M. François Pillet. Cet amendement, dont les dispositions reprennent celles d’une autre proposition de loi visant elle aussi à préserver le tissu social des centres-villes, a simplement pour objet de compléter la panoplie des mesures envisagées au travers de cet excellent texte.
Il s’agit de créer deux outils juridiques, sans aucune conséquence financière ou budgétaire au détriment des communes, des départements ou de l’État. Leur instauration est nécessaire du fait que, en matière de baux d’habitation, il existe des dispositions d’ordre public qui interdiraient de créer ces contrats de manière purement consensuelle.
Le premier de ces outils, dénommé « bail à réhabilitation avec option d’achat », permettrait à des personnes de s’installer dans un logement ancien nécessitant des travaux, qu’elles s’engageraient à réaliser en contrepartie d’un loyer dont le montant serait réduit au regard de ce qu’il aurait pu être dans le cadre d’un bail traditionnel. La durée du bail serait évidemment déterminée en fonction du montant de ces travaux, afin de garantir au preneur l’amortissement des dépenses engagées à ce titre. Le preneur disposerait en outre d’un droit d’option lui permettant d’acquérir la propriété à l’expiration de la durée du bail.
Le second outil est un « bail viager », qui serait pour l’heure réservé, en ce qui concerne le bailleur, aux personnes publiques. Ce contrat courrait en principe jusqu’au décès du preneur. Il donnerait lieu non pas à loyer, mais à versement d’un montant forfaitaire, évidemment très faible au regard de l’état du logement.
Afin que le preneur ne se trouve pas prisonnier d’un logement que, pour des raisons qui lui seraient propres, il souhaiterait un jour quitter, il disposerait d’un droit de résiliation, contrairement au bailleur – en l’espèce il s’agirait, je le redis, d’un bailleur public.
Il s’agit simplement de trouver des outils juridiques susceptibles d’aider à sauver tout ce patrimoine, toutes ces petites maisons inoccupées sur lesquelles fleurissent, en campagne, en ville, en milieu périurbain, des panneaux « à vendre » eux-mêmes complètement décrépis…
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Pierre Moga, rapporteur. Cet amendement tend à créer deux outils innovants, qui peuvent en effet largement contribuer au repeuplement des centres-villes et à la réhabilitation des logements. La jurisprudence admet d’ores et déjà le bail viager, mais les dispositions de cet amendement l’encadrent de façon beaucoup plus nette.
Avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Nous avons, avec les services de Jacques Mézard, examiné ces dispositions.
Il s’agit tout d’abord de permettre à des personnes de s’installer dans un logement ancien nécessitant des travaux qu’elles s’engageraient à réaliser en échange d’un loyer réduit. J’ai été saisie d’un certain nombre de remarques sur les difficultés que pose le dispositif en matière de sécurisation juridique de l’opération et du preneur.
Il en va de même pour le bail viager, par lequel une collectivité consentirait à un preneur, pour un montant forfaitaire, un droit d’usage et d’habitation jusqu’à son décès. Là aussi, les services de Jacques Mézard ont émis des remarques sur la sécurisation juridique du dispositif, pour le preneur et pour la collectivité : des risques financiers pourraient peser sur les deux parties.
Dans ces conditions, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, mais je vous invite, monsieur le sénateur Pillet, à vous rapprocher des services de Jacques Mézard pour approfondir la réflexion sur les présents dispositifs en vue des prochaines lectures de cette proposition de loi et/ou du projet de loi ÉLAN.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. J’ai cosigné cet amendement, dont tout le mérite revient à M. Pillet. Les dispositifs juridiques proposés sont innovants. L’objectif, qui s’inscrit naturellement dans le cadre de cette proposition de loi, est de faire vivre les centres-villes et les centres-bourgs, d’encourager l’activité économique et, plus largement, l’activité humaine. Ces dispositions vont dans le bon sens.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je remercie mon collègue Pillet de proposer d’innover. Si l’on veut faire en sorte que ces logements soient occupés, en effet, il faut prendre un peu de risques et proposer des solutions nouvelles.
