M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour la réplique.
Mme Sophie Taillé-Polian. Pour ma part, je voudrais rendre hommage à ce qui a été fait par le gouvernement précédent ! (Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
En effet, ce sont 700 millions d’euros qui ont sur la table pour accompagner le vieillissement dans notre société. Faites-en autant ! Alors que les finances publiques sont dans un bien meilleur état, vous préférez alléger de milliards d’euros les prélèvements fiscaux des plus riches ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
notre-dame-des-landes et autorité de l’état
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Catherine Deroche. Ma question s’adresse à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur ; elle concerne Notre-Dame-des-Landes.
Monsieur le ministre d’État, je n’entends pas revenir sur votre renoncement regrettable à ce projet structurant du Grand Ouest ; je veux seulement évoquer les événements du week-end dernier.
On a pu voir, en premier lieu, la colère des habitants affectés par l’aéroport de Nantes-Atlantique : se sentant trahis par l’État, ils ont déchiré leurs cartes d’électeurs devant la ministre des transports.
En second lieu, le dégagement de la route départementale qui traverse la ZAD a commencé par un accueil peu banal de la préfète de région ; je pourrais parler de pantalonnade ! Mme la préfète s’est néanmoins félicitée et a trinqué avec les « zadistes », au côté du directeur général de la gendarmerie nationale…
Je tire deux constats de ces événements. Tout d’abord, le « plan B » annoncé – un agrandissement de l’aéroport de Nantes-Atlantique – va se heurter à de nombreux obstacles : plus personne n’y croit ! Ensuite, aux yeux des habitants, les images récentes de la ZAD traduisent moins un sentiment d’apaisement qu’une capitulation.
Est-ce là, monsieur le ministre d’État, votre conception de l’autorité de l’État ? (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur.
M. Gérard Collomb, ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la sénatrice, vous connaissez bien la situation. Vous savez donc que le projet de Notre-Dame-des-Landes existait depuis cinquante ans.
M. Bruno Retailleau. Non !
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Par conséquent, bien des gouvernements auraient pu prendre certaines décisions ! (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.) Tout le monde aurait pu les prendre par le passé ; pour notre part, nous avons pris nos responsabilités ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Emmanuel Capus applaudit également.)
Le cap défini par le Premier ministre le 17 janvier dernier repose sur trois principes. C’est, premièrement, le retour de l’État de droit sur la zone de Notre-Dame-des-Landes (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.), sur lequel nous ne ferons aucune concession, mais que nous souhaitons obtenir de la manière la plus apaisée possible.
Le second principe est la médiation avec l’ensemble des acteurs de la région, que nous avons écoutés…
M. Christophe Priou. C’est faux !
M. Gérard Collomb, ministre d’État. … et que nous continuerons d’écouter dès lors qu’il existe une volonté d’accord constructive. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Enfin, nous avons posé un calendrier clair et respecté qui s’applique à l’ensemble des parties. Comme nous nous y étions engagés, la RD 281, dite « route des chicanes », a été dégagée. Quant aux terres obstruées par les zadistes depuis 2012, le conseil départemental a commencé les travaux.
M. Christophe Priou. Non ! C’est faux.
M. Gérard Collomb, ministre d’État. Si ces travaux ne pouvaient se poursuivre dans les prochaines semaines, l’État se substituerait au département.
En effet, l’État de droit doit être appliqué partout, et il le sera à Notre-Dame-des-Landes ! (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour la réplique.
Mme Catherine Deroche. Monsieur le ministre d’État, vous ne faites que répéter le plan de communication du Gouvernement, que l’on entend depuis le mois de janvier. Mme la préfète, en effet, a crié victoire parce qu’elle a pu marcher quelques mètres, accompagnée d’escadrons de gendarmes mobiles et survolée par un hélicoptère… Néanmoins, la ZAD reste occupée ; la trêve hivernale est un prétexte pour retarder l’évacuation de ces squats illégaux.
