M. François-Noël Buffet, rapporteur. C’était vrai !

M. David Assouline. Le Gouvernement faisait déjà valoir le fait que la directive autorisait une durée maximale de 6 mois et évoquait la nécessité d’une harmonisation européenne vers une durée plus longue. C’est encore le cas aujourd’hui, le Gouvernement tirant argument des normes européennes pour aller jusqu’à 90 jours.

Pourtant, le rapport de M. Mariani est très clair : « Certes, dans de nombreux cas, il n’est pas possible d’organiser l’éloignement au cours de cette période, notamment à cause de la difficulté à obtenir les laissez-passer consulaires, mais une augmentation de la durée de rétention ne permettrait probablement pas d’améliorer nettement le taux d’éloignement des étrangers placés en rétention. » Il recommandait donc de « maintenir la durée maximale de rétention à 32 jours ». C’était le débat à l’époque.

Chacun était alors dans la prospective. M. Mariani affirmait que si l’objectif était de favoriser l’éloignement, une augmentation de la durée de rétention ne permettrait probablement pas de l’atteindre. Il n’avait alors pas de certitude. Depuis lors, on a mis en application un délai de 45 jours, après la loi du 16 juin 2011 relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité, dite loi Hortefeux-Besson. Nous sommes en 2018, et le taux d’éloignement n’a pas augmenté.

Le passage de 32 à 45 jours n’a donc pas eu l’effet attendu, mais le Gouvernement ose nous dire aujourd’hui qu’il faut passer à 90 jours. Qu’est-ce que cela veut dire ? À qui vous adressez-vous ainsi ? Vous pensez parler à ceux qui seront contents de vous voir agiter ce chiffon rouge et dont vous espérez qu’ils se félicitent de votre fermeté, mais, en réalité, vous effrayez tout le monde !

Ceux qui sont dans ces centres, notamment les policiers, ont déjà du mal à gérer la situation actuelle. Ils appréhendent de devoir garder plus longtemps la très faible proportion de retenus qu’ils gardaient 45 jours et qu’ils finissent par relâcher dans un état lamentable. Dans quel état seront ceux qu’on libérera après 90 jours de rétention ?

Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.

M. Roger Karoutchi. Je voterai naturellement contre ces amendements.

Mme Cohen est sortie, mais je souhaitais l’inviter à faire attention. Ce n’est pas parce qu’une association écrit des choses sur son site que l’on peut affirmer que la gendarmerie et la police ne respectent pas le droit, exercent des pressions, etc.

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Il a raison !

M. Roger Karoutchi. Comme d’autres ici, j’ai visité beaucoup de centres, j’ai reçu les associations et j’ai reçu les forces de police. Être policier dans un centre de rétention, ce n’est franchement pas de la tarte ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Esther Benbassa. Nous sommes bien d’accord !

M. David Assouline. C’est vrai ! Il ne faut pas alourdir leur tâche !

M. Roger Karoutchi. Gardons-nous des généralisations hâtives. Les forces de police de la République respectent parfaitement les règles. Il existe sans doute des cas discutables, mais il en va de même pour les associations, qui parfois ne respectent pas les règles pour servir les causes qu’elles défendent. Un peu d’équilibre ne nuit pas, mais ne remettons pas en cause la police et la gendarmerie ! (M. Jacques Grosperrin applaudit.)

M. Philippe Bas, président de la commission des lois. Très bien !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 275 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 503.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 536 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 269 rectifié ter.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 105.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 364 rectifié bis, présenté par MM. Jomier et Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Remplacer les mots :

, en prenant en compte son état de vulnérabilité

par les mots :

, sur la base d’une évaluation individuelle prenant en compte l’état de vulnérabilité physique et psychologique de l’intéressé

La parole est à M. Bernard Jomier.

M. Bernard Jomier. Je note que chacun s’accorde à reconnaître, sur les différentes travées ainsi que sur le banc des commissions, de M. Karoutchi à moi-même, que les policiers sont inquiets des évolutions à venir,…

M. Roger Karoutchi. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Bernard Jomier. … du fait de ces nouvelles dispositions législatives relatives à la rétention, qui les conduisent à exercer un métier qui n’est pas le leur. Pourtant, on y va tout de même ! Droit dans le mur, en klaxonnant ! Il y a là quelque chose qui m’échappe.

