste et républicain.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

Au nom de mon groupe, je me joins aux propos que vient de tenir M. Gontard. Monsieur le ministre de l’intérieur, vous le savez, toutes les associations humanitaires protestent depuis quelques jours contre la circulaire que vous avez prise le 12 décembre dernier, donnant instruction d’opérer un tri parmi les personnes accueillies dans les centres d’hébergement d’urgence, au mépris du principe d’accueil inconditionnel qui est inscrit dans notre droit et fait l’honneur et la grandeur de notre pays.

Le Président de la République a dit qu’il ne voulait plus voir personne dormir dans les rues, dans les bois d’ici à la fin de l’année. Il vous reste donc onze jours, monsieur le ministre, pour donner une suite positive au vœu du Président de la République.

Chaque jour, depuis maintenant plusieurs semaines, un recul sans précédent du respect des droits fondamentaux en matière de politique migratoire est dénoncé par le Défenseur des droits, Jacques Toubon, le Secours catholique, la Fédération d’entraide protestante, la Fédération des acteurs de la solidarité, la CFDT, la Commission nationale consultative des droits de l’homme…

À Paris, des tentes de migrants sont lacérées ; à Calais, des centaines de couvertures sont détruites. Certains migrants, comme l’a rappelé M. Gontard, traversent les Alpes par des températures glaciales, au risque de leur vie. Les maires de grandes villes, de toute couleur politique, vous ont fait part de leur inquiétude.

Monsieur le ministre de l’intérieur, vous avez répondu à côté. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.– Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. Jacques Grosperrin. Accueillez-les donc chez vous !

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Aucun être humain, migrant ou non, ne peut être traité au mépris de nos règles de droit et de l’humanité.

Le candidat à l’élection présidentielle Emmanuel Macron mettait en avant l’honneur de la France d’accueillir des réfugiés, mais les actes d’aujourd’hui contredisent les paroles d’hier, envolées…

Monsieur le ministre, comptez-vous écouter toutes ces grandes voix qui vous alertent et vous demandent de rééquilibrer votre politique en mettant au cœur de celle-ci la dignité, le respect de la loi et celui des devoirs de la France ? (Vifs applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Madame la sénatrice, de quoi parlons-nous ?

Mme Esther Benbassa et M. Pierre Laurent. De gens qui meurent !

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Nous parlons du programme 177 « Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables », qui recouvre deux types de centres.

Les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, les CHRS, accueillent des personnes ou des familles connaissant de graves difficultés économiques, familiales, de logement, de santé ou d’insertion. L’objectif est de les aider à accéder à leur autonomie personnelle ou sociale ou de la recouvrer.

Les centres d’hébergement d’urgence, quant à eux, permettent la mise à l’abri de toute personne pour un temps très particulier.

M. Vincent Éblé. Nous le savons !

M. Martial Bourquin. Ce n’est pas la question !

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Le nombre de places dans les centres d’hébergement d’urgence est de 128 000, en augmentation de 95 % par rapport à 2010. Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, nous avons doublé le nombre de places ! (Vives protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

Mme Laurence Rossignol. C’est nous qui l’avons fait !

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Mais aujourd’hui, cela ne suffit pas. Cela montre que nous devons mener une politique d’immigration responsable. C’est ce que nous continuerons de faire ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.– Protestations sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

position de la france sur la protection des données personnelles numériques

M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. Jérôme Bignon. Ma question s’adresse à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Le projet de loi destiné à adapter la législation française au règlement général européen sur la protection des données personnelles – le RGPD – a été adopté mercredi dernier en conseil des ministres.

L’entrée en vigueur du règlement, qui réforme en profondeur notre cadre normatif de traitement des données, est fixée au 25 mai prochain. Le temps presse, par conséquent, et nous regrettons que les délais pour débattre d’un sujet aussi stratégique et complexe s’annoncent quelque peu serrés.

Le RGPD constitue pourtant une véritable révolution au service d’une meilleure protection des données personnelles : il crée un « droit à l’oubli » et à la portabilité des données pour les citoyens, il oblige les entreprises à recevoir le consentement « explicite » et « positif » des utilisateurs avant le traitement de leurs données, il contraint ces mêmes entreprises à prendre en compte des exigences relatives à la protection des données personnelles dès la conception des produits. Ce règlement permet de combler en partie le retard des régulateurs européens et nationaux sur les avancées technologiques.

Je souhaite saluer ici le rôle crucial joué par la présidente de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, Mme Falque-Pierrotin, dans les travaux européens qui ont conduit à l’adoption du RGPD.

Notre groupe se réjouit que cette régulation mette en valeur une conception très européenne, très protectrice de la vie privée, qui n’est pas celle des États-Unis.

Devant la puissance des entreprises américaines du numérique, en particulier des « GAFA » – Google, Apple, Facebook, Amazon –, devant une législation américaine particulièrement indulgente pour les services de renseignement des États-Unis dès que la sécurité nationale du pays est concernée – l’affaire Snowden l’a démontré –, comment la France compte-t-elle défendre au niveau européen et international le respect de ces nouvelles dispositions, notamment par les entreprises et le gouvernement américains, qui disposent d’un quasi-monopole sur l’hébergement des données numériques ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le sénateur, le projet de loi relatif à la protection des données personnelles, qui sera débattu à partir du mois de février prochain, vise en réalité à adapter la loi Informatique et libertés de 1978 à un nouveau cadre juridique européen composé d’un règlement et d’une directive, laquelle devra être transposée avant le 25 mai 2018.

Ce règlement et le texte français qui le transpose instaurent de nouveaux droits pour les citoyens, en particulier – c’est très important – un droit à l’effacement des données et un droit à la portabilité des données personnelles. Le cadre juridique sécurisé ainsi dessiné permettra de renforcer la confiance des citoyens dans l’utilisation qui est faite de leurs données personnelles.

Pour répondre précisément à la question que vous posez, monsieur le sénateur, il faut dire que le règlement constitue un cadre très protecteur pour l’ensemble des Européens en matière de données personnelles. Il est applicable à l’ensemble des entreprises et de leurs sous-traitants, quel que soit leur lieu d’implantation, dès lors qu’ils offrent des biens et des services à des personnes résidant sur le territoire de l’Union européenne.

C’est évidemment une avancée tout à fait considérable qui permet à la France de garder un rôle moteur dans ce domaine. Dans ce cadre uniformisé, les pouvoirs de la CNIL sont considérablement renforcés, puisqu’elle disposera d’un pouvoir de sanction, pouvant aller jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial consolidé.

En cas de contentieux, les juridictions nationales et/ou européennes pourront également être saisies et intervenir par rapport aux entreprises américaines. De plus, la France a souhaité être associée au « bouclier vie privée », adopté par la Commission européenne en 2016, qui permet les transferts de données des entreprises européennes vers les États-Unis. La France a rappelé la nécessité, pour l’administration américaine, de garantir un niveau de protection équivalent au standard européen. Ainsi, c’est une nouvelle forme de souveraineté que notre pays a promu au sein de l’Union européenne en matière de données personnelles. (MM. Alain Richard et Jean-Pierre Sueur applaudissent.)

bailleurs sociaux

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Philippe Dallier. Ma question s’adresse à M. le ministre de la cohésion des territoires et concerne la politique du Gouvernement en matière de logement.

Deux sujets ont été au cœur de nos débats sur le logement au cours de l’examen du projet de loi de finances : la baisse de 1,5 milliard d’euros des aides personnalisées au logement, doublée d’une diminution des loyers de 1,7 milliard à 1,9 milliard d’euros, qui sera en fait supportée par les bailleurs sociaux, et la suppression de l’APL accession, dispositif qui permet pourtant aux ménages les plus modestes d’accéder à la propriété.

Nous avions cru, monsieur le ministre, que le Gouvernement entendait rechercher, ici au Sénat mais aussi avec les bailleurs sociaux, un compromis garantissant à ceux-ci de conserver les moyens de construire et d’entretenir leur patrimoine. Nous avions également cru vous avoir entendu rassurer le Sénat sur le maintien de l’APL accession.

Or, vendredi soir, à l’Assemblée nationale, par le biais de l’adoption d’un amendement du Gouvernement, vous êtes revenu en nouvelle lecture à votre projet initial, à savoir une baisse des loyers étalée sur trois ans, et vous avez supprimé l’APL accession en zone tendue. Autant dire qu’elle a quasiment disparu, puisque seulement 5 % des ménages précédemment éligibles pourront désormais y prétendre.

Ma question est simple, monsieur le ministre : à la veille de l’ouverture au Sénat des travaux de la conférence de consensus sur le logement, voulue par le président Larcher et par le Premier ministre, quelle est, pour le Gouvernement, la définition des termes « consensus » et « compromis » ? (Rires et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de la cohésion des territoires.

M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Je remarque, monsieur Dallier, que vous avez gardé trente-neuf secondes pour la réplique ! (Sourires.) Je me souviens du temps où j’ai fait voter le droit de réplique dans cette assemblée ; je ne suis pas sûr que ce soit ce que j’ai fait de mieux, mais la démocratie y gagne ! (Rires sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Alain Bertrand applaudit.)

Nous avons beaucoup travaillé, au Sénat et à l’Assemblée nationale, dans le cadre d’un dialogue direct avec les bailleurs sociaux mené sous l’autorité du Premier ministre.

Ce qu’a fait le Sénat a été utile, cher Philippe Dallier. Vous avez omis de rappeler l’adoption d’un amendement que vous avez soutenu et qui a permis de dégager 700 millions d’euros de financement grâce au relèvement du taux de TVA de 5,5 % à 10 % : c’est l’œuvre du Sénat, et cela change considérablement les choses !

À ce titre, je tiens à rendre hommage à celles et à ceux qui ont participé à ce travail, notamment Sophie Primas, vous-même, Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann ou Cécile Cukierman. Ce travail a été et restera utile. En effet, si nous avons abouti, sous l’autorité du Premier ministre, à la signature d’un protocole d’accord avec les entreprises sociales pour l’habitat – cela représente tout de même 60 % de la construction dans le domaine du logement social –, c’est dans une large mesure grâce au travail réalisé ici.

Pour ce qui concerne la conférence de consensus, qui a été proposée par le président du Sénat et acceptée par le Premier ministre, nous avons la volonté d’avancer ensemble. Rechercher un consensus, cela signifie non pas trouver des solutions à tout, mais travailler ensemble, s’écouter et faire avancer la question du logement. Nous le savons tous, parce que vous l’avez souligné souvent dans vos excellents rapports, un certain nombre de problèmes importants doivent être réglés dans ce domaine, la situation actuelle n’étant pas satisfaisante.

Dans l’attente de votre réplique, monsieur Dallier, voilà ce que je voulais vous dire amicalement ! (Sourires et applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour la réplique.

M. Philippe Dallier. Monsieur le ministre, à mes yeux, le Gouvernement a commis une erreur à l’égard du monde HLM, d’abord en le divisant, ce qui n’est pas une bonne chose, ensuite en refusant de se donner du temps pour évaluer les conséquences de votre politique.

Je pense également que vous avez commis une faute à l’égard du Parlement, et particulièrement du Sénat. J’ai en effet le sentiment, monsieur le ministre, que, malgré ce que vous avez dit, nous avons perdu notre temps. En effet, il n’y avait en vérité pas grand-chose à négocier. La nouvelle lecture à l’Assemblée nationale nous l’a malheureusement démontré. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur certaines travées du groupe Union Centriste.)

situation de jérusalem

M. le président. La parole est à M. Richard Yung, pour le groupe La République En Marche. (M. André Gattolin applaudit.)

M. Richard Yung. Ma question porte sur la reconnaissance, par les États-Unis, de Jérusalem comme capitale de l’État d’Israël.

Le 6 décembre dernier, le président Trump a annoncé sa décision de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et d’y transférer l’ambassade américaine, qui se trouve actuellement à Tel-Aviv et compte plus de 1 000 agents. Pour ce faire, il s’est fondé sur une loi de 1995, dont l’application avait jusqu’alors été suspendue de six mois en six mois par tous les différents présidents américains.

Par cette décision unilatérale, le président américain déstabilise une nouvelle fois le Proche-Orient, en rompant un statu quo fragile et en instituant un rapport de force inégal en défaveur des Palestiniens. Il montre aussi le peu de cas qu’il fait de ses alliés – si l’on peut dire ! – de l’OTAN. Les États-Unis perdent en même temps leur statut de médiateur au Proche-Orient.

Le Président de la République, Emmanuel Macron, a exprimé la désapprobation de la France, en qualifiant cette initiative de contraire au droit international et dangereuse pour la paix au Proche-Orient.

Le Conseil de sécurité des Nations unies, réuni hier, a condamné la décision de Donald Trump par quatorze voix, dont celle de la France, et les États-Unis, isolés, ont dû user de leur droit de veto.

La France est l’amie des Palestiniens comme des Israéliens. C’est pourquoi elle ne peut accepter ce coup de force. Comme l’a dit le Président de la République, elle cherchera à rétablir le consensus sur la ville de Jérusalem, la paix et la reconnaissance des deux États.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer quelles voies la France envisage d’emprunter pour atteindre ces objectifs ? (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Richard Yung, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser Jean-Yves Le Drian, qui se trouve précisément avec le Président de la République et le roi Abdallah de Jordanie. Le sujet que vous évoquez est naturellement au cœur de leurs entretiens.

La marque de fabrique de la diplomatie française, c’est qu’elle maintient le dialogue avec l’ensemble des acteurs de la région. Elle continue naturellement à parler à l’Autorité palestinienne, ainsi qu’à l’État d’Israël, puisque le Premier ministre Netanyahou était, voilà quelques jours, en France.

La France est constante dans son souhait de voir advenir véritablement deux États pouvant coexister en paix dans des conditions de sécurité effective. Sa doctrine, très largement partagée au niveau international, se fonde aussi sur l’idée que Jérusalem doit être la capitale des deux États.

La décision du président américain a été qualifiée de regrettable par le Président de la République depuis Alger puis Doha. Le Conseil européen a réaffirmé son attachement à la mise en place de deux États, avec Jérusalem pour capitale commune. Soyons clairs : sans accord sur Jérusalem, il n’y aura pas d’accord de paix.

Dans ces conditions, la France reste active et engagée. Jean-Yves Le Drian était hier aux États-Unis et le Président de la République consulte aujourd’hui. Nous avons bon espoir que la raison finisse par triompher. Il y va de l’avenir de populations qui vivent depuis des décennies dans la peur, voire dans la terreur, ce à quoi on ne peut se résigner. L’année 2018 verra la France poursuivre avec ardeur ses efforts. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Chauvin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Marie-Christine Chauvin. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie et des finances.

Le Premier ministre a annoncé le 15 décembre dernier à Cahors son souhait de redynamiser les centres-villes, notamment leur offre commerciale, de plus en plus moribonde.

C’était une excellente nouvelle. Cependant, le même jour, à l’Assemblée nationale, le Gouvernement faisait adopter un amendement au projet de loi de finances visant à diminuer de façon drastique les crédits du FISAC, le Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce. C’est pourtant le seul instrument de soutien budgétaire de l’État au commerce de proximité.

Le Sénat avait, quelques jours plus tôt, adopté à l’unanimité un amendement tendant à abonder les crédits du FISAC de 20 millions d’euros, afin de soutenir les communes. Ce fonds a montré son efficacité, tout particulièrement dans les zones rurales, où il a contribué à la pérennisation de la dernière activité commerciale dans plus de huit communes sur dix. En tant qu’élue du Jura, je peux en témoigner.

Un récent rapport sénatorial de nos collègues Rémy Pointereau et Martial Bourquin l’a montré : la situation des centres-villes et des centres-bourgs, en particulier du point de vue commercial, est préoccupante et doit faire l’objet d’une action résolue de l’État.

Comment expliquez-vous le décalage entre le discours de Cahors et la réalité budgétaire ? Comment pouvez-vous à la fois vous faire l’avocat de la rénovation des centres-bourgs et repousser l’amendement sénatorial tendant à augmenter les crédits du FISAC, qui avait été adopté à l’unanimité ? N’y a-t-il pas là une contradiction entre effet d’annonce et réalité ? Tous les élus le savent, dans ce domaine, le montant des crédits alloués aux communes est essentiel. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances.

Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire dÉtat auprès du ministre de léconomie et des finances. Madame la sénatrice Marie-Christine Chauvin, le Gouvernement est mobilisé pour protéger et développer un tissu vivace d’entreprises de proximité. (Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.) Le FISAC est un instrument financier important pour le soutien au commerce, à l’artisanat et aux services de proximité en France.

Depuis la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises et son décret d’application du 15 mai 2015, une nouvelle modalité de sélection des dossiers sous forme d’appel à projets a été mise en place, mettant fin à la procédure de guichet. Elle fixe des priorités thématiques et géographiques, ainsi que des critères permettant d’évaluer les projets présentés, afin de procéder à la sélection des meilleurs d’entre eux, compte tenu des moyens disponibles.

La réforme du FISAC a également permis de clarifier le rôle de chaque échelon d’instruction des dossiers, dans un souci de complémentarité des moyens mobilisés. À ce jour, trois appels à projets ont été publiés. Le troisième, financé par les dotations 2018, a été diffusé en mars 2017. Ses priorités thématiques portent notamment sur la modernisation, la diversification, l’accessibilité physique et numérique des entreprises de proximité et, en milieu rural, des commerces multiservices, des derniers commerces du secteur d’activité concerné, ainsi que des stations-service. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)

Parmi les priorités géographiques figurent les centres-villes dévitalisés connaissant un fort taux de vacance. Le plan gouvernemental « Action cœur de ville » en faveur des villes moyennes, présenté vendredi dernier, prévoit de renforcer les interventions du FISAC au bénéfice de ces collectivités. Le niveau retenu pour l’année 2018 est très proche de celui de 2017. Il a été calibré de façon à permettre de soutenir environ 200 projets, ce qui est significatif.

Cette enveloppe est jugée pertinente par le Gouvernement pour orienter l’action locale dans le cadre actuel. Au total, cette réforme consolide les bénéfices du FISAC pour le commerce de proximité et corrige des déficiences que la Cour des comptes relevait dans son rapport définitif très sévère de 2014. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Brouhaha sur les travées du groupe Les Républicains.)

réorganisation des finances publiques

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Olivier Paccaud. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

Depuis une heure, la trésorerie de Bresles, dans l’Oise, a fermé définitivement ses portes. Dans quelques jours, ce sera le tour de la trésorerie de Saint-Leu d’Esserent. D’ici au 31 décembre, bien d’autres agences du Trésor public auront baissé définitivement le rideau.

C’est ce que vous appelez la réorganisation du réseau des finances publiques. L’État poursuit donc son désengagement, son abandon des territoires ruraux et périphériques.

Lorsque la fermeture de la trésorerie de Bresles a été annoncée, les élus locaux se sont mobilisés. Ils ont alors reçu un joli courrier de la directrice départementale, dont je vais vous lire un court extrait :

« Cette mesure consiste à former sur place les fonctionnaires territoriaux à l’utilisation de l’intégralité des potentialités du site impots.gouv.fr.

« Par capillarité, les fonctionnaires municipaux pourraient alors guider les usagers dans la plupart de leurs demandes, aux horaires décidés par chacune des mairies. »

Aucune compensation financière n’est évoquée ! Il s’agit donc, sournoisement, d’un transfert de compétences et d’un transfert de charges qui ne disent pas leur nom. Encore une fois, l’État fait des économies sur le dos des collectivités et de la qualité du service public !

Monsieur le secrétaire d’État, est-il cohérent d’annoncer des milliards pour revitaliser des centres-bourgs et, en même temps, de fermer des services publics dans des bourgs déjà en difficulté ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Monsieur le sénateur Olivier Paccaud, vous évoquez en réalité la réorganisation du réseau de la DGFiP, la Direction générale des finances publiques, sur le territoire.

Cette réorganisation s’impose du fait des changements de pratiques et d’usages. Je pense notamment à la numérisation, même si nous avons pleinement conscience que tous nos concitoyens n’ont pas forcément facilement accès à celle-ci.

Elle s’impose en raison de la réorganisation territoriale, avec la mise en place de nouveaux périmètres pour les intercommunalités ou la création des groupements hospitaliers de territoire, qui impliquent de travailler à une nouvelle échelle.

Elle s’impose aussi parce que nous sommes dans une recherche permanente d’efficacité et de rationalisation de l’action publique.

Monsieur le sénateur, vous ne devriez pas faire comme si les mouvements de fermeture et de réorganisation de trésoreries et de points de contact de la DGFiP étaient une nouveauté. De 2008 à 2016, 400 trésoreries ont été fermées sur le territoire, avec toujours l’ambition de garantir l’accès au service.

Votre question me donne l’occasion de prendre quatre engagements.

Le premier engagement, c’est la concertation. Si, dans les exemples que vous avez cités, elle a été défaillante, je suis tout à fait disposé à en discuter avec vous.

Le deuxième engagement, c’est l’accès au service, notamment par l’organisation de permanences dans les maisons de services au public, dont le nombre a beaucoup progressé, et au cours des périodes de l’année qui le nécessitent.

Le troisième engagement, c’est le maintien du conseil aux élus. En effet, pour accompagner ceux-ci face aux mutations et aux difficultés que peuvent parfois rencontrer les collectivités, il est souvent plus efficace de regrouper les équipes. Des équipes polyvalentes sont préférables à des agents de la DGFiP seuls dans des trésoreries isolées.

Le quatrième engagement, c’est l’innovation. Le Gouvernement a lancé le programme Action publique 2022, auquel j’invite toutes les sénatrices et tous les sénateurs à participer. Nous sommes prêts à expérimenter le compte financier unique, les services facturiers, tout ce qui permettra, en partenariat avec les collectivités locales, de maintenir un service de qualité sur tous les territoires de la République. (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour la réplique.

M. Olivier Paccaud. Monsieur le secrétaire d’État, les fermetures que vous évoquez ont toujours lieu dans les mêmes endroits, à savoir les territoires ruraux et périphériques. Les Français des champs ne valent pas moins que les Français des villes ! Ce ne sont pas des citoyens de seconde zone ! Eux aussi sont des contribuables ; vous semblez l’ignorer, je le regrette profondément. (Bravo ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Alain Bertrand et Mme Mireille Jouve applaudissent également.)

situation en autriche

M. le président. La parole est à M. Didier Marie, pour le groupe socialiste et républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)

M. Didier Marie. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

L’Europe vit des jours sombres ; l’extrême droite est de nouveau au pouvoir dans l’un de ses États membres, l’Autriche.

Vendredi dernier, M. Kurz, nouveau chancelier conservateur, a présenté le pacte le liant au FPÖ, le Parti libéral autrichien. Il a ainsi confié à des responsables de premier plan de ce parti aux racines néonazies six ministères sur treize, dont ceux des affaires étrangères, de l’intérieur et de la défense.

Voilà dix-sept ans, une telle alliance entre la droite et l’extrême droite avait suscité une vague d’indignation. L’Europe avait alors pris des sanctions diplomatiques, on parlait de cordon sanitaire.

Les conditions d’une telle riposte n’existent plus, la nécessaire unanimité des États membres la rendant impossible. Ce n’est d’ailleurs vraisemblablement pas la bonne réponse à l’expression démocratique d’un peuple.

Pour autant, nous ne comprenons pas le silence assourdissant de l’Union européenne et de la France. Si la Pologne, la Hongrie, la République tchèque peuvent se réjouir de voir le groupe de Višegrad s’élargir à un nouvel allié nationaliste et populiste, la France et l’Allemagne doivent apporter une réponse politique forte pour défendre leur conception de l’Europe.

Nous ne pouvons pas accepter que le processus de fracturation de l’Union européenne se poursuive. Nous ne pouvons tolérer que les valeurs fondamentales qui ont présidé à sa création, l’attachement à l’égalité, la liberté et la justice, qui fondent la démocratie, soient remis en cause.

Nous ne pouvons concevoir que, en juillet prochain, lorsque l’Autriche assurera la présidence de l’Union pour six mois, un responsable d’extrême droite ouvertement xénophobe pilote le Conseil déterminant la politique migratoire et d’asile.

Nous ne pouvons imaginer que la mise en œuvre du socle social adopté à Göteborg soit conduite par un gouvernement qui veut réserver les emplois aux seuls nationaux.

Les principes fondateurs de l’Union doivent être rappelés sans concession : tous les États membres doivent garantir l’État de droit, la démocratie, les droits de l’homme, le respect des minorités et leur protection.

Or tous les éléments d’un virage autoritaire et xénophobe de l’Autriche sont réunis. La formation de ce nouveau gouvernement autrichien est un très mauvais signal au regard de l’ambition européenne du Président de la République.

Quelles initiatives le Gouvernement compte-t-il prendre pour défendre l’idéal européen et lutter contre la banalisation de l’extrême droite ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et sur des travées du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire dÉtat auprès du ministre de lEurope et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Didier Marie, Sebastian Kurz, dirigeant du parti conservateur autrichien, arrivé en tête lors des élections législatives, a constitué ces derniers jours un gouvernement de coalition avec le FPÖ, qui a été investi lundi dernier.

Cette percée des populismes est préoccupante. Le chancelier Kurz a néanmoins affirmé à de nombreuses reprises son attachement aux valeurs démocratiques et au projet européen, ce que son projet reflète à ce stade. Je note d’ailleurs que le ministère des affaires européennes a été détaché de celui des affaires étrangères, afin d’être directement rattaché au chancelier. C’était un enjeu important, dans la perspective de la présidence autrichienne de l’Union européenne au second semestre de 2018.

C’est dans un esprit de vigilance constante sur les valeurs partagées par l’Union européenne que se place la France. Nous espérons que l’Autriche ne délaissera pas le rôle moteur et constructif qui lui appartient. Elle doit respecter les valeurs qui sont celles de l’Europe. Si tel n’était pas le cas, il ne faudrait faire preuve d’aucune complaisance. Il n’y a pas deux poids deux mesures. Nous serons très attentifs aux actes.

La situation met d’ailleurs en perspective les élections européennes qui se dérouleront dans quelques mois, en 2019. À ce moment, il conviendra de porter la parole d’une Europe forte, qui protège ses citoyens et ses entreprises, pour ne pas laisser prise aux populismes qui montent.

Permettez-moi, monsieur le président, d’adresser un salut amical à Dominique Vérien, nouvelle sénatrice de l’Yonne, avec qui j’ai ce département en partage, ainsi que bien des valeurs ! (Applaudissements sur des travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste.)

M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Je rappelle que les prochaines questions d’actualité au Gouvernement auront lieu mardi 16 janvier 2018 et seront retransmises sur France 3, Public Sénat, sur le site internet du Sénat et sur Facebook.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures cinquante.)

M. le président. La séance est reprise.

5

 
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Article 1er et rapport annexé (Pour coordination) (Texte non modifié par la commission)

Programmation des finances publiques de 2018 à 2022

Suite de la discussion et adoption en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. Nous reprenons la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Je rappelle que la discussion générale commune a été close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

TITRE Ier

ORIENTATIONS PLURIANNUELLES DES FINANCES PUBLIQUES

Discussion générale
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Article 2

Article 1er et rapport annexé

(Pour coordination)

(Non modifié)

Est approuvé le rapport annexé à la présente loi, prévu à l’article 5 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques 2018-2022

TABLE DES MATIÈRES

I. Le contexte macroéconomique s’améliore, mais les finances publiques restent structurellement dégradées

A. Les perspectives à court terme (2017-2018)

B. Les perspectives à moyen terme (2019-2022)

II. Dès 2018 et tout au long du quinquennat, le Gouvernement engage une transformation profonde des structures de l’action publique qui permettra le respect de nos engagements de finances publiques

A. Conformément à nos engagements européens, la politique du Gouvernement vise un retour vers l’équilibre structurel et une réduction du ratio de dette publique

B. Le taux de prélèvements obligatoires sera abaissé de 1 point sur le quinquennat pour favoriser la croissance et l’emploi

C. Une baisse de plus de 3 points de la dépense publique à horizon 2022

D. À l’horizon du quinquennat, l’effort structurel portera sur la dépense et permettra la diminution du ratio de dette publique

E. Une transformation de l’action et de la gestion publique

III. L’effort sera équitablement réparti entre les sous-secteurs des administrations publiques

A. La trajectoire de l’État

B. La trajectoire des organismes divers d’administration centrale

C. La trajectoire des administrations de sécurité sociale

D. La trajectoire des administrations publiques locales

E. Si la législation et les politiques de finances publiques n’étaient pas réformées, le déficit public se résorberait plus lentement et la dette ne décroîtrait pas sur le quinquennat

Annexes :

Annexe 1 : Principales définitions.

Annexe 2 : Mode de calcul du solde structurel.

Annexe 3 : Périmètre des mesures ponctuelles et temporaires à exclure de la mesure du solde structurel.

Annexe 4 : Précisions méthodologiques concernant le budget quinquennal.

Annexe 5 : Précisions méthodologiques concernant la mesure de la croissance des dépenses au sein de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam).

Annexe 6 : Table de passage entre les dispositions de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques et le présent rapport annexé.

I - LE CONTEXTE MACROÉCONOMIQUE S’AMÉLIORE, MAIS LES FINANCES PUBLIQUES RESTENT STRUCTURELLEMENT DÉGRADÉES

A. Les perspectives à court terme (2017-2018)

L’économie française est sur une trajectoire de reprise plus vigoureuse depuis fin 2016 : la croissance s’établirait à +1,7 % en 2017 et en 2018 (1). Alors que la crise de la dette en zone euro avait fortement pesé sur l’activité économique en 2012 et 2013, celle-ci a retrouvé un rythme de croissance plus solide, proche de 1 % entre 2014 et 2016, mais toujours modéré au regard de la croissance potentielle de l’économie française, estimée à environ 1,25 %. À partir de l’automne 2016, l’activité a accéléré pour atteindre une progression trimestrielle autour de 0,5 % au dernier trimestre 2016 et au premier semestre 2017, dans un contexte où les entreprises et les ménages sont nettement plus optimistes sur la situation et les perspectives économiques depuis le second trimestre 2017.

L’activité serait aussi soutenue par une plus forte croissance dans les pays avancés et émergents. La demande mondiale adressée à la France accélèrerait fortement en 2017 et progresserait encore nettement en 2018 mais sans accélérer, car l’accélération de l’activité aux États-Unis et de l’investissement privé en Allemagne serait compensée par le ralentissement économique attendu en Chine et au Royaume-Uni. Ce regain de dynamisme extérieur se traduirait par des exportations qui croîtraient en 2017-2018 de manière plus vigoureuse qu’en 2016.

La demande intérieure marquerait le pas en 2017 puis accélérerait en 2018 : en particulier, après un dynamisme marqué en 2016, la consommation des ménages ralentirait en 2017, en partie en raison d’un 1e trimestre décevant, lié à de faibles dépenses en énergie. L’investissement des entreprises resterait allant à horizon de la prévision, soutenu par la demande tant extérieure qu’intérieure et les mesures fiscales de Gouvernement, tandis que l’investissement des ménages serait soutenu par un contexte économique (dynamisme du pouvoir d’achat et de l’emploi) et financier favorable en dépit de la remontée des taux d’intérêt.

Ce scénario de croissance est proche des dernières anticipations des autres prévisionnistes : l’OCDE anticipe une croissance de +1,7 % en 2017 puis +1,6 % en 2018 dans le rapport EDR France publié le 14 septembre. Le consensus des économistes de marché s’établit en septembre à +1,6 % en 2017 comme en 2018. L’Insee attendait +1,6 % pour 2017 dans sa note de conjoncture de juin, le FMI prévoyait +1,5 % en 2017 et +1,7 % en 2018 dans ses prévisions de juillet, et la Banque de France tablait sur +1,6 % les deux années en juillet. Pour sa part, la Commission européenne n’a pas encore revu sa prévision publiée au printemps dernier : +1,4 % en 2017 puis +1,7 % en 2018.

Cette prévision est soumise à de nombreux aléas. L’environnement international est incertain, en particulier en ce qui concerne les négociations sur la sortie du Royaume-Uni de l’UE et l’orientation de la politique budgétaire américaine. Les évolutions du pétrole et du change sont également sources d’incertitudes. L’investissement des entreprises pourrait être moins dynamique qu’attendu, si celles-ci souhaitaient réduire leur endettement. À l’inverse, il pourrait être plus dynamique si la reprise économique était plus marquée. Le dynamisme de l’emploi et le regain de confiance des ménages pourraient soutenir la consommation plus qu’escompté. Toutefois, l’investissement des ménages pourrait être moins élevé si le ralentissement des mises en chantier observé depuis quelques mois s’accentuait.

B. Les perspectives à moyen terme (2019-2022)

À moyen-terme, les projections de finances publiques reposent sur une hypothèse de stabilisation de la croissance à +1,7 % de 2019 à 2021, puis à +1,8 % en 2022.

Cette projection s’appuie sur des hypothèses prudentes de croissance potentielle et d’écarts de production.

La croissance potentielle s’établirait à 1,25 % sur 2017-2020, 1,3 % en 2021 et 1,35 % en 2022. Cette estimation est proche de celle de la Commission (voir encadré) et repose sur une tendance de la productivité plus faible qu’avant-crise, en raison notamment du ralentissement des effets du progrès technique au niveau mondial.

La croissance potentielle augmenterait à l’horizon 2022 grâce aux effets positifs des réformes structurelles qui seront mises en œuvre lors du quinquennat, notamment pour favoriser la formation et l’apprentissage, réformer l’indemnisation du chômage, baisser le coin socio-fiscal (bascule des cotisations salariales sur la CSG), moderniser le code du travail, et soutenir l’investissement productif (abaissement de l’impôt sur les sociétés (IS) à 25 %, mise en place du prélèvement forfaitaire unique, réforme de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) qui ne pèsera plus sur les valeurs mobilières) et l’innovation (pérennisation du crédit d’impôt-recherche).

Le scénario de moyen-terme est celui d’un redressement progressif de l’écart de production, de -1,5 % en 2016 à +1,1 % en 2022. Après huit années d’écart de production négatif (entre 2012 et 2019), il serait positif à partir de 2020 mais resterait inférieur aux niveaux observés avant la crise de 2008-2009 ou au début des années 2000.

Le scénario macroéconomique retenu pour la programmation pluriannuelle fait en outre l’hypothèse d’un retour progressif des prix vers des niveaux cohérents avec la cible de la Banque centrale européenne.

Tableau : principales hypothèses du scénario macroéconomique 2018-2022 (*)

 

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

PIB (**)

1,1

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

1,8

Déflateur de PIB

0,4

0,8

1,1

1,25

1,5

1,75

1,75

Indice des prix à la consommation hors tabac

0,2

1,0

1,0

1,1

1,4

1,75

1,75

Masse salariale privée

2,4

3,3

3,1

3,2

3,6

3,8

3,8

Croissance potentielle

1,2

1,25

1,25

1,25

1,25

1,30

1,35

PIB potentiel (en Md€ 2010)

2154

2181

2209

2236

2264

2294

2325

Écart de production (en % du PIB)

-1,5

-1,1

-0,7

-0,2

0,2

0,6

1,1

Note : (*) Données exprimées en taux dévolution annuelle, sauf précision contraire.(**) Données corrigées des jours ouvrables.

 

Encadré : Explication des écarts entre la croissance potentielle de la LPFP et celle de la Commission européenne

Le scénario de croissance potentielle retenu – 1,25 % sur 2018-2020 – est proche de celui de la Commission, qui est de 1,2 % en moyenne sur la même période dans ses prévisions de printemps 2017. L’écart de production retenu en 2016 (-1,5 %) est également proche de l’estimation de la Commission Européenne (-1,3 %).

Les hypothèses de population active sont différentes car la Commission utilise l’exercice européen de projection de population à moyen terme (« Europop »), tandis que les estimations du Gouvernement s’appuient sur les projections les plus récentes de l’Insee pour la France, publiées le 9 mai 2017, moins dynamiques en fin de période. En revanche, le chômage structurel retenu est celui de la Commission européenne (estimé comme un NAWRU, c’est-à-dire un taux de chômage ne faisant pas accélérer les coûts salariaux unitaires réels).

Les prévisions d’investissement sous-jacentes à l’accumulation du capital sont proches entre le scénario du Gouvernement et celui de la Commission ; le scénario de capital retenu repose sur un taux d’investissement par rapport au capital existant égal à sa moyenne 2010-2016.

En revanche, la Commission retient une progression de la productivité tendancielle moins allante que le Gouvernement. Cela s’explique notamment par le traitement de la crise : malgré la prise en compte de la partie cyclique du ralentissement de la productivité liée à la sous-utilisation des capacités de production, la Commission ne retient pas de choc en niveau. Cependant, la Commission retient un effet durable sur la progression de la productivité tendancielle et donc sur la croissance potentielle.

Le Gouvernement a opéré un choix différent et retenu un choc en niveau sur la productivité pendant la crise et un ralentissement de tendance post-crise. En raison de l’introduction de ce choc en niveau sur la période 2008-2010, le ralentissement de la productivité est moins marqué dans les estimations du Gouvernement que dans celles de la Commission (0,6/0,7 % par an sur la période 2018-2022 contre 0,4/0,5 % pour la Commission). La croissance de la productivité globale des facteurs (PGF) tendancielle retenue est proche et légèrement supérieure à celle observée sur la période 2011-2016. Les réformes structurelles mises en œuvre en fin de quinquennat précédent, en particulier les réformes pro-concurrentielles et de simplification, ainsi que les réformes sur le marché du travail et le dialogue social sont favorables à la productivité. Mais, du fait d’un phasage tardif au cours du précédent quinquennat, en seconde moitié voire en toute fin, leurs pleins effets ne se sont pas encore totalement matérialisés. Par ailleurs le rattrapage en cours sur l’intégration des technologies numériques par les entreprises, ainsi que la remontée des dépenses privées de R&D avec la montée en puissance du CIR sont également des facteurs de soutien.

Le choix de ne pas retenir le scénario de la Commission européenne s’explique donc d’une part par la volonté de prendre en compte les dernières projections de population active de l’Insee et d’autre part par le choix de calcul de la tendance de la PGF.

II -   DÈS 2018 ET TOUT AU LONG DU QUINQUENNAT, LE GOUVERNEMENT ENGAGE UNE TRANSFORMATION PROFONDE DES STRUCTURES DE L’ACTION PUBLIQUE QUI PERMETTRA LE RESPECT DE NOS ENGAGEMENTS DE FINANCES PUBLIQUES

A. Conformément à nos engagements européens, la politique du Gouvernement vise un retour vers l’équilibre structurel et une réduction du ratio de dette publique

Le Gouvernement a pris des mesures fortes de maîtrise des dépenses publiques dès son arrivée, afin de respecter l’objectif de 2,9 % de déficit, de sorte à permettre la sortie de la procédure pour déficit public excessif ouverte à l’encontre de la France depuis 2009. Le Conseil européen du 5 mars 2015 a recommandé à la France de corriger son déficit excessif en 2017 au plus tard. La chronique de déficits publics prévue par la LPFP, présentant un retour durable du déficit public sous 3,0 % du PIB à partir de 2017, permet de préparer une sortie de la procédure en 2018. Celle-ci pourrait être proposée par la Commission et décidée par le Conseil, sur la base des données d’exécution de l’année 2017, qui seront notifiées par Eurostat en avril 2018, et des prévisions de printemps de la Commission pour les déficits publics des années 2018 et 2019.

Pour la suite de la trajectoire, et comme prévu dans le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG), l’objectif à moyen terme d’équilibre structurel des finances publiques (OMT) est fixé de manière spécifique par chaque État, avec une limite inférieure de -0,5 % de PIB potentiel. Conformément à l’article 1er de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, il revient à la loi de programmation des finances publiques de fixer l’OMT visé par le gouvernement. L’article 2 de la présente loi de programmation fixe l’OMT à -0,4 % du PIB potentiel. L’OMT est inchangé par rapport à la précédente LPFP.