Qu’en pensent aujourd’hui les Ligériens ? Votre discours est peut-être efficace pour ceux de nos concitoyens qui vivent loin de Notre-Dame-des-Landes, mais les Ligériens, pour leur part, savent qu’ils ont été sacrifiés au profit de ceux qui bafouent depuis des années les lois de la République. Nous souhaitons simplement que cette capitulation ne fasse pas école pour d’autres projets nationaux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires et du groupe socialiste et républicain.)
limitations de vitesse
M. le président. La parole est à Mme Michèle Vullien, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Michèle Vullien. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Le Gouvernement a annoncé, le 9 janvier dernier, la mise en place d’une limitation de la vitesse à 80 kilomètres par heure sur le réseau secondaire à compter du 1er juillet prochain.
Comme vous le savez, le Sénat a constitué un groupe de travail sur le sujet, groupe auquel j’aurai plaisir à participer. J’ai d’ailleurs un a priori plutôt favorable sur cette mesure.
Si l’objectif de diminuer le nombre de morts sur ces portions de routes accidentogènes est louable, il apparaît toutefois que la démarche du Gouvernement a été quelque peu hâtive et dénuée de concertation préalable. En outre, elle a fait abstraction des conclusions rendues dans le cadre des Assises de la mobilité. Par ailleurs, il semblerait que la direction de la sécurité routière n’ait pas souhaité participer aux travaux des assises, alors qu’elle y a été conviée par le groupe d’experts. On ne peut que s’en étonner et le regretter !
Ma demande est donc double.
Tout d’abord, pourquoi la sécurité routière n’a-t-elle pas participé aux Assises de la Mobilité ?
Ensuite, et surtout, monsieur le Premier ministre, pouvez-vous attendre les conclusions du groupe de travail sénatorial avant de confirmer votre décision de modifier la réglementation ?
Permettez-moi enfin un petit clin d’œil. Dans son discours de vœux de ce mardi, le Président de la République a longuement insisté sur l’importance des évaluations ex ante dans le cadre de l’action publique. Il serait tout de même paradoxal que son gouvernement ne respecte pas cette ligne de conduite !
Je vous remercie, monsieur le Premier ministre, et vous propose de prendre rapidement date pour que nous venions vous exposer les conclusions de nos travaux. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Madame la sénatrice, vous m’interrogez sur la décision que j’ai annoncée de faire passer la limitation de vitesse sur les routes bidirectionnelles sans séparateur central de 90 kilomètres par heure à 80 kilomètres par heure.
Dès que j’ai évoqué cette mesure et quand je l’ai rendue publique, j’avais parfaitement conscience qu’elle aurait pour conséquence une impopularité notoire pour celui qui en était à l’origine, et, plus encore – car, au fond, ce n’est pas l’essentiel –, susciterait du scepticisme, peut-être de l’incompréhension et une forme d’agacement, voire, parfois, même si ce n’était pas le ton de votre question, de la colère.
Le sujet est suffisamment complexe et sérieux pour que je vous communique les chiffres définitifs pour l’année 2017, qui viennent d’être publiés. Au cours de l’année 2017, ce sont très exactement 3 693 personnes qui ont trouvé la mort sur les routes françaises. Cela concerne la métropole et l’outre-mer.
En effet – vous le savez sans doute si ce sujet vous intéresse –, pendant très longtemps, il a été décidé, pour des raisons que j’ignore, de ne diffuser que les chiffres concernant la France métropolitaine en omettant les tués sur la route en outre-mer. À ces 3 693 morts, il faut ajouter 77 476 blessés, dont plus de 25 000 blessés graves, ceux que l’on appelle parfois les blessés à vie.
Dans le Rhône, votre département, madame la sénatrice, au cours de l’année 2017, quelque 58 personnes ont trouvé la mort et 2 735 ont été blessées. C’est un peu moins de morts que pour l’année 2016 – trois ! –, mais cela représente 10 % de blessés en plus.
Le coût humain est considérable, tout comme l’est le coût individuel familial. Il en est de même du coût collectif. Pardon d’évoquer ces données de nature budgétaire – c’est peu de chose par rapport au reste –, mais il faut tout de même le faire : on estime entre 32 et 40 milliards d’euros – cela dépend du mode de calcul – le préjudice annuel lié à la surmortalité sur les routes. C’est énorme. Ce n’est pas le motif de la limitation, mais il faut le prendre en compte.
