Sommaire
Présidence de M. David Assouline
Secrétaires :
M. Éric Bocquet, Mme Catherine Deroche.
2. Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques
Mme Cécile Cukierman ; M. Joël Labbé ; M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation ; M. le président.
Article 11 septies A (supprimé)
Amendement n° 341 rectifié ter de Mme Angèle Préville. – Rejet.
Amendement n° 101 rectifié sexies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 538 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 332 rectifié bis de M. Didier Mandelli. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 11 septies A
Amendement n° 449 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet par scrutin public n° 176.
Amendement n° 331 rectifié ter de M. Didier Mandelli. – Retrait.
Amendement n° 391 rectifié quater de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 448 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 330 rectifié ter de M. Didier Mandelli. – Non soutenu.
Amendement n° 37 rectifié sexies de M. Vincent Delahaye. – Retrait.
Amendement n° 394 rectifié ter de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 178 rectifié ter de M. Jean-Pierre Decool. – Non soutenu.
Amendement n° 129 rectifié sexies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 651 rectifié bis de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Amendement n° 519 rectifié ter de M. Franck Montaugé. – Rejet.
Article 11 septies B – Adoption.
Amendement n° 624 rectifié bis de Mme Noëlle Rauscent. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 11 septies
Amendement n° 185 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 434 rectifié bis de M. Bernard Delcros. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 11 octies
Amendement n° 322 rectifié de M. François Bonhomme. – Rejet.
Amendement n° 487 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 655 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Article 11 nonies A (supprimé)
Amendement n° 540 rectifié bis de M. Roland Courteau. – Rejet par scrutin public n° 178.
L’article demeure supprimé.
Article additionnel après l’article 11 nonies A
Amendement n° 574 rectifié bis de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Article 11 nonies B et 11 nonies C – Adoption.
Adoption de l’article.
Amendement n° 741 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles 11 nonies F (nouveau) et 11 nonies – Adoption.
Amendement n° 289 rectifié de M. Jean Bizet. – Retrait.
Amendement n° 765 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 11 decies
Amendement n° 33 rectifié septies de M. Michel Canevet. – Retrait.
Amendement n° 34 rectifié septies de M. Michel Canevet. – Retrait.
Amendement n° 334 rectifié sexies de M. Jean-Claude Luche. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
3. Modification de l’ordre du jour
4. Mise au point au sujet d’un vote
5. Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire. – Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
Articles additionnels après l’article 11 decies (suite)
Amendement n° 265 rectifié ter de M. Philippe Adnot. – Non soutenu.
Amendement n° 566 rectifié ter de Mme Nicole Bonnefoy. – Retrait.
Amendement n° 177 rectifié bis de M. Alain Houpert. – Non soutenu.
Amendement n° 161 rectifié bis de M. Daniel Chasseing. – Retrait.
Amendement n° 379 rectifié de M. Laurent Duplomb. – Retrait.
Amendement n° 94 rectifié septies de M. Michel Canevet. – Retrait.
Amendement n° 246 rectifié bis de M. Bernard Delcros. – Adoption.
Amendement n° 738 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° 454 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 453 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Adoption.
Amendement n° 342 rectifié bis de Mme Angèle Préville. – Rejet.
Amendement n° 219 rectifié bis de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 11 undecies
Amendement n° 607 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Article 11 duodecies A – Adoption.
Article additionnel après l’article 11 duodecies A
Amendement n° 592 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Article 11 duodecies (supprimé)
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 645 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Adoption de l’amendement supprimant l’article.
Amendement n° 542 rectifié de M. Henri Cabanel. – Devenu sans objet.
Amendement n° 737 du Gouvernement. – Devenu sans objet.
Amendement n° 376 rectifié ter de M. Olivier Jacquin. – Devenu sans objet.
Articles additionnels après l’article 11 terdecies A
Amendement n° 167 rectifié quinquies de Mme Denise Saint-Pé. – Rejet.
Amendement n° 222 rectifié bis de M. Max Brisson. – Retrait.
Amendement n° 117 rectifié septies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 118 rectifié quinquies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Article 11 quaterdecies (supprimé)
L’article demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 11 quaterdecies
Amendement n° 543 rectifié bis de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 121 rectifié nonies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 122 rectifié septies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 470 rectifié bis de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 187 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques
M. Fabien Gay ; M. le président.
Amendement n° 189 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 732 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 188 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 273 rectifié bis de Mme Valérie Létard. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 11 quindecies
Amendement n° 111 rectifié sexies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 544 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 730 du Gouvernement. – Adoption de l’amendement insérant un article additionnel.
Amendement n° 210 de Mme Cécile Cukierman. – Devenu sans objet.
Amendement n° 104 rectifié quinquies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 103 rectifié sexies de M. Jean-Pierre Decool. – Retrait.
Amendement n° 429 de M. Bruno Sido. – Retrait.
Amendement n° 431 de M. Bruno Sido. – Retrait.
Amendement n° 430 de M. Bruno Sido. – Retrait.
Adoption de l’article.
Amendement n° 734 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Amendement n° 329 rectifié de M. Bernard Delcros. – Retrait.
Amendement n° 354 rectifié bis de M. Gérard Poadja. – Non soutenu.
Amendement n° 323 rectifié de M. François Bonhomme. – Rejet.
Amendement n° 547 rectifié ter de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 670 rectifié bis de Mme Véronique Guillotin. – Rejet.
Amendement n° 107 rectifié quinquies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 11 septdecies
Amendement n° 658 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Amendement n° 548 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 593 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Amendement n° 499 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 545 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Amendement n° 324 rectifié de M. François Bonhomme. – Rejet.
Amendement n° 546 rectifié de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Article 11 octodecies (supprimé)
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 740 du Gouvernement. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Adoption de l’article.
Article 11 unvicies B – Adoption.
Article additionnel après l’article 11 unvicies B
Amendement n° 594 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Retrait.
Articles 11 unvicies et 11 duovicies – Adoption.
Articles additionnels après l’article 11 duovicies
Amendement n° 452 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 374 rectifié ter de M. Olivier Jacquin. – Rejet.
Amendement n° 596 rectifié de M. Bernard Jomier. – Retrait.
Amendement n° 656 rectifié de M. Jean-Claude Tissot. – Retrait.
Amendement n° 595 rectifié bis de M. Jean-Claude Tissot. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
Amendement n° 630 rectifié de M. Dominique Théophile. – Retrait.
Amendement n° 690 rectifié bis de Mme Véronique Guillotin. – Retrait.
Amendement n° 743 du Gouvernement. – Adoption.
Adoption de l’article.
Amendement n° 742 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° 597 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 87 de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. – Adoption.
Amendement n° 231 rectifié de M. Claude Kern. – Non soutenu.
Amendement n° 631 rectifié ter de Mme Noëlle Rauscent. – Retrait.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 12 bis A
Amendement n° 356 rectifié de M. René Danesi. – Non soutenu.
Articles 12 bis et 12 ter – Adoption.
Amendement n° 614 rectifié ter de M. Bernard Jomier. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 12 quinquies – Adoption.
Amendement n° 380 rectifié bis de M. Laurent Duplomb. – Retrait.
Amendement n° 377 rectifié de M. Laurent Duplomb. – Retrait.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 13
Amendement n° 208 rectifié bis de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 113 rectifié sexies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 410 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 411 rectifié ter de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 599 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 409 rectifié ter de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 408 rectifié ter de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 598 rectifié de Mme Laurence Rossignol. – Rejet.
Amendement n° 398 rectifié quater de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 214 rectifié de Mme Esther Benbassa. – Rejet.
Amendement n° 314 rectifié bis de M. Jean-François Longeot. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 13 bis A
Amendement n° 399 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 112 rectifié septies de M. Jean-Pierre Decool. – Rejet.
Amendement n° 426 rectifié septies de Mme Céline Boulay-Espéronnier. – Rejet.
Amendement n° 204 rectifié de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 745 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 13 bis
Amendement n° 401 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 403 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 13 ter
Amendements identiques nos 234 de M. Roland Courteau et 404 rectifié bis de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenus.
Amendement n° 641 rectifié de Mme Céline Boulay-Espéronnier. – Retrait.
Amendement n° 549 rectifié bis de M. Henri Cabanel. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles additionnels après l’article 13 quater A
Amendement n° 402 rectifié quater de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 405 rectifié ter de Mme Laurence Rossignol. – Non soutenu.
Amendement n° 603 rectifié de M. Jean-Yves Roux. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 13 quinquies
Amendement n° 472 rectifié de M. Joël Labbé. – Rejet.
Amendement n° 501 rectifié de M. Joël Labbé. – Retrait.
Renvoi de la suite de la discussion.
6. Clôture de la session ordinaire de 2017-2018
compte rendu intégral
Présidence de M. David Assouline
vice-président
Secrétaires :
M. Éric Bocquet,
Mme Catherine Deroche.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (projet n° 525, texte de la commission n° 571, rapport n° 570, tomes I et II, avis n° 563).
Organisation des travaux
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait qu’il nous reste, ce matin, 368 amendements à examiner.
Nous avons prévu de siéger toute la journée. Nous ferons le point avec M. le président et M. le ministre en fin d’après-midi.
Je regrette une nouvelle fois le caractère extrêmement contraint du calendrier d’examen de textes importants, qui appellent des discussions qui sont tout aussi importantes.
Si je puis me permettre cette précision technique, il faudrait qu’il ne nous reste pas plus de 100 ou 120 amendements à examiner à la fin de la journée, car, lundi, la séance ne pourra être ouverte avant quatorze heures trente et nous ne pourrons pas siéger au-delà de zéro heure, pour des raisons tenant au temps de transport jusqu’au Sénat.
Cependant, j’en appelle évidemment à la qualité de nos débats : nous devons avoir le temps de débattre des sujets abordés dans les amendements.
Je le répète, monsieur le ministre, au vu des conditions d’examen qui nous sont imposées, nous nous demandons si vous avez vraiment envie que nous discutions des sujets importants.
Mes chers collègues, j’attire votre attention sur la sobriété et l’efficacité de nos débats.
Rappels au règlement
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, mon intervention se fonde sur l’article 36 de notre règlement.
Je veux en fait abonder dans le sens de Mme la présidente de la commission.
Monsieur le ministre, l’engorgement législatif a conduit le Gouvernement à réduire le nombre de jours ouverts pour l’examen d’un certain nombre de projets de loi, tous plus importants les uns que les autres. C’est un vrai problème.
Les adeptes des théories du complot pourraient presque penser que, si vous aviez voulu que nous ne discutions pas, vous ne vous y seriez pas pris autrement… Il est tout de même inacceptable que, dans un pays démocratique comme le nôtre, des sujets aussi importants que ceux qui restent en débat dans le cadre de ce projet de loi ne puissent être traités que tard ce soir, voire dans la nuit !
Je vous invite donc de façon vraiment très solennelle à réfléchir à l’organisation de nos travaux. Nous sommes les représentants du peuple, à l’Assemblée nationale, et des collectivités, au Sénat. Nous ne sommes pas des parlementaires hors sol ! Le problème n’est pas que nous soyons fatigués ou non. Le problème est que, ce week-end, nous avons tous pris des engagements dans nos départements respectifs. Il est nécessaire que nous soyons présents sur le terrain pour exercer notre mandat au plus près des populations, dans nos territoires.
Dès lors, monsieur le ministre, quelle solution êtes-vous en capacité de nous proposer ici pour que nous puissions continuer à avoir des débats de qualité, auxquels puissent participer l’ensemble des groupes et dans un climat aussi serein qu’au début de l’examen du texte ?
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, ma chère collègue.
La parole est à M. Joël Labbé, pour un rappel au règlement.
Je vous rappelle, mes chers collègues, qu’il n’y a pas de débat sur le débat… Les auteurs d’un rappel au règlement doivent se référer à un article de notre règlement.
M. Joël Labbé. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux en fait simplement poser une question.
J’ai bien entendu qu’un ultimatum avait été fixé à lundi, minuit.
Toutefois, si nous n’avions pas achevé l’examen des amendements à ce moment, ce qui est possible, que se passera-t-il ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, sachez tout d’abord que je suis très heureux de vous retrouver ce matin.
M. Antoine Lefèvre. Le bonheur est partagé !
M. Stéphane Travert, ministre. Jamais je ne refuse le débat, on ne saurait me prendre en défaut sur ce point. Pourquoi ? D’abord parce que, en ma qualité d’ancien parlementaire, j’attache énormément d’importance au débat parlementaire et à la qualité des échanges. Vous avez d’ailleurs pu constater que l’on me reproche plutôt la longueur de certaines de mes interventions… C’est que j’ai le souci, lorsque je suis interpellé, de répondre le plus précisément possible aux questions que les parlementaires peuvent se poser.
M. Antoine Lefèvre. C’est vrai !
M. Stéphane Travert, ministre. Permettez-moi de citer quelques chiffres : l’Assemblée nationale, où 2 700 amendements ont été déposés, a débattu de ce texte en séance publique durant 77 heures, c’est-à-dire huit jours. Au Sénat, ce sont un peu plus de 700 amendements qui ont été déposés. Eh bien, nous prendrons le temps qu’il faudra pour les examiner ! Ma position est qu’il ne saurait y avoir de discrimination entre les deux assemblées.
M. Didier Guillaume. Parfait !
M. Stéphane Travert, ministre. Mme la présidente de la commission des affaires économiques et Mme Cukierman ont rappelé que des textes majeurs se sont succédé au Parlement avant la session extraordinaire. Je l’entends. J’ai pris note de vos remarques et de vos demandes, que j’ai transmises au secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, M. Christophe Castaner.
En tout état de cause, nous avons toute la journée pour continuer nos échanges, et il m’importe que nous débattions des sujets très intéressants et très importants pour le devenir de notre agriculture et de notre alimentation. Je souhaite que cette discussion puisse se faire dans le respect de chacun et dans les meilleures conditions pour toutes et pour tous.
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, premièrement, le fait que tous les textes aient été soumis en première lecture à l’Assemblée nationale occasionnera un embouteillage anormal au Sénat au mois de juillet prochain. Le Gouvernement, qui a la maîtrise de l’ordre du jour de la session extraordinaire, n’a pas ménagé les conditions pour que les textes soient examinés avec fluidité et pour que la situation que nous connaissons en cet instant ne se reproduise pas.
Deuxièmement, si nous menons les débats au même rythme qu’hier, je peux vous assurer, mes chers collègues, que l’examen des amendements sera achevé lundi soir avant minuit. Ce rythme relève de la responsabilité de chacun, mais il faut aussi que les uns et les autres puissent défendre, dans cet hémicycle, ce qu’ils ont à défendre.
Que se passera-t-il si nous n’avons pas terminé lundi à minuit, monsieur Labbé ? Nous demanderons au Gouvernement, qui a la maîtrise de l’ordre du jour des sessions extraordinaires, ce qu’il a à nous proposer, mais, je le répète, il ne semble pas que nous nous orientions vers cette hypothèse.
Je vous propose maintenant que nous poursuivions l’examen du projet de loi. Ne laissons pas trop traîner le débat sur le débat… Je connais ! (Sourires.)
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du chapitre Ier du titre II, aux amendements tendant à rétablir l’article 11 septies A.
TITRE II (suite)
MESURES EN FAVEUR D’UNE ALIMENTATION SAINE, DE QUALITÉ, DURABLE, ACCESSIBLE À TOUS ET RESPECTUEUSE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL
Chapitre Ier (suite)
Accès à une alimentation saine
Article 11 septies A
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 341 rectifié ter, présenté par Mmes Préville et Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Lienemann, M. J. Bigot, Mme Grelet-Certenais, M. Kerrouche, Mmes G. Jourda et Meunier, MM. Duran et Madrelle, Mmes Lepage, Conway-Mouret, Guillemot et Jasmin, MM. Tourenne, Marie, Jomier et Antiste, Mme Ghali, MM. Courteau et Roger et Mme Espagnac, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-… – À partir du 1er janvier 2023, les informations suivantes doivent être indiquées sur certaines catégories de denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français :
« 1° “Nourri aux OGM”, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale issues d’animaux nourris avec des organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Le mode d’élevage, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 3° L’origine géographique, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 4° Le nombre de traitements par des produits phytosanitaires sur les fruits et légumes frais ainsi que la nature de ces traitements ;
« 5° L’emploi de pesticides classés cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction ;
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à réintroduire l’article 11 septies A, relatif à l’affichage environnemental des denrées alimentaires, complété par un nouvel alinéa, tendant à informer le consommateur en cas d’emploi de pesticides classés cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction.
Ces substances chimiques sont suspectées d’avoir un impact sur le dérèglement du système hormonal et de favoriser différentes maladies, comme l’obésité, le diabète de type 2, les troubles neurocomportementaux ou encore les cancers hormonodépendants.
L’article 11 septies A, dans sa version initiale, a été supprimé en commission. Il est pourtant nécessaire d’informer le consommateur et de lui donner accès à l’ensemble des informations.
Ainsi, le consommateur doit pouvoir savoir si, oui ou non, les denrées animales ou d’origine animale ont été nourries avec des organismes génétiquement modifiés et connaître le mode d’élevage, l’origine géographique, le nombre des traitements opérés sur les fruits et légumes ainsi que leur nature.
L’impact des organismes génétiquement modifiés et des pesticides est double, puisque ces produits attentent à la fois à l’environnement et à la santé publique.
Il est donc nécessaire de pouvoir assurer une véritable traçabilité des produits.
Le gouvernement précédent a mis en place, au travers de la Sapin II, une expérimentation sur l’étiquetage des produits laitiers et de la viande. Si le bilan est positif, la mesure pourrait être étendue à l’ensemble des États membres.
Poursuivons la même logique, et n’opposons pas nous-mêmes l’argument de la concurrence déloyale et des difficultés vis-à-vis du droit communautaire !
Enfin, monsieur le ministre, je rappelle un argument avancé dans vos propres rangs lors du débat à l’Assemblée nationale : le règlement 1169/2011 du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires permet aux États membres de l’Union européenne d’imposer des mentions complémentaires, si celles-ci se justifient notamment par des raisons de santé publique ou de répression des tromperies.
N’attendons pas un prochain scandale sanitaire !
M. le président. L’amendement n° 101 rectifié sexies, présenté par MM. Decool, Bignon, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Moga et Delcros, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« CHAPITRE …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-… - À partir du 1er janvier 2023, les informations suivantes doivent être indiquées sur certaines catégories de denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français :
« 1° “Nourri aux OGM”, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale issues d’animaux nourris avec des organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Le mode d’élevage, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 3° L’origine géographique, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 4° Le nombre de traitements par des produits phytosanitaires et leur nature sur les fruits et légumes frais.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’agriculture et de l’alimentation, de la transition écologique et solidaire, de l’économie et des finances, et des solidarités et de la santé précise les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-Pierre Decool.
M. Jean-Pierre Decool. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 86, 102 rectifié sexies, 255 rectifié bis et 447 rectifié sont identiques.
L’amendement n° 86 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 102 rectifié sexies est présenté par MM. Decool, Bignon, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Moga et Delcros.
L’amendement n° 255 rectifié bis est présenté par Mmes Lienemann et Meunier, MM. Iacovelli, Duran et Assouline, Mme Monier et M. Tourenne.
L’amendement n° 447 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mmes Costes et N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guillaume, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Léonhardt et Vall.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« CHAPITRE …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-… – À partir du 1er janvier 2023, les informations suivantes doivent être indiquées sur certaines catégories de denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français :
« 1° “Nourri aux OGM”, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale issues d’animaux nourris avec des organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Le mode d’élevage, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 3° L’origine géographique, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 4° Le nombre de traitements par des produits phytosanitaires sur les fruits et légumes frais.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 86.
M. Guillaume Gontard. Par cet amendement, nous proposons de rétablir l’article 11 septies A, instauré à l’Assemblée nationale, dont l’excellent dispositif permet l’indispensable transparence exigée par nos concitoyens lors des États généraux de l’alimentation, dont les conclusions ont été trop oubliées dans ce projet de loi.
Une pétition, cosignée par plus de 30 000 de nos concitoyens, vient également soutenir cette disposition.
Ainsi, l’étiquetage des denrées alimentaires est complété par un affichage environnemental comprenant d’une part, pour toutes les denrées animales ou d’origine animale, le mode d’élevage, l’origine géographique ainsi que, le cas échéant, une mention « nourri aux OGM » et, d’autre part, pour les fruits et légumes frais, le nombre de traitements phytosanitaires. C’est une mesure de santé publique que nous devons à nos concitoyens.
Par ailleurs, je rappelle que notre groupe, qui s’appelait anciennement « CRC », porte cette volonté d’étiquetage des denrées alimentaires depuis des années, notamment en ce qui concerne l’utilisation d’OGM. Il avait d’ailleurs déposé un amendement en ce sens lors de l’examen de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, mais cet amendement avait été refusé par le Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Decool, pour présenter l’amendement n° 102 rectifié sexies.
M. Jean-Pierre Decool. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 255 rectifié bis n’est pas soutenu, votre serviteur étant le seul cosignataire présent.
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 447 rectifié.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à rétablir l’article 11 septies A, supprimé par la commission des affaires économiques.
Si le texte de l’Assemblée nationale était, selon nous, très timide et insuffisamment ambitieux, nous regrettons que la commission des affaires économiques du Sénat l’ait purement et simplement supprimé.
Pourtant, l’article prévoyait des dispositions très utiles à la fois pour les consommateurs et pour les producteurs.
Il est essentiel d’assurer l’information et la liberté de choix du consommateur, en garantissant un étiquetage clair.
Les informations sur l’utilisation de produits phytosanitaires, sur le mode d’élevage et l’utilisation de produits OGM dans l’alimentation animale ou sur l’origine géographique ne sont que rarement disponibles.
Cet étiquetage correspond pourtant à une demande croissante des consommateurs : toutes les études montrent que les Françaises et les Français se posent des questions sur leur alimentation.
De même, de plus en plus d’agriculteurs adoptent des pratiques vertueuses, par exemple en ce qui concerne les bovins ou les vaches laitières élevées dans les systèmes herbagers : ils doivent pouvoir valoriser leur travail et la qualité de leurs produits par rapport à des systèmes fondés uniquement sur le maïs et le soja.
Il faut valoriser, par un affichage clair, les pratiques vertueuses des producteurs.
Cet amendement peut être compatible avec la réglementation européenne. Certes, le droit communautaire ne prévoit pas que les éléments cités à cet article fassent partie des informations communiquées aux consommateurs. En revanche, il prévoit qu’un État membre peut adopter des dispositions nationales, notamment pour la protection des consommateurs, protection que le règlement définit de manière très souple.
Par conséquent, nous disposons de marges de manœuvre nationales pour défendre un affichage environnemental au niveau national : la France peut et doit avoir un rôle moteur sur l’étiquetage, afin de faire évoluer l’ensemble de l’Union européenne vers une plus grande transparence pour les consommateurs et une meilleure valorisation des modes de production.
L’amendement présenté par Mme Préville vise à introduire un alinéa supplémentaire concernant les cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, ou CMR.
Ces produits ne devraient même pas être utilisés. Puisqu’ils le sont, qu’on l’affiche, pour que les consommateurs soient au courant et prennent leurs précautions !
M. le président. L’amendement n° 538 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Kanner, Mme Grelet-Certenais, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« CHAPITRE …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-… - À partir du 1er janvier 2023, les informations suivantes doivent être indiquées sur certaines catégories de denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français :
« 1° “Nourri aux OGM”, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale issues d’animaux nourris avec des organismes génétiquement modifiés ;
« 2° Le mode d’élevage, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« 3° L’origine géographique, pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale ;
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. À l’instar de celui de nos collègues, cet amendement vise à rétablir – en partie seulement – l’article 11 septies A, supprimé en commission, qui prévoyait, à partir du 1er janvier 2023, certaines mentions obligatoires sur les denrées alimentaires mises sur le marché français.
Toutefois, nous ne reprenons pas la mention relative au nombre de traitements par produits phytosanitaires sur les fruits et légumes, car, d’une part, nous nous interrogeons sur la faisabilité et la fiabilité d’un tel dispositif et, d’autre part, nous n’estimons pas souhaitable de cibler uniquement cette catégorie de produits.
En outre, nous savons que la puissance des produits est au moins aussi importante aujourd’hui que le nombre de pulvérisations. Si étiquetage il devait y avoir sur les traitements phytosanitaires, il faudrait bien réfléchir aux modalités des mises en œuvre, pour s’assurer que le consommateur dispose d’une information fiable et transparente.
En tout état de cause, nous proposons la réintégration de l’affichage relatif aux OGM, au mode d’élevage ou encore à l’origine géographique des produits.
M. le président. L’amendement n° 332 rectifié bis, présenté par MM. Mandelli et Mayet, Mme Deroche, M. Babary, Mme Bories, MM. Bonne, Morisset, Lefèvre et Vogel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Paccaud, Danesi, Revet, Chaize, Bazin et Pellevat, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Vaspart et Paul, Mmes Imbert et Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mme Deromedi et MM. Huré, Sido et Laménie, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre … ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-… - À partir du 1er janvier 2023, l’origine géographique pour les denrées alimentaires animales ou d’origine animale est indiquée sur les denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français. »
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur de la commission des affaires économiques. Les amendements identiques nos 86, 102 rectifié sexies et 447 rectifié visent à rétablir la rédaction de l’Assemblée nationale.
Les amendements nos 341 rectifié ter et 101 rectifié sexies vont encore plus loin, puisqu’ils tendent à ajouter l’emploi de pesticides, à avancer l’application à 2021 ou encore à ajouter la nature des traitements phytosanitaires sur les fruits et légumes.
L’amendement n° 538 rectifié reprend la rédaction de l’Assemblée nationale, à l’exception du nombre de traitements phytosanitaires, et l’amendement n° 332 rectifié bis ne vise que l’origine géographique pour les denrées d’origine animale.
Ces amendements sont contraires à la position de la commission, qui a adopté six amendements identiques de suppression, satisfaisant par ailleurs trois amendements de suppression partielle.
Je rappelle brièvement que les règles d’étiquetage des denrées alimentaires sont fixées au niveau européen. Par conséquent, imposer des règles particulières en France soit pénaliserait nos agriculteurs, soit serait contraire à la libre circulation des biens si tous les produits commercialisés sur le territoire national étaient visés.
Une telle obligation serait contre-productive, car elle viendrait fragiliser les expérimentations en cours ou à venir obtenues de haute lutte à Bruxelles, dont M. le ministre va, je pense, nous parler.
En outre, certains signes d’identification de la qualité et de l’origine renseignent déjà sur le mode d’élevage.
Enfin, le contrôle de cette obligation est impraticable, en particulier s’agissant du nombre de traitements phytosanitaires, qui, du reste, n’est pas un indicateur pertinent et desservirait notamment les produits bio.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est lui aussi défavorable à l’ensemble des amendements.
En effet, comme Mme la rapporteur vient de le rappeler, l’étiquetage est géré au niveau européen.
Prenons un exemple concret : nous serions certainement heureux, demain, que le nombre de traitements subis par les fruits et les légumes français figurent sur leur étiquette, mais, pendant ce temps, les fruits et légumes espagnols ne proposeraient pas un tel affichage ! Nous nous retrouverions donc dans un cas de concurrence déloyale entre les deux pays.
Or, nous le savons, gérer les relations entre les producteurs de fruits français et espagnols est déjà parfois difficile, notamment en ce moment. Par ailleurs, le comité mixte franco-espagnol sur les fruits et légumes travaille lui aussi sur le sujet.
L’amélioration de l’information des consommateurs est bien évidemment une préoccupation essentielle pour le Gouvernement. Je suis favorable à une grande transparence en matière d’étiquetage, mais les propositions qui sont faites ici sont extrêmement générales.
Nous avons mandaté le Conseil national de l’alimentation pour travailler sur ces questions et nous faire des propositions, mais je considère aussi que, si la France peut certainement faire beaucoup de choses, elle ne peut agir seule dans ce domaine.
Les réponses doivent être européennes. À cet égard, j’ai pris l’engagement de défendre, au niveau européen, une cohérence en matière d’étiquetage.
Comme je l’ai dit hier, je demanderai que l’expérimentation sur l’étiquetage d’origine des produits laitiers et carnés soit prolongée et étendue à d’autres modes de production.
Laissons le Conseil national de l’alimentation travailler et formuler des propositions. Nous aurons certainement l’occasion d’en débattre. Ces questions relèvent du droit communautaire et il faut le respecter.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote sur l’amendement n° 341 rectifié ter.
M. Daniel Gremillet. Je me réjouis de la position de notre rapporteur et du ministre.
Dans cet hémicycle, voilà un an, nous avons obtenu de Bruxelles que la France puisse expérimenter l’étiquetage de la composition des aliments sous forme décroissante. Nous devons encore nous battre pour inscrire cette expérimentation dans le temps. Or la France est plutôt isolée en Europe sur ces questions.
Au cours de nos discussions, nous avons beaucoup parlé de redonner du pouvoir aux interprofessions et aux organisations de producteurs. Or nous sommes en train de faire leur travail. Prenons un exemple très concret : l’interprofession laitière est en train de définir, en ce moment même, les règles d’étiquetage sur le non-OGM. Il n’y a donc pas besoin de légiférer, comme l’a souligné notre rapporteur, pour que la profession s’organise et définisse clairement la règle du non-OGM.
Beaucoup parlent de la montée en gamme : laissons les groupes d’agriculteurs, les coopératives, les entreprises agroalimentaires s’organiser en fonction des types de productions pour définir des règles très spécifiques de production ou de transformation qui apporteront encore plus de richesse et de valeur au produit.
Je suivrai l’avis de notre rapporteur. Il me semble essentiel de ne pas mettre l’économie agricole française en fragilité, ce que risque d’entraîner l’adoption de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. S’il est fait de manière objective, l’étiquetage des produits peut être très positif.
Mais imposer, par exemple, d’inscrire le nombre de traitements peut n’avoir aucun sens : on peut faire dix traitements sur une culture et mettre moins de produit qu’en une seule fois !
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
M. Pierre Cuypers. Nous sommes d’accord !
M. Laurent Duplomb. Or l’agriculture se tourne justement vers le bas dosage : il s’agit d’identifier le point de départ de la maladie et de la traiter au plus près. Ce n’est pas parce que vous verrez plus souvent l’agriculteur passer le pulvérisateur qu’il mettra plus de produit qu’en passant une seule fois. Il faut tenir compte de la technicité de l’agriculture.
Sur ces questions, l’agriculture évolue beaucoup. Nous aurons à débattre d’un article sur les drones. Vouloir limiter leur utilisation à des pentes de 30 % et à des problématiques d’agriculture biologique, c’est une hérésie !
Si on constate un départ de rouille ou d’une autre maladie sur trois mètres carrés au milieu d’un champ, ne vaut-il pas mieux, avec un drone et très peu de produit, stopper cette maladie et donc éviter qu’elle ne se propage, plutôt que d’utiliser trois fois plus de produit sur tout le champ en adoptant une méthode totalement préventive ?
Faisons preuve d’un peu de bon sens et de pragmatisme. Essayons d’être un peu plus objectifs et sortons de ces discussions dans lesquelles soit tout est bon soit tout est mauvais.
M. Ladislas Poniatowski. Et notre collègue sait de quoi il parle !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 341 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 101 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 86, 102 rectifié sexies et 447 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 332 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 332 rectifié bis est retiré.
L’article 11 septies A demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 11 septies A
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 215 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 451 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano, Castelli, Corbisez, Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Informations à caractère environnemental relatives aux denrées alimentaires
« Art. L. 114- … – À partir du 1er janvier 2023, certaines catégories de denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français, notamment les fruits et légumes, font l’objet d’une information à caractère environnemental à destination du consommateur portant sur la nature des traitements appliqués.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application du présent article. »
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour présenter l’amendement n° 215 rectifié.
Mme Cécile Cukierman. À travers cet amendement, nous nous faisons les porte-voix des consommateurs, que nous sommes toutes et tous.
Les Français sont de plus en plus conscients des conséquences de leur alimentation sur leur santé et sur leur environnement. Selon une étude, quelque 40 % de nos concitoyens ne seraient pas satisfaits de l’information donnée sur les étiquettes.
Par cet amendement, nous souhaitons que certaines catégories de denrées alimentaires présentes sur le marché français, notamment les fruits et les légumes, fassent l’objet, au 1er janvier 2023, d’une information à caractère environnemental à destination du consommateur portant sur la nature des traitements appliqués.
Comme nous l’avons déjà souligné, il est temps de prendre en compte la forte demande sociétale exprimée lors des États généraux de l’alimentation et, plus largement, dans les différentes discussions que nous pouvons avoir avec les uns et les autres, ce qui passe par une meilleure information des consommateurs quant à la qualité de leur alimentation.
Enjeu public de premier ordre, la transparence sur la production des denrées alimentaires nous apparaît comme indispensable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 451 rectifié.
M. Joël Labbé. Il s’agit bien évidemment d’un amendement de repli. Je n’ai pas réussi à prendre la parole voilà quelques instants, je vais le faire maintenant, très rapidement.
Monsieur le ministre, madame la rapporteur, vous nous dites que nous ne pouvons légiférer sur ces sujets qui relèvent de la réglementation européenne. Il n’y a pas si longtemps, dans le cadre de la loi Biodiversité, nous avons pourtant réussi – certes, de haute lutte – à interdire les pesticides néonicotinoïdes à partir de septembre 2018.
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Joël Labbé. Personne ne nous l’a reproché ; mieux, l’Europe s’est ensuite alignée sur notre position pour interdire à son tour ces pesticides. (M. Roland Courteau opine.) Cet argument ne tient donc pas.
Cet amendement de repli vise à informer le consommateur au moins sur les traitements des fruits et légumes. Je suis d’accord avec Laurent Duplomb :…
M. Laurent Duplomb. Merci Joël !
M. Daniel Gremillet. Extraordinaire !
M. Didier Guillaume. Cela ne va pas durer !
M. Joël Labbé. … inscrire le nombre de traitements n’apporte pas plus de lisibilité, c’est sur la qualité de ces traitements ou la non-qualité desdits traitements qu’il faudrait renseigner le consommateur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements identiques ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces deux amendements s’inscrivent dans la lignée de ceux qui ont été déposés à l’article 11 septies A, supprimé par votre commission.
Pour les raisons déjà exposées voilà quelques instants, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Pour les mêmes raisons que celles qui ont été avancées il y a quelques instants : défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 215 rectifié et 451 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 449 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Guillaume, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Informations sur les conditions de production des produits
« Art. L. 115-… – À partir du 1er janvier 2020 l’étiquetage des denrées alimentaires issues d’animaux nourris avec des organismes génétiquement modifiés mises sur le marché sur le territoire français est obligatoire.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Il s’agit encore d’un amendement de repli, spécifiquement sur les OGM.
On nous demande de faire confiance aux interprofessions ; moi, je n’ai pas confiance. À un moment donné, quand il y va de la préservation de la santé humaine, de la biodiversité et de l’ensemble de l’environnement, c’est à la puissance publique d’interdire ce qui doit l’être.
En l’espèce, il ne s’agit pas d’interdire, mais d’informer : les citoyens consommateurs sont en droit de connaître la présence d’OGM dans leurs denrées alimentaires.
Le soja importé d’Amérique du Sud est à 80 % transgénique pour faciliter l’épandage par avion du Roundup qui se fait au détriment non seulement des agriculteurs sud-américains et de la santé des populations locales, mais aussi de la forêt primaire.
Il faudrait organiser au Sénat une séance publique consacrée à la projection du documentaire de Marie-Monique Robin, « Le Roundup face à ses juges » (M. Didier Guillaume s’esclaffe. – Mme Catherine Procaccia et M. Laurent Duplomb sourient. – Exclamations sur diverses travées.),…
M. le président. S’il vous plaît, laissez parler l’orateur.
M. Joël Labbé. … qui montre le caractère redoutable de cet herbicide. Ce qui se passe est absolument scandaleux et il va bien falloir que l’on avance sur cette question.
En l’occurrence, nous demandons, tout petitement, que les consommateurs soient informés sur la qualité des produits qu’ils consomment. J’espère que cet amendement connaîtra un sort favorable. (M. Didier Guillaume s’exclame.)
M. le président. L’amendement n° 331 rectifié ter, présenté par MM. Mandelli, Mayet et Bonne, Mmes Deroche et Bories, MM. Babary, Morisset, Lefèvre et Vogel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Paccaud, Danesi, Revet, Chaize, Bazin et Pellevat, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Vaspart et Paul, Mmes Imbert et Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mme Deromedi et MM. Huré, Laménie et Sido, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Affichage environnemental des denrées alimentaires
« Art. L. 115-… - À partir du 1er janvier 2023, la mention “nourri aux OGM” est indiquée sur les denrées alimentaires mises sur le marché sur le territoire français. »
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Cet amendement vise à permettre le développement d’une véritable filière de production d’alimentation animale française capable de se substituer aux importations de soja génétiquement modifié dont la culture est interdite en France, mais dont l’importation est autorisée.
En effet, bien qu’elle produise 55 % de ses protéines, la France est le plus gros importateur et consommateur européen de tourteaux de soja dont la majorité vient du Brésil – 22 % du soja exporté par le Brésil est destiné à la France.
Cette mention permettra de créer une véritable dynamique en faveur d’une production d’alimentation animale 100 % française.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements visent à instaurer un étiquetage obligatoire des denrées alimentaires issues d’animaux nourris aux OGM.
Ces dispositions sont contraires à la position arrêtée par la commission sur l’article 11 septies A. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote sur l’amendement n° 449 rectifié.
M. Laurent Duplomb. Je vous prie de m’excuser de rallonger les débats, mais on ne peut tout laisser dire.
M. Labbé nous explique que les agriculteurs sud-américains cultivent du soja transgénique en épandant du Roundup par avion. C’est une bêtise !
M. Pierre Cuypers. Eh oui !
M. Laurent Duplomb. Quel agriculteur serait capable de semer un champ, où que ce soit, pour y pulvériser ensuite du Roundup ? Quel agriculteur accepterait, quand il est prêt à récolter, de tuer la plante qu’il a semée en déversant ce défanant ? Vous faites du marchandage de la peur, vous amalgamez des dossiers différents. C’est de l’obscurantisme ! Vous racontez tout et n’importe quoi ! (M. Didier Guillaume rit.)
Tout le monde se rappelle le scandale de l’encéphalopathie spongiforme bovine, ou ESB, en 2000, et des farines animales dans l’alimentation de certains bovins, en particulier en Grande-Bretagne. La France a décidé de supprimer ces farines de toute alimentation, ce qui a entraîné une hausse de l’utilisation de protéines produites à l’étranger dont la part est passée de 80 % à 95 %.
Or les farines animales, quand elles sont faites correctement et qu’elles sont destinées à des espèces omnivores ou carnivores comme les poissons, les poulets ou les cochons, ne posent absolument aucun problème.
Nous avons donc dépensé des sommes folles pour brûler nos farines animales de très bonne qualité, contrairement à celles qui étaient produites en Grande-Bretagne, pour acheter davantage de tourteaux transgéniques d’Amérique du Sud, car les producteurs de cette région se sont chargés de mélanger la totalité des tourteaux, pour ne quasiment plus trouver que des tourteaux OGM sur le marché…
Voilà tout le paradoxe de la situation : d’un côté, comme on ne veut pas utiliser de farines animales, on importe des tourteaux OGM ; de l’autre, on ne veut pas manger des tourteaux OGM, mais on en importe encore un peu plus ! C’est tout le problème de la discussion sur ces sujets-là.
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
M. le président. Nous sommes partis de deux amendements assez précis pour aboutir à un débat sur les farines animales…
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je ne veux pas prolonger le débat. Je voudrais juste faire remarquer à M. Lefèvre qu’il est quelque peu contradictoire de voter, pour de bons motifs, contre un amendement visant à ajouter de nouvelles formules sur l’étiquetage et de présenter ensuite un amendement tendant à demander des précisions supplémentaires sur l’étiquetage. Peut-être notre collègue va-t-il retirer cet amendement ?…
M. Ladislas Poniatowski. Il va le retirer !
M. le président. Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 331 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 331 rectifié ter est retiré.
La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote sur l’amendement n° 449 rectifié.
M. Guillaume Gontard. Je suis d’accord avec M. Duplomb : il faut sortir de l’obscurantisme. C’est d’ailleurs tout le sens de cet amendement – et des amendements précédents sur lesquels je n’ai pu m’exprimer, car la discussion était assez rapide – qui vise simplement à informer les consommateurs sur la nature des produits qu’ils achètent.
M. le ministre nous disait que ces exigences allaient entraîner une distorsion de concurrence avec les autres pays européens, ce qui allait poser problème. Je pense que c’est tout l’inverse : les consommateurs veulent aller vers des produits de qualité et cette mesure permettra de mettre en avant les produits français dont on pourra dire avec certitude qu’ils ne contiennent des OGM.
En ce qui concerne le Roundup et les farines animales, monsieur Duplomb, si vous pensez qu’il n’y a jamais eu de problème, je vous laisse la responsabilité de vos propos…
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. Monsieur Duplomb, il faudrait tout de même accepter la légitimité de ceux qui ne partagent pas votre avis. S’agissant de technique culturale, personne n’a parlé de verser du Roundup sur une plante vivante, mais seulement avant le semis. (M. Laurent Duplomb s’exclame.) Il y a donc bien épandage de Roundup par avion.
Au cours de ces trois jours de débat, mon cher collègue, chaque fois que nous émettons un avis différent du vôtre, vous faites comme si nous étions des ignares. Nous sommes aussi des techniciens et des spécialistes, et nous pouvons donc aussi donner notre avis. (MM. Franck Montaugé et Joël Labbé applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. On ne peut pas dire que les farines animales n’ont posé aucun problème. Elles ont réalisé quelque chose d’inédit : le franchissement de la barrière des espèces. Une loi de la biologie a été violée, ce qui a entraîné l’apparition de maladies à prions. Le franchissement de la barrière des espèces, c’est un drame.
Je veux bien que l’on défende tout et n’importe quoi avec n’importe quels arguments, je veux bien que l’on s’oppose à Joël Labbé, mais c’est simplement ridicule.
Par ailleurs, je suis gêné par la position générale qui se dégage sur le refus d’information supplémentaire. Si je suis d’accord pour dire que trop d’information tue l’information – on ne peut surcharger à l’infini les étiquettes –, les consommateurs ont raison de demander une meilleure information.
Cet amendement a le mérite de poser la question dans les bons termes, même s’il n’y apporte pas nécessairement la bonne réponse. La position de la commission me semble difficilement compréhensible.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je n’interviendrai pas sur les OGM ni sur les farines animales, mais sur les distorsions de concurrence. Ce point peut faire consensus, me semble-t-il.
Ces distorsions de concurrence avec d’autres pays sont insupportables. Dans ce texte, quand on veut que la France se montre plus volontaire que d’autres pays européens sur certains sujets, on crée une distorsion de concurrence. Mais lorsque des substances autorisées à l’international sont introduites en Europe, les producteurs européens subissent des distorsions concurrence vis-à-vis du reste du monde.
Cette idée d’améliorer l’information fournie au consommateur est un moyen de lutter contre ces distorsions de concurrence et de faire valoir notre position plus éthique, plus avancée sur ces questions.
Monsieur le ministre, retourner cet élément de distorsion de concurrence, au nom du règlement européen sur l’information à l’étiquetage, contre les producteurs français, c’est un sacré paradoxe. Voter l’amendement de M. Mandelli ne m’aurait pas dérangé ; je voterai celui de M. Labbé, qui répond partiellement à cette question.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Je ne voulais pas voter les amendements nos 215 rectifié et 451 rectifié qui étaient antiéconomiques, allaient contre l’agriculture et ne tenaient absolument aucun compte de la réalité.
En revanche, informer sur la présence d’OGM dans un produit est important et répond aux attentes de nos concitoyens. Il me semble que nous pourrions tomber d’accord sur ce point.
Je vis au milieu de l’arboriculture, au milieu du verger, et je ne connais aucun arboriculteur ou agriculteur qui met des intrants et qui traite par plaisir. (M. Laurent Duplomb s’exclame.) Lorsque les années sont très pluvieuses comme c’est le cas actuellement, je préfère que l’on traite trois fois nos champs pour avoir des récoltes de légumes ou de fruits plutôt que de faire venir des produits d’Espagne où il n’existe aucun contrôle. (M. Laurent Duplomb s’exclame de nouveau.)
Tout le monde veut savoir s’il y a des OGM ou non dans les produits. On sait très bien que tous les jours on consomme des produits qui en contiennent. Ajoutons cette information et laissons nos concitoyens libres de décider de leurs achats.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 449 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 176 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 344 |
Pour l’adoption | 124 |
Contre | 220 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 391 rectifié quater, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Conway-Mouret et Lienemann, MM. Courteau et Manable, Mme G. Jourda, MM. Féraud, Devinaz et Kerrouche et Mme Préville, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre…
« Informations sur les conditions de production des produits
« Art. L. 115-… – À compter du 1er janvier 2020, à l’issue d’une expérimentation permettant de déterminer les conditions de sa mise en place, l’étiquetage indiquant le mode d’élevage et d’abattage des animaux est rendu obligatoire sur l’ensemble des produits issus de l’élevage, et pour tous les produits agricoles et alimentaires contenant en tant qu’ingrédient des produits issus de l’élevage, à l’état brut ou transformé.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article après que la Commission européenne a déclaré compatible avec le droit de l’Union européenne l’obligation prévue au présent article. »
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Il s’agit d’un amendement dont Mme Rossignol est la première signataire.
De plus en plus sensibilisés aux conditions d’élevage, de transport et d’abattage, les consommateurs manifestent une volonté grandissante de mieux consommer, intégrant comme critère d’achat la notion de bien-être animal. Or les informations disponibles, relatives tant à l’élevage qu’au transport et qu’à l’abattage, ne leur permettent pas de mettre en pratique cette consommation responsable.
Selon le dernier Eurobaromètre réalisé par la Commission européenne en 2016 sur l’attitude des Européens à l’égard du bien-être animal, 52 % des Français estiment que l’offre des distributeurs en produits alimentaires respectueux du bien-être animal est insuffisante. Et comme en réponse, ils sont, selon la dernière étude ACCEPT réalisée par les instituts techniques des filières d’élevage, à 96 % favorables à un étiquetage des produits selon le mode d’élevage – plein air ou non.
D’où cet amendement dans lequel est proposée une expérimentation permettant de déterminer les conditions de mise en place de cet étiquetage.
M. le président. L’amendement n° 448 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano et Corbisez, Mmes N. Delattre et Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Informations à caractère environnemental relatives aux denrées alimentaires
« Art. L. 115-… – À partir du 1er janvier 2023, les denrées alimentaires animales ou d’origine animale mises sur le marché sur le territoire français font l’objet d’une information à caractère environnemental à destination du consommateur, portant sur le mode d’élevage.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement de repli vise à rendre obligatoire un étiquetage du mode d’élevage pour les produits animaux. Les consommateurs sont de plus en plus demandeurs d’informations sur les produits animaux qu’ils consomment.
Actuellement, cet étiquetage n’existe que pour les œufs. Les consommateurs se saisissent de cette information, puisqu’ils se tournent de plus en plus vers les œufs des poules élevées en plein air ou bio. Pour les autres produits animaux, l’information n’est pas toujours disponible et plusieurs études montrent que le consommateur est susceptible de mal interpréter les informations dont il dispose sur l’emballage. Comment les en blâmer ? En effet, il n’est pas rare d’avoir un logo présentant un animal sur un fonds verdoyant évoquant le plein air, alors que le produit concerné est issu d’un élevage hors sol.
On a évoqué précédemment la question de la grande distribution, qui sait très bien valoriser ses produits et faire de la publicité d’une certaine manière mensongère. Il est donc nécessaire d’assurer un minimum de transparence.
En outre, un tel étiquetage valoriserait les éleveurs, de plus en plus nombreux, qui, dès lors qu’ils pratiquent des modes d’élevage vertueux, méritent d’être encouragés.
Ces modèles, s’ils sont valorisés auprès des consommateurs, sont plus rémunérateurs pour les éleveurs. Or tel est également l’objet de ce texte.
Sans compter, monsieur le ministre, que le droit européen nous permet d’aller plus loin concernant l’étiquetage des denrées alimentaires.
M. le président. L’amendement n° 330 rectifié ter, présenté par MM. Mandelli et Bonne, Mme Deroche, M. Babary, Mme Bories, MM. Morisset, Lefèvre et Vogel, Mme Garriaud-Maylam, MM. Paccaud, Danesi, Revet, Chaize, Bazin et Pellevat, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Vaspart et Paul, Mmes Imbert et Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mme Deromedi et MM. Huré, Laménie et Sido, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 391 rectifié quater et 448 rectifié ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’amendement n° 391 rectifié quater reprend la notion d’étiquetage obligatoire du mode d’élevage, mais l’étend au mode d’abattage et à tous les produits bruts ou transformés comportant des produits issus de l’élevage, et ce dès 2020.
Pour les raisons déjà exposées, la commission y est défavorable, comme elle est défavorable à l’amendement n° 448 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, l’amélioration de l’information du consommateur est une priorité forte de ce gouvernement.
Parce que nous sommes sensibles à une plus grande transparence en matière d’étiquetage, nous avons saisi le Conseil national de l’alimentation pour travailler sur ces sujets, notamment en expérimentant un étiquetage relatif aux modes de production en élevage. Pour autant, veillons à encadrer et contrôler la manière dont nous faisons les choses.
Permettez-moi de prendre un exemple, celui de l’élevage de bovins à l’herbe. Cela peut concerner les bovins qui broutent de l’herbe dans les champs, mais aussi ceux qui ne voient jamais la lumière du jour ! Je pense aux feedlots installés dans certains États d’Amérique du Sud ou aux États-Unis, où les bovins mangent de l’herbe, mais sont installés sur du sable ! C’est très différent de ce que nous entendons par « élevage à l’herbe », à savoir des bovins broutant dans les prairies.
Nous avons donc besoin de mieux contrôler et encadrer. Pour ce faire, le Conseil national de l’alimentation mettra en place une expérimentation.
Par ailleurs, notre législation doit rester conforme à la réglementation européenne sur ces sujets. Je suis donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Ces amendements relatifs aux mentions obligatoires à porter sur l’étiquetage témoignent d’une volonté de plus grande transparence que je partage.
Sans doute parce que je vieillis et porte des lunettes (Protestations amusées.), j’estime illisible toutes ces informations minuscules figurant sur les produits.
Comme M. le ministre, je pense que la technologie nous aidera. Un jour ou l’autre, nous devrons passer à un étiquetage sous forme de QR code. Cela nous permettra de lire toutes les informations, qui ne seront pas forcément obligatoires, qu’il s’agisse des conditions d’élevage ou de la présence ou non d’OGM, et ce sur notre téléphone ou, si l’on est un peu vieillissant comme moi, sur notre tablette.
Si vos intentions sont louables, mes chers collègues, veillons à ce que les étiquettes, qui ne sont pas extensibles, restent lisibles !
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. La filière viticole peut déjà expérimenter l’étiquetage dématérialisé pour un certain nombre de points. Par ailleurs, France filière pêche est exemplaire en la matière. Dans votre poissonnerie France filière pêche, vous scannez le QR code : vous obtenez ainsi la photo du bateau, la vidéo, le nom du capitaine, et le lieu de pêche du poisson ! Ce dispositif permet d’avoir des garanties concernant l’origine des produits pêchés par la filière.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 391 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote sur l’amendement n° 448 rectifié.
M. Joël Labbé. Vous mettez en avant, monsieur le ministre, les expérimentations qui seront menées par le Conseil national de l’alimentation. Très bien ! Toutefois, je le souligne, cet amendement renvoie à un décret en Conseil d’État qui déterminera les modalités d’étiquetage.
À un moment donné, il est important de poser des actes, et l’adoption de cet amendement en constituerait un.
Je le répète, s’agissant des élevages de montagne, les broutards élevés uniquement à l’herbe et au fourrage ne sont pas suffisamment valorisés. Leurs producteurs doivent être mieux payés.
Or la grande distribution sait vendre ses produits et tromper le consommateur avec de belles images vertes sur fond fleuri.
Par ailleurs, vous revenez sans cesse à la réglementation européenne pour justifier vos refus. Or, pour favoriser les produits vertueux, il est possible d’agir !
M. le président. Malgré le débat sur le débat, nous examinons 16 amendements par heure, ce qui est correct pour finir lundi soir.
Que M. Duplomb n’y voie pas une invitation à lancer tous les débats… (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
L’amendement n° 37 rectifié sexies, présenté par M. Delahaye, Mme Guidez, MM. Canevet et Mizzon, Mme Dindar, M. Laugier, Mmes Goy-Chavent et Joissains, M. Kern, Mme de la Provôté, MM. Moga, Janssens, Lafon et Poadja, Mme Billon et MM. Longeot et Delcros, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 412-4 du code de la consommation, il est inséré un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-… – Sans préjudice des dispositions spécifiques relatives au mode d’indication de l’origine des denrées alimentaires, l’indication organisme génétiquement modifié des vitamines, enzymes et acides aminés utilisés durant le processus de fabrication d’un produit alimentaire, est obligatoire sur son étiquetage. »
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Dans la lignée de la discussion précédente, il s’agit, à travers cet amendement, d’indiquer sur les étiquettes que les produits sont élaborés à partir d’éléments OGM.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement revient sur l’étiquetage OGM, mais pour ce qui concerne le processus de fabrication d’un produit alimentaire.
Pour les mêmes raisons que celles qui ont été évoquées préalablement, la commission y est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Michel Canevet. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 37 rectifié sexies est retiré.
L’amendement n° 394 rectifié ter, présenté par Mmes Rossignol et Conway-Mouret, M. Vallini, Mmes Jasmin et Lienemann, MM. Féraud et Devinaz, Mme Lepage, M. Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et M. Manable, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre Ier du livre Ier du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Affichage environnemental des produits alimentaires
« Art. L.115-1. – Afin d’éclairer le choix du consommateur sur l’incidence sur l’environnement des produits alimentaires bruts qu’il achète, au plus tard le 1er janvier 2022, le distributeur appose en rayon, à côté de l’étiquette mentionnant le prix, une information relative à la distance parcourue par le produit alimentaire brut depuis son lieu de production jusqu’à son lieu de distribution.
« Sur le même support, il indique par un logo le mode de transport principal qui a été employé pour acheminer le produit.
« Pour une meilleure visibilité pour le consommateur, cet affichage se fait sur un fond d’une couleur verte pour les aliments ayant parcouru moins de 200 kilomètres entre leur lieu de production et le lieu de distribution, jaune pour les aliments produits en France, orange pour les aliments produits dans l’Union européenne et rouge pour les aliments produits dans le reste du monde.
« Un arrêté ministériel fixe le modèle type à utiliser pour cet affichage.
« Avant la publication de cet arrêté, les modalités d’affichage sont librement choisies par les distributeurs, dans le respect des alinéas précédents. À partir de la publication par arrêté du modèle type d’affichage, les distributeurs se conforment à ce modèle type dans un délai de six mois.
« Art. L.115-2. – Au plus tard le 1er janvier 2022, pour toute vente de fruits ou légumes frais, le distributeur appose en rayon une mention indiquant si le fruit ou légume est « de saison » ou « hors saison ».
« Pour l’appréciation du caractère de saison ou hors saison du produit, le distributeur s’appuie sur un calendrier régional de saisonnalité.
« Art. L.115-3. – Au plus tard le 1er janvier 2022, le producteur affiche sur tout produit alimentaire brut destiné à la vente une indication simplifiée de son incidence environnementale.
« Cette information est présentée au moyen de symboles représentant l’incidence environnementale sur des facteurs de type climat, eau, biodiversité à préciser par décret en Conseil d’État. Chaque symbole, représentant un facteur, est assorti d’une échelle de A, représenté en vert à E, représenté en rouge, sur laquelle est indiquée la note obtenue par le produit pour ce facteur. La note globale issue de la moyenne de ces différentes notes est également indiquée.
« La méthode par laquelle sont obtenues les notes environnementales mentionnées à l’alinéa précédent est fixée par décret en Conseil d’État. Elle repose sur une analyse cycle de vie et multicritères.
« Un arrêté ministériel fixe le modèle type à utiliser pour cet affichage.
