M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le ministre, vos arguments sont récurrents et je crains que nous n’y ayons de nouveau droit aux articles suivants !
Vous nous répondez systématiquement que nos amendements ne sont pas conformes au droit européen.
Mme Cécile Cukierman. Je crois que l’Europe n’est pas seule en cause et que cela vous arrange de vous cacher derrière elle ! Car elle offre un modèle de société et elle présente une absence de volonté réelle de régulation qui donne satisfaction à une grande partie des membres de la majorité présidentielle…
Bien évidemment, l’Europe nous interdit des choses, mais je ne vous entends pas protester, monsieur le ministre, ni même notre grand Président de la République. On prétend pourtant qu’il a une meilleure aura que ses prédécesseurs à l’échelle européenne et internationale que tous ses prédécesseurs ! Je ne vous entends, ni vous ni lui, dire haut et fort qu’il faut modifier ce droit européen, notamment dans le domaine agricole, non pas pour une raison dogmatique ou politicienne, mais parce que nous savons tous ici les dégâts qu’il engendre. On parle de technostructure européenne, de diktat européen, et nous n’ignorons pas qu’un certain nombre de responsables politiques utilisent ces arguments pour faire monter le pire dans la population agricole de notre pays.
Vous m’avez répondu sur la question du droit européen. Dont acte. Cela tombe bien, il y aura dans un an le grand rendez-vous des élections européennes.
On ne peut pas simplement répondre à des parlementaires nationaux que le droit européen nous empêche d’agir !
Si le droit européen est si contraignant, soyez assuré que je serai à vos côtés, monsieur le ministre, pour défendre les droits de nos agriculteurs contre ce que veut imposer l’Union européenne. C’est de cela que nous avons besoin, loin de tous les populismes et les dogmatismes ! (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – M. Joël Labbé applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Madame la sénatrice, je partage totalement ce que vous venez de dire. (Mme Cécile Cukierman s’exclame.), mais je ne peux me soustraire, pas plus que vous d’ailleurs, au droit européen, dont nous devons tenir compte. Faisons en sorte de le faire évoluer dans le bon sens !
Vous l’avez rappelé, il y aura des échéances électorales l’année prochaine. Nous verrons alors si, avec une assemblée plus progressiste, nous pouvons faire évoluer le droit communautaire.
Mme Cécile Cukierman. Je regarderai cela avec attention, monsieur le ministre !
M. Stéphane Travert, ministre. Cela rejoint le débat que nous avions cet après-midi, au cours duquel on me disait que rien n’était prévu dans ce projet de loi sur la PAC.
Vous avez adopté une proposition de résolution européenne sur la PAC, mais celle-ci sera négociée et votée à Bruxelles, puis ratifiée par les parlements nationaux. Il s’agit de politiques européennes sur lesquelles nous devons essayer d’influer au maximum.
Pour ce qui concerne le cadre budgétaire européen, nous étions six, au départ, au sein du groupe dit « de Madrid ». La semaine dernière, nous étions vingt à réclamer un budget ambitieux pour la PAC, c’est-à-dire un budget équivalent à celui que nous avons actuellement, avec les taux de retour que nous connaissons, de plus de 9 milliards d’euros pour notre pays.
Je souscris donc pleinement à vos propos, lorsque vous proposez de nous aider à porter l’idée d’un budget ambitieux pour la PAC. Car c’est en ayant une politique agricole commune, une politique commerciale et une politique de la concurrence totalement cohérentes que nous réussirons. Nous souhaitons aller dans ce sens.
Pour le reste, dans le droit national, nous ne pouvons pas passer outre le droit communautaire, même s’il faudra modifier certaines de ses dispositions. J’y suis prêt, et nous ferons des propositions dans le cadre des prochaines échéances.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote sur l’amendement n° 310 rectifié.