C’est surtout la seconde formule qui me paraît intéressante. Je serai le rapporteur du projet de loi de réforme des retraites. Nous y travaillons déjà, et nous voyons bien que se pose, pour les personnes âgées, le problème de la mobilisation du patrimoine, et en particulier celui du viager. Si le recours à cette solution n’est guère envisagé, c’est parce qu’il engage le bien, sous la responsabilité des personnes concernées. Il faut donc trouver un système permettant que le risque lié au viager ne soit pris ni par le locataire ni par le loueur. La piste du viager « intermédié » mérite à cet égard d’être explorée.
Il y aurait là, également, un moyen de compléter les retraites. On sait que 70 % des personnes âgées possèdent un bien. Ce bien est souvent une source de revenus supplémentaires, mais il peut être aussi un fardeau pour les familles, parce qu’il faut l’entretenir.
La formule de bail viager présentée au travers de cet amendement pourrait constituer une solution dans un certain nombre de situations. C’est pourquoi j’engage mes collègues à voter cet amendement, que j’ai cosigné.
Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Primas, pour explication de vote.
Mme Sophie Primas. J’apporte moi aussi mon soutien à cet excellent amendement, qui ouvre la voie à des innovations juridiques pour le bien de nos centres-villes et de nos concitoyens.
J’ai bien entendu les réserves de Mme la secrétaire d’État. Ces deux dispositifs ne sont peut-être pas parfaits, mais rien ne nous empêche de les inscrire dans la proposition de loi : ils pourront toujours être affinés dans une deuxième étape – idéalement, une discussion du texte à l’Assemblée nationale, plus vraisemblablement une intégration au projet de loi ÉLAN.
L’adoption de cet amendement permettrait, d’ores et déjà, d’ouvrir la porte. J’y suis extrêmement favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. Je souscris à tout ce qui vient d’être dit. Il faut en effet multiplier les dispositifs. Nos communes comptent bien des logements complètement obsolètes. Les outils proposés seront très utiles.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l’article 2.
Article 3
Allégement de la fiscalité sur les logements dans les périmètres des conventions OSER
(Supprimé)
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 24 rectifié, présenté par M. P. Joly, Mme Conconne, M. Iacovelli, Mme Artigalas, MM. Cabanel, Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Montaugé, Tissot et Sueur, Mme Blondin, M. Botrel, Mme Espagnac, M. Fichet, Mme Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au 2 de l’article 278-0 bis A, après les mots : « dérogation au 1 », sont insérés les mots : « en dehors du périmètre des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnées à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs » ;
2° Après l’article 278 sexies A, il est inséré un article 278 sexies B ainsi rédigé :
« Art. 278 sexies B. - Le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée est celui mentionné au 2° de l’article 278 sexies-0 A pour les livraisons d’immeubles, situées dans le périmètre d’une opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs et comprenant au moins 10 % de logements sociaux à usage locatif mentionnés aux 2 à 4 et 6 à 8 de l’article 278 sexies et 25 % de logements destinés à être loués à des personnes physiques dont les ressources à la date de conclusion du bail ne dépassent pas les plafonds fixés par le décret prévu à la seconde phrase du premier alinéa du III de l’article 199 novovicies. Le loyer mensuel de ces logements ne dépasse pas les plafonds mentionnés au premier alinéa ou, le cas échéant, au second alinéa du même III. » ;
3° Le a de l’article 296 bis est complété par la référence : « et à l’article 278-0 bis A » ;
4° Au 2 de l’article 279-0 bis, après les mots : « dérogation au 1 », sont insérés les mots : « en dehors du périmètre des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnées à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs » ;
5° Après le IV de l’article 199 novovicies, il est inséré un paragraphe bis ainsi rédigé :
« … - La réduction d’impôt s’applique aussi aux logements situés dans le périmètre de l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs dans la limite d’un nombre de logements et d’une superficie globale de plancher fixés par le représentant de l’État dans le département, sur proposition de la commune signataire de la convention relative à l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation, et en fonction de la situation locale du marché du logement et des perspectives de redynamisation du centre-ville. »
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. La revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs passe par le retour de la population qui les a désertés au cours des dernières décennies.