« Avant la publication de cet arrêté, les modalités d’affichage sont librement choisies par les producteurs, dans le respect des alinéas précédents. À partir de la publication par arrêté du modèle type d’affichage, les producteurs se conforment à ce modèle type dans un délai d’un an.
« Art. L.115-4. – Au plus tard le 1er janvier 2022, le producteur affiche sur tout produit alimentaire destiné à la vente un QR-code renvoyant vers un site permettant au consommateur d’avoir accès aux informations détaillées relatives à l’incidence environnementale du produit.
« Ces informations sont présentées de manière à permettre la lecture la plus facile possible pour le consommateur non averti.
« Les modalités d’application de cette obligation sont précisées par décret en Conseil d’État. »
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. L’information environnementale obligatoire sur les produits alimentaires répond à une forte demande citoyenne, à un impératif de transparence des relations entre producteurs, distributeurs et consommateurs, à l’objectif d’une plus grande prise de conscience environnementale des citoyens en vue de l’indispensable changement des pratiques.
Permettez-moi de formuler une remarque concernant l’information des citoyens. Les jeunes adultes – peut-être avez-vous des enfants relevant de cette catégorie – iront chercher eux-mêmes les informations, quoi que vous fassiez !
Pour répondre à la fois au besoin d’une information simple et courte et d’un affichage environnemental multicritères donnant une information juste et fiable, il est proposé d’articuler deux démarches : une information visible immédiatement en magasin et compréhensible par tous et une information plus exhaustive disponible en ligne.
En ce qui concerne l’information relative à l’impact du dioxyde de carbone du produit, il est proposé de mettre la priorité sur la distance parcourue et le mode de transport. C’est la solution qui semble la plus pédagogique. À l’inverse, l’indication du nombre de grammes d’équivalent CO2 émis sur l’ensemble du cycle de vie du produit est certes transparente, mais elle n’est pas pédagogique, puisqu’elle n’évoque rien pour la plupart des Français. Un format d’affichage très clair a été imaginé, qui pourra être transmis aux services de l’État en vue d’élaborer le futur modèle type d’affichage.
Enfin, le QR code permettra au consommateur d’avoir accès aux informations détaillées relatives à l’incidence environnementale du produit. Il pourra renvoyer soit vers le site du producteur, soit vers un site étatique rassemblant toutes ces informations.
Dans le cas de produits animaux, ces informations pourraient intégrer des éléments détaillés relatifs au mode d’élevage et d’abattage de l’animal. Les producteurs pourraient même être incités à fournir des photographies du lieu d’élevage des animaux, pour permettre au consommateur de constater par lui-même dans quel type de milieu les animaux sont élevés : sont-ils élevés en plein air ? De quel espace dispose-t-il ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position arrêtée par la commission, puisqu’il va très au-delà de ce qui est prévu sur un certain nombre de sujets.
Il s’agit notamment de prescriptions excessivement contraignantes, par exemple l’indication de la distance parcourue du lieu de production jusqu’au lieu de distribution, qui serait du reste impossible à mettre en œuvre puisqu’il faudrait autant d’étiquettes qu’il y a de lieux de distribution, ou l’affichage du mode de transport principal – là aussi, il y aurait autant d’étiquettes que de circuits d’approvisionnement. Je pense également à la mention, pour les fruits et légumes frais, de leur saisonnalité. Une telle précision est inopérante puisqu’un fruit est toujours de saison à une époque de l’année sur la planète.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement rejoint la préoccupation des consommateurs, qui doivent pouvoir disposer d’une information environnementale sincère, objective et complète sur les caractéristiques globales des produits et de leur transport.
Une expérimentation a été menée en 2011, dont le bilan a été dressé en 2013. Un certain nombre d’obstacles doivent être levés en termes de méthodes d’évaluation, de contrôle et de coût associé. La Commission européenne travaille également sur ce sujet dans le cadre de groupes de travail auxquels la France participe. Il importe donc de se coordonner avec le niveau européen pour envisager la mise en place de tels dispositifs, afin d’avoir une cohérence européenne sur ces sujets. En effet, c’est par la cohérence que nous réussirons à porter la qualité et l’information auprès de nos consommateurs et à répondre à la concurrence des pays d’Amérique du Sud ou d’autres continents.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. J’évoquerai trois points.
Premièrement, les producteurs et les filières n’ont pas attendu nos amendements pour mettre en place un étiquetage apportant un certain nombre d’informations. Parfois, dans des entreprises où l’on peut acheter des produits ou dans des magasins, on peut voir les photos des exploitations.
Ne remettons pas en cause une certaine liberté d’organisation ! La montée en gamme, c’est la capacité individuelle de répondre à des conditions très spécifiques de production dans un bassin donné.
Deuxièmement, nous avons voté ici à la quasi-unanimité l’amendement déposé par Mme la Lamure sur la non-surtransposition. Or que sommes-nous en train de faire ? Nous sommes en contradiction avec ce que nous avons voté précédemment, à savoir qu’il ne faut pas fragiliser les productions agricoles de notre pays.
Troisièmement, nous avons voté, presque à l’unanimité, une résolution européenne relative aux conditions d’importation, qui rappelle que les mêmes obligations doivent peser sur nos produits agricoles et sur les produits importés.
Nous disposons donc d’un arsenal complet en la matière ! Je partage totalement l’avis de Mme la rapporteur, et voterai contre cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 394 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 178 rectifié ter, présenté par MM. Decool, Guerriau, Chasseing, A. Marc, Wattebled, L. Hervé, Paul, Vogel et Henno, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 129 rectifié sexies, présenté par MM. Decool, Bignon, Chasseing, Fouché, Guerriau et Lagourgue, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, L. Hervé et Moga, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter du 1er janvier 2019, l’étiquetage des produits préparés contenant du minerai de viande en mentionne explicitement la présence dans la liste des ingrédients des produits.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à renforcer l’information du consommateur et la transparence de la composition des plats préparés à base de minerai de viande.
Le minerai de viande bovine est un produit intermédiaire constitué de muscles et de la graisse qui lui est attachée, issu de la découpe des carcasses et du désossage. Il est destiné à une transformation ultérieure, pour la fabrication de steaks hachés et de plats cuisinés.
Le minerai étant un produit intermédiaire utilisé uniquement entre opérateurs de l’agroalimentaire, il n’est actuellement pas étiqueté sur le produit final remis au consommateur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’appellation « minerai » peut susciter quelques interrogations. Néanmoins, officiellement, le minerai de viande ne contient que du muscle et de la graisse. Rien ne justifie donc un étiquetage spécifique.
Par ailleurs, j’attire votre attention sur le fait que les steaks hachés ou les saucisses ne sont pas constitués d’autre chose que de minerai de viande.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Apposer la mention « minerai » sur les produits reviendrait à les dévaloriser. Or leur utilisation dans l’industrie agroalimentaire permet de ne pas gaspiller ces parties de l’animal, qui sont aussi valorisables.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. La première fois que l’on a entendu parler de minerai, c’est au moment de l’affaire abominable de la viande de cheval. On s’est alors rendu compte qu’on utilisait du minerai dans divers mélanges très improbables. Faisons bien la différence ! Le steak haché ou la saucisse, ce n’est pas du tout la même chose, puisqu’on connaît les ingrédients d’origine.
De mon point de vue, il est important d’indiquer la présence de minerai. Il s’agit non pas de condamner l’industrie agroalimentaire qui l’utilise, mais simplement d’informer les consommateurs qu’ils mangent du minerai et pas vraiment de la viande.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Oh !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 129 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 651 rectifié bis, présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, M. M. Bourquin, Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, MM. Lurel, Vaugrenard et Antiste, Mme Conconne, MM. Dagbert et Duran, Mmes Espagnac et Ghali, M. Jomier et Mme Rossignol, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La commercialisation de produits alimentaires bénéficiant d’une allégation portant sur le mode de production et résultant d’un tri des produits agricoles est autorisée par la loi dans le cas où des modalités de répartition de la valeur créée par ladite allégation sont définies, notamment par accord interprofessionnel étendu par les pouvoirs publics.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement vise à encadrer certaines pratiques commerciales consistant à afficher des mentions valorisantes sur l’étiquette des produits, sans que le producteur en soit informé.
Ce type de mentions crée une valeur, puisqu’elle donne le sentiment d’un produit de meilleure qualité, qu’il s’agisse d’un signe officiel de la qualité ou de l’origine ou d’une allégation portant sur le mode de production. Une note de 2017 du ministère de l’environnement fait ainsi apparaître que les consommateurs sont prêts à payer entre 5 % et 45 % plus cher pour un même produit ayant un moindre impact environnemental.
Ainsi, 57 % des fruits et légumes produits en France pourraient porter la mention « zéro résidu de pesticides », puisqu’ils sont sous les seuils autorisés en cette matière. Dans le cas de produits résultant d’un tri des fruits et légumes, le recours à cette allégation environnementale peut aujourd’hui se faire sans que le producteur en soit informé.
C’est également le cas pour l’utilisation des races bovines dans la valorisation des viandes et steaks hachés : un industriel peut trier parmi ses carcasses et utiliser la mention valorisante « viande charolaise », sans en informer le producteur.
L’amendement vise donc à assurer un meilleur partage de la valeur : dès lors qu’une allégation valorise le produit, le producteur doit non seulement en être informé, mais aussi se voir restituer une partie de la valeur générée.
L’encadrement de la valeur créée par ces allégations est un enjeu majeur de la transition agricole : tant que des allégations concernant le mode de production pourront porter sur des pratiques ne rémunérant pas les producteurs, la transition agricole vers des pratiques vertueuses restera bloquée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les auteurs de cet amendement se réfèrent à des pratiques de distributeurs, lesquelles, si je comprends bien, consisteraient à trier parmi les produits agricoles pour y apposer une allégation, sans pour autant que le producteur soit rémunéré à hauteur de la valeur créée par ladite allégation.
Je ne suis pas sûre de saisir parfaitement l’objet de cet amendement. Vous avez pris l’exemple de la viande, mon cher collègue. Comment, dans ce cas, le producteur lui-même pourrait-il ne pas être informé de la mention valorisante de son produit ?
Sous réserve d’explications complémentaires, l’avis de la commission est plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La répartition de la valeur au sein de la chaîne de production est un enjeu fort, de même que l’évolution des filières vers des modes de production responsables.
Mais cela ne doit pas être encadré par des dispositions dont l’application serait excessivement coûteuse pour de nombreuses filières, ce qui pourrait freiner leur montée en gamme et s’opposer à ce que nous voulons faire.
C’est la raison pour laquelle j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 651 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 519 rectifié ter, présenté par MM. Montaugé et Cabanel, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an suivant la promulgation de la loi, le Gouvernement remet un rapport au Parlement sur l’opportunité de la mise en place d’un système de blockchain permettant de retracer la création de valeur d’un produit ou d’une denrée alimentaire sur toute la chaîne de production, ainsi que la composition précise des aliments transformés. Ce système irait du producteur au consommateur et permettrait de s’assurer d’une transparence totale, répondant ainsi à une attente sociétale forte. Il pourrait être mis en place et utilisé par l’Observatoire des prix et des marges dans des conditions qu’il conviendra de déterminer.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. À partir du constat largement partagé d’un besoin de la société d’information concernant la qualité voire la composition des produits alimentaires, cet amendement prévoit la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement sur l’opportunité de la mise en place d’un système de blockchain permettant de retracer la création de valeur d’un produit ou d’une denrée alimentaire sur l’ensemble de la chaîne de production, et de délivrer une information complète sur la composition des aliments transformés.
La blockchain est une technologie de stockage et de transmission de l’information sans organe de contrôle. En fait, c’est une base de données distribuée entre les différents acteurs de la chaîne alimentaire, du champ de production à l’assiette du consommateur. L’ensemble est sécurisé par cryptographie, et donc à l’abri de falsifications ou d’usages détournés malveillants.
L’intérêt de la blockchain dans le domaine agroalimentaire, c’est de rendre complètement transparentes les données relatives aux produits commercialisés, de la ferme à la table du consommateur.
Les données peuvent concerner la qualité nutritive des aliments et les modes de production. Elles peuvent aussi renseigner sur la répartition de la valeur économique tout au long de la chaîne, de la production à la commercialisation.
À terme, les techniques de QR code sur smartphone permettront un accès généralisé à ce type d’information, pour un achat plus éclairé du consommateur final.
En définitive, la blockchain est un tiers de confiance qui sert aussi bien la stratégie du producteur et des acteurs de la filière que l’intérêt du consommateur.
La France ne doit pas être en retard dans ce domaine et nous estimons important que l’État impulse et accompagne cette démarche, qui s’inscrit dans le champ de la numérisation de notre économie. En la matière, l’agriculture et l’agroalimentaire ne doivent pas prendre de retard. Ils doivent au contraire en retirer tous les profits possibles.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La création de valeur est déjà suivie et évaluée par l’Observatoire de la formation des prix et des marges. C’est précisément l’objet des contrats et accords-cadres que de la retracer au travers des indicateurs qui sont prévus.
Je suis par ailleurs assez sceptique quant à l’intérêt d’appliquer la théorie du blockchain à la création de valeur, qui ne renvoie ni à un problème de sécurisation des données ni à un enjeu de puissance de calcul disponible.
Néanmoins, je vous propose de renvoyer ce sujet à l’OPECST, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui pourrait l’approfondir, ce qui nous permettrait ensuite d’en débattre.
La commission est donc plutôt défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je ne suis pas favorable à ce que l’Observatoire de la formation des prix et des marges soit désigné pour la mise en place d’un hypothétique système de blockchain.
Cet observatoire est aujourd’hui chargé d’une mission capitale, la transparence sur la formation des prix et des marges. Demain, sa mission sera renforcée, puisqu’il devra fournir aux filières des indicateurs, ce qui leur sera très utile.
Je suis donc défavorable à cet amendement, qui devrait pouvoir être satisfait sans passer par la loi et sans mobiliser forcément l’Observatoire de formation des prix et des marges.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. J’entends les arguments de la commission et du Gouvernement, même si je ne les partage pas complètement.
J’ai regardé ce que faisait le Gouvernement en la matière. Une mission d’information a été constituée en début d’année à l’Assemblée nationale concernant la mise en place et l’utilisation potentielle, dans différents secteurs de l’économie, des blockchains. L’OPECST, évoqué par Mme la rapporteur, a été également saisi d’une mission d’évaluation scientifique sur ce sujet.
Je ne voudrais pas que le monde agricole et agroalimentaire passe à côté de cette technologie. J’ai constaté sur le terrain que certaines entreprises en pointe mettaient en œuvre ce type de technique, qu’il convient d’accompagner.
Dans le cadre des plans de filière faisant suite aux États généraux de l’alimentation, le Gouvernement a prévu d’accompagner les filières dans leur modernisation. Ce sujet mériterait d’être pris en considération à cet égard.
Il ne faut pas qu’on soit à la traîne ! On est en compétition internationale avec d’autres pays qui importent chez nous. Nous devrons également être prêts pour exporter nos produits. Cette question constitue l’un des éléments de la compétitivité de l’agriculture et de l’agroalimentaire français. Ne passons pas à côté ! En tant que sénateurs, soyons proactifs et accompagnons ce sujet !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 519 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 septies B
(Non modifié)
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la définition de la durée de vie d’un produit alimentaire et la répartition des responsabilités afférentes à cette durée de vie, afin de s’assurer que les durées sont fixées par les professionnels de l’alimentation de manière harmonisée et pertinente. Le rapport propose aussi une évaluation des obligations en matière d’affichage des durées de conservation des produits alimentaires. Il formule des recommandations afin d’améliorer la lisibilité des mentions actuellement utilisées et évalue l’opportunité de limiter l’affichage de la date de durabilité minimale à un nombre plus restreint de produits. – (Adopté.)
Article 11 septies
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 624 rectifié bis, présenté par Mme Rauscent, MM. Théophile et Patriat, Mme Schillinger, MM. Decool, Capus et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. – Après le premier alinéa de l’article L. 111-1 du code la consommation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« 1° … Les opérateurs de plateformes en ligne qui vendent des denrées alimentaires, à titre principal ou accessoire, reportent de façon explicite les informations mentionnées au 3° du I de l’article L. 412-1 sur la page de vente de chaque denrée. Cette obligation ne s’applique pas aux opérateurs de plateformes en ligne livrant des repas préparés par des restaurateurs et des denrées alimentaires, sous réserve que l’activité de livraison de denrées alimentaires soit accessoire à l’activité de livraison de repas préparés par les restaurateurs ; ».
II. – Un décret précise les conditions d’application du présent article.
La parole est à Mme Noëlle Rauscent.
Mme Noëlle Rauscent. L’objet de cet amendement est simple : il s’agit de renforcer la transparence des informations relatives aux produits vendus en ligne.
Nos habitudes de consommation évoluent et internet devient un nouvel espace de consommation. Malgré ce changement d’usage, les consommateurs doivent pouvoir bénéficier des mêmes exigences d’information et de transparence que dans le commerce traditionnel où le produit est palpable et l’étiquette, à portée des yeux.
Les plateformes de vente en ligne de denrées alimentaires considèrent qu’elles remplissent leurs obligations d’étiquetage fixées par le code de la consommation et le règlement européen INCO en utilisant des photographies des produits.
En effet, ce règlement prévoit que les informations obligatoires pour des denrées alimentaires doivent figurer sur le support de la vente à distance, ce qu’une simple photo peut satisfaire. En revanche, il n’impose aucune obligation quant à la transparence et au caractère explicite de ces informations : une photo de l’emballage n’est pas toujours directement apparente ni dans une police suffisamment lisible.
L’article 11 septies, introduit avec le soutien du rapporteur à l’Assemblée nationale, prévoit une application fidèle du règlement INCO, dont les dispositions peuvent être aujourd’hui contournées par les plateformes. Une telle mesure vise à respecter le devoir d’information au consommateur.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les règles applicables à la vente en ligne sont harmonisées au niveau communautaire. Par définition, l’obligation de report sur le support de la vente à distance ne peut être remplie que si les informations sont reportées de façon lisible pour le consommateur. Il appartient donc à la DGCCRF de contrôler que tel est bien le cas, sans pour autant apporter cette précision dans la loi, notamment le fait que ce report est visible de façon explicite.
Une telle précision, ma chère collègue, est donc au mieux inutile, si elle ne fait qu’expliciter une règle déjà en vigueur. Elle pourrait même être non conforme au droit européen si elle visait à imposer sans justification au niveau national des indications complémentaires non prévues par le droit européen.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je partage l’analyse de Mme la rapporteur. Je précise en outre que l’on pourrait même être en deçà du droit communautaire avec un tel amendement ! J’en demande donc le retrait, faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. Madame Rauscent, l’amendement n° 624 rectifié bis est-il maintenu ?
Mme Noëlle Rauscent. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 624 rectifié bis est retiré.
En conséquence, l’article 11 septies demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 11 septies
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 145 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Daubresse, L. Hervé, Moga et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires.
L’amendement n° 625 rectifié ter est présenté par Mme Rauscent, MM. Théophile et Patriat, Mme Schillinger et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le 3° du I de l’article L. 412-1 du code de la consommation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …° La mise à disposition du public des données relatives aux inscriptions de toute nature sur les marchandises ; »
II. – Le décret en Conseil d’État mentionné à l’article L. 412-1 du code de la consommation renvoie à un arrêté qui détermine notamment le lieu de mise à disposition et le format des données informatiques de façon à constituer une base accessible à tous les utilisateurs de manière non discriminatoire et permettre la réutilisation libre de ces données.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 145 rectifié septies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement pose le principe général de l’accessibilité en ligne des informations sur les marchandises alimentaires.
L’accessibilité en ligne de l’information sur les marchandises est, à terme, une des conditions de la transformation numérique de nos entreprises et de notre économie. Le secteur agroalimentaire est en première ligne de cette exigence d’accessibilité. En effet, la facilité d’accès à l’information relative aux denrées alimentaires est une demande forte, constante et croissante des consommateurs, qui souhaitent pouvoir effectuer un choix éclairé et consommer mieux, plus durable et plus local. L’émergence d’applications mobiles utilisant des jeux de données ouvertes est la démonstration de l’intérêt des consommateurs. L’accès en masse à ces données est également indispensable à la recherche en matière de politique de santé publique et de nutrition.
L’objectif de cet amendement est donc de poser le principe général de l’accessibilité en ligne des informations sur les marchandises et de définir par décret les conditions dans lesquelles le secteur agroalimentaire pourrait être le premier à le mettre en application, dans des conditions relativement souples, et ce afin de soutenir notamment le développement d’applications mesurant la qualité nutritionnelle des aliments.
Ainsi, le décret organisera la mise en open data des informations obligatoires d’étiquetage par les exploitants du secteur alimentaire responsables des informations sur les denrées alimentaires préemballées, à l’exception des TPE, en posant que ces informations devront être rendues accessibles sous format informatique ouvert et réutilisable dans des conditions non discriminatoires par tous. Le secteur agroalimentaire aura la charge d’organiser la mise à disposition de ces informations par les entreprises, dans des conditions harmonisées entre les filières.
L’exclusion dans un premier temps des TPE du dispositif permettra d’en circonscrire l’obligation à des entreprises sachant déjà produire de la donnée structurée.
M. le président. La parole est à Mme Noëlle Rauscent, pour présenter l’amendement n° 625 rectifié ter.
Mme Noëlle Rauscent. Je remercie l’orateur précédent de son exposé.
Le groupe La République En Marche a déposé un amendement identique pour rendre accessibles, dans un format exportable et conforme aux exigences de l’open data – cela vient d’être souligné –, l’ensemble des données figurant sur le site internet où sont proposés les produits alimentaires. Tout ce qui est rendu obligatoire sur l’étiquetage, et uniquement cela, sera donc mis sur internet de manière claire et lisible. En revanche, la base ne serait pas ouverte, car il nous semble préférable de ne pas imposer de choix technologique par la loi.
Notre amendement permet de poser le principe général de l’accessibilité en ligne des informations. Il reviendrait ensuite au secteur agroalimentaire de s’organiser pour la mise à disposition de ces informations par les entreprises, dans les conditions harmonisées par les filières.
Une telle mesure répond au souhait des consommateurs de pouvoir effectuer un choix éclairé, afin de consommer mieux, plus durable et plus local. Elle favoriserait également l’émergence d’applications mobiles utilisant des jeux de données ouvertes, de plus en plus utilisées par nos concitoyens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements identiques prévoient l’obligation de mettre en open data les données relatives aux inscriptions de toute nature de toutes les marchandises, qu’elles soient alimentaires ou non.
À nos yeux, une obligation aussi large et invasive imposée à des personnes privées constituerait clairement une atteinte à la liberté d’entreprendre, voire à la propriété intellectuelle.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La proposition évoquée par les auteurs de l’amendement n° 145 rectifié septies fait actuellement l’objet d’une réflexion de la part des professionnels, qui ont évoqué un projet de catalogue numérique, lors d’un colloque du Fonds français pour l’alimentation et la santé, le 29 mai dernier.
En l’occurrence, le rôle des pouvoirs publics est bien d’encourager de telles démarches collectives. Je serai très attentif au suivi du chantier et à la problématique de l’information du consommateur, dans le cadre du prochain programme national pour l’alimentation, ou PNA, et du prochain programme national nutrition santé, ou PNNS, comme un axe d’articulation entre les deux.
Là encore, il n’est pas nécessaire de passer par la loi. Mieux vaut encourager les professionnels dans les démarches qu’ils sont en train de mettre en place.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’amendement n° 145 rectifié septies.
En outre, je sollicite le retrait de l’amendement n° 625 rectifié ter, dont l’esprit va dans le sens souhaité par mon ministère et par les représentants des industries agroalimentaires, avec lesquels nous travaillons. Une réflexion sur le sujet est prévue dans le cadre du contrat stratégique de filière alimentaire. L’amendement porte sur l’ensemble des marchandises, et pas sur les seules marchandises agroalimentaires. La réflexion n’est pas suffisamment aboutie aujourd’hui. Il faut une discussion avec les représentants économiques, là encore, dans le cadre du contrat stratégique de filière.
M. le président. Monsieur Lagourgue, l’amendement n° 145 rectifié septies est-il maintenu ?
M. Jean-Louis Lagourgue. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 145 rectifié septies est retiré.
Qu’en est-il de l’amendement n° 625 rectifié ter, madame Rauscent ?
Mme Noëlle Rauscent. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 625 rectifié ter est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 147 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et M. Daubresse.
L’amendement n° 627 rectifié quater est présenté par M. Théophile, Mmes Schillinger et Rauscent, MM. Patriat, Dennemont, Bargeton et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3232-8 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Afin de faciliter le partage et la valorisation des données relatives à l’information consommateur sur les denrées alimentaires, sans préjudice des articles 9 et 30 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, les exploitants du secteur alimentaire responsables des informations sur les denrées alimentaires peuvent rendre accessibles sur une base ouverte à tous les utilisateurs dans des conditions non discriminatoires les données sur leurs produits et notamment les informations obligatoires sur les denrées alimentaires, incluant la déclaration nutritionnelle. Les fabricants s’assurent que ces données sont en permanence tenues à jour dans des formats ouverts permettant une réutilisation libre de ces données.
« Le dispositif de partage de l’information mentionné à l’avant-dernier alinéa est considéré comme un des moyens appropriés du point a de l’article 14 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 précité. »
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 147 rectifié septies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à encourager la mise en open data des informations d’étiquetage par le responsable des informations sur les denrées alimentaires, en permettant aux vendeurs de se référer à l’information que ce dernier aura partagée comme moyen de remplir les obligations de l’article 14 du règlement n° 1169/2011 sur la vente à distance.
Il s’agit de permettre et de soutenir le développement d’applications autour de l’exploitation de ces données, mesurant la qualité nutritionnelle des aliments, mais aussi la mise en œuvre de programmes de recherche – big data et intelligence artificielle –, autour de l’exploitation des informations sur les produits.
Car la facilité d’accès à l’information relative aux denrées alimentaires est une demande croissante des consommateurs, qui souhaitent pouvoir effectuer un choix éclairé et consommer mieux, plus durable et plus local. L’émergence d’applications mobiles utilisant des jeux de données ouverts est la démonstration de l’intérêt des consommateurs.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 627 rectifié quater.
M. Dominique Théophile. Je partage ce qui vient d’être dit par notre collègue.
Cet amendement vise à offrir une solution alternative aux producteurs qui ne souhaitent pas mettre en œuvre le dispositif facultatif Nutri-score. L’exploitant aura le choix et l’occasion de mettre en open data ses informations produit pour que des tiers structurent et présentent ces données à leur place. Il s’agit de renforcer la transparence et d’utiliser les possibilités offertes par le numérique à notre avantage.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 146 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et M. Daubresse.
L’amendement n° 626 rectifié ter est présenté par M. Théophile, Mmes Schillinger et Rauscent, MM. Dennemont, Patriat et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3232-8 du code de la santé publique est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« À l’exception des exploitants d’une microentreprise, telle que définie à l’article 3 du décret n° 2008-1354 du 18 décembre 2008 relatif aux critères permettant de déterminer la catégorie d’appartenance d’une entreprise pour les besoins de l’analyse statistique et économique, les exploitants du secteur alimentaire qui ne mettent pas en œuvre le dispositif mentionné au premier alinéa du présent article se conforment à l’avant dernier et au dernier alinéas.
« Afin de faciliter le partage et la valorisation des données relatives à l’information consommateur sur les denrées alimentaires, sans préjudice des articles 9 et 30 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires, les exploitants du secteur alimentaire responsables des informations sur les denrées alimentaires rendent accessibles sur une base ouverte à tous les utilisateurs dans des conditions non discriminatoires les données sur leurs produits et notamment les informations obligatoires sur les denrées alimentaires, incluant la déclaration nutritionnelle. Les fabricants s’assurent que ces données sont en permanence tenues à jour dans des formats ouverts permettant une réutilisation libre de ces données.
« Le dispositif de partage de l’information mentionné à l’avant-dernier alinéa est considéré comme un des moyens appropriés du point a de l’article 14 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 précité. »
M. Jean-Louis Lagourgue. L’amendement n° 146 rectifié septies est défendu, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 626 rectifié ter.
M. Dominique Théophile. Là encore, cet amendement vise à offrir une solution alternative aux producteurs qui ne souhaitent pas mettre en œuvre le dispositif facultatif Nutri-score. Ces derniers devraient choisir entre une application volontaire du Nutri-score et la mise en open data de leurs informations produit pour que des tiers structurent et présentent ces données à leur place.
Il s’agit de renforcer la transparence et d’utiliser les possibilités offertes par le numérique à notre avantage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces quatre amendements prévoient l’obligation, pour les « exploitants du secteur alimentaire », dont on imagine qu’il s’agit des producteurs, de mettre l’ensemble des informations sur les « denrées alimentaires », là encore sans plus de précision, en open data. Les amendements identiques nos 147 rectifié septies et 627 rectifié quater se distinguent des deux suivants en exonérant de cette obligation les microentreprises et les entreprises qui mettraient déjà en œuvre une information nutritionnelle.
La contrainte créée, notamment pour les petites structures, serait particulièrement lourde. Mieux vaut laisser la place aux initiatives professionnelles des volontaires dont M. le ministre vient de nous informer.
La commission émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur l’ensemble des amendements.
Il n’est pas nécessaire de passer par la loi pour de telles actions. Des démarches collectives sont entreprises avec les professionnels. Nous y travaillons dans le cadre du PNNS et du PNA. Et les professionnels œuvrent également dans le cadre des chantiers et des réflexions lancées à la suite des États généraux de l’alimentation.
Je rappelle que le Nutri-score relève d’une démarche volontaire. Laissons donc les professionnels qui le souhaitent s’y engager sans inscrire dans la loi une obligation de non-souscription.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 147 rectifié septies et 627 rectifié quater.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 146 rectifié septies et 626 rectifié ter.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 11 octies
(Non modifié)
L’article L. 641-19 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les fromages fermiers, lorsque le processus d’affinage est effectué en dehors de l’exploitation en conformité avec les usages traditionnels, l’information du consommateur doit être assurée en complément des mentions prévues au premier alinéa selon des modalités fixées par le décret mentionné au même premier alinéa. »
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, sur l’article.
M. Didier Guillaume. Cet article important illustre parfaitement nos objectifs s’agissant des produits agricoles. Comment faire pour faire bénéficier d’un signe de qualité ou d’origine un produit tout en améliorant la sécurité juridique et sa transparence auprès du consommateur ?
C’est exactement la question qui s’est posée pour les fromages fermiers. Un fromage est-il fermier parce qu’il est fabriqué et affiné en totalité à la ferme ? Les cas sont tout de même très limités. Ou bien peut-il être affiné ailleurs et bénéficier néanmoins de ce label de qualité ?
Il faut répondre à cette question juridique. Le texte, me semble-t-il, y répond. Oui, un fromage peut être fermier avec un affinage en dehors de la ferme, sous réserve du respect de méthodes d’affinage traditionnelles, d’une part, et d’en informer le consommateur sur l’étiquetage du fromage, d’autre part !
Cet article permet de sécuriser les producteurs qui affinent leurs fromages en dehors de la ferme et qui pratiquent déjà l’étiquetage avec la mention explicite « affiné par ». C’est le cas, notamment, des producteurs de Picodon, que je connais bien, dans la Drôme ou l’Ardèche, ou des producteurs d’autres fromages, notamment le Rocamadour, cher à notre président de groupe, Jean-Claude Requier, qui en est à la fois un fervent soutien et un grand consommateur ! (Sourires.)
Vous l’aurez compris, je suis donc favorable à cet article tel qu’il résulte des travaux de la commission. (Applaudissements sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, sur l’article.
Mme Angèle Préville. À la suite d’un arrêt du Conseil d’État en date du 17 avril 2015, un fromage fermier ne peut pas être affiné en dehors de l’exploitation. Voilà le texte !
Dans mon département, nous avons un fromage AOP : le Rocamadour. Lorsque j’ai rencontré les producteurs, ils m’ont indiqué que le label ou la mention « fermier » étaient absolument indispensables. En effet, les petits producteurs qui font l’affinage sur la ferme, ce qui implique un surcroît de travail, veulent légitimement en avoir une juste rétribution.
N’affaiblissons pas le terme « fermier », qui induit une valeur ajoutée importante. Il ne faudrait pas que les vrais produits fermiers soient pénalisés.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Avec cet article, nous n’affaiblissons et ne pénalisons rien.
Je rejoins totalement M. Guillaume. L’article 11 octies vise uniquement à encadrer l’affinage quand il est fait à l’extérieur, en conformité avec le cahier des charges, que vous connaissez bien. L’article ne va pas plus loin, et ne remet pas en cause le terme « fermier », auquel nous sommes tous très attachés.
Vous avez évoqué le Rocamadour. Je pourrais vous parler pendant des heures du camembert de Normandie. (Exclamations amusées.)
Faisons attention à ne pas instiller des peurs sur de tels sujets. Nous ne remettons pas en cause ce qu’est un fromage fermier. Nous encadrons les usages, en conformité avec des cahiers des charges qui sont compliqués à tenir et rigoureux, mais qui permettent de bien valoriser les productions issues des productions fermières.
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 137 rectifié quinquies est présenté par Mme Mélot, MM. Capus, Chasseing, Decool, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret, Wattebled, Bignon, Vogel, de Belenet et Paul, Mme Goy-Chavent et M. Daubresse.
L’amendement n° 152 est présenté par M. Panunzi.
L’amendement n° 184 rectifié est présenté par Mmes Thomas et Chain-Larché, M. Cuypers, Mme Lherbier, MM. Babary, Mayet, Dallier et Bizet, Mmes Puissat, Di Folco et Gruny, MM. Brisson et Joyandet, Mme Morhet-Richaud, MM. Cardoux, Bonne, Revet, de Nicolaÿ et Grosdidier, Mme Dumas, M. Danesi, Mme Canayer, MM. Genest, Darnaud et Sido, Mme A.M. Bertrand, M. H. Leroy, Mmes Garriaud-Maylam et Deromedi, MM. Poniatowski et Kennel, Mmes M. Mercier, L. Darcos et Bonfanti-Dossat, MM. Savin et Bonhomme et Mmes Lamure et Raimond-Pavero.
L’’amendement n° 272 rectifié ter est présenté par Mmes Létard, Guidez et Joissains, M. Longeot, Mme Vullien, MM. Vanlerenberghe, Janssens, Cigolotti, Moga, Mizzon, Delahaye et Canevet, Mme Dindar et MM. Luche et Maurey.
L’amendement n° 665 rectifié est présenté par MM. Castelli, Arnell, Artano, A. Bertrand et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Guérini, Mme Jouve et MM. Léonhardt et Menonville.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 137 rectifié quinquies.
Mme Colette Mélot. Certains ont évoqué le Rocamadour ; d’autres, le camembert. Pour ma part, je pourrais parler du brie ! (Exclamations amusées.)
M. Antoine Lefèvre. Ah ! La dame de Melun !
Mme Colette Mélot. Le brie de Meaux ou le brie de Melun – ce sont les deux appellations d’origine –, comme vous voudrez ; il y en d’autres encore.
Cet amendement tend à supprimer l’article 11 octies, relatif à l’ouverture de la dénomination « fromage fermier ».
Cet article introduit une nouvelle définition du fromage fermier en admettant la possibilité d’un affinage en dehors de l’exploitation agricole. Or la mention valorisante « fermier » est définie par le décret n° 2007–628 et se limite aux fromages « fabriqués selon des techniques traditionnelles par un producteur agricole ne traitant que les laits de sa propre exploitation sur le lieu même de celle-ci ».
Dans la nouvelle disposition, l’association des notions « fromages fermiers » et « affinage hors de l’exploitation » pose problème aux producteurs laitiers fermiers à plusieurs titres.
Tout d’abord, lorsque le processus qui va du lait au produit fini affiné est réalisé entièrement sur une même ferme, l’identité du producteur et la provenance du produit sont clairement connus du consommateur via l’étiquette. C’est évident.
Toutefois, lorsque l’étape finale d’affinage a lieu hors de la ferme, c’est souvent la marque, donc l’identité du seul affineur qui est mise en avant. Là, c’est très fréquent ; affineur, c’est un vrai métier. Cela induit, d’une part, une perte de traçabilité pour le consommateur, qui aura du mal à savoir où et comment le produit concerné a été fabriqué, et, d’autre part, une perte de valeur ajoutée pour le producteur fermier, alors même que c’est son travail qui rend possible l’utilisation de la mention valorisante « fermier » sur le produit.
Enfin, il faut le noter, l’introduction d’une telle disposition va à l’encontre d’une décision du Conseil d’État, qui a fait supprimer la possibilité d’affinage des fromages fermiers à l’extérieur de la ferme, en se fondant sur les arguments selon lesquels l’affinage est partie intégrante de la fabrication d’un fromage affiné. Le producteur agricole doit être directement responsable et les pratiques d’affinage doivent être traditionnelles.
M. le président. L’amendement n° 152 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Pierre Cuypers, pour présenter l’amendement n° 184 rectifié.
M. Pierre Cuypers. Nous retirons cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 184 rectifié est retiré.
La parole est à M. Michel Canevet, pour présenter l’amendement n° 272 rectifié ter.
M. Michel Canevet. À l’instar de Mme Mélot, je crois qu’il faut effectivement faire attention.
Le risque est que le terme « fermier », dont la définition est assez précise aujourd’hui, ne soit galvaudé à l’avenir. Nous aurons peut-être demain des boîtes avec en gros la mention « fermier » et en tout petit la mention « affiné à l’extérieur ». Cela ne va pas dans le sens de la nécessaire information des consommateurs.
D’ailleurs, on voit de plus en plus des grandes sociétés industrielles racheter des petits producteurs et s’arroger ainsi à leur profit des marques et signes de qualité alors que les process de production changent. Soyons attentifs, notamment dans la rédaction de l’article, à ce que sont les usages traditionnels, d’autant qu’ils ne sont pas forcément bien définis dans les textes.
Au demeurant, une telle orientation me semble en contradiction avec les démarches de circuits courts et de vente directe qu’un certain nombre de producteurs mettent en place actuellement. J’invite donc à la prudence.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 665 rectifié.
M. Franck Menonville. Notre collègue Joseph Castelli, qui est à l’initiative de cet amendement, s’inquiète des conséquences de l’article 11 octies, qui permet l’affinage hors de la ferme. Il considère que nous risquons d’envoyer un message brouillé au consommateur et une dilution de la traçabilité, l’identité de l’affineur occultant celle du producteur.
Aussi, et afin de ne pas amoindrir le caractère valorisant de la mention « fermier », cet amendement vise à supprimer l’article 11 octies. Cela étant, les précisions et les arguments que j’ai entendus au cours du débat sont rassurants.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les auteurs de ces amendements identiques souhaitent supprimer l’article 11 octies, qui sécurise pourtant la pratique de l’affinage des fromages fermiers en dehors de l’exploitation.
Cette pratique, le plus souvent dans des caves collectives, est ancienne, et n’avait pas posé de problème jusqu’à ce qu’un arrêt du Conseil d’État de 2015 la prive de base réglementaire.
L’article 11 octies apporte une réponse définitive à cette insécurité juridique tout en assurant une bonne information des consommateurs, dès lors qu’il sera indiqué de manière claire et précise que l’affinage a eu lieu en dehors de la ferme.
Le consommateur pourra donc choisir en toute connaissance entre un fromage fermier affiné à la ferme et un fromage fermier affiné en dehors de la ferme conformément, dans ce cas, aux usages traditionnels.
La commission émet un avis défavorable sur ces amendements de suppression.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, à l’issue des débats, je vous inviterai au ministère de l’agriculture à venir partager un immense plateau de bons fromages affinés à cœur, issus de nos territoires respectifs. (Marques d’enthousiasme et exclamations amusées sur de nombreuses travées.)
M. Gérard Longuet. Avec quels vins ?
M. Olivier Jacquin. Et avec des huîtres !
M. Stéphane Travert, ministre. Comme je l’ai souligné précédemment, il n’y a pas lieu d’agiter des peurs. L’appellation « fromage fermier » n’est nullement remise en cause.
Selon certains savoir-faire ancestraux, l’affinage du fromage se fait en dehors de l’exploitation, par exemple dans des cavités naturelles qui existent ailleurs. Encore une fois, l’objectif est d’encadrer l’affinage quand il est fait à l’extérieur, en conformité évidemment avec le cahier des charges. Cela ne va pas plus loin.
Le Gouvernement sollicite donc le retrait de ces amendements de suppression ; à défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Notre amendement est soutenu par l’Association nationale des producteurs laitiers fermiers, qui représente 16 organisations et regroupe 914 producteurs adhérents. C’est donc la voix des producteurs laitiers fermiers, qui veulent défendre leurs produits.
Monsieur le ministre, il ne s’agit pas d’« agiter des peurs ». Ces professionnels revendiquent simplement la reconnaissance de leur travail et de leur artisanat ! Ils craignent que des fabricants autres que fermiers ne puissent revendiquer l’appellation « fromage fermier » si l’on permet l’affinage extérieur.
La suppression de l’article va donc, me semble-t-il, dans l’intérêt des 6 000 producteurs laitiers fermiers, qui, pour la grande majorité, affinent eux-mêmes leurs fromages et dont l’efficacité économique dépend essentiellement de la plus-value jusqu’à présent attachée à la mention fermière.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. J’attire l’attention de nos collègues sur les risques que ferait courir la suppression de cet article.
En supprimant cet article, on reviendrait au droit actuel, qui n’offre pas du tout de cadre juridique sécurisé pour les producteurs, pas même pour ceux qui sont en zone AOP. D’ailleurs, monsieur le ministre, en écho à votre invitation, je pense qu’il serait plus opportun de venir goûter les fromages dans les territoires où ils sont fabriqués. (Exclamations amusées.)
M. Bernard Delcros. Je vous invite donc à venir en Auvergne et dans le Cantal, où nous avons plusieurs AOP.
Aujourd’hui, il n’y a pas de cadre juridique ! À la suite de l’arrêt du Conseil d’État en 2015, nous sommes dans une impasse. Même en zone AOP, où des cahiers des charges très rigoureux permettent de produire un fromage à la ferme et de l’affiner dans une zone définie – ces cahiers sont validés par l’Institut national de l’origine et de la qualité, l’INAO –, il n’est pas possible d’accorder la mention « fromage fermier ». Là est l’enjeu.
Je vous invite donc à faire extrêmement attention et à bien mesurer les conséquences de la suppression de cet article. Nous aboutirions à un résultat contraire à l’objectif. En prétendant sécuriser, nous ne sécuriserions rien du tout !
Pour ma part, je suis même – j’ai déposé un amendement en ce sens, et nous aurons l’occasion d’en discuter – pour sécuriser véritablement les consommateurs et les producteurs, en réservant la mention aux affinages qui répondent au cahier des charges des zones AOP.
Mais ne supprimons surtout pas cet article ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Voilà un exemple concret de sujet sur lequel nous faisons œuvre utile ! (Exclamations amusées.) Il est vrai, mes chers collègues, que, sur certains débats, j’ai parfois eu le sentiment que nous n’étions pas vraiment dans notre rôle de législateur.
En l’occurrence, il y a un vide juridique. Je me réjouis donc de la position de la commission et du choix du Gouvernement de la soutenir. Nous sécurisons à la fois les fromages fermiers affinés à la ferme et les fromages fermiers affinés collectivement en dehors de la ferme.
Et cela va même plus loin !
Nous qui aimons bien tout ce qui est ancien et les vieilles pratiques, nous voilà précisément au cœur du sujet. Pour certaines d’entre elles, cela fait plus d’un siècle que des paysans produisent, transforment chez eux et font affiner chez un affineur, soit collectivement, soit par une entreprise. Et il est très important de le dire : combien de producteurs fermiers disparaîtraient si on ne leur permettait plus d’affiner collectivement les fromages fermiers qu’ils produisent en plus de ceux qu’ils vendent directement ? Car c’est ça la réalité !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Très bien !
M. Daniel Gremillet. Dans mon département, nous avons le munster fermier. Sur le versant alsacien, il n’y a que des affineurs : des producteurs fermiers, en plus de leur production propre vendue directement sur les marchés, vendent à des affineurs. On a tous des exemples identiques dans nos régions. Je suis donc content de la position de la commission, qui vise à sécuriser, sans tromperie vis-à-vis du consommateur. Tout figure clairement sur l’étiquette, c’est parfait pour nous qui voulons enrichir l’étiquette « producteur fermier ». Si le fromage est affiné ailleurs, on précise où et par qui. Au moins, il y a une très grande transparence. Merci de cet amendement, qui vraiment sécurise le système fermier de notre pays !
M. Ladislas Poniatowski. C’est un producteur de fromage qui parle !
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Eu égard aux arguments de Mme le rapporteur et de M. le ministre, nous retirons notre amendement.
M. Daniel Gremillet. Très bien !
M. le président. L’amendement n° 665 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. Je partage l’avis de M. Gremillet, mais pour les produits sous signes d’identification de la qualité et de l’origine, ou SIQO. La différence est fondamentale !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je souhaite vivement que cet article ne soit pas supprimé. Je défendrai d’ailleurs un amendement visant à enrichir le texte et à le sécuriser – un amendement identique sera présenté à juste titre par d’autres groupes –, et à défendre véritablement les fromages fermiers, y compris affinés à l’extérieur, mais dans un cadre très serré.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques. J’ai eu une discussion avec M. Labbé dans les couloirs pour lui expliquer le dossier. Je souhaite non seulement que l’avis de la commission soit suivi, mais aussi qu’il le soit de façon unanime. Je comprends les amendements de certains. Nous sommes tous des sénateurs de la Nation issus d’un territoire. Or, comme pour le vin, dont nous avons beaucoup parlé les jours précédents, nous avons la chance d’être un pays où chaque territoire a son fromage. En revanche, aucun fromage ne ressemble à un autre ni n’est affiné de la même façon – comme l’a rappelé Daniel Gremillet aucune histoire n’est identique. Il est donc normal que les amendements diffèrent en fonction des régions de chacun.
Mais pour se grandir ici, il faut comprendre tous les territoires. C’est toute l’importance d’un rapporteur, car il auditionne tout le monde. Il faut quelques jours pour affiner un camembert fermier, contrairement au saint-nectaire. Voilà pourquoi très peu de saint-nectaire peuvent être affinés à la ferme. Il s’agit pourtant bien d’un fromage fermier qui respecte les traditions, et la position de l’Assemblée nationale a été très claire : on marque bien qui affine et on précise « dans les conditions traditionnelles ».
Notre collègue voudrait que seuls les produits sous signes d’identification de la qualité soient concernés. Or, comme pour les vins de pays, l’intérêt du fermier, c’est qu’il est fermier ; mais pour autant il n’est pas forcément en AOP ou en IGP. Voilà pourquoi il est nécessaire d’adopter à l’unanimité la position de Mme la rapporteur. Nous sommes tous Français, issus de territoires très différents. Lorsque nous aurons fini d’étudier ce texte, les plus assidus d’entre nous pourraient se retrouver dans la bonne humeur, chacun apportant le vin et le fromage affiné de son territoire. (Très bien ! et applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. Je constate que vous dérogez aux propos que vous avez tenus hier sur la diététique, puisque les invitations à manger du fromage sont multiples. (Sourires.)
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur le président, ce qui est bon ne fait pas grossir, chacun le sait bien ! (Nouveaux sourires.)
Tous les arguments en faveur de la position de Mme la rapporteur ont été développés. Ce débat est utile. J’ai reçu en début de semaine la Confédération paysanne, qui était très inquiète de ce texte. Je pense qu’elle a trouvé ici matière à être rassurée.
Je ne peux m’empêcher néanmoins de pointer une contradiction. Sur certaines travées de cet hémicycle, il y a la volonté de promouvoir une agriculture de groupe. Mais quand des producteurs se rassemblent pour affiner ensemble, on veut leur retirer un avantage concurrentiel leur permettant de mieux valoriser leurs fromages, à savoir l’appellation « fermier ». Restons cohérents. Nous avons eu toutes les garanties que les petits producteurs pourront continuer à utiliser la mention « fermier » s’ils élèvent et affinent leurs fromages de façon traditionnelle. Comme Michel Raison, j’appelle à un vote unanime !
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Je me suis exprimé voilà quelques instants sur l’article. Dans des cas comme celui-ci, notre position doit pouvoir évoluer en fonction du débat. Mme la rapporteur et M. le ministre ont levé toutes les craintes.
M. Jean-Paul Émorine. Absolument !
M. Didier Guillaume. Il n’y a donc plus aucun problème. Nos collègues Labbé et Tissot, que je respecte, veulent que le dispositif concerne les seuls produits sous SIQO. Or c’est une autre démarche, mes chers collègues ! Personnellement, je suis favorable aux signes de qualité, aux AOP, aux AOC, aux IGP, etc. Nous avons eu le débat hier, il faut aller dans cette direction.
Toutefois, il s’agit ici de permettre à un fermier, à un éleveur, de pouvoir faire ce travail, de pouvoir donner à un affineur ses tomes, ses fromages pour qu’ils soient affinés douze jours, quarante jours, etc. (M. Laurent Duplomb s’exclame.) Peut-être entreront-ils ensuite dans les produits sous SIQO, dans une aire géographique ou dans un signe de qualité. Il me semble que toutes les garanties sont ici données. C’est un premier pas avant l’obtention, par exemple, d’un signe de qualité. Laissons aux petits éleveurs la possibilité de faire affiner par quelqu’un d’autre leurs fromages.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. Pour plus de clarté pour le consommateur, de cohérence et de logique, pourquoi appeler « fermier » un produit qui ne l’est pas ?
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Il l’est !
Mme Angèle Préville. Il faut laisser cette appellation à ceux qui continuent à produire des fromages fermiers. Inventons une autre dénomination tout aussi valorisante. L’intérêt de la production fermière, c’est précisément qu’elle se fait à la ferme. Ça me gêne beaucoup d’appeler « fermier » un fromage qui n’est pas intégralement produit à la ferme. Trouvons une autre appellation : artisanal, par exemple. Mais laissons la mention « fermier » à ce qui l’est !
M. Laurent Duplomb. Cela a toujours été ça !
M. le président. Madame Mélot, l’amendement n° 137 rectifié quinquies est-il maintenu ?
Mme Colette Mélot. Le débat a nourri ma réflexion : je retire mon amendement (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions.), car j’ai confiance dans les paroles qui ont été prononcées ici ce matin.
M. le président. L’amendement n° 137 rectifié quinquies est retiré.
Monsieur Canevet, qu’advient-il de l’amendement n° 272 rectifié ter ?
M. Michel Canevet. Je le retire, monsieur le président. (Même mouvement.)
M. le président. L’amendement n° 272 rectifié ter est retiré.
M. Ladislas Poniatowski. Le débat était utile !
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° 469 rectifié est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano, Castelli et Corbisez, Mme N. Delattre et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
L’amendement n° 539 rectifié est présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Kanner, Mmes Tocqueville, Monier et Préville, MM. Botrel, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, MM. Jacquin et Roux, Mme Taillé-Polian, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
1° Après le mot :
fermiers
insérer les mots :
sous signe officiel d’identification de la qualité et de l’origine
2° Remplacer les mots :
en conformité avec les usages traditionnels
par les mots :
conformément à leurs cahiers des charges
3° Après les mots :
au premier alinéa
insérer les mots :
parmi lesquelles figure obligatoirement l’affichage du nom du producteur,
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 469 rectifié.
M. Joël Labbé. Comme vous, je souhaitais que l’article 11 octies ne soit pas supprimé, car le rôle de la Haute Assemblée est d’enrichir et d’affiner le texte. (Sourires.)
L’objectif, pour nous, est de valoriser les productions et d’éviter qu’elles ne soient banalisées. Cet amendement, identique à l’amendement n° 539 rectifié qui sera présenté par un autre groupe, vise à préciser les questions de qualité. Il s’agit d’ajouter pour les fromages fermiers « sous signe officiel d’identification de la qualité et de l’origine » et de remplacer « en conformité avec les usages traditionnels », dont la valeur juridique n’est pas évidente, par « conformément à leurs cahiers des charges ». Je pratique habituellement plutôt le langage poétique, mais je me suis mis au langage juridique ! Par ailleurs, nous proposons à la fin de l’article d’insérer les mots « parmi lesquelles figure obligatoirement l’affichage du nom du producteur », car c’est essentiel.
Les fromages fermiers peuvent être affinés en dehors de la ferme, mais d’une façon extrêmement cadrée, traçable et lisible.
La rédaction actuelle de l’article pénalise fortement les producteurs fermiers, qui ne pourront plus faire valoir leur travail. Elle pénalise aussi les consommateurs, qui ne pourront plus identifier clairement les produits. L’amendement vise à prévoir que le terme fermier reste réservé aux fromages affinés sur la ferme. Si, dans le cadre d’une AOC et conformément à un cahier des charges, le fromage est affiné en dehors de l’exploitation, le nom du producteur doit être mentionné sur l’étiquette.
Il ne s’agit pas d’écarter les autres fromages. Ils continueront d’exister. On peut effectivement trouver d’autres dénominations commerciales. Mais le fromage fermier, c’est du fromage fermier et il doit rester fermier, conformément à ce que demandent avec force les producteurs, car le risque est grand que l’industrie ne s’approprie la mention « fermier » – pour son plus grand profit, d’ailleurs, et non au bénéfice des producteurs !
M. Laurent Duplomb. Amen !
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 539 rectifié.
M. Henri Cabanel. L’amendement ayant été parfaitement défendu par mon collègue Joël Labbé, je n’ai rien à ajouter.
M. le président. L’amendement n° 185, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Après le mot :
fermiers
insérer les mots :
sous signe officiel d’identification de la qualité et de l’origine
2° Remplacer les mots :
en conformité avec les usages traditionnels
par les mots :
conformément à leurs cahiers des charges
3° Après le mot :
décret
rédiger ainsi la fin de l’article :
, parmi lesquels le nom du producteur. »
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement va dans le même sens : il vise à sécuriser l’affinage extérieur à la ferme. Il est la transposition d’une pétition signée par plus de 35 000 personnes, dont les grands chefs Antonin Bonnet, Michel Bras et William Frachot, qui vous a été remise mardi, monsieur le ministre.
L’article 11 octies, dans sa rédaction actuelle, ouvre la voie à une confusion. Sa simple suppression, cela a été dit, ne suffit pas ; nous ne la souhaitions d’ailleurs pas. Aujourd’hui, l’appellation « fromage fermier » est strictement encadrée. Pour obtenir cette appellation, un fromage doit être produit et affiné dans la ferme du producteur. Si l’article est voté tel quel, demain, un fromage affiné en dehors de la ferme pourra être appelé « fermier » sans autres contraintes.
Nous risquons donc d’entraîner une confusion dans les produits et en conséquence de léser des producteurs. Cela pourrait s’accompagner d’une perte de qualité pour des raisons lucratives, peu respectueuses de nos savoir-faire et du travail paysan.
Il nous faut donc remédier à cela et clarifier le texte avant que le mal ne soit fait. C’est pourquoi nous proposons de mettre en place une information du consommateur sur l’étiquette afin de garantir l’origine et la qualité du produit. C’est nos savoir-faire et nos artisans qui sont en danger. Aussi, contrairement à l’essentiel des amendements en discussion commune sur cet article, nous demandons que l’étiquetage précise le nom du producteur. Sinon, c’est l’authenticité d’un travail qui risque de se perdre.
Nous vous invitons à voter en faveur de cet amendement plein de bon sens et pragmatique pour préserver la richesse et la diversité de nos produits.
M. le président. L’amendement n° 434 rectifié bis, présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains et MM. Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Détraigne, Kern, Canevet et Vanlerenberghe, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Après le mot :
fermiers
insérer les mots :
sous signe officiel d’identification de la qualité et de l’origine
2° Remplacer les mots :
en conformité avec les usages traditionnels
par les mots :
conformément à leurs cahiers des charges
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Le pas le plus important, à savoir éviter de supprimer cet article, a été franchi. Je remercie les collègues qui ont retiré leurs amendements, car cela permet de donner un cadre juridique aux fromages fermiers. Ce pas étant franchi, deux solutions s’offrent à nous.