M. Claude Bérit-Débat. Pour moi, les amendements nos 310 rectifié et 294 rectifié sont identiques, seule leur présentation diffère. J’ai totalement réécrit la dernière phrase de l’alinéa 7, alors que M. Bizet modifie simplement les références aux articles du règlement OCM, mais le contenu est le même…
M. le président. Certes, mais l’amendement n° 294 rectifié conserve la fin de la phrase.
Je mets aux voix l’amendement n° 310 rectifié.
M. le président. Je mets aux voix l’article 5, modifié.
(L’article 5 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 5
M. le président. L’amendement n° 382 rectifié, présenté par M. Chaize, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de commerce est ainsi modifié :
1° Après le treizième alinéa du I de l’article L. 441-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au neuvième alinéa du présent I, pour les ventes de produits ou les prestations de services relevant du secteur viticole, les parties peuvent convenir d’un délai de paiement qui ne peut dépasser le délai entre la date d’émission de la facture et la fin de l’année culturale en cours. Ce délai doit être expressément stipulé par contrat et ne doit pas constituer un abus manifeste à l’égard du créancier. » ;
2° Au début du 4° de l’article L. 443-1, les mots : « À quarante-cinq jours fin de mois ou soixante » sont remplacés par les mots : « Au délai courant jusqu’à la fin de l’année culturale en cours ».
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Le présent amendement a pour objet de préciser les conditions de paiement dans le secteur viticole.
Des accords ont été passés entre les différents producteurs, mais, en pratique, les règlements peuvent intervenir à la fin de l’année culturale, par contrat. Or l’administration semble oublier ces contrats et avoir une vision très restrictive, ce qui crée de nombreuses difficultés et des risques d’amendes.
L’amendement vise donc à préciser la notion de délai de paiement non abusif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Je ne suis pas certain que cet amendement, lorsqu’on le décortique, soit favorable aux viticulteurs.
Ce qui est proposé reviendrait à dire que, par principe, à compter de l’émission de la facture par le producteur de vin, celui-ci serait payé au plus tard à la récolte suivante, en application de la mention « jusqu’à la fin de l’année culturale en cours ». Cette dernière notion couvre l’entier cycle de production jusqu’à la récolte. Comme la facture ne peut être émise, par définition, qu’après la production de l’année, le délai de paiement courrait donc jusqu’à la récolte n+1, sans aucune contrepartie.
Les acheteurs sont sans doute favorables à cet amendement, mais seuls nous importent les producteurs, pour lesquels ce n’est pas acceptable.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les délais de paiement de droit commun sont de 45 jours fin de mois ou de 60 jours à compter de l’émission de la facture.
Sans supprimer cette dérogation, l’amendement aurait pour effet de faire passer, pour le secteur vitivinicole, les délais de droit commun de 45 jours à plus d’un an, sans contrôle possible par les autorités compétentes, comme vient de le dire M. le rapporteur.
Les dispositions prévues dans l’amendement, abusives au regard des droits du vendeur, sont contraires aux objectifs du projet de loi.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.
M. Patrick Chaize. Je ne suis pas vraiment convaincu par ces avis, car le délai se fixe par contrat, donc par un accord entre les deux parties.
Or le délai prévu dans ce contrat ne peut pas être prolongé à plus de 60 jours, car l’administration a une position très restrictive. Cela pose des problèmes de trésorerie, alors même que les deux parties sont d’accord.
M. Roland Courteau. C’est le pot de terre contre le pot de fer !
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L’amendement n° 230 rectifié est présenté par MM. Kern, Capo-Canellas, Moga et Mizzon, Mme Joissains, MM. Henno, Adnot et Détraigne, Mme Gatel, MM. Le Nay et Luche et Mme Billon.
L’amendement n° 311 rectifié bis est présenté par MM. Bérit-Débat et Cabanel, Mmes Bonnefoy, Cartron et Monier, MM. Lalande et J. Bigot, Mme Grelet-Certenais, MM. Courteau, Dagbert, Daudigny, Tissot, Duran, Vaugrenard et Lozach, Mme Conway-Mouret, MM. Manable et Durain et Mmes G. Jourda, Ghali, Meunier et Préville.