Une nouvelle estimation menée à l’occasion du débat d’orientation des finances publiques 2017 a conduit à revoir le niveau de l’écart de production par rapport au cadrage macroéconomique retenu par le précédent Gouvernement. Ainsi, pour l’année 2016, le niveau du solde structurel a été dégradé, passant de -1,5 % à -2,5 %. Cela signifie que le déficit public est en réalité moins dû à la situation conjoncturelle, qu’à un niveau de dépenses structurellement élevé. Cette révision a pour effet, toutes choses égales par ailleurs, d’allonger la durée de consolidation budgétaire permettant d’atteindre l’OMT. La trajectoire de la présente loi de programmation permet une amélioration continue du solde structurel jusqu’en 2022, où il s’établira à -0,8 % de PIB potentiel, ce qui permettra d’atteindre l’OMT en 2023.

Une telle trajectoire tient compte de la nécessité de soutenir la reprise en cours, alors que la France est l’un des pays de la zone euro dont l’écart de production est le plus creusé, d’après les dernières estimations de la Commission européenne. En outre, cette trajectoire de consolidation progressive des finances publiques permettra de soutenir le déploiement des réformes structurelles engagées par le Gouvernement, qui généreront des effets positifs à moyen terme sur la soutenabilité des finances publiques et le potentiel d’activité. Le rythme de réduction du déficit public prévu sur la durée du quinquennat s’inscrit donc dans la stratégie globale de politique économique du Gouvernement et permettra de combler la plus large partie de l’écart entre le déficit structurel actuel et l’objectif de moyen terme au cours du quinquennat.

Dans le même temps, les efforts consentis permettront de réduire la dette publique de manière significative dans les cinq années à venir. Ainsi, le ratio de dette sur PIB, qui atteint 96,3 % en 2016 s’établira à 91,4 % en 2022 et sera inscrit à cet horizon sur une pente décroissante.

La conformité de cette trajectoire aux règles budgétaires européennes sera évaluée chaque année sur la base des données notifiées, dans le cadre d’une analyse d’ensemble de la Commission, qui tient compte de la situation économique de chaque pays. Pour l’année 2018, cette dernière a précisé que l’évaluation du respect de l’ajustement recommandé sera faite à la lumière de la position des États membres dans le cycle économique, afin de tenir compte notamment de la nécessité relative de soutenir la reprise économique en cours. L’ajustement structurel 2018 serait de 0,1 pt de PIB, dans un contexte d’écart de production encore creusé et de mise en œuvre de réformes structurelles majeures (marché du travail, fiscalité, investissement, logement, climat, …). L’ensemble de ces facteurs sont pris en compte dans les règles budgétaires européennes pour évaluer le caractère approprié de l’ajustement structurel par rapport à la réalité économique et aux réformes de chaque pays. L’ajustement prévu par la France pour 2018 permettrait de ne pas dévier significativement de la recommandation qui lui a été adressée par le Conseil. À partir de 2019, l’ajustement structurel sera en moyenne de 0,35 point de PIB potentiel par an, conformément à nos engagements européens (2).

B. Le taux de prélèvements obligatoires sera abaissé de 1 point sur le quinquennat pour favoriser la croissance et l’emploi

La pression fiscale qui pèse sur les entreprises et les ménages français, entravant la demande et l’initiative privées, sera relâchée. La baisse des prélèvements obligatoires se poursuivra avec une baisse d’un point de PIB d’ici 2022, dont plus de 10 milliards d’euros de baisse d’ici à fin 2018, bénéficiant à la fois aux ménages et aux entreprises. Sur la période de programmation, le taux de prélèvements obligatoires sera ramené de 44,7 % en 2017 à 43,7 % en 2022. Cette baisse répond à trois choix stratégiques du Gouvernement. Le premier est de soutenir immédiatement la croissance et de favoriser l’emploi et le pouvoir d’achat en récompensant le travail, en engageant ces baisses dès le 1er janvier 2018, le deuxième d’améliorer la compétitivité et de libérer l’activité des entreprises, et le troisième de soutenir l’investissement privé dans les entreprises qui prennent des risques, qui innovent et qui créent les emplois de demain.

Cette baisse de la fiscalité portera en grande partie sur les ménages et bénéficiera en priorité aux actifs des classes moyennes et aux ménages modestes. Pour cela, les cotisations salariales maladie et chômage des salariés du secteur privé seront supprimées et financée par une hausse partielle de CSG dont l’assiette est plus large, permettant ainsi d’élargir les bases fiscales notamment s’agissant du financement de la protection sociale afin qu’il ne pèse pas uniquement sur le coût du travail. Outre le gain net de pouvoir d’achat que représentent ces baisses pour les actifs, elles stimuleront à la fois la demande et l’offre de travail en réduisant le coin fiscalo-social sur les salaires, en complément de la revalorisation de la prime d’activité. Par ailleurs, 80 % des ménages seront progressivement exonérés d’ici 2020 de la taxe d’habitation, avec un premier allègement de 3 milliards d’euros dès 2018, pour un gain de pouvoir d’achat et une plus grande équité fiscale (2).

Afin de renforcer la compétitivité des entreprises, l’activité et l’attractivité de notre économie, la fiscalité des entreprises sera allégée et simplifiée. Le taux facial de l’impôt sur les sociétés sera réduit, par étapes, à 25 % d’ici 2022. Cette baisse permettra de converger vers la moyenne européenne et de réduire le coût du capital, stimulant ainsi l’investissement à long terme. Par ailleurs, le CICE sera transformé en allègement pérenne de cotisations patronales dès 2019 – date privilégiée afin de garantir, dans un premier temps, un retour durable du déficit public sous 3 % du PIB – afin de simplifier le dispositif existant et de soutenir dans la durée l’emploi et la compétitivité des entreprises françaises. Cette transformation du CICE est également un gage de stabilité pour les entreprises, en particulier pour les plus petites d’entre elles. Cette baisse de cotisations sécurisera non seulement l’effort entrepris jusqu’ici pour aider les entreprises à restaurer leurs marges, mais elle soutiendra aussi la demande de travail peu qualifié du fait d’un ciblage plus important qu’aujourd’hui au niveau du salaire minimum.

Pour stimuler l’investissement productif, risqué et innovant, l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) sera transformé en Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI) dès 2018 et un taux de prélèvement unique de 30 % sur les revenus de l’épargne sera également instauré en 2018, incluant les prélèvements sociaux. Dans un contexte de transition technologique profonde, le besoin en capital est encore plus important qu’hier et alléger sa fiscalité est devenu indispensable. Ces différentes mesures s’inscrivent également dans une logique de convergence européenne, puisque les taxes sur le capital ont, en France, un poids particulièrement élevé par rapport à nos partenaires européens. Outre le fait que ces mesures participent à l’effort de réduction du coût du capital, elles réorienteront l’épargne nationale vers le financement des entreprises.

Afin d’accélérer la conversion écologique de notre économie, la hausse de la fiscalité du carbone sera amplifiée et la convergence de la fiscalité du diesel sur celle de l’essence sera pleinement effective à l’horizon du quinquennat. Ceci permettra aux acteurs économiques d’internaliser le coût social généré par l’usage des énergies fossiles, réduisant ainsi nos émissions de CO2. La France progressera ainsi en matière de poids des recettes reposant sur la fiscalité environnementale. Des mesures budgétaires comme la généralisation du chèque-énergie et la mise en place d’une prime à la conversion pour les véhicules anciens sont prévues pour accompagner les plus fragiles dans la transition écologique.

Tableau : principales mesures nouvelles en prélèvements obligatoires à fin 2018

 

2018

Dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages

-3,0

Création de l’Impôt sur la Fortune Immobilière (IFI)

-3,2

Mise en place d’un prélèvement forfaitaire unique

-1,3

Baisse du taux d’IS de 33 % à 25 %

-1,2

Suppression de la 4e tranche de la taxe sur les salaires

-0,1

Hausse de la fiscalité énergétique

3,7

Fiscalité du tabac

0,5

CICE - Montée en charge et hausse de taux de 6 à 7 % en 2018

-4,0

Crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires

-0,6

Élargissement du crédit d’impôt pour l’emploi de personnes à domicile

-1,0

Total

-10,3

Note : ce tableau nintègre pas la mesure nouvelle de gain de pouvoir dachat pour les actifs liée à la baisse des charges en basculement de la CSG dont la première étape aura lieu le 1er janvier et dont leffet plein interviendra à compter doctobre 2018

C. Une baisse de plus de 3 points de la dépense publique à horizon 2022

La trajectoire de la loi de programmation 2018-2022 prévoit une baisse du poids de la dépense publique hors crédits d’impôts dans le PIB de plus de 3 points à horizon 2022.

La dépense publique devrait ralentir lors des cinq prochaines années : sur la période 2018-2022, sa croissance en volume sera en moyenne de +0,4 %, contre +1,3 % sur les 10 dernières années. Cette croissance contenue sera rendue possible grâce aux importants efforts d’économies que l’ensemble des administrations publiques fourniront. Le rythme des dépenses s’infléchira au fur et à mesure de la mise en œuvre des économies structurelles identifiées par le processus “Action publique 2022” (cf. infra).

Ainsi, sur le périmètre de la norme pilotable, l’évolution de la dépense de l’État en 2018 s’élèvera à +1,0 % en volume, puis à -0,5 % en volume en 2019, soit +1,6 Md€ par rapport à 2018. Sur la période 2020-2022, alors que la charge de la dette augmentera de l’ordre de 0,1 point de PIB par an, le taux d’évolution en volume de la dépense sous norme pilotable sera de -1 % par an et reposera notamment sur les réformes documentées dans le cadre du processus « Action Publique 2022 ».

De même, les collectivités locales maîtriseront leurs dépenses de fonctionnement dans le cadre du nouveau pacte financier avec l’État : en comptabilité nationale, les dépenses finales de fonctionnement ne progresseront que de 1,2 % en valeur en moyenne sur le quinquennat, en cohérence avec l’objectif fixé dans la loi de programmation. Ceci correspond à un effort de 13 Md€ par rapport à une trajectoire spontanée de dépenses.

Enfin, les dépenses sociales seront maitrisées : en dépit d’une reprise de l’inflation, l’ONDAM sera maintenu à 2,3 % sur la période 2018-2020 (cf. infra).

D. À l’horizon du quinquennat, l’effort structurel portera sur la dépense et permettra la diminution du ratio de dette publique

Les tableaux suivants sont exprimés en comptabilité nationale et non en comptabilité budgétaire ou en comptabilité générale comme les objectifs d’économie ci-dessus. Ces différentes comptabilités peuvent ainsi présenter des écarts significatifs.

 

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public (en point de PIB)

-3,4

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Solde structurel (en points de PIB potentiel)

-2,5

-2,2

-2,1

-1,9

-1,6

-1,2

-0,8

Ajustement structurel

0,2

0,3

0,1

0,3

0,3

0,4

0,4

Tableau : dépenses et recettes (exprimés suivant les conventions de la comptabilité nationale)

 

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Ratio de dépenses publiques (*)

55,0

54,7

54,0

53,4

52,6

51,9

51,1

Ratio de prélèvements obligatoires

44,4

44,7

44,3

43,4

43,7

43,7

43,7

Ratio de recettes hors prélèvements obligatoires

7,5

7,3

7,2

7,2

7,2

7,1

7,1

Clé de crédits d’impôts

-0,2

-0,1

-0,1

-0,1

0,3

0,3

0,1

Note : (*) hors crédits dimpôts

Tableau : croissance de la dépense publique hors crédits dimpôt

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Taux de croissance en valeur

1,9

1,6

1,8

1,7

2,0

1,9

Taux de croissance en volume

0,9

0,6

0,7

0,3

0,2

0,1

Inflation hors tabac

1,0

1,0

1,1

1,4

1,75

1,75

Tableau : dépense publique par sous-secteur, hors transferts, hors crédits dimpôts

Croissance en volume

2017

2018

2019

2020

2021

2022

APU

0,9

0,6

0,7

0,3

0,2

0,1

APUC

1,0**

0,3**

0,8

1,2

0,7

0,2

APUL

1,7

0,2

0,9

-0,4

-1,6

-0,6

ASSO

0,6**

0,9**

0,4

0,1

0,6

0,4

Note : * Dépense en volume hors crédits d’impôts et hors transferts entre sous-secteurs des administrations publiques, exprimée à champ courant sauf mention contraire (**)

** Mesures retraitées :

En 2017, la budgétisation du financement des ESAT augmente la dépense des ASSO et diminue la dépense des APUC (+1,5 Md€).

En 2018, les prestations auparavant versées par le fonds social chômage, classé en APUC, sont transférées vers Pôle Emploi en ASSO (2,5 Md€).

1. Leffort structurel portera exclusivement sur la dépense publique

L’écart de production persistant en 2017 serait résorbé à l’horizon 2020, grâce à une croissance effective du PIB supérieure à la croissance potentielle. Sur le quinquennat, l’écart de production, encore très négatif en 2017 (-1,1 % de PIB potentiel) deviendra positif en 2020 et s’établira en 2022 à +1,1 % de PIB potentiel. Ainsi, la variation conjoncturelle du solde public contribuera de manière significative au redressement des finances publiques entre 2017 et 2022.

Cependant, la stratégie de redressement des finances publiques ira bien au-delà de l’effet mécanique de la résorption des effets de la crise passée : la France doit tirer profit de l’amélioration de la conjoncture économique pour engager un ajustement pérenne de ses finances publiques et en recomposer la structure par des choix stratégiques. Ainsi, le solde structurel, qui s’établit à -2,2 % de PIB potentiel en 2017, se redressera à -0,8 % en 2022. Cela permettra d’atteindre l’OMT, fixé à -0,4 % de PIB potentiel, en 2023. À partir de 2019, l’ajustement structurel sera en moyenne de 0,3 point de PIB potentiel par an. Au total, il sera de 1,4 point de PIB potentiel entre 2017 et 2022.

Cet ajustement sera entièrement porté par un effort structurel en dépense : ce dernier sera de 2,4 points de PIB potentiel sur la période, grâce à une progression des dépenses publiques en volume nettement inférieure à la croissance potentielle de l’économie française. À l’inverse, les mesures nouvelles en prélèvement obligatoires visant à la simplification, la recomposition et la réorientation de nos recettes fiscales, pèseront sur l’ajustement structurel pour près de 1 point de PIB potentiel sur la période. Cette stratégie permettra de libérer l’activité, le pouvoir d’achat, et de stimuler l’investissement productif, risqué et innovant. Enfin, plus spécifiquement, compte tenu du traitement en comptabilité nationale du CICE comme une dépense, la disparition de ce crédit d’impôt en 2019 pour être remplacé par une baisse pérenne des cotisations sociales jouera favorablement sur l’ajustement structurel entre 2017 et 2022 (+0,3 point de PIB potentiel) : la créance en comptabilité nationale sera quasiment éteinte dès 2020, alors qu’un coût budgétaire persistera tout au long des restitutions. Au total, l’effort structurel, c’est-à-dire l’effet des mesures discrétionnaires, permettra d’améliorer le solde structurel de 1,8 point de PIB potentiel sur la période considérée.

Enfin, les mesures exceptionnelles et temporaires prévisibles dans le cadre du présent rapport perturberont la chronique de solde public de manière transitoire. En particulier, la transformation du CICE en allègement pérenne de cotisations sociales patronales entraînera en 2019 une double dépense qui pèsera lourdement (20,6 Md€) sur le déficit nominal.

Tableau : mesures exceptionnelles et temporaires - Hypothèses retenues dans la programmation

 (écart au compte central, en Md€)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Mesures en recettes

-1,5

-4,9

-22,5

0,0

0,0

0,0

dont :

 

 

 

 

 

 

Contentieux OPCVM

-0,8

-0,8

-0,7

0,0

0,0

0,0

De Ruyter

-0,1

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

Stéria

-0,5

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

3 % dividendes

-4,5

-4,5

0,0

0,0

0,0

0,0

Surtaxe d’IS

4,7

0,6

0,0

0,0

0,0

0,0

CVAE

-0,3

-0,2

0,0

0,0

0,0

0,0

Double coût bascule CITE

 

 

-1,1

 

 

 

Double coût bascule CICE

 

 

-20,6

 

 

 

Mesures en dépense

0,7

0,7

0,2

0,0

0,0

0,0

dont :

 

 

 

 

 

 

Intérêts des contentieux

0,7

0,7

0,2

0,0

0,0

0,0

Tableau : variation du solde structurel des administrations publiques

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Variation du solde structurel (ajustement structurel)

0,2

0,1

0,3

0,3

0,4

0,4

Effort structurel

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,5

Mesures nouvelles en recettes (net des CI) et hors one-offs

-0,1

-0,3

-0,1

-0,5

0,0

0,1

Effort en dépense

0,1

0,4

0,4

0,5

0,5

0,6

Clé en crédits d’impôt

0,1

0,0

0,0

0,4

0,0

-0,2

Composante non discrétionnaire

0,2

-0,1

0,0

-0,1

-0,1

-0,1

Tableau : élasticité des prélèvements obligatoires

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Élasticité des prélèvements obligatoires (hors UE)

1,4

1,0

1,0

1,0

1,0

1,0

Tableau : décomposition structurelle par sous-secteur

 En % PIB 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

APU

Solde effectif

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Solde conjoncturel

-0,6

-0,4

-0,1

0,1

0,3

0,6

Solde structurel

-2,2

-2,1

-1,9

-1,6

-1,2

-0,8

Solde des one-offs

-0,1

-0,2

-0,9

0,0

0,0

0,0

APUC

Solde effectif

-3,2

-3,4

-3,9

-2,6

-2,3

-1,8

Solde conjoncturel

-0,3

-0,1

0,0

0,1

0,1

0,2

Solde structurel

-2,8

-3,0

-3,7

-2,6

-2,4

-2,0

Solde des one-offs

-0,1

-0,2

-0,1

0,0

0,0

0,0

APUL

Solde effectif

0,1

0,1

0,1

0,3

0,5

0,7

Solde conjoncturel

-0,1

0,0

0,0

0,0

0,0

0,1

Solde structurel

0,1

0,1

0,1

0,3

0,5

0,7

Solde des one-offs

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

ASSO

Solde effectif

0,2

0,5

0,8

0,8

0,8

0,8

Solde conjoncturel

-0,3

-0,2

-0,1

0,1

0,2

0,3

Solde structurel

0,5

0,7

1,7

0,8

0,6

0,5

Solde des one-offs

0,0

0,0

-0,9

0,0

0,0

0,0

Tableau : effort structurel par sous-secteur

 En % PIB 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

APU

Variation du solde structurel

0,3

0,1

0,3

0,3

0,4

0,4

dont effort structurel

0,0

0,2

0,3

0,4

0,5

0,5

Effort en recettes

-0,1

-0,3

-0,1

-0,5

0,0

0,1

Effort en dépense

0,0

0,4

0,4

0,5

0,5

0,6

Clé de crédits d’impôts

0,1

0,0

0,0

0,4

0,0

-0,2

APUC

Variation du solde structurel

0,2

-0,2

-0,8

1,1

0,2

0,4

dont effort structurel

0,0

-0,2

0,4

0,9

0,1

0,1

Effort en recettes

-0,1

-0,4

0,3

0,5

0,0

0,0

Effort en dépense

0,0

0,2

0,1

0,0

0,1

0,2

Clé de crédits d’impôts

0,1

0,0

0,0

0,4

0,0

-0,2

APUL

Variation du solde structurel

-0,1

0,0

0,0

0,1

0,3

0,2

dont effort structurel

-0,1

0,0

-0,1

0,1

0,3

0,2

Effort en recettes

0,0

-0,1

-0,1

-0,1

0,0

0,0

Effort en dépense

-0,1

0,1

0,1

0,2

0,3

0,2

Clé de crédits d’impôts

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

ASSO

Variation du solde structurel

0,2

0,2

1,0

-1,0

-0,1

-0,1

dont effort structurel

0,1

0,3

0,0

-0,6

0,1

0,2

Effort en recettes

0,0

0,2

-0,2

-0,9

0,0

0,0

Effort en dépense

0,1

0,1

0,2

0,3

0,1

0,2

Clé de crédits d’impôts

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

2. Le ratio de dette des administrations publiques sera réduit de 5 points pendant le quinquennat

La trajectoire de réduction des dépenses publiques de plus de 3 points de PIB et l’augmentation de la croissance, stimulée par les réformes prévues pendant le quinquennat, permettront à horizon 2022 de réduire le ratio de dette publique de 5 points. Cette baisse du ratio d’endettement permettra de renforcer la résilience et de dégager des marges de manœuvre budgétaires, en cas de nouvelle crise, améliorant ainsi la soutenabilité des finances publiques.

Le ratio d’endettement devrait ainsi diminuer à partir de 2020 après avoir atteint un pic en 2019. Cette augmentation en 2019 serait due au « double coût » exceptionnel lié à la transformation du CICE en baisse pérenne de cotisations. À partir de 2020, la baisse du déficit liée à la poursuite des efforts de consolidation et à la disparition de ce surcoût temporaire permettrait de commencer à faire décroître le ratio de dette. Des flux de créance viendraient cependant compenser en partie les effets de la baisse du déficit et de la croissance sur le ratio de dette. L’effet principal serait lié à l’extinction du CICE entre 2020 et 2022. En effet, à partir de 2019 aucun nouveau droit au CICE ne serait acquis mais il resterait un stock de créances fiscales acquises les années précédentes à restituer aux entreprises. Cet effet de trésorerie, neutre sur le solde public à partir de 2019, a néanmoins un impact sur le ratio de dette. Il s’estompe au fur et à mesure que le stock de restitution diminue. Malgré ces flux de créances pesant sur la dette, le ratio dette sur PIB diminuerait ainsi de plus de 5 points entre fin 2019 et 2022.

Tableau : la trajectoire de dette publique des administrations publiques, et détail par sous-secteur

 (En points de PIB)

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Ratio d’endettement au sens de Maastricht

96,3

96,7

96,9

97,1

96,1

94,2

91,4

Contribution des administrations publiques centrales (APUC)

77,3

78,3

79,4

81,1

81,7

81,6

80,8

Contribution des administrations publiques locales (APUL)

9,0

8,7

8,4

8,1

7,5

6,7

5,8

Contribution des administrations de sécurité sociale (ASSO)

10,1

9,7

9,0

8,0

6,9

5,9

4,8

Tableau : lécart au solde stabilisant, le flux de créances et la variation du ratio dendettement

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Variation du ratio d’endettement (1+2)

0,4

0,2

0,3

-1,1

-1,9

-2,8

Écart au solde stabilisant (1) = (a -b)

0,6

0,1

0,1

-1,6

-2,3

-3,0

Solde stabilisant la dette (a)

-2,3

-2,7

-2,8

-3,0

-3,2

-3,3

Pm. Croissance nominale

2,5

2,9

3,0

3,2

3,5

3,6

Solde public au sens de Maastricht (b)

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Flux de créances (2)

-0,2

0,1

0,1

0,5

0,4

0,2

Encadré – Coût de financement de lÉtat et hypothèses de taux dintérêt

En 2017 la France continue de bénéficier de conditions de financement très favorables, grâce au maintien de la confiance des investisseurs et aux effets de la politique monétaire accommodante menée par la Banque centrale européenne (BCE). À mi-septembre 2017 le taux moyen à l’émission des titres à court terme (BTF) s’établit à -0,60 % après -0,53 % en 2016, celui des titres à moyen-long terme à 0,71 % après 0,37 % en 2016. Du fait de l’affermissement de la croissance en Europe et du retour graduel de l’inflation enclenché depuis mi 2016, la perspective d’un resserrement progressif de la politique monétaire de la BCE se confirme.

Le profil de taux sous-jacent à la prévision de la charge de la dette repose sur l’hypothèse d’un resserrement graduel de la politique monétaire européenne à partir de 2018, en cohérence avec le scénario macroéconomique global de consolidation de la croissance et de l’inflation. Il table sur une poursuite du redressement des taux de moyen-long terme au rythme moyen de 75 points de base par an. Le taux à dix ans s’établirait à 1,85 % fin 2018, puis 2,60 % fin 2019 et 3,75 % fin 2021.

 

Niveaux en fin d’année (hypothèses)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Taux courts (BTF 3 mois)

Taux longs (OAT à 10 ans)

-0,50 %

1,10 %

-0,10 %

1,85 %

0,70 %

2,60 %

1,50 %

3,25 %

2,00 %

3,75 %

2,50 %

4,00 %

Tableau : charge dintérêts et solde primaire

 

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public

-3,4

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Charge d’intérêt

1,9

1,8

1,8

1,8

1,9

2,0

2,1

Solde primaire

-1,5

-1,1

-1,0

-1,2

0,4

1,1

1,8

E. Une transformation de l’action et de la gestion publique

1.     Action publique 2022

Lancé dès 2017, le processus « Action publique 2022 » permettra de dégager des économies structurelles à moyen terme. La trajectoire fixée par la présente loi prévoit une baisse de plus de trois points de PIB de la dépense publique. Le Gouvernement entend atteindre cet objectif, en examinant le périmètre de l’action publique d’un point de vue stratégique et en impliquant les usagers et les agents, afin d’améliorer l’efficience des politiques publiques : meilleure qualité de service pour les usagers, meilleur environnement de travail pour les agents, et meilleure utilisation des impôts des contribuables. Cela suppose de mettre en œuvre un processus ambitieux de réforme de l’action publique. S’appuyant sur une démarche de revue des missions et de la dépense publique dans une approche par politique publique, le programme « Action publique 2022 » portera sur la définition et la mise en œuvre de réformes structurelles qui se déploieront au cours du quinquennat.

Constatant que les exercices de réforme de l’État et des administrations publiques qui se succèdent depuis dix ans (« Révision générale des politiques », de 2007 à 2012 et « Modernisation de l’action publique » de 2012 à 2017), et plus généralement les approches par le rabot, n’ont pas été à la hauteur des enjeux de redressement des finances publiques et de modernisation de l’action publique, le Gouvernement souhaite lancer un processus de réforme d’un type nouveau, placé sous l’autorité du Premier ministre, avec l’appui du ministre de l’action et des comptes publics.

Il couvre l’ensemble des administrations publiques et de la dépense publique, dans la mesure où le champ de l’État ne représente qu’une part minoritaire de la dépense publique et dans la mesure où les usagers du service public portent une appréciation sur sa qualité sans distinguer la collectivité qui les porte. Toutefois, afin de garantir une responsabilisation accrue, chaque ministère sera chef de file des politiques publique qui le concernent.

Un Comité Action Publique 2022 (CAP22), composé de personnalités qualifiées françaises ou étrangères issues de la société civile, de hauts fonctionnaires et d’élus locaux, sera chargé d’identifier des réformes structurelles et des économies significatives et durables, sur l’ensemble du champ des administrations publiques, en faisant émerger des idées et des méthodes nouvelles. Pour ce faire, plusieurs chantiers viendront alimenter les travaux du comité. Les propositions des ministères seront examinées dans le cadre de travaux itératifs. Cinq chantiers transversaux seront conduits en parallèle sur les thématiques suivantes : la simplification administrative, la transformation numérique, la rénovation du cadre des ressources humaines, l’organisation territoriale des services publics et la modernisation de la gestion budgétaire et comptable. En parallèle, un grand forum de l’action publique permettra d’associer les usagers et les agents à la rénovation de l’action publique.

Les conclusions du Comité Action Publique 2022, dévoilées au premier trimestre 2018, feront l’objet d’arbitrages sur la base desquels des plans de transformation ministériels seront élaborés et mis en place.

2. La maîtrise des dépenses de lÉtat

Le budget pluriannuel présenté à l’occasion de la présente LPFP 2018-2022 reposera sur un double système de norme : une norme recentrée sur les dépenses pilotables de l’État et un objectif de dépenses totales de l’État (ODETE) telles que définies à l’article 8 du projet de loi.

i) Un principe directeur de sincérité de la budgétisation initiale

Les crédits nécessaires à la couverture des sous-budgétisations identifiés par la Cour des comptes dans son rapport d’audit seront en effet ouverts dans le projet de loi de finances pour 2018, permettant ainsi une plus grande transparence vis-à-vis de la représentation nationale. Un tel effort de remise à niveau doit permettre une plus grande responsabilisation des gestionnaires qui devront donc gérer aléas ou priorités nouvelles au sein de leur plafond limitatif de crédits.

Le principe d’auto-assurance est un corollaire indispensable de la visibilité donnée sur les enveloppes triennales. Il est le pendant de la sincérisation des budgets opérée à l’occasion du PLF 2018. En construction budgétaire (pour les budgets à venir au-delà de celui de 2018) comme en gestion, ce principe implique que les aléas ou les priorités nouvelles affectant les dépenses d’une mission soient gérés dans la limite du plafond de ses crédits, soit par redéploiement de dépenses discrétionnaires, soit par la réalisation d’économies complémentaires. Ces redéploiements ou économies doivent être mis en œuvre prioritairement au sein du programme qui supporte les aléas ou les priorités nouvelles. À défaut, ils doivent être réalisés entre les programmes de la même mission.

Sous-budgétisations sous-jacentes à la LFI 2017 identifiées par la Cour des comptes

 

 

 

Mission

Sous-budgétisation

Montant (Md€)

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

Refus d’apurements communautaires

0,4

Agriculture

Crises : Influenza aviaire

0,2

Travail et emploi

Prime à l’embauche

0,2

Travail et emploi

Rémunération de fin de formation

0,1

Travail et emploi

Plan de formation

0,4

Travail et emploi

Contrats aidés

0,3

Défense

Opérations extérieures, opérations intérieures et masse salariale

0,7

Solidarités et santé

Allocation aux adultes handicapés (AAH) et Prime d’activité

0,7

Enseignement scolaire

Masse salariale de l’éducation nationale

0,4

Immigration, asile et intégration

Allocation pour demandeurs d’asile (ADA)

0,2

Cohésion des territoires

Hébergement d’urgence

0,1

Cohésion des territoires

Aides personnalisées au logement

0,1

Autres

Service civique, Aide médicale d’État, contribution aux organismes scientifiques internationaux, etc.

0,5

 

 

 

 

Total (Md€)

4,2

 

 

 

Source : Cour des comptes, La situation et les perspectives des finances publiques (juin 2017)

La mise en œuvre du principe d’auto-assurance permet ainsi de limiter aux seules situations exceptionnelles les ajustements susceptibles d’affecter en cours d’année les plafonds définis par mission ou leur révision dans le cadre des projets de lois de finances, selon les modalités précisées ci-après.

ii) Réserve de budgétisation et de précaution

L’incapacité de prévoir la totalité des événements susceptibles d’intervenir et la nécessité de pouvoir initier des actions nouvelles en cours de programmation justifient l’existence de marges de manœuvre tant pour la budgétisation au sein d’une période pluriannuelle, qu’en gestion.

Concernant la budgétisation, la programmation triennale prévoit une réserve centrale de budgétisation d’un montant de 0,7 Md€ en 2020. La mise en place d’une telle réserve, objectif qui n’avait pu être atteint depuis le triennal 2009-2011, doit permettre de répondre aux situations nouvelles qui ne pouvaient être anticipées au stade de la programmation pluriannuelle. En priorité, la réserve de budgétisation permettra en 2020, de rehausser le cas échéant les plafonds de mission soumis à des dépenses plus dynamiques que prévues ou imprévisibles, qui ne pourraient être absorbées au sein de la mission après application du principe d’ « auto-assurance » décrit supra.

Concernant l’exécution, le Gouvernement s’engage à revenir à une pratique plus raisonnée des outils de régulation et de redéploiement en gestion. Pour cela, l’accent a été mis sur la sincérité de la budgétisation initiale (cf. supra). Les enveloppes de couverture des risques en gestion sont par ailleurs majorées : la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles (DDAI) est reconstituée à hauteur de 124  M€ afin de permettre de faire face à des événements imprévisibles nécessitant une intervention rapide de l’État (catastrophe naturelle par exemple), la provision pour opérations extérieures de la défense sera progressivement rebasée, avec une première marche de +200 M€ en 2018, et pour la première fois une provision pour risques est inscrite au sein du budget de l’agriculture, à hauteur de 300 M€.

Ces mesures, accompagnées de la réaffirmation du principe d’auto-assurance, permettent d’abaisser fortement le niveau de la réserve de précaution – dont le principe est posé au 4° bis de l’article 51 de la LOLF et qui vise à bloquer une partie des crédits en début de gestion – en le ramenant de 8 % à 3 % des crédits initiaux.

iii) Doctrine daffectation de taxes

À l’inverse des dotations versées par le budget général de l’État, l’affectation directe d’impositions de toute nature fait échapper ce financement public au contrôle annuel du Parlement dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances. L’affectation constitue par ailleurs une dérogation au principe d’universalité budgétaire. Enfin, la plupart des taxes affectées connaissent une évolution dynamique, ce qui, en l’absence de mécanisme de limitation, conduit à une progression de la dépense moins bien contrôlée – et donc moins en adéquation avec les besoins des politiques visées – pour les organismes concernés que pour les dépenses de l’État ou des organismes financés sur subvention budgétaire incluse dans la norme de dépenses pilotables de l’État.

Le recours à l’affectation d’imposition de toutes natures à des tiers autres que les organismes de sécurité sociale, les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale fait l’objet d’un encadrement précis à l’article 15 de la présente LPFP qui exclut expressément l’affectation de taxes, à trois exceptions près :

-       la première exception est celle des ressources présentant une logique de « quasi-redevance » ;

-       la seconde exception concerne les prélèvements finançant des actions de mutualisation ou de solidarités sectorielles au sein d’un secteur d’activité ;

-       enfin, la troisième exception est celle des fonds d’assurance ou d’indemnisation et présentant une logique de mutualisation du risque.

Le même article indique que l’ensemble des taxes affectées doivent faire l’objet d’un plafonnement. Les éventuelles affectations dérogeant à ce principe de plafonnement sont justifiées dans l’annexe « Voies et moyens » du projet de loi de finances de l’année.

3. Leffort des collectivités locales fera lobjet dune contractualisation avec lÉtat

Sur la durée du quinquennat, la maîtrise des dépenses publiques nécessitera la participation de chacun des sous-secteurs des administrations publiques. Les collectivités territoriales seront associées à cet effort avec une réduction de leurs dépenses à hauteur de 13 Md€ par rapport au tendanciel.

Cet objectif fera l’objet d’un contrat de mandature entre l’État et les collectivités locales qui permettra de définir leurs engagements réciproques. Un pacte financier, dont le contenu sera concerté dans le cadre de la conférence nationale des territoires, précisera à cet effet la trajectoire pluriannuelle de dépenses et de désendettement associée, les modalités de mise en œuvre des procédures visant à vérifier le respect des engagements ainsi que le mécanisme de correction applicable dans le cas d’une déviation des dépenses et de la trajectoire de désendettement à la trajectoire prévue.

La loi de programmation des finances publiques s’inscrit dans cette démarche en précisant les principes de la contractualisation avec les collectivités tant dans le périmètre retenu que dans le contenu des contrats et les possibilités de modulation offertes ou encore dans les mécanismes de reprise financière prévus.

L’objectif d’évolution de la dépense locale (ODEDEL) sera à nouveau utilisé sur la période de programmation. Il constituera un outil qui permettra de vérifier, en concertation avec les collectivités, le respect de leur trajectoire de dépenses de fonctionnement.

4. Les dépenses fiscales et les niches sociales feront lobjet dun suivi renforcé

La LPFP 2018-2022 prévoit un mécanisme d’encadrement de la part des dépenses fiscales dans l’ensemble des recettes fiscales du budget général, combiné à un mécanisme similaire de mesure de la part des niches sociales dans les recettes sociales, afin que dépenses fiscales et niches sociales ne puissent excéder un plafond exprimé en pourcentage des recettes totales inscrit en LPFP.

En parallèle, la LPFP 2018-2022 pose le principe d’une limitation dans le temps des dépenses fiscales et des niches sociales : tout nouveau texte instituant une dépense fiscale ou sociale doit prévoir un délai limité d’application maximal de quatre ans pour la niche fiscale et trois ans pour la niche sociale ainsi créée. Une telle disposition permet de fixer une échéance d’évaluation, à l’approche de la date d’extinction du dispositif, afin de justifier sa pertinence avant d’en proposer la reconduction au Parlement.

5. Le Grand plan dinvestissement sera lancé dès 2018

a. Grand plan dinvestissement

Initiative majeure des cinq prochaines années, le grand plan d’investissement (GPI) a pour ambition d’accélérer l’émergence d’un nouveau modèle de croissance en poursuivant trois objectifs : augmenter son potentiel de croissance et d’emplois, privilégier la dépense publique favorable à l’investissement et l’innovation et accélérer la transition écologique. Ce plan, constitué de dépenses non pérennes, améliorera nettement les performances économiques et sociales du pays. Il contribuera à déployer le plein potentiel des réformes structurelles qui seront mises en œuvre en parallèle, et accompagnera les réformes budgétaires.

Les investissements prévus par le plan couvriront un champ très large de dépenses dépassant largement l’investissement public au strict sens comptable (formation brute de capital fixe), en englobant toute mobilisation temporaire de ressources ayant un effet à long terme, par exemple les actions de formation ou subventions destinées à orienter le comportement des acteurs dans la transition énergétique). Le plan sera ainsi centré autour de trois priorités : augmenter le potentiel de production, accélérer la transition énergétique et réduire structurellement la dépense publique en modernisant l’action publique. Il interviendra sur sept axes de politiques publiques : la formation et les compétences, la transition écologique et énergétique, la santé, l’agriculture, la modernisation des administrations publiques notamment grâce à la numérisation, les transports et équipements collectifs locaux, et l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation. Afin d’engager la transformation de notre modèle de croissance dès 2018, le Grand plan d’investissement montera en charge à partir de l’an prochain.

Conformément au principe de responsabilisation voulu par le Gouvernement, afin de donner aux ministres une pleine visibilité et responsabilité sur l’ensemble de leurs moyens, et contrairement aux ressources des programmes successifs d’investissements d’avenir, les crédits du GPI ne constitueront pas un budget distinct des programmes ministériels. Il s’agit donc de dépenses d’avenir et d’investissements temporaires qui seront retracées par les ministères eux-mêmes au sein de leurs budgets. En contrepartie, un suivi transversal sera effectué par une structure légère centralisée afin d’évaluer l’atteinte des objectifs et soutenir les ministères dans la mise en œuvre de ces actions de transformation.

Le plan sera composé de crédits à impact maastrichtien hors investissements d’avenir à hauteur de 36 Md€ sur le budget de l’État, de ses opérateurs, et de l’assurance maladie (ces dernières dépenses seront très largement financés au sein de l’objectif national d’assurance maladie – Ondam), de crédits du troisième PIA pour 10 Md€ (dont 6 Md€ de dépenses maastrichtiennes) et d’instruments financiers innovants non maastrichtiens (mobilisant des fonds propres et des prêts, notamment de la Caisse des dépôts et Consignations) pour 11 Md€ environ.

b. Gouvernance des investissements

En valeur absolue, et depuis de nombreuses années, la France est le premier investisseur de l’Union européenne, avec 78,6 Md€ d’investissements publics au sens comptable (3) en 2015. La France ne souffre donc pas d’un problème de niveau d’investissement public. En revanche, l’utilisation optimale des deniers publics requiert d’investir mieux et de sélectionner les projets les plus utiles à la collectivité, c’est à dire ceux dont les gains pour la collectivité surpassent le plus les coûts. Ainsi, une décision d’investissement doit être éclairée par une comparaison objective de l’ensemble des coûts et des bénéfices socio-économiques du projet envisagé. Si la LPFP 2012-2017 a systématisé l’évaluation socio-économique des investissements, cette dernière reste variable selon les secteurs concernés et l’évaluation socioéconomique n’est d’une manière générale pas suffisamment prise en compte dans les décisions d’investissements.