La première consiste, dans le cadre juridique défini, à réserver l’appellation « fromage fermier » à des fromages produits à la ferme, certes affinés en extérieur, mais dans le cadre d’un cahier des charges très strict, défini par les AOP et validé par l’INAO, l’Institut national de l’origine et de la qualité. C’est la solution, et celle que je défends.
La seconde solution est d’ouvrir davantage cette appellation et de l’accorder aux fromages produits à la ferme et affinés en dehors de la ferme, mais sans véritable garantie. Car quelle signification ont les mots « en conformité avec les usages traditionnels » Quelle est la validité juridique de ces termes ? Cela ouvre la porte – pas pour tout le monde, bien sûr – à des dérives, notamment de la part de l’industrie. Celle-ci en profitera pour donner la mention « fromage fermier » à des fromages qui ne sont pas affinés dans des conditions suffisamment proches de ce que l’on entend par fromage fermier, avec le risque de tromper le consommateur.
C’est la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement afin que, ayant ouvert la possibilité d’affiner en extérieur, on sécurise la mention fromage fermier et le consommateur par le respect de cahiers des charges correspondant à ceux des AOP.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Notre assemblée vient de redire largement son attachement à cet article. Nos collègues sont aussi largement revenus sur la nécessité de respecter le cahier des charges des fromages traditionnels. À notre sens, il n’y a donc pas de motif d’instaurer une discrimination entre fromage sous SIQO et autres.
Aussi, l’avis est défavorable sur ces quatre amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Pour les mêmes raisons que Mme la rapporteur, je ne souhaite pas introduire de différenciation entre les SIQO et les autres produits. Nous avons tous rappelé ici notre attachement à l’appellation « fromage fermier » et à leur mode de production.
L’avis est défavorable sur l’ensemble des amendements.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. J’ai pour habitude de tenir mes engagements. J’avais annoncé une demande de scrutin public. Je fais savoir publiquement que je n’en demanderai finalement pas. Au vu des arguments qui ont été avancés, une majorité doit pouvoir être trouvée dans cet hémicycle pour défendre le fromage fermier véritable et sécuriser juridiquement le texte. Combien de fois nous a-t-on répondu que nos propositions n’étaient pas assez sécurisées ! Eh bien ici, avec la mention « conformément à leurs cahiers des charges », le dispositif est beaucoup plus sécurisé qu’avec la formulation retenue dans le texte, à savoir « en conformité avec les usages traditionnels ». Ces mots ne veulent rien dire, ou disent tout et son contraire.
C’est un débat de fond : si jamais ces amendements ne passaient pas, c’est l’Assemblée nationale qui rattrapera le coup. Soyons à la hauteur, faute de quoi nous serons une nouvelle fois critiqués.
Bref, j’espère un vote favorable, mais je laisse faire la démocratie. Chacun votera en son âme et conscience.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. J’irai dans le sens de Joël Labbé. Effectivement, tout cela sera discuté à l’Assemblée nationale. Il s’agit uniquement de sécuriser l’appellation et d’améliorer le texte. Nos débats prouvent que nous voulons tous aller dans le même sens. Il serait intéressant que le Sénat vote aujourd’hui cette disposition.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 469 rectifié et 539 rectifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
M. Joël Labbé. C’est le summum ! (Sourires.)
M. Roland Courteau. C’est pour gagner du temps !...
M. le président. Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 177 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 342 |
Pour l’adoption | 125 |
Contre | 217 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 185.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 434 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 octies.
(L’article 11 octies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11 octies
M. le président. L’amendement n° 322 rectifié, présenté par MM. Bonhomme et Pellevat, Mmes Micouleau et Di Folco, M. A. Marc, Mme Gruny, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, MM. Chasseing et Kern, Mme Kauffmann, MM. Sido, Cigolotti, Paul et Piednoir, Mmes Delmont-Koropoulis, Garriaud-Maylam et Thomas, MM. Bonne et Lefèvre, Mmes Deroche et Chain-Larché et M. Daubresse, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le deuxième alinéa de l’article L. 640-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par les mots : « , pour valoriser l’usage courant d’appellation due à la notoriété publique du produit et de ses qualités reconnues au travers d’une appellation populaire ».
La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. La valorisation des produits de qualité et de tradition constitue un élément d’identification et de commercialisation important pour nos territoires ; cela se traduit souvent par une dénomination courante qui peut contribuer fortement à sa notoriété.
Le présent amendement vise compléter l’article L. 640–1 du code rural et de la pêche maritime qui vise à définir les objectifs de la « politique conduite dans le domaine de la qualité et de l’origine des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer » en précisant que la valorisation du nom d’usage et de notoriété d’un produit répond à un de ces objectifs importants.
La valorisation d’un produit implique une origine, une fabrication locale, une qualité contrôlée, un savoir-faire préservé et une notoriété dûment établie. Cet amendement permettra ainsi de reconnaître cette singularité.
Une telle évolution sera de nature à redonner leurs lettres de noblesse à de nombreux produits locaux. Ce sera, par exemple, le cas d’une viennoiserie dont historiquement le nom a puisé son origine dans la région Gasconne et qui fait la fierté de tout le sud de la France, je veux bien évidemment parler de la chocolatine, et non du pain au chocolat.
Monsieur le ministre, qui n’a pas connu l’affront de ne pas être compris par la boulangère parisienne, laquelle ne sait pas ce qu’est une chocolatine, ne peut saisir le sens de mon amendement. Il a pourtant une haute portée symbolique et je suis sûr que mes collègues du sud comprendront mon propos.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement vise à mentionner la chocolatine comme une valorisation d’appellation d’usage courant parmi les objectifs de la politique promouvant la qualité et l’origine des produits alimentaires. Nous sommes bien évidemment tous, mes chers collègues, attachés à nos multiples appellations régionales, mais est-il vraiment nécessaire d’ajouter de telles précisions dans la loi ? Je vous laisse le choix de votre réponse, mais la commission émet un avis plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. On a trouvé ma réponse à l’Assemblée nationale un peu brutale, mais un tel amendement est-il franchement du domaine de la loi ? Qu’un produit s’appelle chocolatine dans le sud ou pain au chocolat comme c’est le cas chez moi, dans le Cotentin, peu importe !
L’essentiel, c’est que le produit soit bon,…
M. Roger Karoutchi. Ah oui !
M. Stéphane Travert, ministre. … bien vendu, qu’il valorise nos filières – farine, chocolat, etc. –, que les boulangers puissent le produire et que les consommateurs le mangent avec plaisir.
Je ne sais pas si le plaisir relève du niveau de la loi, mais, quoi qu’il en soit, je suis défavorable à cet amendement. Je comprends tout à fait ce que vous souhaitez porter sur les appellations locales, mais je ne pense pas qu’il faille l’inscrire dans la loi.
M. Ladislas Poniatowski. Très bien !
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 487 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Guérini, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 666-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les exploitants agricoles, y compris les cotisants de solidarité, réalisant sur leur exploitation la mouture d’un volume, inférieur à ce seuil défini par ce même décret, de céréales issues de leur ferme, réalisent une activité agricole au sens de l’article L. 311-1 du présent code. À ce titre, ils ne sont pas considérés comme exploitants de moulin. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à simplifier la vie des agriculteurs qui cultivent leurs céréales et les transforment eux-mêmes en farine.
Les agriculteurs détenteurs d’un moulin, de plus en plus nombreux, qui transforment en farine les céréales de leur exploitation sont actuellement soumis à la même réglementation que les meuniers, ce qui entraîne des obligations spécifiques, notamment des règles sanitaires lourdes davantage adaptées aux productions industrielles.
Ces agriculteurs ne sont pas meuniers, mais bien agriculteurs : ils font œuvre de diversification. Leur activité de mouture est une activité agricole à part entière puisqu’il s’agit d’une transformation de leur propre production. Il est donc absurde et anormal qu’ils soient soumis aux normes et contrôles de la filière meunière.
Ces normes sont en décalage complet avec la réalité de leur activité. Elles ont été élaborées pour des volumes considérables, avec une multiplicité d’opérateurs et une diversité d’origine des matières premières des filières industrielles.
Cet amendement vise donc à clarifier le statut de ces agriculteurs et à alléger les normes auxquelles ils sont soumis, en marquant une distinction claire avec le statut de meunier.
Mes chers collègues, nous avons souvent la réputation d’être très normatifs. Nous le sommes lorsque c’est nécessaire.
M. Michel Raison, rapporteur. Quand cela vous arrange !
M. Joël Labbé. Mais lorsqu’il s’agit, dans un esprit de vertu, de supprimer des normes, nous y sommes favorables. (M. Laurent Duplomb s’exclame.)
Certaines normes sont injustifiées, comme ici, et compliquent réellement la vie des petits producteurs, que nous sommes censés défendre avec ce texte. C’est le cas de celles qui sont pensées pour des exploitations ou des entreprises de type industriel et qui s’appliquent pourtant également aux petites fermes.
Les paysans meuniers, comme les autres petits producteurs qui sont soumis à des normes inadaptées, vivent dans la peur des contrôles. C’est aussi le cas des petits éleveurs de volaille, soumis à des normes de biosécurité relatives à la prévention de la grippe aviaire qui sont pensées pour les élevages industriels, lesquels sont à l’origine de ce problème sanitaire.
Mon amendement relève du domaine réglementaire, mais je souhaite profiter de sa défense pour rappeler le combat de l’ensemble des petits producteurs afin que leur soient appliquées des normes sanitaires adaptées à la réalité des élevages. Souvent, ces producteurs travaillent sur de « petites fermes » et réussissent à bien en vivre. (M. Laurent Duplomb s’exclame de nouveau.)
M. le président. L’amendement n° 655 rectifié, présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, M. M. Bourquin, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Jacquin, Mme Lienemann, M. Lurel, Mme Perol-Dumont, MM. Vaugrenard, Duran et Dagbert, Mme Meunier, M. Antiste, Mmes Conconne, Espagnac et Ghali, MM. Jomier, Kerrouche et Marie et Mme Rossignol, est ainsi libellé :
Après l’article 11 octies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 666-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les agriculteurs réalisant sur leur exploitation la mouture d’un volume de céréales issues de leur ferme, inférieur au seuil défini par ce même décret, réalisent une activité agricole au sens de l’article L. 311-1. À ce titre, ils ne peuvent être considérés comme exploitants de moulin. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement a le même objet que celui qui a été présenté par mon collègue Joël Labbé.
J’ajouterai qu’afin de soustraire ces agriculteurs aux obligations auxquelles est soumise la filière meunerie, l’amendement vise à fonder la distinction entre activité agricole et activité de meunerie sur le seuil défini par le décret n° 2009–319 du 20 mars 2009, soit 350 quintaux de blé tendre par an.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements tendent à exonérer des normes et contrôles applicables aux meuniers les agriculteurs réalisant sur leur exploitation la mouture d’un volume de céréales issues de leur ferme.
Mes chers collègues, dès lors qu’un agriculteur possède et utilise un moulin, il n’y a pas lieu de l’exonérer des règles applicables en la matière, sachant toutefois que l’article L. 666–6 du code rural exonère déjà les moulins à faible capacité de l’obligation de détenir un contingent de meunerie et ne prévoit qu’un simple enregistrement.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur. Nous sommes tout à fait d’accord avec M. le ministre pour dire que, dans notre pays, l’alimentation est saine à 100 %. Même si le « zéro défaut » n’existe pas, la France n’en est pas loin.
Si nous voulons pérenniser la transformation à la ferme, que ce soit de la viande, du fromage ou de la farine, nous devons respecter les règles sanitaires. Par ailleurs, comme vient de le rappeler Mme la rapporteur, les agriculteurs concernés ne sont pas traités tout à fait comme les autres, ce qui est normal.
Sur le plan sanitaire, en revanche, et l’on en reparlera à propos des abattoirs mobiles, il ne doit pas y avoir de dérogation. (M. Joël Labbé lève les bras au ciel.) C’est rigoureux, strict et dur à appliquer, mais il ne s’agirait pas qu’aient lieu des accidents sanitaires alimentaires. Il s’en produit parfois, et il faut en limiter le nombre.
Je connais un certain nombre de ces agriculteurs. Ce sont bien des « meuniers », car ainsi se nomment ceux qui broient du blé entre deux meules. Je serais fier, quant à moi, d’être appelé ainsi parce que c’est un métier magnifique.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 487 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 655 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 nonies A
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 540 rectifié bis, présenté par MM. Courteau, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda et Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Bérit-Débat, Mme Cartron, M. J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
I. - La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre IV du code de la consommation est complétée par un article L. 412-… ainsi rédigé :
« Art. L. 412-… - I. - La mention du pays d’origine du vin est indiquée en évidence sur l’étiquette dans tous les cas où l’omission de cette mention selon ces modalités serait susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen quant au pays d’origine du produit, d’une manière quelconque, y compris en raison de la présentation générale de l’étiquette.
« La mention du pays d’origine est alors indiquée de manière à être visible immédiatement par le consommateur.
« Le fait pour l’omission mentionnée au premier alinéa du présent I d’être susceptible ou non d’induire en erreur le consommateur est notamment apprécié au regard du nom et de l’imagerie utilisés sur le contenant.
« II. - Les conditions d’application du présent article sont précisées par décret, conformément à la procédure établie à l’article 45 du règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires. »
II. - Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à rétablir le texte adopté par l’Assemblée nationale.
Nous souhaitons clairement préciser dans la législation que la mention du pays d’origine doit figurer de manière évidente sur les étiquettes des bouteilles de vin. Il s’agit d’éviter les tromperies, d’éviter que ne soient induits en erreur les consommateurs.
Quelle est la situation actuelle ? Les vins espagnols par exemple, pour ne citer qu’eux, sont présentés dans les rayons de manière dissimulée, déguisée ou maquillée, avec pour objectif de rendre méconnaissable ou inapparente leur origine. Nous demandons simplement davantage de transparence et une réelle loyauté. Le consommateur doit pouvoir connaître d’emblée, au premier regard, quelle est l’origine du vin qu’il achète. Or tel n’est pas très souvent le cas.
En commission, j’ai cité le cas de ces bouteilles de vin espagnol qui affichaient ostensiblement sur leurs étiquettes la cité de Carcassonne. N’y a-t-il pas là tromperie ?
Très souvent aussi, l’origine de ces vins est rendue volontairement inapparente. N’y a-t-il pas là duperie ?
La profession qualifie, à juste raison, ces pratiques de concurrence parasitaire, car elles n’ont d’autre but que de détourner au profit des vins étrangers l’image et la renommée des vins français pour mieux en récupérer la valeur économique.
Faut-il laisser les choses perdurer ? On me dit que le droit européen répond au problème que j’expose et que les mesures à prendre relèvent, par ailleurs, du domaine réglementaire. Or, mes chers collègues, si l’une ou l’autre de ces réponses avait une quelconque efficacité pour stopper ces tromperies qui durent et perdurent depuis des années, cela se saurait, et le problème aurait été aujourd’hui définitivement réglé. Or ces duperies et pratiques déloyales perdurent dans l’indifférence de tous, au détriment de nos filières viticoles.
C’est la raison pour laquelle je vous demande d’adopter le présent amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Mon cher collègue, je comprends votre courroux face à des pratiques qui sont trompeuses, voire frauduleuses, mais je vous réitère les explications données en commission : votre amendement est totalement satisfait par le droit européen (M. Roland Courteau est dubitatif.), qui prévoit très explicitement que « les indications obligatoires apparaissent dans le même champ visuel sur le récipient de façon à être lisibles simultanément sans qu’il soit nécessaire de tourner le récipient ». Parmi ces indications figure celle du pays d’origine.
Que prévoir de plus, sinon la sanction des pratiques trompeuses ou frauduleuses ?
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Aujourd’hui, les règles d’étiquetage de l’origine des vins sont précisément encadrées par la réglementation européenne et le code de la consommation, dont l’article L. 121–2, couvre déjà les tromperies sur l’origine.
Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas encore des efforts à faire,…
M. Roland Courteau. Il y a tout à faire, monsieur le ministre !
M. Stéphane Travert, ministre. … je suis d’accord avec vous sur ce point.
Nous travaillons et avançons, avec la filière elle-même, sur l’étiquetage dématérialisé. Je vous l’ai dit, je soutiendrai au niveau européen une extension de l’étiquetage d’origine, à l’instar de ce qui existe pour le lait et la viande, et cela pourra aussi concerner la viticulture.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. J’ai bien entendu les argumentaires développés par les uns et les autres, avec lesquels je suis d’accord. Mais, en début de semaine, un grand journal local a consacré deux pleines pages (L’orateur brandit un exemplaire desdites pages.) intitulées : « Fruits, légumes, vins, ce made in France pas toujours si français ».
Nous sommes en effet confrontés, dans notre région, à des problématiques liées non pas à la fraude, mais à la tromperie.
On nous a répondu que ces mentions étaient d’ores et déjà obligatoires. Encore faut-il qu’elles soient suffisamment visibles, ce qui n’est pas toujours le cas. Quelques distributeurs et négociants peu honnêtes n’hésitent pas à franciser leurs produits – fruits, légumes ou vins – pour bénéficier de la plus-value attachée aux produits français.
Nous souhaitons des mentions claires et lisibles.
Monsieur le ministre, il me semble que votre collègue chargée de la santé a décidé de revoir le pictogramme « pas d’alcool pendant la grossesse », lequel est présent sur toutes les bouteilles d’alcool,…
M. Jean-Claude Requier. Cela ne sert à rien !
M. Henri Cabanel. … mais est de très petite taille, afin de le grossir et de le rendre plus lisible – nous y reviendrons.
De la même façon, nous souhaitons que la mention du pays d’origine soit vraiment lisible et que l’acte d’achat par le consommateur soit aussi transparent que possible.
Je dis non pas qu’aujourd’hui les règles ne sont pas respectées, mais que certains négociants et distributeurs ont la volonté de rendre ces mentions moins lisibles afin de profiter de la valeur des produits français.
Je l’ai dit à plusieurs reprises, les viticulteurs ou les maraîchers n’ont pas peur de la concurrence. Simplement, ils font des produits d’une certaine qualité et ne veulent pas être copiés par des négociants et des distributeurs peu scrupuleux.
Mes chers collègues, je souhaite donc que vous nous rejoigniez pour voter cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour explication de vote.
Mme Nicole Bonnefoy. Notre collègue Gisèle Jourda, qui ne peut pas être présente ce matin, m’a demandé de vous apporter son témoignage.
Elle rappelle que certains vins issus de pays étrangers font l’objet d’un étiquetage susceptible d’induire en erreur le consommateur, ce qui lui laisse en effet penser que ces vins ont été produits en France à partir de récoltes du vignoble français. C’est particulièrement perceptible pour les vins conditionnés en bag in box.
Ces pratiques sont préjudiciables à toute une filière, laquelle est importante puisqu’elle représente 15 % de la production agricole française. La clarification des règles d’étiquetage par l’indication visible de la provenance de ces vins est donc primordiale pour assurer l’information claire et loyale du consommateur sur la provenance des produits et pour soutenir cette filière en mettant fin à cette concurrence déloyale.
Pour ces raisons, nous vous demandons de réintroduire cet article, qui renforce notre législation en prévoyant que la mention du pays d’origine devra figurer de façon évidente sur l’étiquette d’une bouteille de vin, dans tous les cas où l’omission serait susceptible d’induire en erreur le consommateur.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. On nous dit que le droit européen est censé régler ce problème. Or, sur le terrain, il ne règle rien du tout. On nous dit aussi que cette question relève du domaine réglementaire. Dans ce cas, que prévoient ces mesures réglementaires et quelle est leur efficacité ? Celle-ci est nulle !
Les mesures réglementaires, si tant est qu’elles existent, ne règlent rien. Dans ces conditions, et puisque cette tromperie perdure depuis des années sans que cela émeuve personne, permettez que des parlementaires lassés d’attendre en vain que les pouvoirs publics prennent des mesures drastiques, et donc efficaces, décident de s’emparer du problème et de proposer d’inscrire dans la loi les dispositions qui font défaut aujourd’hui.
Voilà ce que nous voulons, mes collègues Henri Cabanel, Franck Montaugé, Angèle Préville, Nicole Bonnefoy, Olivier Jacquin, Jean-Claude Tissot, Gisèle Jourda, Claude Bérit-Débat – je ne les cite pas tous – et moi-même.
J’y insiste, ces pratiques perdurent depuis des années et les pouvoirs publics ne semblent pas s’en émouvoir. Personne ne réagit. Cela suffit ! Nous allons donc demander un scrutin public sur cet amendement afin de mettre chacun devant ses responsabilités.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Je voterai en faveur de cet amendement. En effet, comme je l’ai dit hier à plusieurs reprises, il faut parfois, dans la loi, indiquer les choses et tracer des perspectives.
Je partage l’avis de Mme la rapporteur et de M. le ministre : cet amendement ne servira à rien, car cela relève de l’arrêté, c’est purement administratif. Même si rien ne sera changé au final, il y a des moments où le Parlement doit se saisir de ces sujets. En défendant, hier, plusieurs amendements similaires, je me suis exprimé de la même façon.
Il est vrai que la loi ne doit pas être bavarde et si on met des pictogrammes sur les bouteilles ou les produits dans les cantines, il faudra quand même qu’à un moment il reste suffisamment de place pour savoir de quel vin ou produit il s’agit. Je soutiens toutefois l’amendement de M. Courteau, car il faut bien qu’à un moment donné les défenseurs que nous sommes des terroirs, et, en l’occurrence, des vignes et de nos cépages, disent clairement que l’origine du vin doit être mise en évidence.
Il faut ajouter, pour que le propos soit équilibré, que nous sommes heureux de vendre du vin français à l’étranger. Dans ces pays, je ne sais pas comment il est étiqueté…
Il s’agit d’un amendement d’appel. Nous tous qui nous intéressons à la viticulture devons dire que quelque chose manque.
Nous avons déjà eu ce débat à l’occasion de l’examen de la précédente loi agricole : on ne peut pas dire que les pouvoirs publics se désintéressent de la question. Il se trouve simplement que l’administration française et les contraintes européennes sont compliquées.
Mme la rapporteur a raison de dire que l’amendement est satisfait. En revanche, les sénateurs ne sont pas satisfaits par ce qui leur a été répondu.
Voilà pourquoi, je le répète, je voterai en faveur de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je souscris aux propos et arguments développés par notre collègue Courteau. Je voudrais mettre le doigt sur deux points.
Tout d’abord, les moyens que l’État français consacre, ou entend consacrer, aux contrôles constituent un véritable sujet à caractère budgétaire. Il ne sert à rien d’édicter des règlements ou d’en inventer d’autres si on n’est pas en mesure de les faire respecter.
Ensuite, je demeure persuadé qu’en matière de contentieux pouvant résulter des contrôles effectués par l’État, notamment sur un sujet comme celui-ci, l’agriculture est un peu la variable de négociation et d’ajustement. En effet, lors d’échanges commerciaux extérieurs, l’agriculture et nos producteurs sont parfois quelque peu sacrifiés au profit d’autres secteurs industriels.
Ces arguments supplémentaires justifient, me semble-t-il, que nous votions cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Je partage les propos de Didier Guillaume. Nous avons toutes et tous à cœur deux objectifs : il faut certes éviter que la loi ne soit trop bavarde, mais aussi faire en sorte qu’elle réponde aux attentes et envoie des signes de sécurisation à celles et ceux qui se sentent fragilisés, au quotidien, par l’application de la législation existante.
Au travers de cet amendement, les parlementaires que nous sommes peuvent envoyer un signal important, celui de leur attachement aux différents vignobles, à leur qualité, à leur promotion et à leur valorisation en France comme à l’étranger.
Ce geste est important ; mon groupe votera donc en faveur de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Mon groupe votera à l’unanimité cet amendement qui va dans la bonne direction.
Il m’arrive d’aller dans les supermarchés, et j’ai parfois la faiblesse de faire un petit tour dans le rayon des vins. Lorsqu’il y a tromperie, ce ne sont pas les grands crus qui sont concernés, bien entendu, mais plutôt les vins d’entrée de gamme, plus ordinaires. Des cubitainers sont ainsi véritablement « maquillés », et il faut regarder l’étiquette de très près pour apprendre que ces vins ne sont pas d’origine française. Cela ne signifie pas qu’ils sont forcément mauvais. Néanmoins, il faudrait informer le consommateur.
Il faut lutter contre cette tromperie. Je ne sais pas si cet amendement aura un effet important, mais en tant qu’élus des territoires, nous devons soutenir nos producteurs. Nous voterons donc des deux mains, si je puis dire, l’amendement.
M. le président. La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. C’est un excellent amendement d’appel, car il faut pouvoir connaître l’origine de tous les produits.
Le groupe Les Indépendants votera donc, unanimement, pour cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Je souhaite préciser trois points.
Avec la ministre de la santé, nous avons reçu ensemble l’interprofession. La filière et le ministère de la santé ont décidé de travailler sur les pictogrammes relatifs à la consommation d’alcool à destination des jeunes, en particulier des mineurs, et des femmes enceintes. Pour le reste, il n’y a pas de restriction particulière.
Par ailleurs, vous le savez, il existe un comité mixte franco-espagnol du secteur vitivinicole. Celui-ci travaille, par exemple, sur l’étiquetage des bag in box. Pour avoir travaillé dans l’industrie de l’emballage, je sais que la mention de l’origine peut être cachée dans un pli. Cette question relève des missions du comité mixte, tout comme la lisibilité des mentions sur la provenance. De la même manière, nous allons confier au Conseil national de l’alimentation une mission sur ces sujets. Je ne change donc pas d’avis sur cet amendement, car je considère que les choses avancent.
Il faut aussi porter une parole européenne. Je le redis, j’ai pris l’engagement devant les professions agricoles et devant l’interprofession des vins et spiritueux que je soutiendrai cette demande d’un étiquetage précisant l’origine et d’extension de l’étiquetage, notamment pour les produits viticoles. (M. Didier Guillaume applaudit.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 540 rectifié bis.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe socialiste et républicain.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 178 :
Nombre de votants | 344 |
Nombre de suffrages exprimés | 327 |
Pour l’adoption | 130 |
Contre | 197 |
Le Sénat n’a pas adopté.
En conséquence, l’article 11 nonies A demeure supprimé.
Article additionnel après l’article 11 nonies A
M. le président. L’amendement n° 574 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel, Courteau et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli et Tissot, Mme G. Jourda, M. Bérit-Débat, Mme Cartron, M. J. Bigot, Mmes Bonnefoy et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 nonies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’indication du pays d’origine de la production de raisins récoltés et vinifiés dans ce pays doit apparaître sur tout récipient contenant du vin de manière claire, sur le champ visuel de l’étiquette ou sur la présentation visible au moment de l’achat, sans avoir à retourner le récipient. Ces indications doivent être inscrites dans une dimension et dans une couleur lisibles pour le consommateur dans des conditions normales d’achat et d’utilisation.
II. – Les conditions d’application de l’alinéa précédent sont fixées conformément à la procédure établie à l’article 45 du règlement (UE) n° 1169/2011 concernant l’information des consommateurs sur les denrées alimentaires.
III. – Les conditions d’application du présent article sont fixées par décret.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement va dans le même sens que le précédent. Il a pour objet d’apporter une précision sur les raisins récoltés et vinifiés. On sait que les raisins peuvent être importés dans un pays, vinifiés dans un autre et prendre l’appellation du pays où ils ont été vinifiés.
Afin que ce soit plus clair pour les consommateurs, nous demandons que soit bien mentionnée l’origine des raisins récoltés et vinifiés sur tous les contenants de vin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement poursuit les mêmes objectifs que le précédent. Pour les mêmes motifs, l’avis est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 574 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 nonies B
(Non modifié)
L’article L. 640-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – promouvoir les produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée. » – (Adopté.)
Article 11 nonies C
(Non modifié)
Après le deuxième alinéa de l’article L. 642-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Toute personne qui participe effectivement aux activités de conditionnement prévues ou non par le cahier des charges des produits vitivinicoles bénéficiant d’un signe d’identification de la qualité et de l’origine constitue un opérateur au sens du présent chapitre. » – (Adopté.)
Article 11 nonies D
(Non modifié)
La loi n° 57-1286 du 20 décembre 1957 interdisant la fabrication de vins mousseux autres que la « Clairette de Die » à l’intérieur des aires délimitées ayant droit à cette appellation d’origine contrôlée est abrogée.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, sur l’article.
M. Didier Guillaume. Cet article est important. La loi de 1957, qui est abrogée par cet article, limitait à la seule production de Clairette de Die les aires délimitées ayant droit à cette appellation d’origine contrôlée, AOC.
Si cette formulation était adaptée au contexte de l’époque, elle était depuis devenue source de contraintes et une entrave au développement de nouvelles productions.
C’est pourquoi je suis heureux, après que mon collègue Courteau a évoqué notamment les vins de l’Aude, de soutenir le maintien de cet article, et donc l’abrogation de la loi n° 57–1286 de décembre 1957, qui va permettre une évolution de la production de la Clairette de Die et du Crémant de Die. Les producteurs pourront ainsi déposer de nouveau un cahier des charges pour l’AOC Clairette de Die étendu au rosé – cet apéritif est approprié tant pour les hommes que pour les dames, lesquelles l’apprécient beaucoup ! (Sourires.) –, et par là même créer une antériorité de production de ce type de vin.
Je souhaite saluer ici le travail de ma collègue députée drômoise Célia de Lavergne, qui a beaucoup insisté sur ce sujet à l’Assemblée nationale, au sein de laquelle elle a su porter la problématique des producteurs de Clairette de Die et faire adopter cet article nouveau que – je n’en doute pas – nous allons voter très largement, voire à l’unanimité.
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 nonies D.
(L’article 11 nonies D est adopté.)
Article 11 nonies E
Après l’article L. 665-6 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 665-6-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 665-6-1. – Les exploitants d’établissements titulaires d’une licence de débit de boissons, à consommer sur place ou à emporter, ou d’une licence de restaurant indiquent, de manière lisible, sur leurs cartes ou sur tout autre support, le pays d’origine ou le lieu de provenance des vins mis en vente sous forme de bouteille, de pichet et de verre. »
M. le président. L’amendement n° 741, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Rédiger ainsi cet alinéa :
Après l’article L. 412-6 du code de la consommation, il est inséré un article L. 412-8 ainsi rédigé :
II. - Alinéa 2
1° Remplacer la référence :
Art. L. 665-6-1.
par la référence :
Art. L. 412-8
2° Remplacer les mots :
le pays d’origine ou le lieu de provenance
par les mots :
la provenance et le cas échéant la dénomination de l’appellation d’origine protégée ou de l’indication géographique protégée
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit de rendre opérationnel le contrôle de la mention de l’origine des vins sur la carte des vins vendus en restauration.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Favorable.
M. le président. L’amendement n° 413 rectifié, présenté par Mme Conconne, MM. Antiste et Lurel, Mme Jasmin, MM. Tissot et Jacquin, Mme G. Jourda, M. Iacovelli, Mme Ghali, M. Todeschini, Mme Conway-Mouret, M. Fichet, Mme Espagnac, MM. Lalande et Mazuir, Mme Guillemot et M. Raynal, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par les mots :
ainsi que celle des spiritueux mis en vente sous forme de bouteille, verre ou cocktail
La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Nous soutenons Catherine Conconne dans sa volonté d’apporter des précisions concernant l’information sur l’origine géographique des spiritueux – il s’agit en l’espèce des rhums.
Actuellement, certains rhums industriels viennent concurrencer le rhum produit en outre-mer dans les conditions du terroir. Les coûts de production industrielle de ces rhums importés étant bien inférieurs, cet amendement prévoit que l’origine géographique des spiritueux vendus par les professionnels de la restauration soit mentionnée de façon lisible sur les cartes présentées aux consommateurs, comme cet article le prévoit pour l’origine des vins.
M. le président. Le sous-amendement n° 775, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Amendement n° 413, alinéa 3
Après le mot :
bouteille
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
de verre ou de cocktail
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Je suis bien sûr favorable à l’amendement n° 413 rectifié, sous réserve de l’adoption du présent sous-amendement, qui est rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ce sous-amendement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’avis est défavorable, car il n’y a pas d’encadrement européen aujourd’hui sur la question de l’étiquetage et des mentions d’origine des spiritueux.
Le sous-amendement de Mme la rapporteur ne change rien à cet état de fait. Son adoption conduirait même à supprimer les mentions que nous avions souhaité ajouter dans la loi sur les vins en pichet dans les cartes de restaurants.
M. le président. Je mets aux voix, modifié, l’amendement n° 413 rectifié.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 nonies E, modifié.
(L’article 11 nonies E est adopté.)
Article 11 nonies F (nouveau)
Au début de l’article L. 644-6 du code rural et de la pêche maritime, sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :
« Afin d’assurer une traçabilité des produits vitivinicoles et sous réserve de la dispense prévue, le cas échéant, au deuxième alinéa du présent article, les personnes physiques ou morales récoltant des raisins de cuve sont tenues de faire une déclaration de récolte aux autorités compétentes pour la campagne viticole au cours de laquelle la récolte a eu lieu. La déclaration de récolte comprend la quantité, la superficie en production, la destination et, le cas échéant, la nature des produits vendus à un vinificateur ou livrés à une cave coopérative. Cette déclaration est faite par voie électronique.
« Certains récoltants peuvent être dispensés de la déclaration de récolte sur la base de critères objectifs et non discriminatoires. » – (Adopté.)
Article 11 nonies
Après le 3° du II de l’article 60 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Seuls les produits satisfaisant aux conditions définies au II peuvent comporter le terme “équitable” dans leur dénomination de vente. » – (Adopté.)
Article 11 decies
Après le premier alinéa de l’article L. 412-4 du code de la consommation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour le miel composé d’un mélange de miels en provenance de plus d’un État membre de l’Union européenne ou d’un pays tiers, les pays d’origine de la récolte sont indiqués sur l’étiquette par ordre décroissant d’importance de la part prise dans la composition du miel. »
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, sur l’article.
M. Fabien Gay. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je veux vous parler du miel. L’image de cet aliment est particulièrement positive dans l’opinion puisqu’on prête au produit du patient travail des abeilles ouvrières de nombreuses vertus, du point de vue tant gustatif que sanitaire.
Nous sommes l’un des pays les plus réputés pour la qualité et la variété de ses miels, qu’ils soient produits dans les plaines du Gâtinais, dans les collines de la Drôme, dans les hauteurs du Trièves ou dans les forêts profondes de Bigorre. Le problème, c’est que la grande distribution faisant de tout produit une simple course à la rentabilité a tenté d’imposer une sorte de « miel standard », produit de mélange de miels de provenances diverses.
Or le miel a une signature, comme ce peut être le cas pour un bon vin ou un fromage – nous venons d’en parler : le miel de sapin, ce n’est pas pareil que le miel de chêne ou le miel de framboisier ou d’arbousier.
Le miel, c’est un peu la nature qui vient en témoignage.
C’est la signature de la biodiversité, comme le montrent désormais les « miels urbains » récoltés dans nos villes de banlieue ou dans la capitale, qui tirent parti de la grande variété des plantations effectuées en ville.
Apiculteur est un vrai métier, à l’égal de vigneron ou d’éleveur laitier fabricant de fromages. Cela doit se respecter. Il est donc logique que l’étiquetage du miel soit précis et ne permette pas de leurrer le consommateur quant à la qualité du produit proposé. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mme Angèle Préville, ainsi que MM. Jean-Claude Tissot, Joël Labbé, Franck Menonville et Didier Guillaume applaudissent également.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 289 rectifié, présenté par M. Bizet, Mme Berthet, M. Bonne, Mme Bories, MM. J.M. Boyer, Buffet, Chatillon, Chevrollier, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mme Deromedi, M. Duplomb, Mmes Duranton et Garriaud-Maylam et MM. D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paul, Pellevat, Priou, Rapin, Revet, Vaspart et Vogel, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Après les mots :
ou d’un pays tiers
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, tous les pays d’origine de la récolte sont indiqués sur l’étiquette. »
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Au dernier alinéa du même article L. 412-4, les mots : « au premier alinéa » sont remplacés par les mots : « aux précédents alinéas ».
La parole est à M. Laurent Duplomb.
M. Laurent Duplomb. Cet amendement est défendu.
M. le président. L’amendement n° 765, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
ou d’un pays tiers
rédiger ainsi la fin de cet alinéa :
, tous les pays d’origine de la récolte sont indiqués sur l’étiquette. »
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit de rendre obligatoire un ordre d’étiquetage selon l’importance de la part prise dans la composition des mélanges de miels. C’est exactement le même amendement que le précédent.
M. le président. Monsieur le ministre, les deux amendements n’étant pas formellement identiques, il s’agit d’une discussion commune.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’amendement n° 289 rectifié revient sur un apport fondamental de la commission. L’indication des pays d’origine dans l’ordre d’importance tient compte à la fois de la variabilité des approvisionnements et de la nécessité d’informer correctement le consommateur sur l’origine des miels en cas de mélange. À défaut de cette précision, et donc avec uniquement l’affichage de la liste des pays d’origine, des conditionneurs pourraient tout à fait induire le consommateur en erreur en mettant par exemple la France en premier, alors que les produits d’origine française ne contribueraient que pour une part très faible au mélange.
Cette obligation nouvelle s’accompagne par ailleurs d’un report au 1er septembre 2020 de la date d’entrée en vigueur, de manière à laisser davantage de temps aux conditionneurs pour s’adapter à ces nouvelles exigences d’affichage.
L’avis est donc défavorable.
J’en viens à l’amendement du Gouvernement. La mention de tous les pays d’origine classés ou non par ordre d’importance, qui va au-delà du droit européen, a été le choix de l’Assemblée nationale. Il est contradictoire d’être, à la fois, pour la rédaction adoptée par les députés et contre la rédaction adoptée en commission par le Sénat sur le même fondement.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je n’ai pas pu faire d’amendement sur le sujet, mais je voudrais partager ma réflexion : je ne comprends pas qu’il y ait des mélanges de miels de plusieurs pays.
Par le passé, la France était autosuffisante en production de miel. Depuis une vingtaine d’années, cette production n’a cessé de se dégrader, et nous sommes maintenant obligés d’en importer.
On en connaît la raison : l’effondrement des colonies d’abeilles, qui est dramatique, et nous vous avons interpellé, monsieur le ministre, à plusieurs reprises sur ce sujet. Il faut vraiment que l’on sauve notre apiculture, mais aussi notre environnement. Derrière la production de miel, il y a en effet aussi une activité économique énorme réalisée par les abeilles et les pollinisateurs : la pollinisation. Il va falloir prendre cela en compte.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb.
M. Laurent Duplomb. Monsieur Labbé, il y a aujourd’hui beaucoup moins d’importation de miel qu’auparavant, pour une simple et bonne raison. Prenons les négociations bilatérales commerciales, en particulier entre les pays d’Europe et la Chine : sur 1,6 milliard d’habitants, la Chine compte 800 millions d’agriculteurs qui avaient tous une ruche. Dans tous les échanges qu’il y a eus par le passé, le miel était un élément de négociation et de paiement. C’est de moins en moins vrai aujourd’hui. Il y a même de plus en plus de producteurs et d’apiculteurs en France, et le miel français prend une part plus importante qu’auparavant.
Je souhaite que la totalité des pays soit indiquée sur l’étiquette. Mme la rapporteur nous a expliqué que ce serait le cas et qu’en plus, ils seraient classés par ordre d’importance de la part prise dans la composition du miel, au travers des pourcentages. Cela me convient très bien.
Je retire donc mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 289 rectifié est retiré.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je veux confirmer les propos de mon collègue Laurent Duplomb. La rédaction actuelle du texte adoptée par la commission est la plus protectrice possible puisque non seulement, monsieur le ministre, tous les pays y sont, mais ils le sont dans l’ordre d’approvisionnement.
C’est vraiment le système le plus protecteur que l’on peut imaginer et qui peut figurer dans la loi. J’attire votre attention sur ce point.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. L’amendement que j’ai présenté porte sur la suppression de l’obligation de l’ordre de l’étiquetage des origines du miel. Bien évidemment, il ne remet pas en question le travail que nous avions fait à l’Assemblée nationale et nous avions bien avancé sur cette question. Il faut dire à qui en revient le mérite : c’est le fruit du travail d’André Chassaigne, président du groupe GDR à l’Assemblée nationale.
Je comprends que Mme la rapporteur et la commission aient souhaité indiquer l’ordre d’importance. Le problème, c’est qu’on n’a pas le droit de le faire. Par ailleurs, des professionnels font énormément de mélanges : ils seront obligés de changer sans cesse de jeu d’étiquettes.
M. Didier Guillaume. Tant mieux !
M. Stéphane Travert, ministre. Cela peut être un problème.
L’idée est de pouvoir préciser l’origine des lieux de production. C’est ce que nous souhaitons faire, ce qui permet de donner une meilleure information à l’ensemble de nos consommateurs.
Je reste défavorable bien évidemment à la position de la commission, tout en saluant la grande avancée que nous avions faite à l’Assemblée nationale.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. La proposition de notre rapporteur est bien plus équilibrée et sûre ! Je ne comprends pas, monsieur le ministre, votre explication selon laquelle cela n’est pas possible. Je vous rappelle que la France a obtenu que l’on expérimente l’étiquetage avec l’ordre décroissant. Si on peut le faire pour le reste, pourquoi ne pourrait-on pas le faire pour le miel ? Nous avons besoin de transparence, qui doit être appliquée de la même manière et étendue.
Je soutiens fermement la proposition de notre rapporteur qui est très équilibrée et sûre. Surtout, elle apporte des réponses très attendues par les producteurs de miel dans l’ensemble de nos territoires.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Je veux prendre un moment pour dire que nous avons aujourd’hui un problème immense avec la disparition des abeilles. Au rythme où vont les choses, demain il n’y aura plus de pollinisation, de pollinisateurs et c’est la biodiversité qui s’arrêtera.
Mme Colette Mélot. C’est grave !
M. Didier Guillaume. Vous avez raison, ma chère collègue, c’est très grave ce qui est en train de se passer. Et nous le constatons dans tous les départements. Des colonies d’abeilles disparaissent régulièrement, il y a de moins en moins de ruches et d’apiculteurs. Il est important d’entendre le cri d’alarme des apiculteurs – il y a d’ailleurs eu, me semble-t-il, une réunion à l’Élysée récemment.
M. Didier Guillaume. Je sais, monsieur le ministre, que vous êtes conscient de la situation et que vous allez avancer sur cette question, car c’est indispensable.
La proposition de Mme la rapporteur ne me gêne pas du tout, mais elle semble toutefois être une surtransposition. J’avais cru comprendre que, dans cet hémicycle, nous n’étions pas forcément favorables aux surtranspositions… Alors certes – j’ai entendu les propos de notre collègue Daniel Gremillet –, cela rassure.
Mais est-on obligé d’aller plus loin ? C’est la raison pour laquelle je voterai l’amendement du Gouvernement, même si, je le sais, il ne sera pas adopté et que le texte de la commission me convient plutôt. Je ne suis simplement pas du tout d’accord pour dire que c’est la meilleure solution, parce que nous surtransposons encore une directive européenne.
M. Daniel Gremillet. Non !
M. Didier Guillaume. Si !
M. Daniel Gremillet. Non, on l’étend !
M. Didier Guillaume. De fait, c’est ce qui sera voté, donc cela ne me gêne pas, mais je pensais qu’il était plus clair de ne pas avoir la liste des pays dans l’ordre décroissant ou je ne sais trop quoi.
Néanmoins, je pense qu’on peut tous être globalement d’accord sur la prise en compte de la situation dramatique des colonies d’abeilles et de l’apiculture dans notre pays, et sur la volonté de progresser pour indiquer l’origine du miel. Ce qui sera voté me convient donc.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. J’apporterai juste une précision. Objectivement, à partir du moment où il y a mention de tous les pays d’origine, il y a surtransposition. Ce que propose la commission, c’est d’aller au bout de la démarche et d’identifier d’où viennent ces miels. (Mme Laure Darcos, ainsi que MM. Daniel Gremillet et Laurent Duplomb applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Un mot pour soutenir la proposition de la commission. Tout ce qui va dans le sens d’une meilleure information du consommateur va dans le bon sens ! Il faut rejeter tous les arguments qui peuvent être avancés, y compris celui de la surtransposition, s’ils ne vont pas dans ce sens.
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 decies.
(L’article 11 decies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11 decies
M. le président. L’amendement n° 33 rectifié septies, présenté par MM. Canevet, Longeot, Détraigne et Le Nay, Mmes C. Fournier et Joissains, MM. Henno et Janssens, Mme Vullien, M. Moga, Mme Sollogoub, MM. Kern et Delahaye, Mme Vérien, M. Vanlerenberghe, Mme Goy-Chavent, M. Prince, Mmes Billon et Létard, M. L. Hervé, Mme Guidez et MM. Cigolotti, Capo-Canellas, Delcros, Mizzon, Luche et Maurey, est ainsi libellé :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 121-3 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Seuls les produits alimentaires entièrement conçus, élevés et fabriqués en France avec des matières premières issues de la production française, peuvent utiliser des symboles ou tous autres emblèmes faisant référence à l’origine française d’un produit tels que le drapeau tricolore ou la carte de la France. »
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. On a beaucoup parlé de transparence à l’instant : il est en effet nécessaire de bien informer le consommateur. Cet amendement vise à réserver l’utilisation des symboles ou autres emblèmes de la France – par exemple, une carte de France ou bien la mention tricolore – aux seuls produits effectivement conçus ou fabriqués en France.
En effet, il faut limiter l’utilisation de ces emblèmes qui sont représentatifs pour le consommateur de ce qui est produit en France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Le code de la consommation définit déjà comme pratique commerciale trompeuse toute pratique reposant sur les « allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur et portant sur […] les caractéristiques essentielles du bien ou du service [dont] son origine ».
Mon cher collègue, l’usage du drapeau tricolore ou de la carte de France entre très clairement dans le champ de ces pratiques commerciales trompeuses, sans qu’il faille pour autant ajouter une nouvelle disposition dans la loi.
Je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je comprends bien sûr les attentes des consommateurs en termes d’information sur les origines, mais avant de prendre une nouvelle disposition, il faut tirer les enseignements de l’expérimentation qui est en cours.
L’expérimentation que nous avions obtenue de l’Union européenne se fera d’ici à la fin de l’année. Cette évaluation nous servira bien évidemment à progresser sur la question. Comme je m’y étais engagé, je demanderai que l’on puisse bénéficier d’une extension.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Monsieur Canevet, l’amendement n° 33 rectifié septies est-il maintenu ?
M. Michel Canevet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 33 rectifié septies est retiré.
L’amendement n° 34 rectifié septies, présenté par MM. Canevet, Longeot, Détraigne et Le Nay, Mmes C. Fournier et Joissains, MM. Henno et Janssens, Mme Vullien, M. Moga, Mme Sollogoub, MM. Kern et Delahaye, Mme Vérien, M. Vanlerenberghe, Mmes Billon et Goy-Chavent, M. Prince, Mme Létard, M. L. Hervé, Mme Guidez et MM. Cigolotti, Capo-Canellas, Delcros, Mizzon, Luche et Maurey, est ainsi libellé :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 121-3 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Seuls les produits agricoles issus de productions régionales peuvent utiliser des symboles ou tout autres emblèmes faisant référence à l’origine régionale d’un produit. »
La parole est à M. Michel Canevet.
M. Michel Canevet. Pour ce qui concerne mon amendement précédent, que je viens de retirer, j’ai bien compris les arguments évoqués, mais je considérais qu’il valait mieux que ce soit expressément prévu dans le code.
L’amendement n° 34 rectifié septies est un amendement de même nature, mais qui vise l’utilisation des symboles régionaux, afin de ne pas tromper le consommateur et de ne retenir ces symboles que pour les produits vraiment produits dans les régions.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Même argumentation, mon cher collègue. Aussi, demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Canevet, l’amendement n° 34 rectifié septies est-il maintenu ?
M. Michel Canevet. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 34 rectifié septies est retiré.
L’amendement n° 334 rectifié sexies, présenté par MM. Luche, Détraigne et Paul, Mme Conway-Mouret, M. Henno, Mme Micouleau, M. Joyandet, Mme Sollogoub, MM. Louault, Bonnecarrère et Laugier, Mmes Joissains et Vullien, M. de Nicolaÿ, Mmes Gatel et Goy-Chavent, MM. Janssens, Le Nay, Chasseing et Chaize, Mme Garriaud-Maylam, MM. Capo-Canellas, D. Dubois, Moga, A. Marc et Delahaye, Mmes de Cidrac et Kauffmann, MM. Wattebled et Prince, Mmes Bories et Keller, MM. Delcros, Pellevat, Charon, L. Hervé, Saury, Mizzon, Bouchet et Lafon, Mmes Conconne et Duranton et M. Maurey, est ainsi libellé :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 412-4 du code de la consommation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les produits agricoles et alimentaires et les produits de la mer à l’état transformé, le lieu de production des matières premières principales utilisées est indiqué sur l’étiquette. »
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Cet amendement va dans le sens d’une meilleure information des consommateurs. Il me donne l’occasion de rappeler le point de départ : les consommateurs sont souvent trompés par des publicités en tous genres, par des affichages ou par défaut d’information précise. Chaque fois que l’on peut aller dans le sens d’une meilleure information du consommateur, on va dans le bon sens !
Cet amendement, cosigné par de nombreux sénateurs de tous bords, vise à indiquer le lieu de production des matières premières utilisées sur l’étiquette des produits alimentaires transformés.
Pour les produits bruts, cette disposition existe déjà. Par exemple, le consommateur est libre de choisir des fraises espagnoles ou des fraises françaises.
Pour les produits transformés, il s’agirait d’inscrire le lieu de production des principaux ingrédients. Le consommateur doit pouvoir être en mesure de connaître dans quelle partie du monde est produite son alimentation. Cela éviterait des scandales, comme celui des sauces italiennes produites avec des tomates chinoises, certaines sauces étant même étiquetées en bio !
Cette disposition permettrait aussi d’être beaucoup plus transparent sur la traçabilité et l’aspect sanitaire des aliments.
Il a été signalé que cet amendement pouvait éventuellement poser difficulté au regard des textes européens. Les auteurs de l’amendement tiennent à rappeler que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne prévoit, dans son article 38, qu’un niveau élevé de protection des consommateurs est assuré dans les politiques de l’Union.
Ainsi, cet amendement semble répondre parfaitement à cet objectif européen et permettrait d’apporter aux consommateurs une information qu’ils sont en droit d’avoir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Instaurer une obligation d’étiquetage du lieu de production des matières premières principales pour les produits transformés va bien au-delà de ce qu’exige effectivement – cela a été évoqué – le droit européen.
Il nous semble essentiel que ce type de démarche soit négocié, monsieur le ministre, et harmonisé au niveau européen.
Si elle était appliquée de manière unilatérale en France, cette mesure risquerait de conduire à notre condamnation pour entrave à la libre circulation des matières.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Sur la forme, la démarche peut être intéressante, mais, sur le fond, elle pose un certain nombre de problèmes aux opérateurs : les conserveurs utilisent plusieurs produits ou espèces interchangeables suivant les marchés. En outre, cela risque de conduire à une surcharge des emballages par excès de mentions obligatoires et à un défaut de visibilité et de compréhension pour le consommateur.
Là aussi, ayons de la cohérence européenne sur ces sujets, travaillons sur l’expérimentation, attendons ses retours.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je voterai en faveur de cet amendement. On nous dit à chaque fois « l’Europe » et « il faut attendre ». Là, il y a urgence à ne plus attendre ! On l’a évoqué dans le cadre de la restauration collective : les 80 % de viande bovine dans les plats tout préparés qui sont de la viande d’importation, cela devient insupportable pour nous, en particulier lors des discussions sur ce texte.
Il s’agit d’un amendement de très bons sens, qui sera très bien perçu. Alors si ça dérange un peu les opérateurs, eh bien ils iront s’approvisionner en viande française, tout simplement ! On cessera d’aller dans le plus bas de gamme, en dessous de tout…
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 334 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons examiné 50 amendements ce matin.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.)
PRÉSIDENCE DE M. Vincent Delahaye
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
3
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre communication du décret de M. le Président de la République en date du 27 juin 2018 modifiant le décret du 18 juin 2018 portant convocation du Parlement en session extraordinaire.
Le Parlement est convoqué en session extraordinaire à partir du lundi 2 juillet 2018.
Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement a demandé l’inscription à l’ordre du jour du lundi 2 juillet, après-midi et soir, de la suite de l’examen du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
Acte est donné de ces modifications.
4
Mise au point au sujet d’un vote
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Lors du scrutin n° 176, qui a eu lieu hier, portant sur l’amendement n° 449 rectifié, j’ai été comptabilisé comme ayant voté contre, alors que je souhaitais voter pour.
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
5
Relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. Nous reprenons l’examen du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons, au sein du chapitre Ier du titre II, l’examen des amendements portant article additionnel après l’article 11 decies.
TITRE II (suite)
MESURES EN FAVEUR D’UNE ALIMENTATION SAINE, DE QUALITÉ, DURABLE, ACCESSIBLE À TOUS ET RESPECTUEUSE DU BIEN-ÊTRE ANIMAL
Chapitre Ier (suite)
Accès à une alimentation saine
Articles additionnels après l’article 11 decies (suite)
M. le président. Toujours après l’article 11 decies, je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 776, présenté par Mme Loisier, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant l’article L. 236–1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 236–1 A ainsi rédigé :
« Art. L. 236–1 A. - Il est interdit de proposer à la vente ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine ou animale des denrées alimentaires ou produits agricoles ayant fait l’objet d’un traitement ou issus d’un mode de production non autorisés par les réglementations européenne et nationale ou ne respectant pas les exigences d’identification et de traçabilité imposées par lesdites réglementations.
« L’autorité administrative prend toutes mesures de nature à faire respecter l’interdiction prévue au premier alinéa. »
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur de la commission des affaires économiques. Cet amendement tend à revenir sur la concurrence déloyale de certaines productions étrangères qui, bien que commercialisées en France, ne respectent pas les normes européennes et françaises imposées par ailleurs à nos agriculteurs, du point de vue tant des traitements que des modes de production.
Sont en particulier visés le traitement par des produits phytopharmaceutiques dont l’usage est interdit en France et dans l’Union européenne, l’utilisation des antibiotiques comme activateurs de croissance, l’inclusion de farines animales dans l’alimentation des bovins ou encore le non-respect des normes environnementales ou des exigences d’identification et de traçabilité.
Au-delà de la distorsion de concurrence qu’elles engendrent pour nos agriculteurs, ces importations de denrées ou de produits constituent une menace tant pour la santé publique que pour l’environnement.
Il importe donc d’assurer l’effectivité d’interdictions certes déjà posées par le droit européen et français, mais que certains produits importés parviennent aujourd’hui à contourner.
Le présent amendement vise en outre, monsieur le ministre, à interpeller le Gouvernement sur la nécessité, d’abord, de renforcer les moyens dédiés au contrôle de ces normes par les services des douanes et de la répression des fraudes, afin qu’ils puissent mener des campagnes de contrôle plus massives, plus régulières et donc plus fiables ; ensuite, d’exiger systématiquement, dans chaque accord de libre-échange, la possibilité de faire des contrôles in situ, car bon nombre de pratiques ou de traitements ne sont plus décelables à la réception des produits en France ; enfin, de mettre en œuvre systématiquement des clauses de sauvegarde pour suspendre l’importation de telle ou telle production qui utiliserait des produits interdits en France et en Europe, comme cela a déjà été fait pour les fameuses cerises turques ayant été soumises à l’utilisation d’insecticides dangereux.
Je profite de cette occasion pour vous interpeller, monsieur le ministre, à la suite du vote récent, à Bruxelles, de l’interdiction d’importer des produits carnés ayant reçu des antibiotiques activateurs de croissance. Le texte est en cours de traitement ; nous espérons une publication au Journal officiel de l’Union européenne en octobre prochain. Allez-vous, monsieur le ministre, vous emparer, comme sur le sujet des glyphosates, de cette question, afin que les règlements d’application puissent être mis en œuvre le plus rapidement possible ?