Il est prévu de prendre en compte l’état de vulnérabilité des personnes placées en rétention, cet amendement vise à ce que cette prise en compte ne soit pas seulement générale et effectuée par catégories en référence à des types d’états de santé, de handicaps ou de troubles psychiques, mais procède bien d’une évaluation individuelle de l’état de vulnérabilité physique et psychique de l’intéressé.

En écho à ce que je disais précédemment, cela me paraît d’autant plus important que la durée de rétention peut être plus longue.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis est défavorable. La commission estime que la rédaction actuelle satisfait largement cette proposition et qu’il n’y a pas de raison de la modifier sur ce point, au risque de surtransposer. La vulnérabilité nous semble parfaitement prise en compte par le droit positif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Le Gouvernement partage l’avis de la commission.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 364 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 283 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 6

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

b) Le II est ainsi modifié :

- à la première phrase du premier alinéa, les mots : « , sur la base d’une évaluation individuelle prenant compte l’état de vulnérabilité de l’intéressé » sont supprimés ;

- le 5° est abrogé ;

- au 7°, les mots : « de son parcours migratoire, de sa situation familiale ou de ses demandes antérieures d’asile » sont supprimés ;

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement vise à supprimer deux dispositions introduites par la droite sénatoriale lors de l’examen de la loi du 20 mars 2018.

La première prévoit de permettre à la préfecture de placer en rétention un étranger soumis au règlement Dublin et refusant de donner ses empreintes ou les altérant volontairement. Cette disposition revient à permettre le placement en rétention des personnes qui refusent de donner leurs empreintes digitales, sans aucune autre condition et de manière systématique, sur la simple suspicion qu’elles relèveraient de la procédure Dublin III, sans qu’il y ait pour autant de certitude à ce sujet.

La seconde permet le placement en rétention d’une personne ayant dissimulé des éléments de son parcours migratoire, de sa situation familiale et de ses demandes antérieures d’asile. Le critère permettant le placement en rétention pour dissimulation d’éléments de son parcours migratoire ou de sa situation familiale est flou et inadapté à la situation des demandeurs d’asile qui ont pu subir des traumatismes durant leur parcours. Il paraît dès lors raisonnable de penser qu’ils ne se confieront pas facilement à l’administration sur ces éléments. Par ailleurs, la loi permet de prendre en compte de manière suffisamment large toutes les situations qui constituent un risque non négligeable de fuite, tout en les adaptant à la situation spécifique des demandeurs d’asile.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis est défavorable, car nous avons voté ces critères dans le cadre de la loi Warsmann dont il n’est pas question de remettre en cause ou d’affaiblir le dispositif.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Jacqueline Gourault, ministre. Bien que le Conseil constitutionnel ait validé l’ensemble des dispositions de la loi Warsmann, l’Assemblée nationale s’est prononcée contre le maintien de ces deux critères ajoutés par le Sénat.

Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie, pour explication de vote.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Pour la deuxième fois au cours de l’examen de ce projet de loi, le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat alors même qu’il avait pris des engagements clairs dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale lors de l’examen de la loi dite Warsmann. C’est curieux. Je suis un esprit simple et j’essaie de comprendre pourquoi un engagement pris devant l’Assemblée nationale n’est pas tenu ici, puisqu’au lieu de se prononcer, le Gouvernement se contente de s’en remettre à notre sagesse. J’aimerais y voir plus clair.

M. Roger Karoutchi. S’en remettre à notre sagesse, c’est flatteur !

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 283 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Je n’obtiendrai donc pas de réponse !

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 365 rectifié bis, présenté par Mme S. Robert, M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz, Iacovelli et Jomier, Mmes Lepage et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 7

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« … – Les I et II du présent article ne sont pas applicables aux personnes en situation de handicap moteur, cognitif ou psychique. » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Madame la présidente, monsieur le ministre d’État, mes chers collègues, cet amendement concerne la question délicate des personnes en situation de handicap qui seraient en rétention.

Le docteur Claude Simonnot, cofondateur de Handicap International, assure que « la rétention fabrique du handicap parce qu’elle fragilise mentalement ». Si la rétention est néfaste pour des personnes ne présentant pas initialement de handicap, songeons aux répercussions qu’elle peut avoir sur celles et ceux qui sont, d’ores et déjà, en situation de handicap.