Pour que cette population revienne, il faut qu’elle puisse disposer de logements aux standards actuels de confort. Cela passe par la rénovation de bâtiments anciens, de logements construits il y a plusieurs dizaines d’années, voire plusieurs siècles. Or ces rénovations sont très coûteuses. Dès lors, il convient, pour permettre à ceux qui les réalisent de bénéficier d’un semblant de retour sur investissement, de mettre en place un certain nombre d’allégements fiscaux.
Les allégements de TVA prévus dans la rédaction initiale de la proposition de loi ont malheureusement été supprimés par la commission des finances. Il est donc proposé ici de rétablir ces mesures d’allégement fiscal.
L’amendement vise en outre à permettre aux propriétaires qui réalisent des investissements locatifs dans les centres-villes et les centres-bourgs de bénéficier des dispositifs de défiscalisation qui sont généralement réservés aux zones dites « tendues », sachant que le caractère « détendu » des zones rurales tient moins à la faiblesse de la demande locative qu’à l’inadaptation de l’offre au regard des standards actuels de confort. Là encore, il s’agit de revenir au texte initial de la proposition de loi.
Mme la présidente. L’amendement n° 30 rectifié bis, présenté par MM. Pointereau, M. Bourquin, Courtial et Joyandet, Mme Harribey, MM. Cuypers, Houpert, Todeschini et Danesi, Mmes Delmont-Koropoulis et Chain-Larché, M. Magras, Mme Thomas, MM. Pemezec, Pierre et Fouché, Mmes Deromedi, L. Darcos et Bruguière, MM. Paccaud, Brisson et H. Leroy, Mme Berthet, M. Henno, Mme Di Folco, MM. Morisset, Guerriau, Lalande, de Nicolaÿ, Charon et Vogel, Mmes Raimond-Pavero et Imbert, M. Courteau, Mmes Joissains, Bonfanti-Dossat, Espagnac et Lamure, M. Dufaut, Mme Vullien, MM. Allizard, Chatillon, Daudigny et Kennel, Mme Kauffmann, MM. P. Joly, Savary et Pillet, Mmes Gruny, Duranton et Dumas, MM. Antiste et Lefèvre, Mme Guillemot, MM. Cabanel et Chasseing, Mme Perol-Dumont, MM. Saury, Perrin, Milon, Ginesta, D. Laurent et Revet, Mme Lassarade, M. Hugonet, Mmes Deseyne et de Cidrac, MM. Babary, B. Fournier, Laménie, Bouchet, Poniatowski, Bonhomme, Priou et Mandelli, Mme Deroche, M. Vaugrenard, Mme Artigalas, MM. J.M. Boyer, Guené et Wattebled, Mmes Canayer et Chauvin, MM. Chevrollier et Manable, Mmes Lopez et Herzog, M. Daubresse et Mmes Meunier, Bories, Garriaud-Maylam et Lanfranchi Dorgal, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 2° du 2 du I de l’article 257 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les périmètres des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnées à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, la proportion mentionnée aux a à d du présent article est portée au deux tiers. » ;
2° Après l’article 278 sexies A, il est inséré un article 278 sexies B ainsi rédigé :
« Art. 278 sexies B. – La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 10 % en ce qui concerne les livraisons de logements neufs et de logements, issus de la transformation de locaux à usage de bureaux, considérés comme neufs au sens du 2° du 2 du I de l’article 257, soit à des organismes mentionnés au 4° du 1 de l’article 207 ou soumis au contrôle, au sens du III de l’article L. 430-1 du code de commerce, de la société mentionnée à l’article L. 313-20 du code de la construction et de l’habitation, soit à des personnes morales dont le capital est détenu en totalité par des personnes passibles de l’impôt sur les sociétés ou des établissements publics administratifs, qu’elles destinent à la location à usage de résidence principale dans le cadre d’une opération de construction ayant fait l’objet d’un agrément préalable entre le propriétaire ou le gestionnaire des logements et le représentant de l’État dans le département, qui précise le cadre de chaque opération et porte sur le respect des conditions prévues aux a à c du présent article.
