compte rendu intégral
Présidence de M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
Secrétaires :
M. Éric Bocquet,
M. Yves Daudigny.
M. le président. Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant toute chose, je vous souhaite une excellente année 2018 !
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu intégral de la séance du 20 décembre 2017 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
2
Décès d’anciens sénateurs
M. le président. J’ai le regret de vous faire part du décès de nos anciens collègues Guy Besse, qui fut sénateur de l’Indre de 1982 à 1989, et Georges Othily, qui fut sénateur de la Guyane de 1989 à 2008.
3
Communication relative à une commission mixte paritaire
M. le président. J’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur le projet de loi ratifiant les ordonnances environnementales nos 2016-1058 et 2016-1060 du 3 août 2016, qui s’est réunie le mercredi 20 décembre 2017, est parvenue à l’adoption d’un texte commun.
4
Candidatures à des organismes extraparlementaires
M. le président. J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de plusieurs organismes extraparlementaires ont été publiées.
Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.
5
Questions orales
M. le président. L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.
déplacement du centre de recherche et développement de galderma
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 117, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur les conséquences sur l’emploi de la décision du groupe industriel Nestlé de déménager son centre de recherche et de développement de Galderma, situé à Sophia Antipolis, dans les Alpes-Maritimes.
Après trente-six ans de présence dans ce département, le plus grand centre de recherche du groupe devrait disparaître en septembre prochain. Au total, 550 emplois sont menacés.
Si une centaine d’opportunités professionnelles sont proposées en Suisse à travers un plan de mobilité internationale, nombre de salariés risquent de perdre leur emploi en France. Certains ne pourront évidemment pas accepter la mobilité en Suisse, en raison de leur implantation locale dans les Alpes-Maritimes, où leurs conjoints travaillent et où leurs enfants sont scolarisés.
Le plan actuellement négocié entre la direction et le comité d’entreprise n’apporte pas de réponse satisfaisante, qu’il s’agisse des indemnités, de la formation pour d’éventuelles reconversions ou de la prise en compte de l’ensemble des situations individuelles. Je pense en particulier aux salariés en situation de handicap et aux salariés dits « seniors », qui présentent malheureusement les taux d’embauche les plus faibles.
Si Nestlé a annoncé être prêt à céder la propriété intellectuelle pour faciliter la création de start-up sur le site, ce changement de statut peut se réduire à un mirage : il n’offre pas les mêmes garanties professionnelles qu’une entreprise internationale, surtout pour des scientifiques.
Enfin, la recherche d’un repreneur se révèle plus que nébuleuse. Seule l’arrivée d’une entreprise équivalente, proposant des missions consacrées au même secteur et porteuse d’une dimension sociale forte, limitera les pertes d’emplois.
Monsieur le secrétaire d’État, la décision de Nestlé date de septembre dernier ; je me suis rendue sur le site pour rencontrer les salariés en novembre ; j’ai aussitôt interrogé, à la veille de l’examen du budget, le ministre de l’économie et des finances, qui a exprimé toute l’attention de l’État aux salariés de Galderma. Mais, à ce jour, ces derniers n’ont toujours aucune visibilité au sujet d’éventuels repreneurs.
Pourtant, depuis la loi dite « Florange » de 2014, les entreprises qui cessent leur activité ont des obligations de recherche de repreneur, d’information et de dialogue social. L’État a donc une responsabilité de suivi.
Où en est-on, concrètement, dans la recherche d’un repreneur ? L’État a-t-il des propositions ?
Monsieur le secrétaire d’État, les représentants des salariés ont été reçus à Bercy et au ministère du travail en novembre dernier. La difficulté de trouver un interlocuteur chez Nestlé a alors été soulevée. Où en sont les négociations du Gouvernement avec cette entreprise ? Quelles actions concrètes a-t-on pu engager ?
Je terminerai en saluant les salariés de Galderma, représentants du comité d’entreprise, présents ce matin dans nos tribunes. Ils sont venus spécialement pour écouter votre réponse. Ainsi, ils manifestent leur motivation et leur espoir : que l’État puisse faire respecter le droit et qu’il leur apporte un appui bienveillant, à eux qui, depuis plusieurs semaines, mènent un combat courageux.