Le Gouvernement a pour objectif d’améliorer cet état de fait, via i) la définition d’une méthodologie harmonisée, partagée et utilisée par tous les porteurs de projets et ii) une réforme du processus d’instruction et de décision des projets d’investissements. Un comité d’experts mis en place sous l’égide de France Stratégie devra préciser et harmoniser les règles de l’évaluation socio-économique pour l’ensemble des secteurs, avec notamment la publication d’un guide d’ici la fin de l’année. De plus le Gouvernement mettra en place un comité interministériel de sélection des investissements placé sous l’autorité du Premier ministre et qui sera chargé de valider ou non les étapes clefs de la vie d’un projet : approbation du principe du projet après notamment analyse socio-économique et analyse de soutenabilité budgétaire, validation du mode de réalisation et du plan de financement, autorisation d’engagement juridique et financier. Ces mesures contribueront à renforcer durablement la qualité de l’investissement public et la visibilité collective sur l’avancement des projets.

III - L’effort sera équitablement réparti entre les sous-secteurs des administrations publiques

A. La trajectoire de l’État

Sur la période de la programmation, la trajectoire de finances publiques de l’État connaîtrait l’évolution suivante :

Tableau : variation du solde structurel des administrations publiques

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde en comptabilité nationale (en Md€)

-70,8

-77,0

-91,8

-62,7

-56,5

-47,4

Solde en comptabilité nationale (en pt de PIB)

-3,1

-3,3

-3,8

-2,5

-2,2

-1,8

Dépenses (en pt de PIB)

21,3

21,0

20,7

19,7

19,4

19,0

Recettes (en pt de PIB)

18,2

17,8

16,9

17,2

17,2

17,3

1.     La trajectoire des dépenses et des recettes de lÉtat

Sur le champ de la norme de dépenses pilotables de l’État (cf. définition en annexe 3), les dépenses augmenteront de 5,1 Md€ en 2018, puis de 1,6 Md€ en 2019 et de 1,0 Md€ en 2020 soit une décélération très nette du rythme d’accroissement de la dépense sous norme. Cette hausse des crédits sous norme de dépenses pilotables de 7,7 Md€ en trois ans est à comparer à la hausse de 10,4 Md€ des crédits inscrits en LFI pour 2017 sur ce périmètre par rapport à la LFI pour 2016. En outre la croissance des dépenses en 2018 s’explique en grande partie par le rebasage des impasses de budgétisation de la LFI pour 2017 mises en lumière par l’audit de la Cour des comptes de juin 2017. Les impasses documentées par la Cour des comptes au titre de la LFI 2017 s’élèvent à 4,2 Md€ (cf. tableau p.37) soit un montant proche de l’augmentation des dépenses entre les LFI 2017 et 2018.

Sur la période 2020-2022 le taux d’évolution en volume de la dépense sous norme pilotable sera de -1 % par an. Cette évolution sera rendue possible notamment par les réformes documentées dans le cadre du processus « Action Publique 2022 ».

Sur le champ de l’objectif de dépenses totales de l’État (cf. annexe 3), l’évolution de la dépense serait de 21 Md€ entre 2017 et 2020. Le prélèvement sur recettes à destination de l’Union européenne, compris dans le champ de cet objectif, augmenterait de 5 Md€ environ entre 2017 et 2020, avec une chronique de dépenses estimée pour les années 2018, 2019 et 2020 de 20, 23 et 24 Md€.

2. Un budget de transformation pour libérer les acteurs et les initiatives, protéger le pays et les plus vulnérables et investir dans lavenir

Libérer

Les transformations fiscales et budgétaires portées par les textes financiers sont menées en cohérence avec les réformes en matière de travail ou de logement, dans une logique de simplification et de modernisation des contraintes normatives et de libération des acteurs.

La transformation économique de la France et le soutien à l’activité et la création d’emploi passera par un soutien accru aux entreprises, notamment fiscal, avec la transformation en 2019 du CICE en allègements de charges sociales pérennes, mesure permettant à la fois une plus grande simplicité et lisibilité pour les entreprises et qui améliorera leur trésorerie dans la mesure où elles bénéficieront de l’allègement immédiatement (et non plus a posteriori comme dans le cas d’un crédit d’impôt). En parallèle la poursuite de la baisse de l’IS de 28 % à 25 % en 2022 et la suppression de la contribution de 3 % sur les dividendes viendront accroître les marges de manœuvre des entreprises et donc leur capacité à investir et à se développer.

La baisse de la pression fiscale redonnera aussi du pouvoir d’achat avec le dégrèvement de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers, la suppression des cotisations salariales, et l’activation de dépenses sociales comme la revalorisation de la prime d’activité.

Protéger

La programmation budgétaire présentée intègre le financement des priorités du Gouvernement en matière de justice, de sécurité et de défense. Ainsi la progression annuelle du budget des armées sera de +1,7 Md€ par an tandis que 10 000 postes de policiers et de gendarmes seront créés d’ici 2022 (dont 2 000 en 2018). En outre, 6 500 postes seront créés à la justice sur la durée du quinquennat, dont 1 000 dès 2018.

La fiscalité sera aussi mise au service de la transition écologique pour protéger contre le risque climatique, avec l’alignement progressif de la fiscalité du gazole sur celle de l’essence et l’accélération de la trajectoire carbone. Des mesures budgétaires comme la généralisation du chèque-énergie et la prime à la conversion pour les véhicules anciens sont incluses pour accompagner les plus fragiles dans la transition écologique.

La trajectoire budgétaire concrétise aussi l’objectif du Gouvernement d’inventer de nouvelles protections pour mieux aider les plus fragiles. Le budget intègre ainsi les mesures de justice sociale et de soutien au pouvoir d’achat du Gouvernement que sont la revalorisation de la prime d’activité, la hausse de l’allocation aux adultes handicapés et la hausse de l’allocation de solidarité aux personnes âgées.

Investir

Au-delà du soutien aux entreprises, les mesures fiscales de la trajectoire sur l’État visent à orienter l’épargne française vers l’investissement des entreprises qui prennent des risques, qui innovent et qui créent les emplois de demain. Ainsi un prélèvement forfaitaire unique de 30 % sur les revenus du capital sera introduit. En parallèle l’impôt sur la fortune sera supprimé et remplacé par un impôt sur la fortune immobilière. Enfin des mesures spécifiques sont prévues pour améliorer l’attractivité du territoire vis-à-vis des investissements étrangers, et notamment le développement de la place de Paris dans le contexte du Brexit.

Les crédits prévus au titre du GPI pour la période 2018-2020 sont aussi intégrés dans les plafonds de chaque mission. Ces crédits seront dotés d’une gouvernance et d’un suivi spécifique. Sera notamment créé au sein d’une nouvelle mission du budget général un fonds pour la transformation de l’action publique, doté de 700 M€ de crédits sur le quinquennat et qui financera, sur la base d’appels à projet, les coûts d’investissement nécessaires à la mise en œuvre de réformes structurelles.

3. Un budget qui opère des choix stratégiques pour financer les priorités du Gouvernement

Des économies d’ampleur seront mises en œuvre sur l’ensemble des missions du budget pour financer les priorités exposées supra. Deux secteurs pour lesquels les résultats obtenus ne sont pas à la hauteur des moyens publics engagés seront particulièrement mis à contribution :

En matière d’emploi le choix est fait, en parallèle de la réforme du code du travail, de diminuer le volume de contrats aidés, dont l’efficacité en matière de retour à l’emploi et d’insertion professionnelle n’est pas démontrée pour investir de manière prioritaire dans la formation professionnelle. Cette dépense s’inscrira dans le cadre du Grand plan d’investissement (GPI) destiné à augmenter le potentiel de croissance de l’économie française, à accélérer la transition écologique et à financer la transformation de l’action publique.

En matière de logement la baisse des aides personnelles au logement (APL) se fera dans le cadre d’une série de réformes structurelles mises en œuvre entre 2018 et 2020 qui visent à sortir de la logique inflationniste induite par le soutien à la demande de logements et à soutenir l’offre de logement.

D’autres économies seront mises en œuvre comme la rationalisation de l’intervention économique en matière de transition énergétique et le recentrage du crédit d’impôt transition énergétique sur les actions les plus efficaces.

Au-delà des économies structurelles engagées dès 2018, « Action Publique 2022 » viendra prendre le relais en initiant un processus de réforme et de modernisation des administrations,

L’évolution de la masse salariale de l’État et de ses opérateurs fera l’objet d’une maitrise stricte. En particulier le point d’indice est stabilisé en 2018 et un jour de carence est introduit pour réduire le micro-absentéisme. Par ailleurs, les effectifs de l’État et des opérateurs s’inscriront en baisse sur le quinquennat. Les créations d’emplois prévues dans les ministères stratégiques comme les armées, l’intérieur ou la justice seront ainsi compensées par des réductions d’effectifs plus importantes dans les autres domaines, selon les capacités d’optimisation et de gains de productivité identifiées.

4. Trajectoire triennale 2018-2020

La programmation d’ensemble des finances publiques couvre cinq années (2018-2022). Au cours de cette période, les moyens de l’État font l’objet d’une programmation plus précise qui détaille, dans le cadre du budget triennal 2018-2020, les crédits alloués à chaque mission. Les plafonds de l’année 2018 sont ceux inscrits dans le PLF. Les plafonds de l’année 2018 coïncident avec ceux qui seront présentés dans le cadre du PLF. Les plafonds de l’année 2019 sont fermes ; ceux de 2020 seront actualisés pour intégrer notamment les économies complémentaires issues du processus Action publique 2022 nécessaires au respect de la trajectoire globale.

Évolution des plafonds de crédits de paiements par mission 2017-2020

Crédits de paiement

LFI 2017

LFI 2017

Format 2018

2018

2019

2020

Action et transformation publiques

0,00

0,00

0,02

0,28

0,55

Action extérieure de l’État

2,86

2,86

2,86

2,75

2,69

Administration générale et territoriale de l’État

2,49

2,50

2,15

2,14

2,30

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3,15

2,79

3,18

2,88

2,84

Aide publique au développement

2,58

2,59

2,68

2,81

3,10

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2,54

2,54

2,46

2,34

2,25

Cohésion des territoires

18,26

18,26

17,22

15,65

15,14

Conseil et contrôle de l’État

0,51

0,51

0,52

0,53

0,53

Crédits non répartis

0,02

0,02

0,12

0,12

0,85

Culture

2,70

2,70

2,72

2,74

2,78

Défense

32,44

32,44

34,20

35,90

37,60

Direction de l’action du Gouvernement

1,37

1,38

1,38

1,39

1,40

Écologie, développement et mobilité durables

9,44

9,91

10,39

10,55

10,57

Économie

1,64

1,65

1,62

1,79

2,15

Engagements financiers de l’État (hors dette)

0,55

0,55

0,58

0,43

0,43

Enseignement scolaire

50,01

50,01

51,49

52,09

52,95

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

8,12

8,11

8,15

8,10

8,04

Immigration, asile et intégration

1,10

1,10

1,38

1,36

1,36

Investissements d’avenir

0,00

0,00

1,08

1,05

1,88

Justice

6,85

6,72

6,98

7,29

7,65

Médias, livre et industries culturelles

0,57

0,57

0,55

0,54

0,54

Outre-mer

2,02

2,02

2,02

2,02

2,03

Pouvoirs publics

0,99

0,99

0,99

0,99

0,99

Recherche et enseignement supérieur

26,69

26,69

27,40

27,87

28,02

Régimes sociaux et de retraite

6,31

6,31

6,33

6,27

6,30

Relations avec les collectivités territoriales

3,44

3,35

3,66

3,51

3,54

Santé

1,27

1,24

1,38

1,48

1,54

Sécurités

13,10

13,09

13,32

13,48

13,66

Solidarité, insertion et égalité des chances

17,64

17,67

19,44

21,31

21,94

Sport, jeunesse et vie associative

0,73

0,80

0,95

1,05

1,07

Travail et emploi

15,27

16,68

15,17

12,96

12,68

Le respect de ce budget triennal est garanti par deux mécanismes fondamentaux : un principe d’auto-assurance et la constitution d’une réserve de précaution.

B. La trajectoire des organismes divers d’administration centrale

Eu égard à la règle posée à l’article 12 de la loi de programmation des finances publiques 2011-2014 interdisant aux ODAC de s’endetter auprès d’un établissement de crédit pour une période allant au-delà d’une année les ODAC sont globalement à l’équilibre. La poursuite des décaissements au titre des PIA 1 et 2 explique le solde déficitaire des ODAC sur la période.

Tableau : trajectoire des organismes divers dadministration centrale

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépense

3,5

3,3

3,2

3,1

3,0

3,0

Recette

3,5

3,2

3,1

3,0

3,0

2,9

Solde

-0,1

-0,1

-0,1

-0,1

-0,1

0,0

C. La trajectoire des administrations de sécurité sociale

Le tableau ci-dessous présente la trajectoire des administrations de sécurité sociale pour les années 2016-2022.

(En points de PIB sauf indication contraire)

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépenses

26,3

26,0

25,9

25,6

25,1

24,9

24,5

Recettes

26,1

26,2

26,5

26,4

25,9

25,7

25,3

Solde

-0,1

0,2

0,5

0,8

0,8

0,8

0,8

Solde (Md€)

-2,9

4,0

12,5

19,9

20,3

20,9

21,7

Le solde des administrations de sécurité sociale (ASSO) se redresserait sur la période 2019-2022, du fait de la dynamique modérée des dépenses des branches vieillesse et famille et de la maîtrise des dépenses d’assurance maladie. Proche de l’équilibre dans le compte provisoire de 2016, le solde des ASSO deviendrait positif dès 2017. Au-delà, sous le double impact de dépenses maîtrisées et de recettes favorables dans un contexte de croissance solide et de nette amélioration en termes d’emploi, le solde des ASSO deviendrait très excédentaire.

Aussi, dans cette trajectoire, il est fait l’hypothèse conventionnelle d’une contribution du secteur ASSO à la réduction du déficit de l’État, sous forme de transfert, dès 2019. Ce transfert stabilise l’excédent ASSO hors Cades et FRR sur toute la période à un niveau légèrement supérieur à l’équilibre. Ce choix, neutre sur l’ensemble des APU, reflète aussi le fait qu’une contribution des sous-secteurs revenus à l’équilibre reste nécessaire.

Les comptes présentés dans la loi de financement de la sécurité sociale et dans la loi de programmation des finances publiques relèvent de périmètres et de conventions comptables distinctes à double titre. D’une part, le champ des ASSO couvert par la LPFP est plus étendu que celui couvert par la LFSS car il inclut notamment le régime d’indemnisation du chômage, les régimes complémentaires de retraite des salariés et les organismes dépendant des assurances sociales (principalement les hôpitaux et Pôle Emploi). D’autre part, les conventions comptables utilisées par la comptabilité nationale diffèrent du plan comptable unique des organismes de sécurité sociale. Elles excluent en particulier les dotations nettes des reprises sur provisions, les dotations aux amortissements et les plus-values sur cessions d’immobilisations financières ou opérations de change.

1.     Maîtriser dans un cadre pluriannuel les dépenses dassurance-maladie tout en garantissant la qualité des soins et laccès à linnovation

La gouvernance de l’ONDAM mise en place depuis plusieurs années (abaissement du seuil d’alerte, mise en place du comité de pilotage, augmentation du nombre des interventions du comité d’alerte) ainsi que la mise en œuvre du plan d’économies 2015-2017 ont contribué au respect de l’objectif en 2016 pour la septième année consécutive. S’agissant de 2017, les données d’exécution à fin mai sur les soins de ville ne laissent pas, à ce stade, craindre un dépassement de l’objectif pour 2017, constat qui avait déjà été celui du comité d’alerte de l’ONDAM en juin. Ce dernier se réunira au plus tard le 15 octobre pour rendre un avis qui portera à la fois sur la construction de l’objectif pour 2018 et sur les risques éventuels quant à la réalisation de l’objectif de l’année en cours.

Dans le cadre de la stratégie globale des finances publiques, l’ONDAM connaîtra un taux d’évolution en moyenne annuelle de +2,3 % sur la période 2018-2020, soit un effort d’économies de 4,2 Md€ dès 2018 afin de compenser une évolution tendancielle des dépenses de +4,5 %.

Pour assurer le respect de cette trajectoire, assurer une amélioration continue de la qualité de soins et garantir l’accès de tous aux soins innovants, le système de soins poursuivra sa transformation dans le cadre de la stratégie nationale de santé (SNS). La prévention, la lutte contre les inégalités d’accès sociales et territoriales aux soins, la pertinence et la qualité des soins et le soutien à l’innovation en constitueront les axes prioritaires d’action.

L’ensemble des acteurs en ville et à l’hôpital seront mobilisés durant la période 2018-2022 pour renforcer l’efficience de l’offre de soins avec comme leviers la structuration de parcours de soins efficients, l’amélioration de la performance des établissements de santé et médico-sociaux, la pertinence des actes, des prestations et des produits de santé.

Les efforts sur les prix des médicaments seront poursuivis pour rémunérer l’innovation à son juste prix et développer l’usage des génériques et des biosimilaires avec pour objectif de maintenir un haut niveau d’accès aux soins innovants tout en assurant la soutenabilité de la dépense.

2. La modération des dépenses des branches vieillesse et famille contribuera à lobjectif global de redressement des finances publiques

Le tableau ci-dessous présente les dépenses prévisionnelles d’assurance vieillesse et d’allocations familiales des régimes obligatoires de base de sécurité sociale pour les années 2018-2020 :

Charges nettes des régimes obligatoires de base de sécurité sociale

En évolution

2018

2019

2020

Branche vieillesse

2,3 %

2,5 %

2,6 %

Branche famille

0,1 %

0,8 %

0,9 %

ONDAM

2,3 %

2,3 %

2,3 %

L’évolution des dépenses d’assurance vieillesse des régimes de base serait de +2,7 % en moyenne sur la période 2018-2022. La reprise progressive de l’inflation entraîne une accélération très progressive des pensions. Toutefois celle-ci resterait assez modérée, du fait de la montée en charge jusqu’en 2022 de la réforme des retraites de 2010.

Comme pour les retraites, les dépenses indexées de la branche famille devraient subir l’effet de la reprise de l’inflation. Toutefois, la trajectoire des dépenses comporte un volet d’économies conformément aux dispositions qui sont proposées au vote du Parlement dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Ces dispositions permettront d’infléchir les dépenses de la branche via, notamment, une meilleure priorisation au sein des dépenses du Fonds national d’action sociale (FNAS) de la CNAF. Ainsi, les dépenses connaîtraient une évolution moyenne sur la trajectoire de 0,8 %.

3. Le dynamisme de la masse salariale et les accords conclus par les partenaires sociaux permettront de garantir la pérennité des régimes complémentaires de retraite

Le solde des régimes complémentaires se redresserait de 7,1 Md€ entre 2016 et 2022. Cette amélioration s’explique notamment par les efforts entrepris par les régimes Agirc et Arrco dans le cadre de l’accord signé en 2015. Sa mise en œuvre soutiendrait les recettes (augmentation du taux d’appel à 127 %, fusion de la tranche T2 et de la tranche TB, unification des deux régimes) et permettrait aux dépenses de ralentir (via les coefficients de solidarité et les coefficients majorants notamment).

Dépenses, recettes et soldes des régimes complémentaires de retraite :

En Md€ en comptabilité nationale

2018

2019

2020

Solde

1,6

4,5

5,5

Recettes

102,9

107,8

111,4

Dépenses

101,2

103,4

106,0

4. La baisse du chômage, associée aux effets de la convention de mars 2017, permettra le retour à léquilibre de lUNEDIC

Le solde du régime d’indemnisation du chômage se redresserait significativement entre 2016 et 2022 sous l’effet de l’amélioration progressive de l’emploi et des mesures prises par les partenaires sociaux lors des accords professionnels du 28 mars 2017. Ceux-ci permettraient des économies progressives en dépenses sur la période, allant de 260 M€ en 2018 jusqu’à un peu plus de 900 M€ en 2022. Par ailleurs, des mesures temporaires en recettes soutiendraient l’amélioration du solde en début de période (pour environ 300 M€ en 2018 et 2019) avant de s’éteindre progressivement.

Dans le cadre de la mesure de baisse des cotisations pour les actifs en 2018, les cotisations salariales à l’assurance chômage seront supprimées (baisse de 2,4 points). Cette mesure sera intégralement compensée pour l’UNEDIC.

Afin de rendre le marché du travail plus fluide, l’assurance chômage deviendra universelle progressivement à partir de 2018 : elle couvrira tous les actifs (salariés, travailleurs indépendants) et facilitera les transitions d’un statut à un autre. En contrepartie de ces droits nouveaux, le contrôle de la recherche d’emploi sera accru avec le recrutement de mille conseillers de contrôle. Le Gouvernement engagera dès l’automne 2017 une concertation avec les partenaires sociaux gestionnaires de l’assurance chômage sur l’ensemble de ces mesures qui devront également permettre de garantir la soutenabilité financière du régime.

Dépenses, recettes et soldes de lassurance chômage

Md€ en comptabilité nationale

2018

2019

2020

Solde

-2,1

-0,8

0,6

Recettes

37,8

38,9

40,1

Dépenses

39,9

39,7

39,4

D. La trajectoire des administrations publiques locales

Comme les autres secteurs publics, les administrations publiques locales contribueront à l’effort de maîtrise des dépenses publiques : leurs dépenses diminueront d’environ 1 point de PIB sur l’ensemble du quinquennat, passant de 11,2 % en 2017 à 10,1 % en 2022, tandis que leurs recettes diminueront dans des proportions moindres (de 11,2 % de PIB en 2017 à 10,8 % en 2022). Ainsi, leur solde s’améliorera fortement au cours des prochaines années, passant de 0,1 % de PIB en 2017 (soit 1,4 Md€) à 0,7 % de PIB en 2022 (soit 19,5 Md€).

Cette trajectoire est une conséquence directe du nouveau pacte financier entre l’État et les collectivités locales : celles-ci s’engageront à baisser leurs dépenses de 13 Md€ sur la durée du quinquennat par rapport à leur évolution tendancielle mais ne verront pas leurs dotations réduites. Ce contrat de mandature traduit la volonté du Président de la République de modifier en profondeur le rapport de l’État et des collectivités territoriales : ce dernier sera fondé sur la confiance et la responsabilité et non plus sur la contrainte. Au-delà de cette dynamique d’ensemble, le solde des collectivités locales sera marqué de manière usuelle par le cycle électoral communal qui affecte habituellement leurs dépenses d’investissement. L’investissement local devrait ainsi connaître une hausse marquée jusqu’en 2019 puis une baisse à partir de 2020, année d’élection municipale.

Tableau : trajectoire des administrations publiques locales

(% PIB)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépenses

11,2

11,0

10,9

10,7

10,3

10,1

Recettes

11,2

11,1

11,0

10,9

10,9

10,8

Solde

0,1

0,1

0,1

0,3

0,5

0,7

Solde (Md€)

1,4

1,7

2,7

6,8

14,2

19,5

E. Si la législation et les politiques de finances publiques n’étaient pas réformées, le déficit public se résorberait plus lentement et la dette ne décroîtrait pas sur le quinquennat

La trajectoire de solde public à législation et pratique inchangées, présentée ici conformément à la loi organique de programmation et de gouvernance des finances publiques de 2012 et à la directive de 2011 sur les cadres budgétaires, s’appuie sur les résultats obtenus ces dernières années en termes de maîtrise de la dépense publique, et prend pour hypothèse une croissance des dépenses égale à la moyenne sur les 10 dernières années de la croissance publique en volume hors crédits d’impôt (soit +1,3 % par an).

En recettes, elle se place dans un cadre dans lequel aucune mesure nouvelle n’aurait été prise depuis le début de la nouvelle législature (été 2017). Dans un tel scénario, le déficit se résorberait lentement : en 2022, il serait toujours de 2,2 % de PIB contre 0,3 % dans la trajectoire de la LPFP. De ce fait, le ratio de dette publique sur PIB serait beaucoup plus dynamique : la dette culminerait à 97,9 % point de PIB en 2019, puis commencerait à refluer lentement pour atteindre 96,6 % de PIB en 2022. Sur le quinquennat, la dette serait quasi-inchangée. À l’inverse, dans la trajectoire de la LPFP, la dette atteint 97,1 % de PIB en 2019 et décroît ensuite, pour s’établir à 91,4 % en 2022.

En % PIB

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public et législation et pratique inchangées

-3,1

-3,4

-2,8

-2,5

-2,4

-2,2

Dette publique à législation et pratique inchangées

96,9

97,7

97,9

97,8

97,4

96,6

Dépenses hors CI

0,2

0,6

0,9

1,4

2,0

2,6

Mesures annoncées en recettes (*)

 

0,0

-1,0

-0,4

-0,5

-0,6

Solde public de la LPFP

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Dette publique de la LPFP

96,7

96,9

97,1

96,1

94,2

91,4

(*) yc contribution nette des crédits d’impôts en recettes et en dépenses

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Annexes

Annexe 1. Principales définitions

La notion dadministrations publiques (APU) est celle définie à l’article 2 du protocole n° 12 sur la procédure concernant les déficits excessifs, annexé aux traités européens, c’est-à-dire « les administrations centrales, les autorités régionales ou locales et les fonds de sécurité sociale, à l’exclusion des opérations commerciales, telles que définies dans le système européen de comptes économiques intégrés ». La méthodologie en vigueur actuellement est celle du système européen des comptes 2010 (SEC 2010) publié dans le règlement n ° 549/2013 du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l’Union européenne.

La notion de prélèvements obligatoires (PO) a été initialement proposée par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et repose sur trois critères : les flux doivent correspondre à des versements effectifs, les destinataires de ces flux doivent être les APU et, enfin, ces versements doivent avoir un caractère « non volontaire » (absence de choix du montant et des conditions de versement, inexistence de contreparties immédiates). Au sein de l’Union européenne, les notions d’impôts et de cotisations sociales sont définies selon des critères précis et contraignants pour les États membres. En France, c’est l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) qui est en charge du classement d’un prélèvement dans la catégorie des PO. La notion de mesures nouvelles en prélèvements obligatoires, qui correspond à l’effort en recettes, s’entend comme les mesures sociales et fiscales nouvelles décidées ou mises en œuvre par les APU, votées par le Parlement ou prises par voie réglementaire, qui font évoluer les prélèvements obligatoires (y compris impact des crédits d’impôt).

Afin de se prémunir des effets du cycle économique, et d’éviter les effets procycliques d’un pilotage par le solde public nominal (c’est-à-dire éviter une politique budgétaire expansionniste lorsque la conjoncture est favorable et que les recettes fiscales sont dynamiques, et inversement une politique restrictive en bas de cycle), les États de l’Union signataires du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) ont mis en place des règles ancrées sur le solde structurel par sous-secteur (c’est-à-dire le solde public corrigé des variations conjoncturelles et net des mesures ponctuelles et temporaires - cf. infra)

 La règle d’équilibre est considérée comme respectée si le solde structurel annuel correspond à lobjectif à moyen terme (OMT). Chaque État membre fixe dans son programme de stabilité cet OMT, qui doit respecter une limite supérieure de déficit structurel de 0,5 %, ou de 1 % pour les États dont le ratio d’endettement est sensiblement inférieur à la valeur de référence de 60 % du produit intérieur brut (PIB) et dont les risques sur la soutenabilité des finances publiques sont faibles. En droit interne français, l’OMT est fixé par la loi de programmation des finances publiques (LPFP). Le Conseil examine l’OMT dans le cadre de l’examen du programme de stabilité ainsi que la trajectoire d’ajustement vers cet objectif. Par ailleurs, conformément à l’article 2 bis du règlement (CE) n° 1466/1997 du Conseil, du 7 juillet 1997, précité, l’OMT est fixé à un niveau de solde structurel qui garantit « la soutenabilité des finances publiques ou une progression rapide vers leur soutenabilité, tout en autorisant une marge de manœuvre budgétaire, en tenant compte notamment des besoins en investissements publics ». Le code de conduite pour l’application du pacte de stabilité et de croissance précise que l’objectif de moyen terme est différencié selon les États membres pour prendre en compte la diversité des situations économiques (notamment la volatilité de l’écart de production) et de finances publiques et les risques liés à la soutenabilité (en particulier le niveau de la dette et l’évolution des dépenses futures liées au vieillissement). L’OMT fixé par la France dans la présente loi de programmation est défini à l’article 2 de cette même loi.

Le solde structurel vise à séparer la partie du solde public qui dépend directement de la conjoncture de celle qui en est indépendante. Ainsi, le calcul du solde structurel repose sur la définition du cycle économique, et donc de l’écart du PIB effectif au PIB potentiel, appelé écart de production. Chaque année, le solde public peut se décomposer en : (1) une composante conjoncturelle qui reflète donc l’impact de la position dans le cycle sur les postes de recettes et de dépenses qui en sont affectés ; (2) des mesures ponctuelles et temporaires (one-offs), qui, parce qu’elles n’affectent pas le déficit durablement, sont exclues de l’évaluation du solde structurel (cf. annexe 5) ; et (3) de la composante structurelle (cf. encadré infra).

Les évaluations du solde structurel et des efforts structurels nécessitent l’estimation de l’« activité potentielle » (ou PIB potentiel) de l’économie française : il s’agit du niveau d’activité qui serait observée en l’absence de tensions sur l’utilisation des capacités de production, et qui correspond par conséquent à une croissance tendancielle qui n’est pas sujette aux fluctuations du cycle économique. Elle est estimée à partir d’une projection des gains tendanciels de productivité et de l’offre potentielle de travail, cette dernière dépendant de la démographie, des taux d’activité et du chômage structurel. Le terme « croissance potentielle » désigne l’évolution de l’activité potentielle.

Lajustement structurel (défini comme la variation du solde structurel) n’est cependant pas entièrement de nature discrétionnaire. Certains éléments échappent en effet au contrôle direct du Gouvernement et du Parlement comme les sur-réactions des recettes à l’évolution du PIB ainsi que l’évolution des recettes non fiscales (comme les dividendes). Dans le détail, l’ajustement structurel se décompose en un effort en recettes, un effort en dépense, la contribution de la clé en crédits d’impôt et une composante non discrétionnaire.

Leffort en recettes est défini comme le montant des mesures nouvelles en prélèvements obligatoires (hors mesures ponctuelles et temporaires). La définition de l’effort en recettes est inchangée par rapport à la précédente loi de programmation.

Leffort en dépense est défini comme la contribution de l’écart entre la croissance de la dépense publique réelle (hors crédits d’impôt, mesures ponctuelles et temporaires et effets de la conjoncture sur les dépenses chômage) et la croissance potentielle de l’économie.

Les crédits dimpôts réduisent les prélèvements obligatoires du montant de leur impact sur les recettes fiscales (c’est-à-dire des imputations et restitutions effectivement consenties aux entreprises et aux ménages), mais contribuent au solde public au niveau de la créance acquise par les contribuables, suivant une logique de « droits constatés ». Dès lors, afin de maintenir inchangé l’effort en recettes et sa cohérence avec le concept de taux de prélèvements obligatoires et de mesures nouvelles, ainsi que l’effort en dépense hors crédits d’impôts, un terme supplémentaire apparaît dans cette décomposition : c’est le terme de variation de l’écart entre le coût budgétaire et le coût en comptabilité nationale des crédits d’impôt restituables et reportables, c’est-à-dire en pratique le CICE et le CIR. Contrairement à la programmation précédente, la clé en crédits d’impôts est intégrée au sein de la ligne d’effort structurel dans la décomposition de l’ajustement structurel.

La composante non discrétionnaire, hors de contrôle du Gouvernement, est définie comme l’effet du décalage observé entre les élasticités spontanées des recettes et les élasticités usuelles auquel s’ajoute l’évolution des recettes hors prélèvements obligatoires. La définition est inchangée par rapport à la précédente loi de programmation.

L’actuelle méthodologie de calcul du solde structurel ne diffère de celle utilisée pour la précédente LPFP que par l’organisation des différents éléments dans la décomposition de l’ajustement structurel : au lieu de faire l’objet d’une ligne séparée, la clé en crédits d’impôts est maintenant intégrée dans l’effort structurel.

Annexe 2. Mode de calcul du solde structurel

Le solde structurel est le solde qui serait observé si le PIB était égal à son potentiel. Il correspond au solde public corrigé des effets du cycle économique et son calcul repose donc sur l’écart entre le PIB effectif noté Y et le PIB potentiel noté Y*.

Côté dépense, seules les dépenses de chômage sont supposées cycliques. Le reste des dépenses sont supposées être structurelles, soit parce qu’elles sont de nature discrétionnaire, soit parce que leur lien avec la conjoncture est difficile à mesurer. Côté recettes, on suppose que tous les prélèvements obligatoires (impôt sur le revenu [IR] et contribution sociale généralisée [CSG], impôt sur les sociétés [IS], cotisations sociales et les autres prélèvements obligatoires) dépendent de la conjoncture tandis que le reste des recettes est supposé être indépendant à la position de l’économie dans le cycle.

Élasticités (4) à lécart de production

 

Retenues depuis 2014

 

 Impôt sur le revenu

1,86

 

 CSG

1,86

 

 Impôt sur les sociétés

2,76

 

 Cotisations sociales

0,63

 

 Autres prélèvements obligatoires (dont TVA)

1,00

 

 Dépenses chômage

-3,23

 

Pour chaque catégorie de prélèvements obligatoires R, la composante structurelle Rs peut s’écrire en fonction de l’élasticité conventionnelle θ à l’écart de production OG : Rs = R(Y*/Y)θ

Le total des recettes structurelles est donc obtenu comme la somme des recettes structurelles, calculées Rs (pour les quatre catégories de prélèvements obligatoires cycliques : IR et CSG, IS, cotisations sociales et autres prélèvements obligatoires), additionnée au reste des recettes. Les dépenses structurelles s’obtiennent comme la différence entre les dépenses effectives et les dépenses structurelles liées au chômage, Dscho. Celles-ci sont déterminées de la même manière que pour les recettes structurelles, en fonction de l’élasticité conventionnelle ν des dépenses de chômage à l’écart de production. Dscho = Dcho(Y*/Y)ν

La différence entre les dépenses structurelles et les recettes structurelles constitue le solde structurel Ss. Enfin, le ratio du solde structurel au PIB potentiel en valeur retient le déflateur du PIB.

Annexe 3. Périmètre des mesures ponctuelles et temporaires à exclure de la mesure du solde structurel

Afin de traiter des mesures ponctuelles qui modifient de manière temporaire les soldes publics, le Pacte de stabilité et de croissance a introduit, dès sa révision de 2005, la notion de mesures « ponctuelles et temporaires » (one-off en anglais) qui n’ont pas d’impact pérenne sur le déficit public. Ce concept vise à couvrir des événements de très grande ampleur qui brouillent la lecture de l’équilibre des finances publiques. Le solde structurel est ainsi défini comme le solde public corrigé des effets du cycle économique et de ces mesures ponctuelles et temporaires.

I. - La définition générale des mesures ponctuelles et temporaires doit être complétée par une analyse au cas par cas

L’évolution des finances publiques résulte d’une multitude d’événements temporaires et exceptionnels. Il est donc malaisé de distinguer ce qui peut être considéré comme un élément exceptionnel et ce qui relève du domaine de l’ordinaire. Par exemple, beaucoup d’investissements publics sont par nature des dépenses « uniques » : la construction d’une route, d’une école ou d’une ligne à grande vitesse. Pour autant, il ne serait pas envisageable d’exclure les investissements du solde structurel. Cette problématique est générale en termes de finances publiques : les coûts des opérations extérieures (guerre, opération à l’étranger), les dépenses en cas de catastrophes naturelles, le déclenchement de garanties, peuvent représenter des montants importants, parfois temporaires, qu’il est difficile de caractériser.

La Commission Européenne a développé dans le rapport « Public Finance in the EMU 2015 » une doctrine concernant la classification de mesures en mesures ponctuelles et temporaires, reprise ensuite dans le « Vade Mecum on the Stability and Growth Pact » (édition 2016). La Commission Européenne donne 5 principes pour exclure une mesure du solde structurel (mesure dite one-off) :

1.      La mesure est intrinsèquement non récurrente ;

2.      Le caractère de one-off ne peut pas être décrété par la loi ou par une décision du gouvernement ;

3.      Les composantes volatiles des recettes ou des dépenses ne doivent pas être considérées comme one-offs ;

4.      Les mesures discrétionnaires conduisant à creuser le déficit public ne sont pas, sauf exception, des one-offs ;

5.      Seules les mesures ayant un impact significatif sur le solde public (i.e. supérieur à 0,1 % du PIB) peuvent être traitées en one-off.

Le principe n° 4 introduit une asymétrie dans l’appréciation de la Commission sur les mesures one-off. En effet, la Commission présume que les mesures qui creusent le solde public ont plus souvent un caractère permanent que celles qui l’améliorent, et donc ne peuvent être exclues sauf exception de la mesure du solde structurel, sans apporter de justification de fond à cette différence. À partir de ces principes, la Commission dresse une liste non-exhaustive de mesures pouvant être classés en one-off, parmi lesquelles :

-          Des recettes fiscales exceptionnelles liées à une mesure temporaire d’amnistie fiscale ;

-          Des décisions consistant à décaler de manière permanente le calendrier d’encaissement de recettes fiscales, ou de manière temporaire certaines dépenses ;

-          Des cessions importantes d’actifs non-financiers (immobilier par exemple) ;

-          Des coûts temporaires associés à la réponse à des désastres naturels majeurs ou d’autres événements exceptionnels.

En tout état de cause, la Commission adopte cependant une approche au cas par cas et se réserve la décision de classer ou non une mesure donnée comme « ponctuelle et temporaire ».

II. - La doctrine proposée par le Gouvernement pour la LPFP 2018-2022

Tout en reconnaissant que le caractère ponctuel et temporaire des mesures doit être apprécié au cas par cas, le Gouvernement propose un ensemble de critères permettant de mieux appréhender la notion de one-offs, regroupés en trois ensembles.

A. - Premier ensemble : les mesures définies comme one-off en amont de la programmation, au regard de leur effet ponctuel et temporaire sur les finances publiques : seule la réforme du CICE entre dans cette catégorie.

Ces mesures sont sélectionnées à la lumière de 4 principes.

(1) Lévénement concerné ne doit pas être récurrent

Aucune catégorie d’événements récurrents ne peut être exclue par principe de la mesure du solde structurel. Par exemple, les remises de dette aux États étrangers sont fréquentes en France, notamment dans le cadre du Club de Paris et de sa politique d’aide au développement. Exclure systématiquement de telles opérations viendrait biaiser la mesure du déficit. De même, les dépenses liées aux catastrophes naturelles ou aux opérations militaires extérieures, bien qu’irrégulières, sont récurrentes. Enfin, des opérations qui relèvent de la gestion habituelle du patrimoine non financier de l’État (investissement public, cessions d’immeubles, gestion du patrimoine immatériel comme les fréquences hertziennes) n’ont pas non plus vocation à être systématiquement corrigées en one-off. Seule une analyse au cas par cas permettrait de retirer celles dont l’ampleur complique la lecture du déficit public.

(2) Une année donnée, le nombre de one-offs doit être limité pour éviter de biaiser la mesure du déficit public

Ce principe pose un garde-fou face au grand nombre de mesures ponctuelles qui rythment en pratique l’évolution du solde des administrations publiques (investissements exceptionnels par exemple), pour éviter un recours trop systématique à la classification en one-off qui biaiserait le calcul du solde structurel.

(3) Lévénement concerné doit entraîner un impact budgétaire significatif

Il convient ainsi de n’envisager que des facteurs qui peuvent potentiellement représenter un impact budgétaire positif ou négatif important.

(4) Toute mesure qui améliore le solde public aujourdhui pour le dégrader systématiquement dans le futur doit être considéré comme un one-off

Suivant les règles du Système Européen des Comptes 1995 (SEC 95), c’était le cas des soultes liées à la reprise des obligations futures de paiement de retraite (les administrations récupèrent en une fois une compensation correspondant à la valeur actualisée des déséquilibres futurs). Néanmoins, depuis la publication des comptes suivant les règles du SEC 2010, les soultes reçues en contrepartie d’engagement de retraites n’améliorent plus le déficit en une seule fois mais sur de nombreuses années, ce qui supprime la nécessité de les classer en one-off.