Tout d’abord, à quoi bon retenir dans des centres de rétention des personnes en situation de handicap moteur, cognitif ou psychique, alors que le risque de fuite est bien souvent très faible, pour ne pas dire inexistant ?

À cet égard, dans son rapport de 2007, la CIMADE qualifiait la création de quelques chambres adaptées aux personnes handicapées motrices en CRA « d’acharnement de l’administration ». Il est vrai que retenir des personnes handicapées en CRA apparaît comme une mesure inadaptée, a minima. Ces personnes doivent faire l’objet d’un traitement à part entière, avec des mesures curatives idoines.

Par ailleurs, le personnel n’est pas nécessairement formé à ce public, qui nécessite une attention toute particulière, et les moyens ne sont pas suffisants pour garantir des conditions décentes d’accueil et de soins.

Par parallélisme, rappelons que la France a déjà été condamnée à plusieurs reprises par la Cour européenne des droits de l’homme pour traitements inhumains ou dégradants, notamment le 4 février 2016 et le 23 février 2012, en raison des conditions de détention d’une personne atteinte de troubles mentaux. Tentons de ne pas encourir à nouveau les mêmes condamnations.

Notre amendement a donc pour objet de proscrire le placement en rétention des personnes en situation de handicap moteur, cognitif ou psychique.

Mme la présidente. L’amendement n° 276 rectifié bis, présenté par MM. Jomier et Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 8

Rédiger ainsi cet alinéa :

« IV. - La vulnérabilité de l’étranger, son état de santé physique ou psychologique, ainsi que, le cas échéant, ses handicaps moteurs ou cognitifs, sont évalués par l’unité médicale dès l’arrivée dans le lieu de rétention. Cette évaluation est prise en compte dans la détermination de la durée de la mesure de placement en rétention et des conditions d’accompagnement dont les personnes bénéficient. » ;

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Il s’agit d’un amendement de repli, dans l’hypothèse où le précédent ne serait pas adopté.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. L’avis de la commission est défavorable sur ces deux amendements. La problématique des personnes en situation de handicap moteur, cognitif ou psychique est déjà prise en compte, naturellement, dans l’évaluation de la vulnérabilité.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat, ministre de lintérieur. L’avis est défavorable pour les mêmes raisons.

Nous avons évidemment étudié de près la question que vous soulevez et nous avons recensé le nombre de personnes placées en rétention qui présentaient une situation de handicap. Il n’y en avait aucune en 2017 et trois en 2018.

Bien entendu, nous prêtons à chacune de ces situations une attention extrême, car dans la prise en considération de la vulnérabilité de la personne, le problème du handicap est évidemment très important.

Mme la présidente. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.

M. Bernard Jomier. Je suis un peu surpris de la réponse à l’amendement n° 276 rectifié bis, en particulier, qui va au-delà de la question du handicap.

Chaque centre de rétention dispose d’une unité médicale. Cet amendement vise à prévoir, dès l’arrivée dans le centre de rétention, une évaluation, par cette unité, de la personne retenue.

À ma grande surprise, ce n’est pas le cas aujourd’hui. J’ai ainsi récemment trouvé dans un centre de rétention francilien un jeune homme de 18 ans atteint d’une tuberculose contagieuse qui était resté 16 jours avant que cette maladie ne soit dépistée. C’était le 11 mai et il est encore hospitalisé aujourd’hui.

Si cette personne avait été vue par l’unité médicale du centre à son arrivée, le dépistage aurait été beaucoup plus rapide, mais elle a craché du bacille de Koch à la figure de tout le monde, y compris des personnels du centre, pendant bien trop longtemps.

Je reconnais qu’il ne s’agit sans doute pas d’une mesure d’ordre législatif, mais plutôt de bon sens réglementaire. Elle n’exige même pas de moyens supplémentaires, puisque la structure existe. Si M. le ministre me garantissait qu’une circulaire allait être diffusée donnant instruction aux unités médicales des CRA de voir systématiquement les arrivants dans les 24 ou 48 heures, je retirerais volontiers cet amendement.

La situation actuelle est un peu abracadabrantesque ! L’unité médicale est présente, mais j’ai interrogé des personnels de ces unités, on ne leur demande pas de voir les retenus qui arrivent. Cela pose un problème de santé personnelle pour ces retenus, mais également de santé publique pour l’ensemble des personnels.

