Mme Sophie Joissains. Le présent amendement a pour objet de revenir à la répartition des compétences en matière d’assainissement et d’eau antérieure à la création de la métropole Aix-Marseille Provence.
Avec 3 173 kilomètres carrés, cette métropole est six fois plus grande que le Grand Lyon, qui compte 533,68 kilomètres carrés. Elle comprend six territoires, six bassins de vie, six villes centres – bientôt sept avec le Pays d’Arles.
Comprenez bien, mes chers collègues, qu’une homogénéité de gestion est absolument impossible. De surcroît, le budget fait apparaître une dette de 2 milliards d’euros. Enfin, alors que les compétences ont été transférées depuis le 1er janvier 2018 à la métropole, celle-ci a imposé aux communes, par convention, qu’elles continuent à en assumer la gestion… pour son compte !
Cet amendement, déjà voté, d’ailleurs, en février 2017, me semble avoir toute sa place dans un texte comme celui-ci, qui est aussi un texte d’appel vis-à-vis du Gouvernement. Je vous demande donc de le voter.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur. Effectivement, comme l’a indiqué notre collègue Sophie Joissains, cet amendement avait été adopté lors de l’examen de la proposition de loi Bas-Retailleau, le 23 février 2017. Mais c’était contre l’avis de la commission et du Gouvernement !
Son objet est de maintenir l’eau et l’assainissement dans les compétences des communes de la métropole d’Aix-Marseille Provence sur la décision de ses entités déconcentrées, les conseils de territoire, à qui ces compétences auraient été déléguées.
Néanmoins, d’une part, l’eau et l’assainissement relèvent des compétences obligatoires des métropoles et, d’autre part, si la métropole d’Aix-Marseille Provence, en vertu des compétences qui lui sont spécifiques, peut déléguer ces matières aux conseils de territoire, c’est à l’exception des schémas d’ensemble d’assainissement et d’eau pluviale.
Enfin, ouvrir la possibilité aux conseils de territoire de subdéléguer aux communes les compétences « eau » et « assainissement » ne semble pas compatible avec le statut de la métropole, EPCI à fiscalité propre de la catégorie la plus intégrée.
L’avis est donc toujours défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Bien évidemment, il est aussi défavorable, du fait des compétences attribuées aux métropoles.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Grand, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Grand. Notre collègue a eu parfaitement raison de soulever le problème avec cet amendement. C’est un amendement de révolte contre les métropoles, auxquelles on donne des compétences qu’elles sont effectivement incapables d’assumer.
Je veux bien que les métropoles aient des compétences. Je veux bien que certaines constituent des territoires dix fois plus grands que d’autres, celui du Grand Lyon, par exemple. Mais je peux dire d’expérience, au vu de ce qui se passe à Montpellier, que la métropole est un fiasco. Le Gouvernement doit en prendre conscience !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Nous voterons cet amendement. En effet, cela a été évoqué tout à l’heure, si certains d’entre nous sont nouveaux sénateurs, d’autres sont plus anciens et se souviennent des longs débats suscités, à l’époque, par la constitution des métropoles et, en particulier, des positions exprimées par un certain nombre de collègues s’agissant du cas d’Aix-Marseille Provence.
Malheureusement, en dépit de tout ce qui a été dit dans le cadre du vote de la loi NOTRe, et qui a parfois été considéré comme des affabulations ou des marques d’inquiétude face à un devenir que l’on ne maîtrisait pas, on se rend compte aujourd’hui que nombre des craintes exprimées autour de la constitution à marche forcée de métropoles et de la mise en concurrence des territoires deviennent une réalité.
C’est pourquoi nous soutiendrons l’amendement déposé par notre collègue Sophie Joissains.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 22.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 3
(Non modifié)
Le titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :
1° Les deux derniers alinéas du II de l’article L. 5214-21 sont supprimés ;
2° La première phrase du IV de l’article L. 5216-7 est ainsi modifiée :
a) Le mot : « trois » est remplacé par le mot : « des » ;
b) Les mots : « au moins » sont supprimés.
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par Mmes Estrosi Sassone et Primas, MM. Cambon, Danesi, Brisson, Chaize, Vaspart et Rapin, Mme Bories, M. Cuypers, Mme Garriaud-Maylam, M. Bascher, Mme Gruny, MM. Paccaud, Hugonet et Savary, Mme Canayer, MM. Lefèvre, Forissier, Daubresse et Bazin, Mme Lassarade, MM. Dufaut et Laménie, Mmes Lopez et Lanfranchi Dorgal, M. Mouiller, Mme Lamure et MM. Gremillet, Husson et Dallier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
…° La première phrase du IV bis de l’article L. 5217-7 est ainsi modifiée :
a) Le mot : « trois » est remplacé par le mot : « des » ;
b) Les mots : « au moins » sont supprimés.