Au total, suivant ces critères, seules les réformes du CICE et du CITE prévues toutes les deux en 2019 doivent être qualifiées ex-ante de one-off.

Le CICE est un avantage accordé sur la masse salariale versée par les entreprises. La réforme proposée nen modifie ni le niveau, ni le fait générateur économique. La transformation du CICE en baisse de cotisations sociales au 1er janvier 2019 permet de conserver inchangé l’avantage auxquelles les entreprises ont droit sur leur masse salariale. Alors que la masse salariale versée courant 2018 permet d’obtenir un droit au CICE (6 % de la MS < 2,5 SMIC), la masse salariale versée courant 2019 est soumise à des réductions de cotisations équivalentes : il n’y a donc ni interruption ni modulation de la réduction du coût du travail entre 2018 et 2019. Seule la date de paiement est avancée, avec un changement de calendrier aboutissant à un double coût en 2019.

La fraction de la baisse de cotisation venant en plus de l’ancien CICE (qui correspond à une extension de champ) constitue une mesure supplémentaire, indépendante de la problématique de la bascule.

Le double coût en 2019 est dû à une modification pérenne du calendrier de versement de lavantage équivalent au CICE. En comptabilité nationale, des modifications non-pérennes du calendrier de paiement de certains impôts ou de dépenses de subventions doivent être corrigées, afin de ne pas perturber la mesure du solde public pour des raisons purement budgétaires (5). En revanche, dans le cas de transferts dont le montant final n’est établi avec certitude que dans une période comptable ultérieure à leur fait générateur économique, comme c’est le cas des crédits d’impôts (6), les modifications pérennes ne sont pas corrigées et peuvent conduire à des pics temporaires de recettes ou de dépenses (7).

Le double coût en 2019 doit être exclu de la mesure sur solde structurel car il est ponctuel et temporaire. Le changement de date de versement du CICE intervient en effet en une seule fois et son effet sur le solde public ne porte que sur une année.

Ensemble 1 : Mesures considérées comme one-off en amont de la programmation au regard de leur impact ponctuel et temporaire

 LPFP 2014-2017 (SEC 2010) : Aucune.

LPFP 2018-2022 : Réforme du CICE.

B. - Deuxième ensemble : les événements dont l’impact budgétaire est substantiel mais dont la temporalité est incertaine

Au moment de la programmation pluriannuelle, il convient de traiter de manière spécifique les éléments connus ex ante, pour lesquels l’incertitude entourant les montants concernés ou les dates d’occurrence ou d’imputation est importante. Cette logique prévaut dans le traitement en one-off des contentieux fiscaux de série (ou « de masse ») dont l’instruction est en cours. Cette incertitude ne vient pas biaiser la mesure du solde structurel, puisque les montants sont déjà provisionnés dans la trajectoire initiale.

Ensemble 2 : Événements importants financièrement mais incertains en termes de temporalité, considérées comme one-off en amont des lois de programmation.

 LPFP 2014-2017 : contentieux fiscaux de masse.

 LPFP 2018-2022 : contentieux fiscaux de masse.

C. - Troisième ensemble : dans le cadre du contrôle ex post, des événements imprévus ayant un impact unique sur le solde public peuvent être traités en one-off

Le traitement des événements imprévus dans le cadre du contrôle ex post doit être apprécié au regard des règles organiques relatives au mécanisme de correction des écarts.

Si, en cours de mise en œuvre de la programmation, des événements d’impact très important apparaissent, qui n’avaient pu être anticipés ex ante et qui ne modifient pas la trajectoire de moyen terme, il serait inutile de prendre des mesures pour corriger la déviation compte tenu de leur caractère temporaire. Du point de vue des règles organiques, il est alors pragmatique de les traiter en one-off pour éviter de déclencher inutilement le mécanisme de correction. Les critères de taille et de non pérennité sont essentiels pour juger des mesures à inclure dans cette catégorie.

Ensemble 3 : Événements imprévus à intégrer en tant que one-offs ex post :

LPFP 2014-2017 : Changement de temporalité dans l’enregistrement en comptabilité nationale des budgets rectificatifs de l’Union Européenne fin 2014.

LPFP 2018-2022 : Aucune information à ce stade. Exceptionnel et non anticipé par nature.

Annexe 4. Précisions méthodologiques concernant le budget quinquennal

Définition des périmètres et objectifs des normes des dépenses sur lÉtat

La nécessité de rénover les instruments de maîtrise des dépenses de l’État

La présente LPFP définit un système rénové de norme à deux niveaux : une norme sur les dépenses pilotables de l’État et un objectif de dépenses totales de l’État.

Les normes de dépenses fixées sur les périmètres hors dette et pensions et « zéro volume » ont été globalement utiles pour maîtriser la dépense de l’État. Ces instruments sont cependant d’autant plus efficaces qu’ils portent sur des dépenses sur lesquelles il est possible d’agir. Plusieurs ajustements sont donc apparus souhaitables pour renforcer l’effectivité du pilotage de la dépense :

-          Le prélèvement sur recettes à destination de l’Union européenne, qui était décompté au sein de la norme hors dette et pensions, est une dépense contrainte i) en pluriannuel par les cadres financiers pluriannuels européens négociés tous les six ans et ii) annuellement, par la budgétisation initiale de l’UE et le taux d’exécution effectif du budget de l’UE qui connaît de forte variations à la fois d’année en année (rattrapage par exemple de la sous-exécution des plafonds du cadre financier pluriannuel) et au cours de l’année (à la suite de l’adoption de budgets rectificatifs par exemple). Selon les années, les variations du PSR UE ont pu constituer des effets d’aubaine pour les autres dépenses ou au contraire des contraintes insurmontables. En raison de ces aléas et de son caractère non pilotable, ce prélèvement n’est donc pas intégré à la nouvelle norme de dépenses pilotables de l’État ;

-          S’agissant du prélèvement sur recettes à destination des collectivités locales, son inclusion dans la norme « hors dette et pensions » a pesé dans les choix de limitation des concours à l’inflation, puis à la stabilisation en valeur, enfin à une baisse dans le cadre du plan d’économies adopté en 2014. Le Gouvernement a fait le choix d’un nouveau mode de relation avec les collectivités locales, fondé sur une approche contractuelle. Il est ainsi assumé de demander un effort aux collectivités locales en contrepartie de la stabilité de leurs dotations, indépendamment des choix faits sur les autres dépenses de l’État ;

-          En crédits, n’étaient à ce stade pris en compte que les crédits ouverts sur le budget général. L’analyse fine des comptes spéciaux amène à considérer que certains portent des dépenses assimilables à de la dépense budgétaire (à l’exception des comptes d’opérations financières et des comptes prévus par la LOLF pour les opérations patrimoniales et les dépenses de pensions). Il en va de même pour les budgets annexes. Afin d’en renforcer la maîtrise, il est proposé de les intégrer dans le périmètre de la norme des dépenses pilotables de l’État ;

-          Les prélèvements sur fonds de roulement ne se traduisent par ailleurs pas par une baisse automatique de la dépense finale des opérateurs. Le principe d’une limitation des réserves de certains établissements demeure un objectif pertinent de maitrise des finances publiques. Toutefois, compte tenu de la complexité induite par le décompte des prélèvements sur fonds de roulement au sein de la norme de dépense, il est proposé de ne plus les retraiter des plafonds de taxes affectées au sens de l’article 46 de la LFI 2012.

Périmètre de la norme de dépenses pilotables de l’État

La norme de dépenses pilotables de l’État comprend les dépenses du budget général, des budgets annexes hors mission « Remboursements et dégrèvements » et « Investissements d’avenir », hors charge de la dette et hors contributions « Pensions », les plafonds de taxes affectées à des tiers autres que les collectivités locales et la sécurité sociale, les dépenses des comptes d’affectation spéciale (hors comptes d’affectation spéciale « Pensions », « Participations financières de l’État », et hors programmes de désendettement, ou portant à titre principal sur des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers) et le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ». Ces modifications mettent en œuvre certaines des recommandations de la Cour des comptes dans son rapport sur le budget de l’État 2015 et représentent sur la base du projet de loi de finances pour 2018, 257,9 Md€.

Tableau : Programme des comptes spéciaux et budgets annexes portant des dépenses pilotables intégrés à la norme de dépenses pilotables de lÉtat

Périmètre de l’objectif de dépenses totales de l’État

L’objectif de dépenses totales de l’État ajoute au périmètre de la norme de dépense pilotable la charge de la dette, les pensions et les prélèvements sur recettes et autres concours financiers en faveur des collectivités locales ainsi que les dépenses d’investissement d’avenir et les dépenses de certains comptes d’affectation spéciale. Il comprend ainsi les dépenses du budget général et budgets annexes hors mission « Remboursements et dégrèvements » et hors contributions « Pensions », les plafonds de taxes affectées à des tiers autres que les collectivités locales et la sécurité sociale, les prélèvements sur recettes à destination de l’Union européenne et des collectivités territoriales, ainsi que la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux régions, au Département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane telle que définie à l’article 149 de la LFI pour 2017, les dépenses des comptes d’affectation spéciale (hors compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » et programmes de désendettement) et le compte de concours financiers « Avances à l’audiovisuel public ». Les éventuels flux financiers entre ces différents agrégats sont retraités.

Champ constant et charte de budgétisation

Le principe du champ constant

La réalité de la dynamique de la dépense s’apprécie entre deux lois de finances consécutives, à périmètre (ou champ) constant. En effet, le périmètre des dépenses de l’État peut être amené à évoluer d’une année sur l’autre, des dépenses ou recettes étant nouvellement inscrites au budget de l’État, d’autres à l’inverse étant sorties du périmètre du budget de l’État. Pour apprécier la dynamique réelle de la dépense de l’État sur un champ identique (champ « constant ») entre deux exercices, le budget doit donc être retraité de ces modifications de périmètre. À cette fin, seuls sont intégrés au calcul de l’évolution de la norme de dépenses pilotables de l’État prévue par l’article 8 de la loi de programmation les mouvements de dépenses et les affectations de recettes ayant pour effet d’accroître ou de diminuer le niveau de la dépense publique.

A contrario, les mouvements constituant une simple réimputation au sein du périmètre de la norme (par exemple, entre budget général et comptes spéciaux) ou les mouvements équilibrés en recettes et en dépenses, entre ce périmètre et une autre entité (par exemple, les collectivités locales), ne doivent pas être comptabilisés dans ce calcul. Ces mouvements, équilibrés en recettes et en dépenses, sont appelés mesures de transfert quand ils ont lieu au sein du périmètre de la norme ou mesures de périmètre quand ils ont lieu entre ce même périmètre et une autre entité. Leur prise en compte permet de passer du champ constant au champ courant, sur lequel est présenté le projet de loi de finances de l’année, mais ils sont sans influence sur l’appréciation de la dynamique du budget.

La charte de budgétisation

L’ensemble des règles qui suivent constituent la charte de budgétisation de l’État, qui permet, en précisant les modalités de prise en compte des modifications de champ dans le calcul de la norme, de déterminer l’évolution de la dépense à champ constant. Cette charte tient compte de l’intégration dans la norme de dépense de certaines taxes affectées, réalisée depuis 2012 et des dépenses pilotables des comptes spéciaux et budgets annexes réalisée cette année.

(i) Les mesures de périmètre, qui donnent lieu à des inscriptions ou à l’inverse à des suppressions de crédits qui n’ont pas à être intégrées dans l’évolution des dépenses à champ constant, recouvrent les situations dans lesquelles l’État :

-          transfère à une autre entité une dépense qu’il assumait auparavant, en transférant parallèlement les ressources d’un même montant permettant de la financer ;

-          inscrit à son budget au sein de la norme de dépenses pilotables une dépense nouvelle auparavant financée par une autre entité, ainsi que des recettes d’un même montant ;

-          prend en charge une dépense financée auparavant par dotations en capital ou par une entité supprimée.

Les mouvements liés à la décentralisation illustrent le premier cas de figure. Le deuxième correspond à des mesures de rebudgétisation, par exemple la réintégration concomitante et équilibrée au sein du budget général d’une recette affectée non plafonnée à un opérateur et des dépenses qu’elle finance, ou à la création d’un compte spécial avec intégration au sein de la norme d’une recette et de la dépense qu’elle finance. En revanche, dans le cas d’une recette affectée plafonnée et donc déjà comptabilisée dans la norme de dépenses pilotables, il s’agit d’une mesure de transfert au sein du périmètre de la norme (cf. infra). Le troisième cas de figure, enfin, n’accroît ni la dépense publique ni le déficit public, puisque la dépense existait déjà auparavant et était financée par une recette non prise en compte dans le solde public selon les règles de la comptabilité nationale.

(ii) Les mesures de transfert, parce qu’elles concernent des mouvements de crédits à l’intérieur du périmètre de la norme de dépense pilotable.

Les mouvements de transferts les plus fréquents sont réalisés entre missions du budget général ; néanmoins, ils peuvent également être effectués entre crédits du budget général ou comptes spéciaux intégrés dans la norme par exemple.

De même, la baisse du plafond d’une taxe affectée à un organisme accompagnée de la création ou d’une hausse à due concurrence d’une subvention à ce même organisme constitue une mesure de transfert (cf. infra).

(iii) Les modifications du plafonnement des taxes et autres recettes affectées peuvent recouvrir quatre situations différentes :

-          modification du plafond d’une taxe ou autre recette existante et déjà plafonnée en loi de finances.

La modification du plafond se traduit par une variation des ressources allouées par l’État à l’entité. La modification de plafond dans la loi de finances a le même effet que l’évolution à la baisse (ou à la hausse) d’une subvention pour charge de service public inscrite en dépense et est donc prise en compte dans la norme de dépenses pilotables. Ainsi, si le plafond est relevé, on comptabilise une mesure nouvelle au sein de la norme de dépense. Si, à l’inverse, le plafond est abaissé, on comptabilise une économie dès lors que le niveau du plafond est inférieur ou égal au rendement prévisionnel de la taxe présenté dans l’annexe « Voies et moyens » du projet de loi de finances (PLF), pour un montant correspondant à la baisse effective des ressources de l’organisme. Si le plafond est abaissé mais qu’il demeure supérieur au rendement prévisionnel de la taxe, une mesure de périmètre est comptabilisée. De la même façon, la suppression d’une taxe affectée, qui peut être assimilée à la suppression de tout ou partie des ressources allouées par l’État à l’entité si elle n’est pas remplacée par une dotation budgétaire équivalente, est comptabilisée comme une économie au sein de la norme de dépense ;

-          ajout dans l’article de plafonnement d’une taxe ou autre recette déjà existante mais qui n’était pas jusqu’alors plafonnée ;

La mesure de plafonnement est alors traitée comme une mesure de périmètre pour le montant correspondant au plafond si celui-ci est supérieur ou égal à l’évaluation du produit de la recette. L’économie liée, le cas échéant, à la fixation du plafond à un niveau inférieur à celui de l’évaluation de recette est quant à elle décomptée dans la norme de dépenses pilotables. Il s’agit bien d’une évolution des ressources allouées à l’entité ;

-          nouvelle affectation de recette ;

Toute nouvelle affectation de recette à un organisme public autre que les administrations de sécurité sociale, les collectivités territoriales, et les établissements publics de coopération intercommunale est prise en compte intégralement dans la norme de dépenses pilotables, pour un montant égal au niveau du plafonnement. Cette mesure est en effet assimilable à l’attribution d’une subvention à un organisme.

-          rebudgétisation d’une recette affectée plafonnée ;

En cas de rebudgétisation d’une recette affectée à un organisme, qui fait déjà l’objet d’un plafonnement en loi de finances et qui est donc prise en compte au sein de la norme de dépenses, le versement d’une subvention à cet organisme constitue une mesure de transfert dès lors que le montant de cette subvention est identique au rendement prévisionnel de la recette effectivement perçue par l’organisme. Dans ce cas, l’écart entre la subvention versée et le plafond de la recette est pris en compte au sein de la norme et constitue ainsi une économie (subvention inférieure à l’ancien plafond) ou une dépense nouvelle (subvention supérieure à l’ancien plafond). Si le rendement prévisionnel de la recette est supérieur ou égal au plafond de celle-ci, la rebudgétisation constitue une mesure de transfert. À l’inverse, si le rendement prévisionnel est inférieur au plafond, la rebudgétisation donne lieu, d’une part, à une mesure de périmètre diminuant le niveau de la norme de dépense pour un montant égal à l’écart entre le plafond de la recette et son rendement prévisionnel et, d’autre part, à une mesure de transfert, du montant prévisionnel de la recette. La hausse des crédits budgétaires par transfert est ainsi limitée au niveau du rendement prévisionnel de la recette qui est rebudgétisée, toute hausse supplémentaire étant comptabilisée comme une mesure nouvelle.

(iv) Flux financiers entre les agrégats constitutifs de la norme :

En cas de flux financiers entre les différents agrégats constitutifs de la norme (par exemple dans les conditions prévues au I de l’article 21 de la loi organique sur les lois de finances), la dépense initiale est retraitée, afin d’éviter un compte double au sein de la norme de dépenses pilotables ou de l’objectif de dépenses totales de l’État.

Les mouvements de dépenses et de recettes considérés comme des mesures de périmètre, les propositions d’extension du champ du plafonnement des taxes affectées sont présentés dans l’exposé général des motifs du projet de loi de finances de l’année.

Nature et portée des autorisations du budget pluriannuel

Le budget pluriannuel détermine deux niveaux de plafonds de crédits de paiement à respecter en construction de loi de finances initiale (LFI) chaque année de la période de programmation.

(i) Il comporte d’abord, pour les deux premières années de la programmation, un plafond global de crédits de paiement pour la norme de dépenses pilotables de l’État conformément à l’article 8 de la présente loi. Ce plafond est indépendant de l’hypothèse d’inflation et correspond, à champ constant, au niveau des crédits fixé en loi de finances initiale pour 2018. Pour les années 2020 à 2022, les dépenses sur ce champ devront baisser de 1 % en volume chaque année.

(ii) Le budget pluriannuel comporte par ailleurs les plafonds 2018, 2019 et 2020 de chacune des missions du budget général (cf. article 12 de la loi de programmation). Ces derniers sont exprimés en crédits de paiement.

Pour l’année 2018, les plafonds de dépenses établis au niveau des missions et la répartition par programme correspondent à ceux du PLF pour 2018.

Pour l’année 2019, les crédits par missions sont des plafonds limitatifs et définitifs, hors répartition éventuelle de la réserve de budgétisation pour financer des aléas imprévisibles et incompressibles. Ils feront l’objet d’une déclinaison au niveau prévu par la loi organique (programmes, actions, titres et catégories) dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019.

Pour 2020, les crédits par mission pourront faire l’objet d’ajustements, dans le respect du plafond global de dépenses. La troisième année de la programmation (2020) constituera en effet le point de départ d’un nouveau budget pluriannuel. Des ajustements dans la répartition des crédits par mission seront possibles pour la première année de la nouvelle programmation (2020), tout en respectant le montant global des dépenses sous norme de dépenses pilotables prévu dans le budget pluriannuel initial pour les années 2020 à 2022 qui est inférieur à la programmation initiale des missions pour l’année 2020.

Chaque année, le Gouvernement établit et transmet au Parlement, au plus tard avant le débat d’orientation des finances publiques prévu par l’article 48 de la LOLF, un bilan des ajustements opérés par rapport aux plafonds fixés dans le budget pluriannuel, tant en ce qui concerne le plafond global de dépenses sous norme de dépenses pilotables que les plafonds par mission, conformément à l’article 27 de la présente loi.

Annexe 5. Précisions méthodologiques concernant la mesure de la croissance des dépenses au sein de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam)

Le principe du champ constant

La réalité de la dynamique de la dépense au sein de l’Ondam s’apprécie entre deux lois de financement de la sécurité sociale consécutives, à périmètre (ou champ) constant. En effet, le périmètre de l’Ondam peut être amené à évoluer d’une année sur l’autre, des dépenses ou recettes étant nouvellement intégrées dans le champ de l’objectif, d’autres à l’inverse en étant sorties. Pour apprécier la dynamique réelle de la dépense au sein de l’Ondam sur un champ identique (champ constant) entre deux exercices, l’Ondam doit en conséquence être retraité de ces modifications de périmètre, selon les règles décrites ci-après. Les mouvements constituant une simple réimputation entre les sous-objectifs de l’Ondam, les mouvements d’intégration ou de sortie du périmètre de l’Ondam de dépenses demeurant financées par les régimes d’assurance maladie, maternité, invalidité, décès ou les mouvements qui traduisent une évolution entre le champ des dépenses de ces régimes d’assurance et celui d’autres entités (par exemple, l’État) équilibrée par un mouvement similaire en recettes, ne doivent pas être comptabilisés dans ce calcul. Ces mouvements sont appelés mesures de transfert quand ils ont lieu entre sous-objectifs ou mesures de périmètre quand ils ont lieu entre le périmètre de l’Ondam et une autre entité (qui peut être la sécurité sociale). Leur prise en compte permet de passer du champ constant au champ courant, sur lequel est présenté l’Ondam de l’année, mais ils sont sans influence sur l’appréciation de la dynamique de ces dépenses.

La charte relative à la détermination de lévolution de lOndam

L’ensemble des règles qui suivent constituent la charte relative à la détermination de l’évolution de l’Ondam, qui permet, en précisant les modalités de prise en compte des modifications de champ dans le calcul de la norme, de déterminer l’évolution de la dépense au sein de l’Ondam à champ constant.

i) Les mesures de périmètre, qui intègrent au sein de l’Ondam, ou à l’inverse sortent de son champ, des dépenses, qui n’ont pas à être prises en compte dans le calcul du taux d’évolution de l’Ondam à champ constant, recouvrent les situations dans lesquelles :

- la sécurité sociale transfère à une autre entité une dépense qu’elle assumait auparavant au sein de l’Ondam, en transférant parallèlement des recettes d’un même montant permettant de la financer ;

- la sécurité sociale prend en charge au sein de l’Ondam une dépense auparavant financée par une autre entité et reçoit des recettes d’un même montant permettant de la financer ;

 - est intégrée dans le périmètre de l’Ondam, ou à l’inverse sortie de son champ, une dépense déjà prise en charge par la sécurité sociale dès lors que cette opération n’a pas d’impact sur son solde ;

- est intégrée dans le périmètre de l’Ondam une nouvelle dépense de la sécurité sociale qui reçoit en contrepartie une recette nouvelle d’un même montant.

Les deux premiers cas de figure correspondent essentiellement à des transferts de dépenses entre l’État et la sécurité sociale, compensés par des transferts de recettes équivalents, visant à rationaliser les financements compte tenu de la nature des dépenses. L’élargissement du champ de l’Ondam pour y intégrer des dépenses d’assurance maladie que l’on souhaite soumettre à la norme illustre le troisième cas de figure. Enfin le quatrième cas de figure comprend la création de prestations financées par un prélèvement entièrement nouveau (et non un transfert)

Ces opérations sont intégralement neutralisées dans le calcul de l’évolution de l’Ondam à périmètre constant. Dans le cas où le montant de la dépense diffère de celui de la recette perçue ou transférée en contrepartie, la différence est prise en compte dans l’Ondam en tant qu’économie dans le cas d’une diminution des dépenses nettes de la sécurité sociale (recette perçue supérieure à la dépense intégrée à l’Ondam, ou recette rendue inférieure à la dépense transférée à une autre entité) ou en tant que dépense supplémentaire dans le cas d’une augmentation.

ii) Les mesures de transfert, parce qu’elles concernent des réimputations de dépense entre sous-objectifs de l’ONDAM, n’ont pas d’impact sur le niveau de celle-ci.

Les mouvements de transferts les plus fréquents concernent les opérations de fongibilité entre les crédits hospitaliers et médico-sociaux.

iii) Dès lors que l’évolution de l’ONDAM est présentée en PLFSS , les éventuelles mesures d’annulation de crédits décidées au sein des enveloppes fermées listées ci-après et intervenant en fin de gestion [postérieurement au vote de la loi de financement de la sécurité sociale] ne sont pas prises en compte dans le calcul du taux d’évolution des dépenses de l’ONDAM dans la limite du montant de la sous-consommation de l’ONDAM constatée, le cas échéant.

Les crédits concernés portent sur les missions d’intérêt général, les aides à la contractualisation, la dotation annuelle de financement, les mises en réserve au titre du coefficient prudentiel et la dotation au fonds d’intervention régional.

Annexe 6.Table de passage entre les dispositions de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques et le présent rapport annexé

Table de passage entre les dispositions de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques et le présent rapport annexé

La loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques (article 5) prévoit que le rapport annexé contienne les éléments suivants :

Parties correspondantes du rapport annexé

 

 1° Les hypothèses et les méthodes retenues pour établir la programmation

 Ensemble du rapport, notamment partie I sur le contexte macroéconomique

 

 2° Pour chacun des exercices de la période de la programmation, les perspectives de recettes, de dépenses, de solde et d’endettement des administrations publiques et de chacun de leurs sous-secteurs, exprimées selon les conventions de la comptabilité nationale

 Parties II et III : La trajectoire des finances publiques et analyse par sous-secteur

 

 3° Pour chacun des exercices de la période de la programmation, l’estimation des dépenses d’assurance vieillesse et l’estimation des dépenses d’allocations familiales

 Partie III C : Dépenses d’assurance vieillesse et d’allocations familiales

 

 4° Pour chacun des exercices de la période de la programmation, les perspectives de recettes, de dépenses et de solde des régimes complémentaires de retraite et de l’assurance chômage, exprimées selon les conventions de la comptabilité nationale

 Partie III C : Dépenses des régimes complémentaires de retraite et de l’assurance chômage

 

 5° Les mesures de nature à garantir le respect de la programmation

 Partie III (la trajectoire des finances publiques par sous-secteur)

 

 6° Toute autre information utile au contrôle du respect des plafonds et objectifs mentionnés aux 1° et 2° de l’article 2, notamment les principes permettant de comparer les montants que la loi de programmation des finances publiques prévoit avec les montants figurant dans les lois de finances de l’année et les lois de financement de la sécurité sociale de l’année

 Partie III (la trajectoire des finances publiques par sous-secteur)

 

 7° Les projections de finances publiques à politiques inchangées, au sens de la directive 2011/85/UE du Conseil, du 8 novembre 2011, sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres, et la description des politiques envisagées pour réaliser l’objectif à moyen terme au regard de ces projections

 Partie III.C

 

 8° Le montant et la date d’échéance des engagements financiers significatifs de l’État en cours n’ayant pas d’implication immédiate sur le solde structurel

 Partie II 5 Encadré « Mesures exceptionnelles et temporaires - Hypothèses retenues dans la programmation »

 

 9° Les modalités de calcul de l’effort structurel mentionné à l’article 1er, la répartition de cet effort entre chacun des sous-secteurs des administrations publiques et les éléments permettant d’établir la correspondance entre la notion d’effort structurel et celle de solde structurel

 Partie II D : Évolution du solde structurel et de l’effort structurel des administrations publiques.)

 

 10° Les hypothèses de produit intérieur brut potentiel retenues pour la programmation des finances publiques. Le rapport présente et justifie les différences éventuelles par rapport aux estimations de la Commission européenne

 Partie I (les hypothèses de produit intérieur brut potentiel et la justification des écarts par rapport aux estimations de la Commission européenne)

 

 11° Les hypothèses ayant permis l’estimation des effets de la conjoncture sur les dépenses et les recettes publiques, et notamment les hypothèses d’élasticité à la conjoncture des différentes catégories de prélèvements obligatoires et des dépenses d’indemnisation du chômage. Le rapport présente et justifie les différences éventuelles par rapport aux estimations de la Commission européenne

 Annexe 2

 

 12° Les modalités de calcul du solde structurel annuel mentionné à l’article 1er

 Annexe 2

 

 Ce rapport présente également la situation de la France au regard des objectifs stratégiques européens

 Partie II A

 

(1) En données CVS-CJO. Les données brutes pourraient être 0,15 pt en-dessous d’après l’Insee en 2017.

(2) Recommandation du Conseil, 22 mai 2017.

(3) Formation brute de capital fixe et acquisition moins cession d’actifs non financiers non produits.

(4) Plus précisément semi-élasticité à l’écart de production

(5) Cf. “Manual on Government deficit and debt” (MGDD) edition 2016, §II.3 pp.93 et 94.

(6) Cf. MGDD 2016, §II.2.26 p.90 “The time of recording of the expenditure should be when government recognizes the claim for its whole amount […]”.

(7) Une difficulté vient du fait que la bascule transforme un crédit d’impôt de type « Subvention » (D.3) en une moindre recette de « Cotisation sociales » (D.6), et que les deux opérations ont une date d’enregistrement recommandée différente en comptabilité nationale (contemporain aux salaires pour le D.6, décalé de 1 an pour le crédit d’impôt en D.3). Cependant, dans les deux cas, le fait générateur économique du transfert correspond aux salaires versés, qui n’est pas modifié par la bascule.

M. le président. L’amendement n° 1, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

RAPPORT ANNEXÉ

I. – Au début du 1 du A du III

Insérer un tableau ainsi rédigé :

 

LFI 2017

LFI 2017 format 2018

PLF 2018

2019

2020

Crédits ministériels

234,6

236,0

241,3

242,6

247,5

Taxes affectées

9,6

9,3

9,1

8,9

9,0

Budgets annexes et comptes spéciaux pilotables

13,3

13,3

13,3

13,8

14,1

Retraitements des flux internes au budget de l’État

-5,8

-5,8

-5,8

-5,9

-5,9

Économies complémentaires Action publique 2022

 

 

 

 

-4,1

Norme de dépenses pilotables

251,7

252,8

257,9

259,5

260,5

Évolution annuelle en volume

1,0 %

-0,5 %

-1,0 %

Transferts aux collectivités territoriales

47,0

47,1

47,0

47,1

47,5

Dépenses du CAS Pensions (hors programme 743)

55,7

55,7

56,5

57,8

59,0

Autres dépenses de comptes d’affectation spéciale

1,5

1,5

1,8

2,0

1,0

Charge de la dette

41,5

41,5

41,2

41,9

44,7

Prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne

18,7

18,7

19,9

23,3

24,1

Investissements d’avenir

0,0

0,0

1,1

1,1

1,9

Objectif de dépenses totales de lÉtat

416,2

417,4

425,4

432,7

438,7

Évolution annuelle en volume

0,9 %

0,6 %

0,0 %

II. – Compléter le paragraphe intitulé : « Périmètre de la norme de dépenses pilotables de l’État » de l’annexe 4 par un tableau ainsi rédigé :

Libellé mission

Numéro programme

Libellé programme

Aides à l’acquisition de véhicules propres

791

Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres

Aides à l’acquisition de véhicules propres

792

Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

751

Structures et dispositifs de sécurité routière

Contrôle de la circulation et du stationnement routiers

753

Contrôle et modernisation de la politique de la circulation et du stationnement routiers

Développement agricole et rural

775

Développement et transfert en agriculture

Développement agricole et rural

776

Recherche appliquée et innovation en agriculture

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

723

Opérations immobilières nationales et des administrations centrales

Gestion du patrimoine immobilier de l’État

724

Opérations immobilières déconcentrées

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

785

Exploitation des services nationaux de transport conventionnés

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

786

Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés

Transition énergétique

764

Soutien à la transition énergétique

 

 

Avances à l’audiovisuel public

841

France Télévisions

Avances à l’audiovisuel public

842

ARTE France

Avances à l’audiovisuel public

843

Radio France

Avances à l’audiovisuel public

844

France Médias Monde

Avances à l’audiovisuel public

845

Institut national de l’audiovisuel

Avances à l’audiovisuel public

847

TV5 Monde

 

 

Contrôle et exploitation aériens

612

Navigation aérienne

Contrôle et exploitation aériens

613

Soutien aux prestations de l’aviation civile

Contrôle et exploitation aériens

614

Transports aériens, surveillance et certification

Publications officielles et information administrative

623

Édition et diffusion

Publications officielles et information administrative

624

Pilotage et ressources humaines

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat auprès du ministre de laction et des comptes publics. Il s’agit de corriger une erreur purement matérielle en insérant dans le texte des tableaux qui doivent y figurer.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Favorable, monsieur le président.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble constitué de l’article 1er et du rapport annexé.

(Larticle 1er et le rapport annexé sont adoptés.)

Chapitre Ier

Les objectifs généraux des finances publiques

Article 1er et rapport annexé (Pour coordination) (Texte non modifié par la commission)
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Article&#160;3

Article 2

(Non modifié)

L’objectif à moyen terme des administrations publiques mentionné au b du 1 de l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, signé à Bruxelles le 2 mars 2012, est fixé à -0,4 % du produit intérieur brut potentiel.

Dans le contexte macroéconomique et selon les hypothèses et les méthodes retenues pour établir la programmation, décrits dans le rapport mentionné à l’article 1er de la présente loi, l’objectif d’évolution du solde structurel des administrations publiques, défini au rapport annexé à la présente loi, s’établit, conformément aux engagements européens de la France, comme suit :

 

(En %)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde structurel

-2,2

-2,1

-1,9

-1,6

-1,2

-0,8

Ajustement structurel

0,3

0,1

0,3

0,3

0,4

0,4

  – (Adopté.)

Article 2
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Article 3&#160;bis

Article 3

Dans le contexte macroéconomique et selon les hypothèses et les méthodes retenues pour établir la programmation mentionnée à l’article 2 :

1° L’évolution du solde public effectif, du solde conjoncturel, des mesures ponctuelles et temporaires, du solde structurel et de la dette publique s’établit comme suit :

 

(En points de produit intérieur brut)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public effectif (1 + 2 + 3)

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Solde conjoncturel (1)

-0,6

-0,4

-0,1

0,1

0,3

0,6

Mesures ponctuelles et temporaires (2)

-0,1

-0,2

-0,9

0,0

0,0

0,0

Solde structurel (en points de PIB potentiel) (3)

-2,2

-2,1

-1,9

-1,6

-1,2

-0,8

Dette des administrations publiques

96,7

96,9

97,1

96,1

94,2

91,4

 ;

2° L’évolution du solde public effectif, décliné par sous-secteur des administrations publiques, s’établit comme suit :

 

(En points de produit intérieur brut)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Solde public effectif

-2,9

-2,8

-2,9

-1,5

-0,9

-0,3

Dont : (ligne supprimée)

- administrations publiques centrales (ligne supprimée)

- administrations publiques locales (ligne supprimée)

- administrations de sécurité sociale (ligne supprimée)

  – (Adopté.)

Article&#160;3
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Article&#160;4

Article 3 bis

I. - L’objectif d’évolution des dépenses des administrations publiques, déduction faite des mesures discrétionnaires en matière de recettes, mentionné au b du 1 de l’article 3 du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, signé à Bruxelles le 2 mars 2012, s’établit comme suit :

 

(En %)

 

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépenses pilotables nettes (en valeur)

2,2

2,2

1,6

1,2

1,9

1,6

Dépenses pilotables nettes (en volume)

1,5

1,0

0,3

-0,3

0,1

-0,2

II. - L’évolution du ratio d’endettement des administrations publiques corrigé des effets de la conjoncture s’établit comme suit :

(En points de PIB potentiel)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Variation du ratio d’endettement corrigé des effets de la conjoncture

1,3

1,0

1,4

-0,3

-1,3

-2,2

  – (Adopté.)

Article 3&#160;bis
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Article&#160;5

Article 4

(Pour coordination)

(Non modifié)

L’objectif d’effort structurel des administrations publiques s’établit comme suit :

 

(En points de produit intérieur brut potentiel)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Effort structurel

0,0

0,2

0,3

0,4

0,5

0,5

Dont :

- mesures nouvelles sur les prélèvements obligatoires (hors crédits dimpôts)

-0,1

-0,3

-0,1

-0,5

0,0

0,1

- effort en dépense (hors crédits dimpôts)

0,0

0,4

0,4

0,5

0,5

0,6

- clé de crédits dimpôts

0,1

0,0

0,0

0,4

0,0

-0,2

  – (Adopté.)

Article&#160;4
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Article&#160;6&#160;bis

Article 5

(Non modifié)

Dans le contexte macroéconomique et selon les hypothèses et les méthodes retenues pour établir la programmation mentionnée à l’article 2, les objectifs d’évolution de la dépense publique et du taux de prélèvements obligatoires s’établissent comme suit :

 

(En points de produit intérieur brut)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Dépense publique, hors crédits d’impôts

54,7

54

53,4

52,6

51,9

51,1

Taux de prélèvements obligatoires

44,7

44,3

43,4

43,7

43,7

43,7

Dépenses publiques, y compris crédits d’impôts

56,1

55,7

54,9

53,3

52,5

51,6

  – (Adopté.)

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article&#160;5
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Article&#160;7

Article 6 bis

(Non modifié)

Lorsque le solde conjoncturel des administrations publiques est constaté à un niveau plus favorable que la prévision mentionnée à l’article 3, l’intégralité de l’écart est affectée à la réduction du déficit.

Lorsque le déficit structurel des administrations publiques est constaté à un niveau plus favorable que la programmation mentionnée à l’article 2, au moins la moitié de l’écart constaté est durablement affectée à la réduction du déficit. La part qui n’est pas affectée à la réduction du déficit est allouée à des baisses de prélèvements obligatoires ou à des dépenses d’investissement.

Le présent article s’applique tant que l’objectif à moyen terme, fixé au même article 2, n’est pas atteint. – (Adopté.)

Chapitre II

L’évolution des dépenses publiques sur la période 2017-2022

Article&#160;6&#160;bis
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Article 8

Article 7

Dans le contexte macroéconomique mentionné à l’article 2, les objectifs d’évolution de la dépense publique des sous-secteurs des administrations publiques s’établissent comme suit :

 

Taux de croissance des dépenses publiques en volume, hors crédits dimpôt et transferts, corrigées des changements de périmètre

(En %)

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Administrations publiques, hors crédits dimpôt

0,9

0,6

0,7

0,3

0,2

0,1

Dont :(ligne supprimée)

- administrations publiques centrales

(ligne supprimée)

- administrations publiques locales

(ligne supprimée)

- administrations de sécurité sociale

(ligne supprimée)

Administrations publiques, y compris crédits dimpôt

1

1,0

0,5

-1,2

0,1

0,1

Dont administrations publiques centrales (ligne supprimée)

 – (Adopté.)

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article&#160;7
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Article&#160;8&#160;ter

Article 8

(Pour coordination)

(Non modifié)

I. – L’agrégat composé des dépenses du budget général et des budgets annexes, hors mission « Remboursements et dégrèvements » et « Investissements d’avenir », hors charge de la dette et hors contributions « Pensions », des plafonds des impositions de toutes natures mentionnées au I de l’article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … de finances pour 2018, des dépenses des comptes d’affectation spéciale (hors comptes d’affectation spéciale « Pensions », « Participations financières de l’État », et hors programmes de désendettement, ou portant à titre principal sur des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers) et du compte de concours financier « Avances à l’audiovisuel public » est dénommé norme de dépenses pilotables de l’État et ne peut dépasser, en euros courants, 257,9 milliards d’euros en 2018, 259,5 milliards d’euros en 2019, 260,5 milliards d’euros en 2020, 262,5 milliards d’euros en 2021 et 264,5 milliards d’euros en 2022, correspondant à une cible de diminution de 1 % en volume à compter de 2020.

II. – L’agrégat mentionné au I du présent article, augmenté des dépenses d’investissements d’avenir, de charge de la dette, des prélèvements sur recettes à destination de l’Union européenne et des collectivités territoriales, ainsi que de la fraction de taxe sur la valeur ajoutée affectée aux régions, au Département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane telle que définie à l’article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, du compte d’affectation spéciale pensions et des programmes des comptes spéciaux portant à titre principal des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers, est dénommé objectif de dépenses totales de l’État et est fixé, en euros courants, à 425,4 milliards d’euros en 2018, 432,7 milliards d’euros en 2019, 438,7 milliards d’euros en 2020, 442,8 milliards d’euros en 2021 et 450,9 milliards d’euros en 2022. – (Adopté.)