Mme la présidente. La parole est à M. David Assouline, pour explication de vote.

M. David Assouline. Nous discutons des textes, mais le fait d’aller dans des centres de rétention nous permet d’être au plus près de la réalité et d’en faire part au Gouvernement qui peut tenir compte de nos remarques.

Lors de ma dernière visite dans un CRA en février, j’ai été confronté à deux sujets de ce type.

Le premier illustre ce que vient de dire M. Jomier : non seulement on ne dépiste pas systématiquement les pathologies existantes au moyen d’une visite médicale lors de l’admission dans le CRA, mais lorsqu’une pathologie est constatée, ce n’est plus le CRA, mais l’OFII, qui prend la décision de faire hospitaliser ou de faire sortir la personne du centre pour lui permettre de recevoir un traitement. Or l’OFII étant engorgé, il répond parfois un peu tard par rapport au problème, qui, dans certains cas, est un problème médical strict.

J’ai ainsi été confronté au cas d’une personne en situation irrégulière qui, parce qu’elle a été arrêtée, n’a pas pu se rendre à une convocation pour une intervention chirurgicale. Le temps qu’on la laisse sortir, il était déjà trop tard.

Le deuxième cas auquel j’ai été confronté constituait une menace pour la sécurité du centre. En saluant les retenus comme je le fais quand j’entre dans un centre, je remarque, alors que je serre la main de l’un d’entre eux, que l’on me fait les gros yeux. Certains viennent alors me confier que la personne que je viens de saluer est dangereuse, qu’ils en ont peur et qu’ils n’en peuvent plus. Cet individu souffrait d’une pathologie psychique lourde signalée et était à l’origine de plusieurs incidents.

Il fallait pour qu’il sorte du centre et soit placé au sein d’une unité psychiatrique qu’une décision soit prise par l’OFII. Or la décision n’arrivait pas, et chaque heure qui passait, cette personne était avec les autres retenus, y compris dans les dortoirs.

Il y a donc un vrai problème, qui explique d’ailleurs notre souci de ne pas rallonger les délais de rétention dans ces centres où des profils socio-médicaux très différents se côtoient dans une promiscuité absolue. Il ne nous semble pas opportun de prolonger ces situations inextricables pendant 90 jours.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Monsieur le ministre d’État, j’ai bien entendu votre réponse. Vous reconnaissez que le problème est redoutable et vous dites qu’il va solliciter toute votre attention.

J’ai moi aussi visité des centres de rétention et j’ai vu les conditions concrètes dans lesquelles un nombre important de personnes est retenu.

Or la prise en charge d’une personne en situation de handicap moteur nécessite un ensemble de procédures médicales adaptées. Il est de fait très difficile de gérer des personnes en situation douloureuse, que ce soit à titre psychique ou mental, et il est pratiquement impossible de le faire sur une durée de 90 jours, ou alors il faudrait embaucher durablement des personnels spécialisés.

Nous avons déposé ces amendements pour appeler l’attention. Vous nous dites que votre attention est appelée, monsieur le ministre d’État, mais nous serons très vigilants aux mesures concrètes que vous prendrez, car elles nous apparaissent extrêmement difficiles à mettre en œuvre.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 365 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 276 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 282 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéas 9 à 11

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Cet amendement vise à réparer ce qui n’est, je l’espère, qu’un oubli relatif à l’accès de l’étranger placé en centre de rétention à l’information lui permettant de faire valoir ses droits.

Alors que la rédaction précédente prévoyait qu’il pouvait bénéficier de cette information sur ses droits dès son arrivée, cette mention a disparu de la nouvelle rédaction.

Nous souhaitons donc revenir sur cette modification afin que l’étranger placé en rétention puisse bénéficier effectivement de ses droits dès son arrivée dans un centre de rétention.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, rapporteur. La rédaction proposée ne nous semble pas modifier fondamentalement le texte proposé par le Gouvernement qui vise, semble-t-il, à répondre au problème des transferts successifs entre centres de rétention.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. Des distorsions existant entre les territoires, nous avons voulu préciser les choses de manière à ce qu’il y ait moins de contentieux. Dès que l’étranger arrive au centre de rétention, il peut communiquer avec son avocat, et éventuellement avec les associations qui peuvent l’accompagner.