L’amendement n° 369 rectifié bis est présenté par M. D. Laurent, Mme Lassarade, MM. Louault, Rapin et Bouchet, Mmes Lamure et Troendlé, MM. Longeot et Morisset, Mme Berthet, MM. Priou, Revet, Lefèvre, B. Fournier, Savary, Cuypers et Paccaud, Mme Bruguière, M. Milon, Mme Deromedi, MM. Babary, Pierre et Mayet, Mmes Bories et Imbert, M. Houpert, Mme Chain-Larché, M. Paul, Mme Chauvin, MM. Chaize, Brisson, Kennel et Poniatowski, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. H. Leroy et Danesi, Mme N. Delattre, MM. Mouiller et Genest, Mmes Gruny et A.M. Bertrand, MM. Sido et Pellevat, Mme Goy-Chavent, M. Vogel, Mmes Bonfanti-Dossat et Di Folco, MM. Chatillon, Charon, Mandelli et Chevrollier, Mmes Lherbier et Delmont-Koropoulis et M. Guené.
L’amendement n° 416 rectifié ter est présenté par Mme Deroche, MM. Piednoir, Bascher, de Legge et Longuet, Mme Garriaud-Maylam et MM. Daubresse et Laménie.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 632-3 du code rural et de la pêche maritime est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque ces accords prévoient des délais dérogatoires en application du 4° de l’article L. 443-1 du code de commerce, ces délais ne doivent pas constituer un abus manifeste à l’égard du créancier. Pour déterminer si les délais dérogatoires prévus dans un accord interprofessionnel dont l’extension lui est demandée constituent un abus manifeste à l’égard du créancier, l’autorité administrative prend en considération tous les éléments d’appréciation pertinents, notamment :
« a) L’existence éventuelle d’un écart manifeste par rapport aux bonnes pratiques et usages commerciaux, contraire à la bonne foi et à un usage loyal ;
« b) Les spécificités du secteur et du produit concernés ;
« c) Le cas échéant, la présence de circonstances locales particulières ;
« d) Toute autre raison objective justifiant la dérogation.
« Lorsqu’une organisation interprofessionnelle reconnue sollicite l’extension d’un accord interprofessionnel ou d’une décision interprofessionnelle prévoyant des délais dérogatoires de paiement, ces délais sont présumés ne pas constituer un abus manifeste à l’égard du créancier s’ils résultent d’une décision adoptée à l’unanimité des familles professionnelles qui la composent. »
La parole est à Mme Françoise Gatel, pour présenter l’amendement n° 230 rectifié.
Mme Françoise Gatel. L’article L. 443-1 du code de commerce prévoit que les délais de paiement sont plafonnés à 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d’émission de la facture.
Cet article permet aussi de déroger à ces délais par accord interprofessionnel. Ainsi, des délais de paiement plus courts ou plus longs peuvent être négociés au sein de chaque interprofession. Le recours à ce régime dérogatoire, en viticulture notamment, est largement pratiqué pour convenir de délais de paiement plus longs.
En cas de non-respect des délais de paiement interprofessionnels, une amende est prévue pour les personnes physiques, et une amende d’un montant plus élevé pour les personnes morales.
Il est important que soit précisé dans la loi ce qu’est un délai de paiement non manifestement abusif.
L’amendement tend à prévoir que les délais de paiement interprofessionnels soient présumés non abusifs s’ils sont adoptés à l’unanimité des deux familles professionnelles, et que le caractère manifestement abusif des délais de paiement soit apprécié par l’administration au regard d’éléments pertinents, notamment les critères suivants : l’existence éventuelle d’un écart manifeste par rapport aux bonnes pratiques et usages commerciaux ; les spécificités du secteur et du produit concernés ; le cas échéant, la présence de circonstances locales particulières ; toute autre raison objective justifiant la dérogation.
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour présenter l’amendement n° 311 rectifié bis.