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 8
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Article 9

Article 8 ter

(Non modifié)

À compter de l’exercice 2019, le plafond des autorisations d’emplois prévu en loi de finances initiale, spécialisé par ministère, conformément à l’article 7 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, ne peut excéder de plus de 1 % la consommation d’emplois constatée dans la dernière loi de règlement, corrigée de l’incidence des schémas d’emplois, des mesures de transfert et des mesures de périmètre intervenus ou prévus. – (Adopté.)

Article&#160;8&#160;ter
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Article 10

Article 9

(Non modifié)

I. – L’objectif de dépenses des régimes obligatoires de base de sécurité sociale ne peut, à périmètre constant, excéder les montants suivants, exprimés en pourcentage du produit intérieur brut et en milliards d’euros courants :

2018

2019

2020

En % du PIB

21,2

21,0

20,8

En milliards d’euros courants (ligne nouvelle)

497,7

508,1

519,1

II. – (Non modifié) – (Adopté.)

Article 9
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Article 11

Article 10

I et II. – (Non modifiés)

III. – L’objectif national d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités territoriales et de leurs groupements à fiscalité propre correspond à un taux de croissance annuel de 1,9 % appliqué à une base de dépenses réelles de fonctionnement en 2017, en valeur et à périmètre constant. Pour une base 100 en 2017, cette évolution s’établit selon l’indice suivant :

Collectivités territoriales et groupements à fiscalité propre

2018

2019

2020

2021

2022

Dépenses de fonctionnement

101,9

103,8

105,8

107,8

109,9

IV (Non modifié). – L’objectif national d’évolution du besoin annuel de financement des collectivités territoriales et de leurs groupements à fiscalité propre, s’établit comme suit, en milliards d’euros courants :

(En milliards deuros)

Collectivités territoriales et groupements à fiscalité propre

2018

2019

2020

2021

2022

Réduction annuelle du besoin de financement

-2,6

-2,6

-2,6

-2,6

-2,6

Réduction cumulée du besoin de financement

-2,6

-5,2

-7,8

-10,4

-13

V. – (Supprimé)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, sur l’article.

M. Pascal Savoldelli. La loi de programmation assure une plus grande implication des collectivités territoriales dans la noble mission de réduction des déficits publics, de maîtrise et de mise en déclin de la dette publique, l’objectif, ambitieux, étant de faire de notre pays un bon élève de la classe européenne…

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la démarche prend un tour particulier après les deux derniers quinquennats. Le premier fut marqué par la disparition de la taxe professionnelle et le quasi-gel de la dotation globale de fonctionnement – un tel mécanisme, d’ailleurs, était peut-être plus compréhensible que celui qui prévaut aujourd’hui : la mécanique était terrible, mais au moins elle était mieux comprise par les élus locaux, si j’en crois mes discussions. Le second quinquennat fut caractérisé par la baisse de plus de 28 milliards d’euros, en cumulé, des concours financiers de l’État aux collectivités.

Le quinquennat actuel, du point de vue des relations entre l’État et les collectivités locales, n’est pas engagé sous les meilleurs auspices. Pas d’annonce de nouvelle ponction spectaculaire, certes – donc une certaine adresse.

Toutefois, les mesures prises, mises en perspective, menacent l’équilibre des finances locales. L’État a retenu un chiffre de 1,2 % pour l’objectif de progression annuelle du volume des dépenses ; notre commission des finances, pour sa part, retient le taux de 1,9 % et a adopté un amendement en ce sens. Nous approuvons cette modification, fût-elle, selon nous, insuffisante.

La progression attendue de la dépense publique locale, sur la période qui nous intéresse, se situant autour de 1,7 % ou 1,8 % du PIB, nous serions donc en présence d’une baisse permanente de sa quotité.

À la vérité, entre la progression tendancielle des dépenses locales telle qu’elle est mesurée par le Gouvernement et l’évolution inscrite à l’article 10, nous constatons une réduction cumulée de 13 milliards d’euros.

Je l’ai dit ce matin devant la commission des finances : l’aspect financier n’est certes pas négligeable, mais, à lire les conclusions de la Conférence nationale des territoires, ainsi que le texte qui nous occupe aujourd’hui, je pense que l’État devrait faire un état des lieux précis, par département, de son action publique.

Lorsque l’on veut contracter avec les collectivités territoriales, il faut être en force en termes d’action publique. Si cet état des lieux n’est pas fait, il y aura des désengagements qui, à un moment ou à un autre, se heurteront à la demande sociale et démocratique. Et cette demande tombera sur les collectivités territoriales !

Je demande donc, au nom de mon groupe, qu’un état des lieux de l’action publique de l’État soit effectué.

M. le président. Je mets aux voix l’article 10.

(Larticle 10 est adopté.)

Article 10
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Article 12

Article 11

(Non modifié)

Les dépenses de gestion administrative exécutées dans le cadre des conventions d’objectifs et de gestion signées à compter du 1er janvier 2018 entre l’État et les régimes obligatoires de sécurité sociale doivent diminuer globalement d’au moins 1,5 % en moyenne annuelle sur la période 2018-2022, à périmètre constant. Les dépenses de gestion administrative exécutées par l’établissement de retraite additionnelle de la fonction publique sont également soumises à cette contrainte. – (Adopté.)

Chapitre III

L’évolution des dépenses de l’État

Article 11
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Article 13

Article 12

(Non modifié)

En 2018, 2019 et 2020, les plafonds de crédits alloués aux missions du budget général de l’État, hors contribution du budget général au compte d’affectation spéciale « Pensions », hors charge de la dette et hors remboursements et dégrèvements, ne peuvent, à périmètre constant, excéder les montants suivants, exprimés en milliards d’euros courants :

 

Crédits de paiement

Loi de finances pour 2017

Loi de finances pour 2017 (format 2018)

2018

2019

2020

Action et transformation publiques

0,00

0,00

0,02

0,28

0,55

Action extérieure de l’État

2,86

2,86

2,86

2,75

2,69

Administration générale et territoriale de l’État

2,49

2,49

2,15

2,14

2,30

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3,15

2,79

3,19

2,88

2,84

Aide publique au développement

2,58

2,59

2,68

2,81

3,10

Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation

2,54

2,54

2,46

2,34

2,25

Cohésion des territoires

18,26

18,26

17,22

15,65

15,14

Conseil et contrôle de l’État

0,51

0,51

0,52

0,53

0,53

Crédits non répartis

0,02

0,02

0,12

0,12

0,8

Culture

2,70

2,70

2,77

2,74

2,78

Défense

32,44

32,44

34,20

35,90

37,60

Direction de l’action du Gouvernement

1,37

1,38

1,38

1,39

1,40

Écologie, développement et mobilité durables

9,44

9,91

10,39

10,55

10,57

Économie

1,64

1,65

1,62

1,79

2,15

Engagements financiers de l’État (hors dette)

0,55

0,55

0,58

0,43

0,43

Enseignement scolaire

50,01

50,01

51,49

52,09

52,95

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

8,12

8,11

8,15

8,10

8,04

Immigration, asile et intégration

1,10

1,10

1,38

1,36

1,36

Investissements d’avenir

0,00

0,00

1,08

1,05

1,88

Justice

6,85

6,72

6,98

7,29

7,65

Médias, livre et industries culturelles

0,57

0,57

0,55

0,54

0,54

Outre-mer

2,02

2,02

2,02

2,02

2,03

Pouvoirs publics

0,99

0,99

0,99

0,99

0,99

Recherche et enseignement supérieur

26,69

26,69

27,40

27,87

28,02

Régimes sociaux et de retraite

6,31

6,31

6,33

6,27

6,30

Relations avec les collectivités territoriales

3,44

3,35

3,66

3,51

3,54

Santé

1,27

1,24

1,38

1,48

1,54

Sécurités

13,10

13,09

13,32

13,48

13,66

Solidarité, insertion et égalité des chances

17,64

17,67

19,44

21,31

21,94

Sport, jeunesse et vie associative

0,73

0,80

0,96

1,05

1,0

Travail et emploi

15,27

16,68

15,17

12,96

12,68

(Adopté.)

Article 12
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Article 14

Article 13

(Non modifié)

I. – L’ensemble des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales, exprimés en milliards d’euros courants, est évalué comme suit, à périmètre constant :

 

2018

2019

2020

2021

2022

Total des concours financiers de l’État aux collectivités territoriales

48,11

48,09

48,43

48,49

48,49

Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée

5,61

5,71

5,95

5,88

5,74

Taxe sur la valeur ajoutée affectée aux régions

4,12

4,23

4,36

4,50

4,66

Autres concours

38,37

38,14

38,12

38,10

38,10

II. – Cet ensemble est constitué par :

1° Les prélèvements sur recettes de l’État établis au profit des collectivités territoriales ;

2° Les crédits du budget général relevant de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » ;

3° Le produit de l’affectation de la taxe sur la valeur ajoutée aux régions, au Département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane prévue à l’article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

III. – Pour la durée de la programmation, l’ensemble des concours financiers autres que le Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée prévu à l’article L. 1615-1 du code général des collectivités territoriales et que le produit de l’affectation de la taxe sur la valeur ajoutée aux régions, au Département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane prévue à l’article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 précitée est plafonné, à périmètre constant, aux montants du tableau du I du présent article. – (Adopté.)

Article 13
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Article 17

Article 14

Le montant de restes à payer, tel que retracé annuellement dans le compte général de l’état annexé au projet de loi de règlement, hors impact des changements de règles de comptabilisation des engagements, ne peut excéder, pour chacune des années 2018 à 2022, le niveau atteint fin 2017.

Le présent article ne s’applique pas aux dépenses du ministère des armées, à l’exclusion de celles portées par la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation. ». – (Adopté.)

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Chapitre IV

Les recettes publiques et le pilotage des niches fiscales et sociales

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

Article 14
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Article 19&#160;bis

Article 17

(Non modifié)

I. – (Non modifié)

II. – Les créations ou extensions de dépenses fiscales instaurées par un texte promulgué à compter du 1er janvier 2018 ne sont applicables que pour une durée maximale de quatre ans, précisée par le texte qui les institue.

III et IV. – (Supprimés) (Adopté.)

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TITRE IER bis

DISPOSITIONS RELATIVES À LA GESTION DES FINANCES PUBLIQUES ET À L’INFORMATION ET AU CONTRÔLE DU PARLEMENT

Chapitre Ier A

Rapport sur la conformité des projets de loi de programmation à la loi de programmation des finances publiques

˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙˙

TITRE II

(Suppression maintenue de la division et de l’intitulé)

Chapitre Ier

État et opérateurs de l’État

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Article 17
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Article 20

Article 19 bis

Au premier alinéa du I de l’article 12 de la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, les mots : « au moins 6 % » sont remplacés par les mots : « entre 3 % et 6 % ». – (Adopté.)

Article 19&#160;bis
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Article 20&#160;bis

Article 20

(Non modifié)

Le Gouvernement transmet chaque année au Parlement, avant le 1er juin, un rapport sur l’exécution des autorisations de garanties accordées en loi de finances, en application du 5° du II de l’article 34 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, qui recense les garanties octroyées au cours de l’année précédente dans ce cadre. – (Adopté.)

Article 20
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Article 23&#160;bis

Article 20 bis

Les données présentées dans le compte général de l’État joint au projet de loi de règlement des comptes et d’approbation du budget, en application du 7° de l’article 54 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances, sont mises à la disposition du public sur internet au plus tard quatorze jours francs après la publication du rapport, dans un document unique, sous une forme susceptible d’être exploitée grâce à des logiciels de traitement de base de données, de même que les données relatives aux dépenses fiscales présentées dans l’annexe prévue au 4° de l’article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances et les données relatives aux opérateurs présentées dans l’annexe prévue à l’article 14 de la loi n° 2006-888 du 19 juillet 2006 portant règlement définitif du budget de 2005. – (Adopté.)

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Chapitre II

Administrations de sécurité sociale

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Article 20&#160;bis
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Article 24

Article 23 bis

Le Gouvernement présente chaque année au Parlement, avant le 15 octobre, une décomposition du solde du sous-secteur des administrations de sécurité sociale entre les régimes obligatoires de base et les organismes concourant à leur financement, les organismes concourant à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit, les autres régimes d’assurance sociale et les organismes divers de sécurité sociale.

Il transmet les prévisions pour l'année à venir, de solde structurel, de solde conjoncturel et de solde effectif des administrations de sécurité sociale et indique les écarts aux prévisions détaillées par le rapport annexé à la présente loi. – (Adopté.)

Chapitre III

Administrations publiques locales

Article 23&#160;bis
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Article 25&#160;bis

Article 24

I. – Des contrats conclus à l’issue d’un dialogue entre le représentant de l’État et les régions, la collectivité de Corse, les collectivités territoriales de Martinique et de Guyane, les départements et la métropole de Lyon ont pour objet de consolider leur capacité d’autofinancement et d’organiser leur contribution à la réduction des dépenses publiques et du déficit public.

Des contrats de même nature sont conclus entre le représentant de l’État, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont les dépenses réelles de fonctionnement constatées dans le compte de gestion du budget principal au titre de l’année 2016 sont supérieures à 60 millions d’euros.

Les autres collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent demander au représentant de l’État la conclusion d’un contrat.

À cette fin, les contrats déterminent sur le périmètre du budget principal de la collectivité ou de l’établissement :

1° Un objectif d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement ;

2° Un objectif d’amélioration du besoin de financement ;

3° Et, pour les collectivités et les établissements dont la capacité de désendettement dépasse en 2016 le plafond national de référence défini au présent article, une trajectoire d’amélioration de la capacité de désendettement.

L’évolution des dépenses réelles de fonctionnement est appréciée en déduisant du montant des dépenses constatées le coût net des dispositions législatives ou réglementaires nouvelles, y compris en matière de fonction publique, applicables l’année précédente à chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale, calculé dans les conditions prévues à l’alinéa suivant.

Chaque année, un décret constate le coût net des dispositions législatives ou réglementaires nouvelles, y compris en matière de fonction publique, applicables l’année précédente aux collectivités territoriales, par grandes catégories de dépenses, à partir du rapport public annuel du Conseil national d’évaluation des normes prévu à l’article L. 1212-1 du code général des collectivités territoriales. Dans les conditions prévues par décret en Conseil d’État, le coût constaté par grande catégorie de dépenses est réparti entre chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale, en fonction de la part que représente chacune de ces grandes catégories de dépenses dans leur budget général.

Le bilan prévu au VIII du présent article tient compte du rapport public annuel du Conseil national d’évaluation des normes.

Pour les départements et la métropole de Lyon, l’évolution des dépenses réelles de fonctionnement est appréciée en déduisant du montant des dépenses constatées la part supérieure à 2 % de la hausse des dépenses exposées au titre du revenu de solidarité active, de l’allocation personnalisée d’autonomie et de la prestation de compensation du handicap, définies respectivement aux articles L. 262-24, L. 232-1 et L. 245-1 du code de l’action sociale et des familles.

La capacité de désendettement d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales est définie comme le rapport entre l’encours de dette à la date de clôture des comptes et l’épargne brute de l’exercice écoulé ou comme la moyenne de ce ratio au cours des trois derniers exercices écoulés. Il est retenu le plus faible de ces deux chiffres. Ce ratio prend en compte le budget principal. Il est défini en nombre d’années.

L’épargne brute est égale à la différence entre les recettes réelles de fonctionnement et les dépenses réelles de fonctionnement. Lorsque l’épargne brute d’une collectivité territoriale ou d’un groupement de collectivités territoriales est négative ou nulle, son montant est considéré comme égal à un euro pour le calcul de la capacité de désendettement mentionnée au neuvième alinéa du présent I.

Pour chaque type de collectivité territoriale ou de groupements, le plafond national de référence est de :

a) Douze années pour les communes et pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ;

b) Dix années pour les départements et la métropole de Lyon ;

c) Neuf années pour les régions, la collectivité de Corse, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

Pour le calcul de la capacité de désendettement de la commune de Paris et du département de Paris, ces deux collectivités territoriales sont considérées comme une seule entité. Le plafond national de référence est celui des communes.

II (Non modifié). – Le contrat prévu au I est conclu pour une durée de trois ans, au plus tard à la fin du premier semestre 2018, pour les exercices 2018, 2019 et 2020. Il est signé par le représentant de l’État et par le maire ou le président de l’exécutif local, après approbation de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Il peut donner lieu à un avenant modificatif sur demande de l’une des parties.

III (Non modifié). – Les dépenses réelles de fonctionnement s’entendent comme le total des charges nettes de l’exercice entraînant des mouvements réels au sein de la section de fonctionnement des collectivités ou établissements concernés. Elles correspondent aux opérations budgétaires comptabilisées dans les comptes de classe 6, à l’exception des opérations d’ordre budgétaire, et excluent en totalité les valeurs comptables des immobilisations cédées, les différences sur réalisations (positives) transférées en investissement et les dotations aux amortissements et provisions.

Pour l’application du deuxième alinéa du I aux communes membres de la métropole du Grand Paris, les dépenses décrites au premier alinéa du présent III sont minorées des contributions au fonds de compensation des charges territoriales.

Pour les collectivités territoriales ou établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ayant fait l’objet d’une création, d’une fusion, d’une extension ou de toute autre modification de périmètre, les comparaisons sont effectuées sur le périmètre ou la structure en vigueur au 1er janvier de l’année concernée.

IV (Non modifié). – Sur la base du taux national fixé au III de l’article 10, le contrat fixe le niveau maximal annuel des dépenses réelles de fonctionnement auquel la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre s’engage chaque année.

A. – Le taux de croissance annuel peut être modulé à la baisse en tenant compte des trois critères suivants, dans la limite maximale de 0,15 point pour chacun des 1° à 3° du présent A, appliqué à la base 2017 :

1° La population de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre a connu entre le 1er janvier 2013 et le 1er janvier 2018 une évolution annuelle inférieure d’au moins 0,75 point à la moyenne nationale ;

2° Le revenu moyen par habitant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est supérieur de plus de 15 % au revenu moyen par habitant de l’ensemble des collectivités ;

3° Les dépenses réelles de fonctionnement de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ont connu une évolution supérieure d’au moins 1,5 point à l’évolution moyenne constatée pour les collectivités de la même catégorie ou les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre entre 2014 et 2016.

B. – Le taux de croissance annuel peut être modulé à la hausse en tenant compte des trois critères suivants, dans la limite maximale de 0,15 point pour chacun des 1° à 3° du présent B, appliqué à la base 2017 :

1° La population de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre a connu entre le 1er janvier 2013 et le 1er janvier 2018 une évolution annuelle supérieure d’au moins 0,75 point à la moyenne nationale ou la moyenne annuelle de logements autorisés ayant fait l’objet d’un permis de construire ou d’une déclaration préalable en application du chapitre Ier du titre II du livre IV du code de l’urbanisme, entre 2014 et 2016, dépasse 2,5 % du nombre total de logements au 1er janvier 2014. Le nombre total de logements est celui défini par le décret pris pour l’application de l’article L. 2334-17 du code général des collectivités territoriales ;

2° Le revenu moyen par habitant de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre est inférieur de plus de 20 % au revenu moyen par habitant de l’ensemble des collectivités ou, pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, la proportion de population résidant dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville est supérieure à 25 % ;

3° Les dépenses réelles de fonctionnement de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ont connu une évolution inférieure d’au moins 1,5 point à l’évolution moyenne constatée pour les collectivités de la même catégorie ou les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre entre 2014 et 2016.

C. – Le cas échéant, le contrat mentionne les critères utilisés dans la définition de l’objectif d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement de la collectivité territoriale ou de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, ainsi que leur impact sur la valeur de cet objectif.

V. – À compter de 2018, il est constaté chaque année la différence entre le niveau des dépenses réelles de fonctionnement exécuté par la collectivité territoriale ou l’établissement et l’objectif annuel de dépenses fixé dans le contrat. Cette différence est appréciée sur la base des derniers comptes de gestion disponibles.

1. Dans le cas où cette différence est supérieure à 0, il est appliqué une reprise financière dont le montant est égal à 75 % de l’écart constaté. Le montant de cette reprise ne peut excéder 2 % des recettes réelles de fonctionnement du budget principal de l’année considérée.

Le niveau des dépenses réelles de fonctionnement considéré pour l’application du premier alinéa du présent 1 prend en compte les éléments susceptibles d’affecter leur comparaison sur plusieurs exercices, et notamment les changements de périmètre et les transferts de charges entre collectivité et établissement à fiscalité propre ou la survenance d’éléments exceptionnels affectant significativement le résultat. Le représentant de l’État propose, s’il y a lieu, le montant de la reprise financière.

La collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunalité à fiscalité propre dispose d’un mois pour adresser au représentant de l’État ses observations. Si la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre présente des observations, le représentant de l’État, s’il y a lieu, arrête le montant de la reprise financière. Il en informe la collectivité ou l’établissement en assortissant cette décision d’une motivation explicite.

Si la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre ne s’est pas prononcée dans le délai prescrit, le représentant de l’État arrête le montant de la reprise financière.

Le montant de la reprise est prélevé, pour les collectivités territoriales n’entrant pas dans le champ de l’article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, sur les douzièmes prévus aux articles L. 2332-2 et L. 3332-1-1 du code général des collectivités territoriales.

Pour les collectivités entrant dans le champ de l’article 149 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 précitée, le montant de la reprise est prélevé sur le montant prévu au IV du même article 149 ou sur les douzièmes prévus à l’article L. 4331-2-1 du code général des collectivités territoriales.

2. Dans le cas où cette différence est inférieure à 0, la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunale est éligible au mécanisme prévu au VII du présent article.

VI (Non modifié). – Pour les collectivités territoriales et établissements de coopération intercommunale à fiscalité propre entrant dans le champ des deux premiers alinéas du I du présent article et n’ayant pas signé de contrat dans les conditions prévues au même I, le représentant de l’État leur notifie un niveau maximal annuel des dépenses réelles de fonctionnement qui évolue comme l’indice mentionné au III de l’article 10, après application des conditions prévues au IV du présent article.

Ces collectivités et établissements se voient appliquer une reprise financière si l’évolution de leurs dépenses réelles de fonctionnement dépasse le niveau arrêté en application du premier alinéa du présent VI. Le montant de cette reprise est égal à 100 % du dépassement constaté.

Le montant de cette reprise ne peut excéder 2 % des recettes réelles de fonctionnement du budget principal.

Les troisième à dernier alinéas du V s’appliquent.

VII. – Il est institué, à compter de 2019, un prélèvement sur les recettes de l’État destiné à soutenir les collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale ayant respecté l’objectif leur ayant été assigné en vertu du IV ou du VI du présent article. Le montant de ce prélèvement est égal à la somme, l’année de répartition, des reprises financières prévues au 1 du V et au VI du présent article.

Ce montant est réparti entre les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale éligibles en application du 2 du V du présent article, en fonction de l’écart constaté pour chacun d’entre eux en application du premier alinéa du même V.

Le représentant de l’État peut accorder à ces communes et établissements publics de coopération intercommunale une majoration du taux de subvention pour les opérations bénéficiant de la dotation de soutien à l’investissement local.

VIII. – Le Gouvernement dresse un bilan de l’application des dispositions des articles 10 et 24 de la présente loi avant le débat d’orientation des finances publiques du projet de loi de finances pour 2020.

IX (Non modifié). – Le dispositif prévu à l’article 10 et au présent article entre en vigueur à compter de la publication de la présente loi.

X (Non modifié). – Les modalités d’application du présent article sont précisées, en tant que de besoin, par un décret en Conseil d’État.

XI (nouveau). – La perte de recettes résultant pour l’État du VII est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

M. le président. L’amendement n° 2, présenté par MM. Bazin et Bonhomme, Mme Eustache-Brinio, MM. Lefèvre, Paccaud, Paul, Pierre, Reichardt, Saury, Bonne, Sol, Savary et D. Laurent et Mme Lavarde, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Ils visent aussi à analyser les conditions d’une meilleure compensation des charges transférées.

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Nous proposons d’ajouter au texte une petite phrase au sujet des contrats : « Ils visent aussi à analyser les conditions d’une meilleure compensation des charges transférées. »

En effet, l’absence de compensation équitable par l’État des compétences transférées aux collectivités locales a entrainé de lourdes contraintes budgétaires, contredisant le principe d’autonomie financière des collectivités. On a apporté ici, à plusieurs reprises, la démonstration que le total de la dette de bien des départements était précisément égal au montant inhérent à la non-compensation du transfert des AIS, les allocations individuelles de solidarité, à nos départements.

Les politiques sociales des collectivités locales sont ainsi asphyxiées par l’explosion des besoins et la baisse des dotations. C’est pourquoi, dans le dialogue qui va se matérialiser en une proposition de contrat entre le représentant de l’État et la collectivité, il serait intéressant de faire figurer le défaut de compensation par l’État de l’exercice de ses compétences par les collectivités, ce qui permettrait de nourrir la discussion budgétaire dans les assemblées qui régissent lesdites collectivités.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Notre collègue Bazin souhaite compléter l’objet du dialogue qui doit s’instaurer entre les représentants de l’État et les collectivités, en l’ouvrant à la question des compétences transférées.

Normalement, vous le savez, mes chers collègues, la compensation des transferts de compétences est même une obligation constitutionnelle. À la différence des charges sur lesquelles portent les propositions de compensation que nous allons faire par ailleurs, à savoir le coût des normes ou des contraintes nouvelles applicables aux collectivités, les charges dont nous parlons ici sont les charges transférées proprement dites ; comme telles, elles sont censées faire l’objet d’une compensation, d’ailleurs strictement encadrée et vérifiée par le Conseil constitutionnel.

Reste qu’il s’agit d’un éternel problème. La preuve : nous aurons tout à l’heure un petit débat sur un certain nombre de dispositions concernant en particulier les allocations individuelles de solidarité des départements. Le Gouvernement, dans le cadre du premier dialogue que nous avons eu à Cahors, a accepté de prendre en compte la spécificité des départements, qui s’étaient justement vus transférer un certain nombre de charges, en matière notamment d’allocations individuelles de solidarité. C’est donc un vrai sujet.

En outre, ce dialogue peut être en effet l’occasion d’examiner les conditions des transferts de compétences. La commission est par conséquent favorable à cet ajout, qui n’est pas normatif, mais qui prévoit qu’un débat sur les conditions d’une meilleure compensation des charges transférées sera organisé dans le cadre dudit dialogue.

La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est beaucoup plus réservé sur l’amendement qui vient d’être présenté par M. le sénateur Bazin.

L’évaluation des transferts de charges de l’État vers les collectivités est une obligation constitutionnelle – le rapporteur général vient de le rappeler –, mais nous considérons qu’il n’est pas nécessaire de l’inscrire dans les 340 contrats que nous espérons signer avec les collectivités ayant une certaine taille démographique et réalisant un total de dépenses réelles de fonctionnement de plus de 60 millions d’euros.

Je saisis l’occasion qui m’est donnée pour le souligner, après la Conférence nationale des territoires, les modalités de contractualisation ont été précisées et très certainement améliorées, en tout cas aux yeux de l’ensemble des élus.

Les présidents des trois principales associations d’élus regroupant des collectivités signataires du bloc local se sont notamment exprimés en ce sens : le président de l’AdCF, l’Assemblée des communautés de France, le président de France urbaine et la présidente de Villes de France ont tous souligné que, malgré quelques améliorations restant à apporter, les choses allaient dans le bon sens.

Nous avons prévu, à la suite de ce débat et via le dépôt d’un amendement, que le taux de 1,2 % puisse être ajusté, à hauteur de 0,15 point par critère, pour tenir compte des efforts réalisés, de l’évolution démographique et de la richesse fiscale. Nous avons fait en sorte – M. le rapporteur général vient de le rappeler – que les augmentations de dépenses liées aux allocations individuelles de solidarité soient prises en compte dans la limite d’une augmentation de 2 % ; si l’augmentation était supérieure à 2 % par an, tout ce qui « dépasse », si vous me permettez l’expression, ne serait pas intégré dans le périmètre faisant l’objet d’une évaluation.

Nous avons précisé les modalités de reprise en cas de non-respect des engagements. Nous avons ouvert la porte, pour reprendre les mots du rapporteur général, ou entrouvert, devrais-je dire, sur la question de la bonification.

Nous avons en outre adopté un mécanisme qui est peut-être passé un peu trop inaperçu, mais qui est utile et repose sur le principe suivant : là où les engagements ne seraient pas respectés, d’aucuns qualifiant une telle situation de dérapage, la reprise interviendrait immédiatement. Mais si une collectivité réalisait des efforts supérieurs aux attentes en année N, une forme de capitalisation serait instituée.

Ainsi, l’amendement a pour objet, non pas d’en rester à ce taux de 1,2 % par an, mais d’introduire, via un tableau, une référence sous forme d’indice – indice 100 en 2017, 101,2 en 2018, pour arriver jusqu’à 103,6 – ce qui permet de créer une forme de compte épargne-temps, pour reprendre une expression qui a été utilisée dans les discussions, à tort sans doute, pour illustrer ce dispositif.

Les choses ont donc bien avancé. En revanche, nous considérons qu’intégrer dans les contrats une clause qui conduirait, collectivité par collectivité, à examiner les conditions des transferts de charges, comme vous le souhaitez, monsieur le sénateur, ne nous paraît pas opportun. Un tel examen relève en effet d’une obligation constitutionnelle, de bloc à bloc, beaucoup plus générale et beaucoup plus impérative que celle qui résulterait de l’adoption de votre proposition.

L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur cet amendement.

M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.

M. Alain Richard. J’ajoute un argument contre la proposition de M. Bazin : chacun le sait ici, le Gouvernement a annoncé, devant l’Assemblée des départements de France, il y a maintenant un peu plus d’un mois, qu’un travail allait être entrepris, dans le cadre du dialogue entre les représentants des départements et l’exécutif, pour réexaminer, à l’échelle nationale et non locale, les conditions de compensation financière du transfert des allocations individuelles de solidarité.

Il me paraît donc beaucoup plus opérant et logique – je pense d’ailleurs que les commissions du Sénat peuvent jouer un rôle tout à fait constructif dans cette réflexion, qui sera publique et ouverte – que ce travail de réexamen de la compensation financière adéquate aux charges de solidarité des départements ait lieu au niveau national, les départements étant représentés collectivement et les organismes représentatifs des bénéficiaires des prestations sociales départementales étant eux aussi entendus.

Ce travail pourrait d’ailleurs se trouver, dans la nouvelle conjoncture économique qui est aujourd’hui la nôtre, légèrement facilité par une nouvelle modération de la croissance de ces allocations.

M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.

M. René-Paul Savary. Je ne partage pas du tout les propos qui viennent d’être tenus par notre collègue. Je pense qu’il est tout à fait nécessaire de tenir compte des spécificités de chaque type de collectivité : un département n’est pas une région !

Pourquoi ? Parce que leurs compétences respectives sont différentes ! Un département, c’est 70 %, voire 80 % de frais de fonctionnement, de par les compétences qui lui sont dévolues – je pense par exemple aux personnels embauchés pour l’entretien des routes, dans les établissements médico-sociaux, etc. En revanche, une région, par définition, c’est une politique d’intervention.

M. Charles Revet. Très juste !

M. René-Paul Savary. Souvenez-vous, mes chers collègues : il fut un temps où 80 % du budget des régions étaient consacrés à l’investissement, la part des frais de fonctionnement s’élevant à 20 % seulement. La situation, depuis lors, a évolué : les régions assurent désormais la gestion des personnels TOS – techniciens, ouvriers et de service – des lycées, ce qui a considérablement modifié ce ratio.

Il n’empêche que les dépenses sont différentes ! Les recettes le sont également : celles des départements comportent des taxes fiscales ; la marge de manœuvre des régions en matière de modulation des recettes locales ne représente que 3 % des impôts qu’elles perçoivent. Elles n’ont la possibilité d’agir que sur le taux de la TICPE, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, et le tarif de la carte grise, qui concernent avant tout les utilisateurs de véhicules consommateurs de carburant. Quant aux recettes des départements, elles dépendent toujours pour une part de la taxe sur le foncier bâti. Il existe donc des spécificités.

S’agissant de l’amendement déposé par mon collègue, il me paraît tout à fait légitime que nous l’adoptions. Il y a une histoire, tout de même ! La révolution ne va pas se faire de but en blanc.

Les dettes de certains départements équivalent à l’absence de compensation des dépenses de solidarité ; dans d’autres départements – je pense aux Ardennes en voyant mon collègue Benoît Huré à mes côtés –, la dette correspond à des investissements réalisés pour le compte de l’État, concernant notamment les routes nationales. Il faut tenir compte des efforts déjà réalisés et des spécificités de chaque strate de collectivité.

C’est la raison pour laquelle il me paraît essentiel que la proposition de mon collègue Bazin soit prise en compte dans la discussion qui sera menée avec chacune de nos collectivités.

Pour ma part, je voterai cet amendement.

M. Charles Revet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.

M. Claude Raynal. Ce débat me semble un peu vain. Pourquoi ? Tout simplement parce que le sujet majeur, lui, est laissé de côté.

On peut, comme cela a été proposé, modifier les modalités de la contractualisation et prendre en compte, ici ou là, certaines subtilités, s’agissant en particulier des AIS – c’est tout à fait justifié –, mais également dans d’autres domaines – certains souhaitent par exemple, dans les grandes agglomérations, retirer du périmètre la politique de transport.

On peut intégrer autant de spécificités et adaptations que l’on veut. Mais si l’enveloppe n’a pas vocation à être modifiée, si l’on commence par poser que le montant des économies de frais de fonctionnement, fixé à 13 milliards d’euros, est sans appel, eh bien, en définitive, quel que soit l’élément retiré du périmètre pour y parvenir, il faudra toujours faire 13 milliards d’euros d’économies !

Si l’on décide de retirer les AIS, mais que ce retrait se reporte sur le reste des dépenses des départements, cela ne change rien pour ces derniers. Modifier quelques éléments pour finir par demander à l’ensemble des collectivités de diminuer leurs dépenses de 13 milliards d’euros, c’est jouer un jeu à somme nulle – l’effort devra bien être accompli quelque part !

J’aurais pensé que le retrait des AIS diminuerait d’autant le montant de l’effort demandé aux collectivités, tout simplement. Si nous ne modifions pas l’orientation, il ne se passera rien : nous nous contenterons de nous amuser entre nous, en jouant un jeu à somme nulle, et, pour finir, il y aura toujours 13 milliards d’euros d’économies à réaliser. Je ne vois donc pas comment cela va se conclure.

Voter cet amendement ne pose aucune difficulté, à ceci près que cela revient à jouer une variante du jeu de taquin : on renvoie sur les autres l’effort à réaliser ! (Sourires.)

M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.

M. Pascal Savoldelli. Je formulerai une remarque et une question.

Ma question s’adresse tant à M. le secrétaire d’État qu’à M. Richard. Je vous ai écoutés attentivement tous deux. Vous nous dites que tout va bien, qu’il est inutile d’amender le texte, que la situation des départements est favorable. Monsieur Richard – dites-moi si je me trompe –, vous nous dites aussi que va s’engager un dialogue entre le Gouvernement et les départements, et vous évoquez une modération de la croissance des allocations.

Je souhaiterais que M. le secrétaire d’État et vous-même nous disiez maintenant, et pas dans quelques mois, ce que vous mettez derrière la modération de la croissance des allocations. Je le dis à la fois pour les départements et pour les allocataires. Nous aimerions connaître, si j’ose dire, la vérité des prix,…

M. Alain Richard. Mais vous la connaissez !

M. Pascal Savoldelli. … afin de ne pas avoir à interpréter vos intentions.

Sur la question qui se trouve à l’origine du dépôt de cet amendement, je partage tout à fait les propos de Claude Raynal : le problème à résoudre est tout de même défini de manière assez fermée !

Néanmoins, il y a bien là un sujet. Lors de la Conférence nationale des territoires, on nous a dit que les relations nouvelles entre l’État et les collectivités territoriales seraient fondées sur le choix, laissé aux secondes, des dépenses de fonctionnement à réduire. Mais si l’on ajoute au tableau l’inflation et le glissement vieillesse-technicité, vous verrez, mes chers collègues, ce qu’il nous restera à arbitrer !

Par ailleurs, nous dit-on, on va s’occuper de l’endettement de nos collectivités. C’est, là encore, un vrai sujet ! Depuis que je suis conseiller départemental – les citoyens l’ont décidé –, je fais le constat que le niveau de la dette de mon département équivaut à ce que lui doit l’État au titre des trois allocations de solidarité, dette contractée sous différents types de gouvernements.

Enfin, d’ici à la fin du premier semestre de 2018, alors que le débat d’orientation budgétaire aura eu lieu, que nous aurons voté un budget dans nos collectivités et que nous devrons rendre des comptes à nos citoyens, nous serons peut-être convoqués à un rendez-vous d’arbitrage sur la question de notre niveau d’endettement !

Mes chers collègues, j’essaie simplement d’expliquer de manière apaisée et sereine un certain nombre de dysfonctionnements.

M. le président. La parole est à M. Benoît Huré, pour explication de vote.

M. Benoît Huré. Ce débat est intéressant. C’est toute la France qui est concernée et on voit que chacun a son expérience.

Je salue l’esprit d’ouverture dont a fait preuve le Gouvernement en excluant les AIS. Celles-ci ne sont pas des dépenses comme les autres ! Elles sont la mise en œuvre de la solidarité nationale, confiée aux départements, certes, mais sur laquelle les départements n’ont pas de marge de manœuvre. Lorsque l’État décide de l’augmentation du RSA, on l’applique. Ce n’est pas au choix !

Cette compétence a été confiée aux départements parce que ceux-ci ne se situaient ni trop près ni trop loin : ils étaient au bon niveau pour mettre en œuvre cette solidarité. Mes chers collègues, c’est le pacte républicain, fondé par le Conseil national de la Résistance ! Nous pouvons être fiers de cette solidarité telle qu’elle est mise en œuvre dans notre pays.

Je ne suis pas aussi optimiste que vous, cher Alain Richard : il n’est certes pas impossible que les dépenses liées au RSA commencent à baisser ; tel ne saurait être le cas, en revanche, des dépenses inhérentes au vieillissement. (MM. Julien Bargeton et Alain Richard acquiescent.)

Les situations sont différentes, en outre, d’un département à un autre. J’ai eu le bonheur de présider un département qui cumule un fort taux de chômage, donc un fort recours au RSA, et un vieillissement important de la population. Ne pas exclure ces dépenses de l’effort d’économies que doivent faire les collectivités est injuste à l’égard des territoires qui sont déjà les plus en difficulté.

Vous ne le savez peut-être pas, mais la compensation versée par l’État au titre des dépenses de solidarité diffère d’un département à un autre. On est devant un empilement de réglementations, une sorte de construction « persienne », qui fait que plus vous êtes affecté par le vieillissement de votre population et par les demandes de RSA, moins bien vos dépenses sont compensées. Aujourd’hui, le reste à charge par habitant, en France métropolitaine, va de 78 euros à 237 euros, pour la Seine-Saint-Denis. Vous voyez bien, mon cher collègue, que ce n’est pas tout à fait la même chose.

Nous devons donc étudier ces questions avec discernement. Je souhaite que cette proposition prospère ; son adoption serait équitable.

J’ai vécu, dans mon département, les Ardennes, avec un défaut de compensation moyen, de 2004 à 2010, de 19 millions d’euros par an, sachant que, lorsque nous augmentons les impôts, chez nous, cela représente 500 000 euros. Vous voyez : c’était déjà quelque chose ! Or, sur les trois dernières années, ce sont 147 millions d’euros que l’État n’a pas compensés. Si, en plus, nous sommes pénalisés, l’injustice sera criante.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Benoît Huré. Je termine, monsieur le président.

On nous dit que l’on va juger les collectivités sur l’investissement. Je suis un peu étonné ! L’endettement des collectivités, c’est de l’endettement au service de l’investissement. Tel n’est pas le cas, a contrario, de l’endettement de l’État.