M. Simon Sutour. Ah !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Ces chiffres sont trop importants, et je ne veux pas que l’on s’y habitue. Ce n’est jamais le cas, bien sûr, mais lorsque ces mauvais chiffres se répètent, année après année, certains finissent par se dire que c’est la fatalité.
Or je ne crois pas à la fatalité. Je pense que nous pouvons réduire le nombre de morts et de blessés sur les routes en France. C’est l’objectif !
M. Simon Sutour. Il faut mettre de l’argent sur les routes !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Vous avez raison, monsieur le sénateur. Reste que 92 % des accidents de la route ne sont pas liés à l’état des routes, mais sont dus au comportement humain et à la vitesse. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Grosdidier. Ils sont dus à l’excès de vitesse !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Les chiffres sont là, ils en attestent. La vitesse est systématiquement un facteur aggravant, madame la sénatrice, même si ce n’est pas le seul. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)
M. Gérard Cornu. L’excès de vitesse !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Je le répète : 3 693 morts !
Madame la sénatrice, avant d’occuper cette fonction, vous avez été maire d’une commune de 8 800 habitants. Nous voulons avancer et faire en sorte qu’il y ait moins de morts et moins de blessés. (Nous aussi ! sur les travées du groupe Les Républicains.)
Certes, on peut se focaliser sur cette mesure, mais elle s’inscrit dans le cadre d’un plan, grâce auquel seront sanctionnées beaucoup plus lourdement la conduite en état d’ivresse, l’utilisation du téléphone portable en conduisant, la conduite sans permis de conduire, la conduite sous l’emprise de produits stupéfiants. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Grosdidier. C’est cela, la vraie cause !
M. Jackie Pierre. Faites déjà respecter les 90 kilomètres par heure !
M. Édouard Philippe, Premier ministre. Tous ces éléments sont prévus, et ce plan produira des effets.
Bien évidemment, nous avons interrogé tous les spécialistes en la matière. Vous imaginez bien, madame la sénatrice, qu’avant de prendre une décision dont je sais qu’elle est impopulaire, ne recherchant pas spécifiquement et spontanément l’impopularité, je me suis demandé si elle pouvait avoir un effet et j’ai interrogé les sachants, les médecins, les spécialistes : tous ont indiqué que la vitesse était systématiquement un facteur aggravant sur ces routes qui représentent plus de 55 % des accidents en France. Nous les avons écoutés et pris en compte leur avis.
Je sais que le Sénat s’interroge sur ce sujet et a créé un groupe de travail. Je suis enchanté qu’il le fasse et la porte de Matignon, qui est évidemment toujours ouverte à tous les sénateurs, l’est plus encore à ceux qui voudraient discuter de cette mesure.
En la matière, madame la sénatrice, je me fixe non une obligation de moyens, mais une obligation de résultat : nous allons faire mieux. Nous allons réduire le nombre de morts et de blessés sur la route.
Je me souviens de la réaction qu’avait suscitée, au début des années 2000, la décision du président Chirac de s’engager résolument en la matière : l’impopularité du Gouvernement. Quelques années plus tard, tout le monde a reconnu que ces mesures étaient justes et avaient produit leur effet. C’est sur cette ligne que je m’inscris. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. François Patriat. Très bien !
Mme Michèle Vullien. Monsieur le Premier ministre, je vous remercie de votre réponse. Je suis plutôt favorable à cette mesure, qui appelle toute mon attention.
En revanche, je déplore la méthode. C’est seulement hier soir que nous avons reçu les études du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA. Nous aurions souhaité avoir plus de temps pour les étudier.
agriculture dans les zones défavorisées (i)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mme Françoise Laborde. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation et porte sur la refonte de la carte des zones défavorisées simples, les ZDS.
Cette révision répond à la demande de la Commission européenne, la carte définitive devant être remise au mois de mars prochain.