M. Claude Bérit-Débat. Cet amendement répond à une demande forte des professionnels de la filière viticole, que ce soit dans mon département, dans ceux de Roland Courteau et d’Henri Cabanel et, je pense, dans tous les départements français où se trouvent des vignobles.
Il y est fait référence à l’article L. 443-1 du code de commerce, lequel prévoit des dérogations aux délais de paiement contractuels. Ces dérogations peuvent être instaurées par accord interprofessionnel, et sont négociées au sein de chaque interprofession. Pour la filière viticole, le recours à ce régime dérogatoire est largement pratiqué pour convenir de délais de paiement plus longs, ce qui permet de répondre à des contraintes spécifiques de la filière.
Dans le cadre de cette procédure d’extension des délais de paiement par accord interprofessionnel, l’autorité administrative vérifie que les délais de paiement prévus ne sont pas manifestement abusifs. Or tout le problème réside dans la manière dont l’autorité administrative apprécie le délai fixé par l’accord interprofessionnel.
Dès lors, il apparaît important que soit précisé dans la loi ce qu’est un délai de paiement non manifestement abusif.
L’amendement tend donc à prévoir que les délais de paiement interprofessionnels soient présumés non abusifs s’ils sont adoptés à l’unanimité des deux familles professionnelles, et que le caractère manifestement abusif des délais de paiement soit apprécié par l’administration au regard d’éléments pertinents, notamment les critères suivants : l’existence éventuelle d’un écart manifeste par rapport aux bonnes pratiques et usages commerciaux – mauvaise foi et usage déloyal ; les spécificités du secteur et du produit concerné ; le cas échéant, la présence de circonstances locales particulières ; toute autre raison objective justifiant la dérogation.
Cet amendement devrait être adopté à l’unanimité, car tous les terroirs viticoles sont concernés, de la Bourgogne au Bordelais et de Bergerac au Vaucluse… sans oublier la Champagne, l’Alsace et les côtes du Rhône. Merci donc de le voter !
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour présenter l’amendement n° 369 rectifié bis.
M. Pierre Cuypers. Il a été défendu.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Deroche, pour présenter l’amendement n° 416 rectifié ter.
Mme Catherine Deroche. Il a été défendu.
M. le président. L’amendement n° 252 rectifié, présenté par Mme Férat, MM. Détraigne, Henno et Janssens, Mmes Goy-Chavent et Billon, M. Vanlerenberghe, Mme Gatel, MM. Delcros et Canevet, Mme Perrot et M. D. Dubois, est ainsi libellé :
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 632-3 du code rural et de la pêche maritime est complété par six alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque ces accords prévoient des délais dérogatoires en application du 4° de l’article L. 443-1 du code de commerce, ces délais ne doivent pas constituer un abus manifeste à l’égard du créancier. Pour déterminer si les délais dérogatoires prévus dans un accord interprofessionnel dont l’extension lui est demandée constituent un abus manifeste à l’égard du créancier, l’autorité administrative prend en considération tous les éléments d’appréciation pertinents, notamment :
« a) L’existence éventuelle d’un écart manifeste par rapport aux bonnes pratiques et usages commerciaux, contraire à la bonne foi et à un usage loyal ;
« b) Les spécificités du secteur et du produit concernés ;
« c) Le cas échéant, la présence de circonstances locales particulières ;
« d) Toute autre raison objective justifiant la dérogation.
« Lorsque les syndicats représentatifs de l’interprofession, réunis dans leur comité interprofessionnel reconnu, sollicitent l’extension d’un accord interprofessionnel ou d’une décision interprofessionnelle prévoyant des délais dérogatoires de paiement, ces délais sont présumés ne pas constituer un abus manifeste à l’égard du créancier s’ils résultent d’une décision adoptée à l’unanimité des familles professionnelles qui la composent. »
La parole est à Mme Françoise Férat.