« Pour l’application du premier alinéa, les logements doivent :
a) Être implantés sur un terrain situé dans le périmètre d’une opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs ;
« b) Être intégrés dans un ensemble immobilier comprenant au minimum 15 % de surface de logements mentionnés aux 2 à 6, 8 et 10 du I de l’article 278 sexies, sauf dans les communes comptant déjà plus de 50 % de logements locatifs sociaux, au sens de l’article L. 302-5 du code de la construction et de l’habitation, et dans les quartiers faisant l’objet d’une convention prévue à l’article 10-3 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine ;
« c) Être destinés à être loués à des personnes physiques dont les ressources à la date de conclusion du bail ne dépassent pas les plafonds fixés par le décret prévu au premier alinéa du III de l’article 199 novovicies du présent code. Le loyer mensuel de ces logements ne dépasse pas les plafonds visés au premier ou, le cas échéant, au second alinéa du même III. » ;
3° Le 2 de l’article 278-0 bis A, est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les périmètres des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnées à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, la proportion mentionnée au b du présent article est portée à 20 %. »
4° Après le IV de l’article 199 novovicies, il est inséré un paragraphe ainsi rédigé :
«… – La réduction d’impôt s’applique aussi aux logements situés dans le périmètre de l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l’article 1er de la loi n° … du … portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs dans la limite d’un nombre de logements et d’une superficie globale de plancher fixés par le représentant de l’État dans le département, sur proposition de la commune signataire de la convention relative à l’opération de sauvegarde économique et de redynamisation, et en fonction de la situation locale du marché du logement et des perspectives de redynamisation du centre-ville. » ;
La parole est à M. Martial Bourquin.
M. Martial Bourquin. La commission des finances nous a alertés sur le fait que le dispositif initial n’était peut-être pas conforme au droit européen. Avec Rémy Pointereau, nous avons revu notre copie en rédigeant un amendement qui vise à ouvrir le bénéfice du taux réduit de TVA de 10 % aux opérations mixtes de logement social et intermédiaire. Nous avons donc retiré du champ de notre dispositif les logements purement privés, comme cela était demandé.
Dès lors, les opérations concernées doivent se situer dans un périmètre « OSER » et s’insérer dans un ensemble immobilier comprenant au minimum, en surface, 15 % de logements sociaux.
Il s’agit notamment d’ouvrir le champ du dispositif de défiscalisation des investissements locatifs aux zones détendues, dès lors qu’elles se trouvent dans un périmètre « OSER ». En effet, cela a été souligné lors de la conférence de consensus sur le logement organisée par le Sénat, il existe de vrais besoins de logement dans ces zones, où l’absence de tension tient souvent non pas à un manque général de demande locative, mais à l’état dégradé et vieillissant du parc immobilier.
Pour éviter les abus, qui ont pu consister à bâtir des logements dans des zones où la demande était faible, la mise en œuvre de réductions d’impôt serait strictement encadrée. Elle serait réservée, donc, aux périmètres « OSER », et limitée à un nombre de logements et à une superficie de plancher compatibles avec les capacités d’absorption par le marché local et fixés par le préfet. Le volume de logements acceptés tiendrait compte, en outre, de la situation actuelle du marché.