M. le président. Pour la sérénité des débats, j’invite les uns et les autres à respecter leur temps de parole.
La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de présenter, au nom du Gouvernement et en mon nom personnel, mes vœux pour la nouvelle année, à vous-mêmes et à l’ensemble de vos collègues. Je salue également les représentants des salariés présents en tribune.
Madame Estrosi Sassone, la société Galderma, située à Biot, à Sophia Antipolis, dans les Alpes-Maritimes, œuvre dans le domaine de la recherche et développement. Depuis 2016, elle est propriété à 100 % du groupe Nestlé.
Le projet de réorganisation mondial lié à l’abandon des produits de type « crème » s’accompagne à terme du désengagement du groupe de son site de Sophia Antipolis, avec les conséquences et les inquiétudes que vous avez décrites.
Ainsi, Galderma a ouvert un dossier de plan de sauvegarde de l’emploi, ou PSE. Dans un premier temps, un plan de départs volontaires porte sur 400 postes, l’entreprise proposant seulement 100 postes de reclassement au niveau de son siège, en Suisse. La première consultation du comité d’entreprise a eu lieu le 2 octobre dernier.
À la suite de cette annonce, les représentants du groupe Nestlé ont été reçus à de multiples reprises par le Gouvernement et par les services compétents de l’État, en particulier par les services de Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances.
C’est ainsi que M. Jean-Pierre Floris, délégué interministériel aux restructurations d’entreprises, a reçu la direction de Nestlé France la semaine dernière. À cette occasion, il a répété une fois encore combien le Gouvernement est attaché à la recherche d’un repreneur pour l’ensemble du site et au respect des dispositions de la loi Florange. Ce projet devra aboutir au repositionnement d’activités de pointe, qui sauront tirer parti des compétences de haut niveau dont disposent les salariés du site.
M. Floris poursuit ses discussions avec le groupe Nestlé. Il se rendra dans votre département le 7 février prochain pour faire le point sur les projets de reprise du site avec la direction et les représentants du personnel, que nous lui avons demandé de rencontrer. Si vous le souhaitez, il se tiendra aussi à votre disposition pour s’entretenir avec vous des projets à l’étude et de l’état des discussions.
Par ailleurs, je tiens à le souligner, les salariés du site et leurs représentants font preuve d’un grand sens des responsabilités. Un dialogue social constructif a pu s’engager avec la signature d’un accord de méthode. Cette démarche doit se poursuivre pour donner toutes leurs chances au site et à ses salariés et, ainsi, répondre à l’implication de ceux-ci.
Je puis vous assurer que l’État restera extrêmement attentif à la mise en œuvre de cette réorganisation, à la recherche d’activités nouvelles et aux mesures d’accompagnement qui seront proposées aux salariés. L’ensemble de ces démarches devront être à la hauteur des capacités d’un groupe comme Nestlé.
Nous appelons de nos vœux la prise en compte, dans le cadre des propositions que Nestlé fera, de chacune des spécificités et des spécialités du site et des salariés qui l’ont fait vivre jusqu’à aujourd’hui.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. Je serai brève, monsieur le président.
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de l’annonce de la visite du délégué interministériel aux restructurations d’entreprises, que j’accueille avec beaucoup d’espoir et de détermination. Je serai évidemment présente le 7 février prochain, comme les salariés et les représentants au comité d’entreprise.
J’attire également votre attention sur la question du crédit d’impôt recherche, le CIR, qui devrait aujourd’hui être encadré. Galderma a perçu plus de 68 millions d’euros au titre de ce crédit d’impôt depuis plusieurs années. Or cette entreprise n’a, d’une certaine manière, de comptes à rendre à personne quant aux nombreux avantages qui lui ont ainsi été consentis. Elle n’a même pas pris la peine de proposer, en amont, un véritable plan permettant aux salariés d’anticiper une éventuelle fermeture du site ! Il y a là un réel problème d’ordre général.