La profession agricole s’inquiète fortement des propositions de nouveaux zonages. À lui seul, mon département représente quelque 40 % des communes non classées de la région Occitanie, alors que, en termes de revenus agricoles, il est classé quatre-vingtième au rang national, sur 93, et possède un potentiel agronomique parmi les plus faibles.
Ces zones défavorisées ne sont pas juste dessinées sur une carte pour Bruxelles. Elles représentent une réalité physique, économique, sociale et, surtout, humaine.
Si le zonage, tel que vous le proposez aujourd’hui, devait être maintenu, les départements de la Haute-Garonne, du Gers, du Tarn-et-Garonne, du Lot et bien d’autres verront leur biodiversité irrémédiablement bouleversée. En effet, nombre d’éleveurs et de jeunes agriculteurs cesseront leur activité. Pourtant, comme l’a souligné le président Macron lors de ses vœux le 25 janvier dernier, l’agriculture française a du talent et de la ténacité. Voilà qui me laisse à penser, monsieur le ministre, que la mobilisation des manifestants dans nos départements n’est pas près de s’essouffler.
Monsieur le ministre, ma question est simple : allez- vous écouter les propositions formulées par la profession agricole, qui demande à revoir la liste des critères de zonage, notamment paysagers, et permettre ainsi une répartition plus juste de cette cartographie ? (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Madame Laborde, je n’ignore rien de la situation des agriculteurs concernés par les ZDS sur vos territoires, en particulier dans votre région. Leur inquiétude est légitime.
Nous parlons d’un zonage qui a plus de quarante ans et qui n’a jamais été revu. Nous devons aujourd’hui débattre de sa pertinence et de son efficacité en plaine. Cette discussion a commencé à l’échelon européen en 2002, la révision du zonage est connue depuis 2013 et d’autres gouvernements ont travaillé pour que cette nouvelle carte puisse entrer en application en 2019, en France comme dans l’ensemble des pays européens.
Il faut aussi tenir compte des contraintes réglementaires et budgétaires à l’échelon européen, qui font qu’il n’y a aucune part d’arbitraire possible pour intégrer ou exclure tel ou tel territoire, pas plus qu’il n’y en a aujourd’hui pour repousser les échéances. Des discussions ont été engagées depuis 2016 avec les professionnels agricoles et les régions, afin d’établir ce nouveau zonage.
À l’heure où je vous parle, madame la sénatrice, ces discussions se poursuivent avec l’appui de l’ensemble des services du ministère. Le zonage envisagé à l’issue d’un premier cycle de travail aboutissait à une carte très étendue par rapport à la carte actuelle, ce qui augmentait considérablement les besoins en crédits du Fonds européen agricole pour le développement rural, le FEADER, alors même que, vous le savez, il s’agit d’une enveloppe très fermée. Cette carte n’était pas soutenable budgétairement, et certains critères retenus n’étaient pas justifiables à l’échelon européen.
Je recevrai demain les représentants professionnels de votre région pour faire le point sur cette situation. Nous héritons d’un dossier ancien. Nous avons fait le tour du sujet sur le plan technique, il nous faut maintenant en sortir.
L’objectif du Gouvernement est de parvenir à une cartographie à la mi-février, comme l’a demandé le Président de la République. Nous veillerons à la partager et à définir les mesures d’accompagnement, puis nous la transmettrons à la Commission européenne pour approbation d’ici à la fin du mois de mars prochain. À l’issue de cette réforme, il faudra dire la vérité : des communes entreront dans le nouveau dispositif, d’autres en sortiront. Nous accorderons une attention particulière aux communes sortantes et analyserons les situations individuelles pour mieux accompagner les exploitations concernées.
Madame la sénatrice, vous pouvez bien évidemment compter sur ma mobilisation à l’échelon tant européen que national pour défendre les intérêts de nos agriculteurs. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Laborde, pour la réplique.
Mme Françoise Laborde. Monsieur le ministre, j’insiste sur le fait que, dans ce dossier, il y a de la technique, mais aussi de l’humain.
rôle des banques dans le financement de l’économie réelle
M. le président. La parole est à M. Alain Chatillon, pour le groupe Les Républicains.
M. Alain Chatillon. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.
Monsieur le Premier ministre, je souhaite appeler votre attention sur les bourgs-centres, qui sont en péril. Ils constituent un élément fort pour notre territoire et nous devons les accompagner.