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone.
Mme Dominique Estrosi Sassone. L’article 3 de cette proposition de loi vise à assouplir les règles de représentation-substitution des communes au sein des syndicats exerçant les compétences « eau » et « assainissement » et à permettre aux syndicats regroupant deux EPCI à fiscalité propre de bénéficier de ce dispositif.
Le rapporteur a jugé cet assouplissement bienvenu, car il permet de préserver de nombreux syndicats existants et d’assurer la continuité des services rendus aux usagers.
Je n’entends pas remettre en cause l’article 3 avec mon amendement. Celui-ci tend à compléter la suppression des dispositions spécifiques relatives aux mécanismes de représentation-substitution des communes au sein des syndicats exerçant les compétences « eau » et « assainissement » dont la conséquence était la dissolution des syndicats ne regroupant pas au moins trois EPCI.
En effet, il convient de prévoir une telle modification pour les métropoles, donc de l’étendre à l’article L. 5217-7 du code général des collectivités territoriales. À défaut, certains syndicats mixtes regroupant en leur sein des communautés d’agglomération et des métropoles seraient fragilisés et devraient disparaître.
Cet amendement vise donc à permettre aux communautés d’agglomération et aux métropoles de maintenir les syndicats mixtes compétents en matière d’eau et d’assainissement dont elles seraient conjointement membres.
M. Ladislas Poniatowski. Excellent amendement !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Bonhomme, rapporteur. Cet amendement tend à aligner les dispositions applicables au mécanisme de représentation-substitution dans les syndicats comprenant des métropoles sur le mécanisme prévu – et modifié par la présente proposition de loi – pour les syndicats composés de communautés d’agglomération.
Je n’ai a priori aucune objection particulière à opposer à cette proposition (Exclamations sur les travées du groupe Union Centriste.),…
Mme Sylvie Goy-Chavent. C’est bien !
M. François Bonhomme, rapporteur. … mais je ne dispose pas de tous les éléments et le Gouvernement pourra peut-être nous éclairer.
Pour l’heure, je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. Il est ici proposé de modifier les dispositions de représentation-substitution. Le mécanisme permet d’assurer la pérennité des syndicats mixtes qui comprennent, dans leur périmètre, des communes appartenant à au moins trois EPCI à fiscalité propre différents. Les EPCI concernés ont alors vocation à se substituer à leurs communes membres au sein du comité syndical.
L’article 3 de la proposition de loi prévoit un assouplissement de cette règle, au bénéfice des communautés de communes et d’agglomération qui n’exerçaient pas encore la compétence à titre obligatoire.
C’est un point qui avait fait l’objet d’un consensus dans le cadre de nos travaux et sur lequel je m’étais engagée, vous ne le contestez pas, mais vous demandez que la règle prévoyant le retrait des communes membres des syndicats comprenant dans leur périmètre moins de trois EPCI à fiscalité propre soit maintenue s’agissant des métropoles – c’est déjà possible pour les communautés d’agglomération, j’y insiste.
Ces métropoles représentent, en effet, le niveau d’intégration intercommunale le plus poussé. Dès lors, il ne paraît pas souhaitable qu’elles exercent une compétence de manière dispersée sur leur territoire. Voilà le sujet !
Lorsqu’ils sont de petites tailles, les syndicats intercommunaux doivent pouvoir mobiliser des moyens matériels et humains pour la création et l’entretien des réseaux d’assainissement collectif ou de distribution d’eau potable. Lorsqu’ils ne disposent pas d’une taille suffisante, il est souhaitable de favoriser la rationalisation de la carte intercommunale et de laisser les EPCI à fiscalité propre, les métropoles notamment, exercer la compétence sans représentation-substitution, ce qui favorise également la montée en puissance desdites métropoles.
Cela étant dit, madame Estrosi Sassone, vous connaissez certainement un cas particulier – il en est toujours ainsi avec ce type d’amendements. Je ne peux pas exprimer un avis favorable,…
M. Jacques Grosperrin. Pourquoi pas un avis de sagesse, alors ?
Mme Jacqueline Gourault, ministre. … mais vous me direz si vous pensez à la métropole dont j’imagine qu’elle pourrait être concernée, et je regarderai la question de très près.
M. Ladislas Poniatowski. Après que nous aurons voté l’amendement !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.) (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 3, modifié.