Sans doute le manque d’attractivité, aujourd’hui avéré, dont souffre notre pays, explique-t-il plus largement que des sites de cette nature n’arrivent pas à se maintenir sur notre territoire, même quand ils dépendent d’un groupe qui dégage des chiffres d’affaires très élevés en France, en Europe et dans le monde.
Le Gouvernement doit se pencher sérieusement sur l’ensemble de ces problèmes et, plus généralement, sur la situation de la science et des scientifiques en France ; ces problématiques doivent être beaucoup mieux traitées, car notre pays, et le territoire des Alpes-Maritimes en particulier, ont grand besoin de leurs emplois hautement qualifiés !
prêts de la caisse des dépôts et consignations aux collectivités territoriales
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, auteur de la question n° 124, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le secrétaire d’État, j’attire votre attention sur l’importance des investissements exigés de la part des collectivités territoriales pour réhabiliter, mettre aux normes ou créer des équipements structurants et des services aux publics au sein des territoires, notamment en milieu rural, afin d’assurer un véritable maillage territorial et de soutenir l’économie locale.
Ces collectivités territoriales, touchées par la baisse des dotations de l’État, sont confrontées au problème de l’importance de l’autofinancement pour faire aboutir leurs projets.
À la demande de l’État, la Caisse des dépôts et consignations a mis en place des dispositifs de soutien avantageux pour les collectivités territoriales ayant des besoins d’investissement en matière d’équipements publics. Je vous en donnerai trois exemples.
Tout d’abord, des prêts à long terme sont accordés au taux du livret A majoré de 1 %. Ma commune d’Arrens-Marsous, dans les Hautes-Pyrénées, a pu bénéficier de ce dispositif pour réaliser de façon urgente et nécessaire la réhabilitation d’une station d’épuration.
Ensuite, des prêts à taux zéro sont proposés. Le conseil départemental des Hautes-Pyrénées a pu en bénéficier pour acquérir et rénover un bâtiment public destiné à héberger une partie de ses services. Ce projet a permis au département de réaliser des économies de fonctionnement et d’énergie, de répondre aux mises aux normes d’accessibilité et d’offrir de meilleures conditions de travail à ses agents.
Enfin, en 2015, le préfinancement du Fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée, le FCTVA, a assuré le lissage des trésoreries.
Ces dispositifs sont beaucoup plus intéressants que ceux des banques. Ces dernières proposent des prêts de plus courte durée à des taux bien supérieurs, quand elles ne refusent pas tout simplement de prêter aux collectivités…
Or certains de ces prêts de la Caisse des dépôts et consignations, précieux pour les collectivités territoriales, semblent aujourd’hui menacés. Le sont-ils réellement ? Si tel est le cas, seront-ils remplacés par de nouveaux accompagnements financiers tout aussi avantageux ?
J’insiste encore, monsieur le secrétaire d’État, sur l’importance de ces dispositifs pour les collectivités, soucieuses de maintenir leurs investissements et, partant, l’attractivité de leur territoire.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame Artigalas, le ministère de l’économie et des finances n’a aucunement l’intention de supprimer les prêts du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations aux collectivités territoriales.
Au contraire, M. le ministre de l’économie et des finances a récemment confirmé au directeur général de la Caisse des dépôts et consignations la prolongation jusqu’en 2020 de l’enveloppe de 20 milliards d’euros en faveur du secteur public local.
Une rationalisation des dispositifs publics de financement du secteur public local paraît toutefois nécessaire. En effet, la Cour des comptes a récemment appelé l’attention du Gouvernement sur la nécessité de rationaliser les dispositifs publics locaux de financement, dans un contexte de taux extrêmement favorables pour les collectivités territoriales et de concurrence entre plusieurs dispositifs, parmi lesquels le fonds d’épargne, mais aussi la Société de financement local, la SFIL, dont la Caisse des dépôts et consignations est l’un des actionnaires, et la Banque européenne d’investissement, la BEI.
Dans ces conditions, l’enveloppe de financement sur fonds d’épargne destinée aux collectivités territoriales a vocation à constituer un mécanisme de précaution face à une éventuelle recrudescence de la défaillance du marché du financement du secteur public local.