Actuellement, alors que les GAFA sont en train de piller le commerce, sans aucune contrepartie d’aucune sorte, taxe foncière, taxe d’habitation ou taxe sur la valeur ajoutée – rien, pas d’impôt –, nous ne faisons pas grand-chose. Il serait pourtant temps que nous nous mobilisions pour réhabiliter nos centres-villes, rendre la vie dans le rural aussi digne qu’il y a quelques années encore et avoir la capacité d’apporter les services qui s’imposent à ces communes.
J’en viens à la taxe d’habitation. Sur ce sujet, monsieur le Premier ministre, ma question est claire et précise : en cette matière, un remboursement à l’euro près est prévu. Pourquoi pas, mais comment, par quoi, par quel nouvel impôt ?
Ne faudrait-il d’ailleurs pas que ce remboursement soit prévu sur la moyenne de la taxe d’habitation de la zone du territoire ? En effet, les communes qui ont consenti le plus d’efforts pour limiter les impôts vont se trouver défavorisées par rapport à celles qui ont augmenté les leurs.
Mme Catherine Deroche. Oui !
M. Alain Chatillon. Pour ma part, je souhaite que soit opérée une moyenne de la strate occupée.
Enfin, et cette question a un lien avec les deux précédentes, vous le savez, voilà maintenant dix ans, la Banque centrale européenne a attribué 4 200 milliards d’euros aux banques françaises pour assurer leur sécurité et, dans le même temps, pour garantir 2 % d’inflation. Il se trouve que beaucoup d’argent est resté ou revenu à la Banque centrale européenne. À l’époque, le prêt était de 0,25 %, alors que le financement est maintenant à 0,60 %.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Alain Chatillon. Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous indiquer le montant du reliquat des banques françaises, qui ont placé de nouveau cet argent, plutôt que de le consacrer au développement économique de notre pays ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le sénateur, les sujets que vous avez évoqués sont vastes et assez différents.
Vous avez d’abord interrogé le Gouvernement sur la question des centres-villes et la nécessité d’accompagner la rénovation.
Je suis convaincu que le plan de développement et de confortement des centres-villes, notamment des bourgs-centres, que mettent en place Jacques Mézard et Julien Denormandie, vous apportera des réponses particulièrement satisfaisantes. Il a en effet pour objectif d’accompagner les communes et les centres urbains, qui émaillent et structurent notre pays, permettant à des territoires entiers de vivre et de se développer, et ce sans tenir compte de leur taille, sans établir de critères qui viendraient discriminer certaines communes et leur interdire l’accès à cet appel à projets.
En d’autres termes, il s’agit d’accompagner les cœurs de ville qui font vivre des territoires, des pays et des bassins de vie et, ainsi, de donner à nos concitoyens les moyens de trouver dans les centres-villes les équipements et les commerces nécessaires.
Monsieur le sénateur, vous avez aussi appelé l’attention du Gouvernement sur la question des banques, du financement et de la taxe d’habitation. Vous conviendrez avec moi que ces problématiques sont difficiles à relier.
Je puis toutefois vous assurer que les banques françaises sont présentes aux côtés des entreprises : elles le font dans le cadre européen que vous connaissez et avec une attention particulière du Gouvernement et du Premier ministre, lequel relaie ces questions auprès de ses collègues de l’Union européenne. L’année dernière, les encours et les prêts qu’elles ont consentis aux entreprises pour leur développement ont augmenté de plus de 5 %, ce qui est aussi le signe d’un retour de la croissance.
Enfin, vous avez interrogé le Gouvernement sur la façon dont la taxe d’habitation sera compensée pour les collectivités. Engagement a été pris, et il sera tenu, que cette compensation sera intégrale. Nous passons par la technique du dégrèvement, qui, comme vous le savez, permet une compensation à l’euro près. Nous avons trois ans devant nous pour compenser la taxe d’habitation, dont 80 % des contribuables seront finalement exonérés.