M. le président. L’amendement n° 265 rectifié ter, présenté par M. Adnot, Mme Perrot et MM. Revet, Savary et Cuypers, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 566 rectifié ter, présenté par Mme Bonnefoy, MM. Cabanel, Montaugé, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Cartron, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville et Tocqueville, M. Kanner, Mmes Monier, Lienemann et Artigalas, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Conconne, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Il est interdit d’importer, de détenir en vue de la vente ou de la distribution à titre gratuit, de mettre en vente, de vendre ou de distribuer à titre gratuit des denrées alimentaires traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant des résidus de substances actives non autorisées par les autorités communautaires. »
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement, que nous avons déjà proposé en commission, vise à interdire l’importation, la vente ou la distribution à titre gratuit de denrées alimentaires traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant des résidus de substances actives non autorisées par les autorités communautaires. Il s’agit de préserver la santé de nos concitoyens, tout en luttant aussi contre les distorsions de concurrence entre producteurs européens et non européens.
Nous avons tous en tête l’exemple de l’épisode du diméthoate de 2016 ; face à des risques liés à la consommation humaine et à la suite de la décision de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, de retirer l’autorisation de mise sur le marché de cet insecticide, le Gouvernement avait déclenché une clause de sauvegarde pour interdire la commercialisation en France de cerises traitées avec ce produit.
Cet amendement tend donc à généraliser ce principe, sans avoir à passer par une décision gouvernementale, parce qu’il n’est plus acceptable que nous puissions avoir sur notre marché des denrées traitées avec des produits que nous savons dangereux pour la santé humaine et que nous avons d’ailleurs interdits.
Je vous invite donc à voter notre amendement, qui est de bon sens.
M. le président. Les cinq amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 160 rectifié bis est présenté par MM. Chasseing, Malhuret, A. Marc, Guerriau, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, MM. Wattebled, Capus et Fouché, Mmes Vullien et Goy-Chavent, MM. Longeot, Lefèvre, de Legge et Mandelli, Mme Joissains et MM. Henno, Mizzon, Bonnecarrère, Nougein et Canevet.
L’amendement n° 206 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 248 rectifié ter est présenté par M. Delcros, Mme Gatel, MM. Louault, Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe et Delahaye, Mme Billon et MM. Kern, Le Nay, Détraigne et Luche.
L’amendement n° 466 rectifié ter est présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mmes N. Delattre et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
L’amendement n° 648 rectifié ter est présenté par MM. Gremillet et Duplomb, Mme Bruguière, MM. Pointereau et Reichardt, Mme Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, MM. Piednoir, Paul, Mouiller et Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Joyandet, Morisset, Revet, Huré, Danesi et Savary, Mmes Lassarade et Lanfranchi Dorgal, MM. Sido, Rapin, Pierre et Charon, Mmes Deromedi, Lamure, Bories et de Cidrac, M. Priou, Mme Gruny, MM. Longuet, Pillet et Babary, Mme Imbert, MM. Saury, Bouchet et Poniatowski, Mmes Duranton et Berthet et MM. Cornu, Vaspart, Bonne et Laménie.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 253–8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Il est interdit de proposer à la vente en vue de la consommation humaine ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine des denrées alimentaires traitées avec des produits phytopharmaceutiques contenant des résidus de substances actives non approuvées conformément au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil. »
La parole est à Mme Colette Mélot, pour présenter l’amendement n° 160 rectifié bis.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à interdire l’importation en France de denrées produites en utilisant des substances interdites dans l’Union européenne, même à doses résiduelles. Il s’agit de ne pas laisser subsister de distorsion de concurrence entre les producteurs européens et les producteurs des pays tiers, tout en protégeant la santé publique et l’environnement.
Certaines molécules chimiques interdites en Union européenne sont pourtant utilisées dans des pesticides à l’étranger pour traiter des produits destinés à l’exportation vers l’Union. Le rapport de la commission Schubert sur les impacts de l’accord économique et commercial global, le CETA ou Comprehensive Economic and Trade Agreement, répertorie aussi quarante-six molécules interdites dans l’Union européenne, mais autorisées dans les produits exportés vers l’Union, comme l’Atrazine, interdite dans l’Union européenne depuis le début des années 2000.
Une telle situation n’est pas tenable pour les agriculteurs français dont les produits agricoles doivent respecter des pratiques agricoles plus coûteuses et qui se trouvent concurrencés par ceux de producteurs étrangers ayant des contraintes environnementales moindres.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° 206 rectifié.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement va dans le même sens que le précédent.
Selon un rapport publié par l’Agence européenne de sécurité des aliments, 6,5 % des aliments importés en Union européenne depuis des pays tiers contiennent des résidus de pesticides au-dessus de la limite autorisée. Selon cette agence, les données collectées en 2014 montraient une légère hausse des aliments importés contenant un excès de résidus de pesticides par rapport à 2013, année où ils représentaient 5,7 %.
Lors des contrôles effectués en 2014, un total de 3 265 échantillons a dépassé ces limites, dont la grande majorité était des produits importés. Parmi ceux-ci, 1 253 contenaient des pesticides non autorisés par l’Union européenne.
Or, ces dernières années, selon les statistiques des douanes, seulement une poignée de produits ont été interdits. C’est pourquoi, tout en continuant d’aller dans la voie de la réduction des produits phytosanitaires, il est nécessaire d’arrêter l’importation de produits qui ont été traités par des molécules interdites en France.
Cela me permet de vous reposer la question que l’on vous a posée à plusieurs reprises, monsieur le ministre, sur le CETA et sur le MERCOSUR.
M. Fabien Gay. Absolument !
M. Guillaume Gontard. Tel est le sens de notre amendement.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 248 rectifié ter.
M. Bernard Delcros. Les collègues ont bien expliqué le sujet. Il y a évidemment un enjeu de distorsion de concurrence, mais il y a plus encore un enjeu de santé publique.
On voit bien, en effet, l’incohérence de la situation. On interdit aujourd’hui en France, à juste titre, l’utilisation d’un certain nombre de substances pour produire des denrées, mais on importe par ailleurs, pour la consommation des résidents de notre pays, des denrées sur lesquelles on a utilisé ces substances. On voit bien, je le répète, l’incohérence de la situation ; j’ai même envie de dire que l’on a l’impression de marcher sur la tête, quand on voit cela.
Il faut mettre fin à cette situation.
M. Joël Labbé. Ce sera dans le même esprit, et on n’en a pas fini parce qu’il y a d’autres molécules que l’on va interdire, j’en suis convaincu, en France. Je pense notamment aux produits ayant des effets cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction, dits « CMR ». On ne pourra plus les tolérer et on trouvera sans tarder des majorités pour voter leur interdiction. C’est nous qui allons tirer l’ensemble de l’Europe et du monde entier vers le haut !
Il s’agit évidemment d’éviter la distorsion de concurrence, mais aussi, notre collègue Delcros l’a dit, de préserver la santé publique, ainsi que la biodiversité. En effet, sur ces sujets, on est complètement à côté de la plaque !
Cet amendement vise à interdire l’importation en France de denrées produites en utilisant des substances interdites en Union européenne. Il s’agit de ne pas introduire de distorsion de concurrence, je l’ai dit – nos producteurs y sont extrêmement sensibles, et cela se comprend –, tout en protégeant la santé publique et l’environnement.
Nous avons déjà évoqué cette question à de nombreuses reprises. Nous pouvons faire tous les efforts possibles pour tenter de répartir la valeur et de mieux rémunérer nos producteurs, mais, tant que nous serons soumis à un commerce international dérégulé, nos efforts seront en partie sans effet. Notre agriculture, à laquelle nous tenons tous, est exposée à la concurrence de denrées produites dans des conditions qui n’ont rien à voir avec celles qui se pratiquent dans notre pays, au point de vue tant social que sanitaire et environnemental. Ce n’est acceptable ni pour les consommateurs ni pour les producteurs.
Il s’agit aussi de ne pas favoriser ces modes de production dans les autres pays du monde. Chaque région, plutôt que de s’engager dans une course au moins-disant et de développer des filières d’exportation à grand renfort d’intrants et de phytosanitaires, doit retrouver une souveraineté alimentaire ; qu’on se l’applique aussi en France !
Pour revenir sur mes engagements, j’avais annoncé une demande de scrutin public sur cet amendement ; je la maintiens. (Mme la rapporteur proteste.)
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 648 rectifié ter.
M. Daniel Gremillet. Cet amendement correspond à l’acte I de la résolution, que nous avons adoptée ici, sur l’interdiction d’importer des produits alimentaires n’étant pas soumis aux mêmes contraintes que celles que l’on s’impose en Europe et à l’échelon national. Je serais tenté de dire que cet amendement va encore plus loin, monsieur le ministre, puisque nous sommes en train de donner, au travers de ce projet de loi, une nouvelle dimension à l’alimentation et au rôle de l’agriculture française.
L’acte II consiste à faire en sorte que les contraintes supplémentaires que nous sommes en train d’instaurer et que les valeurs supplémentaires que nous sommes en train d’adopter soient respectées par ceux qui ont envie de vendre des produits dans notre pays.
Au-delà de la distorsion de concurrence pour les agriculteurs et pour les entreprises agroalimentaires, il y a un autre aspect : le respect des consommateurs. Puisque l’on parle beaucoup de demande sociétale, à laquelle l’agriculture devra répondre, il faut s’assurer que ce que les consommateurs trouveront dans leurs assiettes – ce qui sera vendu en Europe et surtout chez nous – corresponde à ce qu’ils auraient la chance de trouver grâce au travail réalisé par les agriculteurs et par les entreprises de nos territoires.
C’est aussi un amendement important vis-à-vis des obligations de vos services, monsieur le ministre. Cette disposition ne doit pas se limiter à des intentions ; il faut exercer les contrôles et s’assurer que les produits importés correspondent bien aux règles que nous sommes en train de définir.
M. le président. L’amendement n° 177 rectifié bis, présenté par MM. Houpert, Morisset et Longeot, Mme Goy-Chavent, MM. Grand, Bazin, Lefèvre et Pellevat, Mmes Joissains et Lassarade, MM. Buffet et Poniatowski, Mme Gruny, MM. Vogel et Paccaud, Mme Lopez, MM. Guerriau, Grosdidier, Milon, Kern et Revet, Mme Delmont-Koropoulis, M. Bonnecarrère, Mmes Garriaud-Maylam et Bonfanti-Dossat, M. Joyandet, Mme Deromedi, M. Brisson, Mme M. Mercier, MM. Cuypers et Daubresse, Mme de Cidrac, MM. Babary et Le Gleut, Mme Billon et MM. Meurant et Leleux, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 161 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing, Malhuret, A. Marc, Guerriau, Decool et Lagourgue, Mme Mélot, MM. Wattebled, Capus et Fouché, Mmes Vullien et Goy-Chavent, MM. Longeot, Lefèvre, de Legge et Mandelli, Mme Joissains et MM. Henno, Mizzon, Bonnecarrère, Nougein et Canevet, est ainsi libellé :
Après l’article 11 decies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 253–8 du code rural et de la pêche maritime est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« … – Il est interdit de proposer à la vente en vue de la consommation humaine ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine des denrées alimentaires ou des produits agricoles issus de méthodes de production interdites en France et dans l’Union européenne. »
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à interdire l’importation en France de denrées produites en utilisant des substances interdites dans l’Union européenne et en France, même à doses résiduelles – produits phytopharmaceutiques, farines animales ou encore antibiotiques activateurs de croissance.
Il s’agit de ne pas laisser subsister de distorsion de concurrence entre les producteurs européens et les producteurs des pays tiers, tout en protégeant la santé publique et l’environnement.
Le rapport de la commission Schubert sur les impacts du CETA répertorie les activateurs de croissance et les produits phytosanitaires – quarante-six molécules – interdits dans l’Union européenne mais autorisés dans les produits exportés vers l’Union européenne, comme l’Atrazine, interdite dans l’Union depuis le début des années 2000.
Une telle situation n’est pas tenable pour les agriculteurs français, dont les produits agricoles doivent respecter des pratiques plus coûteuses et qui se trouvent concurrencés par ceux de producteurs étrangers ayant des contraintes environnementales moindres.
Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion, à l’exception de celui qu’elle a elle-même présenté ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’ensemble de ces amendements visent tous, selon des modalités pouvant diverger, à interdire la commercialisation en France des produits importés qui ne respectent pas les normes européennes et françaises, en matière de traitement, pour les premiers amendements, ou de mode de production, pour les deux derniers.
Nous l’avons dit, ces préoccupations sont légitimes, mais elles sont intégralement satisfaites par la rédaction de l’amendement de la commission, qui est englobante. En effet, notre amendement tend à prendre en compte les traitements, les modes de production pour les denrées humaines et animales, ainsi que la traçabilité et l’identification.
Je vous propose donc, mes chers collègues, de retirer vos amendements au profit d’un vote unanime pour l’amendement de la commission.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Je veux profiter de la discussion de ces amendements pour répondre à un certain nombre d’interrogations.
D’abord, la question des CMR est quelque chose que l’on porte à l’échelon européen, et cela fait partie de la feuille de route sur la sortie et la réduction des pesticides que le Gouvernement soutient. Nous travaillons sur la sortie des produits au fur et à mesure que nous avançons dans nos travaux.
Sur le CETA, j’entends encore un certain nombre de choses. Je veux juste rappeler un chiffre : à ce jour, à peine 100 tonnes de viande du Canada sont arrivées sur le territoire européen ; ce n’est donc pas une arrivée massive, comme on aurait pu le penser. Ne nous faisons pas peur non plus avec cela…
Concernant le MERCOSUR, une session de négociation est prévue au début de juillet ; s’il n’y a pas de signature à ce moment-là, vous le savez, cela mettra encore du temps puisqu’il y aura ensuite les élections européennes puis le renouvellement de la Commission. (M. Fabien Gay s’esclaffe.) En outre, dès lors que l’accord sera signé, il y aura six ans de mise en application, donc on a le temps de travailler avec les filières afin de prévoir tous les garde-fous nécessaires pour les protéger.
Je veux aussi vous redonner deux ou trois éléments sur la feuille de route relative aux produits phytopharmaceutiques, en commençant par l’objectif de réduction de 50 % de leur utilisation à l’horizon de 2025, avec une priorité : diminuer l’utilisation des substances les plus préoccupantes pour la santé et pour l’environnement.
Nous voulons réviser les dispositifs d’évaluation européenne, accélérer la sortie des molécules les plus préoccupantes vis-à-vis de l’Union européenne, je viens de le dire, diminuer la quantité de pesticides utilisés, revoir la redevance pour pollution diffuse en ciblant les substances les plus préoccupantes, mais aussi mieux connaître les impacts pour informer et protéger notre population et l’environnement.
Donc, là aussi, nous misons sur la recherche et sur son impact sur la santé et sur la biodiversité, en encourageant une meilleure coordination des instituts de recherche, avec l’Agence nationale de la recherche, l’ANR, et l’ensemble des agences concernées, en actualisant l’expertise collective de l’INSERM sur les pesticides, notamment pour améliorer le dispositif de reconnaissance des maladies professionnelles et, enfin, en mettant en place une campagne exploratoire de la surveillance des pesticides dans l’air.
Nous avons besoin de favoriser la recherche et le développement pour trouver des méthodes alternatives pour les agriculteurs. Il faut renforcer la recherche au travers de la mobilisation des instituts et le développement du biocontrôle. Nous voulons faciliter le recours aux préparations naturelles peu préoccupantes, tout en préservant, évidemment, une évaluation sanitaire et environnementale préalable. Cela passe par le développement de la formation, par la réorganisation du conseil, par les stratégies et les plans de filière ; n’oublions pas que, dans tous les plans de filière qui nous ont été adressés – plus de trente-cinq –, il y a des engagements, notamment dans les filières végétales, sur la réduction de l’utilisation des pesticides, et nous suivons ce parcours.
Nous souhaitons développer la certification de haute valeur environnementale, la HVE, et du plan Ambition bio, sur lequel je ne reviens pas. Enfin, nous nous appuyons sur le grand plan d’investissement pour recourir à tous les moyens innovants permettant de développer notre agriculture. Nous souhaitons également renforcer le plan Écophyto II et son fonctionnement.
Voilà les objectifs que nous portons dans la feuille de route de la politique de l’alimentation 2018–2022, et c’est la France qui le fait. La France est devant, sur ces sujets, et nous devons aussi travailler à des réponses européennes.
J’en viens aux amendements présentés, notamment à celui que propose Mme Loisier, rapporteur de la commission.
Je vous rejoins tous pour dire que les produits importés doivent respecter les mêmes normes que ceux qui sont produits en Union européenne, tant pour les consommateurs que pour les producteurs et les transformateurs. Toutefois, la réglementation en matière d’importation de produits destinés à la consommation humaine ou animale est définie à l’échelon européen et ne peut l’être qu’à ce niveau.
Je souhaite rappeler que les denrées alimentaires d’origine animale importées sont soumises à un contrôle sanitaire lors de leur introduction sur le territoire de l’Union européenne, et peuvent ensuite circuler librement entre les États membres dans le cadre du marché unique.
Prendre une telle mesure en droit français, d’une part, ne serait pas efficace parce que, vous le savez comme moi, il y a des produits qui entrent par d’autres États membres, sur lesquels on appose un beau logo « UE » et qui peuvent circuler sur tout le territoire européen et arriver en France – nous avons donc besoin de cette réponse européenne pour être cohérent avec notre objectif –, et, d’autre part, pourrait conduire à une situation dans laquelle un autre État membre respecterait le droit de l’Union, mais n’appliquerait pas sa surtransposition française, ce qui nous exposerait à un contentieux devant la Cour de justice de l’Union européenne, que nous perdrions.
La France porte systématiquement à l’échelon européen la position consistant à conditionner les concessions commerciales de l’Union européenne à des garanties relatives au mode de production, y compris en matière de promoteurs de croissance et de traçabilité, et à les inscrire dans les limites soutenables pour les filières en cause. C’est ce que nous faisons sur les accords commerciaux.
C’est ainsi que la position de la France – c’est important, et cela me permet de répondre à la question posée – a porté ses fruits, madame. En matière de médicaments vétérinaires, la France a défendu vivement le fait que les viandes importées ne soient pas issues d’animaux ayant reçu des antibiotiques comme promoteurs de croissance. C’est un enjeu de santé publique, car les antibiotiques délivrés comme tels concourent au développement de l’antibiorésistance. Cet accord a été obtenu par le Parlement et par le Conseil de l’Union courant juin, il y a quelques jours, effectivement ; je me félicite de ces avancées.
Pour l’ensemble de ces raisons – ce travail est entamé et nous devons trouver une réponse européenne et maintenir la cohérence européenne –, j’émets un avis défavorable tant sur l’amendement de la commission que sur les autres amendements présentés.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Je viens d’écouter vos arguments, monsieur le ministre, et on ne peut que se féliciter de l’unanimité du Sénat, qui va dans le sens de nos agriculteurs, lesquels veulent s’orienter vers une agriculture durable et de qualité. (M. Laurent Duplomb s’exclame.) Je pense que nous assumons nos responsabilités, même si j’ai bien entendu les limites que vous venez de souligner du point de vue de la distorsion de concurrence vis-à-vis des autres pays européens.
Néanmoins, quelques orateurs ont cité l’exemple des cerises qui contenaient une matière active que la France avait interdite, le diméthoate. Aujourd’hui, en France, 50 % des cerises que nous consommons proviennent de ce que nous produisons ; donc nous importons 50 % de notre consommation.
Dans ce cadre, si le Sénat assume ses responsabilités avec l’unanimité sur toutes les travées, je vous demande comment vos services assumeront les leurs, monsieur le ministre. En effet, je vous le disais ce matin, reprenant un article d’un journal du sud de la France relatif à des produits espagnols, les services de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, ont toutes les peines à contrôler ces produits en raison d’effectifs faibles. Eu égard à la volonté du Gouvernement de supprimer 120 000 fonctionnaires, je me pose une question : seront-ils supprimés au sein de la DGCCRF, ce qui nous paraît impossible au regard de la décision que nous sommes sur le point de prendre ?
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Premièrement, si nous sommes tous d’accord pour défendre l’agriculture française et pour dire qu’il ne faut pas que des produits entrent en ne respectant pas les règles que nous imposons aujourd’hui, c’est parce que nous sommes déjà, selon moi, dans une agriculture saine et durable.
Deuxièmement, monsieur le ministre, vous ne nous convainquez pas du tout. Si vous n’êtes pas vous-même en capacité de défendre ces amendements, de faire en sorte que les choses soient clairement dites et de défendre la position de la France à l’échelon européen, quand y arriverons-nous ?
M. Laurent Duplomb. On ne peut pas continuer de demander à tous nos agriculteurs de courir un 100 mètres en leur accrochant un boulet de plus en plus gros au pied ! Malheureusement, monsieur le ministre, le titre II de votre projet de loi revient encore à faire grossir et à faire peser un peu plus ce boulet…
Donc, faites-le si vous avez envie de le faire, mais, au moins, donnez-leur ce plaisir, travaillez à l’échelon européen pour imposer votre marque et la marque de la France, afin que l’on respecte des choses de bon sens et de pragmatisme. On ne peut pas demander plus de choses aux agriculteurs, alors que M. le Président de la République reçoit le Premier ministre argentin et lui tape dans le dos en disant que l’on va accélérer les accords avec le MERCOSUR ! On sait pertinemment que ces accords concernent des produits qui ne respectent pas les règles de nos productions françaises.
M. Fabien Gay. Il faut refuser ça.
M. Laurent Duplomb. Donc, un peu de cohérence, un peu de motivation, et allez-y, nous serons derrière vous !
M. le président. La parole est à M. Jean-Paul Émorine, pour explication de vote.
M. Jean-Paul Émorine. Monsieur le ministre, je vous écoute depuis longtemps dans tous les avis que vous émettez sur les amendements. Vous répondez toujours « nous sommes en train d’y travailler ».
M. Jean-Paul Émorine. Je ne dis pas que vous n’y travaillez pas (Sourires.), mais je veux vous rendre attentif à quelque chose. Vous parlez des accords CETA avec le Canada ; l’agriculture canadienne, c’est plus de deux fois l’agriculture française. Vous évoquez aussi les tonnages, mais cela ne correspond pas à la négociation à l’échelon européen ; on évoque 45 000 tonnes sur l’espace européen.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Certes, mais aujourd’hui !
M. Jean-Paul Émorine. Qu’est-ce qui pose problème, aujourd’hui, à notre pays ? Je vous l’ai démontré hier, les éleveurs n’arrivent pas à dégager une marge suffisante pour avoir des conditions de vie décentes.
L’autre problème, s’agissant du MERCOSUR, est que l’on est dans deux mondes différents. Vous négociez avec des espaces dix ou quinze fois plus grands que l’espace français. Dans les pays du MERCOSUR, il n’y a pas d’hiver, l’herbe y pousse toute l’année.
Quant aux conditions sanitaires, je vais vous donner un exemple. J’ai rédigé, voilà quelques années, un rapport d’information sur une épizootie de fièvre aphteuse. La France était bloquée pour deux cas de fièvre aphteuse sur son territoire. Eh bien, figurez-vous que, selon l’Office international des épizooties, l’OIE, auprès duquel les pays doivent déclarer – il n’y a pas d’inspection – les épizooties, il y avait au Brésil une fièvre aphteuse endémique, ce qui n’empêchait pas ce pays d’exporter ! J’appelle donc votre attention sur ce point.
Je partage l’analyse de la commission et des auteurs des autres amendements. Mon collègue Laurent Duplomb vient de le dire, nous ne pouvons pas être rigoureux pour la production française – j’y suis moi-même tout à fait favorable – et nous défausser en permanence sur des règlements européens, que vous voulez faire évoluer. Donc inscrire cette disposition dans le projet de loi vous aiderait à négocier à l’échelon européen.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. L’amendement de la commission, présenté par le rapporteur, permet d’enrichir le texte.
Je veux prendre un exemple très concret, celui de l’identification des animaux. Vous le savez très bien, monsieur le ministre, quand vos services font des contrôles en France, s’ils se présentent dans un élevage et qu’un animal n’a aucune boucle, celui-ci va à l’équarrissage. Or il y a aujourd’hui des importations de viande provenant de pays où les animaux sont bouclés juste avant d’être embarqués pour l’Union européenne. Voilà un exemple très concret, dans lequel il n’y a aucune traçabilité, aucune certitude de ce qu’il est passé dans la vie de l’animal par rapport aux exigences que l’on peut avoir à l’échelon national.
Le texte que nous examinons instaure des contraintes supplémentaires au-delà des règles européennes. On ne peut donc pas, d’un côté, imposer aux agriculteurs français cet effort et faire peser sur eux ces charges nouvelles et, de l’autre, ne pas accepter que des produits venant d’ailleurs, y compris de pays de l’Union européenne, car c’est une véritable distorsion par rapport à nos collègues européens, soient examinés en fonction des règles que nous aurons définies dans le texte que vous êtes en train de présenter.
L’amendement de notre rapporteur va au-delà, puisqu’il tend même à prévoir les moyens de contrôle au niveau national, car, comme notre collègue Henri Cabanel l’a souligné, ils n’existent pas aujourd’hui.
Nous avons les moyens de contrôler ce que font nos paysans, mais pas les produits importés. C’est un simple problème de justice et d’équité : revenons les pieds sur terre !
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Monsieur le ministre, nous en revenons à la question du libre-échange. D’ailleurs, je suis très satisfait de la position quasi unanime du Sénat. Nous appartenons tous à des partis politiques représentés au Parlement européen. Certains versent des larmes de crocodile, mais je leur rappelle que leur groupe vote des deux mains tous les traités de libre-échange. D’ailleurs, il serait bon que vous interpelliez vos députés européens, car treize traités sont en cours de négociation. Si vous voulez vous y opposer et tenir le même discours localement devant les agriculteurs, dans cet hémicycle et à l’échelon européen, il est encore temps d’agir !
Monsieur le ministre, considérons-nous que l’agriculture est un bien commun de l’humanité qui doit être sorti des traités de libre-échange, une exception culturelle ? Je vous pose la question parce que nous avons un débat de très haut niveau, ce qui n’est pas le cas avec tous les ministres. J’ai eu l’occasion d’interroger le ministre de la transition écologique et solidaire, qui m’a répondu de ne pas m’inquiéter, que le CETA serait encadré. Mais vouloir encadrer un traité de libre-échange, c’est comme mettre des barrières en carton-pâte pour contenir un troupeau de taureaux : l’effet est nul !
Monsieur le ministre, nous avons eu l’occasion de débattre d’un traité de libre-échange avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Nous étions d’accord, y compris avec nos collègues de l’opposition, mais une interrogation demeure. Nous n’avions pas encore négocié le plan de répartition des quotas agricoles découlant du Brexit que nous étions déjà en train de parler avec deux mastodontes : nous nous mettons nous-mêmes en difficulté !
Pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande se posent les problèmes de l’utilisation d’hormones de croissance et de la décontamination chimique des carcasses, dont la traçabilité est très difficile. Je voudrais que vous me répondiez à ce sujet.
Enfin, pour prolonger le débat avec vous, monsieur le ministre, je vous offre Le Traité avec le Canada mis à nu, de Patrick Le Hyaric, que j’ai retrouvé pendant la suspension.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Je veux revenir sur le vote récent à Bruxelles de l’interdiction d’importer des produits carnés ayant été traités avec des antibiotiques activateurs de croissance.
Nous nous en réjouissons tous, monsieur le ministre, c’est un grand pas, mais nous nous réjouirons encore davantage de la mise en application rapide de cette décision. Il ne faudrait pas que la Commission mette trois ans à publier les règlements d’application.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Donc nous comptons sur vous pour que ce dispositif s’applique rapidement et puisse s’imposer dans le cadre des traités de libre-échange CETA, MERCOSUR et tous les autres.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Il est de ma responsabilité de défendre l’agriculture française, les agriculteurs, mais aussi l’agriculture européenne et ce qu’elle peut représenter.
Effectivement, il y a des avancées sur l’utilisation des antibiotiques et le règlement européen n° 178/2002. La France, avec le plan Écoantibio, est d’ailleurs nettement en avance par rapport à de nombreux pays. Nous avons démontré que nous savions travailler avec les éleveurs. C’est grâce à eux et aux vétérinaires que nous avons pu diminuer de 33 % l’usage des antibiotiques, alors que nous avions fixé un objectif de 25 %. Nous devons continuer à travailler ainsi.
Ensuite, gardons-nous de nous faire peur ! Je comprends, j’entends les inquiétudes que peuvent susciter un certain nombre d’accords commerciaux passés ou à venir. Reprenons-les les uns après les autres.
Pour ce qui concerne l’Australie et la Nouvelle-Zélande, le mandat de négociation n’est pas encore connu, même si l’on entend beaucoup d’extrapolations sur le sujet. Pour l’instant, rien n’a démarré. Je vous rappelle que c’est l’Union européenne qui négocie, et que la France, comme sur le MERCOSUR et le CETA, fera valoir ses intérêts et ses lignes rouges.
Sur le MERCOSUR, il est normal que le Président de la République reçoive le président argentin. Avec lui, j’ai reçu une délégation argentine pour échanger sur cet accord. Celui-ci comporte des éléments positifs pour la France, notamment sur la construction automobile, mais à aucun moment nous ne faisons d’échanges du type l’automobile contre la viande bovine. Non, nous avons fixé des lignes rouges de négociation, à savoir une limite de 70 000 tonnes de viande bovine là où les contingents pourraient dépasser, selon certains, les 100 000 tonnes. Il a ensuite été question du sucre, puis d’autres produits.
Le mandat sur le MERCOSUR n’est pas encore signé par l’Union européenne. Une nouvelle session de négociation démarre début juillet ; nous verrons à ce moment-là. La France défend ses lignes rouges à Bruxelles et au Luxembourg. Nous sommes d’ailleurs douze pays à nous associer à la défense de ces lignes rouges, également dans l’enceinte du COPA-COGECA, pour permettre à nos filières de vivre et de travailler.
À travers ce texte, nous sommes justement en train de donner aux filières la capacité de résister à tout cela. En ce qui concerne l’ouverture internationale, il faut saluer l’accord signé avec la Chine pour exporter 30 000 tonnes de viande bovine. C’est tout de même important !
M. Ladislas Poniatowski. C’est un bon accord !
M. Stéphane Travert, ministre. Ouvrir la restauration collective aux produits sous SIQO, c’est donner des débouchés commerciaux à nos filières, en particulier à la filière bovine. Comme je l’ai indiqué hier, 70 % de la viande bovine servie dans la restauration collective vient de l’étranger. La filière a une responsabilité, et nous sommes prêts à l’accompagner pour y travailler.
Le CETA, je le rappelle, s’est traduit pas l’importation de 100 tonnes de viande sur le continent européen. Là encore, pas de grandes peurs. Certes, le contingent est de 70 000 tonnes, mais au train où vont les choses, nous devrions être tranquilles. Il faut mettre ces 100 tonnes importées dans le cadre du CETA en regard des 30 000 tonnes exportées en Chine, de l’ouverture de nouveaux débouchés commerciaux, de la réouverture de la route vers le marché turc pour la viande bovine. Nous avons aussi pu apporter la démonstration que nous avions une filière de qualité, que nous pouvions exporter des produits sans danger pour les consommateurs.
Sur le CETA, le Gouvernement avait mis en place un plan d’action rappelant les lignes rouges sur la protection de nos standards sanitaires, réglementaires, afin de faire en sorte que pas un gramme de viande qui ne correspondrait pas à ces règles n’entre sur le territoire français.
Toutefois, je vous l’ai dit, nous devons aussi élaborer une réponse européenne. En effet, dès lors qu’une viande se retrouve avec le logo de l’Union européenne, il n’est plus permis d’exercer le contrôle stricto sensu que nous appelons de nos vœux.
Nous devons donc continuer à répéter incessamment à l’échelon européen, sans rien lâcher, au commissaire Hogan, aux membres de la Commission, que nous souhaitons que nos filières soient préservées, que l’Europe puisse développer une agriculture de qualité. J’entends votre demande autour de ces enjeux.
La clause de sauvegarde mise en place par mon prédécesseur sur les cerises tenait compte du mode de consommation des cerises fraîches en France, contrairement aux autres pays européens, ce qui comporte un danger, notamment pour les enfants. Nous avons donc interdit le diméthoate. Aujourd’hui, nous acceptons que la Turquie réexporte des cerises, parce qu’elle s’est engagée à ne plus utiliser ce produit et que nous instaurons des contrôles stricts. Nous avons des engagements, sinon nous ne l’aurions pas autorisé. Cela fait partie des échanges commerciaux que nous devons avoir.
Nous avons appliqué la clause de sauvegarde parce que les modes de consommation l’exigeaient, mais nous ne pouvons pas le faire sur tout. C’est la raison pour laquelle nous émettons un avis défavorable sur les amendements qui ont été présentés.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Nous avons des visions différentes de l’international, des accords commerciaux et de l’Europe ; c’est un fait. Il est bon que chacun émette ses convictions, mais je ne pense pas que nous réussissions à nous convaincre les uns et les autres…
M. Fabien Gay. Pourquoi pas ?
M. Didier Guillaume. Au bout du compte, si nous partons du principe qu’il existe des traités commerciaux, ceux-ci ne peuvent pas être complètement favorables à la France.
Nous sommes tout de même très contents, M. le ministre vient de l’évoquer, de pouvoir exporter du bœuf en Chine, d’ouvrir deux abattoirs, d’exporter du lait. Il faut par conséquent en importer un peu. Les chiffres que vous nous avez communiqués sont parlants, monsieur le ministre.
Je fais donc partie de ceux qui sont favorables aux traités internationaux. Il faut les négocier le mieux possible, et c’est votre responsabilité, monsieur le ministre, de taper du poing sur la table, de ne pas vous laisser tondre la laine sur le dos, comme on dit en pastoralisme. Cela relève aussi de l’Europe.
Vous avez un double travail, qui nous semble souvent insuffisamment mené. Le problème ne date pas d’aujourd’hui, ni même du précédent gouvernement, ou de celui d’avant. Jean-Paul Émorine, qui a de l’expérience, pourrait nous dire que les questionnements sont exactement les mêmes depuis qu’il siège dans cet hémicycle. Aucun traité n’est totalement bon,…
M. Fabien Gay. Ah !
M. Didier Guillaume. … mais il faut faire en sorte qu’il soit le moins mauvais possible, parce que nous ne nous en sortirons pas seuls.
Pour en revenir aux amendements, la jurisprudence de la commission varie depuis deux jours en fonction de ceux qui présentent les amendements. Nous en avons parlé avec Michel Raison, les modifications sont acceptées lorsqu’elles sont proposées par la majorité, mais refusées lorsqu’elles émanent de l’opposition. C’est la vie démocratique ! Nous verrons bien le texte qui en ressortira à l’arrivée.
M. le président. Il va falloir conclure, cher collègue !
M. Didier Guillaume. Oui, mais il me reste sept secondes, monsieur le président.
Je voterai l’amendement de la commission, partant du principe, que j’ai déjà évoqué depuis deux jours, qu’il faut parfois inscrire dans la loi des choses qui ne servent à rien – cet amendement n’apporte rien par rapport à ce qu’a dit le ministre – pour afficher des orientations politiques.
M. le président. Mes chers collègues, je vous demande de respecter les temps de parole, afin que nous puissions avancer dans la discussion.
La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Monsieur Guillaume, la question n’est pas de savoir si l’on est pour ou contre les traités internationaux.
M. Didier Guillaume. Nous n’avons parlé que de ça !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Le sujet que nous traitons cet après-midi est celui de la qualité de l’alimentation ; ce n’est pas exactement la même chose. Nous pouvons, bien sûr, avoir des avis différents sur les traités internationaux, mais le sujet, je le répète, est la qualité de l’alimentation.
Comme nous avons élaboré une proposition de résolution européenne pour indiquer ce que nous attendons de la PAC,…
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. … il s’agit là d’un vote symbolique pour dire que nous ne souhaitons pas importer sur notre territoire des produits qui ne répondent pas aux normes demandées aux agriculteurs. C’est simplement ce message que le Sénat veut vous adresser, monsieur le ministre, pour vous aider dans vos négociations en Europe. Prenez-le comme un encouragement dans vos négociations et non comme une défiance à l’égard de votre texte.
Politiquement, la commission a souhaité demander un scrutin public sur son amendement, en espérant qu’il fera l’unanimité.
M. Didier Guillaume. Cela fait gagner du temps ! (Sourires.)
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Décidément, c’est le grand bal des scrutins publics !
D’abord, je veux saluer nos jeunes concitoyens qui nous écoutent attentivement dans les tribunes, vêtus d’une belle couleur porteuse d’avenir. (Sourires.) Je veux leur dire que si des places sont vides dans l’hémicycle, c’est parce que deux commissions sont saisies et que nos collègues travaillent dans leur circonscription. Il est important de le préciser.
M. Didier Guillaume. Ce n’est pas le moment de faire un cours d’instruction civique !
M. le président. Veuillez ne pas vous écarter du sujet, cher collègue !
M. Joël Labbé. Un consensus se dégage dans cette enceinte sur le fait qu’il est insensé d’importer des produits porteurs de traces de substances interdites en France et en Europe.
J’avais annoncé un scrutin public, mais mon amendement deviendra sans objet si celui de la commission est adopté. Cet amendement est moins exigeant que le mien, mais il est tout de même assez clair sur ce point. Je retire donc l’amendement n° 466 rectifié ter en faveur de l’amendement de la commission qui fera peut-être l’unanimité, ce qui serait un très bon signe pour les jeunes générations. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme la rapporteur applaudit également.)
M. le président. L’amendement n° 466 rectifié ter est retiré.
La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Comme cela a été dit, ces amendements convergent vers le même objectif, à quelques détails de rédaction près. Il importe d’envoyer un message fort, de la manière la plus unanime possible, pour peser dans les négociations à venir.
Dans ces conditions, évidemment, je retire l’amendement n° 248 rectifié ter au profit de l’amendement n° 776 de la commission.
M. le président. L’amendement n° 248 rectifié ter est retiré.
La parole est à Mme Colette Mélot, pour explication de vote.
Mme Colette Mélot. Monsieur le président, je retire les deux amendements que j’ai défendus au profit de celui de la commission, qui reprend effectivement ce que nous avons demandé dans nos amendements respectifs.
M. le président. Les amendements nos 160 rectifié bis et 161 rectifié bis sont retirés.
Monsieur Gremillet, l’amendement n° 648 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Daniel Gremillet. Non, je le retire au profit de celui de la commission, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 648 rectifié ter est retiré.
Monsieur Cabanel, l’amendement n° 566 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 566 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 776.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant de la commission des affaires économiques.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 179 :
Nombre de votants | 343 |
Nombre de suffrages exprimés | 343 |
Pour l’adoption | 323 |
Contre | 20 |
Le Sénat a adopté. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Colette Mélot applaudit également.)
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11 decies, et l’amendement n° 206 rectifié n’a plus d’objet.
Article 11 undecies
Le I de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le 11° est complété par les mots : « , et d’atteindre, au 31 décembre 2022, l’objectif d’affectation de 15 % de la surface agricole utile à l’agriculture biologique, au sens du même article L. 641-13 » ;
2° Le 12° est complété par les mots : « et de retour de la valeur aux agriculteurs » ;
3° Après le 17°, sont insérés des 18°, 18° bis et 19° ainsi rédigés :
« 18° De promouvoir l’indépendance alimentaire de la France à l’international, en préservant son modèle agricole ainsi que la qualité et la sécurité de son alimentation ;
« 18° bis (nouveau) De s’assurer dans tout nouvel accord de libre-échange d’une réciprocité effective pour ce qui concerne l’accès au marché, en particulier aux marchés publics, d’une exigence de normes de production comparables, ainsi que d’un degré élevé d’exigence dans l’élaboration de normes communes sociales, environnementales, sanitaires, phytosanitaires et relatives au bien-être animal, en vue d’une protection toujours plus forte des consommateurs et d’une préservation de nos modèles agricoles européens ;
« 19° De favoriser l’acquisition pendant l’enfance et l’adolescence d’une culture générale de l’alimentation soulignant les enjeux culturels, environnementaux, économiques et de santé publique liés aux choix alimentaires. »
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l’article.
M. Maurice Antiste. Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier mes collègues de la commission des affaires économiques qui ont eu la clairvoyance d’insérer un alinéa 6 à l’article 11 undecies. Ainsi, serait intégré aux missions de la politique agricole et alimentaire le fait de « s’assurer dans tout nouvel accord de libre-échange d’une réciprocité effective […], d’une exigence de normes de production comparables, ainsi que d’un degré élevé d’exigence dans l’élaboration de normes communes sanitaires et phytosanitaires […] en vue d’une protection toujours plus forte des consommateurs et d’une préservation de nos modèles agricoles européens ».
Cela est particulièrement vital pour nos agriculteurs, nos concitoyens et nos modèles agricoles, au regard de la frénésie de l’Union européenne à négocier et à conclure des accords de libre-échange de nouvelle génération avec des pays tiers – MERCOSUR, Indonésie, Mexique, Chili –, sachant par ailleurs que les négociations avec Singapour en 2014, le Vietnam en 2016 et le Japon en décembre 2017 sont closes.
Or ces nouveaux accords affectent de manière profonde l’économie des pays signataires, dans la mesure où ils ne se contentent pas de lever les barrières tarifaires. On reproche d’ailleurs à la Commission européenne de mener une politique commerciale déséquilibrée, qui prend insuffisamment en compte une exigence de réciprocité de la part des partenaires. Cette question concerne particulièrement l’ouverture des marchés publics, mais aussi les procédures et les normes sanitaires et phytosanitaires, au détriment des agriculteurs européens, dont les agriculteurs français que nous défendons ici.
Je prends pour exemple l’accord UE-MERCOSUR, qui aurait des conséquences importantes sur nos populations, de manière directe et indirecte.
Tout d’abord, il constitue un véritable désastre pour la sauvegarde de l’environnement et du climat – l’élevage bovin brésilien est responsable, à lui seul, de 80 % de la destruction de la forêt amazonienne.
Ensuite, les exportations de viandes et de volailles prévues dans l’accord sont particulièrement inquiétantes, car les mesures sanitaires et phytosanitaires dans ces pays ignorent le principe de précaution et permettent de nourrir avec des OGM les animaux et les volailles, en plus de les soumettre aux piqûres aux hormones !
M. le président. Il faut conclure, cher collègue !
M. Maurice Antiste. Enfin, il serait prévu l’importation, au sein de l’Union européenne, de 100 000 tonnes de bœuf et de 90 000 tonnes de volaille, ainsi qu’un quota total de 600 000 tonnes de canne à sucre.
On voit donc bien tout l’intérêt de cet article.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, sur l’article.
M. Joël Labbé. Je souhaite m’exprimer sur un aspect spécifique de cet article, à savoir l’alinéa qui prévoit que la politique agricole favorise, pendant l’enfance et l’adolescence, l’acquisition d’une culture générale de l’alimentation. Je souhaite prendre la parole sur ce thème, car deux de mes amendements sur ce sujet ont été déclarés irrecevables. Le premier prévoyait la mise en place obligatoire, dans les écoles, d’un jardin pédagogique. Le second, pour échapper à l’article 40 de la Constitution, visait à favoriser cette pratique dans le cadre de l’éducation à l’alimentation.
Je pense que ces mesures auraient eu toute leur place dans ce texte. Si l’on veut favoriser une alimentation durable, des comportements alimentaires sains, des jardins pédagogiques ont toute leur importance. C’est un outil utile pour la sensibilisation et l’éducation à l’alimentation. Il permet aux élèves de redonner une valeur à leur alimentation, d’être sensibilisés au gaspillage alimentaire, au traitement des déchets via la mise en place de compost.
Il permet une forme de reconnexion à la nature. Aujourd’hui, ces enseignements sur l’agronomie, la botanique, les sciences de la vie et de la terre, ou SVT, sont de plus en plus rares. Les SVT ont été l’une des grandes perdantes de la réforme du baccalauréat. Nous perdons ainsi une culture essentielle à notre bien-être !
Les agriculteurs se plaignent de ne pas être compris par le reste de la population. Il serait crucial d’avoir une éducation dès le plus jeune âge dans ces domaines.
Nous pourrons avoir un débat sur cette question via un amendement de notre collègue Angèle Préville qui a pu échapper, et je m’en réjouis, à l’irrecevabilité. Je le soutiendrai, tout à l’heure.
Nous parlons souvent de distorsion de concurrence ou d’inégalité. Voilà huit jours, j’étais invité à être le parrain d’un jardin pédagogique dans une école, la Touline, et j’ai trouvé cela fantastique. Contrairement à d’autres, quelle chance ont ces enfants de pouvoir bénéficier de cette sensibilisation ! La généralisation des jardins pédagogiques dans les écoles serait une très bonne idée, mais nous ne pourrons pas vous la soumettre.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 379 rectifié, présenté par MM. Duplomb, Gremillet, Adnot, Babary, Bansard et Bazin, Mmes A.M. Bertrand et Bonfanti-Dossat, M. Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, J.M. Boyer, Brisson et Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon, Chevrollier et Danesi, Mmes L. Darcos, Deroche et Di Folco, M. Gilles, Mme Gruny, MM. Guené et Huré, Mme Imbert, MM. Joyandet, Kennel et Laménie, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Lefèvre, Mme Lopez, MM. Mayet, Meurant, Morisset, Paccaud, Panunzi, Paul, Pierre, Pointereau, Poniatowski et Priou, Mme Puissat, M. Rapin, Mme Renaud-Garabedian, MM. Revet, Savin, Sol et Sido et Mme Thomas, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au 1° , après les mots : « socialement acceptables par tous », sont insérés les mots : « et avec des méthodes de productions autorisées en France et dans l’Union Européenne » ;
La parole est à M. Laurent Duplomb.
M. Laurent Duplomb. Cet amendement a pour objet de parler non pas du produit, mais de la méthode de production. C’est pourquoi la précision apportée par cet amendement est importante.
Les lentilles vertes produites en France ou en Europe, pour prendre un exemple précis, doivent répondre à une norme concernant le glyphosate de 0,1 milligramme par kilogramme.
Avant 2012, les normes autorisées par l’Union européenne pour les importations étaient de 4 milligrammes par kilogramme pour le Canada et de 5 milligrammes par kilogramme pour les États-Unis. Pour favoriser les importations de ces produits, l’Union européenne a relevé ses seuils, à l’inverse de ce qui se fait en France. Ainsi, depuis 2012, les lentilles canadiennes ou américaines peuvent entrer sur le territoire européen pour être consommées avec un taux de glyphosate atteignant jusqu’à 10 milligrammes par kilogramme, soit cent fois plus que ce qui est autorisé en France !
Pourquoi parler de méthode de production ? En France, il est interdit d’épandre du glyphosate sur une culture avant la récolte pour accélérer son murissement, afin d’éviter justement de retrouver des taux élevés de cette substance dans le produit. Au Canada, si vous supprimez la possibilité de défaner la récolte, par définition, vous ne pouvez plus récolter.
Au-delà du produit, c’est également sur la méthode de production que nous devrions nous pencher, qui est aussi d’une certaine manière importée et qui vient concurrencer, une fois de plus, le travail des producteurs français soumis à des normes toujours plus strictes. Il devient impossible de lutter contre cette différence flagrante.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 207 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 385 rectifié est présenté par M. Piednoir, Mme Deroche, M. Bazin, Mme Garriaud-Maylam et MM. Savary, Perrin, Pellevat, Paul, Chaize, Savin, Rapin, Sido, Laménie et Bouchet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le 1° est complété par les mots : « en interdisant de proposer à la vente ou de distribuer à titre gratuit en vue de la consommation humaine des denrées alimentaires ou des produits agricoles issus de méthodes de production interdites en France et dans l’Union européenne » ;
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 207.
M. Fabien Gay. Cet amendement, qui s’inscrit dans le débat que nous venons d’avoir, mais qui est de nature différente, vise à interdire l’importation en France de denrées produites en utilisant des substances interdites dans l’Union européenne et en France, même à doses résiduelles : produits phytopharmaceutiques, farines animales, antibiotiques, activateurs de croissance…
En effet, il paraît inacceptable que nos agriculteurs soient soumis à des contraintes supplémentaires, alors même que la France importe des matières premières de pays qui ne partagent pas nos exigences, que ce soit en matière sociale, environnementale ou sanitaire. Face à cette incohérence, il est légitime que les agriculteurs ressentent une profonde injustice.
Avec le CETA, des milliers de tonnes de volaille, de viande porcine ou bovine ou de sucre vont inonder le marché communautaire. La France, signataire de cet accord, va ainsi importer des marchandises produites avec des molécules qu’elle interdit.
En effet, le rapport de la commission Schubert sur les effets du CETA répertorie des activateurs de croissance et des produits phytosanitaires – pas moins de 46 molécules ! – qui sont interdits dans l’Union européenne, mais autorisés dans les produits importés dans l’Union, comme l’atrazine, qui est prohibée dans l’Union européenne depuis le début des années 2000.
Une telle situation n’est pas tenable pour les agriculteurs français, dont les produits agricoles doivent respecter des pratiques plus coûteuses et qui se retrouvent concurrencés par ceux de producteurs étrangers dont les contraintes environnementales sont moindres.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour présenter l’amendement n° 385 rectifié.
M. Arnaud Bazin. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 94 rectifié septies, présenté par MM. Canevet, Longeot, Détraigne et Le Nay, Mmes C. Fournier et Joissains, MM. Henno et Janssens, Mme Vullien, M. Moga, Mme Sollogoub, MM. Kern et Vanlerenberghe, Mmes Vérien, Billon et Goy-Chavent, M. Prince, Mme Guidez et MM. Cigolotti, Delcros, Capo-Canellas, Mizzon, Luche et Maurey, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« …° D’interdire à la vente ou à la distribution à titre gratuit en vue de la consommation humaine des denrées alimentaires ou des produits agricoles issus de méthodes de production interdites en France et dans l’Union européenne ;
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Cet amendement, dont le premier signataire est Michel Canevet, vise à interdire l’importation en France de denrées produites en utilisant des substances interdites dans l’Union européenne, même si ces substances ne sont présentes qu’à des doses résiduelles.
L’objectif est d’empêcher des distorsions de concurrence entre les producteurs européens et ceux des pays tiers, tout en protégeant l’environnement et la santé publique.
Une telle situation n’est pas tenable pour les agriculteurs français, dont les produits agricoles doivent respecter des pratiques plus restrictives, mais qui se retrouvent concurrencés par des producteurs étrangers qui ont des contraintes environnementales moindres.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements sont satisfaits par celui que nous venons d’adopter à l’unanimité, ainsi que par celui que nous avons adopté en commission à cet article qui ajoute un alinéa 18 bis à l’article L.1 du code rural et de la pêche maritime. Cet alinéa mentionne en effet l’exigence de l’application de normes de production comparables en matière environnementale, sanitaire ou encore phytosanitaire.
C’est pourquoi la commission demande le retrait de ces amendements. À défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. En effet, ces amendements me semblent satisfaits par celui que le Sénat vient d’adopter.
Je rappelle cependant que l’importation de produits, dont la LMR, la limite maximale de résidus, est dépassée, est interdite. Le cas échéant, un produit qui dépasse cette LMR peut, au cas par cas, être autorisé, si tant est que la valeur de résidus reste inférieure aux valeurs toxicologiques de référence.
La France est particulièrement vigilante sur ce sujet. Nous nous opposons systématiquement à ces dépassements et nous dénonçons les relèvements de seuils. Je peux vous dire que nous allons maintenir cette position.
C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Monsieur Delcros, l’amendement n° 94 rectifié septies est-il maintenu ?
M. Bernard Delcros. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 94 rectifié septies est retiré.
Monsieur Duplomb, l’amendement n° 379 rectifié est-il maintenu ?
M. Laurent Duplomb. Non, monsieur le président, même si je ne suis pas complètement convaincu par les arguments de Mme la rapporteur. Ces amendements ont le mérite d’ouvrir un débat qui est très important.
Nous voulons défendre l’agriculture française face aux importations et je regrette que, depuis quelques jours, nos travaux laissent parfois la place à des caricatures et à des postures. Il faut que nous soyons tous pleinement conscients des réalités du secteur agricole en France et dans les pays étrangers.
Je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 379 rectifié est retiré.
Monsieur Gay, l’amendement n° 207 est-il maintenu ?
M. Fabien Gay. Évidemment, monsieur le président !
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je soutiens l’amendement n° 207 du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Je dois dire que je suis sensible aux propos tenus tout à l’heure par Laurent Duplomb concernant les doses de glyphosate. J’aurais d’ailleurs voté son amendement !
M. Didier Guillaume. C’est la deuxième fois !
M. Joël Labbé. Finalement, le glyphosate peut nous réunir, mon cher collègue ! (Sourires.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 207 et 385 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 246 rectifié bis, présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains, MM. Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot, Détraigne et Kern, Mme Sollogoub et MM. Canevet, Le Nay et Luche, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au 9°, après les mots : « promotion de circuits courts, », sont insérés les mots : « notamment par des actions en faveur du maintien des abattoirs à proximité des élevages » ;
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Monsieur le ministre, mes chers collègues, j’attire votre attention sur cet amendement. Nous sommes tous d’accord pour réduire les importations de viande qui représentent aujourd’hui 70 % du marché, hors consommation à domicile. Il faut donc développer des filières françaises de proximité.
Tel était l’objet de la proposition de loi visant à favoriser l’ancrage territorial de l’alimentation, que le Sénat a adoptée en mai 2016. Le projet de loi que nous examinons reprend les mêmes finalités.
Remplir cet objectif de structuration des filières de proximité nécessite de mettre en place un certain nombre d’outils. Cet amendement va dans ce sens, puisqu’il vise à développer des actions en faveur du maintien des abattoirs à proximité des élevages.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Favorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, car les abattoirs sont déjà pris en compte dans la rédaction de cet article en tant qu’outils de première transformation.
M. le président. Je suis saisi de dix amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 738, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au 13°, les mots : « l’aide alimentaire » sont remplacés par les mots : « la lutte contre la précarité alimentaire telle que définie à l’article L. 266-1 du code de l’action sociale et des familles ».
II. – Alinéa 6
Rédiger ainsi cet alinéa :
« 18° bis De veiller dans tout nouvel accord de libre-échange au respect du principe de réciprocité et à une exigence de conditions de production comparables pour ce qui concerne l’accès au marché, ainsi qu’à un degré élevé d’exigence dans la coopération en matière de normes sociales, environnementales, sanitaires, phytosanitaires et relatives au bien-être animal, en vue d’une protection toujours plus forte des consommateurs et d’une préservation des modèles agricoles européens ; »
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à garantir la prise en compte de la lutte contre la précarité alimentaire dans la politique de l’alimentation. Cela permettra d’assurer une cohérence avec les modifications apportées par le projet de loi au programme national nutrition santé et aux programmes alimentaires territoriaux. Voilà pourquoi nous proposons de remplacer l’aide alimentaire par la lutte contre la précarité alimentaire dans les objectifs de la politique en faveur de l’agriculture et de l’alimentation.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 227 rectifié bis est présenté par M. Kern, Mme Létard, MM. Capo-Canellas et Mizzon, Mme Joissains, M. Henno, Mme Gatel, MM. Le Nay et Moga, Mme Férat, MM. de Nicolaÿ, D. Dubois et Luche, Mme Billon et M. Poadja.
L’amendement n° 243 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mme Vullien, MM. Louault, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot et Delahaye, Mme Sollogoub et M. Canevet.
L’amendement n° 283 rectifié est présenté par MM. Bizet, Bansard et Bazin, Mme Berthet, M. Bonne, Mme Bories, MM. Buffet, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Deseyne et Duranton, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest, Grand et Guené, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mme Lopez, MM. Mayet, Milon, Morisset, Paccaud, Paul, Pellevat, Perrin, Piednoir, Pillet, Priou et Rapin, Mme Renaud-Garabedian et MM. Revet, Saury, Sol, Vaspart et Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
en interdisant notamment les importations de viandes issues de bovins nourris aux farines animales
L’amendement n° 227 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 243 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. Cet amendement vise à interdire l’importation de viande bovine issue d’animaux nourris aux farines animales. La logique est la même que celle de nos débats précédents : mettre fin à l’importation de denrées qui ne sont pas produites avec des contraintes similaires à celles qui sont imposées aux agriculteurs français.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 283 rectifié.