Mme Françoise Férat. J’apporterai un peu de nouveauté. Nos collègues ont évoqué les organisations interprofessionnelles ; quant à moi, ayant à l’esprit le débat que nous avons eu en commission, j’ai souhaité ajouter à la liste des critères la précision suivante : « lorsque les syndicats représentatifs de l’interprofession, réunis dans leur comité interprofessionnel reconnu, sollicitent l’extension d’un accord interprofessionnel ou d’une décision interprofessionnelle prévoyant des délais dérogatoires de paiement ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Michel Raison, rapporteur. Le sujet est délicat. Il y a d’ailleurs d’autres problèmes relatifs aux délais de paiement. Ainsi, les délais ne sont pas les mêmes pour la viande et pour la charcuterie, ce qui crée des problèmes de contrôle. Lorsqu’un petit faiseur fait une facturation une fois par semaine, c’est le délai le plus court qui compte, quel que soit le jour où il livre…
La commission, qui, comme vous le savez, travaille sérieusement, considère que ces amendements ne sont pas très normatifs et auraient pour conséquence de supprimer les contrôles administratifs, dont nous avons besoin.
Pour que les contrôles administratifs soient intelligents, la loi doit l’être aussi. La commission souhaite connaître l’avis de M. le ministre, afin qu’il nous dise comment on peut résoudre ce problème, d’ores et déjà évoqué par Patrick Chaize.
L’avis de la commission est donc défavorable sur les amendements identiques nos 230 rectifié, 311 rectifié bis, 369 rectifié bis et 416 rectifié ter. Quant au rapporteur, à titre personnel, il s’en remet à la sagesse du Sénat…
Sur l’amendement n° 252 rectifié, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La question des délais de paiement peut être réglée et contractualisée via les accords interprofessionnels. Il faut laisser cette capacité d’organisation et de négociation jouer son rôle.
Les auteurs de ces amendements prennent l’exemple de la viticulture. Dans ce secteur, l’interprofession doit prouver que la dérogation aux délais de paiement est justifiée.
Ces amendements ont pour conséquence d’inverser la charge de la preuve : c’est à l’autorité administrative d’apprécier si les délais dérogatoires prévus constituent, ou non, un abus manifeste à l’égard du créancier. Ce n’est pas opportun, car le système actuel permet d’ores et déjà de déroger aux délais de paiement. Enfin, je le répète, il est possible de régler la question au travers des accords interprofessionnels.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur. Il faut traiter ce sujet dans le cadre d’une circulaire. Les autorités administratives ont en effet besoin de suivre une direction pour effectuer leurs contrôles ; elles ne l’ont pas aujourd’hui.
Nous devons absolument nous pencher sur ce dossier, qui n’est pas forcément du domaine législatif, car il y a trop de conflits relatifs aux délais de paiement.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Je veux apporter mon soutien à ces amendements, car il est de bon sens et pragmatique de payer le raisin une fois le vin vendu, et non l’inverse, à 45 ou 60 jours. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Pierre Cuypers. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Claude Bérit-Débat, pour explication de vote.
M. Claude Bérit-Débat. Je suis d’accord avec ce que vient de dire notre collègue. Le ministre a donné un avis défavorable et le rapporteur un avis de sagesse à titre personnel.
Or ces amendements viennent de toutes les travées de notre assemblée : cela montre que, sur le terrain, l’analyse est différente de la vôtre, monsieur le ministre, car elle s’appuie sur le vécu des viticulteurs, quel que soit leur terroir.
Il faut donc voter ces amendements.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. J’entends ce qui a été dit. Comme je ne suis pas obtus et parce que je veux faire avancer les choses, je suis attentif à ce qui remonte du terrain et à ce que la réglementation permet de faire.
M. le rapporteur proposait que l’on prenne une circulaire. Je propose que l’on constitue, avec les sénateurs qui le souhaiteraient, un groupe de travail sur le sujet des délais de paiement, qui ne relève pas du domaine législatif, mais concerne l’ensemble des territoires et des territoires viticoles. J’y suis prêt.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je vous remercie, monsieur le ministre, de cette avancée importante.