Le Président de la République a déclaré, lors de ses vœux aux Français, le 31 décembre dernier, qu’il voulait aller plus loin et exonérer 100 % des contribuables. Il s’agit là d’un défi collectif. Nous avons trois ans devant nous, aidés par les travaux de la mission menée par Alain Richard et Dominique Bur, pour refondre le modèle de fiscalité locale et de financement de nos collectivités, trouver de la stabilité et de la justice et, surtout, conférer de la pérennité à ce nouveau modèle.
agriculture dans les zones défavorisées (ii)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. François Bonhomme. Ma question, à laquelle je souhaite associer M. Philippe Mouiller, sénateur des Deux-Sèvres, s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Monsieur le ministre, depuis mercredi dernier, à Montauban, les agriculteurs du Tarn-et-Garonne et d’Occitanie protestent contre la future carte des zones défavorisées simples que vous allez présenter prochainement à l’échelon européen.
Or, en l’état, ce nouveau zonage, établi à partir de critères modifiés, exclura de facto un grand nombre de communes jusqu’alors éligibles à ces aides européennes, qui étaient perçues par ces agriculteurs pour compenser le handicap naturel de ces zones.
Monsieur le ministre, vous savez comme moi que, depuis plus de quarante ans, ces aides se sont révélées essentielles dans un certain nombre de départements. Elles sont notamment essentielles au maintien d’exploitations familiales et modestes.
Or la suppression de ces aides, induite par ce projet de nouvelle carte, signifierait inévitablement la fin de ce type d’exploitation et, plus généralement aussi, la fin d’un certain type d’activités, dans ces zones si difficiles, où des paysans contribuent depuis si longtemps au maintien de nos paysages et à la vie de nos petites communes.
Monsieur le ministre, quelles garanties et quels engagements fermes et tangibles pouvez-vous apporter aujourd’hui en ce qui concerne le maintien de ces aides vitales à nos agriculteurs ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le sénateur, vous m’interrogez, vous aussi, sur la situation des zones défavorisées simples, question qui concerne les territoires de l’Occitanie, mais aussi des Deux-Sèvres et de la région Centre.
Comme je l’ai souligné tout à l’heure, ce zonage a plus de quarante ans, et il faut le revoir. Dès mon arrivée aux responsabilités, soyez sûr que nous avons bataillé à Bruxelles pour obtenir un délai complémentaire afin de retravailler cette cartographie, notamment avec l’ensemble des éleveurs et des acteurs du monde agricole, et la finaliser dans les meilleurs délais. Ce travail est conduit en totale concertation avec les représentants professionnels, et les discussions sont engagées depuis 2016.
Monsieur le sénateur, je ne peux pas laisser dire que nous souhaiterions mettre un terme à l’élevage et aux activités agricoles sur ces territoires. Bien évidemment, je sais que la survie de ces agriculteurs peut dépendre de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, l’ICHN, qu’ils perçoivent.
Ce travail a été engagé par les services du ministère pour pouvoir intégrer de nouvelles communes. Cependant, comme dans chaque révision de zonage après quarante ans, il y aura de nombreux entrants, mais aussi des sortants. Si certains critères sont objectifs, il en est d’autres que nous ne pouvons conserver et il est de ma responsabilité, comme ministre de l’agriculture, de penser à la suite.
Je le répète, je recevrai des représentants demain pour faire un point précis de la situation avec eux. Nous étudierons les mesures d’accompagnement à mettre en place dans le souci de l’efficacité de nos politiques publiques. Nous devons collectivement nous tourner vers l’avenir.
Monsieur le sénateur, je compte sur vous pour accompagner les agriculteurs des communes qui, c’est inévitable, sortiront de ce dispositif. L’État sera présent et prendra toute sa part dans cet accompagnement, je peux témoigner de cette volonté.
Le Gouvernement a bien pour objectif de parvenir le plus rapidement possible à un accord, c’est-à-dire à une carte équitable et budgétairement soutenable, qui préserve au mieux les zones d’élevage extensif en plaine.