M. Antoine Lefèvre. Les accords de libre-échange en voie de ratification ou en cours de négociation, qui prévoient notamment l’ouverture du marché communautaire à plusieurs centaines de milliers de tonnes de viandes issues de bovins non tracés, engraissés aux farines animales dans des feedlots, sont parfaitement incompatibles avec le modèle d’élevage prôné par les États généraux de l’alimentation et les objectifs de la politique de l’agriculture et de l’alimentation définie au livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime.
Cette pratique, strictement interdite au sein de l’Union européenne, ne fait aujourd’hui l’objet d’aucune restriction pour les importations : affirmer que toute viande entrant sur le marché européen respecte les mêmes normes de production que celles qui sont imposées aux producteurs communautaires est donc mensonger.
Elle soulève, en outre, des questions de santé publique : alors que l’utilisation des farines animales dans l’alimentation des bovins a été strictement prohibée en Europe, à la suite de la crise de la vache folle, il semble à la fois incohérent et risqué d’autoriser des importations de viandes issues de bovins ayant consommé de telles substances.
C’est pourquoi cet amendement vise à renforcer le livre préliminaire du code rural et de la pêche maritime, en exprimant clairement le refus de la France d’importer des viandes bovines issues d’animaux nourris aux farines animales.
M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 228 rectifié bis est présenté par M. Kern, Mme Létard, MM. Capo-Canellas et Mizzon, Mme Joissains, M. Henno, Mme Gatel, MM. Le Nay et Moga, Mme Férat, MM. de Nicolaÿ, D. Dubois et Luche, Mme Billon et M. Poadja.
L’amendement n° 244 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mme Vullien, MM. Louault, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot et Delahaye, Mme Sollogoub et M. Canevet.
L’amendement n° 284 rectifié est présenté par MM. Bizet, Bansard et Bazin, Mme Berthet, M. Bonne, Mme Bories, MM. Buffet, Chatillon, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Deseyne et Duranton, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest et Guené, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mme Lopez, MM. Mayet, Milon, Morisset, Paccaud, Paul, Pellevat, Perrin, Piednoir, Pillet, Priou et Rapin, Mme Renaud-Garabedian et MM. Revet, Saury, Sol, Vaspart et Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
en interdisant notamment les importations de viandes issues de bovins engraissés aux antibiotiques utilisés comme activateurs de croissance
L’amendement n° 228 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 244 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. Nous proposons que la France refuse d’importer des viandes issues de bovins engraissés aux antibiotiques utilisés comme activateurs de croissance.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 284 rectifié.
M. Antoine Lefèvre. Ce sont les mêmes motivations, monsieur le président. Je considère donc que cet amendement est défendu.
M. le président. Les trois amendements suivants sont également identiques.
L’amendement n° 229 rectifié bis est présenté par M. Kern, Mme Létard, MM. Capo-Canellas et Mizzon, Mme Joissains, M. Henno, Mme Gatel, MM. Le Nay et Moga, Mme Férat, MM. de Nicolaÿ, D. Dubois et Luche, Mme Billon et M. Poadja.
L’amendement n° 245 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mme Vullien, MM. Louault, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot, Détraigne et Delahaye, Mme Sollogoub et M. Canevet.
L’amendement n° 285 rectifié est présenté par MM. Bizet et Bazin, Mme Berthet, M. Bonne, Mme Bories, MM. Buffet, Chatillon, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Deseyne et Duranton, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Genest et Guené, Mme Lamure, MM. D. Laurent, Lefèvre et Longuet, Mme Lopez et MM. Mayet, Milon, Morisset, Paccaud, Paul, Pellevat, Perrin, Piednoir, Pillet, Priou, Rapin, Revet, Saury, Sol, Vaspart et Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
en interdisant notamment les importations de viandes issues d’animaux non tracés individuellement de leur lieu de naissance jusqu’à leur lieu d’abattage
L’amendement n° 229 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 245 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. Nous proposons que la France refuse l’importation d’animaux non tracés individuellement de leur lieu de naissance jusqu’à leur abattage, traçage qui est exigé pour les productions françaises.
L’ensemble des amendements qui viennent d’être présentés montre bien que nous devons mener un véritable combat pour arrêter d’importer des denrées qui sont produites dans des conditions non conformes aux règles de santé publique qui s’imposent en France.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 285 rectifié.
M. Antoine Lefèvre. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est favorable à l’amendement n° 738 du Gouvernement, qui apporte une précision rédactionnelle.
Les autres amendements faisant l’objet de cette discussion commune visent à lutter contre des exemples précis de concurrence déloyale. Ils me semblent justement trop précis pour pouvoir être intégrés à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime qui définit deux grands objectifs.
Surtout, des amendements plus globaux ont déjà été adoptés sur le même sujet. Ainsi, le dernier d’entre eux vise à interdire les importations de produits issus de modes de production non équivalents et inclut des aspects liés à l’identification des produits et à leur traçabilité.
Les amendements en discussion sont donc satisfaits, si bien que la commission en demande le retrait. À défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable aux amendements nos 243 rectifié bis, 283 rectifié, 244 rectifié bis, 284 rectifié, 245 rectifié bis et 285 rectifié.
En effet, dans le cadre du plan d’action sur la mise en œuvre de l’accord entre l’Union européenne et le Canada, le Gouvernement s’est engagé à défendre le modèle européen de production agricole dans les enceintes internationales et dans l’ensemble des négociations commerciales de l’Union européenne.
Ainsi, nous conditionnons les concessions commerciales de l’Union européenne à des garanties relatives aux modes de production, y compris en matière de promoteurs de croissance et de traçabilité, et à leur limitation à un niveau soutenable pour les filières en question.
Notre position rejoint, vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, les objectifs des différents amendements qui ont été présentés, mais n’adopter qu’en droit français les mesures que vous proposez constituerait une surtransposition, qui présenterait un risque élevé de contentieux.
M. le président. Monsieur Lefèvre, les amendements nos 283 rectifié, 284 rectifié et 285 rectifié sont-ils maintenus ?
M. Antoine Lefèvre. Le ministre nous indique que le risque contentieux est important. Je retire donc ces amendements, monsieur le président.
M. le président. Les amendements nos 283 rectifié, 284 rectifié et 285 rectifié sont retirés.
La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Monsieur le ministre, de nouveau, votre réponse ne me convainc pas du tout ! Si un ministre veut défendre l’agriculture française, il doit s’en donner les moyens, en particulier en allant fréquemment à Bruxelles. Mais si l’on passe le plus clair de son temps en France, cela ne peut pas marcher ! (Protestations sur différentes travées.)
M. Laurent Duplomb. Oui, mes chers collègues, il faut se donner les moyens de ses ambitions !
Monsieur le ministre, vous parlez de garanties. Mais quelles garanties avons-nous sur l’accord avec les pays du MERCOSUR ? Vous savez très bien que, dans ces pays, les bêtes ne sont identifiées qu’à l’abattoir, quand elles sont tuées ; chez nous, elles doivent l’être dans les sept jours qui suivent la naissance, sinon l’agriculteur est pénalisé. Les choses ne sont donc pas du tout les mêmes.
En termes de bien-être animal, les productions colombiennes, mexicaines ou brésiliennes sont clairement aux antipodes des nôtres !
Si vous voulez vraiment défendre l’agriculture française face à ce type de productions, vous devez vous en donner les moyens. Alors, nous serons derrière vous ! Si vous ne le faites pas tout en invoquant la surtransposition, il n’y aura tout simplement plus d’agriculture en France dans dix ans !
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. J’ai cosigné plusieurs de ces amendements. J’entends les arguments avancés par la rapporteur et je ne suis pas opposé au retrait de ces amendements, si l’on peut nous assurer qu’une rédaction plus générale les englobe.
Cela dit, jusque-là, nous avons beaucoup parlé de la concurrence déloyale causée par l’utilisation de modes de production qui sont prohibés chez nous. Nous avons aussi parlé de risques sanitaires. Mais nous n’avons pas évoqué un autre risque, celui d’une crise de confiance de la part des consommateurs. Si ceux-ci apprennent que les animaux importés en France sont produits dans des conditions qui sont clairement contraires à nos propres règles, le rejet qui ne manquera pas d’apparaître risque d’atteindre toutes les productions, y compris celles qui respectent ces règles.
Nous devons être extrêmement attentifs à ne pas créer de confusion. Comment expliquer aux gens qu’une substance est mauvaise, dangereuse pour la santé donc interdite en France, et leur dire, dans le même temps, qu’on autorise l’importation de produits qui contiennent cette substance, certes dans des quantités limitées ?
Nous risquons en fait de créer un grave déficit de confiance de la part des consommateurs. Nul besoin de vous rappeler, monsieur le ministre, que notre économie a déjà pu mesurer l’effet d’une crise de ce type !
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. La rédaction de l’amendement n° 738 du Gouvernement est en réalité quasi identique à celle de l’amendement que le groupe socialiste et républicain a fait voter en commission et qui se retrouve donc aujourd’hui dans le projet de loi.
Notre amendement reprenait une position que le Sénat a adoptée de manière stable et claire depuis plusieurs années en matière d’accord de libre-échange. Il s’agissait pour nous de faire préciser dans la loi que tout accord de libre-échange doit s’appuyer sur l’exigence de normes de production comparables entre les pays de l’Union européenne et les pays tiers.
L’objectif est d’assurer la qualité des produits destinés aux consommateurs européens, tout en protégeant nos agriculteurs d’une concurrence qui pourrait s’avérer déloyale. Ces accords de libre-échange ne doivent pas pénaliser nos modes de production, aujourd’hui soumis à des normes de plus en plus exigeantes.
Dans ce cadre, notre proposition, que le Gouvernement vient ici conforter, visait à étendre le champ des normes pour lesquelles l’exigence de réciprocité doit s’appliquer, en intégrant celles qui sont relatives au bien-être animal.
Nous voterons donc l’amendement rédactionnel du Gouvernement, qui appuie la position prise depuis plusieurs années par le Sénat sur la question des accords de libre-échange.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Les amendements autres que celui du Gouvernement sont un peu rentre-dedans, mais je crois que l’Europe doit évoluer sur ces questions.
Personnellement, je ne dirai pas au ministre qu’il doit être à Bruxelles tous les quatre matins, son travail l’appelle évidemment dans différents endroits.
M. Joël Labbé. C’est toute la France qui doit faire bouger l’Union européenne et la tirer vers le haut. Vous savez que je suis très sensible à la question des farines animales. C’est pourquoi je voterai ces amendements.
M. le président. En conséquence, les amendements nos 243 rectifié bis, 244 rectifié bis et 245 rectifié bis n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 454 rectifié, présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell, Artano, Castelli et Corbisez, Mmes N. Delattre et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le 17° est complété par les mots : « , notamment la biodiversité des sols » ;
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à préciser que la politique agricole a pour objectifs la préservation et la valorisation des terres agricoles, particulièrement la biodiversité des sols. Celle-ci est essentielle, notamment pour la fertilité, la régulation du cycle de l’eau, la lutte contre l’érosion, ou encore la santé des plantes.
Le sol représente 80 % de la biomasse. Cette biodiversité complexe et essentielle a une valeur, tant pour la qualité de notre environnement, que pour la production agricole.
L’érosion des sols est un phénomène qui s’accentue et qui est inquiétant, à la fois pour la baisse des rendements agricoles, mais aussi pour les phénomènes de ruissellement et d’inondation qui peuvent être provoqués par un sol quasi mort, incapable d’absorber l’eau.
C’est un sol vivant, avec sa biodiversité et ses micro-organismes, qui nourrit la plante et qui permettra à notre agriculture de continuer à nous nourrir.
Il convient donc de préciser que la protection et la valorisation des terres agricoles impliquent une protection de la biodiversité des sols.
J’en profite pour présenter un amendement jugé irrecevable. Il portait sur la protection de la quantité des sols, non moins importante que leur qualité. Cet amendement avait pour objet de donner une valeur législative à l’engagement du Gouvernement en matière de lutte contre l’artificialisation des sols.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. C’était un cavalier !
M. Joël Labbé. Nous perdons 236 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers par jour, ce qui correspond à la consommation d’un département français tous les sept ans. Cette artificialisation se fait majoritairement aux dépens de terres agricoles. Je reviendrai sur le sujet lors de l’examen d’autres textes.
Les sols sont un enjeu essentiel et je pense que nous pouvons trouver un consensus pour les protéger.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet objectif de valorisation de la biodiversité, notamment des sols, est bien évidemment un enjeu majeur. Il est d’ailleurs inscrit aux alinéas 1° et 2° de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, qui évoquent la protection de l’environnement et des paysages et la performance environnementale des filières de production, ainsi qu’au paragraphe II du même article, qui définit un objectif spécifique de promotion des démarches agroécologiques, et au paragraphe IV, qui prévoit que la politique d’installation doit répondre aux enjeux de biodiversité.
Cet amendement me paraît donc satisfait. C’est pourquoi la commission en demande le retrait. À défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Il me semble aussi que cet amendement est satisfait. En outre, la préservation de la biodiversité des sols est certes un enjeu important, mais il n’est pas nécessairement opportun de mettre cet aspect en avant plus que d’autres. Enfin, le lien avec la politique de l’alimentation est assez flou et la rédaction de l’article L. 1 du code précité qui résulterait de l’adoption de cet amendement serait peu compréhensible. Voilà pourquoi l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 454 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Oui, monsieur le président !
Monsieur le ministre, le rapport avec l’alimentation est direct : c’est le sol vivant qui en est à la source. C’est grâce à la préservation de la biodiversité que les pollinisateurs existent.
Soyons bien conscients que nous frôlons la catastrophe ! Même si nos débats ici, au Sénat, sont empreints de sagesse, nous ne sommes toujours pas à la hauteur de la situation d’urgence créée par la chute de la biodiversité.
Ce sujet est trop important pour que je retire mon amendement. Les sols doivent retrouver la vie ! À la Journée mondiale des sols, j’ai entendu un très beau slogan : « La vie fait le sol et le sol fait la vie ! »
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. En rebondissant sur les propos de Joël Labbé, je veux rappeler que, sur l’initiative, notamment, de Stéphane Le Foll a été lancée l’initiative « 4 pour 1 000 », qui vise à encourager l’enfouissement de carbone dans les sols.
En effet, on estime qu’enfouir seulement 4 pour 1 000 du stock de carbone existant aujourd’hui permettrait de contrebalancer les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère et de fertiliser les sols.
À l’heure actuelle, 40 % des sols cultivés sont dégradés. La biodiversité est donc touchée, atteinte.
L’INRA, l’Institut national de la recherche agronomique, a commencé à réfléchir sur le sujet et ses experts estiment que le potentiel d’enfouissement de carbone est de l’ordre de 115 millions de tonnes par an à l’échelon européen. Si les agriculteurs étaient encouragés à enfouir davantage de carbone dans les sols, ne serait-ce que par une couverture permanente des cultures, et s’ils étaient rémunérés à hauteur de 30 euros la tonne, cela coûterait environ 6 % du budget actuellement consacré à la politique agricole commune.
L’intérêt de l’initiative « 4 pour 1 000 » est double : elle permet de contrebalancer les émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère, notamment le CO2, et de fertiliser les sols. Or un sol fertilisé, riche en matières organiques, donc en carbone, permet de mieux résister à l’érosion et de lutter contre les inondations.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 226 rectifié bis est présenté par M. Kern, Mme Létard, MM. Capo-Canellas et Mizzon, Mme Joissains, M. Henno, Mme Gatel, MM. Le Nay et Moga, Mme Férat, MM. de Nicolaÿ, D. Dubois et Luche, Mme Billon et M. Poadja.
L’amendement n° 242 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mme Vullien, MM. Louault, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe et Longeot, Mme Sollogoub et M. Canevet.
L’amendement n° 282 rectifié est présenté par MM. Bizet et Bazin, Mmes Berthet et Bories, MM. Buffet, Chatillon, Cornu, Danesi, Daubresse et de Legge, Mmes Deromedi, Deseyne et Duranton, M. B. Fournier, Mme Garriaud-Maylam, MM. Grand et Guené, Mme Lamure et MM. D. Laurent, Lefèvre, Longuet, Mayet, Milon, Morisset, Paccaud, Paul, Pellevat, Piednoir, Pillet, Priou, Rapin, Revet, Sol, Vaspart et Vogel.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 5
Remplacer les mots :
ainsi que la qualité et la sécurité de son alimentation
par les mots :
familial, économe en intrants, valorisant les ressources naturelles telles que l’herbe ainsi que la qualité et la sécurité de son alimentation en refusant les importations de produits alimentaires ne respectant pas strictement les mêmes normes de production que les systèmes français
L’amendement n° 226 rectifié bis n’est pas soutenu.
La parole est à M. Bernard Delcros, pour présenter l’amendement n° 242 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. Nous proposons que la France refuse les importations de produits alimentaires ne respectant pas strictement les mêmes normes de production que celles qui s’appliquent sur son territoire.
M. le président. La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 282 rectifié.
M. Antoine Lefèvre. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements sont satisfaits. La commission en demande donc le retrait. À défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Delcros, l’amendement n° 242 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Bernard Delcros. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 242 rectifié bis est retiré.
Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 282 rectifié est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 282 rectifié est retiré.
L’amendement n° 453 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Castelli et Corbisez, Mmes N. Delattre et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 5
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° De promouvoir l’autonomie de la France et de l’Union européenne en protéines ;
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. La France et l’Union européenne souffrent d’une dépendance en protéines végétales historique, issue en grande partie des accords commerciaux négociés dans le cadre du GATT dans les années 1960. On ne le répète jamais assez. La France est dépendante en ce domaine à plus de 40 % ; le déficit européen global est encore plus fort.
Or cette dépendance en protéines végétales pose de nombreux problèmes. Elle soumet notamment les éleveurs français qui dépendent d’importations pour l’alimentation animale à la volatilité des cours mondiaux dans un contexte international tendu. Quand nous avons parlé des revenus des producteurs, nous avons beaucoup évoqué les difficultés liées à l’aval, mais il en existe également en amont.
Je rappelle aussi que le soja importé d’Amérique du Sud est transgénique à 80 %, ce qui a des conséquences sur les forêts et sur les populations paysannes locales. Nos producteurs sont là aussi confrontés à une concurrence déloyale.
De plus, les cultures de protéines présentent des avantages sur les plans agronomique et environnemental. Par exemple, le développement des légumineuses permet l’enrichissement des sols en azote. Introduire du soja dans les rotations permet aussi de limiter les intrants. Des filières commencent à se développer et la politique agricole doit les encourager.
L’autonomie protéique est souhaitable à la fois sur le plan de la sécurité alimentaire et d’un point de vue économique, social et environnemental. Cet objectif est stratégique pour notre pays comme pour l’Union européenne. Nous pouvons trouver sur ce sujet un consensus.
Monsieur le ministre, je vous rappelle que le plan national Protéines, qui date de plusieurs années maintenant, tarde à prendre son envol. C’est pourquoi j’ai déposé cet amendement sur la promotion de l’autonomie de la France et de l’Union européenne en protéines.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il est essentiel de promouvoir l’autonomie française et européenne en protéines. Avis favorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
Certes, le constat posé est pertinent : il est vrai qu’il est important de réduire notre dépendance aux importations de soja génétiquement modifié et d’engrais azoté. Le Président de la République l’a d’ailleurs rappelé en janvier dernier.
Nous y travaillons, mais introduire un principe d’autonomie en protéines dans le code rural et de la pêche maritime pourrait heurter nos partenaires commerciaux, sans s’attaquer véritablement à la mise en place de solutions.
En effet, de quelles protéines parle-t-on ? Il faut savoir qu’en les comptabilisant dans leur ensemble, en incluant l’herbe, le blé, le lait, etc., la France est largement excédentaire. Je préfère donc que nous travaillions plus précisément sur l’autonomie fourragère de nos élevages, sur la cohérence entre nos filières végétales et animales, ou encore sur la relance des filières protéagineuses.
D’ailleurs le Président de la République s’était engagé à ce que nous puissions soutenir un plan Protéines. Des parlementaires européens, comme M. Jean-Paul Denanot, ancien président de la région Auvergne…
M. Bernard Delcros. Centre !
M. Stéphane Travert, ministre. … la région Centre, pardon, travaillent sur ces sujets au Parlement européen. Nous devons accompagner ces travaux.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour explication de vote.
M. Pierre Cuypers. Je soutiens totalement l’amendement de M. Labbé. La France est vulnérable, car elle est dépendante du reste du monde pour ses approvisionnements en protéines. Monsieur le ministre, au-delà de la loi que nous sommes en train d’élaborer, quel plan Protéines pour la France ? Quel plan Protéines pour l’Europe ?
Plus ça ira, plus nous serons dépendants en matière de protéines végétales. Je pense plus particulièrement aux légumineuses. Pour avoir été moi-même président de l’interprofession française et européenne des protéines, je sais les difficultés pour développer cette filière. S’il n’y a pas une volonté politique d’accompagner le développement de la recherche génétique sur des plantes riches en protéines, nous n’aboutirons pas et nous serons de plus en plus vulnérables et dépendants du reste du monde.
Grâce au ciel, nous avons développé les biocarburants – j’espère que cela va continuer –, pour lesquels nous produisons des matières riches en protéines sans nuire à la production alimentaire.
C’est une vraie richesse qu’il faut cultiver. Monsieur le ministre, je réitère mon interrogation : quel plan Protéines pour la France, tout de suite ?
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Monsieur Labbé, je pensais que votre amendement pouvait faire l’unanimité. Je dois dire que je suis surpris de votre position, monsieur le ministre. Quelle ambition avons-nous ? Il y a un vrai problème. Vous dites vouloir marquer l’histoire de la France par une reconquête, un renouveau de l’agriculture, avec une nouvelle stratégie permettant une meilleure indépendance et une meilleure traçabilité de l’alimentation répondant aux attentes des citoyens. Quel plus bel exemple que celui des protéines ? Nous n’avons pas arrêté depuis trois jours de parler des OGM, car les consommateurs, et vous l’avez vous-même dit, n’en veulent pas. Il faut bien sûr répondre à l’attente des consommateurs, mais ne piégeons pas les agriculteurs. Permettons-leur d’accéder à cette indépendance en matière de production de protéines.
Monsieur le ministre, vous avez succédé à Stéphane Le Foll, qui, j’ose le dire, même s’il n’est pas de ma sensibilité, a eu l’audace de mettre en place en France un plan Protéines, lequel permettait notamment, dès lors que l’on avait 50 % de légumineuses dans les pâturages, de bénéficier d’un accompagnement budgétaire. C’était un encouragement à la production locale, à l’indépendance. Depuis le 1er janvier 2018, ce plan a été supprimé. Pourquoi ?
Certes, vous présentez au Sénat un texte allant bien plus loin que les règles européennes, et qui est censé répondre à des attentes sociétales – c’est le cas des protéines –, mais, sur ce sujet, vous êtes en panne. Il n’y a rien ! On est dans le vide, parce que, depuis le 1er janvier 2018, des milliers d’hectares sont abandonnés, les agriculteurs n’étant plus accompagnés pour produire des protéines, et cela va signer le retour du soja… du soja OGM.
M. Laurent Duplomb. Eh oui !
M. Daniel Gremillet. Nous sommes en pleine incohérence ! C’est pourquoi je soutiens le rapporteur. Pour tout vous dire, je ne pensais même pas prendre la parole, car je croyais que le ministre ne pouvait être que d’accord. Eh bien non ! Franchement, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Duplomb. C’est sûr !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur de la commission des affaires économiques. Monsieur Labbé, votre amendement est un amendement de cohérence par rapport à un certain nombre de votes qui ont été émis depuis quelques jours.
Vous avez parlé de la biodiversité du sol. Vous avez raison, les légumineuses peuvent en effet être accompagnées de graminées dans les prairies, mais, pour ma part, je vais m’attarder sur la production de céréales.
Lorsque l’on introduit dans un assolement des légumineuses, on améliore la structure du sol en y apportant de l’humus. La luzerne, dont les racines peuvent être très profondes – attention toutefois aux drainages, et je sais que vous êtes contre, monsieur Labbé (Sourires.), qui peuvent boucher les tuyaux – enrichit le sol en azote, naturellement, par le biais des nodosités et de la photosynthèse, et le nettoie. Ainsi, sur certains sols argileux, on peut faire pousser du blé derrière une luzerne quasiment sans désherbant.
Il y a un autre intérêt. On a beaucoup parlé de la solidarité entre les paysans. Dans certaines régions, on recherche une solidarité entre les producteurs de céréales de grande culture qui voisineraient avec d’autres producteurs, tels que des producteurs laitiers. Par exemple, en Franche-Comté, les producteurs de comté sont situés en montagne, pour la plupart, et ils ne peuvent pratiquement pas produire de culture. Par parenthèse, je me souviens avoir été obligé, une fois, de contredire M. Hulot, qui opposait ceux qui nourrissaient leur bétail à l’herbe et ceux qui le nourrissaient au soja. Mais on ne nourrit jamais complètement une vache ni au soja ni à l’herbe, notamment, dans ce dernier cas de figure, quand on ne peut pas la cultiver.
L’hiver, donc, on donne du foin aux vaches, mais elles ont besoin de quelques compléments en protéines. Or ces compléments pourraient justement être fournis par les céréaliers des zones voisines qui produisent de la luzerne. Comme, en même temps, la méthanisation, dont la chaleur doit être récupérée pour éviter la déperdition, est encouragée, elle pourrait même servir à sécher la luzerne.
C’est – je n’aime pas beaucoup ces termes, devenus un lieu commun – de l’économie circulaire qu’il conviendrait d’encourager dans le domaine agricole.
Vous voyez, monsieur le ministre, les intérêts à relancer cette filière, sans compter les bénéfices induits pour notre balance commerciale. En effet, moins on importe du pétrole, du soja – que sais-je encore ? –, mieux on se porte.
À mon sens, cet amendement est beaucoup plus important qu’il n’y paraît.
M. Ladislas Poniatowski. Monsieur le ministre, on vous a posé une question précise !
M. le président. Monsieur Poniatowski, c’est moi qui préside !
Je mets aux voix l’amendement n° 453 rectifié bis.
(L’amendement est adopté.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur Poniatowski, vous pouvez aussi venir répondre à ma place ! Vous ne m’impressionnez pas, je vous le dis très tranquillement.
Aujourd’hui, je ne remets pas en cause la nécessité d’un plan Protéines. Ne dites pas, mesdames, messieurs les sénateurs, que nous ne faisons rien ou que nous abandonnons ce chantier entrepris par mon prédécesseur. Je l’ai d’ailleurs soutenu en son temps, et, comme je suis cohérent, je continue à soutenir cette idée, au ministère de l’agriculture.
Un plan Protéines pour la période 2014-2020, lancé, vous l’avez rappelé, par Stéphane Le Foll, existe déjà. Il est en cours de modification, l’objectif étant que la révision soit achevée à la fin de l’année. Déjà, un certain nombre d’impulsions ont été données à l’intérieur même des trente-cinq plans de filière adoptés – ils doivent bien servir à quelque chose –, et que nous sommes d’ailleurs en train de revoir pour faire le point sur les engagements pris, qu’ils soient sociétaux, commerciaux ou environnementaux. Nous travaillons avec les filières et nous essayons de les accompagner dans cette recherche d’un plan Protéines satisfaisant. Nous estimons que c’est nécessaire. Ces impulsions existent donc bel et bien en France.
Par ailleurs, à l’échelon de l’Union européenne, un plan a été adopté à la fin du mois d’avril dernier par le Parlement européen.
On ne part donc pas d’une page blanche !
C’est enfin l’une des priorités du Grand Plan d’investissement : 5 milliards d’euros dédiés à l’agriculture, dont 3,2 milliards d’euros consacrés à la structuration des filières en amont.
Vous le voyez, nous travaillons sur ces sujets aujourd’hui.
Revenons-en à l’amendement, dont les auteurs souhaitent ajouter dans le titre Ier du code rural et de la pêche maritime l’objectif d’un plan Protéines ambitieux. Je ne suis pas en désaccord avec cette proposition sur le fond, mais, mesdames, messieurs les sénateurs, il nous revient d’écrire le droit, et nous essayons de le faire du mieux possible pour qu’il soit lisible par celles et ceux, qui, demain, devront appliquer la loi. Nous n’avons pas renoncé à cette ambition, mais, compte tenu de la rédaction de cet amendement, je reste hostile à l’amendement qui vient d’être adopté par le Sénat.
M. le président. L’amendement n° 342 rectifié bis, présenté par Mmes Préville et Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Lienemann, M. J. Bigot, Mmes Grelet-Certenais et G. Jourda, M. Duran, Mme Rossignol, M. Kerrouche, Mmes Lepage, Guillemot et Meunier, MM. Madrelle, Tourenne et Marie, Mme Conway-Mouret, M. Jacquin, Mmes Jasmin, Féret et Ghali, MM. Antiste, Courteau et Roger et Mme Espagnac, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Le développement de jardins potagers éducatifs et pédagogiques au sein des établissements scolaires est favorisé ainsi que la consommation des produits cultivés dans ce cadre.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement, dont le premier signataire est Mme Préville, devrait recueillir un large assentiment. Je vais quand même le présenter… (Sourires.)
Il vise à favoriser la réalisation de jardins potagers éducatifs et pédagogiques au sein des établissements scolaires, ainsi que la consommation des produits cultivés. Les potagers et jardins pédagogiques permettent une appropriation douce de la nature et favorisent la prise de conscience de la biodiversité dès le plus jeune âge.
Les élèves qui ont la chance de cultiver des fruits et des légumes tout au long de l’année seront sensibilisés à la fois au respect de l’environnement et à une alimentation saine.
Pour rappel, en novembre 2016, un appel à projets « Potagers et jardins pédagogiques » avait été lancé par le ministère de l’environnement, de l’énergie et de la mer. Il y avait eu alors plus de 10 000 manifestations d’intérêt, et plus de 1 300 établissements avaient été désignés lauréats de cette opération. Plusieurs d’entre eux font aujourd’hui la promotion de cette expérience, riche d’enseignements pour les élèves.
L’éducation à l’alimentation et au développement durable est un levier majeur pour faire évoluer les comportements. C’est dès le plus jeune âge qu’il faut éclairer le consommateur en devenir pour relever les défis de la transition écologique et de la santé publique. C’est aussi une expérience qui a du sens et qui donne un nouveau souffle au projet global d’alimentation saine et durable.
J’irai plus loin pour clore mon propos : ce seront des graines favorables semées dans la tête de nos enfants, initiés non seulement au goût d’aliments qu’ils auront eux-mêmes cultivés, mais aussi à de futures pratiques responsables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Je me demande si cette disposition a véritablement sa place dans les grands principes définissant la politique agricole. L’avis de la commission est plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’objectif que vous visez, monsieur le sénateur, est totalement pertinent, mais il existe déjà aujourd’hui dans la feuille de route définie par les États généraux de l’alimentation pour la politique de l’alimentation. Ainsi, la formation dès le plus jeune âge à toutes ces activités a été retenue. D’ailleurs, nous travaillons avec Jean-Michel Blanquer, ministre de l’éducation nationale, sur des actions avec le milieu scolaire pour former et accompagner les jeunes élèves sur ces sujets. Tous les lycées agricoles y travaillent aussi beaucoup. Même si vous avez raison sur le fond, votre amendement ne relève pas de la loi. Pour une raison de forme, j’émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. L’amendement que j’avais déposé en commission n’a pas été retenu, mais mon souhait était de généraliser ces jardins pédagogiques.
Deux grandes questions se posent actuellement. Quelle planète allons-nous laisser à nos enfants ? Et son corollaire : quels enfants allons-nous laisser à notre planète ?
L’éducation à l’environnement, l’éducation à l’alimentation, l’éducation à la citoyenneté : tout est lié !
Le projet de loi prévoit de « favoriser l’acquisition pendant l’enfance et l’adolescence d’une culture générale de l’alimentation », formule qui n’est pas plus juridique que celle retenue par M. Tissot dans son amendement. Pourtant, nous allons voter cette formule. Justement, les auteurs de cet amendement proposent une application concrète. Personnellement, je pense qu’il faudra prévoir dans ces jardins, qui vont fatalement devenir une réalité, un espace réservé à l’herboristerie et aux plantes médicinales pour la culture de nos jeunes enfants.
M. le président. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour explication de vote.
M. Laurent Duplomb. Les jardins pédagogiques, c’est très bien !
Ils apprennent à tous ceux qui sont très éloignés de la terre que celle-ci demande beaucoup de labeur. Il faut surtout se baisser pour la cultiver.
Ils apprennent aux jeunes que tout n’est pas acquis : ce n’est pas parce que l’on sème ou que l’on plante que l’on récolte.
Ils permettent aussi de voir la réalité, dans un monde virtuel où l’on impose des normes à tout. Les plants de pommes de terre, beaux et bien en fleurs, peuvent soudainement être attaqués par les doryphores. On peut ramasser ceux-ci à la main, mais, quand ils sont trop nombreux, il n’y a plus de pommes de terre !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 342 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 219 rectifié bis, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À la seconde phrase du troisième alinéa du III de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « à mettre en œuvre » sont remplacés par les mots : « et financements permettant l’atteinte des objectifs fixés ».
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe d’un taux de 0,1 % sur le chiffre d’affaires de la grande distribution.
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement a pour ambition de donner les moyens à la politique nationale de l’alimentation d’atteindre les objectifs de transition qu’elle s’est fixés en matière de restauration collective. Un de ces moyens est la création d’un « bonus cantines bio et locales ».
Le passage à 20 % ou même à 30 % de bio n’entraîne pas nécessairement de surcoûts pour les établissements publics, mais une politique plus ambitieuse peut, en fonction des territoires et dans un premier temps, nécessiter un budget supplémentaire, notamment pour des besoins de formation ou de matériel.
Nous souhaitons donc créer un « bonus cantines bio et locales » pour accompagner clairement la transformation de la restauration collective à travers un montage de financements publics et privés.
Ce dispositif doit continuer à être travaillé dans le cadre des réflexions sur le financement de la transition agricole et alimentaire, notamment via le volet alimentation des dispositifs de financement prévus par les États généraux de l’alimentation.
Nous avons eu un débat hier sur l’intérêt pédagogique de favoriser le bio et le lien avec la provenance des aliments. La question des jardins pédagogiques abordée par Joël Labbé et Angèle Préville est aussi très intéressante. Pour mener à bien ces projets, les collectivités doivent être accompagnées et aidées. C’est le sens de cet amendement.
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 191 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 657 rectifié bis est présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, M. M. Bourquin, Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, M. Lurel, Mme Perol-Dumont, MM. Vaugrenard, Duran, Dagbert et Antiste, Mme Conconne, M. Courteau, Mmes Espagnac, Ghali et G. Jourda et MM. Kerrouche et Marie.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À la seconde phrase du troisième alinéa du III de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « à mettre en œuvre » sont remplacés par les mots : « et financements permettant l’atteinte des objectifs fixés dans les zones définies à l’article 1465 du code général des impôts, et dans les écoles et établissements inscrits dans le programme “réseau d’éducation prioritaire” et “réseau d’éducation prioritaire renforcé” ».
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 191.
M. Fabien Gay. L’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime prévoit que le programme national pour l’alimentation encourage le développement des circuits courts et de la proximité géographique entre producteurs agricoles, transformateurs et consommateurs. À cette fin, il préconise des actions pour favoriser l’approvisionnement de la restauration collective, publique comme privée, en produits agricoles de saison ou en produits sous signes d’identification de la qualité et de l’origine, notamment issus de l’agriculture biologique.
Par le biais de cet amendement, nous souhaitons aller plus loin en soutenant les collectivités et les établissements les plus fragiles situés en zone urbaine ou rurale dans la transition agricole et alimentaire. Il est de notre devoir de faciliter la mise en œuvre volontariste des mesures d’adaptation de la restauration collective à une alimentation qualitative.
C’est la raison pour laquelle il paraît indispensable d’accompagner financièrement les collectivités qui en ont particulièrement besoin. Tel est l’objet de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 657 rectifié bis.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces dispositions ne seraient, a priori, pas à leur place dans l’article L. 1 du code précité qui, je le rappelle, définit uniquement les grands objectifs de la politique d’alimentation.
En outre, il est difficilement envisageable d’accorder des financements spécifiques à certaines zones, et pas à d’autres, pour la promotion d’une alimentation saine, qui doit, par définition, bénéficier à tous.
L’avis de la commission est plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’avis est également défavorable. Je n’ai pas d’opposition particulière au fait de soutenir financièrement les collectivités et les établissements les plus fragiles. Néanmoins, c’est plutôt lors de l’examen du projet de loi de finances qu’il faudrait en discuter. Il s’agit d’un cavalier législatif. Il en est de même pour la taxe sur le chiffre d’affaires de la grande distribution. Je vous donne rendez-vous à l’automne lors de la discussion des mesures fiscales au sein du projet de loi de finances.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 219 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 191 et 657 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 undecies, modifié.
(L’article 11 undecies est adopté.)
Article additionnel après l’article 11 undecies
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers sont identiques.
L’amendement n° 100 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mmes Goy-Chavent et Lopez, MM. Daubresse, Moga et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires.
L’amendement n° 241 rectifié bis est présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains, MM. Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot, Mizzon et Détraigne, Mme Sollogoub et MM. Canevet, Luche et D. Dubois.
L’amendement n° 268 rectifié bis est présenté par M. Adnot, Mme Perrot et MM. Revet et Cuypers.
L’amendement n° 325 rectifié bis est présenté par MM. Bonhomme et Pellevat, Mmes Micouleau et Di Folco, M. Mandelli, Mmes Gruny et Kauffmann, M. Bazin, Mmes Chain-Larché, Thomas, Garriaud-Maylam et Delmont-Koropoulis, M. Piednoir, Mme Billon, MM. Rapin et Pointereau, Mmes A.M. Bertrand et Lamure et M. Sido.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement nomme une commission d’experts indépendants qui lui remet, dans un délai d’un an, un rapport sur les impacts économiques, sociétaux et sanitaires qu’aurait la ratification de l’accord de libre-échange avec les pays du Mercosur pour la filière agricole, ainsi que sur les risques liés à la dégradation de la qualité alimentaire, notamment quant aux différences de normes d’hygiène potentiellement existantes.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 100 rectifié septies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Nous proposons la remise d’un rapport d’une commission d’experts indépendants sur les impacts économiques, sociaux et sanitaires des accords internationaux sur la filière agricole.
L’accord UE-MERCOSUR, conclu entre l’Union européenne et l’Argentine, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay, est en effet source d’inquiétudes pour les agriculteurs et les consommateurs. Les différences de réglementation entre nos deux continents semblent menacer notre système agricole d’une concurrence peu loyale.
Le cas des importations de viande bovine est régulièrement évoqué. Cet accord entraînerait l’importation de 70 000 tonnes de viande bovine sud-américaine chaque année. Ces nouvelles importations auront un effet direct et immédiat sur la filière bovine française et européenne. Il est donc important de conduire ces négociations internationales en ayant à l’esprit leurs incidences concrètes.
En outre, cette substitution de certains produits agricoles étrangers aux produits agricoles européens doit se faire sous des conditions de respect de nos critères sanitaires. Il faut donc établir des procédures de traçabilité du produit et de certification sanitaire, afin d’évaluer la qualité nutritionnelle et hygiénique de l’alimentation des consommateurs européens.
Le scandale, en mars 2018, du poulet brésilien avarié, mais aussi la présence de salmonelle dans les exportations du géant BRF ont mis en évidence les risques des accords d’importation de viande sud-américaine. La police brésilienne avait en effet mis au jour un réseau d’inspecteurs d’hygiène corrompus qui certifiaient de la viande avariée comme propre à la consommation.
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour défendre l’amendement n° 241 rectifié bis.
M. Bernard Delcros. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à M. Pierre Cuypers, pour défendre l’amendement n° 268 rectifié bis.
M. Pierre Cuypers. Cet amendement est également défendu.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour défendre l’amendement n° 325 rectifié bis.
M. François Bonhomme. Je n’ajouterai rien, sinon pour m’inquiéter des différences de réglementation dans cet accord de libre-échange avec les pays du MERCOSUR, c’est-à-dire le Brésil, le Paraguay, l’Uruguay et l’Argentine. Vous le savez, cet accord inquiète les acteurs de la filière bovine. Nous attendons que M. le ministre clarifie cette question, et le rapport proposé y participerait.
M. le président. L’amendement n° 607 rectifié, présenté par MM. Tissot, Antiste, Cabanel et Montaugé, Mmes Lienemann, Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 undecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement nomme une commission d’experts indépendants qui lui remettra sous un an, un rapport sur les effets économiques, environnementaux, sanitaires et sociaux, qu’aurait le projet de traité de libre-échange entre l’Union européenne et le marché commun du Sud (Mercosur) une fois ratifié, pour la filière agricole, ainsi que sur les risques liés à la dégradation de la qualité alimentaire.
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Le Gouvernement a mis en place en juillet 2017 une commission d’experts indépendants, dite commission Schubert, chargée d’évaluer l’effet attendu de l’entrée en vigueur de l’accord commercial entre l’Union européenne et le Canada, le CETA, sur l’environnement, le climat et la santé. Cette commission a rendu ses conclusions à l’automne dernier, conformément à ce qui avait été demandé. Cela a donné lieu à un plan d’action du Gouvernement sur la mise en œuvre du CETA.
En cours de négociation, l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les quatre pays du MERCOSUR inquiète à son tour agriculteurs et associations de consommateurs.
En cause, les différences de réglementation entre les deux régions qui font peser la menace d’une concurrence peu loyale entre les producteurs européens et ceux des pays du MERCOSUR. Par exemple, les farines animales ou l’utilisation d’antibiotiques comme activateurs de croissance sont autorisées dans les pays du MERCOSUR, mais interdites dans l’Union européenne.
De même, alors que cet accord pourrait conduire à l’importation de près de 70 000 tonnes de viande bovine sud-américaine par an, il est fondamental de s’interroger en amont sur les procédures de traçabilité et de certification sanitaire pratiquées dans cette région, afin que cet accord n’ait pas des effets préjudiciables à la qualité nutritionnelle et sanitaire de l’alimentation des consommateurs européens.
Aussi, nous demandons au Gouvernement de nommer, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, une commission d’experts indépendants sur le modèle de la commission Schubert. Cette commission lui remettra, dans un délai d’un an, un rapport sur les effets économiques, sociétaux et sanitaires qu’aurait la ratification de l’accord de libre-échange avec les pays du MERCOSUR pour la filière agricole, ainsi que sur les risques liés à la dégradation de la qualité alimentaire, notamment en raison des différences de normes d’hygiène potentiellement existantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Sur le fond, nous sommes tous bien évidemment préoccupés par l’accord de libre-échange avec les pays du MERCOSUR. Peut-être M. le ministre reviendra-t-il sur le sujet pour nous préciser où en sont les négociations et quelle est la position du Gouvernement.
Néanmoins, sur la forme, ces amendements constituent des injonctions au Gouvernement ; ils sont donc irrecevables, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel.
L’avis de la commission est par conséquent défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Avis défavorable, pour deux raisons.
D’abord, l’évocation dans la loi de l’incidence de l’accord avec les pays du MERCOSUR semble inappropriée.
Ensuite, la mise en place d’une telle commission ne nécessite pas de recourir à la loi. J’ajoute que la loi sera promulguée à la rentrée, dans le courant du mois de septembre, et il sera difficile, six mois après, de rédiger un rapport sur les effets de l’accord avec les pays du MERCOSUR, lequel n’aura pas été encore validé, signé et mis en œuvre. En effet, je vous rappelle qu’après la signature d’un tel accord, si cette signature devait advenir, la mise en œuvre de cet accord intervient dans un délai de six ans. La disposition figurant dans ces amendements me semble compliquée à appliquer.
Pour le CETA, un plan d’action a déjà été instauré. Des groupes travaillent sur la vérification et le suivi de ce plan. Le Gouvernement aura l’occasion de donner toutes les informations nécessaires au Parlement le moment venu.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 100 rectifié septies, 241 rectifié bis, 268 rectifié bis et 325 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 607 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 duodecies A
Le III de l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Après la première phrase du même dernier alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Il remet chaque année au Parlement et au Gouvernement son rapport d’activité dans lequel il formule des propositions d’évolution de la politique de l’alimentation. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 11 duodecies A
M. le président. L’amendement n° 592 rectifié, présenté par MM. Tissot, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duodecies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 30 septembre 2018, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les indicateurs utilisés pour la contractualisation en matière de mesures agro environnementales, département par département. Ce rapport précise également comment la mise en œuvre des objectifs contenus par ces indicateurs permet d’atteindre la stratégie globale de la France en matière agro environnementale.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Les mesures agroenvironnementales, ou MAE, sont les mesures mises en place dans le cadre de la politique agricole commune, la PAC, en contrepartie de versements aux agriculteurs volontaires. Elles visent surtout à protéger des paysages ruraux, les cours d’eau, la faune et la flore.
Les MAE consistent en des contrats sur cinq ans, qui tendent à définir et encourager des pratiques agricoles spécifiques, respectueuses de l’environnement. Les agriculteurs qui les mettent en œuvre peuvent alors percevoir un montant majoré d’aides de la PAC.
Ces crédits sont cadrés par le règlement européen, dit agroenvironnemental, du 30 juin 1992. Chaque État membre en a subsidiairement fait sa propre déclinaison.
La manière dont la France décline aujourd’hui sa stratégie agricole est fondée sur une logique de moyens, et non d’objectifs. Ainsi, la contractualisation actuelle repose essentiellement sur des indicateurs liés aux moyens – nombre de mètres linéaires de fossés, de haies à rajouter, etc.
Le rapport demandé dans cet amendement permettrait de préciser les objectifs poursuivis avec les MAE, dans le cadre de la stratégie globale de la France en matière agroenvironnementale, et d’analyser dans quelle mesure les moyens mis en œuvre conduisent aux buts visés. Le cas échéant, il pourrait être judicieux de faire évoluer les critères des MAE.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Au-delà de nos réticences à multiplier les rapports, cet amendement me semble renvoyer sur le fond à un sujet qui relève davantage des négociations sur la nouvelle PAC que d’un rapport du Gouvernement. Je pense qu’il s’agit d’un amendement d’appel à l’égard du Gouvernement. L’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire, mesdames, messieurs les sénateurs, les MAEC, les mesures agroenvironnementales et climatiques, et les paiements pour services environnementaux font partie des points que nous souhaitons défendre dans le cadre de la PAC. Malheureusement, la France est assez isolée dans ce dossier pour l’instant. Nous devons continuer à travailler, à multiplier les efforts, pour que des alliés nous rejoignent. C’est dans ce but que je vais rencontrer demain et dimanche mon homologue irlandais. Nous allons travailler sur les enjeux liés au Brexit, aux accords internationaux et sur la PAC, les Irlandais étant des partenaires très importants pour la France.
J’en viens à l’amendement. Il convient de ne pas multiplier les demandes de rapport, surtout dans la loi, d’autant que les conseils régionaux, qui sont les autorités de gestion pour la mise en œuvre des MAE au titre du FEADER, doivent déjà établir des rapports annuels de mise en œuvre, aussi appelés RAMO, où sont renseignés les différents indicateurs de réalisation.
Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 592 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 duodecies
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 131 rectifié sexies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, L. Hervé, Dennemont, Hassani et Lévrier.
L’amendement n° 541 rectifié est présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 703 rectifié est présenté par M. Guillaume, Mme N. Delattre, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gold et Guérini, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville et Vall.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après la première phrase de l’article L. 611–6 du code rural et de la pêche maritime, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Cette certification concourt de façon majeure à la valorisation de la démarche agroécologique mentionnée au II de l’article L. 1. »
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 131 rectifié sexies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à rétablir l’article 11 duodecies, qui a pour objet la certification des démarches agroécologiques.
Cet article consacre la mention « haute valeur environnementale », ou HVE, en lui conférant une définition législative et en la liant aux démarches agroécologiques. Il s’agit de privilégier les modes de production agroécologiques, c’est-à-dire une façon de concevoir des systèmes de production qui s’appuient sur les fonctionnalités offertes par les écosystèmes.
L’agroécologie implique le recours à un ensemble de techniques qui considèrent l’exploitation agricole dans son ensemble. C’est grâce à cette approche systémique que les résultats techniques et économiques peuvent être maintenus ou améliorés tout en renforçant les performances environnementales.
L’agroécologie réintroduit de la diversité dans les systèmes de production agricole et restaure une mosaïque paysagère diversifiée ; le rôle de la biodiversité comme facteur de production en sort renforcé, voire restauré.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 541 rectifié.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise lui aussi à rétablir l’article 11 duodecies, supprimé en commission sur l’initiative de Mme la rapporteur. Cet article précise la définition législative de la mention « haute valeur environnementale » en la liant à la démarche agroécologique.
Près de dix ans après sa création, cette notion valorisante n’a malheureusement presque pas été utilisée. Comme nous l’avons expliqué lors de la défense d’un précédent amendement, elle présente pourtant un réel intérêt, notamment lorsqu’on atteint le niveau 3 de certification, qui s’accompagne du respect d’indicateurs de performance.
Cet amendement tend donc à donner un nouveau souffle à la certification HVE en en faisant une mention valorisante de l’agroécologie. Aujourd’hui, alors même que celle-ci est admise par tout le monde, elle ne bénéficie pas d’un label qui lui soit spécifique. Il s’agit par conséquent de prévoir un label public qui permettrait de certifier la démarche agroécologique des exploitants agricoles.
Bien évidemment, il n’est pas question d’en faire le seul label. Nous sommes d’une manière générale favorables au soutien de toutes les certifications, qui, à l’instar des labels ou mentions valorisantes, participent à la montée en gamme de notre agriculture.
Je veux en conclusion saluer une filière qui a bien compris l’intérêt de la certification HVE et qui va en faire son cheval de bataille : les vignerons indépendants ont choisi cette labellisation pour mettre en avant les vins français.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour présenter l’amendement n° 703 rectifié.
M. Didier Guillaume. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements visent à rétablir l’article 11 duodecies, qui prévoyait que la certification environnementale « concourt de façon majeure à la valorisation de la démarche agroécologique ». La commission avait supprimé cet article au motif qu’il n’apportait aucune plus-value à la certification environnementale. Elle est donc défavorable à ces amendements de rétablissement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je soutiens complètement la démarche de la certification environnementale et ses trois niveaux. Nous avons déjà eu l’occasion de rappeler combien il importe qu’on y entraîne un maximum d’agriculteurs. Je ne souhaite pas, en revanche, limiter cette certification au niveau HVE 3, comme cela a pu être suggéré ; en effet, seules 800 exploitations ont à ce jour reçu cette certification. Selon moi, si l’on veut entraîner avec nous plus de monde pour soutenir une dynamique et une qualité de filière, il faut s’y prendre de façon graduée.
Cela dit, oui, je soutiens une démarche d’amplification de la certification HVE, comme cela a été affirmé lors États généraux de l’alimentation. Les initiatives se multiplient dans ce domaine : vous venez de citer, monsieur Cabanel, l’exemple des vignerons indépendants. Aujourd’hui, la haute valeur environnementale est une démarche qui permet de fédérer et de valoriser ces initiatives autour d’un référentiel commun, que je soutiens dans l’action quotidienne du Gouvernement.
Néanmoins, s’il est nécessaire de mettre en valeur la certification HVE, dont je rappelle qu’elle ne concerne aujourd’hui, au maximum, que 800 exploitations, cela ne sert à rien en revanche d’inscrire dans la loi que cette démarche contribue à la valorisation de l’agroécologie.
Il est plutôt nécessaire, à mes yeux, de réfléchir aux leviers à mettre en œuvre pour faire en sorte qu’un maximum d’exploitations puisse d’abord atteindre le niveau 2 de certification environnementale, puis monter en gamme vers le niveau 3. Ainsi, un nombre plus important d’exploitations bénéficieraient du label HVE. Ne bloquons pas la situation, car le nombre d’exploitations aujourd’hui concerné est bien trop peu élevé par rapport au nombre d’agriculteurs nécessaire pour porter l’exigence de qualité vers laquelle nous tendons à travers ce projet de loi.
Par conséquent, le Gouvernement est défavorable à ces amendements, même s’il soutient à l’évidence totalement la démarche de certification HVE.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. Cela fait deux fois que la commission supprime du présent texte la notion d’agroécologie. Décidément, mes chers collègues, il me semble que vous avez un problème avec l’agroécologie ! Madame la rapporteur, très cordialement, il me faut vous demander une explication.
Cela fait deux ou trois fois que vous nous déclarez simplement que l’amendement en discussion ne correspond pas à la position de la commission, sans aborder le fond. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi vous êtes opposée à ces amendements et à la mise en avant de l’agroécologie, qui est aujourd’hui prise en compte par bien des agriculteurs dans de très nombreuses exploitations, et pourquoi vous n’êtes pas favorable à la certification « haute valeur environnementale » ? J’aimerais une explication, parce qu’elle ne nous a pas été donnée.
Quant à vous, monsieur le ministre, ce n’est pas la première fois que vous nous faites le coup ! Vous êtes entièrement d’accord, mais vous n’êtes pas d’accord ! Dont acte, mais c’est dommage. Si vous étiez tout simplement d’accord, à un moment ou à un autre, cela nous motiverait lors de l’examen de ce texte, ne serait-ce qu’une seule fois après quatre jours, deux nuits et je ne sais combien d’heures de débat ! (Sourires.)
Je terminerai mon propos sur une note plus sérieuse, car il est une chose qu’il ne faut pas oublier : la situation de l’agriculture, des sols, de la pollution et de l’environnement mérite que l’on prenne ces sujets vraiment au sérieux.
On a pu entendre, tout à l’heure, tout un tas de déclarations : il fallait améliorer les sols, produire plus de protéines, plus de ceci, plus de cela. Tout cela, c’est déclaratif ! Or certains amendements déclaratifs ont été acceptés par la commission, quand d’autres ont été refusés. Peu importe, c’est le choix de la majorité sénatoriale, mais sur ces amendements-ci, si la notion d’agroécologie ne devait figurer nulle part dans ce texte, ce serait quand même un choc par rapport à ce qui a été accompli jusqu’à présent, notamment par les agriculteurs français.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. J’ai bien entendu les argumentaires de chacun, mais je ne comprends pas, moi non plus, ce manque de volonté d’inscrire notre agriculture dans l’agriculture durable. Qu’est-ce que l’agroécologie ? C’est diminuer les émissions de gaz à effet de serre, c’est limiter les engrais de synthèse, c’est réduire les produits phytosanitaires, c’est préserver l’eau et l’énergie, et ce sont des performances économiques, sociales et environnementales. Nous sommes tout de même nombreux à nous retrouver sur ces sujets, et ce serait un signe fort de l’inscrire dans le texte.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Je veux profiter de cette discussion pour évoquer la question plus générale de ce que j’appelle les « certifications délibérées ».
On se plaint, souvent à juste titre, de la surtransposition, ou encore des normes imposées, qui tombent sur le dos de nos agriculteurs avec, parfois, les conséquences que l’on sait.
Quelques-uns d’entre nous ont auditionné, il y a deux ans, un agronome américain, professeur d’université originaire, si je ne m’abuse, de l’Arkansas, qui nous a appris que beaucoup de farmers américains s’étaient engagés dans des démarches de certification quasiment de type ISO.
Je suis convaincu que, en tant que Français, en tant qu’Européens, nous avons intérêt à construire une agriculture orientée vers l’agroécologie à partir de telles normes délibérées du type de la certification HVE. Une question stratégique se pose. Les marchés se gagnent grâce aux prix, grâce à la qualité, mais aussi grâce à des stratégies de normes.
À l’échelle de la planète, dans le domaine des échanges de denrées alimentaires, une véritable bataille se livre autour des normes. En matière agricole comme en matière industrielle, on fait souvent le constat, y compris sur nos travées, que nous sommes plutôt en retrait sur cette question des normes : nous n’utilisons pas celles-ci comme un moyen offensif de conquête des marchés, j’en suis convaincu.