(L’article 3 est adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi, je donne la parole à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Sans surprise, à l’issue de cet après-midi de débat, notre groupe votera le texte tel qu’il est issu des travaux du Sénat.
Je l’indiquais lors de mon intervention sur l’article 1er, les choses évoluent progressivement et nous nous rendons compte, mois après mois, année après année, que des propositions avancées dans le cadre de l’examen de certains textes de loi, et qui pouvaient parfois apparaître comme des compromis, sont impossibles à mettre en œuvre dans les territoires, suscitant l’inquiétude parmi les élus de terrain.
Je ne reviendrai pas sur le fond du texte, car beaucoup a été dit. Mais je voudrais vous interpeller, madame la ministre, ainsi que nos collègues députés, à travers le compte rendu qui sera fait de nos débats : à l’heure où la discussion s’ouvre sur le devenir de nos institutions, il serait bon d’entendre, aussi, ce que les sénatrices et les sénateurs de tous les groupes – avec leurs spécificités et leurs différences – ont fait remonter au sujet de ce qui se passe et se vit dans nos territoires ou de la qualité des services qui, demain, seront rendus à leur population.
Il ne s’agit pas d’engager un bras de fer entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Mon collègue Pierre-Yves Collombat l’a rappelé : oui, l’Assemblée nationale a le dernier mot ! Mais le dire, ce n’est pas faire grand-chose ! Notons, en revanche, que le Sénat a cette capacité à rassembler les élus que nous sommes, présents au quotidien dans la vie des collectivités et auprès de nos collègues élus de terrain.
Nous avons cheminé depuis la loi NOTRe, avec l’adoption, l’an dernier, d’une proposition de loi et nos travaux de cet après-midi. Ce parcours devrait tout de même inviter la majorité gouvernementale à l’Assemblée nationale à entendre ce que nous avons à dire, à ne pas rester dans une posture et, peut-être, à se réinterroger sur le sort de cette compétence.
En effet, se contenter d’un simple report du transfert à 2026, c’est tout simplement mentir aux élus locaux ! C’est tout simplement mentir aux populations ! Non, le caractère optionnel ne demeurera pas, puisqu’il n’est question que d’un report dans le temps !
Pour notre part, nous voterons des deux mains le texte.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous avons tous et toutes un devoir de cohérence !
Tout à l’heure, j’ai expliqué être venu à cette tribune pour défendre la proposition de loi présentée par MM. Philippe Bas et Bruno Retailleau en 2017.
C’était la position de mon groupe, parce que les dates de 2018 et de 2020 nous apparaissaient totalement absurdes et irréalistes. Nous l’avons défendue devant de très nombreux maires, de très nombreux élus et – je tiens à le dire au nom de tous mes collègues – nous n’en changerons pas aujourd’hui.
En même temps,…
M. Michel Savin. Ah ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Pierre Sueur. Certaines expressions font partie du bien commun, mon cher collègue ! (Sourires.)
En même temps, donc, nous sommes très attachés aux progrès en matière d’intercommunalité. Nous pensons qu’il doit être possible d’aller vers plus d’efficacité et de mutualisation, en particulier au regard du prix de l’eau et de la bonne efficacité de nos systèmes.
Sans doute pouvions-nous avancer… Mais voilà ce qui s’est passé, madame la ministre – et vous le savez d’ailleurs très bien –, M. le président Philippe Bas l’a parfaitement expliqué : le Sénat avait établi un texte ; tout aurait été très différent si ce texte sénatorial avait été présenté devant l’Assemblée nationale, s’il n’y avait pas eu ce renvoi en commission, puis l’invention d’une proposition de loi d’origine gouvernementale pour repartir sur une autre base, tout en échappant à l’étude d’impact et à l’avis du Conseil d’État.
Nous regrettons, en particulier, que n’aient pas été pris en compte des arguments auxquels nous tenons et que Mme Laurence Harribey a longuement exposés – je veux lui rendre hommage – sur la sécabilité et les communautés d’agglomération.
Nous pensons donc que l’échéance à 2026, soit huit années pour la mise en œuvre, est préférable, mais nous voulons être fidèles au vote que nous avons émis et à la position que nous avons défendue devant les élus de ce pays. Tel sera le sens de notre vote. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Michel Canevet, pour explication de vote.
M. Michel Canevet. Pour ma part, je ne retire pas beaucoup de satisfaction de l’examen de ces questions relatives à l’eau et l’assainissement.
En définitive, on veut faire évoluer nos collectivités territoriales dans un cadre extrêmement contraint, alors même que l’on évoque souvent le principe de libre administration de ces collectivités.