Je veux bien être jugé ! Mon collègue de la Marne l’a dit : mon département est endetté – sa dette s’élève à 237 millions d’euros. Les dépenses que j’ai dû engager pour que le département des Ardennes puisse enfin être rattaché au réseau autoroutier français s’élèvent, elles, à 260 millions d’euros !

La dette du département est donc une dette d’investissement, consacrée à faire ce que l’État n’avait pas fait chez nous – pourquoi ? Je ne le sais pas ; peut-être parce que c’est par les Ardennes que les envahisseurs voisins sont toujours entrés dans notre pays. (Sourires.)

M. François Grosdidier. Parce que les Parisiens ne partent pas en vacances dans les Ardennes !

M. Benoît Huré. Le département de la Marne compte deux constructions autoroutières ; on n’a pas imposé au département de participer à leur financement.

M. le président. Monsieur Huré, vous venez de multiplier par deux votre temps de parole ! Il faut vraiment conclure.

M. Benoît Huré. Je ne parle pas souvent, monsieur le président ! (Sourires.) Et aujourd’hui, c’était nécessaire. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.

M. Arnaud Bazin. Monsieur le secrétaire d’État, nous l’avons bien compris : vous n’avez pas envie que l’on voie, dans les contrats qui seront signés au premier semestre 2018, ce que représente l’apport de l’État pour l’exercice des compétences départementales, en particulier les AIS, et ce que l’on demande au contribuable départemental, c’est-à-dire le propriétaire de logement départemental.

Voilà, me semble-t-il, une raison supplémentaire de maintenir fermement cette demande. On verra bien ce qu’il adviendra d’elle.

J’appelle l’attention sur le périmètre des dépenses qui sont prises en compte, notamment pour les départements. Il a été dit que les AIS étaient retirées du périmètre. Ce n’est pas tout à fait ce qu’a expliqué le secrétaire d’État (M. le secrétaire dÉtat opine) et ce n’est pas ce qui figure dans le texte, qui précise « au-delà de 2 % d’augmentation ».

Dans un département urbain que je connais un peu – mais ailleurs, c’est pareil, ou pire ! –, le RSA représente quelque 20 % des dépenses de fonctionnement. Une augmentation de 2 % équivaudrait à 0,4 point d’augmentation des dépenses de fonctionnement, quand seule une augmentation de 1,2 % d’augmentation est autorisée au total.

Si nous acceptons un tel dispositif, nous devrons consentir un effort encore plus important sur le reste des dépenses pour parvenir à tenir une augmentation de 0,8 point et non de 1,2. En effet, la totalité de l’évolution des dépenses d’allocations individuelles de solidarité n’est pas prise en compte dans ce cas, ce qui posera de sérieux problèmes aux départements. Il me semble important d’insister sur ce point.

Bien évidemment, mes chers collègues, je maintiens cet amendement et vous invite à le voter.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je ne voudrais pas laisser de questions sans réponse, notamment votre double interrogation, monsieur Bazin.

Vous avez raison, je n’ai pas dit que la totalité des dépenses liées à l’évolution des AIS étaient sorties du périmètre des dépenses faisant l’objet d’une évaluation. Il s’agit seulement de l’augmentation supérieure à 2 %. Il faut savoir que le taux de 1,2 % que vous évoquez peut être modulé à la hausse, notamment en fonction des caractéristiques liées à la richesse fiscale.

Nous savons que les départements dont le budget est très largement mobilisé par les allocations individuelles de solidarité connaissent souvent un niveau de richesse fiscale de nature à permettre la modulation à la hausse. En effet, le niveau de richesse fiscale a aussi un lien avec le pourcentage de population bénéficiaire des AIS.

Monsieur Savoldelli, je ne veux pas me faire le porte-parole d’Alain Richard, mais, pour avoir eu l’honneur de participer à la mission qu’il conduit avec le préfet Dominique Bur, j’ai pu prendre connaissance d’un certain nombre d’éléments sur l’évolution des AIS, département par département. La modération dont nous parlons ne concerne pas le montant des allocations individuelles de solidarité ; la plupart d’entre elles ont d’ailleurs été récemment revalorisées.

Il s’agit plutôt de noter, comme l’ont fait d’autres intervenants, qu’au cours des derniers mois, pour le RSA en particulier, la tendance était plutôt au reflux, en tout cas à une inflexion de l’augmentation du nombre de bénéficiaires. C’est plutôt une bonne nouvelle, car cela signifie que la reprise économique est présente et qu’un certain nombre de bénéficiaires du RSA sont de retour dans l’emploi.

Nous avons constaté cette inflexion : nous savons qu’elle se mesure aujourd’hui en nombre de bénéficiaires, mais pas nécessairement encore en coût pour les collectivités départementales. Pour certaines mesures, des effets de cliquet peuvent avoir un caractère plus ou moins rétroactif. Reste que cette inflexion est mesurable en nombre de bénéficiaires et que nombre de départements la constatent.

Je conclurai en apportant deux précisions.

Ma première remarque porte sur le périmètre des dépenses. Déjà, dans sa version initiale, le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoyait que ce périmètre ferait l’objet d’une évaluation et témoignait de la volonté du Gouvernement de contractualiser le périmètre des dépenses de fonctionnement et uniquement ce périmètre.

Dans la version initiale, il était tenu compte des dépenses de fonctionnement des budgets principaux et des budgets annexes. La seule modification a consisté à retirer du périmètre des dépenses faisant l’objet d’une évaluation les budgets annexes, de manière à éviter de sanctionner, positivement ou négativement, un choix de gestion.

En effet, selon qu’une collectivité fait le choix d’une délégation de service public ou d’une gestion en régie d’un service public à vocation industrielle ou commerciale, le niveau de ses dépenses ou de ses recettes réelles de fonctionnement varie considérablement, si les budgets annexes sont consolidés. C’est pourquoi l’évaluation s’appuie uniquement sur les dépenses de fonctionnement et non sur l’investissement.

Ma seconde remarque concerne le niveau d’endettement et du ratio de désendettement, ce qui fait le lien avec l’amendement n° 3 rectifié bis que M. Bazin défendra certainement dans un instant.

Le projet de loi de programmation des finances publiques initial prévoyait un mécanisme non pas de contrôle, mais d’accompagnement, de vigilance et, in fine, de contrôle sur les ratios de désendettement, non pour les 320 collectivités signataires d’une convention avec l’État – elles sont d’ailleurs aujourd’hui 340 –, mais pour l’intégralité des communes de plus de 10 000 habitants et pour l’intégralité des EPCI de plus de 50 000 habitants.

L’objectif était le suivant : pour le bloc local, lorsque le ratio de désendettement dépassait douze ans, une discussion s’engageait entre, d’une part, le préfet et la direction départementale des finances publiques, et, d’autre part, le maire ou le président de l’intercommunalité ; un plan d’action concerté était mis en place, qui pouvait durer trois ans, quatre ans, voire cinq ans – les dates n’étaient pas fixées. Un constat était ensuite dressé.

Si l’objectif n’était pas atteint, la chambre régionale des comptes était saisie pour avis. Si, à l’issue d’un débat contradictoire après l’avis rendu par la chambre régionale des comptes, rien n’était mis en œuvre pour retrouver un ratio de désendettement jugé convenable dans les douze ans, la gestion du budget de la commune ou de l’intercommunalité pouvait être confiée au préfet.

Cette disposition a suscité de l’inquiétude. En effet, tout le monde a compris, à raison peut-être – c’est un euphémisme ! –, que, à la fin du long processus que j’ai décrit, il y avait un risque de tutelle effective au regard des critères relatifs à l’endettement.

Le Gouvernement est revenu sur ces dispositions et soutient l’article 24 dans la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale – le rapporteur général me pardonnera de préférer la version de l’Assemblée nationale à celle qui a été adoptée ce matin par la commission des finances du Sénat.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Quelle tristesse ! (Sourires.)

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Pour les mêmes raisons que celles que je viens d’évoquer s’agissant des dépenses de fonctionnement, le Gouvernement a jugé injuste d’intégrer les budgets annexes dans la consolidation de l’endettement.

Lorsqu’une métropole crée un syndicat d’économie mixte avec le département ou la région de son territoire pour gérer un réseau de transport, ce syndicat a une personnalité morale autonome et son endettement ne saurait être consolidé avec celui de la métropole. À l’inverse, lorsque la métropole de Rennes ou celle de Nantes fait le choix de gérer son réseau de transport en régie, l’endettement apparaît sur un budget annexe.

M. le président. Il faut conclure, monsieur le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Je conclus, monsieur le président !

Il est important de rappeler que l’article 24 est profondément modifié, pour ne pas dire supprimé, et que la seule disposition qui subsiste concerne uniquement les 340 collectivités signataires, et non plus les communes de 10 000 à 50 000 habitants ou les intercommunalités de 50 000 à 150 000 habitants.

En outre, les dispositions des contrats relatifs à l’encadrement ou à la maîtrise du reste du ratio de désendettement n’auront pas de caractère prescriptif et ne feront pas l’objet de mesures de reprise par rapport à la rédaction initiale du projet de loi de programmation des finances publiques. L’évolution est certaine et mérite d’être soulignée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié bis, présenté par MM. Bazin et Bonhomme, Mme Eustache-Brinio et MM. Lefèvre, Paccaud, Paul, Pierre, Reichardt, Saury, Bonne, Sol et Savary, est ainsi libellé :

Alinéa 7, 12 et 14 à 18

Supprimer ces alinéas.

La parole est à M. Arnaud Bazin.

M. Arnaud Bazin. Cet amendement est relatif à la règle d’or renforcée, mais, monsieur le secrétaire d’État, je ne le défendrai pas.

M. Julien Bargeton. Très bien !

M. Arnaud Bazin. Après les explications du rapporteur général de la commission des finances, j’ai bien saisi le caractère purement incitatif, et non pas prescriptif, de cette disposition. Qui plus est, dans la mesure où la commission va émettre un avis défavorable sur cet amendement, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 3 rectifié bis est retiré.

La parole est à M. le rapporteur général.

M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances. Je souhaite obtenir une clarification de la part du Gouvernement par rapport au risque – peut-être n’est-ce qu’un fantasme – d’externalisation de la dette, voire de certaines dépenses.

Très concrètement, si seul le budget principal est concerné, les collectivités n’auront-elles pas la tentation d’externaliser vers des délégations de service public, les DSP, ou autres ? Comment se prémunir du risque de voir une dette devenir une dette cachée ? L’information n’est pas très claire. L’objectif de 1,2 % inclut-il l’ensemble des budgets, y compris les budgets annexes ? A priori, il concerne seulement le budget principal.

Je pourrais aussi prendre l’exemple des participations d’un département ou d’une commune au contingent incendie. Les situations sont extrêmement variables. Dans ces conditions, n’y a-t-il pas lieu de les exclure des dépenses obligatoires ?

À ce stade, des questions restent ouvertes. Je l’ai déclaré devant le Premier ministre et devant le Sénat : la commission des finances n’est pas forcément opposée à la contractualisation ; à titre personnel, je ne le suis pas non plus. Il s’agit d’un mécanisme sans doute plus vertueux et plus honnête que le rabot aveugle que l’on a connu, visant à baisser les dotations.

Néanmoins, il faudra bien préciser le périmètre, car, si l’on ne vise que les budgets principaux, la tentation peut être grande de reporter l’ensemble des dépenses vers des budgets annexes, des contingents ou des participations. La dette peut même être externalisée vers des SEM, voire des DSP, ce qui peut rendre très difficilement lisibles les comparatifs et empêcher la bonne perception non seulement de la dépense publique, mais aussi des dettes.

Quel est donc le périmètre exact, en termes tant de dépenses publiques que de dette ? À mon sens, dans sa rédaction actuelle, le texte ne lève pas toutes les ambiguïtés.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire dÉtat. Monsieur le rapporteur général de la commission des finances, le niveau d’endettement comme les dépenses de fonctionnement ne concernent que les budgets principaux. Vous avez fait remarquer que telle ou telle collectivité pourrait vouloir se lancer dans une forme d’optimisation, ce dont nous avons conscience.

En effet, dans la période précédente, que vous avez rappelée et dont je prends toute ma part de responsabilité, la contribution au redressement des finances publiques était calculée à hauteur d’environ 2 % des recettes réelles de fonctionnement – je parle des deux années pleines. Le risque d’une optimisation et d’une volonté de diminuer le niveau des recettes réelles de fonctionnement des budgets principaux, puisqu’il ne s’agissait là aussi que des budgets principaux, existait déjà.

Il y a deux différences avec la période que nous allons connaître.

En premier lieu, la contractualisation ne concernera que 340 communes, alors que la contribution au redressement des finances publiques, la CRFP, en concernait 36 000. L’État pourra donc porter un regard plus vigilant et déceler la latitude et – pardonnez ce terme brutal – l’honnêteté des communes qui seraient tentées par cette optimisation.

En second lieu, la création de budgets annexes pour externaliser une partie des dépenses ou des recettes réelles de fonctionnement sera non pas libre, mais soumise à des critères législatifs et réglementaires qu’il conviendra de respecter. Il sera donc facile de procéder à cette vérification pour les 340 collectivités qui contractualisent.

Pour conclure, le Premier ministre l’a déclaré avant moi, le Gouvernement a la volonté de faire confiance. Nous ne baissons pas les dotations ; nous demandons aux 340 collectivités les plus importantes de modérer l’augmentation de leurs dépenses en respectant le taux de 1,2 %, alors que l’on sait que, structurellement, celui-ci oscille plutôt entre 2 % et 2,5 %.

Si cela fonctionne, cela permettra non seulement aux collectivités signataires de ne pas voir leurs dotations baisser, mais aussi aux 36 000 autres collectivités de France de bénéficier de la même stabilité de dotations. Il s’agit donc aussi d’un principe de confiance.

M. le président. Je mets aux voix l’article 24, modifié.

(Larticle 24 est adopté.)

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Article 24
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Article&#160;27&#160;ter

Article 25 bis

I. – Les critères utilisés pour calculer les attributions et prélèvements dont font l’objet les collectivités territoriales, leurs groupements et les ensembles intercommunaux sont mis à la disposition du public.

La publication prévue au premier alinéa du présent I porte sur chaque concours financier de l’État mentionné à l’article 13 de la présente loi ainsi que sur chaque dispositif de péréquation.

Elle porte sur le montant attribué ou prélevé ainsi que sur chaque critère individuel utilisé pour calculer l’attribution ou le prélèvement ainsi que, le cas échéant, chaque indice, fraction ou critère intermédiaire utilisé.

II. – Les données individuelles relatives à la base, au taux, au produit et au nombre d’assujettis de chaque imposition directe ou indirecte locale versée à chaque collectivité territoriale ou groupement sont également publiées. Il en est de même pour le montant et le nombre de bénéficiaires de chaque dégrèvement d’impôt local.

III. – Ces données sont mises à la disposition du public sur internet, avant le 1er septembre de l’année de répartition, dans un document unique par échelon de collectivité territoriale et par année, sous une forme susceptible d’être exploitée grâce à des logiciels de traitement de base de données. – (Adopté.)

Chapitre IV

Autres dispositions

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Article 25&#160;bis
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Article&#160;28

Article 27 ter

Les dépenses fiscales dont le coût figurant à l’annexe prévue au 4° de l’article 51 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances est supérieur à 2 % du coût total des dépenses fiscales pour au moins trois exercices consécutifs font l’objet d’une évaluation bisannuelle indépendante visant à déterminer leur efficacité et leur efficience. Les évaluations sont transmises au Parlement avant le 1er juillet de chaque année. – (Adopté.)

Article&#160;27&#160;ter
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Article&#160;29

Article 28

(Non modifié)

L’article 14 de la loi n° 2006-888 du 19 juillet 2006 portant règlement définitif du budget de 2005 est ainsi modifié :

1° La deuxième phrase du premier alinéa est supprimée ;

2° Les cinq derniers alinéas sont remplacés par neuf alinéas ainsi rédigés :

« Cette annexe présente également les données d’exécution, portant sur les trois derniers exercices, relatives :

« 1° Aux crédits ou impositions affectées aux opérateurs ;

« 2° À leurs ressources propres ;

« 3° Aux emplois rémunérés par eux ainsi qu’aux emplois sous plafond ;

« 4° À leur masse salariale ;

« 5° À leur trésorerie ;

« 6° À la surface utile brute de leur parc immobilier ainsi qu’au rapport entre le nombre de postes de travail et la surface utile nette du parc.

« Cette annexe donne la liste des opérateurs supprimés ou créés au cours de l’année précédant le dépôt du projet de loi de finances de l’année. Elle comporte également, pour chaque opérateur dont les effectifs sont supérieurs à dix personnes, la somme des dix plus importantes rémunérations brutes totales. » – (Adopté.)

Article&#160;28
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Explications de vote sur l'ensemble (début)

Article 29

À l’exception de l’article 12, des articles 26 et 28 et des articles 31, 32 et 34, la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 est abrogée. – (Adopté.)

Article&#160;29
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
Explications de vote sur l'ensemble (fin)

M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.

Vote sur l’ensemble

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.

(Le projet de loi est adopté.)

Explications de vote sur l'ensemble (début)
Dossier législatif : projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022
 

6

 
Dossier législatif : projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la sécurité
Discussion générale (suite)

Adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité

Adoption en procédure accélérée du projet de loi dans le texte de la commission modifié

M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion, après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité (projet n° 105, texte de la commission n° 162, rapport n° 161).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Discussion générale (début)
Dossier législatif : projet de loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la sécurité
Article 1er

Mme Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre dÉtat, ministre de lintérieur. Monsieur le président, monsieur le rapporteur, cher Philippe Bonnecarrère, mesdames, messieurs les sénateurs, nous abordons, à l’occasion de cette session parlementaire automnale particulièrement chargée pour le ministère de l’intérieur, le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité.

Délibéré lors du conseil des ministres du 22 novembre dernier, le texte dont nous débattons aujourd’hui a pour objet de transposer deux directives et de tirer les conséquences d’une décision.

Il s’agit tout d’abord de transposer la directive du 6 juillet 2016 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et des systèmes d’information dans l’Union européenne. Mon collègue Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État chargé du numérique, vous en présentera dans quelques instants l’économie générale. Le terme de transposition de cette directive, fixé au 9 mai 2018, commandait l’urgence de l’examen parlementaire de ce projet de loi.

Il s’agit ensuite de transposer la directive du 17 mai 2017 modifiant la directive de 1991 relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes.

Il s’agit enfin de transposer la décision du 25 octobre 2011 relative aux modalités d’accès au service public réglementé offert par le système mondial de radionavigation par satellite issu du programme Galileo.

S’agissant de la directive du 17 mai 2017, dont le terme de transposition est fixé au 14 septembre 2018, elle a été prise sur l’initiative de la France, à la suite des attentats de Paris au mois de janvier 2015. Son fil conducteur est le renforcement du contrôle de la circulation et du commerce des armes à feu, notamment des plus dangereuses, ainsi que de la coopération intraeuropéenne sur les flux d’armes à feu. Elle a donc pour finalité le renforcement de la sécurité publique.

Cette directive supprime tout d’abord la catégorie D des armes à feu, qui correspondait au régime administratif de l’enregistrement. Désormais, toutes les armes à feu devront au moins relever de la catégorie C, soumise à une déclaration, à l’exception des armes historiques et de certaines reproductions de ces dernières.

La directive surclasse par ailleurs certaines armes, qui étaient jusqu’alors soumises à autorisation, pour les faire passer sous un régime d’interdiction. Cependant, le projet de loi ouvre, comme l’autorise la directive, des dérogations pour la pratique du tir sportif et la sécurité privée, selon des modalités qui seront précisées par décret.

À ce stade de mon propos, je tiens à rappeler que la directive prévoyait également la possibilité d’une troisième exception pour les collectionneurs, dans laquelle nous n’avons pas souhaité nous engager, là aussi, pour des raisons de sécurité publique.

La directive impose, pour les ventes d’armes à distance, une vérification, préalable à la livraison, de l’identité et du titre de détention de l’acquéreur. En pratique, les ventes entre particuliers devront faire l’objet d’une vérification par un professionnel, préalable à la livraison, pour s’assurer de l’identité de l’acquéreur et du fait qu’il n’est pas interdit de détention de port d’armes.

Enfin, le projet de loi permet aux armuriers de refuser, légalement, de conclure des transactions d’armes ou de munitions qu’ils pourraient raisonnablement considérer comme suspectes, leur assurant ainsi une protection juridique qui fait aujourd’hui défaut.

Ces dispositions sont toutes guidées par le souci de renforcer les contrôles sur la circulation et le commerce des armes, dans un but exclusif de sécurité publique. Je ne m’étendrai pas sur la nécessité et l’urgence d’insérer au plus vite de telles dispositions dans notre droit au regard du contexte que connaît notre pays, comme d’autres pays européens, depuis 2015.

J’en viens aux dispositions du titre III du projet de loi qui concernent Galileo et rappelle qu’il s’agit d’un projet européen d’importance stratégique consistant en un système de positionnement par satellites entré en service le 15 décembre 2016. Depuis lors, le lancement de nouveaux satellites se poursuit : pas plus tard que le 12 décembre dernier d’ailleurs, quatre satellites supplémentaires ont été mis sur orbite.

Outre les services « ouverts » destinés au grand public, qui sont d’ores et déjà partiellement accessibles, le système Galileo émet un signal sécurisé de haute précision, le service public réglementé, dit « PRS », exclusivement réservé aux utilisateurs autorisés par décision gouvernementale. Ce signal chiffré, protégé contre le brouillage et le leurrage, est destiné à des utilisations nécessitant une grande fiabilité du signal et qui sont contrôlées par les États.

À cet égard, le projet de loi nous dote des outils juridiques nécessaires à la mise en œuvre des mesures de contrôle de l’accès à ce signal sécurisé. Il prévoit notamment qu’une autorisation est obligatoire pour développer, fabriquer et exporter les récepteurs spécifiques du signal PRS ou la technologie et les logiciels associés à ce matériel. Il fixe des sanctions administratives et pénales en cas de manquement à la loi.

Ces mesures permettront à la France d’assurer un haut niveau de sécurité du service public réglementé PRS, dont les applications, notamment en matière de sécurité et de défense, contribueront à assurer en toutes circonstances la protection des citoyens. Elles sont aussi le moyen de sortir de la dépendance à des systèmes de positionnement satellites étrangers, dont le contrôle échappe totalement aux pays européens.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, telles sont les principales dispositions de ce projet de loi. Je conclurai en saluant le travail réalisé par votre commission des lois sur le texte. Fidèle à sa tradition d’excellence juridique, elle a, sur la proposition de son rapporteur, procédé à un important travail de précision et d’amélioration de la rédaction de certaines dispositions, auquel le Gouvernement est favorable.

Qu’il me soit cependant permis, à ce stade de mon propos, de relever une petite divergence – une différence, une discordance ? (Sourires) – d’appréciation sur le régime juridique des reproductions d’armes historiques, sur laquelle je reviendrai lors de l’examen de l’article 16.

Sous cette réserve, très légère, mesdames, messieurs les sénateurs, le Gouvernement vous invite bien évidemment à adopter ce projet de loi, très important pour notre sécurité. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat auprès du Premier ministre, chargé du numérique. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est une tradition désormais bien ancrée de la Haute Assemblée que d’être en pointe sur les sujets relatifs au numérique. Le précédent grand rendez-vous – c’était pour moi une première – a eu lieu voilà quelques semaines, à l’occasion du débat sur l’intelligence artificielle. Vous êtes l’assemblée du numérique, la première à développer ces sujets !

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Très bien !

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Déjà, en 2012, le Sénat avait été le premier à publier un rapport d’information sur la cyberdéfense, élaboré par Jean-Marie Bockel. À l’époque, c’était le rapport le plus riche sur les sujets de cybersécurité, et il a continué à influencer toute la réflexion française de ces dernières années sur ces questions.

C’était il y a plus de cinq ans. Or, dans le monde du numérique, cinq ans, c’est une éternité : les règles que nous avions définies à l’époque et la façon que nous avions alors d’appréhender les risques sont radicalement transformées, tout comme ont changé les menaces et les usages. Les menaces sont nouvelles, la façon dont le numérique s’est diffusé dans l’intégralité des espaces de notre vie a évolué à une rapidité extrême.

Je me réjouis donc de l’échange que nous allons avoir – c’est à chaque fois un moment riche – sur des sujets qui sont nouveaux pour les Français, mais qui les intéressent de plus en plus.

Il ne faut surtout pas envisager ces sujets comme des questions techniques, mais considérer que, quand on parle techniquement de ces sujets, on parle de questions très politiques et très importantes pour nos entreprises et nos concitoyens.

Je tiens à saluer particulièrement le travail tout à fait remarquable qui a été accompli par la commission des lois, son président, Philippe Bas, et son rapporteur, Philippe Bonnecarrère.

J’ai lu l’intégralité du rapport. J’y tenais, car c’est le premier texte que je viens défendre, et il était donc intéressant pour moi d’apprécier le travail de la commission : j’ai pu en mesurer la richesse et l’exhaustivité et je vous remercie du travail accompli.

Pour l’avoir comparé avec le texte d’origine que nous avions proposé, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne peux que constater que vous l’avez amélioré, rendu plus clair à de nombreuses reprises, et que vous en avez parfois corrigé les erreurs. C’est tout à votre honneur, et je vous en remercie.

M. Jean-Claude Requier. C’est le Sénat !

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Nous partageons le souci de mieux défendre nos concitoyens contre les attaques informatiques. Ceux-ci ont compris – ils en parlent de plus en plus – qu’il s’agit d’un sujet essentiel de leur vie.

À l’époque, le risque cyber était confiné à l’espace numérique : quand un dispositif était « hacké », c’était l’ordinateur qui tombait en panne. Aujourd’hui, les conséquences pour l’entreprise ou pour n’importe quelle structure sont réelles et physiques.

Désormais, une entreprise ne doit pas se contenter de protéger ses ordinateurs et ses réseaux, elle doit protéger aussi ses fournisseurs et ses clients et limiter l’impact que l’attaque aura sur notre économie. Le niveau de sécurité n’est plus le même. Le risque est potentiellement catastrophique.

Dès 2013, le législateur français a fixé des exigences en matière de sécurité informatique aux systèmes d’informations les plus critiques pour les opérateurs d’importance vitale, les OIV, avec une liste très restrictive.

L’objectif était avant tout de maintenir la capacité minimale de la société en cas de crise majeure, par la protection des systèmes d’information concernés. Les acteurs pour lesquels nous avions un niveau d’exigence très élevé étaient peu nombreux, et nous avions su définir un cadre d’exigences pour faire respecter ce niveau de sécurité.

Cette initiative a essaimé partout en Europe, et la France fait figure d’exemple. Cette discussion a conduit à élargir le périmètre des OIV à l’ensemble des services non seulement vitaux, mais même essentiels à la société. Cela a été tout l’objet des débats européens sur la définition des services essentiels à la société.

Cette occupation répond à la multiplication d’attaques de grande ampleur, mais d’intensité moyenne, qui sont capables de toucher durement notre société. Prenons l’exemple de l’attaque WannaCry : il s’agissait d’une attaque non de grande ampleur, mais moyenne, qui visait certes des organisations moyennes, mais en très grand nombre. Pris individuellement, l’impact était faible, mais la somme de ces impacts a eu un fort retentissement sur nos sociétés.

Ainsi, au Royaume-Uni, près d’une dizaine d’hôpitaux ont été touchés par l’attaque WannaCry. Ces établissements n’auraient pas été protégés dans le cadre des OIV. C’est la raison pour laquelle nous devons nous interroger sur les conséquences d’une telle attaque et être capables d’élargir ce périmètre.

Il s’est agi non pas d’une attaque ciblée, mais d’une attaque par reproduction. Cela signifie que de nombreuses cibles ont été touchées, sans que quiconque ait eu la volonté de cibler chacune d’entre elles. Ce type d’attaque est encore plus dangereux, car il signifie qu’il faut se protéger non pas d’un seul ennemi, mais d’un système. Il faut donc augmenter le niveau global de sécurité et de résilience des réseaux les plus essentiels. Telle est la philosophie du texte.

La transposition de la directive NIS nous offre la possibilité, l’espoir, de mieux nous protéger collectivement. Si les opérateurs de services essentiels, qui seront désignés par le Premier ministre, se protègent mieux, c’est globalement toute la France qui sera mieux protégée.

Les règles de sécurité qui seront imposées à ces opérateurs seront définies par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI. Elles devront être réalistes, c’est-à-dire applicables à des coûts maîtrisables par ces organisations, mais accroître le niveau de sécurisation et de résilience global de notre société, pendant ou après une attaque. C’est à l’aune de ces critères que devra être évaluée cette loi dans quelques années.

Ces règles ont été définies à l’échelle européenne. Elles seront également applicables aux plus grands fournisseurs de services. C’est le deuxième volet de ce texte.

Les fournisseurs de services numériques, du fait de l’ampleur de leurs services, parce qu’ils comptent de très nombreux clients, ont une responsabilité particulière. Si l’un de ces fournisseurs de services est défaillant ou si sa sécurité est défaillante, ce sont des milliers de clients qui sont affectés. C’est pour cela que l’on distingue d’un côté les opérateurs, et, de l’autre, les fournisseurs de services, car ils sont les nœuds de la diffusion et de la sécurité de nos réseaux.

Monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, le Gouvernement a déposé deux amendements, après de nombreux échanges. Il s’agit d’amendements rédactionnels, visant à clarifier une formulation. Nous avions fait une proposition, vous en aviez fait une autre. L’amendement que nous proposons est une fusion intelligente de ces deux propositions. Il s’agit de trouver le meilleur moyen de progresser sur la voie de la sécurité numérique.

L’augmentation de la sécurité numérique est un enjeu pour tous les Français. Plus globalement, elle est la condition essentielle de la confiance des Français dans la transformation numérique que nous sommes en train de vivre, dans ses volets à la fois économique et public. Il n’y aura pas de transformation numérique de l’État, des services publics et de l’économie, pas d’émergence de start-ups et de PME si les Français n’ont pas l’assurance que l’État a augmenté le niveau de sécurité.

Ce sujet, mesdames, messieurs les sénateurs, n’est pas seulement technique, il est également économique et sociétal. Peu de journalistes m’ont interrogé à ce sujet jusqu’à présent, mais je suis certain que, très bientôt, les gens poseront tous des questions sur ce projet de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le Gouvernement manifeste sa considération vis-à-vis du Parlement en tenant les propos élogieux que nous venons d’entendre voilà quelques instants, mais aussi en lui prêtant des connaissances encyclopédiques, puisque nous allons traiter de trois sujets différents : la cybersécurité, les armes et le système satellitaire Galileo.

Préalablement, je tiens à rassurer chacun d’entre vous sur le fait que les trois parties du texte ne posent aucune difficulté de subsidiarité. La lutte contre la cybercriminalité est bien sûr un enjeu européen, comme les questions d’armes. Quant au système satellitaire Galileo, il est par essence un programme européen.

Le texte n’effectue pas non plus de surtransposition majeure, à une exception, effectivement en lien avec l’objectif à atteindre. Ce texte étant pour l’essentiel une transposition, il nous imposera un examen plus contraint que pour un projet de loi classique.

Améliorer la cybersécurité est l’objectif de la directive dite « NIS », pour Network and Information Security, du 6 juillet 2016, qui doit être transposée avant le 9 mai 2018. Les risques de cyberattaques criminelles sont largement partagés en Europe. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous avons entendu, cette question ne doit pas être appréhendée sous un angle seulement technique ou technologique.

Ce texte, mes chers collègues, prévoit l’obligation de respecter un socle minimal de mesures de sécurité, des modalités de contrôle, ainsi qu’une obligation de déclaration des incidents à l’ANSSI. Sont concernés par la directive les opérateurs économiques dits « essentiels » et les fournisseurs de services numériques.

La notion d’opérateur économique essentiel est connue en matière de défense depuis la loi relative à la programmation militaire de 2013, environ 250 entreprises ayant été classées opérateurs d’intérêt vital, ou OIV.

Le champ d’application des opérateurs économiques essentiels sera plus large, en raison d’une légère surtransposition dans la définition, que je vous ai signalée, et de l’intention des services du Premier ministre, que nous avons interrogés, d’aller au-delà des sept secteurs visés par la directive en y ajoutant probablement le tourisme, le secteur agroalimentaire et l’automobile. L’automobile dite « autonome » devrait en effet arriver très vite, avec ce que cela suppose de problèmes de maîtrise.

À terme, quelque 600 entreprises pourraient être classées opérateurs économiques essentiels. Nous devons simplement être conscients du coût économique découlant de la directive NIS. Les pratiques de sécurité de ces 600 entreprises, probablement les plus grandes, auront un caractère systémique, car elles auront des effets en cascade sur leurs sous-traitants. Ce sont donc des dispositions qui, à mon sens, concerneront au moins indirectement les PME.

La commission des lois vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de compléter le projet de loi d’ici à son examen à l’Assemblée nationale au mois de février prochain.

L’article 9 du texte prévoit des sanctions pénales en cas de violation des règles minimales en matière de protection des réseaux et des systèmes d’information, lesquelles doivent être fixées par voie réglementaire. Vous avez déjà tous anticipé ce que je vais maintenant vous dire : le risque est fort que ce régime soit jugé contraire à la Constitution, dans la mesure où il nous semble porter atteinte au principe à valeur constitutionnelle de légalité des délits et des peines.

En effet, le législateur est tenu de définir les obligations sanctionnées, nous dit le Conseil constitutionnel, « en termes suffisamment clairs et précis » et ne peut laisser cette tâche au pouvoir réglementaire. Ce travail ne pouvant techniquement être fait par le Parlement, il vous appartient, nous semble-t-il, monsieur le secrétaire d’État, de mener à bien les concertations et de définir les bonnes pratiques professionnelles avant l’examen du texte par l’Assemblée nationale.

Le deuxième volet du texte porte sur la directive relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes, laquelle a connu un examen difficile devant le Parlement européen.

La portée de cette directive du 17 mai 2017, qui doit être transposée avant le 14 septembre 2018, doit être relativisée. Elle est en particulier sans effet sur la lutte contre le trafic illégal, puisqu’elle ne traite en réalité que de la situation des personnes qui s’inscrivent ou s’inscriront dans le cadre légal.

L’Union européenne n’est pas restée inactive, puisque, en parallèle, elle a adopté un règlement visant à harmoniser les normes de neutralisation des armes, comme elle avait introduit un peu plus tôt un dispositif obligatoire, transposé dans notre pays par un décret du 29 août 2017, pour les opérateurs économiques d’enregistrement des transactions concernant des substances susceptibles d’être utilisées à des fins de fabrication d’explosifs, à l’exemple du TATP.

Dans une logique d’augmentation du contrôle des armes à feu, la directive supprime la catégorie dite « D1 » des armes à feu et élargit la catégorie A. Le Gouvernement a fait le choix d’activer des dérogations concernant les tireurs sportifs et certaines sociétés de sécurité privée bénéficiant d’un agrément.

Les ventes par correspondance d’armes restent licites, à condition que les armes soient livrées par l’intermédiaire d’un armurier ou que la plateforme utilisée soit celle d’un armurier. C’est le respect de l’obligation de déclaration qui est recherchée ; Mme la ministre vient d’en parler.

Elle a également fait état d’une petite divergence avec notre position s’agissant des collectionneurs. Nous avons pour notre part proposé une solution élégante, et a priori appréciée, si j’en juge par le fait qu’aucun amendement n’a été déposé sur ce point en séance, consistant à garder les collectionneurs d’armes ou de répliques d’armes historiques dans le cadre d’un volet législatif, sans priver l’autorité publique de la possibilité d’intervenir en fonction de leur niveau de dangerosité.

Enfin, en conclusion, je dirai quelques mots concernant Galileo, le programme européen de radionavigation et de positionnement par satellites, à comparer avec le système américain GPS et les systèmes, déjà opérationnels, russes et chinois.

Galileo comprend trois services distincts : un service ouvert, accessible à tous, conçu pour servir de support aux applications de géolocalisation ; un service commercial, dont tout porte à croire qu’il sera finalement gratuit ; un service public réglementé, dit « SPR », très sécurisé, à usage beaucoup plus restreint, en clair à vocation de renseignement ou militaire.

La décision du 25 octobre 2011, dont la transposition vous est aujourd’hui demandée, précise que, pour activer le service public réglementé de Galileo – 23 satellites à l’heure actuelle, sur 30 prévus, et un début de caractère opérationnel à la fin de l’année dernière –, une organisation administrative minimale doit être mise en place dans chaque État membre, accompagnée d’un système de sanctions pénales.

Le Parlement, mes chers collègues, ne peut que donner son feu vert à la mise en œuvre du service public réglementé. Il serait regrettable que notre défense ne puisse pas accéder à Galileo. Pour cela, un cadre minimal est nécessaire, tant d’un point de vue administratif que d’un point de vue pénal. Tel est le sens de la transposition qui vous est soumise. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Thani Mohamed Soilihi applaudit également.)

M. le président. La parole est à M. Dany Wattebled.

M. Dany Wattebled. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, ce projet de loi concerne trois sujets bien distincts en matière de sécurité. Il nous est aujourd’hui proposé de transposer la directive européenne relative à la cybersécurité et la directive relative aux armes à feu, mais aussi de tirer les conséquences de la décision relative au programme européen de positionnement par satellite, Galileo.

L’actualité récente a montré que tous les secteurs d’activité pouvaient être victimes de cyberattaques susceptibles de ralentir, voire de paralyser l’activité économique et sociétale de l’État et, bien au-delà, de compromettre la stabilité et la prospérité économiques de l’Europe. L’objectif de la directive relative à la cybersécurité est donc de garantir la continuité de ces activités.

Dès lors, il appartient à chaque État membre de renforcer le niveau de sécurité des réseaux et des systèmes d’information des opérateurs de services essentiels, afin de garantir la continuité des échanges au sein du marché intérieur et la compétitivité de l’Union européenne dans le commerce international.

Les cyberattaques visent aussi les fournisseurs de services numériques, lesquels jouent un rôle clef en raison de l’importance croissante du numérique. Ces services sont eux-mêmes souvent utilisés par les opérateurs de services essentiels. Il est donc primordial d’en renforcer la sécurité.

Dans un monde toujours plus interdépendant et interconnecté, nous ne pouvons espérer lutter efficacement contre la cybercriminalité sans approche commune ni coordination. La criminalité étant sans frontières, aucune politique nationale ne peut être suffisante à elle seule.

Les dispositions ainsi prévues sont parfaitement adaptées à la situation actuelle. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, qui assure la défense et la sécurité des systèmes d’information, a donc par nature vocation à être au cœur du dispositif de transposition. Elle se verra ainsi attribuer de nouvelles missions.

J’en viens à la directive relative aux armes à feu. Elle comporte principalement des mesures visant à mieux encadrer les régimes légaux d’acquisition et de détention des armes, d’une part en durcissant les règles applicables à l’acquisition et à la détention des armes considérées comme les plus dangereuses, d’autre part en durcissant la sécurité et les conditions de vente des armes à feu.

Six mesures nécessitent une transposition par voie législative. Je n’en citerai que deux, le temps m’étant compté : la disparition de la catégorie D des armes à feu et le nouveau régime des reproductions des armes historiques.

L’objectif du projet de loi est d’aligner les catégories d’armes nationales sur les catégories d’armes à feu prévues par la directive du 17 mai 2017. En effet, en France, les armes de chasse relèvent de deux catégories juridiques distinctes : la catégorie C, soumise à déclaration, ou la catégorie D1, soumise à enregistrement.

La directive du 17 mai 2017 supprime la formalité d’enregistrement des armes de catégorie D1 pour la remplacer par la procédure de déclaration, afin de contribuer au renforcement de la sécurité publique. Dès lors, il n’existe plus que trois catégories d’armes à feu : A, B et C.

En outre, cet alignement a pour conséquence positive de supprimer la distinction entre deux procédures administratives qui étaient, de fait, devenues semblables après les modifications introduites par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016. Les chasseurs peuvent être rassurés : le changement sera administrativement neutre, plus formel que réel en quelque sorte.