Pour faire la synthèse de mon propos, j’estime qu’on a vraiment intérêt à ce que le plus grand nombre possible d’agriculteurs français s’engagent dans ces démarches de normes délibérées du type de la certification HVE qui sont liées à l’agriculture agroécologique. C’est évidemment indispensable, et je voterai donc, avec les autres membres de mon groupe, en faveur de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Michel Raison, rapporteur. Depuis quelques jours, on fait beaucoup de communication autour de certains termes. Pour anticiper la réponse que Mme la rapporteur fera à M. Guillaume, le terme « agroécologie » figure tout de même dans le code rural et de la pêche maritime.
Cela dit, la base du métier d’agriculteur, c’est l’écologie, étymologiquement parlant. En effet, tout agriculteur qui se respecte et qui a de surcroît fait quelques études agricoles la pratique. D’ailleurs, même à l’époque où les agriculteurs ne faisaient pas d’études, ils savaient du moins observer : ils avaient la science du sol, ils avaient la connaissance du milieu. Tout agriculteur observe ses sols, observe le ciel, observe la vie des animaux ; il va voir, le soir, s’il y a une attaque d’insectes ; il va observer quelles sont les pousses de mauvaises herbes ; il prend sa bêche pour aller étudier le sol, car depuis très longtemps les agriculteurs savent faire une fosse pour apprendre si s’est formée une semelle de labour. Toutes ces notions, c’est de l’agroécologie ! (M. Laurent Duplomb applaudit.)
C’est pourquoi je suis parfois un peu estomaqué qu’on prétende ici redécouvrir le vrai métier d’agriculteur tout en sous-estimant la qualité des agriculteurs. Moi, j’ai connu un ancien agriculteur qui m’étonnait…
M. Didier Guillaume. Vous faites une mauvaise interprétation de nos propos ! Vous pouvez dire ce que vous voulez, mais ce n’est pas ce que nous disons !
M. Michel Raison, rapporteur. Monsieur Guillaume, vous n’êtes pas président de séance, laissez-moi donc finir !
J’insiste sur le fait que, un peu comme M. Jourdain faisait de la prose sans le savoir, certains agriculteurs que je connais font de l’agroécologie sans le savoir.
M. Didier Guillaume. Évidemment !
M. Michel Raison, rapporteur. Eh bien, si c’est évident, pourquoi déposer des amendements qui visent des choses qui existent déjà ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
C’est justement ce que je voulais démontrer, et je vous remercie, monsieur Guillaume, de confirmer que mes propos sont évidents et que c’est naturel pour un agriculteur de faire de l’écologie.
M. Didier Guillaume. Je l’ai toujours dit ! Mais vous avez voté l’amendement sur les protéines. Ce n’est pas cohérent !
M. Michel Raison, rapporteur. Cela n’avait rien à voir !
M. le président. La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Mes chers collègues, l’agroécologie ne nous cause aucun souci ! On peut, dans certains secteurs, la traduire par la multifonctionnalité ; c’est le cas dans un secteur que je connais bien, la forêt. La multifonctionnalité de la forêt répond à des préoccupations à la fois économiques, environnementales et sociétales.
L’agroécologie nous pose d’autant moins de problèmes que le code rural et de la pêche maritime consacre déjà pratiquement une demi-page à sa définition dans toutes ses dimensions.
Nous sommes donc tout à fait d’accord sur ce sujet. La commission considère simplement que les amendements concernés n’apportent pas de plus-value.
M. Didier Guillaume. Pas plus que l’amendement sur les protéines !
M. Michel Raison, rapporteur. Encore une fois, cela n’a rien à voir ! C’est de la politique agricole.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Je veux revenir sur quelques éléments. Il est vrai que nous faisons la loi, mais nous faisons également de la politique.
M. Fabien Gay. Ah ! Merci !
M. Stéphane Travert, ministre. Faire de la politique, c’est aussi pouvoir envoyer des signes. Un certain nombre de signes de confiance a d’ailleurs été adressé à nos agriculteurs et à nos filières – c’est selon moi important –, par la majorité sénatoriale, à travers l’adoption d’amendements qui, reconnaissons-le, n’apportaient parfois rien au regard du contenu du projet de loi.
En revanche, nous qui écrivons le droit avons le devoir de veiller à ce que la loi soit efficace et peu bavarde. C’est ainsi que nous pourrons nous concentrer sur les mesures nécessaires à l’agriculture, c’est-à-dire, je le rappelle, celles qui concernent, d’une part, le revenu agricole et, d’autre part, la mise en place de conditions assurant de nouveaux débouchés commerciaux et une alimentation plus saine, plus sûre, plus durable et accessible à tous.
Je ne voudrais pas toutefois qu’on puisse croire que, à l’issue d’un débat comme celui-ci, l’agroécologie ou les démarches de certification HVE seront balayées d’un revers de la main. Je rejoins somme toute Michel Raison, qui expliquait à l’instant que les agriculteurs sont aujourd’hui les premiers écologistes de la nature. Nous sommes tous d’accord sur ce point.
M. Didier Guillaume. Oui, nous sommes d’accord !
M. Stéphane Travert, ministre. En effet, un agriculteur entretient ses paysages, il entretient son cheptel, notamment parce qu’il en a besoin pour percevoir un revenu, quand bien même, nous en convenons tous, ce revenu est bien souvent insuffisant.
Je ne connais pas d’agriculteur qui n’entretienne pas ses terres ou qui n’utilise pas à bon escient des pesticides ou des produits phytosanitaires : il ne recourt à de telles substances que par nécessité. Et l’emploi de ces produits figurait dans l’enseignement dispensé aux agriculteurs. Aujourd’hui, les formations évoluent ; dans les lycées agricoles, elles sont tournées vers l’agroécologie. Il faut le souligner.
Dès lors, comme je considère que les signes ou les marqueurs politiques sont eux aussi importants, et que je suis personnellement sensible à ces symboles, je vais faire quelque chose que je fais peu : je m’en remets, en fin de compte, à la sagesse du Sénat sur ces amendements.
En effet, je ne voudrais pas qu’on puisse considérer que mon ministère et moi-même ne sommes pas cohérents avec ce que j’ai toujours soutenu les années précédentes. Ainsi, nous pourrons continuer à avancer sur ces sujets.
M. Henri Cabanel. Merci, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je veux saluer le discours de M. le ministre : cet avis de sagesse est le bienvenu et il me paraît important d’y être parvenu.
Quant à l’agroécologie, à vrai dire, tout ce débat montre la nécessité de l’inscrire dans la loi. Vous avez parlé de communication, monsieur le rapporteur. Peut-être, mais il n’empêche. Au-delà, il faudra définir l’agroécologie.
J’ai en revanche été quelque peu choqué par vos derniers propos. Bien sûr, les agriculteurs sont au plus près de leur sol, bien sûr, ils vont voir leur terre, mais j’en connais pour ma part beaucoup qui sont catastrophés par ce qui se passe. Ils vont observer leur sol avec une bêche et ils s’aperçoivent qu’il n’y a plus de biodiversité, qu’il n’y a plus rien, et qu’il faut changer de cap. Notre rôle est aussi d’indiquer cette nouvelle direction et de les accompagner vers l’agroécologie. Tel est selon moi le sens de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Il n’est pas du tout dans notre état d’esprit d’opposer deux sortes de professionnels agricoles, les routiniers qui massacreraient l’environnement, d’une part, et ceux qui seraient parés de toutes les vertus, d’autre part. Au contraire, il est absolument évident que les agriculteurs, quels qu’ils soient, contribuent à l’entretien de l’environnement, parce que c’est la base fondamentale de leur métier.
Cela étant dit, certains d’entre eux se sont lancés dans des démarches expérimentales complexes et exigeantes, dont l’un des objectifs finaux est de diminuer le volume des intrants. Ces démarches sont économiquement difficiles, mais elles méritent d’être encouragées par le biais de cette certification.
Et si vous offrez cette certification aux agriculteurs qui pratiquent l’agroécologie, les autres exploitants ne subiront pour autant aucun préjudice ; c’est simplement la reconnaissance d’une démarche expérimentale, scientifique et de recherche qui, un jour ou l’autre, offrira sans doute des solutions techniques à tous les agriculteurs. À ce titre, il est intéressant de les aider pour le futur.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. À écouter Michel Raison, avec toute sa technique, son ancienneté et son expérience, on ne peut qu’adhérer à ses propos.
Cela dit, l’agriculture est mon milieu depuis toujours, et les agriculteurs n’ont pas toujours été des écologistes : on les a quelquefois encouragés à utiliser certains produits, pour ainsi dire à l’insu de leur plein gré ! (Sourires.) J’ai été moi-même le premier à le faire ! Il y a quarante ans, quand on revenait de traiter le maïs, on était tout bleu ! Étions-nous vraiment écologistes ?…
Je ne veux par ces propos, à l’évidence, condamner personne : nous étions alors dans une dynamique autre que celle d’aujourd’hui. Il n’en reste pas moins qu’on retrouve toujours de l’atrazine dans l’eau, alors que cela fait quinze ans que ce produit n’est plus autorisé.
M. Michel Raison, rapporteur. Justement ! Nous ne sommes plus dans cette agriculture-là !
M. Jean-Claude Tissot. C’est pourquoi nous avons déposé de tels amendements ; ils représentent aussi la possibilité d’une agriculture nouvelle : nous voulons donner une nouvelle orientation, sans aucune autre prétention.
Je ne suis pas sénateur depuis longtemps et c’est le premier texte important à l’examen duquel je participe le plus activement possible. Pour autant, je m’interroge : si l’on ne s’autorise pas de telles ambitions, où pourra-t-on les exprimer si ce n’est ici ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 131 rectifié sexies, 541 rectifié et 703 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 11 terdecies A
I. – Au plus tard le 1er janvier 2030, les cahiers des charges des signes d’identification de la qualité et de l’origine mentionnés au 1° de l’article L. 640-2 du code rural et de la pêche maritime intègrent des exigences environnementales dont le niveau minimal et les modalités sont fixés par décret pris après avis des organismes de défense et de gestion concernés.
II. – Le décret mentionné au I intervient au plus tard le 1er janvier 2021.
M. le président. L’amendement n° 645 rectifié, présenté par MM. Gremillet et Duplomb, Mme Bruguière, MM. Pointereau et Reichardt, Mme Delmont-Koropoulis, M. de Nicolaÿ, Mme Morhet-Richaud, MM. Piednoir, Paul, Mouiller et Cuypers, Mmes Chain-Larché et Thomas, MM. Joyandet, Morisset, Revet, Huré, B. Fournier et Savary, Mme Lassarade, M. Priou, Mme Gruny, MM. de Legge, Pillet et Babary, Mme Imbert, M. Lefèvre, Mmes de Cidrac, Bories, Lamure et Deromedi, MM. Charon, Pierre, Rapin et Sido, Mme Lanfranchi Dorgal, M. Laménie, Mme A.M. Bertrand, MM. Bouchet et Poniatowski, Mme Duranton et MM. Cornu, Vaspart et Bonne, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. Cet amendement s’appuie lui aussi sur notre histoire. Les paysans ont mis en œuvre des signes de qualité depuis au moins 1905. Il nous est proposé dans ce texte d’alourdir les critères de ces signes de qualité en y incluant certaines démarches environnementales. Celles-ci sont pourtant déjà prises en compte dans les critères spécifiques de chacun de ces signes de qualité.
Nous relevons un point majeur, monsieur le ministre : en permanence, les évolutions législatives, qu’elles aient été décidées à l’échelon européen ou national, imposent des comportements nouveaux à l’agriculture. Tous les territoires, même ceux qui disposent de signes d’identification de la qualité, doivent alors les mettre en œuvre.
Et l’on exigerait d’ici à 2030 que les cahiers des charges de ces signes comportent des mesures environnementales supplémentaires. Je vous rappelle pourtant, monsieur le ministre, que la France a été pionnière. Elle a même été l’élément moteur à l’échelon communautaire, et grâce au travail des ministres, des gouvernements successifs, des organisations professionnelles et d’un savoir-faire, elle a fait reconnaître ces signes de qualité au niveau européen, il n’y a pas si longtemps.
Je crois donc nécessaire de nous en tenir à cette conception de la responsabilité et du savoir-faire des territoires. Ce texte n’est pas fait pour alourdir ; il est fait – vous l’avez dit vous-même, monsieur le ministre – pour regagner de la valeur ajoutée et pour monter en gamme. Depuis 1905, on n’arrête pas de monter en gamme !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement de suppression, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les États généraux de l’alimentation ont réaffirmé la nécessité de prendre davantage en compte les questions relatives à l’environnement et de concilier la performance économique et la performance environnementale. Dans cet objectif, les filières sous signes de qualité ont entamé un travail très important dès 2016 ; elles ont d’ores et déjà déterminé une liste de mesures types qui peuvent être directement intégrées dans les cahiers des charges si les opérateurs concernés le souhaitent.
Une autre approche, tout aussi valable pour un organisme de défense et de gestion, est de permettre l’addition de deux démarches : les cahiers des charges SIQO, d’une part, et la certification environnementale ou la certification bio, d’autre part. Ainsi, le producteur pourra valoriser ses pratiques et le consommateur pourra en prendre connaissance.
Le présent article permet de se fixer une échéance pour finaliser ces travaux. Il est important, car il permet de définir les modalités de mise en œuvre de cette démarche. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement de suppression.
M. le président. En conséquence, l’article 11 terdecies A est supprimé et les amendements nos 542 rectifié, 737 et 376 rectifié ter n’ont plus d’objet.
L’amendement n° 542 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer l’année :
2030
par l’année :
2025
II. – Alinéa 2
Remplacer l’année :
2021
par les mots :
dans les six mois qui suivent la promulgation de la présente loi
L’amendement n° 737, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
L’amendement n° 376 rectifié ter, présenté par MM. Jacquin, Iacovelli, Courteau et Tissot, Mmes Lienemann et Espagnac, MM. Daudigny et Kerrouche, Mme Grelet-Certenais, M. Houllegatte, Mme Jasmin et MM. Tourenne, Antiste, Jomier et P. Joly, est ainsi libellé :
Alinéa 1
1° Après les mots :
exigences environnementales
insérer les mots :
équivalentes à la certification environnementale de niveau 3
2° Supprimer les mots :
dont le niveau minimal
Articles additionnels après l’article 11 terdecies A
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 167 rectifié quinquies, présenté par Mmes Saint-Pé, Gatel, Vullien et C. Fournier, MM. Kern et Longeot, Mme Goy-Chavent, M. Détraigne, Mme Dindar, MM. Moga et Mizzon, Mme Billon, MM. L. Hervé, Vanlerenberghe, Delcros, Capo-Canellas, Canevet, Le Nay et Louault, Mme Joissains et MM. Janssens, Poadja et de Legge, est ainsi libellé :
Après l’article 11 terdecies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Un décret précise la définition de la Haute Valeur Environnementale pour les exploitations agricoles élevant des animaux.
La parole est à Mme Denise Saint-Pé.
Mme Denise Saint-Pé. Je tiens avant tout à préciser que M. Brisson, premier signataire de l’amendement n° 222 rectifié bis, a décidé de ne pas le soutenir et de se rallier à celui que nous examinons.
Le présent amendement vise à encadrer la définition de la certification « haute valeur environnementale » pour les produits issus de l’élevage et à imposer de nouvelles obligations en matière d’exigence de résultats.
La certification HVE est aujourd’hui très majoritairement utilisée par des exploitations végétales ou vitivinicoles. Or il est essentiel que les éleveurs puissent prétendre à une certification qui prenne en compte des enjeux environnementaux et nutritionnels.
C’est la raison pour laquelle nous proposons que soient fixés par décret de nouveaux critères de définition de la certification HVE pour l’élevage sur une base d’obligation de résultat. Les objectifs seraient la diminution des émissions de gaz à effet de serre, l’amélioration de la qualité nutritionnelle des produits animaux et la diminution de la déforestation importée.
J’ai noté, monsieur le ministre, votre soutien à cette dernière démarche il y a quelques minutes. Je souhaite que, sur cet amendement, le marqueur politique soit le même.
M. le président. L’amendement n° 222 rectifié bis, présenté par M. Brisson, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bascher et Lefèvre, Mme Lassarade, MM. Paccaud, Danesi, Mayet et Revet, Mmes Deroche et Delmont-Koropoulis, MM. Panunzi, Pellevat et Paul, Mmes Morhet-Richaud et Deromedi, M. Rapin, Mmes Lamure et A.M. Bertrand, M. Laménie, Mmes Bories et Duranton et M. Charon, est ainsi libellé :
Après l’article 11 terdecies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La labellisation Haute Valeur Environnementale est étendue aux exploitations agricoles élevant des animaux. Un décret en précise les conditions.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Nous retirons cet amendement au profit de l’amendement n° 167 rectifié quinquies, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 222 rectifié bis est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 167 rectifié quinquies ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La question de l’adaptation de la certification environnementale aux élevages d’animaux a été soulevée au cours de nos auditions. Il est néanmoins apparu qu’il existait déjà quelques élevages certifiés. Cette notion mérite certainement des éclaircissements de la part du Gouvernement, notamment au regard des travaux qui seraient en cours sur ce sujet.
Cela dit, je demande le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Madame la sénatrice, la HVE est une certification d’exploitation et non pas une certification de filière. On ne peut donc pas définir des exploitations d’élevage HVE.
Les indicateurs de performance qui identifient les exploitations bénéficiant de ce label seront revus dans le cadre des travaux de la Commission nationale de la certification environnementale, afin de mieux prendre en compte les spécificités de la filière animale, conformément à ce que nous avons décidé dans la feuille de route des États généraux de l’alimentation.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 167 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 117 rectifié septies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Hassani, Moga, Lévrier et Marchand, est ainsi libellé :
Après l’article 11 terdecies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, les différents signes d’identification de la qualité et de l’origine, labels et mentions valorisantes intègrent dans leurs cahiers des charges le respect de la biodiversité. Pour cela, les cahiers des charges introduisent des indicateurs permettant d’obtenir une équivalence avec la certification environnementale de niveau 3 ou de demander aux producteurs une labellisation Haute Valeur Environnementale de leur exploitation pour produire sous signe de qualité.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à intégrer progressivement la biodiversité et l’environnement dans les cahiers des charges des signes d’identification de la qualité et de l’origine, les SIQO.
Le contrôle des produits sous SIQO permet de s’assurer qu’ils sont élaborés selon les éléments définis dans chacun des cahiers des charges qui les caractérisent. Cette garantie est importante pour le consommateur, ainsi que pour les professionnels qui interviennent dans l’élaboration des produits. Elle permet en effet de protéger ceux-ci, par exemple, des risques de concurrence déloyale ou de contrefaçon. C’est ce contrôle qui donne sa pleine légitimité à l’ensemble de la procédure.
Cet amendement tend à intégrer la promotion des produits issus d’exploitations respectueuses de la biodiversité parmi les objectifs de la politique conduite dans le domaine de la qualité et de l’origine des produits agricoles, forestiers ou alimentaires, et des produits de la mer.
Les produits sous SIQO doivent en effet promouvoir une agriculture de qualité et non pas seulement des produits de qualité. Pour ce faire, les cahiers des charges des SIQO doivent comporter le respect du bien-être animal, de l’environnement et de la biodiversité.
M. le président. L’amendement n° 118 rectifié quinquies, présenté par MM. Decool et Wattebled, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Guerriau, Chasseing, Bignon, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Fouché et Daubresse, est ainsi libellé :
Après l’article 11 terdecies A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les moyens de renforcer la cohérence entre les signes d’identification de la qualité et de l’origine et le respect de l’environnement, étudiant notamment l’opportunité de réserver les appellations d’origine contrôlées aux seuls produits issus d’exploitations certifiées Haute Valeur Environnementale ou de l’agriculture biologique.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Il s’agit d’un amendement de repli, presque identique au précédent. La seule différence entre eux est le délai proposé : il est de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi dans l’amendement précédent, mais d’un an dans celui-ci.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement vise à rendre obligatoire, d’ici à cinq ans, l’inscription de critères liés au respect de la biodiversité dans les cahiers des charges des signes de qualité et des mentions valorisantes.
Seraient ici visés non seulement les signes de qualité, mais aussi toutes les mentions valorisantes.
Qui plus est, le délai envisagé de cinq ans nous semble très insuffisant. En outre, ces critères devraient correspondre à une certification environnementale de niveau 3, ce qui paraît excessif.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Monsieur le président, il ne s’agit pas d’une explication de vote sur ces amendements.
À l’article 11terdecies A, l’adoption de l’amendement n° 645 rectifié a rendu sans objet les amendements nos 542 rectifié et 737. Quid de l’amendement n° 376 rectifié ter ? Est-il lui aussi devenu sans objet ? Il n’était pourtant pas en discussion commune.
M. le président. L’amendement n° 645 rectifié était un amendement de suppression. Son adoption ayant entraîné la suppression de l’article, les autres amendements n’avaient plus lieu d’être.
M. Roland Courteau. Je vous remercie de ces précisions, monsieur le président.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 117 rectifié septies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 118 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 11 quaterdecies
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 628 est présenté par Mmes Schillinger et Rauscent, MM. Théophile, Patriat et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 705 rectifié est présenté par MM. Guillaume, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty et Gold, Mmes Guillotin et Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport portant sur la définition de la déforestation importée, sur les pratiques agricoles qui y contribuent significativement et sur les pistes à suivre pour les réduire.
La parole est à Mme Noëlle Rauscent, pour présenter l’amendement n° 628.
Mme Noëlle Rauscent. Alors que la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée, la SNDI, devrait être entérinée au mois de juillet prochain, le concept même de déforestation importée reste à définir. C’est tout l’objet de cet amendement.
Nous devons nous emparer pleinement de ce sujet, car ce sont près de 7 millions d’hectares de forêt qui disparaissent chaque année dans les pays tropicaux, et c’est l’agriculture qui reste le principal moteur de la déforestation.
Alors que la demande globale pour la production ne cessera d’augmenter, nous sommes persuadés que la sécurité alimentaire pourra être atteinte par d’autres moyens que par l’expansion des zones agricoles au détriment des forêts.
Nous devons donc mettre en place un cadre légal et réglementaire efficace pour que nos acteurs prennent leurs responsabilités. En effet, les entreprises françaises figurent parmi les premiers acheteurs de commodités forestières et agricoles ; elles ont par conséquent une responsabilité particulière.
Dans le plan Climat publié au mois de juillet 2017, le Gouvernement s’était engagé à « mettre un terme à la déforestation importée ». La France doit être le moteur européen de cette lutte.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour présenter l’amendement n° 705 rectifié.
M. Didier Guillaume. Cet amendement s’inscrit dans la même veine.
Beaucoup a déjà été dit dans le monde sur cette question. Ainsi, la déclaration de New York de 2014 a fixé un objectif de réduction de la moitié du rythme de disparition des forêts d’ici à 2020, mais de fin de leur perte à l’horizon 2030.
Hélène Clark, lorsqu’elle a été administratrice du Programme des Nations unies pour le développement, le PNUD, a déclaré : « Les forêts constituent l’une des ripostes de plus grande envergure et des plus rentables à notre disposition pour relever le défi du changement climatique. »
Sur cet amendement, je remercie d’ores et déjà la commission d’émettre un avis défavorable. (Sourires.) Pourtant, il est très important. C’est l’huile de palme qui est en réalité en cause.
Vous ne pouvez pas critiquer, il y a quinze jours, l’attitude du Gouvernement à propos de l’usine de La Mède, soutenir la FNSEA et les groupements d’intérêts agricoles lorsqu’ils se battent contre l’importation d’huile de palme – je les soutiens aussi, car ils ont raison – et émettre un avis défavorable sur un rapport qui avait été introduit à l’Assemblée nationale pour vérifier les dégâts liés à l’huile de palme dans la déforestation à l’étranger.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Non !
M. Didier Guillaume. C’est pourtant l’objet de mon amendement ! Peu importe votre argumentation.
Mon amendement tend à ce que ce rapport permette de faire le point sur la déforestation liée à l’huile de palme, au soja, au cacao, tous produits qui contribuent à une déforestation importante dans les régions du monde, en Amazonie, en Asie du Sud-Est ou en Afrique centrale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Alors que le Gouvernement est en train de finaliser la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée qui devrait être déterminée d’ici à cet été, il ne nous semble pas opportun de travailler à la définition du concept dans un rapport qui devrait être remis six mois après la promulgation de ce texte.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable, qui porte sur la forme, et non sur le fond.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Nous travaillons à une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. La France souhaite prendre des engagements très clairs sur ce sujet.
De la même manière, nous ne souhaitons pas valoriser les produits issus de la déforestation importée. Cela nous ramène au débat que nous avons eu voilà quelques semaines sur la réouverture de l’usine de La Mède et l’importation d’huile de palme.
Un accord a été trouvé pour un approvisionnement en huile de palme limité à 300 000 tonnes destinées à la fabrication de biocarburants à l’usine de La Mède, mais nous avons toujours affirmé que nous souhaitions défendre notre filière colza, car elle donne de bons résultats sur le territoire national. Elle produit des huiles alimentaires d’excellente qualité, tout comme des tourteaux de colza qui nous permettent de travailler à notre autonomie protéique.
Ce sont là, je crois, des éléments importants.
M. Didier Guillaume. Quels arguments…
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Votre amendement est satisfait !
M. Stéphane Travert, ministre. Nous soutenons la filière colza et allons d’ailleurs entamer avec les producteurs de biocarburants une négociation en vue d’une utilisation maximale de colza pour la production de biocarburants.
Il est important de rappeler que nous étions en première ligne pour lutter contre l’importation de produits issus de la déforestation.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis favorable sur ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 628 et 705 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 11 quaterdecies demeure supprimé.
Articles additionnels après l’article 11 quaterdecies
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 543 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Kanner, Mme Préville, M. J. Bigot, Mme Grelet-Certenais, M. Bérit-Débat, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, MM. Jacquin et Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quaterdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’État se donne pour objectif, à compter de 2021, de n’acheter que des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée.
Un décret précise les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Cet amendement vise à poser le principe selon lequel la France devra cesser d’importer des produits contribuant à la déforestation massive dans le monde en 2021. Il s’agit de lutter contre l’abattage des forêts primaires et tropicales qui nuit profondément à l’équilibre de nos écosystèmes.
Il convient, d’une part, que la France soit exemplaire dans ce domaine, afin de rendre sa parole audible et crédible à l’étranger, d’autre part, que nous soyons cohérents avec les récentes déclarations du ministre de la transition écologique et solidaire, qui a indiqué vouloir mettre fin à la déforestation importée.
Nous avons bien conscience que la stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée est en cours d’élaboration et qu’elle sera finalisée à l’été. Toutefois, l’adoption de cet amendement permettrait d’ores et déjà de concrétiser certains engagements forts.
À l’instar d’un autre sujet beaucoup plus sensible que nous aborderons tout à l’heure, nous ne comprenons pas pourquoi le Gouvernement refuserait d’inscrire dans son projet de loi des annonces qu’il a lui-même faites.
M. le président. L’amendement n° 121 rectifié nonies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mmes Goy-Chavent et Lopez, MM. Daubresse et Moga et Mme Keller, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quaterdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’État se donne pour objectif, à compter de 2022, de n’acheter que des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée et, à compter de 2025, n’ayant pas contribué à la conversion d’écosystèmes naturels. Un décret précise les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Il s’agit du même objet, n’était que les dates retenues sont différentes. Il s’agit là aussi de lutter contre la déforestation importée dans les achats de l’État.
La stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée est en cours d’élaboration. Elle devait être adoptée à la fin de ce mois. L’ajout suggéré permettrait de concrétiser la volonté du Gouvernement. La plupart des entreprises privées visées par la stratégie ont déjà des engagements zéro déforestation pour 2020. Nous proposons par conséquent d’instaurer cet objectif pour le secteur public à compter de 2022, puisque la majorité des achats publics sont effectués auprès de ces entreprises.
Il existe même déjà des certifications et des démarches certifiées par une tierce partie indépendante permettant de garantir l’absence de déforestation – soja, huile de palme, cacao, noix.
L’objectif pour 2025 concerne la conversion d’écosystèmes naturels : conversion de forêts primaires et secondaires, savanes, garrigues et prairies naturelles, tourbières et autres zones humides. Les plantations ne sont pas considérées comme des écosystèmes naturels. Les zones de pâturage destinées au bétail qui sont clôturées ou dominées par une végétation non indigène ne sont pas non plus considérées comme des écosystèmes naturels. Cependant, les systèmes pastoraux ou autres destinés à l’élevage du bétail dans les prairies indigènes sont généralement considérés comme tels.
Cet amendement a pour objet de fixer un cap pour 2025 et de laisser suffisamment de temps pour mettre en place les dispositifs permettant d’y parvenir.
M. le président. L’amendement n° 122 rectifié septies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, M. Daubresse et Mme Keller, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quaterdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’État se donne pour objectif à compter de 2022 de n’acheter que des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée. Un décret précise les modalités d’application du présent article.
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Il s’agit d’un amendement de repli, qui a pour objet que l’État, à compter de 2022, n’achète que des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée.
M. le président. L’amendement n° 470 rectifié bis, présenté par MM. Labbé, Dantec, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Corbisez, Mmes N. Delattre et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quaterdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter du 1er janvier 2022, l’État se donne pour objectif de n’acheter que des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée. Un décret détermine les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Il s’agit d’inviter l’État à être plus vertueux et à se donner pour objectif, à compter de 2022, de n’acheter que des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée.
Cet objectif s’inscrit pleinement dans la lignée du plan Climat, dont l’axe 15 entend interdire l’importation de produits contribuant à la déforestation.
Il faut donc que cet objectif s’applique aussi dans le domaine public. C’est pourquoi nous proposons de l’instaurer pour le secteur public à compter de 2022.
C’est tout à fait faisable, puisque la majorité des achats publics sont effectués auprès d’entreprises ayant déjà pris de tels engagements.
Il existe des certifications et des démarches certifiées par une tierce partie indépendante permettant de garantir l’absence de déforestation, que ce soit pour le soja, l’huile de palme, le cacao, la noix.
Cette mesure va par conséquent dans le bon sens, tout en étant parfaitement réalisable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements ont globalement le même objet : fixer à l’État, en 2021 ou 2022, l’objectif de ne pas acheter de produits ayant contribué à la déforestation importée.
L’amendement n° 121 rectifié nonies vise, en outre, à ne plus acheter de produits ayant contribué à la conversion d’écosystèmes naturels à compter de 2025.
Je rappelle que, en raison de l’adoption de l’article 11 nonies B, nous avons ajouté la promotion des produits n’ayant pas contribué à la déforestation importée à la liste des objectifs de la politique conduite dans le domaine de la qualité et de l’origine des produits agricoles, forestiers ou alimentaires et des produits de la mer.
Le Gouvernement doit par ailleurs publier d’ici à quelques semaines, voire d’ici à quelques jours, sa stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée.
Par conséquent, par cohérence, la commission émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Conformément aux vœux du Président de la République, la France va se doter d’une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée.
Concernant les industries agroalimentaires, il est important de souligner que bon nombre d’entre elles ont déjà engagé des démarches pour s’assurer que les produits qu’elles importent, voire les produits qu’elles fabriquent, n’entraînent pas de déforestation.
Ainsi, en France, une grande entreprise qui produit du pain de mie avec une filière blé 100 % française a supprimé l’huile de palme dans la fabrication de ses produits. Il faut saluer ces gestes environnementaux.
Pour autant, aucun instrument européen n’existe aujourd’hui pour certifier que les produits agricoles et alimentaires importés au sein de l’Union européenne sont exempts de déforestation. La France est en train de pousser la Commission européenne pour qu’un plan d’action communautaire soit mis en place. Nous ne pouvons exiger des fournisseurs de l’État français d’assurer en moins de trois ans la traçabilité des produits qu’ils importent, alors que nous nous inscrivons dans le cadre du marché unique communautaire.
Là aussi, je le rappelle, cela fait partie des points durs que nous n’hésitons pas à rappeler à la Commission européenne ; nous l’avons encore fait dernièrement.
C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 543 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 121 rectifié nonies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 122 rectifié septies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 470 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 187, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quaterdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant l’article L. 201-1 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 200-… ainsi rédigé :
« Art. L. 200-… – L’État a la responsabilité de faire respecter la réglementation sur l’ensemble de la chaîne agroalimentaire.
« Il associe à cette politique les laboratoires départementaux d’analyses ainsi que l’ensemble des acteurs publics et privés contribuant au respect de la législation sur la chaîne agroalimentaire. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Cet amendement vise à inscrire dans le code rural et de la pêche maritime la responsabilité de l’État dans le domaine du respect de la réglementation concernant la chaîne agroalimentaire.
En effet, la chaîne agroalimentaire s’est complexifiée et allongée et a une structure hétérogène, puisqu’elle touche à de nombreux métiers. En outre, elle est composée d’acteurs dont la dimension économique et le nombre à chaque échelon sont très disparates.
Au sommet se trouvent les consommateurs ; à l’autre extrémité, près de la base, se situent les agriculteurs. Entre ces deux entités, les grandes centrales d’achat des groupes de la distribution ont une taille et un pouvoir économique sans commune mesure du fait de leur concentration.
Ainsi, ces grandes centrales deviennent de plus en plus un point de passage obligé pour pouvoir commercialiser les produits. Or, souvent, du fait de la vive concurrence qui sévit entre elles, elles ont des stratégies agressives en termes d’expansion et d’approvisionnement auprès de leurs fournisseurs. Cette situation impose donc que l’État puisse jouer un rôle réglementaire pour cette chaîne. C’est le sens de notre amendement.
Afin d’aller plus loin, nous proposons d’y associer les laboratoires départementaux d’analyses, ainsi que l’ensemble des acteurs publics et privés contribuant au respect de la législation relative à la chaîne agroalimentaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Comme pour toute politique publique, l’État a la responsabilité de faire respecter la réglementation dans l’ensemble de la chaîne agroalimentaire. Quel intérêt de le préciser dans le code précité ?
Par définition, ces dispositions s’imposent aux opérateurs, font l’objet de contrôles et sont passibles de sanctions en cas de manquement.
C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, qui semble satisfait sur le fond.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’article 95 de la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe, précise déjà que les laboratoires départementaux d’analyses sont des acteurs de la politique de sécurité sanitaire. La responsabilité de l’État en matière sanitaire est fixée par le règlement européen n° 178/2002.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures quinze, est reprise à dix-sept heures vingt-cinq.)
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, il reste 259 amendements à examiner. Sur proposition de M. le ministre et avec l’accord de la direction de la séance, nous allons poursuivre nos débats jusqu’à minuit, pour les reprendre lundi à quatorze heures trente.
En revanche, monsieur le ministre, je souhaite que nous nous engagions à ce que le débat sur les phytosanitaires ne soit en aucun cas commencé ce soir, alors que nous serons peu nombreux dans l’hémicycle. Il s’agit d’un débat important pour nos concitoyens et pour les parlementaires auquel il faudra consacrer le temps nécessaire.
M. Fabien Gay. Mon intervention se fonde sur l’article 36 du règlement du Sénat.
J’abonde dans le sens de la présidente de la commission des affaires économiques : il est raisonnable que nous entamions l’examen de l’article sur les produits phytosanitaires lundi. Sur ce sujet, il faut un vrai débat.
Cela étant, monsieur le ministre, depuis quatre jours, je n’ai rien dit, mais je le dis maintenant : il n’est pas possible que nos débats se déroulent de cette manière ! Alors que, pendant des semaines, nous n’avons siégé que le mardi, voire le mardi et le mercredi, depuis plusieurs semaines consécutives maintenant, nous siégeons les mardi, mercredi et jeudi et il faut ouvrir le vendredi.
Comme le président du Sénat, M. Larcher, je trouve normal que nous ne siégions pas le samedi et le dimanche. Cela peut arriver, mais cela ne doit pas devenir une habitude, notamment pour les fonctionnaires du Sénat et nos collaboratrices et collaborateurs.
Ne pas avoir prévu quinze jours de débat pour un tel texte relève de la responsabilité du Gouvernement ; je suppose que vous êtes d’accord avec moi, monsieur le ministre.
Comme je l’ai déjà fait remarquer mardi, je pense que c’est le fruit d’une stratégie et j’y vois une corrélation avec le débat sur les institutions, la révision de la Constitution et la manière de légiférer.
Qui veut tuer son chien l’accuse de la rage ! La façon de débattre à laquelle on nous astreint vise à prouver que le système ne fonctionne pas et à nous imposer une autre façon de procéder et une autre Constitution à la sauce gouvernementale.
Ce n’est pas possible ! Il faut respecter les institutions ! Il faut respecter le Sénat et l’Assemblée nationale !
Je suis un jeune parlementaire, cela fait dix mois que j’ai été élu : je n’ai connu que des procédures accélérées et des ordonnances, je ne sais même pas ce que c’est que de légiférer selon la procédure normale. Chaque fois que l’on entame la discussion d’un texte, à partir du mardi vingt heures, on nous dit : « Dépêchez-vous ! Il faut plier, il ne faut pas que les débats s’allongent. » Non ! Je suis désolé : nous sommes des élus, des parlementaires, nous sommes là pour que les débats aient lieu.
Qui plus est – je le souligne –, sur ce projet de loi, nos débats sont de haute qualité. Or je constate que les travées se déciment peu à peu, y compris de notre côté, je le reconnais. Cela me désole, car nous avons besoin de la contradiction.
Monsieur le ministre, il faut vraiment faire passer le message à M. Castaner, secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement. Nous ne nous laisserons pas faire, car ce qui est en jeu dépasse ce simple constat.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Bravo !
M. le président. Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. J’entends vos propos sur les conditions du débat, monsieur le sénateur, et, je le répète, je transmettrai vos remarques au secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement.
J’ai à cœur que le débat ait lieu. D’ailleurs, depuis que l’examen de ce texte a commencé, je ne pense pas avoir cherché à me soustraire à quoi que ce soit.
M. Fabien Gay. Tout à fait !
M. Stéphane Travert, ministre. Je tiens à répondre à chacune des questions qui me sont posées, même si cela prend du temps. C’est important et cela témoigne du respect que l’on doit au Sénat et à la représentation nationale tout entière.
J’en profite, en ce dernier jour de travail de la semaine, pour inviter, mesdames, messieurs les sénateurs, ceux d’entre vous qui le souhaitent, lors de la suspension, entre vingt heures et vingt et une heures trente, à venir partager un plateau de fromages et de charcuteries – de bons produits de nos terroirs, des fromages affinés et des charcuteries de qualité –, accompagné d’un verre de vin, au ministère de l’agriculture, 78, rue de Varennes. Vous serez les bienvenus.
M. le président. Merci de cette invitation, monsieur le ministre.
Article 11 quindecies
Le livre II du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° L’article L. 201-7 est ainsi modifié :
a) Après la référence : « L. 231-1 », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « informe immédiatement l’autorité administrative désignée par décret lorsqu’il considère ou a des raisons de penser, au regard de tout résultat d’autocontrôle, qu’une denrée alimentaire ou un aliment pour animaux qu’il a importé, produit, transformé, fabriqué ou distribué présente ou est susceptible de présenter un risque pour la santé humaine ou animale. » ;
b) Après le même deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dès qu’il a connaissance de tout résultat d’examen indiquant que des locaux, installations et équipements utilisés pour la manipulation ou le stockage de denrées alimentaires et aliments pour animaux sont susceptibles de rendre préjudiciables à la santé humaine des produits, le propriétaire ou détenteur mentionné au deuxième alinéa du présent article informe immédiatement, après une contre-expertise réalisée dans les plus brefs délais, l’autorité administrative des mesures prises pour protéger la santé humaine ou animale. » ;
c) Après le troisième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En outre, dans le cadre des contrôles officiels réalisés en application de l’article L. 231-1, les laboratoires sont tenus de communiquer immédiatement tout résultat d’analyse sur demande de l’autorité administrative. » ;
2° Après le II de l’article L. 237-2, il est inséré un II bis ainsi rédigé :
« II bis. – Est puni de six mois d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende le fait, pour un propriétaire ou un détenteur de denrées alimentaires ou d’aliments pour animaux, de ne pas respecter les obligations d’information prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 201-7. » ;
3° Le 1° du II de l’article L. 251-20 est complété par les mots : « à l’exception de celles mentionnées aux deuxième et troisième alinéas du même article L. 201-7 ».
M. le président. L’amendement n° 189, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Il informe dans les plus brefs délais les associations de consommateurs et de victimes, dans des conditions fixées par voie réglementaire.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le ministre, nous vous remercions de votre invitation, qui nous fait plaisir.
L’amendement n° 189, vous l’aurez compris, fait suite à l’affaire Lactalis. Nous avons alors tous constaté avec un immense désarroi que cette société avait malheureusement travaillé contre ses propres intérêts, en ne donnant pas, au moment opportun, les informations requises aux consommateurs. Ceux-ci ont découvert jour après jour de nouveaux éléments qui ont jeté la suspicion sur toute la filière.
Une telle affaire n’est pas acceptable. Il faut absolument qu’il y ait un dialogue constructif, honnête, transparent, respectueux entre les producteurs, les distributeurs, les associations de consommateurs et les victimes, lesquelles ont été nombreuses dans l’affaire Lactalis.
Cet amendement vise donc à remettre un peu de bon sens dans la communication entre producteurs et consommateurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement, mon cher collègue, me semble en partie satisfait puisque l’exploitant doit mettre en œuvre de suite une procédure de retrait et en informer immédiatement les consommateurs.
En outre, je précise que les associations de victimes sont souvent constituées après la détection des faits.
La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’information des consommateurs est indispensable lorsque des produits potentiellement contaminés sont mis sur le marché. Il incombe aux industriels et aux distributeurs de prévenir les consommateurs.
La diffusion de cette information n’est pas utile lorsque les produits sont encore sous la responsabilité des opérateurs, ou lorsqu’il s’agit de résultats d’autocontrôle sur l’environnement de production. Une telle information ne manquerait pas de créer un climat anxiogène et d’induire de la confusion chez les consommateurs, alors même que les produits n’ont pas été mis sur le marché.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 732, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
1° Remplacer les mots :
préjudiciable à la santé humaine des produits
par les mots :
les produits préjudiciables à la santé humaine
2° Remplacer les mots :
après une contre-expertise réalisée dans les plus brefs délais
par les mots :
selon l’analyse de risque qu’il conduit
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement est important, car il vise à supprimer l’obligation de contre-expertise en cas d’autocontrôle défavorable.
Les industriels et les distributeurs ont l’obligation d’informer les services de contrôle dès qu’ils ont connaissance d’un risque pour la santé publique. Les mesures de gestion doivent pouvoir être prises immédiatement après un résultat d’autocontrôle défavorable.
La réalisation d’une contre-analyse aurait pour conséquence de retarder la prise de mesures de protection pour la santé publique, ce qui pourrait porter préjudice à la protection du consommateur. Une contre-expertise aurait en outre un coût trop élevé pour les professionnels.
Je rappelle, par ailleurs, que l’article 11 sexdecies A vise à s’assurer de la qualité des analyses effectuées, les laboratoires réalisant des analyses d’autocontrôle devant soit faire l’objet d’une accréditation, soit participer à des essais de comparaison entre laboratoires.
Le présent amendement, outre une modification rédactionnelle, tend, je le répète, à supprimer l’obligation de contre-expertise en cas d’autocontrôle défavorable.
L’information des services de contrôle se fait immédiatement, et non après une contre-analyse, en raison du risque pour la santé publique. Ainsi, que se serait-il passé si nous avions perdu du temps lors de la contamination de fromages à la listeria il y a quelques semaines, sachant que cette contamination a entraîné le décès d’un enfant ?
Par ailleurs, qu’est-ce qu’une contre-analyse ? Porte-t-elle sur le même échantillon ou sur un autre ? En tous les cas, le risque que des analyses soient fausses est traité par l’article 11 sexdecies A, qui prévoit, je le répète, une accréditation ou des essais de comparaison entre laboratoires.
Tel est l’objet de l’amendement que je vous demande d’adopter, mesdames, messieurs les sénateurs.
M. le président. L’amendement n° 188, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Supprimer les mots :
, après une contre-expertise réalisée dans les plus brefs délais,
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. L’alinéa 5 du présent article précise que dès qu’un propriétaire ou détenteur « a connaissance de tout résultat d’examen indiquant que des locaux, installations et équipements utilisés pour la manipulation ou le stockage de denrées alimentaires et aliments pour animaux sont susceptibles de rendre préjudiciables à la santé humaine des produits », il doit informer « immédiatement, après une contre-expertise réalisée dans les plus brefs délais, l’autorité administrative des mesures prises pour protéger la santé humaine ou animale. »
Les termes « plus brefs délais » posent problème. Il convient de les supprimer, car ils sont bien trop vagues. Qu’est-ce qu’un délai bref ? Une semaine ? Un mois ?
Cette notion soulève également une difficulté sanitaire majeure dans la mesure où, si une anomalie est détectée, le temps que la contre-expertise soit réalisée, des personnes pourront être contaminées, comme l’a expliqué M. le ministre.
Nous ne pouvons pas jouer avec la santé de nos concitoyens, comme en attestent les récents scandales alimentaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier. L’amendement n° 188 est de nature à transférer les responsabilités de la sécurité sanitaire de la chaîne alimentaire des exploitants à l’autorité administrative, ce qui contrevient à la réglementation européenne. La commission y est donc défavorable.
Quant à la rédaction proposée par le Gouvernement, elle nous semble vague. Elle revient, en outre, sur les travaux tant de notre commission que de la commission des affaires sociales, lesquels, je vous le rappelle, ont été adoptés à l’unanimité.
Il est important de bien responsabiliser l’exploitant concernant la sécurité de ses produits et de ne pas transférer de responsabilités à l’autorité administrative. Je rappelle qu’un agent pathogène dans l’environnement de production n’induit pas mécaniquement une contamination des produits sortis de l’usine. C’est pourquoi il nous semble nécessaire, monsieur le ministre, de prévoir deux procédures différentes, afin de ne pas déresponsabiliser l’exploitant et de respecter ainsi le droit européen, sans opérer une surtransposition trop forte.
Lorsqu’il constate que son environnement de production est potentiellement concerné par la présence d’un agent pathogène, l’exploitant a besoin d’une contre-expertise pour prendre une décision lourde. Cette contre-expertise concernera l’environnement de production et non les contrôles sur les produits, lesquels donnent lieu, comme aujourd’hui, à une information immédiate. Si cette contre-expertise révèle un agent pathogène dangereux pour la santé humaine, qui risque de contaminer le produit, il aura alors l’obligation d’avertir l’autorité administrative d’un risque de contamination de son environnement de production.
Revenir sur cette rédaction, c’est imposer une surtransposition forte, en alignant les procédures d’autocontrôle de l’environnement de production sur les procédures d’autocontrôle des produits.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 188 ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je suis favorable à la suppression que demandent les auteurs de l’amendement n° 188. Le terme « contre-expertise » n’est pas suffisamment explicite et peut être interprété de différentes manières. Toutefois, je suis défavorable à cet amendement, car je lui préfère, évidemment, celui que j’ai présenté, qui est beaucoup plus large et vise à apporter des précisions.
M. le président. L’amendement n° 273 rectifié bis, présenté par Mmes Létard, Guidez et Goy-Chavent, M. Longeot, Mme Joissains, M. Janssens, Mme Vullien, M. Moga, Mme Dindar et MM. Mizzon, Delahaye, Canevet, Cigolotti, Vanlerenberghe, L. Hervé, Delcros, Luche et Maurey, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Après le mot :
demande
insérer le mot :
motivée
2° Compléter cet alinéa par les mots :
et d’en informer le propriétaire ou détenteur des denrées concernés
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. L’article 11 quindecies, introduit par l’Assemblée nationale, renforce les obligations pesant sur les exploitants du secteur alimentaire en matière de transmission aux autorités administratives d’informations relatives à leurs contrôles sanitaires.
L’amendement n° 273 rectifié bis, dont le premier signataire est Valérie Létard, vise à répondre aux craintes des petits producteurs face à l’afflux des demandes de contrôles et à éviter des traitements différenciés entre les territoires. Il est important de prévoir une demande motivée de la part de l’autorité administrative et surtout de ne pas exclure le producteur du circuit d’information relatif à la communication des résultats des contrôles exercés sur ses propres produits.
L’autorité administrative ne peut pas se permettre des contrôles aléatoires et discriminants. En conséquence, l’information qu’elle demande doit être un outil au service d’une gestion de crise avérée, latente ou potentielle.
Les informations obtenues doivent servir à établir la cartographie du risque et son évolution prévisible. Elles ne sauraient constituer une démarche aléatoire contre un producteur.
Le lien direct établi entre les laboratoires et les administrations sanitaires par l’alinéa 7 de cet article reviendrait, en n’intégrant pas les producteurs au circuit d’information, à remettre en cause la responsabilité et leur rôle capital de ceux-ci dans la mise en œuvre de leur maîtrise sanitaire.
Un indéniable travail de mise aux normes des ateliers et de formation des producteurs aux questions de sécurité sanitaire est effectué depuis plusieurs années. Les producteurs sont davantage responsabilisés et un dialogue s’est établi avec l’administration, gage de transparence et de bonne gestion en cas de problème sanitaire.
Par ailleurs, en excluant les producteurs du circuit de l’information, le risque n’est pas négligeable, en les déresponsabilisant, de réduire le nombre d’autocontrôles, ce qui serait largement contre-productif et contraire au paquet Hygiène de 2006.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Dans l’esprit du paquet Hygiène, l’exploitant est bien responsable de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires qu’il met sur le marché. Dès lors, il paraît normal qu’il soit tenu informé si l’autorité administrative demande, dans le cadre d’un contrôle officiel, un résultat d’analyse. La commission est donc favorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, car les services de l’État n’ont ni à justifier auprès du laboratoire les raisons pour lesquelles ils demandent des éléments ni à en informer le propriétaire des denrées, qui doit, de toute façon, également transmettre ces informations de son côté.
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 quindecies, modifié.
(L’article 11 quindecies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11 quindecies
M. le président. L’amendement n° 111 rectifié sexies, présenté par MM. Decool, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Bignon, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Daubresse, Moga et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quindecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 5° du II de l’article L. 231-1 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce contrôle est effectué en priorité à l’aide d’un audit en matière de bonnes pratiques de fabrication, de bonnes pratiques d’hygiène, de bonnes pratiques agricoles et de la mise en place de principes HACCP ; ».
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à modifier les modes de contrôle des denrées alimentaires et à renforcer les audits de bonnes pratiques.
À la suite du scandale Lactalis, les autocontrôles des entreprises ont été remis en cause. Cet amendement tend donc à mettre l’accent sur les audits en matière de bonnes pratiques de fabrication, d’hygiène et de respect des principes HACCP mis en place par le fabricant sur ses chaînes de production, ses locaux, son environnement immédiat, ses matières premières et son personnel.
Le ministre de l’économie et des finances ayant affirmé qu’il n’y aurait pas d’augmentation du nombre de personnels qualifiés dans les services de contrôle, en particulier dans les directions départementales de la protection des populations, cet amendement tend à modifier les modes de contrôle de ces services.
Dans sa rédaction, cet amendement, coécrit avec l’association UFC-Que Choisir, reprend les dispositions de l’article 10 du règlement européen n° 882/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’article du règlement européen auquel il est fait référence étant d’application directe, cet amendement est déjà satisfait. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les contrôles effectués par les services de mon ministère pour vérifier la bonne application de la réglementation sanitaire et alimentaire européenne sont déjà fondés sur un plan d’audit de maîtrise sanitaire de l’établissement et des pratiques mises en œuvre par les professionnels.
De plus, je rappelle que les résultats de ces contrôles officiels sont rendus publics sur internet et accessibles via l’application mobile Alim’confiance, que je vous invite à télécharger sur vos smartphones, mesdames, messieurs les sénateurs. Cette application permet aussi de vérifier, lorsque vous vous rendez dans un restaurant, si celui-ci a fait l’objet de contrôles et d’en connaître les résultats.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 111 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 544 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Kanner, Mme Rossignol, MM. Botrel, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quindecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le deuxième alinéa de l’article L. 232-1 du code rural et de la pêche maritime, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L’autorité administrative compétente rend immédiatement publique la décision prévue au premier alinéa du présent article, sa date et le délai sur lequel elle s’applique. Elle le fait notamment par le biais d’un site internet unique, dédié à cet effet, permettant d’informer les consommateurs sur les rappels ou retraits ordonnés, et permettant à toute personne de signaler des défaillances relatives à la procédure initiée.
« Un décret précise les modalités relatives à ce site internet, l’adresse d’hébergement ainsi que les modalités de mise en ligne pour l’autorité administrative. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à renforcer l’information du consommateur en cas de crise sanitaire liée à des denrées alimentaires. Il s’agit de permettre à chaque citoyen, de façon rapide et claire, d’avoir accès à l’ensemble des informations.
Le site du ministère de l’agriculture et de l’alimentation prévoit certes déjà un dispositif de communication, mais son accès, de l’aveu même de M. le ministre, est très difficile et mériterait d’être retravaillé pour plus de clarté.
Compte tenu des scandales sanitaires survenus ces dernières années, en particulier du dernier en date chez Lactalis, et de la nécessité de communiquer une information de plus en plus transparente à nos concitoyens, votre réponse, monsieur le ministre, n’est pas satisfaisante.
Dans l’attente d’un engagement plus clair du Gouvernement, cet amendement tend à créer un site unique entièrement dédié aux procédures de retrait des denrées alimentaires. Ce site sera facilement identifiable et accessible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement ne vise que les décisions de retrait prononcées par l’autorité administrative, alors que ces décisions peuvent, nous le savons, être aussi prises par les fabricants de produits eux-mêmes. Par ailleurs, quand l’autorité publique prend une telle décision, elle la publie. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Cela étant dit, nous en sommes bien d’accord, un site unique, comme l’ont d’ailleurs suggéré la commission des affaires économiques et la commission des affaires sociales du Sénat, serait particulièrement intéressant. La lisibilité du site de la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, pourrait être améliorée. Par ailleurs, son contenu devrait être automatiquement publié sur les autres sites reprenant les listes de produits rappelés. Nous savons en effet malheureusement que, lors de l’affaire Lactalis, de nombreux sites ont publié des listes différentes de produits rappelés, ce qui a nui à la sécurité du consommateur.
Pourriez-vous nous donner votre avis sur l’idée d’un site unique, monsieur le ministre ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La Direction générale de l’alimentation, la DGAL, et la DGCCRF font des rappels. La DGAL en fait d’ailleurs deux fois plus que la DGCCRF. Les listes sont diffusées.
Quant à la création d’un site internet unique pour les retraits et les rappels, il est vrai que nous devons tirer les leçons de la récente crise chez Lactalis.
Le ministère de l’économie et des finances, dans le cadre du Conseil national de la consommation, a engagé des réflexions sur les procédures de retrait et de rappel, les objectifs étant d’optimiser les mesures de retrait-rappel et d’améliorer l’information des consommateurs. Il nous faut attendre la conclusion de ses travaux avant de proposer une modification législative sur ce sujet, ainsi que tout le retour d’expérience de l’affaire du lait contaminé à la salmonelle dans l’entreprise Lactalis. Votre proposition est concomitante à ces réflexions, monsieur le sénateur, mais il est nécessaire de travailler sur ces sujets.
Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.
M. Henri Cabanel. Les arguments sont toujours les mêmes : « On est en train d’y réfléchir, on verra plus tard ! ». Monsieur le ministre, votre collègue ministre de l’économie et des finances, M. Lemaire, s’était déjà engagé à travailler sur cette question…
Même si, vous l’aurez compris, mon amendement est un amendement d’appel visant à insister sur un défaut d’information, je serais tout de même rassuré si vous pouviez m’indiquer un délai.
Vous dites qu’il faut attendre les retours d’expérience de l’affaire Lactalis. Pour sa part, la commission des affaires économiques ayant longuement auditionné les responsables de Lactalis, les distributeurs et tous les acteurs de la chaîne, elle a constaté une sacrée cacophonie lorsqu’elle a essayé d’établir les responsabilités des uns et des autres.