Pourquoi veut-on absolument déployer la même organisation sur l’ensemble du territoire national ? On voit bien, sur le terrain, que les situations sont disparates. Dans certains endroits, il apparaît justifié de prévoir des regroupements à mailles parfois très larges, pouvant aller au-delà des territoires communautaires ; dans d’autres – je pense aux collectivités de montagne, en particulier –, une maille infracommunautaire peut tout à fait être pertinente.
Oui, à bien examiner la question de ces compétences, je me dis que l’on veut totalement corseter les collectivités territoriales dans notre pays !
Il faudra donc que nous puissions, dans le cadre de la révision constitutionnelle, bien affirmer le droit à la différence. Le droit à la différence, c’est permettre le développement d’organisations adaptées aux territoires, et non formatées selon un même modèle, de façon à prendre véritablement en compte les souhaits et préoccupations des élus locaux. C’est permettre aux territoires de s’organiser librement, pour la plus grande efficience de leurs services.
L’examen d’un certain nombre d’amendements déposés sur ce texte montre que l’on veut aussi définir, par la loi, toute une série de relations entre les collectivités qui doivent normalement rester contractuelles. Quand un contrat est établi entre des communes et des communautés pour une bonne répartition, voulue par les élus, des responsabilités à l’échelle d’un bassin de vie, il faut aussi faire confiance à ces élus ! Il faut les laisser définir la nature des relations, notamment financières, et non les contraindre à travers un cadre beaucoup trop rigide.
Donc, pour ma part, je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. Comme je l’indiquais précédemment, j’aurais préféré que l’on puisse négocier dans le cadre d’une CMP conclusive ! Tel n’a pas été le choix retenu par l’Assemblée nationale. Du coup, si nous voulons avoir une démarche réellement constructive à terme, il faut que nous soyons nombreux à voter cette proposition de loi, afin de montrer à nos collègues députés, qui l’ont votée dans une autre version, que, toutes travées confondues, nous sommes très attachés à la liberté des collectivités territoriales. Ainsi pourront-ils nous rejoindre à l’occasion de la seconde lecture à l’Assemblée nationale et, cette fois, voter les modifications que j’aurais souhaité obtenir par une négociation.
Comptons donc sur le fait, mes chers collègues, que la sagesse de nos députés rencontrera celle du Sénat !
M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, pour explication de vote.
M. François Grosdidier. Notre groupe Les Républicains reste très cohérent. Lors de l’examen de la loi NOTRe, nous étions opposés à toutes les mesures réduisant l’autonomie des communes, notamment sur deux points : de nouvelles compétences obligatoires, que nous refusions, et l’élection au niveau intercommunal des conseillers communautaires – deux dispositions mortifères pour les communes.
C’est dans ce sens qu’a donc été voté ce texte par la majorité sénatoriale.
Puis, dilemme au moment de la commission mixte paritaire : si nous laissions le dernier mot à l’Assemblée nationale et si elle adoptait l’élection des conseillers communautaires au niveau intercommunal, cette décision était irréversible, puisqu’elle s’appuyait sur le principe constitutionnel de l’action directe des élus des collectivités qui lèvent l’impôt. Le compromis a consisté en un refus, par tous, de l’élection des conseillers communautaires au niveau intercommunal – même si l’ancienne majorité a remis cela sur le tapis s’agissant des conseillers métropolitains –, tandis que nous obtenions le report à 2020 – au lieu de 2018 – du transfert des compétences « eau » et « assainissement », dans l’idée d’y revenir avant cette date pour rendre celles-ci optionnelles.
Mme Cécile Cukierman. Vous vous êtes fait avoir !
M. François Grosdidier. Nous y sommes. Sauf que, à l’époque, nous pensions raisonnablement pouvoir revenir au pouvoir avant 2020. Ce ne sont plus les socialistes qui y sont, ce n’est pas nous non plus : c’est En Marche, qui dispose d’une nouvelle majorité à l’Assemblée nationale.
Mme Cécile Cukierman. L’alternance, ça ne marche pas systématiquement !...
M. François Grosdidier. Aujourd’hui, nous rétablissons au Sénat le caractère définitivement optionnel – et non pas pour quelques années – des compétences « eau » et « assainissement ». Selon les territoires, on se rend bien compte que cette communautarisation de compétences n’est pas opportune. L’INSEE et la nature ne délimitent pas les mêmes périmètres : un bassin de vie n’est pas un bassin versant, ni aujourd’hui ni dans quelques années.