Quant aux armes historiques et de collection, ainsi que leurs reproductions, elles sont actuellement classées par la loi en catégorie D2, armes dont l’acquisition et la détention sont libres. L’objectif de la directive est de dissocier le régime des armes historiques de celui de leurs reproductions, lorsque la technologie, susceptible d’améliorer la durabilité et la précision de ces dernières, en renforce la dangerosité.

Le projet de loi indique que les armes historiques et de collection, ainsi que leurs reproductions, seront classées par décret en Conseil d’État.

En englobant toutes les armes de l’article L. 311-3, c’est-à-dire non seulement les reproductions d’armes historiques, mais également les armes historiques elles-mêmes, le projet de loi excède le champ de la directive, qui ne vise qu’à « surclasser » les reproductions d’armes historiques présentant un niveau élevé de dangerosité. Or, pour les collectionneurs, la suppression de la catégorie D mettrait les armes historiques et leurs reproductions « à la merci du pouvoir réglementaire », pour reprendre leur expression.

Dans ce contexte, sur l’initiative du rapporteur, la commission des lois a adopté un amendement de compromis visant à conserver le classement des armes historiques et de leurs reproductions en catégorie D2, comme le demandent les collectionneurs, sauf pour certaines armes présentant une dangerosité élevée et dont la liste serait fixée par décret en Conseil d’État.

Enfin, j’en viens au troisième volet du projet de loi, le programme européen de positionnement par satellites, Galileo.

Ce programme doit permettre d’offrir à l’Union européenne son propre système mondial de navigation par satellites et de garantir son indépendance stratégique vis-à-vis des autres dispositifs existants et à venir, comme le GPS américain. Il aura des applications dans une grande variété de domaines, pour des usages gouvernementaux, mais aussi dans la vie quotidienne des citoyens européens.

Ce programme comprend trois services distincts : un service ouvert, accessible à tous et gratuit ; un service commercial, et un service public réglementé, le SPR, très sécurisé et à usage plus restreint.

Aussi, afin de garantir la sûreté de ce dispositif sensible, un contrôle rigoureux de l’accès des utilisateurs est exigé, grâce à des moyens à la fois techniques et institutionnels – mise en place d’une procédure d’autorisation, homologation des récepteurs, etc. Ce dernier type de contrôle incombe aux États membres, en vertu de la décision du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011.

L’article 22 du projet de loi prévoit donc d’inscrire dans le code de la défense les dispositions de la décision du 25 octobre 2011, afin de fixer un cadre administratif minimum et préalable, ainsi qu’un régime de sanctions pénales.

Dans l’ensemble, ce projet de loi se révèle conforme aux textes européens qu’il vise à transposer. Au cours de son examen en commission, aucune difficulté concernant le partage entre le domaine réglementaire et le domaine législatif n’a été constatée.

Aussi le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera-t-il en faveur de ce projet de loi.

M. le président. La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les directives dont il nous est aujourd’hui demandé d’approuver la transposition traitent de sujets importants pour notre pays, qu’il s’agisse de la lutte contre la cybercriminalité, du renforcement du cadre de la commercialisation des armes à feu, ou encore de l’exploitation des données collectées par Galileo.

Les contraintes qui encadrent notre mission de transposition ne doivent pas nous dispenser d’un examen méticuleux des dispositions transposées dans notre droit. À cet égard, notre rapporteur a, il faut le souligner, apporté de nombreuses améliorations au texte initial.

Dans ces cas précis, la transposition comporte bien des embûches. Notre rapporteur a par exemple souligné les conséquences problématiques de la suppression pure et simple de la référence des armes de catégories D proposée par le Gouvernement, ou encore la nécessité de prendre en compte les exigences constitutionnelles s’imposant aux mises en demeure préalables au prononcé d’une sanction.

Nous soutenons ainsi l’essentiel des modifications qu’il a méthodiquement apportées, bien que certaines modalités de mise en œuvre des dispositions fixées par la directive méritent quelques débats.

Comme aurait pu le dire Georges Clemenceau, la cybersécurité est une chose trop grave pour la confier à des ingénieurs ! (M. le secrétaire dÉtat rit.)

Ce sujet a été trop longtemps abandonné aux concepteurs et aux techniciens des systèmes d’information. Nous en prenons aujourd’hui progressivement la mesure, à l’occasion de piratages spectaculaires affectant nos institutions et notre économie. Aujourd’hui, le directeur de l’ANSSI nous appelle à nous saisir du problème. Selon lui, « la cybersécurité est l’affaire des décideurs ».

Selon les estimations de la Commission européenne, l’ampleur de ces phénomènes est sans précédent : 80 % des entreprises européennes en seraient victimes, et dans certains États membres, la cybercriminalité représenterait 50 % des infractions constatées. Les victimes collatérales sont l’ensemble des utilisateurs des services affectés. Certains subissent même les inconvénients de résider dans une zone blanche tout en étant exposés à la cybercriminalité, ce qui est une situation particulièrement injuste et paradoxale, vous en conviendrez !

Face à l’augmentation de ces incidents, quelle réponse apporter ? La cybercriminalité aurait pu être regardée comme le prolongement électronique d’incriminations multiséculaires : le vol ou l’usurpation d’identité. Selon cette conception, le service de lutte contre la cybercriminalité aurait dû être rattaché au ministère de l’intérieur. La cybercriminalité aurait dû être combattue avec les moyens humains et matériels lui étant dévolus.

En France, dès sa création en 2001, la Direction centrale de la sécurité des systèmes d’information a été placée sous l’autorité du Premier ministre, cette tutelle n’ayant pas été remise en cause en 2009 lors de la transformation de la direction en agence. Dès lors, l’ANSSI assure le volet préventif de la cybersécurité et le système judiciaire le volet répressif. Cette architecture institutionnelle n’est pas anodine et a influencé certaines des dispositions du projet de loi, au-delà des objectifs fixés par la directive.

En premier lieu, le texte confie de nombreuses prérogatives au Premier ministre. Il nous semble qu’il aurait été plus judicieux de confier ces missions à l’ANSSI, compte tenu du nombre de décisions qui reviennent par ailleurs au chef du Gouvernement. Cela aurait permis de ne pas remettre en cause la légitimité de l’Agence en la matière, bien que, à terme, son indépendance pourrait être envisagée.

En second lieu, les modalités de contrôle de l’application des normes élaborées par l’ANSSI ne sont pas satisfaisantes. Nous considérons que l’ANSSI, qui soutient déjà considérablement les opérateurs d’importance vitale, est suffisamment dimensionnée pour effectuer les contrôles nécessaires auprès des opérateurs de services essentiels publics, sans que la charge de ces contrôles incombe à ces derniers.

À tout le moins, un traitement différencié aurait pu être appliqué selon la nature publique ou non des OSE, afin de ne pas mettre en difficulté des établissements publics aux finances déjà fragiles. Je pense en particulier aux hôpitaux.

Enfin, en raison de la grande sensibilité des données économiques et individuelles en jeu, il nous semble que le non-respect des règles fixées par l’ANSSI devrait être strictement sanctionné, comme le prévoit la directive.

Sans que les deux directives soient liées, la lutte contre la détention illégale d’armes n’est pas éloignée des questions « cyber », tant le dark web est devenu une plateforme de fournisseurs pour les organisations de criminalité organisée.

La seconde directive s’inscrit donc dans la continuité de la déclaration de Paris et des dispositions de la loi du 3 juin 2016 relatives aux armes à feu. Le régime de l’enregistrement des armes de type D1, vidé de sens, fusionne avec celui de la déclaration. La livraison d’armes est mieux encadrée, de même que la profession d’armurier, grâce aux amendements de notre rapporteur.

Il serait cependant naïf de croire que ces modifications assécheront les réseaux d’approvisionnement des organisations terroristes si l’ensemble de nos partenaires européens ne s’astreint pas à une rigueur comparable.

Jusqu’à présent, la déclaration de Paris n’a eu que des effets mitigés. Nous invitons donc le Gouvernement à poursuivre les négociations, afin d’obtenir des engagements plus contraignants, s’agissant notamment de l’harmonisation des règles de neutralisation des armes saisies.

Enfin, le surclassement des fusils à canon lisse utilisés pour la chasse pourrait placer leurs utilisateurs dans une situation d’insécurité juridique. Nous attendons donc du Gouvernement qu’il se positionne clairement sur les solutions déjà envisagées dans l’étude d’impact et qu’il donne de sérieux gages aux personnes concernées.

Au-delà des réserves que je viens d’exprimer, je considère, comme la plupart des membres du groupe du RDSE, que ces transpositions constituent des avancées. Nous voterons donc ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Brigitte Lherbier.

Mme Brigitte Lherbier. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la gestion des risques est aujourd’hui au cœur des politiques publiques, mais aussi des entreprises. En matière de sécurité, l’entreprise est une cible d’autant plus exposée qu’elle est insérée dans un ensemble d’interdépendances nationales et internationales.

Les menaces pesant sur les États et sur les entreprises sont protéiformes : cybercriminalité, espionnage économique, ou bien encore actions d’influence, de désinformation, de déstabilisation, atteinte à la réputation, mais aussi risques technologiques, environnementaux, sabotages. C’est pourquoi les pouvoirs publics doivent être en mesure de proposer aux entreprises françaises et européennes, ainsi qu’aux entreprises étrangères implantées en France, un niveau de sécurité suffisant pour préserver leurs intérêts et leurs richesses.

Je suis fort satisfaite que la gouvernance européenne s’applique non pas uniquement dans les rapports de force entre les territoires, mais également dans un « cyber territoire », dont l’aire est en réalité planétaire, et qu’elle puisse s’attacher à proposer un socle commun aux États membres.

La directive sur la sécurité des réseaux et des systèmes d’information, que nous transposons aujourd’hui dans notre droit, a été conçue dans cet objectif, afin d’intensifier la coopération entre les États membres sur la question essentielle de la cybersécurité. Elle établit des obligations en matière de sécurité, tant pour les opérateurs fournissant des services essentiels dans des secteurs décisifs tels que l’énergie, les transports, la santé et la finance, que pour les fournisseurs de services numériques.

Veiller à la sécurité des réseaux en identifiant les risques et créer une obligation de notification des incidents graves survenus, cela permettra indéniablement d’améliorer la sécurité de tous. Dans ce « cyber monde », lorsqu’une faiblesse est constatée sur un maillon, c’est l’ensemble des services interconnectés qui sont en réalité atteints.

Il me paraît néanmoins essentiel que toutes les garanties soient apportées afin de préserver les secrets industriels et commerciaux. Sur ce point, notre rapporteur, Philippe Bonnecarrère, nous a rassurés, et j’en suis pleinement satisfaite. Il nous a également proposé d’apporter des précisions dans les définitions transposées, pour plus de clarté. Cela nous semble nécessaire lorsqu’on touche aux libertés publiques.

La France ne part pas de rien, puisqu’elle s’est déjà dotée d’outils éprouvés et d’une agence dédiée à cet effet, l’ANSII, véritable autorité en matière de sécurité et de défense des systèmes d’information pour la sécurité numérique de la nation. Cette agence nationale permet à chaque acteur d’accroître sa vigilance dans cet espace ouvert, confronté aux cybermenaces. Je formule le vœu que son rôle soit renforcé.

Longtemps restée l’affaire de spécialistes, la cybersécurité est aujourd’hui un défi pour chacun d’entre nous, pour la science, pour l’industrie, donc pour l’État.

Je compléterai mon propos en évoquant également un point de la seconde directive sur le contrôle de l’acquisition et de la détention des armes à feu détenues par les collectionneurs.

Si le Conseil d’État nous avait rassurés dans son avis sur le cas des armes historiques et de certaines de leurs reproductions, qui demeurent en dehors du champ d’application de la directive, je salue l’initiative subtile de notre rapporteur, qui permet que ces armes soient classées en catégorie libre d’acquisition et de détention, à l’exception de certaines, dont la dangerosité serait avérée et dont la liste sera établie par décret en Conseil d’État.

Les collectionneurs peuvent donc être rassurés par cette mesure extrêmement protectrice de leur statut, qui leur évite des formalités fastidieuses et des restrictions sans commune mesure avec la dangerosité des armes et matériels qu’ils détiennent.

La garantie de la sécurité et de l’intégrité de chaque citoyen constituant un droit fondamental, il paraît primordial que l’usage, la détention et la commercialisation d’armes à feu soient définis selon les mêmes termes dans l’espace européen de libre circulation.

L’actualité nous démontre au quotidien la nécessité de raisonner au-delà de nos frontières et d’agir avec nos partenaires européens. Jusqu’à la semaine dernière, j’étais adjointe au maire de Tourcoing, ville frontalière, chargée de la sécurité. Je travaillais au quotidien avec les autorités belges voisines ; c’était une nécessité locale.

Je voudrais conclure en vous signalant que jeudi dernier, le général Marc Watin-Augouard, fondateur et délégué du Forum international de la cybercriminalité, nous a réunis autour des enjeux stratégiques de cybersécurité et de cyberdéfense pour préparer la prochaine édition du FIC, qui se tiendra à Lille, en janvier prochain. Vous y êtes tous invités, je pense, par la gendarmerie.

J’ai donc pu à cette occasion constater à nouveau que la gendarmerie nationale était efficace et prête à s’organiser avec ses homologues européens, tout en rappelant aux spécialistes présents combien le Sénat est attentif, M. le rapporteur l’a démontré encore aujourd’hui, à ces enjeux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

M. Thani Mohamed Soilihi. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les projets de loi, présentés sous l’acronyme générique DDADUE, dont le contenu est généralement très aride, visent à incorporer à notre droit national un ensemble de directives et de règlements européens récemment adoptés.

En l’occurrence, celui qui nous réunit aujourd’hui a pour objectif de transposer deux directives du Parlement européen et du Conseil : l’une consacrée au combat pour la cybersécurité et qui doit être transposée par les États membres avant le 9 mai 2018, l’autre, destinée à lutter contre le trafic d’armes, dont le délai limite de transposition nationale est quant à lui fixé au 14 septembre 2018.

Ce projet de loi tire également les conséquences d’une décision du 25 octobre 2011, relative au système de positionnement par satellites Galileo.

En préambule, je voudrais souligner les progrès incontestables effectués par notre pays ces dernières années pour sortir de ce statut de « mauvais élève » en matière de transposition. À ce titre, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sur ce texte, ce qui démontre sa volonté d’agir vite afin de garantir un niveau de sécurité élevé des citoyens et de respecter ainsi ses engagements européens.

Attardons-nous à présent sur les dispositions du texte examiné par notre assemblée. Son titre Ier, consacré à la transposition de la directive Network and Information Security, ou NIS, du 6 juillet 2016, a pour objectif de renforcer les capacités nationales en matière de cybersécurité et d’établir un cadre formel de coopération entre États membres.

Nous ne pouvons que nous réjouir de ces dispositions, compte tenu de la menace croissante visant le patrimoine numérique des entreprises et les données personnelles des citoyens. Dans un monde de plus en plus connecté, les incidents sont devenus légion.

Si la transformation numérique offre aux entreprises un formidable levier de croissance, elle induit dans le même temps une prolifération de nouveaux risques aux conséquences économiques et juridiques majeures. Selon Bruxelles, 80 % des entreprises européennes auraient connu au moins un incident de sécurité en 2016.

Ce texte dote donc la France des moyens de se prémunir contre ces cyberattaques, en imposant désormais aux opérateurs et aux fournisseurs de services numériques d’identifier les risques potentiels en matière de sécurité numérique, de prendre à leur frais les décisions qui s’imposent pour les maîtriser et d’informer l’autorité nationale compétente en la matière, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI.

Le titre II transpose, quant à lui, une directive du 17 mai 2017, prise à l’initiative de la France à la suite des attentats de Paris qui ont endeuillé notre pays en novembre 2015, et dont l’objet est de renforcer le contrôle de la circulation et du commerce des armes à feu.

Le présent projet de loi permet notamment aux armuriers de refuser de conclure des transactions d’armes ou de munitions qu’ils pourraient raisonnablement considérer comme suspectes. On peut néanmoins regretter que la directive ne traite pas de la problématique du trafic illégal, car il est un sujet majeur de préoccupation, en particulier en ce qui concerne le terrorisme.

S’agissant de la question des armes historiques actives et de leurs reproductions, la commission des lois du Sénat a préféré faire le choix du compromis, en revenant sur la suppression de la catégorie D. Pourtant, la directive impose aux États membres, en raison des techniques modernes qui peuvent augmenter la dangerosité des reproductions d’armes à feu anciennes, de durcir le régime qui leur est appliqué. Je réfléchis à voix haute : n’est-ce pas finalement reculer pour mieux sauter ?

Le titre III porte sur la décision du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011, qui définit les modalités d’accès au service public réglementé du système mondial de radionavigation issu du programme européen Galileo de positionnement par satellite, entré en service le 15 décembre 2016. Le projet de loi introduit un cadre réglementaire assurant sa bonne utilisation et l’assortit de sanctions pénales.

Enfin, les deux derniers titres comprennent des articles non moins importants, puisqu’ils permettent l’application de la loi en outre-mer et prévoient des dispositions transitoires.

Ce texte a le mérite de mettre la France en conformité avec ses engagements européens. Surtout, il offre à ses citoyens un espace ouvert et unifié par des législations harmonisées en matière de sécurité, dont on a malheureusement pu constater ces dernières années l’impérieuse nécessité. C’est la raison pour laquelle les sénateurs du groupe La République En Marche apporteront leur entier soutien au projet de loi de transposition. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe Union Centriste.)

M. le président. La parole est à Mme Esther Benbassa.

Mme Esther Benbassa. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, le projet de loi qui nous réunit aujourd’hui a pour objet de transposer ou de mettre en œuvre des directives ou décisions européennes dans notre droit. Si le temps qui m’est imparti ne me permet malheureusement pas de revenir en détail sur chacune des très nombreuses dispositions de ce texte, je souhaiterais toutefois formuler quelques remarques d’ordre général.

La première porte sur le déclenchement de la procédure accélérée, qui est souvent regrettable, plus particulièrement s’agissant d’un texte aussi dense et complexe.

Permettez-moi, mes chers collègues, de vous citer, pour illustrer mon propos, un passage des conclusions de la commission des lois : « Tout en relevant le risque d’inconstitutionnalité de l’article 6 du projet de loi qui, en raison de son manque de précision, pourrait être jugé contraire au principe de légalité des délits et des peines, la commission n’a pas été en mesure d’y apporter des améliorations, les consultations portant sur le socle minimal de mesures de sécurité à imposer aux opérateurs économiques essentiels n’étant pas achevées au niveau interministériel ». Édifiant, n’est-ce pas ? Par manque de temps pour travailler de manière satisfaisante, la commission se contente de « relever » le risque d’inconstitutionnalité.

Ensuite, quel besoin y avait-il de traiter de trois sujets distincts, mais d’égale importance dans un même texte ? La cybersécurité, la réglementation sur les armes à feu civiles et le système de positionnement par satellite Galileo recouvrent des enjeux bien différents qui auraient mérité d’être traités séparément dans un temps propice à un travail parlementaire de meilleure qualité.

Faut-il le rappeler, mes chers collègues, nos concitoyens font preuve d’un véritable désamour à l’égard de l’Europe et de ses institutions, qu’ils envisagent au mieux comme une bureaucratie intrusive, au pire comme un instrument supplémentaire de paupérisation.

Plutôt que de faire preuve de pédagogie, de montrer la nécessité de construire, ensemble, un socle de droits et de devoirs cohérents, nous examinons, pardonnez ma familiarité, à la va-vite un texte quelque peu fourre-tout. Sur le fond pourtant, il y avait matière à montrer que l’Europe peut être protectrice et parfois même faire fi des pressions des lobbies.

Prenons l’exemple de la directive relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes. Ce texte, demandé par la France après les attentats de 2015, a pour objet de réduire les sources potentielles de trafic illégal d’armes à feu et de limiter l’accès aux armes les plus dangereuses. Il vise notamment à lutter contre le détournement à des fins criminelles d’armes prétendument neutralisées. Eh bien, ce texte existe, malgré l’intense lobbying des « proarmes » au Parlement européen, souvent relayé par les députés conservateurs et d’extrême droite, voire par certains libéraux.

Comme l’a rappelé notre collègue eurodéputé Pascal Durand, dont je partage l’analyse : « Les progrès réglementaires sont le fruit d’un compromis entre les objectifs de sécurité publique, en luttant notamment contre les risques de trafic d’armes, et la possibilité d’acquérir une arme sur le marché intérieur. Ceci implique, entre autres, le contrôle de l’identité des personnes acquérant une arme en ligne et, de la part des États membres, le partage des informations sur la possession d’armes à feu sur leur territoire. Par ailleurs, la vérification périodique ou continue de l’aptitude psychologique à détenir une arme à feu est désormais obligatoire et des restrictions s’appliquent sur l’entreposage des armes. »

Ce sont là de véritables avancées pour la sécurité commune comme pour la sécurité de chacune et de chacun, et nous nous en réjouissons. Ainsi, c’est avec le sentiment d’un travail certes pas tout à fait accompli, mais convaincu de la nécessité de poursuivre la construction d’un droit européen cohérent, que le groupe CRCE soutiendra ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)

M. le président. La parole est à Mme Laurence Harribey.

Mme Laurence Harribey. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, le texte qui nous est soumis, sans être un fourre-tout, s’apparente plutôt à un inventaire à la Prévert, qui trouve cependant son unité dans la recherche d’une meilleure sécurité. Il vise en effet à transposer le droit européen en droit national sur trois volets : deux directives, l’une relative à la sécurité des réseaux et des systèmes d’information, l’autre relative au contrôle de l’acquisition et de la détention d’armes, une décision relative au service public réglementé issu du programme Galileo. On le voit, ces trois volets diffèrent, mais visent tous à accroître la sécurité.

Il s’agit d’un texte technique, comme l’a indiqué notre rapporteur en introduction, et pour lequel la marge d’appréciation parlementaire est relativement contrainte par l’obligation d’intégration du droit européen dans le droit national. Notre rôle a été de veiller à une bonne intégration, en écartant le risque de sous-transposition comme de surtransposition, mais aussi en déterminant ce qui relève du domaine législatif et ce qui relève du domaine réglementaire.

On dit souvent que le diable se cache dans les détails. Il peut aussi se cacher dans le manque de détails, et c’est à y remédier que se sont attelés la commission des lois et son rapporteur. À cet égard, nous souscrivons au rapport présenté par notre collègue, y compris aux amendements qui seront défendus visant à corriger un certain nombre d’insuffisances ou de manques de clarifications.

Sans revenir sur le détail de l’examen technique du texte, j’essaierai plutôt de le remettre en perspective, car, comme l’a très bien dit M. le secrétaire d’État, derrière les aspects techniques, il faut s’interroger sur les enjeux et l’utilité d’un texte pour y répondre.

Ce texte touche à des domaines sensibles et stratégiques, en particulier celui de la cybersécurité visé au titre Ier. Même si le fondement juridique du titre Ier relève de l’article 114 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne concernant le marché unique, il semble que des enjeux touchent aux grands équilibres et à la sûreté des États. C’est sur ce point que j’aimerais focaliser mon propos.

Face à l’inflation des cyberattaques, vous avez été nombreux à les citer, il importe de répondre rapidement et de s’adapter le mieux possible. Le rapport a cité de cas de la cyberattaque de Saint-Gobain, mais il y eut aussi, vous les avez évoqués, monsieur le secrétaire d’État, les virus WannaCry et Petya, qui se sont propagés à l’échelle mondiale et ont causé des dégâts importants à des entreprises mais aussi à des services publics - je pense notamment aux cartes d’identité estoniennes.

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Tout à fait !

Mme Laurence Harribey. Nous pouvons facilement imaginer les enjeux de la cybersécurité quand on sait que, à l’échéance de 2020, près de 6 milliards d’objets seront connectés dans l’UE.

Dans ce contexte, le projet de loi, comme l’a souligné notre rapporteur, donne un cadre législatif à la stratégie européenne en matière de cybersécurité qui émerge progressivement et invite de fait les États à une stratégie nationale de sécurité.

Dans cette double stratégie européenne et nationale – les deux niveaux sont intrinsèquement liés – se posera immanquablement, sinon dans le texte que nous étudions, du moins dans ceux qui suivront, la question de la certification en matière de cybersécurité, pour laquelle près de la moitié des États membres ont mis en place un dispositif. Il est à noter que la France fait partie des quelques pays ayant une vraie expertise en la matière.

Ce projet de loi incontournable aura des conséquences sur l’appréhension de la cybersécurité par les acteurs économiques, et ce bien au-delà de ceux qui y sont définis et énumérés, du simple fait de la chaîne des responsabilités : la question de la relation client-fournisseur, celle de la responsabilité de notification des incidents ou encore celle du risque de sanctions pénales. La notion de confidentialité appellera les acteurs économiques à une stratégie de certification renforcée. C’est là qu’il conviendra d’être particulièrement vigilant, sous la pression de la nécessité, au risque d’une certification par le bas.

Je fais référence au projet de règlement pour un système européen de certification en matière de cybersécurité, sur lequel la commission des affaires européennes s’est prononcée en matière de subsidiarité. Nous devons garder à l’esprit l’objectif de protection, afin d’éviter que la pression à la certification n’aboutisse en fait à une certification au rabais. Nous savons que les enjeux sont essentiels, or nous sommes dans le domaine d’un règlement sur lequel nous ne pourrons guère intervenir.

Voilà l’essentiel de ce que je voulais souligner en prélude au vote sur le volet relatif à la cybersécurité.

En ce qui concerne le titre II, relatif au contrôle de l’acquisition et la détention d’armes, je n’ai pas de remarques particulières à formuler, si ce n’est que nous souscrivons à celles du rapporteur. Finalement, comme cela a été indiqué dans le rapport, le texte est relativement faible au vu de ce qui était visé lors de la demande par la France d’un texte européen.

Enfin, le titre III relatif au service public réglementé n’appelle pas non plus de notre part de remarque particulière

Nous souscrivons, vous l’aurez compris, mes chers collègues, à ce projet de loi. Nous adopterons également les amendements présentés par le rapporteur et validés par la commission des lois, en émettant simplement une réserve sur le risque d’inconstitutionnalité qui a été évoqué dans le rapport et par plusieurs collègues. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe La République En Marche.)

M. le président. La parole est à Mme Sophie Joissains. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)

Mme Sophie Joissains. Le projet de loi que vous nous présentez, madame la ministre, chère Jacqueline Gourault, est riche et fait l’objet d’un degré de consensus rare. (Sourires.) De la cybersécurité aux régimes des armes à feu, des armes à feu aux satellites du système Galileo, le champ que nous balayons ce soir est vaste.

Je ne m’étendrai pas sur Galileo, mais je salue tout de même l’ambition de ce projet, qui permettra à terme de mettre fin à toute dépendance de l’Europe aux États-Unis en matière de positionnement par satellite.

La suite de mon propos sera brève et concentrée sur les titres Ier et II du projet de loi.

Le titre Ier transpose la directive NIS du 16 juillet 2016. Rappelons que cette directive s’inscrit dans le cadre d’une stratégie européenne en matière de cybersécurité et qu’elle constitue la première initiative législative européenne ainsi que la première tentative d’harmonisation des normes dans ce domaine – il n’était pas trop tôt.

Le renforcement du niveau de cybersécurité des États membres pour les activités économiques stratégiques est un enjeu majeur, vous l’avez tous largement souligné. L’accélération des progrès technologiques, notamment en matière d’objets connectés, qui nous accompagnent dans pratiquement tous les aspects de notre vie quotidienne, nous oblige à nous mobiliser à une échelle qui ne peut plus être seulement nationale.

Les dégâts causés par les cyberattaques ne cessent de s’accroître. M. Philippe Bonnecarrère évoque dans son rapport le cas de l’attaque informatique subie par l’entreprise française Saint-Gobain au mois d’août 2017, qui aurait entraîné des pertes s’élevant à environ 250 millions d’euros.

À la fin du mois de novembre dernier, la révélation de l’attaque dont a été victime la société Uber inquiète également : quelque 57 millions de comptes utilisateurs de la plateforme ont été piratés, dont les données de 600 000 chauffeurs de l’entreprise. Alors que cette attaque remonte à la fin de l’année 2016, l’entreprise n’avait jusqu’à présent rien dit, et avait même payé une rançon aux hackers pour que ces derniers ne révèlent pas cette énorme fuite de données personnelles…

On pourrait multiplier les exemples, et vous l’avez fait, mes chers collègues. Ce phénomène ne concerne pas uniquement de grandes multinationales. Les attaques informatiques, de plus ou moins grande ampleur, concernent aussi des entreprises de taille parfois bien plus modestes et se répercutent sur un grand nombre de citoyens.

Aujourd’hui croissante au niveau de l’ensemble des trafics et parfois des plus sordides, la cybercriminalité dispose d’un champ d’action quasi illimité. La puissance publique doit réagir, s’adapter, et c’est l’objet de la directive européenne du 6 juillet 2016.

Il s’agit de protéger les opérateurs de services essentiels dans les secteurs publics et privés concernant la santé, le transport, l’énergie, l’alimentation, la logistique et le social. Peut-être d’autres domaines seront-ils ajoutés. Désignés par le Premier ministre, ces acteurs essentiels au bon fonctionnement de l’économie et de la vie quotidienne appliqueront des règles de cybersécurité particulières, suivies et évolutives.

Le cas Uber, que je viens d’évoquer, est un bon exemple de ce qui peut se passer quand un acteur économique est confronté à ce type d’attaque : il se tait. Il se tait de peur que sa réputation n’en soit gravement ternie, exposant par là même des milliers de citoyens ; empêchant aussi par son silence la réaction des services de l’État, qui est seul en situation à la fois d’enquêter sur les raisons de l’attaque, d’apporter des solutions d’urgence et, surtout, d’éviter que d’autres acteurs ne subissent le même sort.

Pour ces raisons, les dispositions du présent texte imposent des règles obligeant le signalement des incidents de sécurité. Celles-ci sont fondamentales pour que l’ANSSI puisse pleinement jouer son rôle, aussi bien de manière préventive qu’en temps de gestion de crise et, bien sûr, en termes d’évaluation et d’évolution du système.

Concernant le renforcement de la législation sur les armes à feu, deuxième volet important de ce projet de loi, nous ne pouvons, à l’instar de notre rapporteur, qu’être légèrement déçus par rapport aux collectionneurs. Quel est l’enjeu ? Est-ce le régime juridique applicable aux 220 000 tireurs sportifs que compte notre pays ? Ou bien les obligations à la charge des collectionneurs ? Probablement pas.

Selon nous, le sujet qui doit concentrer toute notre énergie est la lutte contre le trafic d’armes. Or force est de constater que peu des dispositions qui nous sont soumises ce soir sont de nature à radicalement endiguer ce trafic, lequel alimente aussi bien la grande criminalité organisée que le terrorisme.

C’est pourtant la France, après les terribles attentats qu’elle a subis en 2015, qui avait été à l’origine de la directive que nous transposons aujourd’hui. Nous sommes naturellement favorables aux dispositions prévues par le présent projet de loi, qui visent néanmoins à sécuriser les conditions de ventes d’armes à feu.

Je dirai un mot tout de même du durcissement du régime des armes historiques. Nous avons été plusieurs à être interpellés dans nos départements sur cette question. De nombreux collectionneurs d’armes anciennes ont émis des craintes sur l’article 16 du texte, qui précise que le classement de ces armes et leurs reproductions ne relèvent plus de la loi, mais sera défini par décret en Conseil d’État.

Or les armes historiques elles-mêmes demeurent en dehors du champ d’application de la directive. La commission des lois, qui a excellemment travaillé, a fort opportunément considéré que les armes historiques et leurs reproductions seront classées en catégorie D2, exception faite de certaines armes dangereuses qui seront énumérées par décret.

Je tiens à remercier chaleureusement notre collègue Philippe Bonnecarrère et à le féliciter pour la grande qualité de son rapport.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et dadministration générale. Moi aussi !

Mme Sophie Joissains. Il a su faire preuve de pédagogie dans la présentation de son analyse sur des sujets très techniques, notamment sur l’aspect de cybersécurité. Surtout, il a veillé à éviter deux écueils : la sous-transposition et la surtransposition, dérives que le Sénat, sa commission des lois et sa commission des affaires européennes dénoncent régulièrement.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste, comme les autres groupes, du reste, votera en faveur du projet de loi, dans la rédaction issue des travaux de notre commission des lois. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)

M. le président. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’union européenne dans le domaine de la sécurité

TITRE Ier

DISPOSITIONS TENDANT À TRANSPOSER LA DIRECTIVE (UE) 2016/1148 DU PARLEMENT EUROPÉEN ET DU CONSEIL DU 6 JUILLET 2016 CONCERNANT DES MESURES DESTINÉES À ASSURER UN NIVEAU ÉLEVÉ COMMUN DE SÉCURITÉ DES RÉSEAUX ET DES SYSTÈMES D’INFORMATION DANS L’UNION

Chapitre Ier

Dispositions communes

Discussion générale (suite)
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Article 2

Article 1er

Pour l’application du présent titre, on entend par réseau et système d’information :

1° Tout réseau de communication électronique tel que défini au 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques ;

2° Tout dispositif ou tout ensemble de dispositifs interconnectés ou apparentés, dont un ou plusieurs éléments assurent, en exécution d’un programme, un traitement automatisé de données numériques ;

3° Les données numériques stockées, traitées, récupérées ou transmises par les éléments mentionnés aux 1° et 2° du présent article en vue de leur fonctionnement, utilisation, protection et maintenance.

La sécurité des réseaux et systèmes d’information consiste en leur capacité de résister, à un niveau de confiance donné, à des actions qui compromettent la disponibilité, l’authenticité, l’intégrité ou la confidentialité de données stockées, transmises ou faisant l’objet d’un traitement, et des services connexes que ces réseaux et systèmes d’information offrent ou rendent accessibles.

M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.

(Larticle 1er est adopté.)

Article 1er
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Article 3

Article 2

Les dispositions du présent titre ne sont pas applicables aux opérateurs mentionnés au 15° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques ni aux prestataires de services de confiance soumis aux exigences énoncées à l’article 19 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE.

Elles ne sont pas non plus applicables aux opérateurs économiques essentiels ni aux fournisseurs de service numérique soumis, en application d’un acte juridique de l’Union européenne, à des exigences sectorielles de sécurité pour leurs réseaux et systèmes d’information ou de notification d’incidents ayant un effet au moins équivalent aux obligations résultant de l’application du présent titre.

M. le président. L’amendement n° 14, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Rédiger ainsi cet alinéa :

Elles ne sont pas non plus applicables aux opérateurs de services essentiels ni aux fournisseurs de service numérique soumis, en application d’un acte juridique de l’Union européenne, pour les réseaux et systèmes d’information visés au premier alinéa des articles 5 et 12, à des exigences sectorielles de sécurité et de notification d’incidents ayant un effet au moins équivalent aux obligations résultant de l’application des dispositions du présent titre.

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Cet amendement prévoit une nouvelle version du texte qui permet de désigner à la fois les opérateurs et leurs réseaux, les rédactions précédentes ne désignant que les uns ou les autres, alternativement.

L’enjeu est de pouvoir établir une distinction, au sein d’un même opérateur, entre ces différents réseaux.

De nombreux opérateurs pourraient être qualifiés d’opérateurs d’importance vitale – OIV – pour certaines parties de leur réseau et d’opérateurs de services essentiels – OSE – pour d’autres.

Cette définition stricte permettra de n’imposer aux opérateurs que les obligations applicables à la partie de réseau concernée.

Cette distinction évitera de faire subir un poids trop important à certaines entreprises en les contraignant à respecter toutes les obligations des OIV ou toutes celles des OSE.

Je précise que l’approche plus subtile retenue dans cet amendement est issue du travail que nous avons mené avec la commission.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. L’avis de la commission est favorable.

M. le secrétaire d’État s’en est expliqué : cet amendement permet à la fois de faire application de la législation sectorielle ou du présent projet de loi.

Nous reconnaissons bien volontiers que cette rédaction, si vous me permettez d’utiliser cette formule quelque peu triviale, mes chers collègues, permet d’éviter tout trou dans la raquette.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 14.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2, modifié.

(Larticle 2 est adopté.)

Article 2
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Article 4

Article 3

I. – Les prestataires de service habilités à effectuer des contrôles en application du présent titre sont soumis aux mêmes règles de confidentialité et de discrétion professionnelle que les agents publics et les services de l’État à l’égard des informations qu’ils recueillent auprès des opérateurs mentionnés à l’article 5 et des fournisseurs de service numérique mentionnés à l’article 11.

II. – Lorsqu’elle informe le public ou les États membres de l’Union européenne d’incidents dans les conditions prévues aux articles 7 et 13, l’autorité administrative compétente tient compte des intérêts économiques de ces opérateurs et fournisseurs de service numérique et veille à ne pas révéler d’informations susceptibles de porter atteinte à leur sécurité et au secret en matière commerciale et industrielle. – (Adopté.)

Article 3
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Article 5

Article 4

Les modalités d’application du présent titre sont déterminées par décret en Conseil d’État. Ce décret fixe notamment la liste des services essentiels au fonctionnement de la société ou de l’économie mentionnés à l’article 5, ainsi que, pour chacun des domaines de sécurité mentionnés à l’article 12, la nature des mesures que les fournisseurs de service numérique sont tenus de mettre en œuvre. – (Adopté.)

Chapitre II

Dispositions relatives à la sécurité des réseaux et systèmes d’information des opérateurs de services essentiels

Article 4
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Article 6

Article 5

Les opérateurs, publics ou privés, offrant des services essentiels au fonctionnement de la société ou de l’économie et dont la continuité pourrait être gravement affectée par des incidents touchant les réseaux et systèmes d’information nécessaires à la fourniture desdits services sont soumis aux dispositions du présent chapitre. Ces opérateurs sont désignés par le Premier ministre. La liste de ces opérateurs est actualisée à intervalles réguliers et au moins tous les deux ans.

Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux opérateurs mentionnés aux articles L. 1332-1 et L. 1332-2 du code de la défense.

M. le président. L’amendement n° 15, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

, pour les systèmes d’information mentionnés au premier alinéa de l’article L. 1332–6–1 du même code

La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Comme l’amendement n° 14 à l’article 2, cet amendement vise à rédiger plus précisément le texte.

Cette reformulation est encore plus essentielle que la précédente, car elle fait cette fois référence aux obligations liées aux OIV.

L’enjeu est ici de pouvoir distinguer les systèmes d’information vitaux et non vitaux au sein d’un OIV afin que ce dernier puisse être contraint de façon plus faible dans le cas d’un système d’information pouvant être qualifié d’OSE.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Même avis favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 15.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 5, modifié.

(Larticle 5 est adopté.)

Article 5
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Article 7

Article 6

Le Premier ministre fixe les règles de sécurité nécessaires à la protection des réseaux et systèmes d’information mentionnés au premier alinéa de l’article 5. Ces règles ont pour objet de garantir un niveau de sécurité adapté au risque existant, compte tenu de l’état des connaissances. Elles définissent les mesures appropriées pour prévenir les incidents qui compromettent la sécurité des réseaux et systèmes d’information utilisés pour la fourniture des services essentiels ou pour en limiter l’impact afin d’assurer la continuité de ces services essentiels. Les opérateurs mentionnés au même article 5 appliquent ces règles à leurs frais.

Les règles prévues au premier alinéa du présent article peuvent notamment prescrire que les opérateurs recourent à des dispositifs matériels ou logiciels ou à des services informatiques dont la sécurité a été certifiée. – (Adopté.)

Article 6
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Article 8

Article 7

I. – Les opérateurs mentionnés à l’article 5 déclarent, sans délai après en avoir pris connaissance, à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information mentionnée à l’article L. 2321-1 du code de la défense, les incidents affectant les réseaux et systèmes d’information nécessaires à la fourniture de services essentiels, lorsque ces incidents ont ou sont susceptibles d’avoir, compte tenu notamment du nombre d’utilisateurs et de la zone géographique touchés ainsi que de la durée de l’incident, un impact significatif sur la continuité de ces services.