L’avis est défavorable.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 282 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 424, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 18

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéas 24 et 25

Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :

a) Les deuxième et troisième alinéas sont ainsi rédigés :

« Le juge peut également être saisi lorsque la mesure d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou de l’absence de moyens de transport. Il peut également être saisi aux mêmes fins lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la mesure d’éloignement.

« Le juge statue par ordonnance dans les conditions prévues aux articles L. 552-1 et L. 552-2. S’il ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration du délai de vingt-huit jours mentionné au premier alinéa du présent article et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. » ;

III. – Alinéa 27

1° Première phrase

Remplacer la référence :

à l’article L. 552-3

par les mots :

aux troisième ou quatrième alinéas

2° Troisième phrase

Remplacer les références :

aux articles L. 552-1 et L. 552-2

par la référence :

au présent article

3° Dernière phrase

Remplacer le mot :

quarante-cinq

par le mot :

quinze

4° Compléter cet alinéa par deux phrases ainsi rédigées :

Si l’une des circonstances mentionnées à la première phrase du présent alinéa survient au cours d’une période de prolongation ordonnée en application du présent alinéa, le juge peut être à nouveau saisi dans les mêmes conditions. Toutefois, la rétention ne peut être prolongée plus de deux fois en application du présent alinéa et sa durée maximale ne peut excéder quatre-vingt-dix jours ou, par dérogation, deux cent dix jours dans le cas prévu au quatrième alinéa.

La parole est à M. le ministre d’État.

M. Gérard Collomb, ministre dÉtat. J’ai eu l’occasion de vous dire, mesdames et messieurs les sénateurs, que le temps de rétention administrative était de 160 jours dans de nombreux pays.

Nous avions proposé de porter le temps de rétention à 90 jours de manière à disposer du temps suffisant pour obtenir les laissez-passer consulaires.

Les députés ont souhaité séquencer ce temps de rétention de telle sorte que le juge des libertés et de la détention, le JLD, puisse se prononcer au bout de 2 jours, puis de nouveau au bout de 28 et de 30 jours.

Dans certains cas exceptionnels comme une tentative de fuite ou un refus d’embarquement, ils ont prévu une prolongation supplémentaire de deux fois 15 jours de manière à pouvoir effectuer les éloignements que nous n’arrivons pas aujourd’hui à effectuer.

Le texte que cet amendement vise à rétablir me semble donc particulièrement équilibré.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Ce n’est pas ce qui est écrit, monsieur le ministre d’État !

Mme la présidente. L’amendement n° 277 rectifié bis, présenté par M. Leconte, Mme de la Gontrie, MM. Marie, Sueur, Durain et Fichet, Mme Harribey, MM. Kanner, Kerrouche et Assouline, Mme Blondin, MM. Devinaz et Iacovelli, Mmes Lepage, S. Robert et Rossignol, MM. Temal et J. Bigot, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian, Meunier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 18

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Marie-Pierre de la Gontrie.

Mme Marie-Pierre de la Gontrie. Madame la présidente, si vous le voulez bien, je présenterai les amendements nos 277 rectifié bis, 279 rectifié bis et 280 rectifié bis qui sont en discussion commune.

L’amendement n° 277 rectifié bis vise à supprimer le séquençage de la rétention introduit par la commission des lois qui prévoit une deuxième phase d’une durée de 40 jours. Ce nouveau séquençage, qui a été précisé par le rapporteur, restreint en effet le contrôle du juge des libertés et de la détention au détriment des droits de la personne retenue.

L’amendement n° 279 rectifié bis est un amendement de coordination.

L’amendement n° 280 rectifié bis vise à supprimer l’allongement de la durée de la rétention à 90 jours, cette prolongation étant totalement inefficace.

Le rapporteur a d’ailleurs indiqué, lorsqu’il a rappelé l’historique de son évolution, qu’aucune démonstration de l’utilité de l’augmentation de la durée maximale de rétention n’a jamais pu être faite.

Le ministre d’État lui-même l’avait au fond admis lors de son audition devant la commission des lois, et l’on comprenait que cette mesure visait davantage à faire passer un message général dans le monde aux potentiels candidats à la demande de séjour qu’à répondre à un besoin réel qui n’a jamais été démontré.