La commission a rétabli les déclarations de récolte, qui devaient être supprimées dès le mois de septembre prochain, et qui étaient une garantie de qualité dans un certain nombre de vignobles. On voit donc bien que l’administration a un poids important et que ses décisions peuvent modifier des pratiques agricoles, lesquelles sont dans certains vignobles particulièrement bien organisées.
En Champagne, vignoble que je connais bien, il y a depuis des lustres une interprofession qui règle les problèmes et associe les négociants, les récoltants-manipulants, les producteurs, les grandes maisons et les petits vignerons. Dans une réflexion partagée, ils prennent des dispositions qui manifestent leur entente. Et le producteur a le choix !
Il y a aussi des contingences administratives et fiscales, notamment pour ce qui concerne les vins qui vieillissent. Il existe ainsi en Champagne un délai minimum de vieillissement, avec des répercussions faisant que cette économie est spécifique : les réserves présentes dans les caves sont plus importantes, en valeur, que le chiffre d’affaires annuel des négociants ou des vendeurs de champagne.
Nous devons donc être attentifs. L’interprofession nous a d’ailleurs fait part de difficultés et de pratiques différentes selon l’administration concernée et les moments.
Il faut prendre en compte les réalités du terrain et faire une loi qui y corresponde.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. J’ai bien entendu les propos du rapporteur et du ministre, qui ont vraisemblablement raison : ce sujet relève non pas du domaine de la loi, mais plutôt de celui du décret et de l’arrêté.
Vous avez fait une proposition, monsieur le ministre ; or c’est l’inverse qu’il faut faire ! Ces amendements sont présentés par des collègues d’opinions diverses et issus de tous les terroirs. Le Sénat doit donc les adopter.
Si vous vous engagez à mettre en place, avant la fin des travaux parlementaires, une commission et à prendre une circulaire, peut-être la rédaction de ces amendements n’apparaîtra-t-elle plus dans le texte définitif de la loi…
Mais vous devez comprendre, monsieur le ministre, que cette volonté est partagée, aussi, par ceux qui sont prêts à vous soutenir, car elle vient de tous les terroirs, de tous les territoires et de tous les bords politiques.
Nous voterons ces amendements. Si vous faites diligence quant à vos annonces, encore une fois, il se peut qu’ils ne subsistent pas au final.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Didier Guillaume a exprimé ce que je voulais dire.
Monsieur le ministre, nous vous avons prouvé que nous étions unanimement pour ces amendements. Si vous faites un effort – nous vous remercions pour cette ouverture –, nous envisagerons de revenir sur ces dispositions en commission mixte paritaire.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je reprends le propos d’Henri Cabanel. Nous avons le temps, compte tenu de notre unanimité. Je regrette malgré tout le sort réservé à l’amendement de notre collègue Patrick Chaize, qui était quasi identique.
Le rapporteur a donné, à titre personnel, un avis de sagesse. Je vois qu’il y a une évolution par rapport au travail en commission, et je suis un peu perturbé.
Profitons du laps de temps qui nous reste, à la suite des propos de M. le ministre, pour affiner le compromis qu’il sera possible de trouver en commission mixte paritaire.
Cela devient compliqué… Il y a unanimité de l’ensemble des groupes, profitons-en !
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. J’ai entendu les arguments de M. le ministre, de M. le rapporteur, et ceux échangés lors du travail en commission, qu’a rappelés Daniel Gremillet. Je comprends la préoccupation, sympathique, de mes collègues, qui est partagée dans tous les terroirs et tous les vignobles.
Mais, en tant que présidente de la commission, je me dois de vous dire que ce sujet relève du domaine réglementaire et qu’il suffit pour le résoudre de prendre une circulaire. Or nous sommes ici pour écrire la loi.
J’ai entendu, aussi, que la position pourrait évoluer en commission mixte paritaire si M. le ministre faisait sa part du job… Nous ne sommes pas là pour faire la loi avec du réglementaire,…