Je rappelle que, dans ce contexte, l’offre de la SFIL, une offre de marché aujourd’hui très compétitive, est appelée à être le dispositif public pivot de l’offre de prêt.
Pour ces raisons, l’enveloppe est tarifée au taux du livret A assorti d’une marge de 130 points de base et recentrée sur les prêts de long terme, soit vingt-cinq ans et plus, pour lesquels la ressource du fonds d’épargne, qui n’intervient qu’à taux variable, contrairement aux autres dispositifs publics et aux banques commerciales, paraît compétitive dans la durée.
Par ailleurs, dans le cadre de la mise en œuvre du Grand plan d’investissement, le ministre a souhaité ouvrir, pour cinq ans, une enveloppe de 2 milliards d’euros à taux préférentiel, destinée au soutien à la rénovation énergétique des bâtiments publics, conformément aux recommandations du rapport établi par M. Pisani-Ferry à la demande de M. le Premier ministre.
Cette enveloppe, qui remplace l’actuelle enveloppe de prêts « croissance verte », sera tarifée au taux du livret A majoré de 75 points de base et pourra financer des projets d’une maturité minimale de vingt ans.
Madame la sénatrice, vous le constatez : avec le maintien des fonds de soutien, l’offre compétitive dont j’ai parlé et cette enveloppe à taux préférentiel, les dispositifs de soutien de la Caisse des dépôts et consignations aux collectivités territoriales sont maintenus. Le Gouvernement n’a aucunement l’intention de les voir supprimer.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas.
Mme Viviane Artigalas. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait tout à fait.
Je tiens simplement à souligner que, face aux difficultés financières qu’ont connues à un moment donné certaines collectivités territoriales, le prêt à taux zéro était le dispositif le plus intéressant pour elles ; il leur a permis de réaliser des équipements structurants, en particulier dans les départements ruraux où – vous n’êtes pas sans le savoir – certaines collectivités territoriales ont du mal, compte tenu de l’évolution des dotations, à boucler leur budget. (M. Xavier Iacovelli le confirme.)
Je souhaiterais vous entendre insister sur ce fait : les prêts à taux zéro restent les outils les plus intéressants pour les collectivités !
situation de certaines collectivités ayant signé un emprunt à taux fixe
M. le président. La parole est à M. André Reichardt, auteur de la question n° 142, adressée à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. André Reichardt. Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite attirer l’attention de M. le ministre de l’économie et des finances sur les difficultés auxquelles se heurtent certaines collectivités territoriales ayant signé un emprunt à taux fixe auprès de Dexia.
À titre d’exemple, une commune de mon département a contracté auprès de Dexia, en 2007 – l’année est naturellement importante –, un emprunt de 2 millions d’euros à rembourser sur vingt ans au taux fixe de 4,72 %. Ce dernier est très loin des taux pratiqués à l’heure actuelle, mais il était tout à fait conforme aux conditions pratiquées à l’époque : l’emprunt en question ne pouvait donc pas être considéré comme toxique.
Depuis lors, vous vous en doutez, les communes ayant souscrit à l’époque un tel prêt à taux fixe consacrent tous les ans plusieurs dizaines de milliers d’euros, pris sur leur budget de fonctionnement, au paiement des intérêts de ce prêt. Dans le contexte de financement contraint des collectivités territoriales que vous connaissez bien, la solution pour ces communes a été la suivante : chercher à renégocier leur prêt, afin d’obtenir un taux plus proche des prix actuels.
Or, contrairement aux banques ordinaires, la Société de financement local, la SFIL, qui a repris la gestion des prêts aux collectivités territoriales à la suite de la déconfiture de Dexia, s’en tient strictement aux clauses du contrat signé et réclame une indemnité de sortie anticipée véritablement léonine.
Ainsi, pour la commune dont j’ai parlé, la SFIL exige plusieurs centaines de milliers d’euros, correspondant pratiquement à tous les intérêts restant à payer jusqu’à l’échéance du prêt. Cette situation est totalement inacceptable.