Je souhaite donc que vous m’indiquiez un délai plus précis, monsieur le ministre, car je crains que ne survienne une autre affaire du type Lactalis sans que nous ayons pour autant trouvé de solution.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Pour autant, nous avons déjà agi. Comme nous le verrons plus tard au cours de l’examen du texte, l’Assemblée nationale a élargi les contrôles. Alors que ceux-ci étaient uniquement effectués sur le produit, nous les avons étendus à l’environnement du produit. C’est important.
Par ailleurs, des travaux sont en cours. Le rapport de la commission d’enquête chargée de tirer les enseignements de l’affaire Lactalis est attendu dans le courant du mois de juillet. Le ministère de l’économie et des finances effectue également un travail de son côté, dont les conclusions seront elles aussi connues non pas dans six mois, mais dans quelques semaines, d’ici à la rentrée.
Cela étant dit, nous avons déjà tiré un certain nombre d’enseignements de cette malheureuse affaire et pris les devants, s’agissant notamment des contrôles, car nous estimions que c’était important.
Ces travaux ont pour conséquence une charge de travail supplémentaire pour les services, l’ajout du contrôle de l’environnement du produit rendant la procédure plus lourde.
Enfin, je rappelle qu’il appartient à l’industriel d’apporter la preuve que le produit qu’il met sur le marché ne présente aucun danger particulier pour les consommateurs.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 730, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quindecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code de la consommation est ainsi modifié :
1° L’article L. 423-3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque des mesures de retrait ou de rappel sont mises en œuvre, les producteurs et les distributeurs établissent et maintiennent à jour un état chiffré des produits retirés ou rappelés, qu’ils tiennent à la disposition des agents habilités. » ;
2° À l’article L. 452-5, les deux occurrences des mots : « , transformé ou distribué » sont remplacées par les mots : « ou transformé » ;
3° Après l’article L. 452-6, il est inséré un article L. 452-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 452-7. – Le fait de ne pas satisfaire aux obligations énoncées au quatrième alinéa de l’article L. 423-3 est puni d’une amende de 5 000 euros. »
II. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le III de l’article L. 237-2 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, le mot : « quatre » est remplacé par le mot : « cinq » ;
b) Aux deuxième et troisièmes alinéas, les mots : « , transformé ou distribué » sont remplacés par les mots : « ou transformé » ;
2° Après l’article L. 205-7, il est inséré un article L. 205-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 205-7-1. – Lorsque des mesures de retrait ou de rappel sont mises en œuvre, les exploitants établissent et maintiennent à jour un état chiffré des produits retirés ou rappelés, qu’ils tiennent à la disposition des agents mentionnés à l’article L. 205-1. » ;
3° Le chapitre VII du titre III du livre II est complété par un article L. 237-4 ainsi rédigé :
« Art. L. 237-4. – Le fait de ne pas satisfaire aux obligations énoncées à l’article L. 205-7-1 est puni d’une amende de 5 000 euros. »
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement illustre lui aussi notre volonté d’avancer. Il vise à créer une nouvelle obligation de traçabilité des retraits et des rappels et à améliorer l’efficacité des sanctions en matière de retraits et de rappels, sur lesquelles le Sénat, dans un récent rapport publié dans le prolongement de l’affaire Lactalis, a invité le Gouvernement à légiférer. Nous avons donc écouté le Sénat.
Cet amendement tend ainsi à imposer aux professionnels la réalisation d’un état chiffré des produits retirés ou rappelés. Cette traçabilité permettra de renforcer la gestion des opérations par les professionnels et leur contrôle par les services de l’État. Le non-respect de cette obligation sera pénalement sanctionné, dans le code de la consommation pour les denrées végétales et dans le code rural et de la pêche maritime pour les denrées animales.
Nous proposons, par ailleurs, de maintenir l’actuel régime de sanction délictuelle pour les producteurs et importateurs, dont la responsabilité est première en matière de retrait et de rappel, et de créer pour les distributeurs un régime contraventionnel beaucoup plus adapté.
Enfin, pour des raisons de cohérence, nous proposons d’appliquer les mêmes sanctions à l’ensemble des produits alimentaires, alors qu’une différence existe actuellement entre les denrées animales et les denrées végétales.
M. le président. L’amendement n° 210, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quindecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le III de l’article L. 237-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« III. - Est puni de quatre ans d’emprisonnement et d’une amende de 600 000 euros, dont le montant peut être porté, de manière proportionnée aux avantages tirés du manquement, à 10 % du chiffre d’affaires moyen annuel, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits le fait pour un exploitant de mettre sur le marché un produit d’origine animale ou une denrée en contenant préjudiciable à la santé au sens de l’article 14 du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 ou de s’abstenir de mettre immédiatement en œuvre des procédures de retrait ou de rappel d’un tel produit qu’il a importé, produit, transformé ou distribué, en méconnaissance des articles 14 et 19 du même règlement communautaire. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Je pense que nous serons tous d’accord sur cet amendement, car il est le reflet de nos travaux en commission.
Pour des raisons de santé publique, il est nécessaire que les exploitants du secteur alimentaire, que ce soit les producteurs, les transformateurs ou les distributeurs, assurent des procédures de retrait et de rappel publiques immédiatement, dès que la sécurité des produits est mise en doute.
Si, comme pour la publication des comptes des entreprises que nous avons déjà évoquée, la loi impose déjà des obligations à cet égard, l’actualité récente vient nous rappeler que ces obligations doivent être renforcées, afin de protéger plus efficacement nos concitoyens.
Nous avons récemment auditionné MM. Nalet et Besnier au sujet de la contamination à la salmonelle des laits infantiles Lactalis, mais l’affaire Lactalis n’est malheureusement pas unique. En avril dernier, des laits infantiles Prémilait 1er âge, de l’entreprise Premibio, ont été rappelés en raison d’une possible contamination par des entérobactéries de type Enterobacter sakazakii. Alors que ces lots de lait avaient été produits en octobre 2017, il a fallu attendre cinq mois et un contrôle de la direction départementale de la protection des populations de Vendée avant qu’ils soient rappelés. Précisons d’ailleurs que le contrôle en question avait été mis en œuvre à la suite de l’affaire Lactalis.
Si, après un autocontrôle, l’entreprise avait décidé de ne pas commercialiser une partie du lot, la direction départementale de la protection des populations a estimé, quant à elle, que les éléments n’étaient pas suffisants pour exclure la contamination du reste du lot. L’entreprise a alors décidé de procéder au retrait de ce dernier.
Ces affaires, et surtout les délais de rappel qui ont suivi, démontrent la nécessité de prendre immédiatement des mesures en cas de contamination et d’accentuer la pression à cette fin.
Nous proposons donc, comme l’ONG Foodwatch, d’ajouter le mot « immédiatement » à l’article L. 237-2 du code rural et de la pêche maritime, conformément à la rédaction de l’alinéa 2 de l’article 19 du règlement européen n° 178/2002.
Cet amendement vise ainsi à faire en sorte que les mesures devant être prises en cas de contamination ou de suspicion de contamination puissent être prises de façon immédiate.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur l’amendement du Gouvernement qui reprend les éléments issus du travail de nos commissions.
Nous serons particulièrement attentifs, monsieur le ministre, à la mise en place du régime contraventionnel pour les distributeurs en cas d’échec de la procédure de retrait. Ces sanctions doivent être proportionnelles aux manquements et importantes en cas d’erreur massive.
Quant à l’amendement n° 210, il est satisfait, cher collègue, car les exploitants ont l’obligation d’effectuer de tels retraits immédiatement, c’est-à-dire dès qu’ils ont connaissance qu’un produit présente un réel danger. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 210 ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les dispositions actuelles sont suffisamment claires pour être mises en œuvre. L’ajout du mot « immédiatement » n’apporterait rien. J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement n° 210.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Vous me dites, madame la rapporteur, que mon amendement est satisfait. Or des dysfonctionnements ont malheureusement été constatés dans les affaires Lactalis et Premibio. Et on se souvient que l’épisode Lactalis a duré près de six semaines, bien que les consommateurs aient en premier alerté la grande distribution !
J’entends bien l’avis du rapporteur, celui du ministre, et toutes les interrogations, mais ajouter le mot « immédiatement » renforcerait la législation. Franchement, six semaines !
La commission des affaires économiques et la commission des affaires sociales, qui ont effectué un travail de fond, ont formulé dix-sept recommandations dans leur rapport d’information. Nous pouvons agir, mais il faut aussi donner aux services publics les moyens d’effectuer des contrôles. Nous étions d’accord sur ce point. Pour que l’alerte soit véritablement efficace, il faut qu’elle intervienne le plus tôt possible.
J’invite chacun et chacune d’entre vous, mes chers collègues, à voter en faveur de cet amendement, ce qui permettrait de changer un peu les choses. Ce type de scandale, qui a été d’une brûlante actualité, pourrait se reproduire, même si je ne l’espère pas.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11 quindecies, et l’amendement no 210 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 104 rectifié quinquies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Daubresse, Dennemont, Moga et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quindecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À l’article L. 451-1 du code de la consommation, après le mot : « procéder », sont insérés les mots : « à l’obligation d’autocontrôle du respect des prescriptions en vigueur prévue à l’article L. 411-1, ou de ne pas procéder ».
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à instaurer des sanctions contre les acteurs ayant failli à leurs obligations d’autocontrôle.
Cette proposition fait écho aux recommandations que l’ONG Foodwatch a formulées, dans le fascicule intitulé Affaire du lait contaminé Lactalis, qu’elle a publié le 14 février dernier, pour prévenir les crises sanitaires, notamment par le renforcement de la réglementation actuelle.
L’article L. 411-1 du code de la consommation prévoit en effet une obligation d’autocontrôle lors de la première mise sur le marché d’un produit ou d’un service. Cependant, aucune sanction n’est prévue en cas de non-respect de cette obligation. Le présent amendement tend donc à modifier l’article L. 451-1 du code précité relatif aux sanctions en cas de manquement à l’information du consommateur pour remédier à ce vide juridique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il existe déjà un certain nombre de sanctions. En particulier, si les autocontrôles ne sont pas effectués conformément à ce qui est prévu dans le plan de maîtrise sanitaire de l’établissement, celui-ci peut voir son agrément suspendu, voire retiré lors des contrôles.
Les sanctions existantes nous semblent suffisamment dissuasives. L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le non-respect de la disposition ne peut pas être sanctionné pénalement, mais peut faire l’objet de mesures de police administrative pour corriger les défaillances.
Le Gouvernement émet par conséquent un avis défavorable sur l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 104 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 103 rectifié sexies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Daubresse, Dennemont, Hassani, Moga, Lévrier et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 11 quindecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le titre II du livre V du code de la consommation est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Publication des contrôles officiels
« Art. L. 526-… – Les résultats de tous les contrôles effectués en application du livre V du présent code sont rendus publics selon les modalités de publication sont fixées par voie réglementaire. »
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à assurer la transparence des opérations de contrôle sanitaire sur les aliments.
La publication des résultats des opérations de contrôle sanitaire est une démarche d’ores et déjà inscrite dans le droit français. Le décret du 15 décembre 2016 a ainsi créé les articles D. 231-3-8 et D. 231-3-9 du code rural et de la pêche maritime qui précisent les modalités de publication des résultats des contrôles.
En outre, l’arrêté du 28 février 2017, relatif aux modalités d’application du décret susmentionné, a renforcé ces prérogatives de publication des résultats de contrôle.
Si l’application de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a permis la mise en place du dispositif Alim’confiance, site permettant d’accéder aux informations relatives aux contrôles officiels en matière de sécurité sanitaire des aliments, ce dispositif n’est pas exempt de critiques : informations cantonnées aux questions d’hygiène des aliments, sans mention de la qualité, de la sécurité ou des règles d’information, suppression des informations postées après un an sur le site, etc.
Il convient donc de renforcer la transparence de ces opérations de contrôle, en rendant obligatoire la publication des contrôles relatifs aux denrées et produits alimentaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement nous semble satisfait, comme cela est d’ailleurs précisé dans l’exposé des motifs.
S’il s’agit d’apporter un certain nombre de précisions, M. le ministre pourra peut-être y revenir.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Madame la sénatrice, le ministère de l’agriculture applique déjà la transparence sur les résultats des contrôles sanitaires officiels, puisque, comme vous l’indiquez, les résultats sont publiés sur le site internet Alim’confiance, que je vous invite une nouvelle fois à télécharger.
Le dispositif étant récent, il peut effectivement être amélioré. Les services y travaillent, à ma demande.
Par conséquent, il est prématuré aujourd’hui d’étendre le dispositif à d’autres critères d’appréciation, voire à d’autres produits, avant d’avoir pleinement mis en œuvre le mécanisme existant, qui ne fait que démarrer.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Madame Mélot, maintenez-vous l’amendement n° 103 rectifié sexies ?
Mme Colette Mélot. Non, monsieur le président, je le retire, M. le ministre m’ayant précisé que le dispositif devait être amélioré. Nous y serons vigilants !
M. le président. L’amendement n° 103 rectifié sexies est retiré.
Article 11 sexdecies A
(Non modifié)
L’article L. 202-3 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les laboratoires réalisant des analyses d’autocontrôle dans le secteur alimentaire, le secteur des sous-produits animaux ou le secteur de l’alimentation animale doivent soit être accrédités selon la norme relative aux exigences générales concernant la compétence des laboratoires d’étalonnages et d’essais, soit participer à leurs frais à un processus d’essais de comparaison interlaboratoires. Les analyses concernées et leurs conditions de mise en œuvre sont définies par décret. Les résultats des audits pour les laboratoires accrédités et des évaluations réalisées dans le cadre des processus d’essais sont communiqués par les exploitants à l’autorité administrative sur sa demande. »
M. le président. L’amendement n° 429, présenté par MM. Sido et Dallier, Mmes Deromedi et Bonfanti-Dossat, MM. Chaize et Brisson, Mme Di Folco, MM. Paccaud, Bizet, Bouchet, Priou, Bazin et Danesi, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme Imbert, MM. Kennel, Lefèvre et Poniatowski, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, M. Bonhomme, Mme Bruguière, MM. Cardoux, D. Laurent, Morisset, Revet et Savary, Mme Gruny, MM. H. Leroy, Mouiller, Huré et Bonne et Mme Lherbier, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Supprimer les mots :
soit participer à leurs frais à un processus d’essais de comparaison inter laboratoires
La parole est à M. Ladislas Poniatowski.
M. Ladislas Poniatowski. Cet amendement et les deux suivants participent d’une même logique, monsieur le président.
Les crises sanitaires et médiatiques, notamment celle de Lactalis, ont révélé un besoin de laboratoires accrédités et indépendants sur l’ensemble du territoire.
Il est préférable de confier les autocontrôles à des laboratoires accrédités, afin de viser un haut niveau d’exigence technique et une homogénéité des prestations entre laboratoires.
La même exigence devra être imposée aux laboratoires chargés par les autorités sanitaires de vérifier et de contrôler les autocontrôles.
À cet égard, monsieur le ministre, les laboratoires départementaux d’analyses rappellent qu’ils assument aujourd’hui une large mission d’épidémiosurveillance sur le territoire national dans les domaines de la santé animale, de l’hygiène alimentaire, de la santé des végétaux et de la surveillance sanitaire des produits de la mer.
Leur indépendance, leur répartition sur l’ensemble du territoire et leur haut niveau d’expertise analytique sont des garanties de réactivité et d’expertise en matière de sécurité sanitaire. À ce titre, ils contribuent largement au maillage sanitaire français dont bénéficient les acteurs des filières de production, grâce au soutien financier des collectivités locales, qui assurent ainsi leurs missions d’épidémiosurveillance.
C’est la raison pour laquelle les élus départementaux souhaitent que ces laboratoires soient préservés sur l’ensemble du territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il existe deux niveaux de laboratoires.
Le premier réunit les laboratoires réalisant des contrôles officiels, qui sont donc agréés ou reconnus par l’État. C’est bien évidemment le cas des laboratoires d’analyses départementaux, qui ne sont pas concernés par cet article.
L’autre niveau, qui, lui, est visé par cet article, regroupe les laboratoires réalisant des autocontrôles qui ne sont généralement pas des laboratoires effectuant des contrôles officiels et qui ne suivent aujourd’hui aucune procédure d’accréditation ou de comparaison interlaboratoires.
L’article 11 sexdecies A renforce la réglementation pour ces laboratoires, en prévoyant qu’ils réalisent des autocontrôles. Il ne supprime donc pas l’accréditation officielle, mais en ajoute une, au bénéfice de la sécurité des consommateurs.
L’amendement qui nous est proposé tend à accréditer tous les laboratoires accomplissant des autocontrôles. Son adoption poserait deux difficultés : d’une part, cette transposition structurelle de la réglementation européenne aura des surcoûts importants pour l’ensemble des entreprises agroalimentaires ; d’autre part, compte tenu de la situation financière de nombreux laboratoires, nombre d’entre eux ne pourront se payer une accréditation à court terme. La fermeture de ces petits laboratoires créerait de nombreuses difficultés.
Pour toutes ces raisons, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Nous sommes attachés au maillage des laboratoires départementaux d’analyses.
D’ailleurs, nous menons actuellement une réflexion sur ce sujet, de manière que ces laboratoires puissent offrir le meilleur service aux populations et répondre à un certain nombre de demandes.
Pour ce qui concerne le caractère obligatoire de l’accréditation des laboratoires qui réalisent des analyses d’autocontrôle, il est primordial de s’assurer que ces laboratoires apportent les garanties nécessaires en matière de conformité et de performance.
Tous les laboratoires qui effectuent des contrôles pour le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, en particulier pour la direction générale de l’alimentation, sont accrédités. Les laboratoires départementaux peuvent faire des demandes d’accréditation, mais il en résulte alors pour eux un travail très important. Ont-ils tous les effectifs suffisants pour assumer ce travail ?
Il ne faut pas prévoir d’exigences disproportionnées, comme l’accréditation obligatoire, qui pourrait avoir un effet parfois contre-productif pour certains laboratoires départementaux. La marche serait trop haute pour certains laboratoires d’autocontrôle.
Par ailleurs, le projet de loi contient déjà des dispositions pour que les services sanitaires accèdent aux résultats. En outre, ces derniers peuvent déjà effectuer des prélèvements sur des lots ayant fait l’objet d’un certain nombre d’analyses.
Pour ces raisons, je suis défavorable à cet amendement, comme, du reste, aux deux suivants.
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Malgré l’avis défavorable de Mme la rapporteur et de M. le ministre, nous allons voter cet amendement, ainsi que les deux suivants.
En effet, monsieur le ministre, ces amendements soulèvent une question essentielle. J’ai entendu ce que vous avez dit sur les laboratoires accrédités, mais on sait que les laboratoires qui réalisent les autocontrôles le font sur la base de prélèvements opérés par l’entreprise.
L’amendement n° 431 pose la question de l’indépendance économique et capitalistique du laboratoire à l’égard de l’entreprise pour laquelle il réalise les autocontrôles. Et c’est une vraie question.
En effet, au cours des auditions que nous avons menées sur l’affaire Lactalis, nous nous sommes aperçus que si le laboratoire n’a qu’un seul client, en l’occurrence Lactalis, ou si, parmi ses clients, Lactalis représente 80 % du chiffre d’affaires, il peut y avoir un risque de conflit d’intérêts, même si cela n’arrive pas forcément.
Monsieur le ministre, je me suis rendu à Craon, où j’ai passé une journée entière. Je n’ai pas pu rencontrer les salariés de Lactalis, mais j’ai rencontré des agriculteurs. Comme je l’ai dit les yeux dans les yeux à M. Besnier, je n’avais jamais vu une telle pression sociale, une telle emprise d’une entreprise sur l’ensemble du territoire. J’y ai même rencontré des syndicalistes qui n’avaient pas envie de discuter avec moi et des journalistes qui m’ont prévenu qu’ils ne signeraient pas de leur nom le papier qu’ils allaient rédiger sur ma venue, parce qu’ils avaient qui une cousine, qui un frère, qui une sœur qui travaille chez Lactalis ! (M. le ministre marque son scepticisme.) Monsieur le ministre, c’est la réalité !
Sans parler de mafia – je n’utiliserai jamais ce mot –, j’ai été frappé par l’emprise de l’entreprise sur un territoire. Le phénomène est complexe. Il me semble qu’une telle situation peut faire naître des conflits d’intérêts. Dans ces conditions, on ne peut balayer d’un revers de la main la question de l’indépendance économique des laboratoires qui réalisent les autocontrôles.
M. le président. La parole est à M. Ladislas Poniatowski, pour explication de vote.
M. Ladislas Poniatowski. J’aurais été ravi de faire plaisir aux membres du groupe CRCE, mais ceux-ci ne pourront pas voter cet amendement ni les suivants, parce que je vais les retirer !
Monsieur le ministre, j’ai bien entendu vos propos concernant nos laboratoires départementaux, que nous connaissons tous ici.
Je sais bien que tous ne sont pas accrédités pour la totalité des opérations, mais la très grande majorité d’entre eux sont très largement compétents.
J’ai également retenu que le maillage n’était pas complet sur notre territoire. Je pense qu’il sera important de veiller à la cartographie française et de voir où sont les trous, mais je suis aussi également très sensible à l’argument de Mme la rapporteur, qui a déclaré que certains n’auraient probablement pas la capacité financière de recruter suffisamment de techniciens pour réaliser tous les contrôles.
Je crois que ces paroles seront entendues par ces laboratoires et, au nom de mon groupe, je retire le présent amendement, monsieur le président, ainsi que les deux suivants.
M. le président. L’amendement n° 429 est retiré.
L’amendement n° 431, présenté par MM. Sido et Bizet, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonhomme et Brisson, Mme Bruguière, M. Chaize, Mmes Deromedi et Di Folco, MM. Paccaud et Morisset, Mmes Berthet et A.M. Bertrand, MM. Cardoux, D. Laurent, H. Leroy, Mouiller, Revet, Savary, Bazin, Dallier et Danesi, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mmes Gruny et Imbert, MM. Kennel, Lefèvre, Bouchet, Priou, Poniatowski et Huré et Mme Lherbier, est ainsi libellé :
Alinéa 2, après la deuxième phrase
Insérer une phrase ainsi rédigée :
L’indépendance capitalistique des laboratoires concernés est assurée afin d’éviter tout conflit d’intérêts économiques.
Cet amendement a été retiré.
L’amendement n° 430, présenté par MM. Sido et Dallier, Mmes Deromedi et Bonfanti-Dossat, M. Brisson, Mme Di Folco, MM. Paccaud et Bazin, Mme A.M. Bertrand, MM. Bizet, Bouchet, Chaize et Danesi, Mme Garriaud-Maylam, M. Genest, Mme Imbert, MM. Kennel, Lefèvre, Poniatowski et Priou, Mme Berthet, M. Bonhomme, Mme Bruguière, M. Cardoux, Mme Gruny, MM. D. Laurent, H. Leroy, Morisset, Mouiller, Revet, Savary, Huré et Bonne et Mme Lherbier, est ainsi libellé :
Compléter cet article par trois alinéas ainsi rédigés :
« Les laboratoires réalisant des analyses d’autocontrôle sont soumis à une exigence d’accréditation selon la norme relative aux exigences générales concernant la compétence des laboratoires d’étalonnages et d’essais. Ils rendent les résultats sous accréditation selon les exigences définies dans le plan de maîtrise sanitaire établi par l’opérateur de la chaîne agroalimentaire.
« Les autorités compétentes ont accès aux résultats des analyses d’autocontrôle. Dans le cadre des contrôles officiels qu’elles réalisent, elles effectuent des prélèvements, notamment sur des lots ayant déjà fait l’objet d’analyses, afin de s’assurer de la fiabilité des autocontrôles effectués par les opérateurs, ou par un tiers à leur demande. Elles peuvent s’appuyer en tant que de besoin sur un laboratoire agréé, c’est-à-dire habilité à réaliser des analyses officielles au titre de l’article L. 202-1.
« Ces dispositions s’appliquent systématiquement lorsqu’un risque sanitaire a été identifié pour la chaîne alimentaire. »
Cet amendement a été retiré.
Je mets aux voix l’article 11 sexdecies A.
(L’article 11 sexdecies A est adopté.)
Article 11 sexdecies
(Non modifié)
Dans les conditions prévues à l’article L. 521-17 du code de la consommation et à l’article 54 du règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires, le Gouvernement prend les mesures réglementaires visant à la suspension de la mise sur le marché de l’additif E 171 (dioxyde de titane – TiO2) ainsi que des denrées alimentaires en contenant.
Le Gouvernement adresse, au plus tard le 1er janvier 2019, un rapport au Parlement sur toutes les mesures prises concernant l’importation et la mise sur le marché à titre gratuit ou onéreux de toute denrée alimentaire contenant du dioxyde de titane en tant qu’additif alimentaire (E 171) et les usages grand public.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, sur l’article.
M. Roland Courteau. Ma collègue Angèle Préville ayant dû s’absenter, je me permets de vous faire part de quelques-unes de ses remarques, auxquelles nous souscrivons.
Les restrictions prises sur le dioxyde de titane sont une avancée, que nous saluons et qui ne doit pas s’arrêter à la seule question de l’agroalimentaire.
L’additif E171 est pointé du doigt depuis de nombreuses années, et les études menées ne manqueront sans doute pas d’attester son potentiel toxique pour l’organisme et son franchissement des barrières biologiques chez l’homme.
Le dioxyde de titane ne sert à rien d’autre qu’à blanchir. Il n’apporte rien de plus.
L’enjeu sanitaire concerne en premier lieu les enfants, amateurs de confiseries.
Au-delà de l’exemple du dioxyde de titane, qui est emblématique, nous devrions dès à présent nous interroger sur l’ensemble des additifs alimentaires, notamment quand ces substances ont pour seule fonction de colorer, blanchir ou modifier le goût des aliments.
Un projet ambitieux pour une loi sur l’alimentation saine et durable aurait été de lancer une véritable réflexion dépassant le seul cadre du dioxyde de titane : je pense bien évidemment, tout comme Angèle Préville, à l’ensemble des substances chimiques nocives ajoutées aux denrées alimentaires et aux produits transformés dont les risques pour la santé sont avérés.
Je conclus ce propos par une alerte qui dépasse le cadre de l’examen du présent projet de loi, ce dont, je l’espère, vous m’excuserez, monsieur le ministre.
L’industrie agroalimentaire n’est malheureusement pas la seule concernée : la réflexion sur le secteur pharmaceutique sera bientôt en première ligne. En effet, plusieurs milliers de médicaments vendus aujourd’hui en France contiennent du E171. Le retrait du dioxyde de titane sera-t-il également imposé à l’industrie pharmaceutique ? C’est une question que se pose Angèle Préville, tout comme nous.
M. le président. L’amendement n° 734, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 1
1° Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
La mise sur le marché de l’additif E 171 (dioxyde de titane –TiO2) ainsi que des denrées alimentaires en contenant est suspendue, dans les conditions prévues…
2° Après les mots :
sécurité des denrées alimentaires
Supprimer la fin de cet alinéa.
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à améliorer la rédaction de l’article relatif à la suspension du dioxyde de titane, de manière qu’il ne puisse être lu comme une injonction du Parlement au Gouvernement.
Nous ne sommes qu’au début du travail, mais nous avons fait une belle avancée avec la suppression du dioxyde de titane dans un certain nombre d’aliments, notamment les produits de confiserie.
Cet additif n’a pas de valeur nutritionnelle particulière : il permettait juste de blanchir un certain nombre de sucreries ou autres bonbons qui étaient vendus dans le commerce.
Actuellement, nous menons également une étude sur le dioxyde de titane par inhalation. Nous comptons aussi avancer sur ce plan.
Force est de constater que, aujourd’hui, 80 % des confiseurs se passent déjà du dioxyde de titane. Nous souhaitons que ce taux atteigne 100 %.
Tel est le sens de l’article 11 sexdecies. Nous souhaitions envoyer un signal fort.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Cet amendement vise à modifier l’article 11 sexdecies, en vue d’éviter sa qualification d’injonction au Gouvernement
Cette proposition ne modifie pas le fond de l’article, qui prévoit une suspension de la mise sur le marché du dioxyde de titane comme additif alimentaire et des denrées alimentaires en contenant.
En commission, nous avons bien évidemment pleinement soutenu cette mesure, compte tenu des risques associés à cette substance, qui est d’ailleurs utilisée à des fins purement esthétiques dans l’alimentation.
Un avis rendu par le Haut Conseil de la santé publique ce lundi 25 juin nous conforte dans cette décision, en mettant en évidence les risques du dioxyde de titane lorsqu’il est utilisé sous forme nanoparticulaire, ce qui est le cas.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, l’ANSES, a, d’ailleurs, produit un rapport sur les dangers de l’inhalation de dioxyde de titane sous forme nanoparticulaire. Pour une fois – tout arrive ! – que l’ANSES est d’accord avec le Centre international de recherche sur le cancer, le CIRC, situé à Lyon, ne boudons pas notre plaisir, monsieur le ministre !
Dans ces conditions, nous émettons un avis favorable sur cet amendement.
Je profite de l’occasion pour souligner qu’un usage approprié du principe de précaution, lequel justifie cette suspension, implique une concertation avec les parties prenantes, en l’occurrence les producteurs, distributeurs et utilisateurs du dioxyde de titane, pour leur donner de la visibilité, afin de leur permettre de réorganiser leurs activités
À ce titre, monsieur le ministre, pouvez-vous nous apporter des éléments sur le calendrier de cette procédure de suspension ? Par ailleurs, le Gouvernement a-t-il déjà eu des échanges avec les acteurs du secteur ou des rencontres sont-elles prévues prochainement à ce sujet ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur le rapporteur pour avis, vous m’avez interrogé sur les prochaines étapes de la procédure de suspension du dioxyde de titane et sur les conditions dans lesquelles les acteurs du secteur, les producteurs, les distributeurs et les utilisateurs, ont été ou seront consultés ou associés à cette procédure.
Les pouvoirs publics attendront les conclusions de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, dont les analyses sont en cours, avant de prendre, le cas échéant, des mesures réglementaires appropriées.
Dans le même temps, les professionnels sont invités à valoriser les produits de substitution au dioxyde de titane dans leur processus de fabrication, et les contrôles de la loyauté de l’information donnée aux consommateurs sur la présence éventuelle de matériaux sous forme nanoparticulaire effectués par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, vont se poursuivre.
Le syndicat des confiseurs de France a fait savoir que, d’ores et déjà, comme je le disais tout à l’heure, 80 % de ses adhérents ont supprimé le dioxyde de titane. Ils se sont d’ailleurs engagés, dans leur charte, à supprimer totalement le recours à ce produit.
Nous attendons le retour de l’EFSA avant de travailler à la suppression définitive de ce produit et de nous attaquer aux autres causes de sa toxicité, notamment l’inhalation.
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 sexdecies, modifié.
(L’article 11 sexdecies est adopté.)
Article 11 septdecies
(Non modifié)
L’article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rédigé :
« Art. L. 230-3. – L’observatoire de l’alimentation assure un suivi global de la qualité nutritionnelle de l’offre alimentaire. Il collecte et analyse les données nutritionnelles relatives aux aliments afin d’éclairer les pouvoirs publics et les opérateurs privés en vue d’une amélioration continue de la qualité de l’offre alimentaire et d’une réduction des risques en matière de santé.
« Il fournit également aux secteurs professionnels des outils d’aide à la décision utiles à la mise en œuvre des engagements collectifs définis à l’article L. 230-4.
« Les modalités de fonctionnement de l’observatoire ainsi que sa composition sont définis par décret. »
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, sur l’article.
M. Maurice Antiste. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, lors de la discussion du projet de loi de modernisation de notre système de santé, en 2016, j’avais tenté d’imposer aux industriels de l’alimentation des objectifs clairement établis concernant la qualité nutritionnelle de leurs recettes manufacturées.
Or, malgré les engagements pris par les industriels, aucun impact sensible n’est aujourd’hui mesurable, puisque les travaux conjoints de l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, et de l’ANSES concluent à l’absence de diminution significative des consommations de matières grasses totales, d’acides gras saturés, de sucre ou de sel.
Pis, les aliments ultratransformés se retrouvent partout dans les rayons, avec des taux en sucre ajouté et en sel très importants. Pauvres en matières premières brutes – légumes, fruits, lait, viande –, mais riches en additifs, ils regorgent d’ingrédients à bas coût dénaturés pour leurrer notre goût.
C’est d’ailleurs la conclusion à laquelle a abouti l’association 60 millions de consommateurs, dans une étude intitulée Ces aliments qui nous empoisonnent, pour laquelle ont été décryptés les ingrédients de cent denrées alimentaires. Croisée à une série d’études internationales, notamment celle de la revue British Medical Journal qui a été publiée au début de l’année, elle semble établir un lien sérieux entre nourriture ultratransformée et risque de cancer.
Un autre problème de santé majeur en découle, considéré comme un véritable fléau par l’Organisation mondiale de la santé : l’obésité et le surpoids.
Un Français sur deux est en surpoids, quand 15,8 % des hommes et 15,6 % des femmes sont atteints d’obésité. Fait plus grave, le taux de personnes en surcharge pondérale – surpoids plus obésité – s’élève, au total, à 56,8 % pour les hommes et à 40 % pour les femmes.
Malgré les efforts consentis depuis plusieurs années et les différentes campagnes de sensibilisation, cette pathologie est très prégnante aux Antilles, où elle touche toutes les générations. En 2014, 4,8 % des enfants des classes maternelles et 5,5 % des enfants des classes de CM2 dans les départements d’outre-mer souffraient d’obésité. N’oublions pas également que l’une des conséquences de ce fort taux d’obésité est l’augmentation des cas d’AVC et des maladies cardiovasculaires sur notre île.
C’est pourquoi il est grand temps de prendre le problème à bras-le-corps et d’agir contre ces déséquilibres alimentaires.
M. le président. L’amendement n° 329 rectifié, présenté par M. Delcros, Mmes Gatel et Vullien, MM. Louault et Henno, Mme Joissains et MM. Moga, Capo-Canellas, L. Hervé, Prince, Vanlerenberghe, Longeot, Kern et Canevet, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 230-3 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Après le mot : « alimentation », sont insérés les mots : « et de la restauration collective responsable » ;
b) Sont ajoutés les mots : « , en particulier en restauration collective » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« En liaison avec les observatoires régionaux et inter-régionaux de l’alimentation durable et de la restauration collective responsable, il veille au respect de l’article L. 230-5-1. Les gestionnaires, publics et privés, d’activités de restauration collective recueillent et communiquent à l’observatoire les données quantitatives et qualitatives utiles à l’accomplissement de sa mission de suivi. »
La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. L’article 11, que nous avons adopté hier très largement, marque une étape importante.
Il réalise une belle avancée en faveur d’une alimentation de qualité, produite localement, notamment en direction de notre jeunesse, pour tout ce qui concerne la restauration scolaire.
Cependant, il est évidemment nécessaire de prévoir un dispositif de suivi pour pouvoir suivre l’avancée de cette mesure et voir si l’on atteint nos objectifs, pour que l’orientation que nous avons inscrite dans ce texte ne reste pas sans concrétisation sur le terrain.
L’amendement du rapporteur qui a été adopté hier répond partiellement à cet objectif, en créant, à l’échelon régional, une instance de concertation sur l’approvisionnement de la restauration collective.
Malgré tout, il me paraît nécessaire qu’une instance coordonne et capitalise les travaux des comités régionaux au niveau national.
Tel est le sens du présent amendement, qui vise à étendre les missions de l’Observatoire de l’alimentation au suivi des données qualitatives et quantitatives relatives à la restauration collective responsable.
Ainsi, l’élargissement des compétences de cette instance s’inscrirait pleinement dans les objectifs de l’article 11 et compléterait utilement, me semble-t-il, l’amendement n° 772 du rapporteur.
L’Observatoire pourrait éventuellement prendre le nom d’« observatoire de l’alimentation et de la restauration collective responsable ».
Il nous permettrait de rendre opérationnels les objectifs que nous inscrivons dans la loi et qui doivent être une priorité, mais aussi de valoriser les expériences réussies, notamment les modèles économiques performants pour accompagner les gestionnaires de la restauration collective, particulièrement les petites collectivités locales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Mon cher collègue, je pense que, sur ce point, votre amendement est satisfait par l’annonce du Gouvernement de la prochaine installation du conseil national de la restauration collective.
Par conséquent, la commission sollicite le retrait de votre amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur le sénateur, il n’est pas souhaitable de confier à l’Observatoire de l’alimentation la mission de veiller au respect de l’obligation prévue à l’article 11 du projet de loi, parce qu’il n’en a pas les moyens.
De manière générale, il faudra prévoir les modalités de suivi de cet article qui seront examinées dans le cadre du conseil national de la restauration collective, que je créerai prochainement. Cette instance permettra de discuter des dispositions devant figurer dans le décret prévu à cet effet.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Monsieur Delcros, l’amendement n° 329 rectifié est-il maintenu ?
M. Bernard Delcros. Compte tenu des réponses qui m’ont été apportées, je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 329 rectifié est retiré.
Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 354 rectifié bis, présenté par MM. Poadja, Laurey et Kern, Mme Dindar, M. Mizzon, Mme Létard et M. Henno, n’est pas soutenu.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 134 rectifié sexies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse, Dennemont et Moga.
L’amendement n° 388 rectifié bis est présenté par Mme Schillinger et MM. Bargeton, Cazeau, Gattolin, Karam, Marchand, Mohamed Soilihi et Théophile.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour agir sur la qualité nutritionnelle des produits agricoles et alimentaires et leur consommation, il fixe des objectifs à atteindre en termes de taux de matières grasses, de sucre et de sel présents dans leurs produits et les délais pour y parvenir. Ces objectifs, définis par famille de produits, ont pour but de permettre une évolution favorable de la qualité nutritionnelle des denrées en réduisant la consommation en matières grasses, sucre et sel occasionnée par les méthodes de fabrication des opérateurs du secteur de l’agroalimentaire.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 134 rectifié sexies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement tend à mettre en place des objectifs contraignants pour l’ensemble des produits des filières responsables des déséquilibres alimentaires.
L’avis rendu par l’ANSES en décembre 2016 sur l’actualisation des repères du programme national nutrition santé, ou PNNS, a mis en avant l’importance de déterminer des objectifs de diminution du taux de sucre par famille d’aliments chiffrés et contraignants.
Le présent amendement vise à répondre à cette demande.
M. le président. L’amendement n° 388 rectifié bis n’est pas soutenu.
L’amendement n° 323 rectifié, présenté par MM. Bonhomme et Pellevat, Mmes Micouleau, Di Folco et Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Mandelli et A. Marc, Mmes Gruny et de la Provôté, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, MM. Chasseing et Kern, Mme Kauffmann, M. Bazin, Mmes Deroche, Chain-Larché, Thomas et Garriaud-Maylam, M. Mizzon, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Piednoir et Paul, Mme Billon, MM. Pointereau, Cigolotti et Saury, Mme A.M. Bertrand et MM. Sido et Daubresse, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Pour agir sur la qualité nutritionnelle des produits agricoles et alimentaires et leur consommation, il fixe des objectifs ambitieux et nécessaires en termes de teneur en acides gras saturés, en sucres et en sel présents dans leurs produits et les délais pour y parvenir. Ces objectifs, définis par famille de produits, ont pour but de permettre une amélioration significative de la qualité nutritionnelle des denrées en réduisant la consommation d’acides gras saturés, de sucres et de sel induite par les méthodes de fabrication de certains opérateurs du secteur de l’agroalimentaire.
La parole est à M. Arnaud Bazin.
M. Arnaud Bazin. Il apparaît qu’aucun effet sensible ne ressort aujourd’hui des engagements volontairement pris par les industriels voilà quinze ans afin d’améliorer la qualité nutritionnelle de leurs recettes.
Alors que ceux-ci ont réservé leurs efforts d’amélioration à un faible nombre de produits de niche, les travaux conjoints de l’INRA et de l’ANSES, au sein de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation, montrent qu’il n’y a pas eu de diminution significative de la consommation de matières grasses totales, d’acides gras saturés, de sucre ou de sel.
Le présent amendement, qui est une réaction à ces chiffres, vise à ce que soient mis en place des objectifs ambitieux, portant sur l’ensemble des produits des filières directement responsables de ces déséquilibres alimentaires.
En outre, son adoption constituerait un levier important pour incorporer une part accrue de matières premières agricoles à valeur nutritionnelle significative dans la fabrication des produits alimentaires.
D’ailleurs, dans son avis sur l’actualisation des repères du programme national nutrition santé, rendu en décembre 2016, l’ANSES défendait une position proche de cette demande, en proposant que les pouvoirs publics soient chargés de déterminer un objectif chiffré de diminution des taux de sucre par famille d’aliments. Cette mesure serait assortie d’un calendrier permettant de fixer des délais à respecter pour chaque objectif.
M. le président. L’amendement n° 547 rectifié ter, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner et Antiste, Mme Lienemann, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Avant le dernier alinéa de l’article L. 3231-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ce programme fixe des objectifs chiffrés à atteindre tous les cinq ans en termes de taux de matières grasses, de sucre et de sel par famille de produits alimentaires. »
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Cet amendement vise à préciser que le PNNS, qui est élaboré tous les cinq ans par le Gouvernement, fixe des objectifs clairs en matière de réduction des taux de matières grasses, de sucre et de sel par famille de produits alimentaires.
Il s’agit bien entendu de répondre à l’explosion du phénomène d’obésité en France, particulièrement chez les jeunes, en renforçant le rôle stratégique de l’État dans ce domaine.
Je veux ajouter quelques chiffres à ceux qui ont déjà été évoqués : 50 % des adultes sont en surpoids, dont 17 % de personnes obèses. Chez les enfants, ces taux s’élèvent respectivement à 17 % et à 4 %.
Il faut préciser que l’article L. 230-4 du code rural et de la pêche maritime prévoit que l’État incite les opérateurs du secteur agroalimentaire à mettre en œuvre des accords collectifs ayant pour but d’améliorer la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires. Pour ce faire, ces opérateurs fixent eux-mêmes, à ce jour, des objectifs à atteindre, conformément aux orientations définies dans le PNNS.
L’amendement que nous vous proposons vise à renforcer ce programme, afin que les acteurs de la chaîne alimentaire soient contraints d’y intégrer des objectifs clairs, permettant de procéder à des évaluations avec les partenaires.
M. le président. L’amendement n° 670 rectifié bis, présenté par Mmes Guillotin et Laborde, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Gold et Guillaume, Mme Jouve et MM. Labbé, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Les deux premiers alinéas de l’article L. 230-4 du code rural et de la pêche maritime sont ainsi rédigés :
« Pour agir sur la qualité nutritionnelle des produits agricoles et alimentaires et leur consommation, l’État fixe des objectifs à atteindre en termes de taux de matières grasses, de sucre et de sel présents dans leurs produits et les délais pour y parvenir. Ces objectifs, définis par famille de produits, ont pour but de permettre une évolution favorable de la qualité nutritionnelle des denrées en réduisant la consommation en matières grasses, sucre et sel occasionnée par les méthodes de fabrication de ces opérateurs.
« Les objectifs sont fixés par arrêté, après avis de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation. »
La parole est à M. Didier Guillaume.
M. Didier Guillaume. Cet amendement est défendu.
M. le président. L’amendement n° 107 rectifié quinquies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent, MM. Daubresse, Dennemont et les membres du groupe Les Indépendants - République et Territoires, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Après l’article L. 230-4 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un article L. 230-4-… ainsi rédigé :
« Art. L. 230-4-… – Pour agir sur la qualité nutritionnelle des produits agricoles et alimentaires et leur consommation, l’État fixe des objectifs à atteindre en termes de taux de matières grasses, de sucre et de sel présents dans leurs produits et les délais pour y parvenir. Ces objectifs, définis par famille de produits, ont pour but de permettre une évolution favorable de la qualité nutritionnelle des denrées en réduisant la consommation en matières grasses, sucre et sel occasionnée par les méthodes de fabrication de ces opérateurs.
« Les objectifs sont fixés par arrêté, après avis de l’Oqali. »
La parole est à Mme Colette Mélot.
Mme Colette Mélot. Cet amendement vise à permettre à l’État de fixer des objectifs de qualité nutritionnelle pour les produits agricoles et alimentaires.
Les auteurs de cet amendement, coécrit avec l’association UFC-Que Choisir, s’inquiètent du caractère minime des efforts d’amélioration de la qualité nutritionnelle des recettes de produits alimentaires. De nombreux rapports d’observations de l’Observatoire de la qualité de l’alimentation, de l’ANSES et de l’INRA pointent du doigt le manque de baisse significative des consommations de matières grasses totales, d’acides gras saturés, de sucre ou de sel.
Dans son avis de décembre 2016, l’ANSES proposait déjà de réactualiser les repères du programme national nutrition santé et demandait que les pouvoirs publics soient chargés de déterminer un objectif de diminution des taux de sucre par famille d’aliments chiffré et contraignant.
En proposant d’insérer un nouvel article dans le code rural et de la pêche maritime, nous souhaitons que soient fixés des objectifs sur l’ensemble des produits des filières responsables des déséquilibres alimentaires.
Le calendrier d’application de ces nouveaux objectifs est renvoyé à un arrêté.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les amendements nos 134 rectifié sexies et 323 rectifié visent à confier la fixation des objectifs à l’Observatoire de la qualité de l’alimentation, alors que cet organisme n’a pour fonction, précisément, que d’observer et de suivre la qualité nutritionnelle de l’offre alimentaire. Il lui appartient non pas de fixer des objectifs, mais seulement d’éclairer les pouvoirs publics.
Les dispositions de l’amendement n° 547 rectifié ter renvoient la fixation de ces objectifs au PNNS, ce qui relève du pouvoir réglementaire, et non de la loi.
Enfin, les amendements nos 670 rectifié bis et 107 rectifié quinquies tendent à ce que l’État fixe des objectifs, sans que rien ne contraigne les opérateurs à appliquer ceux-ci.
La commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement partage la finalité recherchée par les auteurs de ces amendements.
Toutefois, les modalités retenues dans la feuille de route des États généraux de l’alimentation et du plan national de santé publique diffèrent de celles qui sont ici proposées.
Nous souhaitons donner un nouvel élan aux engagements des professionnels en privilégiant des approches ambitieuses mesurables et vérifiables. La fixation de seuils réglementaires interviendra dans un second temps, si nous n’atteignons pas les objectifs fixés.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Monsieur le ministre, on ne découvre pas cette question. Cela fait des années que l’on connaît les effets néfastes de ces produits sur la santé, notamment leurs effets de latence sur certaines maladies. Il faut se décider à diminuer les teneurs en matières grasses, en sucre ou en sel.
L’ANSES a mené des études très précises pour réactualiser le programme national nutrition santé.
Les questions de santé publique sont de plus en plus prégnantes dans notre société. Hier, nous évoquions le diabète de type 2. Nous parlons ici de facteurs avérés en matière de maladies cardiovasculaires ou d’AVC. Certaines études scientifiques font aussi le lien entre obésité et infertilité. On ne peut pas dire qu’on ne sait pas !
L’ANSES s’est penchée de nouveau sur la question en 2016. On sait aujourd’hui que la consommation de ces produits a un effet sur la santé publique.
Monsieur le ministre, vous dites vouloir donner un nouvel élan. Disons plutôt qu’on a manifesté une nouvelle espérance vis-à-vis de l’industrie agroalimentaire. Malheureusement, neuf mois après l’instauration, par exemple, de la taxe soda, on sait que les choses ne bougent pas, …
M. François Bonhomme. … sinon très peu, voire de manière factice : on va donner des gages sur certains produits relativement marginaux en termes de vente et ne rien changer aux produits phares de cette gamme alimentaire.
Quand on regarde un fameux paquet de céréales, on a l’impression que l’agriculture est au premier plan. Or ces céréales sont composées de plus de 50 % de sucres ! Tout cela pose un problème.
Je ne peux laisser dire que des efforts significatifs ont été réalisés. Je suis très contrarié et déçu de votre réponse. Comme le rappelle la célèbre formule : l’immobilisme est en marche et rien ne l’arrêtera ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur le sénateur, vous ne pouvez pas parler d’immobilisme après ce que nous venons de faire au travers des États généraux de l’alimentation.
Je vous invite à m’accompagner à une réunion de l’Association nationale des industries agroalimentaires, l’ANIA, pour rencontrer les professionnels. Vous verrez que les choses bougent. Venez sur le terrain rencontrer les entreprises et les principaux opérateurs des industries alimentaires : le secteur est en train de bouger pour répondre et aux demandes des consommateurs et aux objectifs ambitieux que nous fixons.
Notre méthode reste la même : nous n’imposons pas, nous souhaitons travailler dans la concertation avec les industriels. Comme je l’ai dit à l’instant, si les objectifs suffisamment ambitieux que nous avons fixés avec les professionnels, et qui font l’objet d’un suivi régulier et précis, ne sont pas atteints, nous imposerons alors des seuils réglementaires pour limiter la consommation des produits plus gras, plus salés, plus sucrés.
Comment pouvez-vous parler d’immobilisme ? Nous prenons cette question à bras-le-corps. Il est impossible de l’éluder, de la sous-estimer ou de la mésestimer. Il s’agit d’une question de société : vous le savez comme moi, les pathologies induites par la consommation de produits alimentaires de moins bonne qualité sont souvent consubstantielles à l’origine sociale des consommateurs. C’est la raison pour laquelle nous travaillons sur la précarité alimentaire, notamment à travers la restauration collective. Là encore, nous donnons des gages aux entreprises pour faire évoluer certaines situations.
Je ne peux vous laisser dire que nous sommes dans l’immobilisme : nous privilégions la concertation plutôt que l’obligation qui met bien souvent les gens au pied du mur.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 134 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 547 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 670 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 107 rectifié quinquies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 septdecies.
(L’article 11 septdecies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 11 septdecies
M. le président. L’amendement n° 658 rectifié, présenté par M. Tissot, Mmes Rossignol, Préville et Taillé-Polian, MM. M. Bourquin et Duran, Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, M. Lurel, Mme Perol-Dumont, MM. Vaugrenard et Dagbert, Mme Meunier, M. Antiste, Mmes Conconne, Espagnac et Ghali, M. Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche et Mme Tocqueville, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le second alinéa de l’article L. 3232-8 du code de la santé publique est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces recommandations prennent en compte, sans préjudice des autres critères, le niveau de transformation et la modification des qualités nutritionnelles des produits par des additifs divers. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement vise à informer le consommateur sur la manipulation industrielle des ressources entrant dans la composition des produits agroalimentaires. Cette disposition n’entrave pas la liberté de choix du consommateur, mais lui permet de prendre en compte le niveau de transformation des produits.
Des recherches récentes montrent que la consommation régulière de ces aliments recomposés, souvent riches en sucres et en graisses, favorise l’apparition de maladies métaboliques chroniques, comme le diabète, l’hypertension ou l’obésité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement tend à une information complémentaire du consommateur sur le niveau de transformation et la modification des qualités nutritionnelles des produits par des additifs divers.
L’étiquetage des additifs est déjà obligatoire et les consommateurs ont bien compris que plus la liste est longue, plus le produit est transformé.
La commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Comme je l’ai souligné hier, la ministre des solidarités et de la santé, le ministre de l’économie et des finances et moi-même avons lancé le logo Nutri-score en octobre 2017. Il est encore trop tôt pour modifier ce dispositif, faute de retours d’expérience en nombre suffisant.
Par ailleurs, le haut degré de transformation d’un produit ne signifie pas nécessairement que celui-ci est mauvais pour la santé. Il convient de faire preuve de prudence en la matière. Trop de mentions sur l’étiquette tue l’information ; mieux vaut sérier les choses.
Il me semble important aujourd’hui de soutenir Nutri-score et de ne pas multiplier les initiatives. Attendons d’avoir suffisamment de retours, fort utiles, de la part des consommateurs qui consultent ce logo – au moins un an – pour disposer du recul nécessaire. Il s’agit d’une démarche volontaire de la part des industriels qui acceptent d’apposer le logo Nutri-score sur leurs produits.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Si on commence à multiplier le nombre d’additifs, parfois incroyable dans certains produits, dans la liste des informations devant figurer sur l’étiquetage, ça peut poser problème. Et ce d’autant plus que l’étiquetage nutritionnel n’est pas lu. Nutri-score devait permettre de simplifier les choses, mais l’Europe – on sait quelles pressions psychologiques les députés européens ont subies en 2011 – a rendu ce dispositif facultatif.
Je ne comprends pas votre position, monsieur le ministre. Vous voulez faire preuve de pédagogie, mais cela fait des années qu’on entend le même discours lancinant sur la pédagogie. J’aimerais plus d’engagement de votre part.
Vous nous dites que le bilan sera fait au bout d’un an. Pouvez-vous nous préciser dans quelles conditions ? Comment seront évalués précisément les engagements assez flous pris par l’industrie agroalimentaire ? Certaines firmes, comme Nestlé, veulent d’ailleurs contourner le dispositif en mettant en avant leur propre Nutri-score, en quelque sorte, uniquement pour brouiller le message.
En attendant, on rajoute du sucre dans les haricots verts ou les carottes râpées ! Les images publicitaires sont toujours très belles : elles montrent des fruits, des légumes et autres matières premières. Tout cela en direction des enfants, qui sont les premiers touchés.
Quant à l’aspect social que vous avez évoqué, apposer le logo Nutri-score sur un produit n’est pas punitif. Voir de tout jeunes enfants, victimes de cette surconsommation en sucre, être atteints de diabète de type 2 à seize ans – on ne connaissait pas auparavant cette situation –, dont l’espérance de vie est déjà fortement réduite, voilà ce qui est punitif.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. Mon propos ne visait pas simplement à rajouter les additifs à la liste des informations à communiquer.
Il existe aujourd’hui des applications pour smartphones très utilisées par les plus jeunes…
Mmes Sophie Primas et Anne-Catherine Loisier, présidente de la commission des affaires économiques et rapporteur. Et les moins jeunes ! (Sourires.)
M. Jean-Claude Tissot. … et les moins jeunes – d’autant plus que l’on peut agrandir la police d’écriture sur l’écran, comme vous me l’avez fait remarquer, madame la présidente… (Mêmes mouvements.)
Tous les produits à la vente devraient être lisibles par ces applications.
M. le président. L’amendement n° 548 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 1434-3 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Comporte un volet consacré à l’alimentation, notamment en termes de sensibilisation de la population et d’éducation aux bonnes conduites alimentaires auprès des plus jeunes et conformément aux recommandations du programme national relatif à la nutrition et à la santé prévu à l’article L. 3231-1 du présent code. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à instaurer un volet consacré à l’alimentation dans chaque projet régional de santé. Cette demande traduit l’une des recommandations de l’atelier 9 des États généraux de l’alimentation.
Avec le manque d’activité physique, l’alimentation est un élément déterminant de l’émergence des principales pathologies chroniques – cancer, diabète ou maladies cardiovasculaires et neurovasculaires.
Aujourd’hui, le schéma régional de santé comporte des volets consacrés à l’offre de soins, à l’accès aux soins, à la sensibilisation de la population et des professionnels aux maladies vectorielles, ou encore à des besoins spécifiques liés à la situation géographique.
Le lien entre santé et alimentation étant extrêmement fort, nous proposons que chaque schéma régional de santé intègre demain un volet consacré à l’alimentation, notamment en termes de sensibilisation de la population et d’éducation aux bonnes conduites alimentaires auprès des plus jeunes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de prévoir un volet obligatoire au sein des projets régionaux de santé.
Rien n’empêche l’agence régionale de santé de s’emparer de ce sujet de santé publique si elle estime qu’il s’agit d’une priorité locale. De fait, cet amendement est satisfait : tout dépend de l’initiative et de l’engagement des autorités régionales.
La commission est donc défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Ces thèmes sont d’ores et déjà inclus dans les documents d’orientation nationale, en particulier dans la stratégie nationale de santé et le programme national nutrition santé, dont la priorité est d’améliorer la santé de l’ensemble de la population en agissant sur la nutrition.
Dans la mesure où votre amendement n’apporte aucune plus-value et qu’il est déjà satisfait, le Gouvernement y est défavorable, monsieur le sénateur.