II. – Après avoir consulté l’opérateur concerné, l’autorité administrative peut informer le public d’un incident mentionné au I du présent article, lorsque cette information est nécessaire pour prévenir ou traiter un incident. Lorsqu’un incident a un impact significatif sur la continuité de services essentiels fournis par l’opérateur à d’autres États membres de l’Union européenne, l’autorité administrative en informe les autorités ou organismes compétents de ces États.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano et Castelli, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer les mots :

après en avoir pris connaissance

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Comme nous l’avons évoqué lors de la discussion générale, les risques liés aux cyberattaques sont encore largement sous-estimés, aussi bien par les utilisateurs que par l’écosystème.

Ainsi, 51 % des citoyens européens ne se sentent pas suffisamment informés sur les risques liés aux cyberattaques et deux tiers des entreprises n’ont jamais évalué les risques financiers liés à ces attaques, selon une estimation de la Commission européenne.

La directive souligne pourtant que les informations relatives aux incidents s’avèrent de plus en plus précieuses pour le grand public et pour les entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises.

Bien que ces incidents soient de plus en plus médiatisés, la plupart d’entre eux se règlent dans la confidentialité, avec le concours de l’ANSSI et des centres d’alerte et de réaction aux attaques informatiques déjà mis en place.

La directive vise justement à renforcer la coopération de l’ensemble de ces acteurs au sein de l’Union européenne. À cette fin, elle prévoit que les OSE notifient les incidents à l’autorité compétente « sans retard injustifié », une formule peu courante en droit français.

Le rapporteur lui a donc préféré l’expression « sans délai après en avoir pris connaissance ».

Nous considérons qu’il serait préférable de mentionner simplement que ces notifications ont lieu sans délai, ce qui serait plus conforme à l’esprit de la directive, qui vise à contraindre les opérateurs de services essentiels à adapter leurs pratiques au risque accru de cyberattaques.

Il est évident que la sanction prévue à l’alinéa 2 de l’article 9 ne vise pas les dirigeants d’opérateurs aptes à prouver que l’incident significatif en cause était difficilement détectable.

Par ailleurs, pour des raisons commerciales ou stratégiques, certains opérateurs pourraient être tentés de sous-communiquer ces incidents à l’ANSSI afin de ne pas perdre d’utilisateurs si cette attaque était rendue publique.

C’est pourquoi nous préférons la formule « sans délai », qui ne laisse place à aucune ambiguïté. La sécurité des utilisateurs et de leurs données doit primer sur toute autre chose. Une bonne coopération serait en outre favorable à l’ensemble de l’écosystème.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. J’aimerais convaincre notre collègue de retirer cet amendement, pour deux raisons.

Premièrement, la rédaction que nous avons retenue concourt à une harmonisation avec le sujet parallèle du RGPD, le règlement général sur la protection des données, auquel il a été fait référence à plusieurs reprises.

Deuxièmement, d’un point de vue pratique, les incidents en matière informatique peuvent être découverts plusieurs mois après le début de l’intrusion – certains exemples sont connus.

Il serait donc quelque peu contre-productif d’obliger une entreprise à signaler un incident qu’elle n’a pas encore découvert, la réalité étant qu’elle ne pourra dans certains cas en prendre connaissance que plusieurs mois après.

Voilà pourquoi nous avons retenu cette formulation.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Je m’en remets à la sagesse du Sénat.

Tous les arguments ont, me semble-t-il, été échangés. Vous avez notamment rappelé les enjeux et le parallèle avec le RGPD. Nous partageons tous l’ambition absolue que les opérateurs signalent les incidents dès qu’ils en ont connaissance.

M. le président. Madame Carrère, l’amendement n° 2 rectifié est-il maintenu ?

Mme Maryse Carrère. Non, je le retire, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 2 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 7.

(Larticle 7 est adopté.)

Article 7
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Article 9

Article 8

Le Premier ministre peut soumettre les opérateurs mentionnés à l’article 5 à des contrôles destinés à vérifier le respect des obligations prévues par le présent chapitre ainsi que le niveau de sécurité des réseaux et systèmes d’information nécessaires à la fourniture de services essentiels.

Les contrôles sont effectués, sur pièce et sur place, par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information mentionnée à l’article L. 2321-1 du code de la défense ou par des prestataires de service habilités à cet effet par le Premier ministre. Le coût des contrôles est à la charge des opérateurs.

Les opérateurs sont tenus de communiquer à l’autorité ou au prestataire de service chargé du contrôle prévu au premier alinéa les informations et éléments nécessaires pour réaliser le contrôle, y compris les documents relatifs à leur politique de sécurité et, le cas échéant, les résultats d’audit de sécurité et leur permettre d’accéder aux réseaux et systèmes d’information faisant l’objet du contrôle afin d’effectuer des analyses et des relevés d’informations techniques.

En cas de manquement constaté à l’occasion d’un contrôle, l’autorité mentionnée au deuxième alinéa peut mettre en demeure les dirigeants de l’opérateur concerné de se conformer, dans un délai qu’elle fixe, aux obligations qui incombent à l’opérateur en vertu du présent titre. Le délai est déterminé en tenant compte des conditions de fonctionnement de l’opérateur et des mesures à mettre en œuvre.

M. le président. L’amendement n° 13 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano et Castelli, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les mots :

peut soumettre

par le mot :

soumet

La parole est à M. Jean-Claude Requier.

M. Jean-Claude Requier. Les deux premiers alinéas de l’article 14 de la directive contraignent les États membres à veiller à ce que les OSE, les opérateurs de services essentiels, prennent effectivement les mesures techniques et organisationnelles nécessaires pour la gestion des risques « cyber » et pour prévenir les incidents.

Il ne s’agit pas d’une faculté pour les États membres, mais bien d’une obligation, qui, pour être effective, nécessiterait la mise en place d’un contrôle systématique des OSE, ce que ne prévoit pas la rédaction actuelle.

L’amendement vise donc à adapter le texte aux exigences fixées par la directive. Sans contrôle, le respect des nouvelles exigences de cybersécurité est voué à rester théorique.

Nous avons conscience que la systématisation de tels contrôles et l’application effective de ces nouvelles exigences de sécurité pourraient constituer une importante charge financière supplémentaire pour les opérateurs concernés, qui ne sont pas encore en conformité au regard de ces règles.

C’est le cas notamment des établissements publics, tels que les hôpitaux, qui sont des cibles privilégiées des cyberpirates, comme l’a démontré récemment le piratage du NHS au Royaume-Uni. Sans parler des graves dysfonctionnements et des pertes humaines qu’une telle attaque pourrait occasionner, les hôpitaux accumulent également de nombreuses données personnelles qui pourraient être exploitées à des fins de rançon.

C’est pourquoi nous aurions souhaité, dans le même temps, prévoir que la mise en œuvre du renforcement de la sécurité des systèmes d’information et des réseaux des établissements publics concernés soit prise en charge par l’État, de même que les contrôles conduits a posteriori. Nos amendements ont malheureusement été déclarés irrecevables financièrement.

Il s’agit toutefois d’une question dont le Gouvernement devra rapidement se préoccuper, de même que de l’articulation de ce dispositif avec la protection des données personnelles, particulièrement exposées aux cyberattaques.

Il est d’ailleurs regrettable que les dispositions mentionnées au 4° de l’article 15 de la directive ne figurent pas dans le texte de transposition : elles prévoyaient d’associer la CNIL au traitement d’attaques touchant des données personnelles.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. L’avis est défavorable.

La présentation de Jean-Claude Requier est extrêmement habile puisque notre collègue a soutenu à la fois l’amendement n° 13 rectifié et les amendements qui ont été déclarés irrecevables. (Sourires.)

L’idée défendue par Mme Carrère et M. Requier est digne d’estime, puisqu’il s’agit d’aller plus loin dans les modalités de contrôle. Elle présente toutefois deux inconvénients à nos yeux.

Premièrement, si la directive envisage effectivement les modalités de contrôle, elle ne prévoit pas forcément de contrôler chaque opérateur économique essentiel. Cela reste une faculté pour l’ANSSI et il nous semble plus raisonnable d’en rester là.

Deuxièmement – c’est l’élément fondamental –, au-delà du coût économique auquel vous avez fait référence pour les entreprises, nous craignons que votre rédaction n’épuise l’ANSSI en l’obligeant à se lancer dans des opérations de contrôle massif dont elle n’aura pas les moyens.

M. le président Philippe Bas a écouté, comme nous tous, la présentation des dispositions budgétaires concernant l’ANSSI : sauf erreur de ma part, 25 postes ont été accordés à l’Agence sur les 50 demandés, en dépit de la multiplication de ses missions.

C’est donc plus l’aspect matériel que juridique qui nous conduit à ne pas vous suivre, monsieur Requier.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. Le Gouvernement est également défavorable à cet amendement.

Je pourrais reprendre les arguments exposés par le rapporteur. Il m’apparaît aussi très important que le Premier ministre et l’ANSSI, qui sont en charge de cette mission, puissent porter un plan stratégique étalé sur l’année et adapté aux différents types d’acteurs et aux risques qui existent en France.

Matériellement, il serait impossible d’envisager un contrôle automatique, mais, y compris d’un point de vue stratégique, il est important de mobiliser nos moyens et nos intelligences sur les secteurs et les éléments essentiels.

M. le président. Monsieur Requier, l’amendement n° 13 rectifié est-il maintenu ?

M. Jean-Claude Requier. Non, monsieur le président. J’ai été séduit par les argumentations du rapporteur et du secrétaire d’État. Cet amendement d’appel visait au demeurant à poser le problème, et non à le résoudre ce soir : je le retire.

M. le président. L’amendement n° 13 rectifié est retiré.

L’amendement n° 7 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano et Castelli, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 4, première phrase

Remplacer les mots :

peut mettre

par le mot :

met

M. Jean-Claude Requier. Je retire également cet amendement, monsieur le président !

M. le président. L’amendement n° 7 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 8.

(Larticle 8 est adopté.)

Article 8
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Article 10

Article 9

Est puni d’une amende de 100 000 € le fait, pour les dirigeants des opérateurs mentionnés à l’article 5, de ne pas se conformer aux règles de sécurité mentionnées à l’article 6, à l’issue du délai fixé par la mise en demeure qui leur a été adressée en application de l’article 8.

Est puni d’une amende de 75 000 € le fait, pour les mêmes personnes, de ne pas satisfaire à l’obligation de déclaration d’incident prévue au I de l’article 7.

Est puni d’une amende de 125 000 € le fait, pour les mêmes personnes, de faire obstacle aux opérations de contrôle mentionnées à l’article 8. – (Adopté.)

Chapitre III

Dispositions relatives à la sécurité des réseaux et systèmes d’information des fournisseurs de service numérique

Article 9
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Article 11

Article 10

Pour l’application du présent chapitre, on entend :

1° Par service numérique tout service fourni normalement contre rémunération, à distance, par voie électronique et à la demande individuelle d’un destinataire de services ;

2° Par fournisseur de service numérique toute personne morale qui fournit l’un des services suivants :

a) Place de marché en ligne à savoir un service numérique qui permet à des consommateurs ou à des professionnels au sens du dernier alinéa de l’article liminaire du code de la consommation de conclure des contrats de vente ou de service en ligne avec des professionnels soit sur le site internet de la place de marché en ligne, soit sur le site internet d’un professionnel qui utilise les services informatiques fournis par la place de marché en ligne ;

b) Moteurs de recherche en ligne à savoir un service numérique qui permet aux utilisateurs d’effectuer des recherches sur, en principe, tous les sites internet ou sur les sites internet dans une langue donnée, sur la base d’une requête lancée sur n’importe quel sujet sous la forme d’un mot clé, d’une phrase ou d’une autre entrée, et qui renvoie des liens à partir desquels il est possible de trouver des informations en rapport avec le contenu demandé ;

c) Service d’informatique en nuage à savoir un service numérique qui permet l’accès à un ensemble modulable et variable de ressources informatiques pouvant être partagées. – (Adopté.)

Article 10
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Article 12

Article 11

I. – Tout fournisseur de service numérique au sens de l’article 10 qui offre ses services sur le territoire national et qui n’a désigné aucun représentant dans un autre État membre de l’Union européenne procède à la désignation d’un représentant établi sur le territoire national auprès de l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information prévue par l’article L. 2321-1 du code de la défense aux fins d’application des dispositions du présent chapitre. Cette désignation ne fait pas obstacle aux actions qui pourraient être introduites, en application de l’article 15, à l’encontre des dirigeants du fournisseur concerné.

II. – Sont soumis aux dispositions du présent chapitre les fournisseurs de service numérique qui offrent leurs services dans l’Union européenne :

1° Lorsque leur siège social ou leur établissement principal est établi sur le territoire national ;

2° Ou qui ont, en application du I, désigné un représentant sur le territoire national.

III. – Les dispositions du présent chapitre ne sont pas applicables aux entreprises qui emploient moins de cinquante salariés et dont le chiffre d’affaires annuel n’excède pas 10 millions d’euros.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Mounir Mahjoubi, secrétaire dÉtat. L’article 11 vise à transposer l’article 18 de la directive, qui prévoit que les fournisseurs de service numérique établis hors de l’Union devront désigner un représentant dans l’un des États membres et se conformer aux dispositions prises par ce dernier pour la transposition de la directive.

Il pouvait toutefois exister un « trou dans la raquette » si aucun représentant n’était nommé, en dépit de cette obligation d’en désigner un sur le territoire de l’Union.

Nous pensons que la rédaction proposée permet de répondre à cette préoccupation.

Néanmoins, l’idéal serait de définir un mécanisme unifié au niveau européen qui permettrait d’éviter que deux États n’imposent simultanément cette obligation au même fournisseur.

La formulation actuelle de l’article 11 le permet, c’est assurément celle qui assure la plus grande efficience et je vous remercie de l’avoir proposée.

Gardons toutefois ma remarque à l’esprit. Nous avons également contacté la Commission pour leur signaler ce point qui pourrait être utile à d’autres gouvernements et d’autres parlements européens.

M. le président. Je mets aux voix l’article 11.

(Larticle 11 est adopté.)

Article 11
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Article 13

Article 12

Les fournisseurs de service numérique mentionnés à l’article 11 garantissent, compte tenu de l’état des connaissances, un niveau de sécurité des réseaux et des systèmes d’information nécessaire à la fourniture de leurs services dans l’Union européenne adapté aux risques existants.

À cet effet, ils sont tenus d’identifier les risques qui menacent la sécurité de ces réseaux et systèmes d’information et de prendre des mesures techniques et organisationnelles nécessaires et proportionnées pour gérer ces risques, pour éviter les incidents de nature à porter atteinte à ces réseaux et systèmes d’information ainsi que pour en réduire au minimum l’impact, de manière à garantir la continuité de leurs services. Ces mesures interviennent dans chacun des domaines suivants :

1° La sécurité des systèmes et des installations ;

2° La gestion des incidents ;

3° La gestion de la continuité des activités ;

4° Le suivi, l’audit et le contrôle ;

5° Le respect des normes internationales. – (Adopté.)

Article 12
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Article 14

Article 13

I. – Les fournisseurs de service numérique mentionnés à l’article 11 déclarent, sans délai après en avoir pris connaissance, à l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information mentionnée à l’article L. 2321-1 du code de la défense, les incidents affectant les réseaux et systèmes d’information nécessaires à la fourniture de leurs services dans l’Union européenne, lorsque les informations dont ils disposent font apparaître que ces incidents ont un impact significatif sur la fourniture de ces services, compte tenu notamment du nombre d’utilisateurs touchés par l’incident, de sa durée, de sa portée géographique, de la gravité de la perturbation du fonctionnement du service et de l’ampleur de son impact sur le fonctionnement de la société ou de l’économie.

II. – Après avoir consulté le fournisseur de service numérique concerné, l’autorité administrative peut informer le public d’un incident mentionné au I ou imposer au fournisseur de le faire, lorsque cette information est nécessaire pour prévenir ou traiter un incident ou est justifiée par un motif d’intérêt général. Lorsqu’un incident a des conséquences significatives sur les services fournis à d’autres États membres de l’Union européenne, l’autorité administrative en informe les autorités ou organismes compétents de ces États, qui peuvent rendre public l’incident.

M. le président. L’amendement n° 9 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano et Castelli, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Supprimer les mots :

après en avoir pris connaissance

La parole est à Mme Maryse Carrère.

Mme Maryse Carrère. Compte tenu du sort qui a été réservé à l’amendement n° 2 rectifié, je retire le présent amendement, qui visait à appliquer les mêmes dispositions aux fournisseurs de service numérique.

M. le président. L’amendement n° 9 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l’article 13.

(Larticle 13 est adopté.)

Article 13
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Article 15

Article 14

Lorsque le Premier ministre est informé qu’un fournisseur de service numérique mentionné à l’article 11 ne satisfait pas à l’une des obligations prévues aux articles 12 ou 13, il peut le soumettre à des contrôles destinés à vérifier le respect des obligations prévues par le présent chapitre ainsi que le niveau de sécurité des réseaux et systèmes d’information indispensable à la fourniture de ces services. Il en informe si nécessaire les autorités compétentes des autres États membres dans lesquels sont situés des réseaux et systèmes d’information de ce fournisseur et coopère avec elles.

Les contrôles sont effectués, sur pièce et sur place, par l’autorité nationale de sécurité des systèmes d’information mentionnée à l’article L. 2321-1 du code de la défense ou par des prestataires de service habilités à cet effet par le Premier ministre. Le coût des contrôles est à la charge des fournisseurs de service numérique.

Les fournisseurs de service numérique sont tenus de communiquer à l’autorité ou au prestataire de service chargé du contrôle prévu au premier alinéa du présent article les informations nécessaires pour évaluer la sécurité de leurs réseaux et systèmes d’information, y compris les documents relatifs à leurs politiques de sécurité et, le cas échéant, leur permettre d’accéder aux réseaux et systèmes d’information faisant l’objet du contrôle afin d’effectuer des analyses et des relevés d’informations techniques.

En cas de manquement constaté à l’occasion d’un contrôle, l’autorité mentionnée au deuxième alinéa peut mettre en demeure les dirigeants du fournisseur concerné de se conformer, dans un délai qu’elle fixe, aux obligations qui incombent au fournisseur en vertu du présent titre. Le délai est déterminé en tenant compte des conditions de fonctionnement du fournisseur et des mesures à mettre en œuvre. – (Adopté.)

Article 14
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Article 16

Article 15

Est puni d’une amende de 75 000 € le fait, pour les dirigeants des fournisseurs de service numérique mentionnés à l’article 11, de ne pas se conformer aux mesures de sécurité mentionnées à l’article 12, à l’issue du délai fixé par la mise en demeure qui leur a été adressée en application de l’article 14.

Est puni d’une amende de 50 000 € le fait, pour les mêmes personnes, de ne pas satisfaire aux obligations de déclaration d’incident ou d’information du public prévues à l’article 13.

Est puni d’une amende de 100 000 € le fait, pour les mêmes personnes, de faire obstacle aux opérations de contrôle mentionnées à l’article 14. – (Adopté.)

TITRE II

DISPOSITIONS RELATIVES AU CONTRÔLE DE L’ACQUISITION ET DE LA DÉTENTION D’ARMES

Article 15
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Article 17

Article 16

Le chapitre Ier du titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 311-2 est ainsi modifié :

a) Au 4°, les mots : « soumises à enregistrement et armes » sont supprimés ;

b) À la fin de la seconde phrase du neuvième alinéa, les mots : « ou des enregistrements » sont supprimés ;

2° L’article L. 311-4 est complété par les mots : « , sauf certaines armes présentant une dangerosité avérée et dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État ».

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le classement des armes ne relève pas de la loi, mais du règlement, comme le rappelle l’avis du Conseil d’État.

Vous avez souhaité un classement législatif des armes historiques et de leur reproduction. Nous émettons une première réserve sur ce point.

La deuxième réserve tient au fait que la directive que nous transposons érige en principe le classement dans une catégorie contrôlée par l’État des reproductions d’armes historiques.

Vous inversez la logique de la directive en posant comme principe l’absence de contrôle de l’État et en renvoyant au décret le soin de préciser d’éventuelles dérogations.

Troisièmement, vous parlez de « dangerosité avérée ». On ne sait pas très bien quel est le sens de cette expression et nous avons quelques doutes sur sa compatibilité avec la directive.

Je souhaiterais que ces différents points soient revus dans la suite du processus législatif.

En conclusion, je rappelle à ceux qui auraient des doutes que les armes historiques restent libres de détention et que les reproductions d’armes anciennes ne seront intégrées dans un régime de contrôle qu’à la condition d’être manifestement plus performantes que les modèles originaux.

M. le président. Je mets aux voix l’article 16.

(Larticle 16 est adopté.)

Article 16
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Article 18

Article 17

Le chapitre II du titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 312-2 est ainsi modifié :

a) Après le mot : « scientifique », la fin de la deuxième phrase est ainsi rédigée : « ainsi que, pour des activités professionnelles ou sportives, des personnes peuvent être autorisés à acquérir et à détenir des matériels de guerre, armes et éléments d’armes de catégorie A. » ;

b) La troisième phrase est ainsi rédigée : « Il fixe également les conditions dans lesquelles des personnes peuvent acquérir, à des fins de collection, des matériels de guerre. » ;

c) Est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ces dérogations sont accordées sous réserve des engagements internationaux en vigueur et des exigences de l’ordre et de la sécurité publics. » ;

2° L’article L. 312-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « B et C et d’armes de catégorie D soumises à enregistrement » sont remplacés par les mots : « A, B et C » ;

b) Le quarante-deuxième alinéa du 1° est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« – acquisition, cession ou détention sans déclaration d’armes ou de matériels de catégorie C ou de leurs munitions prévues à l’article L. 317-4-1 du présent code ;

« – détention d’un dépôt d’armes ou de munitions de catégorie C ou de certaines armes de catégorie D prévue à l’article L. 317-7 du présent code ; »

c) Au quarante-cinquième alinéa du 1°, les mots : « soumises à enregistrement » sont supprimés ;

3° À l’article L. 312-3-1, les mots : « B et C et des armes de catégorie D soumises à enregistrement » sont remplacés par les mots : « A, B et C » ;

4° À la première phrase du premier alinéa et aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 312-4, avant la lettre : « B », sont insérés les mots : « A ou » ;

5° L’article L. 312-4-2 est abrogé ;

6° Aux 1° et 2° de l’article L. 312-4-3, avant la lettre : « B », sont insérés les mots : « A ou » ;

7° Au premier alinéa de l’article L. 312-5, les mots : « et B ainsi que des armes de catégorie D figurant sur une liste établie par un décret en Conseil d’État » sont remplacés par les mots : « , B et C » ;

8° L’article L. 312-11 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « des catégories B, C et D » sont remplacés par les mots : « de toute catégorie » ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « soit à la neutraliser, » sont supprimés ;

9° À la fin du premier alinéa de l’article L. 312-13, les mots : « des catégories B, C et D » sont remplacés par les mots : « de toute catégorie » ;

10° Aux 2° et 3° de l’article L. 312-16, les mots : « B et C et des armes de catégorie D soumises à enregistrement » sont remplacés par les mots : « A, B et C » ;

11° (nouveau) Aux premier et second alinéas de l’article L. 314-2, après le mot : « catégorie », sont insérés les mots : « A ou ». – (Adopté.)

Article 17
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Article 19

Article 18

Le chapitre III du titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° L’article L. 313-2 est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-2. – Nul ne peut, s’il n’est titulaire d’un agrément relatif à son honorabilité professionnelle et privée et à ses compétences professionnelles délivré par l’autorité administrative, exercer l’activité qui consiste, à titre principal ou accessoire, soit en la fabrication, le commerce, l’échange, la location, la location-vente, le prêt, la modification, la réparation ou la transformation, soit en la négociation ou l’organisation d’opérations en vue de l’achat, de la vente, de la fourniture ou du transfert d’armes à feu, de munitions ou de leurs éléments essentiels. » ;

2° Le dernier alinéa de l’article L. 313-3 est supprimé ;

3° L’article L. 313-5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 313-5. – Les matériels, armes, munitions ou leurs éléments essentiels des catégories A, B et C ainsi que des armes et munitions de catégorie D énumérées par décret en Conseil d’État acquis, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 313-4, entre particuliers, directement ou à distance, ne peuvent être livrés que dans les locaux mentionnés aux premier et dernier alinéas de l’article L. 313-3, aux fins de vérification de l’identité de l’acquéreur, des pièces mentionnées à l’article L. 312-4-1 ou, le cas échéant, de l’autorisation d’acquisition et de détention de l’acquéreur mentionnée à l’article L. 312-4.

« La transaction est réputée parfaite à compter de la remise effective à l’acquéreur.

« Si la transaction a été faite dans le cadre des activités mentionnées à l’article L. 313-2, ces matériels, armes, munitions ou éléments essentiels acquis, par dérogation au premier alinéa de l’article L. 313-4, par correspondance ou à distance, peuvent être livrés directement à l’acquéreur. » ;

4° Sont ajoutés des articles L. 313-6 et L. 313-7 ainsi rédigés :

« Art. L. 313-6. – Les personnes physiques ou morales autorisées à exercer les activités mentionnées à l’article L. 313-2 peuvent refuser de conclure toute transaction visant à acquérir des armes, des munitions ou leurs éléments dont il est raisonnable de considérer qu’elle présente un caractère suspect, en raison notamment de son échelle ou de sa nature.

« Toute tentative de transaction suspecte fait l’objet d’un signalement auprès d’un service désigné par le ministre de l’intérieur.

« Art. L. 313-7. – Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent chapitre. »

M. le président. L’amendement n° 12 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Artano et Castelli, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guérini, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Requier et Vall, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Supprimer les mots :

professionnelle et privée

La parole est à M. Raymond Vall.

M. Raymond Vall. Cet amendement vise à simplifier la rédaction de l’article 18, sans réduire la portée des exigences d’honorabilité pesant sur les armuriers qui sont prévues par le texte de la commission.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Avis favorable.

Nous souhaitions féliciter élégamment Mme Carrère pour son action persévérante, mais M. Vall nous prive de la possibilité de lui donner directement satisfaction… (Sourires.)

M. Raymond Vall. Je n’étais que son porte-parole ! (Nouveaux sourires.)

M. Philippe Bonnecarrère, rapporteur. Les deux rédactions ont objectivement le même effet pratique, les armuriers devant produire dans les deux cas leur casier judiciaire.

Nous ne voyons donc pas de difficulté à retenir cet amendement (M. Raymond Vall se tourne vers Mme Maryse Carrère et applaudit.), et nous remercions le RDSE de sa vive attention sur ce texte.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. L’honorabilité n’impose pas de précision et de qualification législative pour qu’elle soit utilement contrôlée.

Mais, si c’est pour faire plaisir à Mme Carrère, le Gouvernement n’y voit pas d’objection. (Sourires.)

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 12 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 18, modifié.

(Larticle 18 est adopté.)

Article 18
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Article 20

Article 19

I. – À l’article L. 314-2-1 du code de la sécurité intérieure, les mots : « ou de catégorie D soumises à enregistrement » et les mots : « ou, le cas échéant, à un enregistrement, » sont supprimés.

II. – À l’article L. 315-1 du code de la sécurité intérieure, après la lettre : « B », sont insérés les mots : « et C » et les mots : « des catégories A et B » sont remplacés par les mots : « de ces mêmes catégories ». – (Adopté.)

Article 19
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Article 21

Article 20

Le chapitre VII du titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 317-3-1, les mots : « , C ainsi que d’une ou plusieurs armes ou munitions de catégorie D mentionnées au second alinéa de l’article L. 312-4-2 » sont remplacés par les mots : « et C » ;

2° Au 4° de l’article L. 317-3-2, les mots : « ou une arme, un élément essentiel ou des munitions de catégorie D mentionnés au second alinéa de l’article L. 312-4-1, » sont supprimés ;

3° Le deuxième alinéa de l’article L. 317-4-1 est supprimé. – (Adopté.)

Article 20
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Article 21&#160;bis&#160;(nouveau)

Article 21

Le titre III du livre III de la deuxième partie du code de la défense est ainsi modifié :

1° L’article L. 2331-1 est ainsi modifié :

a) Au 4° du I, les mots : « armes soumises à enregistrement et » sont supprimés ;

b) À la fin de la seconde phrase du neuvième alinéa du même I, les mots : « ou des enregistrements » sont supprimés ;

c) Au III, après les mots : « du présent titre », sont insérés les mots : « ou au chapitre III du titre Ier du livre III du code de la sécurité intérieure » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 2339-4, les mots : « , C ainsi que d’une ou plusieurs armes ou munitions de catégorie D mentionnées au second alinéa de l’article L. 312-4-2 du code de la sécurité intérieure » sont remplacés par les mots : « et C » ;

3° Au 4° de l’article L. 2339-4-1, les mots : « ou une arme, un élément essentiel ou des munitions de catégorie D mentionnés au second alinéa de l’article L. 312-4-2 du code de la sécurité intérieure » sont supprimés. – (Adopté.)

Article 21
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Article 22

Article 21 bis (nouveau)

À la première phrase du premier alinéa de l’article 9 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, les mots : « , ainsi que celles soumises à enregistrement relevant de la catégorie D » sont supprimés. – (Adopté.)

TITRE III

DISPOSITIONS RELATIVES AU SERVICE PUBLIC RÉGLEMENTÉ GALILEO

Article 21&#160;bis&#160;(nouveau)
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Article 23

Article 22

Le titre II du livre III de la deuxième partie du code de la défense est complété par un chapitre III ainsi rédigé :

« Chapitre III

« Service public réglementé de radionavigation par satellite

« Section 1

« Activités contrôlées

« Art. L. 2323-1. – L’accès au service public réglementé offert par le système mondial de radionavigation par satellite issu du programme européen Galileo, le développement ou la fabrication de récepteurs ou de modules de sécurité conçus pour ce service et l’exportation d’équipements, de technologie ou de logiciels conçus pour ce service ne peuvent s’exercer qu’après autorisation délivrée par l’autorité administrative et sous son contrôle.

« Les autorisations délivrées en application du présent article peuvent être assorties de conditions ou de restrictions. Elles peuvent être abrogées, retirées, modifiées ou suspendues en cas de manquement du titulaire aux conditions spécifiées dans l’autorisation ou lorsque le respect des engagements internationaux de la France, la protection du service public réglementé ou celle des intérêts essentiels d’ordre public ou de sécurité publique le justifient.

« Art. L. 2323-2. – Tout transfert d’équipements, de technologie ou de logiciels conçus pour le service public réglementé offert par le système mondial de radionavigation par satellite issu du programme européen Galileo effectué depuis la France vers les autres États membres de l’Union européenne fait l’objet d’une déclaration à l’autorité administrative.

« Art. L. 2323-3. – Les dispositions de la présente section s’appliquent sans préjudice de celles du chapitre V du titre III du présent livre et du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage.

« Les modalités d’application de la présente section sont fixées par décret en Conseil d’État.

« Section 2

« Sanctions pénales

« Art. L. 2323-4. – Est puni d’une amende de 200 000 € le fait de se livrer à une activité définie à l’article L. 2323-1 :

« 1° Sans autorisation ;

« 2° Sans respecter les conditions ou restrictions dont est assortie l’autorisation mentionnée au même article L. 2323-1.

« La tentative des délits prévus aux alinéas précédents est punie des mêmes peines.

« Art. L. 2323-5. – Est punie d’une amende de 50 000 € la méconnaissance de l’obligation prévue à l’article L. 2323-2.

« Art. L. 2323-6. – I. – Les personnes physiques coupables de l’une des infractions prévues aux articles L. 2323-4 et L. 2323-5 encourent également les peines complémentaires suivantes :

« 1° La confiscation, suivant les modalités prévues par l’article 131-21 du code pénal, de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de la chose qui en est le produit, à l’exception des objets susceptibles de restitution ;

« 2° L’interdiction, suivant les modalités prévues par l’article 131-27 du même code et pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer une fonction publique ou d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise ;

« 3° La fermeture, dans les conditions prévues par l’article 131-33 dudit code et pour une durée de cinq ans au plus, des établissements ou de l’un ou de plusieurs des établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;

« 4° L’exclusion, dans les conditions prévues par l’article 131-34 du même code et pour une durée de cinq ans au plus, des marchés publics.

« II. – Les personnes morales déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l’article 121-2 du code pénal, des infractions définies à la présente section encourent, outre l’amende suivant les modalités prévues par l’article 131-38 du même code, les peines prévues par les 1°, 2°, 4°, 5°, 8°, 9° et 12° de l’article 131-39 dudit code. » – (Adopté.)

TITRE IV

DISPOSITIONS APPLICABLES À L’OUTRE-MER

Article 22
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Article 24 (début)

Article 23

I. – Les dispositions des titres Ier et V sont applicables à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, dans leur rédaction résultant de la présente loi.

Pour l’application de l’article 2 à Wallis-et-Futuna, en Polynésie française, en Nouvelle-Calédonie et dans les Terres australes et antarctiques françaises, les mots : « exigences énoncées à l’article 19 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE » sont remplacés par les mots : « règles applicables dans l’Hexagone en vertu de l’article 19 du règlement (UE) n° 910/2014 du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché intérieur et abrogeant la directive 1999/93/CE ».

II. – Le titre IV du livre III du code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa des articles L. 344-1, L. 345-1, L. 346-1 et à la fin de l’article L. 347-1, la référence : « loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale » est remplacée par la référence : « loi n° … du … portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 345-2-1, les mots : « et du 1° de la catégorie D » sont supprimés.

III. – Le livre IV de la deuxième partie du code de la défense est ainsi modifié :

1° Les articles L. 2441-1, L. 2451-1, L. 2461-1 et L. 2471-1 sont ainsi modifiés :

a) Au premier alinéa, les références : « L. 2322-1 à L. 2335-7 » sont remplacées par les références : « L. 2322-1, L. 2323-1, L. 2323-3, L. 2323-4, L. 2323-6, L. 2331-1 à L. 2335-7 » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions des articles L. 2323-1, L. 2323-3, L. 2323-4, L. 2323-6, L. 2331-1, L. 2339-4 et L. 2339-4-1 sont applicables dans leur rédaction issue de la loi n° « du portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité. » ;

2° Au début de l’article L. 2441-3-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour l’application à Wallis-et-Futuna des dispositions de l’article L. 2323-3, les mots : « du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage » sont remplacés par les mots : « des règles applicables dans l’Hexagone en vertu du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage ».

« Pour l’application à Wallis-et-Futuna de l’article L. 2323-6, la référence à l’article L. 2323-5 est supprimée. » ;

3° Au début de l’article L. 2451-4-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour l’application en Polynésie française des dispositions de l’article L. 2323-3, les mots : « du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage » sont remplacés par les mots : « des règles applicables dans l’Hexagone en vertu du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage ».

« Pour l’application en Polynésie française de l’article L. 2323-6, la référence à l’article L. 2323-5 est supprimée. » ;

4° Au début de l’article L. 2461-4-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour l’application en Nouvelle-Calédonie des dispositions de l’article L. 2323-3, les mots : « du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage » sont remplacés par les mots : « des règles applicables dans l’Hexagone en vertu du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage ».

« Pour l’application en Nouvelle-Calédonie de l’article L. 2323-6, la référence à l’article L. 2323-5 est supprimée. » ;

5° Au début de l’article L. 2471-3-1, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :

« Pour l’application dans les Terres australes et antarctiques françaises des dispositions de l’article L. 2323-3, les mots : « du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage » sont remplacés par les mots : « des règles applicables dans l’Hexagone en vertu du règlement n° 428/2009 du Conseil du 5 mai 2009 instituant un régime communautaire de contrôle des exportations, des transferts, du courtage et du transit de biens à double usage ».

« Pour l’application dans les Terres australes et antarctiques françaises de l’article L. 2323-6, la référence à l’article L. 2323-5 est supprimée. »

IV (nouveau). – À l’article 15 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence, la référence : « de la loi n° 2017-1154 du 11 juillet 2017 prorogeant l’application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence » est remplacée par la référence : « de la loi n° … du … portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité ». – (Adopté.)

TITRE V

DISPOSITIONS TRANSITOIRES

Article 23
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Article 24 (fin)

Article 24

Les dispositions du titre Ier entrent en vigueur à compter d’une date définie par décret en Conseil d’État et au plus tard le 9 mai 2018. La désignation des opérateurs de services essentiels prévue au premier alinéa de l’article 5 intervient au plus tard le 9 novembre 2018.

Les dispositions des articles 16, 17, 19, 20, 21 ainsi que des 2°, 3° et 4° de l’article 18 entrent en vigueur à compter d’une date définie par décret en Conseil d’État et au plus tard le 14 septembre 2018.

Les dispositions du 1° de l’article 18 entrent en vigueur à compter d’une date fixée par décret en Conseil d’État et au plus tard le 14 décembre 2019.

Les personnes qui, à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, détiennent des armes acquises depuis le 13 juin 2017 qui étaient précédemment soumises à enregistrement au titre du 1° de la catégorie D et sont désormais soumises à déclaration au titre de leur classement dans la catégorie C, procèdent à leur déclaration auprès du représentant de l’État dans le département du lieu de leur domicile ou, à Paris, du préfet de police, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État et au plus tard le 14 décembre 2019. – (Adopté.)

Vote sur l’ensemble

M. le président. Personne ne demande la parole ?…

Je mets aux voix, dans le texte de la commission modifié, l’ensemble du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine de la sécurité.

(Le projet de loi est adopté.)

M. le président. Je constate que ce texte a été adopté à l’unanimité des présents.

Article 24 (début)
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7

Ordre du jour

M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mercredi 20 décembre 2017, à quatorze heures trente et, éventuellement, le soir :

1. Quatre conventions internationales examinées selon la procédure simplifiée :

- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant la ratification du protocole sur les privilèges et immunités de la juridiction unifiée du brevet (n° 6, 2017–2018).

Rapport de M. Ronan Le Gleut, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 142, 2017–2018).

Texte de la commission (n° 143, 2017–2018).

- Projet de loi autorisant la ratification du traité d’extradition entre la République française et la République socialiste du Viet Nam et du traité d’entraide judiciaire en matière pénale entre la République française et la République socialiste du Viet Nam (n° 614, 2016–2017).

Rapport de Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 140, 2017–2018).

Texte de la commission (n° 141, 2017–2018).

- Projet de loi autorisant l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sainte-Lucie et de la convention d’extradition entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sainte-Lucie (n° 576, 2016–2017).

Rapport de M. Raymond Vall, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 138, 2017–2018) ;

Texte de la commission (n° 139, 2017–2018).

- Projet de loi autorisant l’approbation de la convention sur le transfèrement des personnes condamnées entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Pérou (n° 382, 2016–2017) ;

Rapport de M. Claude Haut, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 136, 2017–2018) ;

Texte de la commission (n° 137, 2017–2018).

2. Nouvelle lecture du projet de loi de finances rectificative pour 2017.

3. Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017–644 du 27 avril 2017 relative à l’adaptation des dispositions législatives relatives au fonctionnement des ordres des professions de santé.

Rapport de Mme Corinne Imbert, rapporteur pour le Sénat (n° 130, 2017–2018) ;

Texte de la commission mixte paritaire (n° 131, 2017–2018).

4. Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à l’exercice des compétences des collectivités territoriales dans le domaine de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

 

 

nomination dun membre dune mission dinformation

Le groupe La République En Marche a présenté une candidature pour la mission dinformation sur Alstom et la stratégie industrielle du pays.

Aucune opposition ne sétant manifestée dans le délai prévu par larticle 8 du règlement, cette candidature est ratifiée : M. Frédéric Marchand est membre de la mission dinformation sur Alstom et la stratégie industrielle du pays, en remplacement de M. Martin Lévrier, démissionnaire.

 

Direction des comptes rendus

GISÈLE GODARD