Ces communes, déjà mises en difficulté par l’importance de leurs frais financiers, subissent de ce fait une double peine. Au bout du compte, c’est le contribuable qui assume cette indemnité de sortie à hauteur de 75 %.
Comme vous le savez, les particuliers bénéficient quant à eux d’une limitation légale de l’indemnité de sortie à 3 % du capital restant dû.
Les collectivités territoriales concernées éprouvent un fort sentiment d’iniquité, voire d’injustice, car les collectivités qui, à l’époque, avaient souscrit un emprunt toxique ont bénéficié, elles, de mesures particulières.
Monsieur le secrétaire d’État, compte tenu de ces éléments, je vous remercie de bien vouloir m’indiquer les mesures que pourrait prendre le Gouvernement pour permettre à ces collectivités territoriales de sortir d’une situation particulièrement néfaste à leur fonctionnement comme à leur capacité d’investissement future.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur Reichardt, vous appelez l’attention du Gouvernement sur la gestion de la dette par les collectivités territoriales, selon que l’emprunt est considéré comme à risque ou qu’il a été contracté à taux fixe.
Pour ce qui concerne les collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts structurés dits « à risque », l’État a mis en place en 2014 un fonds de soutien. Ce dispositif a permis d’accompagner plus de 578 de ces collectivités territoriales, qui souhaitaient sortir de leur emprunt à risque. Je rappelle que l’État a rehaussé de 1,5 à 3 milliards d’euros le montant de ce fonds.
Ce sont 5,6 milliards d’euros d’encours d’emprunts à risque qui ont été refinancés dans ce cadre ou qui, au minimum, ont fait l’objet d’une transaction civile entre l’emprunteur et la banque prêteuse. Ce résultat dépasse de loin l’objectif de 4 milliards d’euros initialement assigné au fonds.
Les annuités sont aujourd’hui versées aux collectivités territoriales sans difficulté, et elles sont garanties jusqu’en 2028 ; nous nous en félicitons.
Au-delà de ces résultats probants, le débat public relatif aux emprunts dits « à risque » semble aujourd’hui plus apaisé. Nous ne le nions pas, certaines collectivités territoriales qui ont refusé l’aide ou qui héritent, du fait par exemple d’une fusion, de prêts toxiques, restent dans une situation délicate. Mais ces difficultés sont considérées comme résiduelles, quelque importantes qu’elles puissent être localement.
Pour ce qui concerne les collectivités territoriales ayant souscrit des prêts à taux fixe, comme celle à laquelle vous faites référence, la situation est sensiblement différente. Il est important de souligner que les emprunts à taux fixe ne sont pas répertoriés comme à risque. Il est également nécessaire de rappeler que les dispositions applicables aux prêts aux particuliers qui plafonnent le montant des indemnités exigibles ne sont pas applicables aux collectivités territoriales en l’état actuel du droit. Vous l’avez vous-même souligné.
Compte tenu du niveau actuel des taux d’intérêt, les établissements de crédit sont aujourd’hui exposés à des pertes actuarielles potentiellement importantes, ce qui explique le niveau élevé des indemnités de remboursement anticipé qu’ils demandent souvent aux collectivités.
Cette problématique n’est pas propre à la Société de financement local, que vous avez mentionnée à propos de la commune prise en exemple : il s’agit d’une pratique commune à l’ensemble des établissements de crédit.
Bien entendu, le Gouvernement demeure attentif à la santé financière des collectivités territoriales et à la gestion de leur dette. Il appelle de ses vœux des solutions négociées chaque fois qu’elles sont possibles.
Toutefois, l’État n’a pas forcément vocation à s’immiscer dans les relations contractuelles entre un établissement de crédit et un emprunteur. La renégociation éventuelle des contrats en cours demeure, en principe, du ressort des parties prenantes que sont l’établissement de crédit et la collectivité territoriale concernée, dans le respect de leurs intérêts mutuels.
Nous appelons donc au dialogue entre les collectivités territoriales emprunteuses et les banques prêteuses ; mais, en l’état actuel des choses, l’État ne peut pas s’immiscer dans leurs relations contractuelles.