Ces dispositions, très attendues par les élus locaux, ont fait l’objet d’une appréciation positive dans l’étude d’impact indépendante qui accompagne la proposition de loi. Mes chers collègues, si nous n’amenons pas des habitants dans les centres-villes et les centres-bourgs, tout ce que nous faisons ici ne servira à rien !
Nous avons tenu compte de l’importante remarque de la commission des finances sur la compatibilité de ces dispositions avec le droit européen. Attachons-nous à peupler nos centres-villes, nos centres-bourgs, pour y faire vivre les commerces et les services ! (Mme Sonia de la Provôté et M. Xavier Iacovelli applaudissent.)
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission des finances ?
M. Arnaud Bazin, rapporteur pour avis de la commission des finances. Pour éclairer cette matière un peu ardue, je rappellerai que la très grande majorité des travaux de rénovation sont déjà concernés par des taux réduits de TVA : de 5,5 % pour les travaux de rénovation énergétique et de 10 % pour tout ce qui est rénovation et non pas restructuration lourde – le taux normal de 20 % s’appliquant dans ce dernier cas de figure, comme pour la production d’un immeuble neuf.
Sur l’amendement n° 24 rectifié, qui vise à rétablir la version initiale du texte, la commission des finances a émis un avis défavorable.
L’amendement n° 30 rectifié bis, plus complexe, comprend trois parties. Il tend à rétablir de manière partielle l’article 3, qui avait été supprimé par la commission des finances.
Cet amendement a été rectifié de manière importante mercredi en début d’après-midi, après que la commission des finances se fut réunie pour déterminer son avis.
S’agissant du 1° et du 3°, les auteurs de l’amendement reprenaient des dispositions, rejetées lors de l’examen en commission, qui appliquaient un taux réduit de TVA aux travaux réalisés dans le parc des logements privés, même lorsque ces travaux conduisent à rendre l’immeuble comme neuf. Cela est malheureusement exclu par la directive relative au système commun de TVA du 28 novembre 2006, qui limite l’application d’un taux réduit à la « rénovation » et à la « réparation » de logements privés, soit un niveau d’intervention moins important que celui qui est assimilable à la livraison d’un immeuble neuf.
Afin de répondre à cette objection, les auteurs de l’amendement ont rectifié celui-ci afin de modifier la définition même d’un « immeuble considéré comme neuf ». La rectification porte donc sur l’article 257 du code général des impôts. Si je la comprends bien, le taux réduit de TVA pourrait s’appliquer, par exemple, si l’on modifie les deux tiers des fondations, contre la moitié aujourd’hui.
Il est difficile de dire si un grand nombre de projets seraient concernés hors périmètres « OSER », et plus encore de mesurer les faits déclencheurs.
À défaut de pouvoir donner l’avis de la commission des finances, celle-ci n’ayant pas examiné cette rectification, je livrerai quelques observations rapides.
Tout d’abord, l’article 257 du code général des impôts joue un rôle central dans la fiscalité des immeubles. Il y est fait référence dans plusieurs dizaines d’autres articles du code général des impôts ou d’autres codes. Il est donc impossible, dans les délais impartis, d’évaluer les conséquences de sa modification.
Or, il est délicat d’accepter de tels dispositifs dérogatoires, dont la mise en œuvre pourrait par exemple créer une situation dans laquelle un taux de 5,5 % s’appliquerait dans une rue au motif qu’elle aurait été classée en périmètre « OSER » par la commune, alors que le taux de 20 % prévaudrait, pour des travaux analogues, dans une rue voisine présentant les mêmes caractéristiques, mais extérieure à ce périmètre.
S’agissant du 2°, c’est-à-dire de l’application du taux réduit de 10 % pour des travaux réalisés dans un ensemble de logements partiellement social, la modification va dans le sens de ce qui avait été demandé par la commission. Elle nous paraît donc acceptable, puisque ne sont plus visés que le logement social et le logement intermédiaire, et non le logement privé.