Nous rétablissons donc ce caractère optionnel ; il appartiendra à la nouvelle majorité de l’Assemblée nationale de confirmer ou non cette liberté rendue aux communes non pas pour préserver des prérogatives, mais pour choisir sur chaque territoire le mode de gestion le plus adapté aux problématiques locales. (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les maires, notamment ceux des communes rurales sont des gens pragmatiques, sérieux, qui connaissent et gèrent avec beaucoup d’attention et d’application l’eau et l’assainissement. Laissons-leur la liberté de transférer ou non la compétence aux communautés de communes.
Vous avez, madame la ministre, apporté une amélioration à la loi NOTRe avec la possibilité de décaler le transfert en 2026. Toutefois, je soutiens la proposition de la commission d’un transfert optionnel des compétences « eau » et « assainissement », sans date, comme cela a été voté en 2017 par le Sénat.
Les maires sont des gens responsables, soucieux de leur commune : nous devons leur faire confiance. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, pour explication de vote.
M. Olivier Paccaud. Monsieur le président, madame la ministre, M. Chasseing a parlé des maires : je veux avoir une pensée pour tous les élus locaux qui font vivre de petits syndicats d’eau, d’assainissement, et qui, dans beaucoup d’endroits, le font quasi bénévolement, c’est-à-dire avec des indemnités pharaoniques de 200 euros ou 250 euros par mois. Ils sont disponibles, compétents, ils connaissent parfaitement, sans être sourciers, les détours et les contours de leurs réseaux. Et si, malheureusement, que ce soit en 2020 ou en 2026, leur syndicat disparaît, j’ai bien peur que l’enjeu dont nous parlait Mme Gourault, à savoir la bonne gestion, la maîtrise des coûts de fonctionnement, soit perdu de vue, parce qu’il est évident que le coût de fonctionnement de ces petits syndicats, avec leurs élus bénévoles, est très inférieur à ce que seront les coûts de fonctionnement pour les communautés de communes ou d’agglomération une fois qu’elles exerceront ces compétences « eau » et « assainissement » – et à ce qu’ils sont déjà pour celles qui les exercent déjà.
Mme la ministre, dans son propos introductif, a insisté sur le fait que de nombreuses intercommunalités avaient déjà franchi le pas du transfert de compétences. C’est exact. Mais elle a sous-entendu que c’est parce que la démarche était logique et que les réseaux seraient ainsi mieux gérés. Mais la vérité, en tout cas dans mon département de l’Oise, c’est que ceux qui ont franchi le pas n’avaient qu’une seule motivation : les sous, la dotation bonifiée ! C’est une vision court-termiste dont ils seront, à mon avis, un jour ou l’autre – et plus tôt que tard – déçus. Je pense sincèrement que c’est faire fausse route.
Nous allons rétablir le caractère optionnel de ce transfert. À la suite des propos tenus par M. Grosdidier, j’espère que la raison l’emportera à l’Assemblée nationale et, surtout, au Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot, pour explication de vote.
M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, madame la ministre, à l’issue de ce débat, il faut quand même se poser un certain nombre de questions. Il est important d’écouter les élus locaux.
Notre collègue Grosdidier nous a rappelé le contexte dans lequel a été votée la loi NOTRe relativement à cette question du transfert des compétences « eau » et « assainissement ». Or il y a quand même un problème, car on s’est aperçu qu’un certain nombre d’éléments contenus dans cette loi nous ont menés droit dans le mur.
Par le vote de la loi de décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, modifiant la loi Montagne de 1985, nous avons permis aux communes touristiques, notamment de montagne, de conserver l’exercice de la compétence « promotion du tourisme, dont la création d’offices de tourisme », revenant ainsi sur la loi NOTRe, qui avait confié cette compétence aux intercommunalités.
Aujourd’hui, nous revenons sur le caractère obligatoire du transfert des compétences « eau » et « assainissement », pour le rendre optionnel.
Je partage les propos tenus par un certain nombre de nos collègues : la sagesse du Sénat, c’est d’avoir certainement un tout petit peu de bon sens et d’écouter la voix de ces élus locaux qui, pour 200 euros ou 250 euros par mois, somme pharaonique, comme l’a dit notre collègue, gèrent un syndicat d’eau. Il faut leur faire confiance parce que, à force de leur retirer des compétences, il ne leur restera plus qu’à rédiger des contrats de PACS. Je ne suis pas sûr que ce soit par ce biais que nous encouragerons les élus locaux à continuer leurs activités. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 92 :
Nombre de votants | 332 |
Nombre de suffrages exprimés | 304 |
Pour l’adoption | 285 |
Contre | 19 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)