M. le président. La parole est à M. André Reichardt.
M. André Reichardt. Vous comprenez bien, monsieur le secrétaire d’État, que votre réponse ne peut pas me satisfaire.
Je salue les mesures prises par le gouvernement de l’époque pour trouver une solution au problème des emprunts toxiques, mais, pour ce qui est des collectivités territoriales ayant souscrit des emprunts à taux fixe, sur lesquelles je vous ai interrogé, votre réponse ne résout rien.
Ces collectivités territoriales, qui se sont très bien comportées, souhaitent simplement ne pas être, si je puis dire, les dindons de la farce.
Le gouvernement d’alors a mis en place le dispositif que vous avez rappelé au bénéfice des collectivités territoriales qui avaient souscrit des emprunts toxiques : pourquoi l’État n’intervient-il pas, au moins sous la forme de recommandations, pour que la SFIL accepte de discuter d’une renégociation des taux particulièrement élevés de l’époque ?
Vous affirmez que cette problématique n’est pas propre à la SFIL. C’est pourtant bien le cas ! Dans le département dont je suis l’élu, toutes les autres collectivités locales qui ont souhaité renégocier des prêts avec la Caisse d’épargne, le Crédit mutuel ou d’autres établissements bancaires que je ne citerai pas ont obtenu satisfaction, à des conditions tout à fait intéressantes. Pourquoi donc la SFIL ne le fait-elle pas ?
Les communes concernées ont le sentiment que, en refusant de renégocier les taux, la SFIL leur fait payer le coût des mesures mises en œuvre pour remédier aux effets des emprunts toxiques. Ce n’est franchement pas acceptable.
Vous nous appelez au dialogue. Chiche ! Mais encore faut-il que le dialogue soit possible ! Je le répète, la SFIL refuse systématiquement d’évoquer une renégociation.
Nous ne demandons pas un emprunt à taux zéro, mais au moins une réévaluation. Entre 4,70 % et les taux actuels, qui sont en moyenne de 0,70 %, il y a vraiment un grand écart… (Mme Isabelle Raimond-Pavero acquiesce.)
Monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez certes pas de pouvoir véritable d’influer sur la SFIL, mais nous vous demandons de faciliter le dialogue.
risques liés à la dématérialisation au sein de l’institut national de la propriété industrielle
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, auteur de la question n° 128, adressée à M. le ministre de l’action et des comptes publics.
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le secrétaire d’État, depuis le 16 octobre dernier, la direction générale de l’Institut national de la propriété industrielle, l’INPI, oblige les déposants de marques, dessins et modèles et d’inscriptions aux registres de propriété industrielle à effectuer leurs formalités uniquement par voie électronique via le site internet de l’institut.
De nombreux usagers seront pénalisés dans leurs démarches par le dépôt électronique rendu obligatoire. En effet, 10 % des marques nationales sont encore déposées sous forme papier, ce qui représente plus de 9 000 dépôts par an.
Tous les dépôts effectués sous forme papier sont désormais renvoyés aux déposants, sans enregistrement, ce qui constitue une violation du traité international sur le droit des marques signé le 27 octobre 1994 et ratifié par la France, ainsi que des dispositions de l’article L. 112-2 et suivants et de l’article R. 112-5 du code des relations entre le public et l’administration.
L’INPI devient ainsi le seul office à l’échelle européenne, voire sur le plan international, à rejeter les formalités sur support papier. Or l’article 63 du règlement délégué 2017-1430 de la Commission du 18 mai 2017 complétant le règlement n° 207-2009 du Conseil sur la marque communautaire et abrogeant les règlements n° 2868-95 et n° 216-96 autorise de tels dépôts.
Le Défenseur des droits, dans son rapport du 30 mars 2016 sur l’accès aux droits, rappelle clairement les risques de fracture numérique à l’égard des services publics pratiquant la « tout-numérisation ».
Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous m’indiquer si le Gouvernement a l’intention d’agir pour que la continuité du service public de cet établissement soit assurée par la réception, l’enregistrement et le traitement des dépôts sous forme papier de marques, dessins et modèles et d’inscriptions aux registres de la propriété industrielle ?