S’agissant de l’ouverture du bénéfice du dispositif Pinel, la commission des finances a émis un avis défavorable, dans la mesure où elle avait approuvé le recentrage de ce dispositif lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2018.
En conclusion, la commission des finances avait émis, avant sa rectification, un avis défavorable sur l’amendement n° 30 rectifié bis. Elle eût été prête à s’en remettre à la sagesse du Sénat si le 1°, le 3° et le 4° avaient été supprimés. Tel n’ayant pas été le cas, l’avis de la commission des finances reste défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Nous avions également relevé les problèmes de compatibilité avec le droit européen qui grevaient ces dispositions.
La position du Gouvernement est que les mesures fiscales ont vocation à être discutées en loi de finances.
En l’état actuel des choses, l’avis du Gouvernement est défavorable sur ces deux amendements.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. Je soutiens les efforts des deux coauteurs de la proposition de loi pour essayer d’instaurer un droit à dérogation adapté à des situations qui méritent des mesures exceptionnelles. Quand des centres-bourgs meurent, s’étiolent, il faut apporter des réponses !
On nous oppose en permanence le droit européen, le droit ceci, le droit cela !
M. Philippe Dallier. Ça existe…
Mme Catherine Conconne. Je peux le comprendre, mais, sans mesures audacieuses, ce pacte de revitalisation n’aura aucune portée. Le mot « pacte » suppose un accord sur une intention ! Il faut trouver des solutions pour motiver des dérogations. Les dérogations, on les compte déjà par centaines ! La jurisprudence fait florès en la matière.
Je soutiens donc les efforts des deux coauteurs, dont je salue l’esprit de concertation pour essayer jusqu’au bout de trouver des accords. Si la boîte à outils que nous avons souhaité mettre en place par le biais de ce texte ne contient pas une batterie de mesures audacieuses pour motiver des propriétaires à faire des travaux dans des endroits où la désespérance s’est déjà installée, l’effet de levier que nous appelons de nos vœux ne jouera pas. Nous trouverons les solutions ! (M. Xavier Iacovelli applaudit.)
Mme la présidente. La parole est à M. Martial Bourquin, pour explication de vote.
M. Martial Bourquin. Je pense que l’on peut régler un premier problème, celui de l’élargissement du champ des allégements de TVA consentis pour les travaux de rénovation. Le mécanisme que nous proposons consiste simplement à modifier légèrement les critères du code général des impôts, pour qu’il y ait davantage de travaux de rénovation lourde dans les périmètres « OSER ». Il s’agit de sauver le patrimoine et de promouvoir sa valorisation.
Mes chers collègues, nous discutons là d’un des points durs de la proposition de loi. Si l’on ne repeuple pas les centres-villes, tout ce que nous faisons ici sera voué à l’échec. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain. –Mme Sonia de la Provôté et MM. Max Brisson et François Pillet applaudissent également.)
Nous devons faire preuve d’imagination et de volontarisme. Il faudra parfois démolir et reconstruire, parfois rénover et mettre en valeur le patrimoine existant. C’est ainsi que nos centres-villes retrouveront une esthétique, que nous redonnerons l’envie d’y habiter.
Le dispositif Pinel serait coûteux et inefficace, ai-je entendu dire, mais si l’on ne peut y recourir dans certaines villes, le résultat sera désastreux, parce qu’il offre des possibilités extraordinaires en matière de construction. Cet outil est indispensable au renouvellement urbain. Si on le réserve aux seuls secteurs tendus, nous ne pourrons pas rénover et requalifier nos centres-villes. Si l’on ajoute la suppression de l’APL accession pour les ménages modestes, cela fait beaucoup ! La Fédération française du bâtiment m’a fait part de ses vives inquiétudes ; il y a une baisse très sensible de la construction. La question du logement doit être posée dans d’autres termes.