Monsieur Bonhomme, pour ce qui concerne le calendrier de mise en œuvre de Nutri-score, je ne peux vous apporter de réponse précise pour l’instant. Ce dispositif interministériel est déployé sous la triple tutelle du ministère de l’agriculture et de l’alimentation, du ministère de l’économie et des finances et du ministère des solidarités et de la santé. C’est donc ensemble que nous définissons la stratégie à mener pour ce logo nutritionnel.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 328 rectifié est présenté par M. Bonhomme, Mme Garriaud-Maylam, M. Pellevat, Mmes Micouleau et Bruguière, MM. Paul, Paccaud et Mizzon, Mmes Estrosi Sassone et Delmont-Koropoulis, MM. Piednoir et Kern, Mme Kauffmann, M. Longuet, Mme Deromedi, MM. Gilles et Bansard, Mmes Renaud-Garabedian et Billon, M. Le Nay, Mme Boulay-Espéronnier, MM. L. Hervé et Buffet, Mme Bories, MM. Sido et A. Marc, Mme Bonfanti-Dossat et MM. Brisson, Daubresse et Le Gleut.
L’amendement n° 669 rectifié est présenté par Mmes Guillotin et Laborde, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, MM. Dantec, Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Jouve et MM. Labbé, Léonhardt, Menonville et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2133-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2133-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-1-… – Les messages publicitaires en faveur de denrées alimentaires sont accompagnés de la forme de présentation complémentaire à la déclaration nutritionnelle recommandée par l’État en application de l’article L. 3232-8 du présent code. Dans le cas des messages publicitaires sur internet, télévisés ou radiodiffusés, cette obligation ne s’applique qu’aux messages émis et diffusés à partir du territoire français et reçus sur ce territoire. La même obligation d’information s’impose à toute promotion, destinée au public, par voie d’imprimés et de publications périodiques édités par les producteurs ou distributeurs de ces produits.
« Les annonceurs et les promoteurs peuvent déroger à cette obligation sous réserve du versement d’une contribution dont le produit est affecté à l’Agence nationale de santé publique.
« La contribution prévue au deuxième alinéa du présent article est assise, s’agissant des messages publicitaires, sur le montant annuel des sommes destinées à l’émission et à la diffusion de ces messages, hors remise, rabais, ristourne et taxe sur la valeur ajoutée, payées par les annonceurs. Le montant de cette contribution est égal à 5 % du montant de ces sommes.
« La contribution prévue au même deuxième alinéa est assise, s’agissant des autres types de promotion de ces produits, sur la valeur hors taxe sur la valeur ajoutée des dépenses de réalisation et de distribution qui ont été engagées au titre de l’année civile précédente, diminuée des réductions de prix obtenues des fournisseurs qui se rapportent expressément à ces dépenses. La base d’imposition des promoteurs qui effectuent tout ou partie des opérations de réalisation et de distribution avec leurs propres moyens d’exploitation est constituée par le prix de revient hors taxe sur la valeur ajoutée de toutes les dépenses ayant concouru à la réalisation desdites opérations. Le taux de la contribution est fixé à 5 % du montant hors taxe sur la valeur ajoutée de ces dépenses.
« Le fait générateur est constitué par la diffusion des messages publicitaires ou la mise à disposition des documents mentionnés au premier alinéa. La contribution est exigible au moment du paiement par l’annonceur aux régies ou au moment de la première mise à disposition des documents mentionnés. La contribution est déclarée, liquidée, recouvrée et contrôlée selon les procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à cette même taxe. Il est opéré un prélèvement de 1,5 % effectué par l’État sur le montant de cette contribution pour frais d’assiette et de recouvrement.
« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État pris après avis de l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail et après consultation de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité.
« Le présent article entre en vigueur à la date de publication du décret mentionné à l’avant-dernier alinéa, et, au plus tard, le 1er janvier 2019. »
La parole est à M. François Bonhomme, pour présenter l’amendement n° 328 rectifié.
M. François Bonhomme. Nutri-score est un logo visant à simplifier l’information du consommateur sur la qualité nutritionnelle du produit.
Conçu par Santé publique France, l’ANSES et le Haut Conseil de la santé publique, il est recommandé par le ministère des solidarités et de la santé, reconnu par l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, par les organisations de consommateurs et par les professionnels de santé.
Il classe en cinq catégories, allant de A au E et du vert au rouge, les produits alimentaires en fonction de leurs qualités nutritionnelles. Ainsi, les produits riches en nutriments à favoriser, comme les fibres, les protéines, les fruits et les légumes, obtiendront un score plus proche du vert et du A, et ceux qui sont riches en nutriments à limiter – sel, sucres et gras – un score plus proche du rouge et du E.
Cette information transparente et directe vise, d’une part, à mieux informer le consommateur dans ses choix et, d’autre part, à terme, à inciter les industriels à améliorer la composition et la qualité nutritionnelle de leurs produits.
Des études menées par les autorités sanitaires ont démontré que le logo Nutri-score orientait le choix des consommateurs, en particulier les plus jeunes, vers des produits plus sains.
Si la mention du Nutri-score sur les emballages n’a pas de caractère obligatoire pour des raisons de conformité au droit européen, la présence de ce logo est néanmoins recommandée par les autorités. Un certain nombre d’entreprises s’est engagé à le faire figurer sur une partie de ses produits.
Les avancées dans ce sens s’avérant encore insuffisantes, le présent amendement vise à rendre obligatoire la mention du Nutri-score sur tous les supports publicitaires pour les denrées alimentaires.
Cette mention concernerait tous les aliments transformés – à l’exception des produits artisanaux, des produits « traiteur », des produits bruts et infantiles –, ainsi que toutes les boissons, hormis les boissons alcoolisées.
Cette disposition est une mesure de santé publique pour informer de façon simple et lisible le consommateur. Il s’agit, en orientant positivement ce dernier dans ses choix, de mieux prévenir le développement de maladies comme le diabète ou l’obésité.
M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour présenter l’amendement n° 669 rectifié.
M. Franck Menonville. Cet amendement est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Comme l’a rappelé M. le ministre, le Nutri-score n’est entré en vigueur qu’en octobre 2017.
Si ce dispositif est encore insuffisamment déployé, plus d’une cinquantaine d’entreprises se sont engagées à le mettre en place dans les meilleurs délais. Par ailleurs, ce logo a fait l’objet d’une importante campagne de communication en mai dernier.
Rendre obligatoire le logo Nutri-score serait aujourd’hui clairement contraire au droit européen, qui ne l’autorise que sur une base volontaire et dans le cadre d’une expérimentation dont je vous conseille, mes chers collègues, d’attendre les conclusions.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 328 rectifié et 669 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 593 rectifié, présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Rossignol, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, MM. Jacquin et Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 1er janvier 2019 , le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité de généraliser au niveau communautaire le système d’étiquetage nutritionnel Nutri-Score.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Afin d’éviter toute distorsion de concurrence et en partant du constat que le système Nutri-score a fait ses preuves au plan national, les auteurs de cet amendement proposent de le généraliser à l’échelle européenne. Nous souhaitons donc que les autorités françaises engagent des négociations dans ce sens dans les mois à venir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission souhaite attendre le bilan de l’expérimentation avant de proposer toute extension du dispositif à l’échelle européenne : avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement est défavorable à cet amendement, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. M. le ministre nous dit vouloir attendre les résultats de l’expérimentation, ce dispositif n’eut-il aucun caractère obligatoire.
Or ce n’est pas un hasard si des applications pour smartphones se développent ; elles ne sortent pas des limbes – je pense à Yuka, par exemple, qui permet de connaître l’indice glycémique de tous les produits consommés : en fait, l’étiquetage actuel est bien trop compliqué.
Même si les autorités publiques ne font pas preuve d’un enthousiasme absolu – c’est le moins qu’on puisse dire –, la société vous rattrapera.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Justement ! Pourquoi légiférer ?
M. François Bonhomme. Il s’agit aujourd’hui d’un besoin. Autant accompagner le mouvement dans l’enthousiasme et de manière officielle plutôt que de traîner les pieds et d’essayer de retarder ce qui me paraît inéluctable et nécessaire.
M. Didier Guillaume. Tout à fait !
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Le logo Nutri-score constitue un premier pas. Même s’il repose sur le principe du volontariat, c’est toujours mieux que rien.
Pour que ce système fonctionne correctement, les consommateurs doivent être éduqués en matière d’alimentation. Les choses sont plus globales et complexes qu’une simple notation par produit.
Je veux enfin poser une question quelque peu malicieuse : quelqu’un a-t-il jamais vu, dans les rayons d’un magasin, un produit avec une notation Nutri-score D ou E ? On imagine mal un industriel mettre sur le marché un produit en indiquant qu’il ne faut surtout pas l’acheter… On voit là toutes les limites du volontariat.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Tissot. Madame le rapporteur, monsieur le ministre, j’aimerais comprendre ce qui vous retient de mettre ce système en place.
J’entends que vous ne disposez pas encore des résultats de l’expérimentation. Pour autant, je ne comprends pas votre position : nous n’avons pas les résultats officiels, mais nous savons déjà qu’ils sont bons. Si les applications se développent, c’est que la demande existe.
M. le président. Je suis saisi de huit amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 499 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Corbisez, Mme N. Delattre, M. Guillaume, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2133-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2133-1-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-1-… – Les messages publicitaires et activités promotionnelles, directes ou indirectes, portant sur des boissons et des produits alimentaires manufacturés destinés aux mineurs sont interdits, sur tous supports audiovisuels, radiophoniques, ou électroniques.
« Ces dispositions s’appliquent aux messages émis et diffusés à partir du territoire français et réceptionnés sur le territoire, à compter du 1er janvier 2020.
« Le premier alinéa ne s’applique pas aux aliments et boissons qui figurent sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, compte tenu de leurs caractéristiques nutritionnelles adaptées aux besoins des personnes mineures, dans le cadre d’une alimentation équilibrée.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions de mise en œuvre du présent article. »
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Volontairement, je n’y suis pas allé avec le dos de la cuillère (Sourires.), parce qu’il y en a vraiment assez de voir les publicitaires faire la pluie et le beau temps – en l’occurrence, le mauvais temps – dans ce pays !
J’y insiste en vous lisant un paragraphe de cet amendement : « Les messages publicitaires et activités promotionnelles, directes ou indirectes, portant sur des boissons et des produits alimentaires manufacturés destinés aux mineurs sont interdits, sur tous supports audiovisuels, radiophoniques, ou électroniques. »
Dans un rapport de 2016, l’Organisation mondiale de la santé soulignait les effets néfastes du marketing d’aliments hautement énergétiques, riches en matières grasses, en sucre ou en sel sur les enfants, lequel entraîne une propension à préférer les aliments et modes d’alimentation peu sains et favorisant l’obésité.
J’ai déjà souligné qu’il me semblait essentiel d’assurer une éducation à l’alimentation à l’école, via des jardins pédagogiques, dont le développement est indispensable.
Favoriser une alimentation saine implique de protéger nos enfants et adolescents de messages publicitaires qui contrediraient absolument cette éducation à une alimentation équilibrée.
Cet amendement vise à renforcer la protection des enfants et des adolescents par l’encadrement très strict de la publicité en faveur des produits à forte teneur en sucres ou en matières grasses. On se doit de favoriser la qualité de l’alimentation de nos enfants dès leur plus jeune âge.
M. le président. L’amendement n° 545 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Botrel, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 2133-1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 2133-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-… – I. – Les messages et activités promotionnelles sous toutes leurs formes, ciblant les enfants de moins de seize ans, et portant sur des boissons et des produits alimentaires manufacturés, sont interdits sur tout support de communication radiophonique, audiovisuel et électronique. Ces dispositions s’appliquent aux messages émis et diffusés à partir du territoire français et réceptionnés sur le territoire, à compter du 1er janvier 2020.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions de mise en œuvre du présent I.
« II. – Le premier alinéa du I ne s’applique pas aux aliments et boissons qui figurent sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, pris après avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, compte tenu de leurs caractéristiques nutritionnelles adaptées aux besoins de l’enfant et de l’adolescent dans le cadre d’une alimentation équilibrée. »
La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.
Mme Nicole Bonnefoy. Cet amendement traduit encore l’une des recommandations de l’atelier 9 des États généraux de l’alimentation, à savoir l’interdiction de la publicité auprès des jeunes en faveur d’aliments trop gras, trop sucrés ou trop salés.
Nous savons que cette proposition a déjà été rejetée à plusieurs reprises, mais nous la maintenons, car nous la jugeons opportune.
Il est inutile de rappeler l’influence de la télévision, de la radio, des médias, surtout chez les plus jeunes enfants. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons réellement agir sur les conduites alimentaires. Nous ne pouvons mettre de côté la problématique de la publicité.
En outre, l’interdiction que nous proposons complétera utilement les dispositions de la loi du 20 décembre 2016 relative à la suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique.
Je précise que le II de notre amendement permettra, après avis de l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, l’AFSSA, de déterminer les aliments ou boissons n’étant pas concernés par cette interdiction. Il s’agit d’ajouter un peu de souplesse au dispositif, afin de ne pas instaurer un cadre trop rigide.
M. le président. L’amendement n° 324 rectifié, présenté par MM. Bonhomme et Pellevat, Mmes Lavarde, Micouleau, Di Folco et Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Mandelli et A. Marc, Mmes Gruny et de la Provôté, M. Longeot, Mme Goy-Chavent, M. Chasseing, Mme Kauffmann, MM. Bonne, Bazin et Kennel, Mmes Deroche, Chain-Larché, Thomas et Garriaud-Maylam, M. Mizzon, Mme Delmont-Koropoulis, MM. Piednoir et Paul, Mme Billon, M. Cigolotti, Mme A.M. Bertrand, M. Fouché, Mme Bruguière et MM. Sido et Daubresse, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 2133-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-… – Les messages publicitaires et activités promotionnelles sous toutes leurs formes (marketing, événements, jeux, advergames etc.) ciblant les enfants de moins de 16 ans pour des produits alimentaires et des boissons trop riches en sucres, sel et/ou acides gras saturés sont interdits, sur tout support de communication radiophonique, audiovisuel et électronique (internet, réseaux sociaux, etc.).
« Les modalités d’application du présent article, et notamment critères de référence utilisés pour définir les produits et boissons ciblés par ces mesures, sont déterminées par décret. »
La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. En France, un enfant sur six est en surpoids ou obèse et risque de le rester à l’âge adulte.
Dans son rapport de 2016, la commission sur les moyens de mettre fin à l’obésité de l’enfant de l’OMS relève : « Des données incontestables montrent que la commercialisation d’aliments nocifs pour la santé et de boissons sucrées a un lien avec l’obésité de l’enfant ». Elle ajoute : « Même si l’industrie déploie un nombre croissant d’initiatives volontaires, l’exposition à la commercialisation des aliments nocifs pour la santé reste un problème majeur appelant un changement pour protéger tous les enfants de façon égale. »
La volonté de corriger l’augmentation continue des cas d’obésité de l’enfant devrait donc tendre à réduire l’exposition des enfants à la commercialisation des aliments nocifs pour la santé.
Actuellement, la France se contente des engagements volontaires de l’industrie agroalimentaire sur le marketing ciblant les enfants, comme le European pledge. De nombreuses études ont montré que ces engagements volontaires étaient très insuffisants, voire inopérants, pour assurer une prévention efficace de marketing ciblant les enfants pour des aliments déséquilibrés.
La nécessité de « limiter l’influence de la publicité et du marketing alimentaire sur les enfants en les réglementant et [d’]encadrer la promotion des marques associées à des aliments peu favorables au plan nutritionnel » est aujourd’hui inscrite dans la stratégie nationale de santé 2018-2022.
Cette proposition, qui constitue l’une des recommandations de l’atelier 9 des États généraux de l’alimentation, a également été formulée par le Haut Conseil pour la santé publique.
La France n’est pas protégée contre le mouvement général de développement de l’obésité infantile. Certes, notre modèle alimentaire nous protège encore quelque peu, mais il suffit de se rendre dans les départements du nord de la France pour voir combien les choses évoluent.
Le critère social est l’un des plus discriminants en la matière : plus on est précaire sur le plan économique et culturel, plus on est touché.
Si la France n’est pas le Mexique où règne une obésité morbide, encore plus qu’aux États-Unis, elle commence à subir la même situation. Il ne faudrait ni minimiser ni relativiser les choses. Dire cela, ce n’est pas stigmatiser. (M. Joël Labbé applaudit.)
M. le président. Les amendements nos 326 rectifié, 417 rectifié ter, 606 rectifié bis et 679 rectifié bis sont identiques.
L’amendement n° 326 rectifié est présenté par MM. Bonhomme et Pellevat, Mmes Lavarde, Micouleau, Di Folco et Bonfanti-Dossat, MM. Brisson, Mandelli et A. Marc, Mmes Gruny et de la Provôté, M. Longeot, Mmes Goy-Chavent et Kauffmann, MM. Bonne, Bazin et Kennel, Mmes Deroche, Chain-Larché, Thomas, Garriaud-Maylam et Delmont-Koropoulis, MM. Piednoir et Paul, Mme Billon, MM. Rapin et Cigolotti, Mme A.M. Bertrand, M. Sido, Mme Lamure et M. Daubresse.
L’amendement n° 417 rectifié ter est présenté par M. Théophile, Mme Schillinger et MM. Marchand, Dennemont, Karam, Gattolin, Hassani et Bargeton.
L’amendement n° 606 rectifié bis est présenté par M. Antiste, Mme Lienemann, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 679 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano, A. Bertrand, Castelli, Collin, Corbisez, Dantec, Gabouty, Guillaume et Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 2133-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-… – Les jeux, applications et sites internet portant sur des boissons et des produits alimentaires manufacturés ou sur des personnages, logos ou marques associés à ces produits ne sont accessibles que par des adultes majeurs. Leur consentement attestant de leur âge doit obligatoirement être donné avant l’accès à ceux-ci.
« Le premier alinéa ne s’applique pas aux supports relatifs aux aliments et boissons qui figurent sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, compte tenu de leurs caractéristiques nutritionnelles adaptées aux besoins de l’enfant et de l’adolescent dans le cadre d’une alimentation équilibrée. »
La parole est à M. François Bonhomme, pour présenter l’amendement n° 326 rectifié.
M. François Bonhomme. Cet amendement vise à encadrer le marketing alimentaire à destination des mineurs sur internet. Les effets néfastes des publicités pour des aliments peu sains sont rappelés par l’OMS depuis plusieurs années. Il est aujourd’hui indispensable de dupliquer l’encadrement existant pour ce qui concerne internet et les médias délinéarisés, par lesquels les jeunes publics sont de plus en plus attirés.
Ainsi, il est proposé que les jeux, applications et sites internet portant sur ce type de produits ou utilisant leur logo ou mascotte ne puissent être accessibles aux mineurs. Non seulement cela évitera que le jeune public ne soit attiré sur des sites vantant les mérites d’une alimentation déséquilibrée, mais cela permettra également d’empêcher tout contournement. La pratique des marques consiste généralement à créer des divertissements, en reprenant des mascottes – le tigre, la tortue ou l’abeille – ou des logos évoquant clairement le type de produits en question, tel l’animal d’une marque de céréales.
Ainsi, si l’aliment n’est pas le sujet principal du jeu, la mascotte relève clairement de la publicité et aura forcément tendance à attirer l’enfant vers le produit qu’elle représente.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 417 rectifié ter.
M. Dominique Théophile. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 606 rectifié bis.
M. Franck Montaugé. Cet amendement, qui s’inscrit dans la logique de notre amendement précédent, vise à encadrer le marketing alimentaire à destination des mineurs sur internet.
Depuis plusieurs années, l’OMS tire la sonnette d’alarme et appelle à limiter les effets néfastes, auprès du grand public, des publicités pour des aliments peu sains.
Il paraît aujourd’hui indispensable de mettre en place un encadrement sur internet et les médias délinéarisés, dont les jeunes publics sont de plus en plus friands.
Ainsi, nous proposons que les jeux, applications et sites internet portant sur ce type de produits ou utilisant leur logo ou mascotte ne puissent être accessibles aux mineurs.
En plus d’éviter que ce jeune public ne soit attiré sur des sites vantant les mérites d’une alimentation déséquilibrée, l’adoption de cet amendement permettra d’empêcher tout contournement, consistant notamment à créer des divertissements reprenant des mascottes et/ou des logos qui évoquent clairement ce type de produits, tel l’animal d’une marque de céréales.
Ainsi, si l’aliment n’est pas le sujet principal du jeu, la mascotte relève clairement de la publicité et aura tendance à attirer l’enfant vers le produit qu’elle représente.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 679 rectifié bis.
M. Joël Labbé. Cet amendement a été très bien défendu par François Bonhomme et Franck Montaugé.
Je veux simplement souligner le cynisme insupportable des publicitaires, qui osent utiliser l’abeille pour vendre de la malbouffe !
M. le président. L’amendement n° 546 rectifié, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les propositions concrètes qu’il formulera, dans le cadre de la future charte alimentaire signée avec le Conseil supérieur de l’audiovisuel, pour encadrer et limiter la publicité auprès du jeune public pour des boissons et des produits alimentaires manufacturés.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Il s’agit d’un amendement de repli, dans l’hypothèse où l’amendement n° 545 rectifié serait rejeté.
Nous connaissons l’argument du Gouvernement, qui revient à considérer qu’il appartient à la charte alimentaire du CSA d’aborder la question de la limitation ou de l’encadrement de la publicité en faveur de certains produits manufacturés.
Par ailleurs, nous avons bien pris connaissance de la deuxième charte alimentaire du CSA, signée en 2013, qui comporte un volet visant à promouvoir une alimentation saine et une activité physique.
Cependant, outre le fait que cette charte, selon nous, ne va pas suffisamment loin, nous considérons que, sur des questions de cette importance, il est fort regrettable que les législateurs que nous sommes soient ainsi exclus du processus décisionnel.
De plus, il s’agit ici d’une question de santé publique. Je ne vois pas en quoi le CSA serait plus compétent que le Parlement pour l’aborder.
En tout état de cause, par cet amendement, nous demandons que le Gouvernement remette un rapport au Parlement, afin de préciser concrètement les engagements qu’il compte prendre dans la future charte alimentaire pour encadrer et limiter la publicité de certains produits alimentaires à destination des plus jeunes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Les amendements nos 499 rectifié, 545 rectifié et 324 rectifié visent, selon des modalités différentes, à interdire tout message publicitaire ou activité promotionnelle.
Quant aux amendements identiques nos 326 rectifié, 417 rectifié ter, 606 rectifié bis et 679 rectifié bis, ils concernent uniquement les jeux, applications et sites internet, qui ne pourraient faire référence à des produits alimentaires qu’auprès des majeurs.
Mes chers collègues, je m’interroge sur la mise en œuvre d’une telle disposition. Cela m’intéresse beaucoup ! J’ai un adolescent à la maison, et je suis curieuse de savoir comment, techniquement, vous pensez procéder.
Je veux également insister sur l’ensemble des instruments existants pour réguler aujourd’hui la communication alimentaire auprès des jeunes. Ainsi, la loi de décembre 2016 a supprimé, le 1er janvier de cette année, la publicité commerciale à destination des enfants de moins de douze ans dans les émissions destinées à la jeunesse. Par ailleurs, la charte du Conseil supérieur de l’audiovisuel comporte des dispositions en la matière. Il est prévu, monsieur le ministre, de la renforcer dans les prochains mois, pour l’étendre notamment aux supports radio et internet. Pour toutes ces raisons, la commission est défavorable à l’ensemble de ces amendements.
S’agissant de l’amendement de repli n° 546 rectifié, nous considérons que les pouvoirs publics et le CSA, l’organe régulateur, sont suffisamment mobilisés sur ce sujet qui ne justifie pas un nouveau rapport. La commission y est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Sur ces sujets, nous l’avons toujours dit, nous privilégions le travail avec le CSA sur la charte de régulation.
Le CSA est l’instance de régulation de l’audiovisuel public. La loi du 20 décembre 2016 a fixé des obligations en matière d’audiovisuel public. J’avais participé à l’élaboration de cette loi au Parlement et, bien évidemment, nous continuons à travailler en ce sens. Très prochainement, les services du ministère de l’agriculture et de l’alimentation et le cabinet rencontreront la présidente de section du CSA en charge de ces questions, pour faire le point et avancer. En effet, nous en avons bien conscience, il faut aller plus loin.
Toutefois, plutôt que d’inscrire dans la loi des interdictions et des obligations qui mettraient les gens dos au mur, nous préférons inciter, en travaillant avec les acteurs de fabrication de ces produits et le CSA, lequel, en vertu de son rôle de régulateur, peut aussi faire passer un certain nombre de messages.
Il en est de même pour ce qui concerne les chaînes privées, qui sont aussi concernées par un certain nombre de ces objectifs, parce qu’elles tirent une partie importante de leurs ressources de la publicité. Ces ressources servent au développement du secteur de l’animation française.
La charte du CSA associe les pouvoirs publics – les ministères de la santé, de l’éducation nationale, de l’agriculture, de la jeunesse et des sports, de la culture et de la communication – et l’ensemble des professionnels du secteur audiovisuel.
Je suis donc défavorable à l’ensemble de ces amendements.
Concernant la publicité sur internet, il faut effectivement aller plus loin, et la préoccupation qui s’est fait jour dans le cadre des États généraux de l’alimentation est légitime. Nous entendons renforcer nos engagements dans le cadre de la charte du Conseil supérieur de l’audiovisuel, qui est notre régulateur. J’émets donc également un avis défavorable sur les amendements relatifs à la publicité sur internet.
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Vos propos, monsieur le ministre, témoignent d’une continuité certaine : pas d’interdiction, pas d’obligation ! Malheureusement, le public ciblé aujourd’hui est le public le plus touché. Mais permettez-moi de vous suggérer quelques pistes. En matière de santé publique, on a bien interdit les publicités pour le tabac. Même si je n’établis pas une analogie parfaite entre les deux produits, le rapprochement peut paraître légitime au regard des problèmes de santé publique soulevés.
On peut être prescriptif, notamment en autorisant la publicité pour des produits dont la valeur nutritionnelle est avérée. Mais la valeur nutritionnelle de certaines boissons rafraîchissantes non alcoolisées du type du Coca-Cola est égale à zéro. Il s’agit de « calories vides ». Il suffit qu’un adolescent boive une canette par jour pour ingérer la dose journalière maximale de sucre recommandée. C’est tout de même un sujet !
Certes, on peut prévoir un calendrier. Mais il convient d’être beaucoup plus prescriptif, plutôt que de se reposer sur la seule bonne volonté de ce secteur pour avancer, eu égard aux aspects de santé publique.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je veux le redire : on tergiverse, on n’arrête pas de tergiverser ! Le but des publicitaires, c’est de faire du business, et ils ont de gros moyens !
Notre rôle, c’est de protéger nos enfants et nos adolescents. Lorsqu’il y a lieu d’interdire, il faut interdire, sans doute dans le cadre d’un calendrier.
François Bonhomme nous confirme que ce sont les enfants des publics les plus défavorisés qui sont les plus ciblés, ce qui se comprend. Comment continuer à fonctionner ainsi ? J’insiste sur ce point : à un moment donné, il faut interdire !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 326 rectifié, 417 rectifié ter, 606 rectifié bis et 679 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.
L’amendement n° 193 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 355 rectifié ter est présenté par MM. Poadja, Laurey et Kern, Mme Dindar, M. Mizzon, Mme Billon, M. L. Hervé, Mme Guidez et M. Henno.
L’amendement n° 418 rectifié ter est présenté par M. Théophile, Mme Schillinger et MM. Marchand, Dennemont, Karam, Gattolin, Hassani et Bargeton.
L’amendement n° 572 rectifié est présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot et Kanner, Mme Lienemann, MM. Antiste, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 680 rectifié bis est présenté par Mme N. Delattre, MM. Arnell, Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli et Collin, Mme Costes, MM. Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mmes Guillotin, Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
Ces cinq amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 septdecies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 2133-… ainsi rédigé :
« Art. L. 2133-… – Les messages publicitaires télévisés ou radiodiffusés portant sur des boissons et des produits alimentaires manufacturés ne peuvent être diffusés dès lors que le nombre de mineurs parmi l’audience dépasse un plafond fixé par un décret révisé annuellement. Ce décret, pris sur la base des données de Médiamétrie, définit les plages horaires durant lesquelles ces messages publicitaires ne peuvent être diffusés au regard du plafond établi. Les messages publicitaires ne peuvent être diffusés durant les 15 minutes qui précèdent et suivent ces plages horaires. Ces dispositions s’appliquent aux messages émis et diffusés à partir du territoire français et réceptionnés sur le territoire, à compter du 1er janvier 2020.
« Le premier alinéa ne s’applique pas aux aliments et boissons qui figurent sur une liste fixée par arrêté du ministre chargé de la santé, pris après avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, compte tenu de leurs caractéristiques nutritionnelles adaptées aux besoins de l’enfant et de l’adolescent dans le cadre d’une alimentation équilibrée. »
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 193 rectifié.
M. Fabien Gay. En 2010, 80 % des spots ciblant les enfants vantaient des produits à forte teneur en sucres, sel ou matières grasses. Ces aliments présentent des risques de carence et de déséquilibres pondéraux pour la santé lorsqu’ils sont consommés avec excès. Ils entraîneraient diabète, surpoids ou obésité, maladies cardiovasculaires et AVC précoces, ou encore hypertension artérielle. Les experts prévoient même que les enfants d’aujourd’hui pourraient être la première génération à avoir une moins bonne santé et une durée de vie plus courte que leurs parents.
Selon l’OMS et l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, les publicités télévisées influenceraient les demandes d’achats alimentaires et les habitudes de consommation des enfants, cibles privilégiées des publicitaires puisqu’ils sont à la recherche constante de modèles auxquels s’identifier.
Selon l’UFC-Que Choisir, les enfants les plus exposés aux publicités sont aussi ceux qui consomment le plus de produits gras et sucrés. Un enfant qui regarde les publicités lui étant destinées ingère 300 calories de plus par jour. De la même manière, 76 % des demandes d’achats des enfants de quatre à dix ans sont en lien avec une publicité, et 82 % des enfants demandent à leurs parents des produits qu’ils ont vus à la télévision.
Cet amendement vise ainsi, selon les recommandations de l’OMS de 2010, à réduire l’exposition des enfants à la promotion d’aliments manufacturés nocifs, afin d’encourager une alimentation saine, ce qui est d’ailleurs l’un des objectifs de la stratégie nationale de santé pour la période 2018-2022.
Face à ce problème sociétal, nous nous devons d’être ambitieux. Se reposer sur les engagements volontaires des industriels ou sur les responsabilités des parents face à l’éducation alimentaire de leurs enfants ne suffira pas. Ce qu’il faut, c’est réguler l’environnement des enfants. Même si le rôle de l’éducation parentale reste important, ce sont généralement les enfants qui sont prescripteurs d’achats, puisque 87 % d’entre eux disent obtenir ce qu’ils demandent. Ce phénomène de socialisation inversée, dans lequel les décisions économiques de la famille sont dévolues aux enfants, suggère qu’il sera inévitable de mettre des limites à la publicité pour protéger la santé de nos enfants.
M. le président. L’amendement n° 355 rectifié ter n’est pas soutenu.
La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 418 rectifié ter.
M. Dominique Théophile. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° 572 rectifié.
M. Henri Cabanel. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 680 rectifié bis.
M. Joël Labbé. C’est un amendement de repli, extrêmement difficile à mettre en œuvre, puisqu’il s’agit d’interdire la diffusion de messages publicitaires portant sur des boissons et des produits alimentaires durant les quinze minutes qui précèdent et suivent les émissions destinées aux enfants.
Mais si on pouvait le voter, on donnerait un petit signe en faveur d’une alimentation saine.
M. le président. Votre intervention, monsieur Labbé, vaudra explication de vote, dans la mesure où vous n’étiez pas signataire de cet amendement.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.
M. Fabien Gay. Je l’entends, il faut aller vite. Mais ce n’est pas notre faute si on en est là ! Ce type d’amendement prend une à deux heures de travail à un collaborateur ou à une collaboratrice. Et j’ai moi-même encore une demi-heure de travail après. Vous l’avez vu, je n’ai pas pris la parole souvent !
M. Ladislas Poniatowski. C’est vrai !
M. Fabien Gay. J’ai défendu cinq ou six amendements. Chaque fois, nos collaborateurs s’efforcent de trouver des chiffres, pour enrichir le débat.
Très franchement, après deux heures de travail, la défense de l’amendement mérite d’être lue en séance, malgré certaines réflexions – je ne suis pas sourd ! –, car je pense que nous sommes tous attachés à la valeur travail.
Je comprends que vous essayiez d’accélérer, mais, je le répète, ce n’est pas notre faute si on en est arrivé là. Il me reste peut-être encore deux amendements à défendre. Quoi qu’il arrive, je lirai les argumentaires, parce que je respecte le travail des collaborateurs et collaboratrices, mes propres collaborateurs et ceux du groupe CRCE. (M. Henri Cabanel applaudit.)
M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour explication de vote.
M. François Bonhomme. Si le public jeune est plus touché qu’un autre, c’est parce qu’il est captif.
M. Didier Guillaume. Eh oui !
M. François Bonhomme. Le sucre étant un aliment très peu cher, on en met partout. Il a des vertus sur le plan non pas de la nutrition, mais de la conservation. C’est pour cette raison qu’on en met dans le jambon !
On va me dire que c’est le consommateur qui le réclame. Mais sait-il vraiment ce qu’il consomme ? Assurément, non ! C’est un exhausteur de goût, qui obère les nuances pour les remplacer par des saveurs extrêmement primaires. Surtout, on garde toute sa vie les habitudes alimentaires que l’on a prises jeune. Les jeunes, qui sont très sensibles aux messages publicitaires, deviennent captifs de leurs habitudes alimentaires, dont les teneurs en sucre sont largement excessives. En cinquante ans, on a multiplié par sept la consommation moyenne de sucre en France, en passant de 5 kilos à 35 kilos par an. Dans certaines catégories d’âge et certaines catégories géographiques, notamment dans le nord de la France, la consommation est de 100 kilos, voire de 200 kilos ! Au point qu’une nouvelle maladie est apparue, la maladie du soda, ou NASH, c’est-à-dire la cirrhose non alcoolique, qui n’est pas du tout anecdotique : on ne boit pas un gramme d’alcool et on se retrouve à devoir subir une greffe de foie.
Que faut-il de plus pour prendre conscience qu’il y a là un sujet majeur ? Comme il s’agit de maladies asymptomatiques et qu’il y a un temps de latence, les pouvoirs publics sont forcément à la traîne. Je ne suis pas en train de dénoncer un complot de l’industrie agroalimentaire ! Mais il faut tout de même regarder la réalité sanitaire du pays et entendre les alertes que ne cessent de lancer les nutritionnistes, les hépatologues et d’autres spécialistes du corps médical, qui voient arriver de plus en plus des personnes atteintes par le sucre. Ensuite, il faut envoyer ces malades dans des centres de rééducation très lourds pour leur apprendre à s’alimenter avec des produits de base. Il faudrait revenir au bon sens !
Par ailleurs, l’agriculture y gagnerait ! En effet, quand seulement 10 % des ingrédients d’un gâteau possèdent une valeur nutritionnelle, tout le reste étant assimilable à des additifs et des cochonneries, on peut se poser des questions sur la notion de bon sens.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 193 rectifié, 418 rectifié ter, 572 rectifié et 680 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 11 octodecies
(Supprimé)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 132 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Guerriau, Fouché, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Daubresse et L. Hervé.
L’amendement n° 629 rectifié ter est présenté par M. Théophile, Mmes Schillinger et Rauscent, M. Patriat et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 731 est présenté par le Gouvernement.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le deuxième alinéa du III de l’article L. 225-102-1 du code de commerce est ainsi modifié :
1° La troisième occurrence du mot : « et » est remplacée par le signe : « , » ;
2° Après le mot : « alimentaire », sont insérés les mots : «, de la lutte contre la précarité alimentaire, du respect du bien-être animal et d’une alimentation responsable, équitable et durable ».
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 132 rectifié septies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à rétablir l’article 11 octodecies, relatif au renforcement des obligations des grandes entreprises en matière de responsabilité sociale, ou RSE.
Il prévoyait notamment que les actions en matière de lutte contre la précarité alimentaire et en faveur du respect du bien-être animal et d’une alimentation responsable, équitable et durable soient intégrées dans le reporting extrafinancier.
Le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, dit PACTE, devrait comporter un important volet consacré à la transformation des entreprises en matière de responsabilité. Le Sénat pourrait prendre les devants en consacrant, dans ce projet de loi, une inclusion des thématiques de lutte contre la précarité alimentaire ou en faveur du bien-être animal dans le reporting extrafinancier.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 629 rectifié ter.
M. Dominique Théophile. Vous le savez tous, l’entreprise occupe désormais une place essentielle dans la société. Elle ne peut se résumer à son objectif de maximisation de profits, mais doit intégrer les dimensions environnementales, sociétales et sociales.
La responsabilité sociale des entreprises permet d’intégrer les préoccupations sociétales dans les activités économiques de nos sociétés et dans leurs interactions avec l’ensemble des parties prenantes.
Par cet amendement, nous souhaitons souligner, à l’intérieur même du dispositif de RSE, les engagements sociétaux de nos entreprises en faveur du don alimentaire, du respect du bien-être animal et d’une alimentation durable.
Ce dispositif permet donc de mettre en place un levier d’action pour améliorer concrètement les conditions de vie des animaux, lutter contre la précarité alimentaire ou encore défendre une alimentation durable. Il permettra à tout citoyen, dans ses statuts de collaborateur, de consommateur ou d’épargnant, de procéder à une comparaison des performances des entreprises en la matière.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 731.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’article 11 octodecies, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale. Les éléments de cet article ont été identifiés par les États généraux de l’alimentation comme des attentes sociétales très fortes de nos concitoyens.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Le rapport RSE des entreprises prévoit des dispositions qui visent le développement durable et l’économie circulaire. Les concepts d’alimentation responsable, équitable ou durable ne sont définis par aucun texte. Comment pourraient-ils permettre de clarifier les obligations des entreprises en la matière ?
La commission est donc défavorable à ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Nous sommes supposés enrichir le texte, et nous sommes en train de l’appauvrir ! L’alimentation responsable, équitable et durable est bel et bien définie.
Certes, ces mentions seront réinsérées dans le texte par l’Assemblée nationale. Mais quel dommage que nous donnions une telle image !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 132 rectifié septies, 629 rectifié ter et 731.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 11 octodecies demeure supprimé.
Article 11 vicies
(Supprimé)
M. le président. L’amendement n° 740, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au premier alinéa de l’article L. 642-9 du code rural et de la pêche maritime, après les mots : « représentation des consommateurs », sont insérés les mots : «, et d’associations de protection de l’environnement agréées au titre de l’article L. 141-1 du code de l’environnement. »
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Cet amendement vise à rétablir cet article, en cohérence avec l’article 11 terdecies A, concernant l’intégration de critères environnementaux dans les SIQO, les signes officiels de la qualité et de l’origine. La participation des ONG sera de nature à favoriser la prise en compte et la montée en gamme des SIQO.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La gouvernance de l’INAO, l’Institut national de l’origine et de la qualité, comporte déjà plus d’une cinquantaine de personnes. Il est possible de nommer, parmi les personnalités qualifiées qui y siègent, des personnes qui, au titre de leurs compétences, sont reconnues dans les domaines de la protection de l’environnement.
La commission est donc défavorable au rétablissement de cet article.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Je le dirai à chaque fois, nous appauvrissons de nouveau le texte, au lieu de l’enrichir !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. On arrête le bavardage !
M. le président. En conséquence, l’article 11 vicies demeure supprimé.
Article 11 unvicies A
(Non modifié)
L’article L. 201-3 du code rural et de la pêche maritime est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret en Conseil d’État, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, précise les conditions dans lesquelles la collecte des données et leur traitement peuvent être confiés à des personnes agréées par le ministère chargé de l’agriculture. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 186 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 659 rectifié est présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, M. M. Bourquin, Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, MM. Lurel, Vaugrenard et Dagbert, Mme Perol-Dumont, M. Antiste, Mmes Conconne, Espagnac et Ghali, M. Kerrouche et Mme Rossignol.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 186.
M. Fabien Gay. Nous n’allons pas refaire ici le débat sur la protection des données personnelles, mais il est tout de même bon de rappeler que, si notre société numérique doit être une société de liberté, elle doit être clairement encadrée. Dans ce cadre, il est important de protéger efficacement les données personnelles de nos concitoyens, y compris de nos agriculteurs.
Ainsi, il n’est pas concevable que les bases de données de l’État, qui rassemblent des données personnelles des agriculteurs, puissent être transmises à des organismes privés, y compris interprofessionnels : à l’heure actuelle, la gouvernance, la représentativité et les pratiques de ces organismes ne permettent pas de donner les garanties suffisantes pour une utilisation respectueuse des principes les plus fondamentaux de la protection des données individuelles.
C’est dans cette logique que nous vous proposons, par cet amendement, de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour présenter l’amendement n° 659 rectifié.
M. Jean-Claude Tissot. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est défavorable à ces amendements identiques.
En effet, cet article permet à l’État de recourir à des opérateurs privés pour la collecte et le traitement des données, ainsi que pour des informations d’ordre épidémiologique concernant les dangers sanitaires.
Cette possibilité, qui est d’ailleurs déjà utilisée en matière d’identification des animaux, devrait permettre, en s’appuyant notamment sur des bases de données déjà disponibles – plutôt que de les reconstituer –, d’être plus efficace en cas de crise sanitaire.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Notre proposition vise non pas à confier des données d’ordre privé détenues par l’État à des opérateurs privés, mais à agréer un dispositif de collecte et de traitement de l’information à caractère réglementaire.
Une telle disposition, qui existe en matière d’identification des animaux, a montré toute sa pertinence. Il s’agit de dupliquer, pour ce qui nous concerne, certaines données réglementaires à caractère sanitaire, liées notamment à l’influenza aviaire.
Pour ces raisons, le Gouvernement est défavorable à ces amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 186 et 659 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 11 unvicies A.
(L’article 11 unvicies A est adopté.)
Article 11 unvicies B
(Non modifié)
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 30 septembre 2018, un rapport présentant, département par département, un récapitulatif des aides du premier pilier de la politique agricole commune versées en 2017. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 11 unvicies B
M. le président. L’amendement n° 594 rectifié, présenté par MM. Tissot, Montaugé et Cabanel, Mmes Lienemann, Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Temal, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 unvicies B
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le 30 septembre 2018, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur sa stratégie en matière de politique agricole commune. Ce rapport précise notamment les objectifs visés par le Gouvernement en matière de politique agricole commune pour 2021-2027, et indique les montants attendus concernant les aides couplées et concernant les aides liées à l’introduction de mécanismes « contracycliques » de manière à amortir les chocs liés à l’évolution des cours mondiaux des denrées agricoles. Il présente une distribution de la totalité des aides versées au titre de la politique agricole commune, par niveaux de revenus des exploitations
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. La négociation sur la politique agricole commune pour la période 2021-2027 est actuellement engagée entre les États membres et la Commission européenne. Il s’agit bien entendu d’une compétence européenne, mais qui a des impacts extrêmement importants pour l’agriculture française.
Aussi, il paraît indispensable que le Gouvernement puisse présenter sa stratégie en la matière devant la représentation nationale. Pour l’heure, les communications émanant du ministère de l’agriculture ne présentent pas une vision claire et lisible des arbitrages déjà rendus ou des perspectives visées pour la période 2021-2027.
Par cet amendement, il s’agit d’obtenir une présentation axée autour de trois objectifs essentiels pour le développement et l’avenir de l’agriculture française : un renforcement du couplage des aides ; l’introduction de mécanismes « contracycliques » destinés à amortir les chocs liés à l’évolution des cours mondiaux des denrées agricoles ; et la mise en place d’un plafonnement, de manière à éviter la captation des aides agricoles par les structures les plus importantes, qui bénéficient de gains de productivité liés à leur taille et à leur éventuelle emprise sur le marché.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement ressemble à un amendement d’appel.
Le Sénat a adopté une résolution sur ce sujet essentiel au début du mois de juin. Les débats ont d’ailleurs permis au Gouvernement de préciser ses orientations. Le Sénat poursuivra ses travaux.
Aux termes de l’article 88-4 de la Constitution, le Gouvernement doit soumettre au Parlement tous les projets d’actes législatifs européens. Le Parlement sera donc associé au déploiement du nouveau cadre de la PAC. Il y sera – nous pouvons tous en attester – particulièrement attentif dans le cadre de ses activités de contrôle.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le procès d’intention qui nous est fait n’est pas correct ! Nous avons fait connaître notre position sur la PAC depuis le début, en précisant ce que nous allions faire et comment nous allions le faire.
Le 2 mai dernier, la Commission européenne a fait part de ses perspectives budgétaires. La PAC était classée au neuvième rang. Cela ne nous convient pas. Elle doit être placée beaucoup plus haut, car c’est une priorité européenne ; je pense que vous nous suivrez sans difficulté sur ce point. C’est une politique qui est aujourd’hui totalement intégrée dans notre pays. Ce sont 9 milliards d’euros de retours sur notre territoire chaque année.
Nous avons indiqué dès le 2 mai que ce budget était inacceptable. Nous avons ensuite créé un groupe de six à Madrid. Aujourd’hui, nous sommes vingt à soutenir un budget ambitieux ou, tout au moins, équivalent à celui de l’UE-27.
Nous avons déjà signifié que nous n’acceptions pas que la PAC soit la variable d’ajustement du Brexit ou des politiques migratoires ou de défense, même si nous considérons qu’il faudra également traiter ces questions politiques très importantes, car elles sont en train de bousculer la construction et le bon fonctionnement de l’Union européenne.
En outre, nous avons réussi à obtenir ce qu’un certain nombre de groupes politiques – je pense notamment aux groupes de gauche – réclamaient depuis plusieurs années : un budget de la zone euro. Les contours d’un tel budget sont en train de se dessiner.
Lors de la rencontre d’hier, les chefs d’État et de gouvernement n’ont pas évoqué la stratégie financière ; ils ont abordé d’autres sujets, en particulier les politiques migratoires.
Il est difficile de faire un rapport dans les six mois sur ce que donneront les perspectives de la PAC, comme le voudraient les auteurs de l’amendement. Nous attendons de savoir sur quel budget réel nous allons pouvoir travailler et proposer des transformations de la PAC.
Nous souhaitons bien évidemment que cette politique évolue, qu’elle devienne plus lisible, plus simple, plus efficace et qu’elle préserve des filets de sécurité pour nos producteurs. Nous souhaitons travailler sur le paiement des services environnementaux, dossier sur lequel – je l’ai indiqué – la France est aujourd’hui assez isolée ; nous avons donc besoin de chercher des alliés.
Nous avons également rappelé un certain nombre de points durs. Sur le premier pilier, nous n’acceptons pas de cofinancements ; la politique agricole commune doit rester commune.
Nous devons travailler sur l’épargne de précaution. Nous devons travailler sur la capacité à mobiliser la réserve de crise. Aujourd’hui, il faut de multiples autorisations pour pouvoir la solliciter. Or quand des épizooties d’influenza aviaire déciment des cheptels de canards et de poulets – c’est ce qui s’est produit dans vos territoires du Sud-Ouest –, on doit pouvoir y recourir. Cela n’a pas été facile. C’est donc l’État qui est parfois venu compenser les difficultés rencontrées par les producteurs. Il était parfaitement dans son rôle, et il a eu raison de le faire : ce sont de belles filières.
Voilà ce que je défends dans le cadre de l’Union européenne !
Ainsi que je l’ai précisé tout à l’heure, je pars en Irlande demain matin pour travailler pendant le week-end avec mon homologue irlandais. Nous avons besoin d’échanger sur le Brexit, la politique agricole commune et les accords commerciaux. C’est un partenaire important.
Nous devons donc attendre d’avoir un cadre stabilisé, c’est-à-dire défendre l’idée d’un budget européen. Lorsque nous aurons un budget suffisamment ambitieux ou, du moins, à la hauteur de nos attentes et de celles des vingt États membres qui nous accompagnent, nous pourrons travailler sur la nécessaire réforme de la PAC, que nous appelons de nos vœux. Le Président de la République a déjà eu l’occasion de préciser les sujets sur lesquels il souhaite avancer.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement ; il est trop tôt pour adopter un tel dispositif.
Mais je suis évidemment à la disposition des commissions du Sénat et de l’Assemblée nationale pour venir expliquer notre action lorsque vous le souhaitez. Une proposition de résolution européenne a été adoptée ici à l’unanimité. Pour moi, c’est important ; c’est un engagement que je porte à Bruxelles. Un vote similaire est intervenu à l’Assemblée nationale en début de semaine. Je m’appuie sur la volonté des parlementaires nationaux pour défendre notre ambition pour la politique agricole commune.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Monsieur le ministre, je vous remercie de ces explications. Nous ne faisons aucun procès d’intention. Nous voulions simplement vous donner l’occasion de vous exprimer comme vous avez pu le faire à l’instant.
Pour autant, la question du cadre financier pluriannuel, à laquelle vous avez fait référence, reste prépondérante. Les déclarations du commissaire européen au budget, M. Günther Oettinger, et celles de M. Phil Hogan peuvent nous inquiéter sur le futur budget de la PAC.
J’espère que l’exploit intervenu en 2013 – on se rend compte a posteriori que c’en était un – pourra être réédité : sauver plus de 9 milliards d’euros pour la PAC, ce n’était pas rien ! Je crois que cela n’a pas forcément été mesuré à sa juste valeur à l’époque. Je vous souhaite d’obtenir le même résultat, dans l’intérêt de l’agriculture française.
Nous retirons l’amendement n° 594 rectifié.
M. le président. L’amendement n° 594 rectifié est retiré.
Article 11 unvicies
(Non modifié)
À l’article 3 de la loi n° 2014-773 du 7 juillet 2014 d’orientation et de programmation relative à la politique de développement et de solidarité internationale, après le mot : « agricole », sont insérés les mots : « et agroalimentaire ». – (Adopté.)
Article 11 duovicies
Au plus tard le 1er janvier 2020, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’évaluation du dispositif de projet alimentaire territorial. Ce rapport présente un bilan du développement et de la mise en œuvre du dispositif sur les territoires et formule des propositions, incluant le cas échéant un renforcement de son accompagnement financier, en vue de favoriser sa création. – (Adopté.)
Articles additionnels après l’article 11 duovicies
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 452 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Corbisez et Guillaume, Mme Laborde et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À partir du 1er janvier 2022, l’ensemble du territoire français doit être couvert par des projets alimentaires territoriaux tel que définis par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Je vais évoquer une nouvelle fois les projets alimentaires territoriaux, ou PAT. C’est assez terrible de croire en des amendements de bonne facture tout en se disant qu’ils ne seront pas adoptés !
Cet amendement vise à généraliser le recours aux projets alimentaires territoriaux, qui permettent de fédérer les différents acteurs d’un territoire autour de la question de l’alimentation. Les PAT visent à construire des circuits alimentaires de proximité prenant en compte les dimensions sociales, environnementales, économiques et de santé de ce territoire. Ce sont donc des outils essentiels pour la relocalisation de l’alimentation. Je souhaite que chaque territoire dispose d’un PAT à l’échelle pertinente, à l’horizon de 2022.
L’intérêt de ces projets est également d’avoir une nouvelle gouvernance alimentaire. Producteurs, transformateurs, mais aussi élus locaux, associations de parents d’élèves, associations de défense de l’environnement ou associations de consommateurs se réunissent autour de la table.
Dans mon département, le Morbihan, qui n’est pas un département spécialement en avance, des réflexions sont actuellement menées sur les intercommunalités. Certains projets sont un peu avancés. D’autres sont en gestation. Renseignez-vous sur ce qui se passe dans vos départements ; cela doit forcément être la même chose.
Si nous parvenions à couvrir le territoire national de PAT à l’horizon de 2022, nous aurions de sacrées bonnes réponses à toutes les questions que nous nous posons aujourd’hui !
Ce n’est pas la panacée, mais c’est un bon axe de réponse. On a beaucoup parlé de répartir la valeur entre les acteurs de la chaîne alimentaire et des difficultés pour y parvenir et garantir un revenu à nos producteurs. Il existe une solution à exploiter : court-circuiter les gros acteurs de l’aval, en relocalisant l’alimentation et en limitant le nombre d’intermédiaires. Les circuits longs ont leur rôle, mais les circuits de proximité, construits de manière concertée sur les territoires, ont aussi un grand avenir !
Encore une fois, nous sommes en situation d’urgence sociétale et planétaire ; nous devons nous poser la question de la résilience !
M. le président. L’amendement n° 374 rectifié ter, présenté par MM. Jacquin, Iacovelli, Courteau et Tissot, Mme Lienemann, M. Todeschini, Mme Espagnac, M. Daudigny, Mmes G. Jourda et Rossignol, M. Kerrouche, Mme Grelet-Certenais, M. Houllegatte, Mme Jasmin et MM. Tourenne, Jomier et P. Joly, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À compter du 1er janvier 2026, l’ensemble du territoire français doit être couvert par des projets alimentaires territoriaux tel que définis par la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Cet amendement, déposé sur l’initiative de notre collègue Olivier Jacquin, est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Mon cher collègue Joël Labbé, je partage votre conception des PAT, que je considère effectivement comme des outils de structuration de l’approvisionnement sur nos territoires absolument essentiels, notamment pour la restauration collective, sujet que nous avons abordé à l’article 11.
Néanmoins, je ne vous suivrai pas sur l’obligation d’une couverture du territoire. À mes yeux, l’intérêt de tels dispositifs réside justement dans leur grande souplesse, en termes à la fois d’initiative, de périmètre et de contenu. Il est plus pertinent que ce soient les acteurs locaux qui décident.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Il est proposé de rendre la couverture par des PAT obligatoire à l’horizon de 2022. Mais quel type de couverture ? Sur quel périmètre ? Pour quel territoire ?
Aujourd’hui, on peut faire des PAT dans un département, dans une communauté de communes ou même dans une commune : lors du Salon de l’agriculture, j’ai remis des prix pour des PAT de petites communes qui avaient réussi à produire un travail très intéressant. On peut aussi en faire à l’échelon régional, avec des déclinaisons dans les EPCI ou les départements de la région.
Il y a un certain nombre de formules de périmètres sur lesquelles vous pouvez travailler. En rendant obligatoire la signature de PAT, nous allons créer une espèce de course à la signature où certains se satisferont du seul fait d’avoir signé. Or ce qui importe, c’est la qualité et le contenu du projet ; c’est la manière dont on valorise les productions locales, le travail des producteurs, la qualité des repas servis dans la restauration scolaire, dans les hôpitaux et les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD.
En outre, les PAT ne se ressembleront pas selon les territoires : un PAT dans mon département ne ressemblera pas à un PAT en montagne, et c’est bien normal.
Rendre la couverture obligatoire, c’est également, me semble-t-il, nier aussi les périmètres sur lesquels nous devons travailler. En montagne, on va travailler sur une vallée ou un versant ; on ne va pas travailler sur une zone où les gens ne peuvent de toute manière pas circuler à un moment de l’année.
Je pense donc que la solution la plus pertinente est de laisser aux territoires la liberté de faire ce qu’ils ont à faire. Bien évidemment, on peut les inciter à faire des PAT, puis à travailler à la structuration de l’offre autour de ces projets, afin que les acteurs concernés puissent se fournir en quantité et en qualité suffisantes auprès des producteurs que l’on aura réussi à capter autour et à l’intérieur de ces périmètres.
L’objectif des auteurs de l’amendement est louable, mais il est préférable de travailler de la manière que je viens de décrire.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. J’aime bien cette formule de l’abbé Pierre, qui définissait la politique comme « l’art de rendre possible le nécessaire ». Nous sommes en plein dedans !
Rendre possible le nécessaire suppose parfois d’être directif ; dans une situation délicate, être directif, si c’est pour le bien commun partagé, c’est une bonne chose !
Comme vous l’avez souligné, les PAT ne seront évidemment pas les mêmes en Normandie ou dans les Vosges. L’intérêt de ces projets est qu’ils sont complètement liés à un territoire.
En général, même s’il peut exister des PAT dans des communes, le périmètre est plutôt celui du territoire intercommunal. Cela renvoie à la question du bassin de vie. Il faut y réfléchir : je sais que mon amendement ne va pas passer, mais nous finirons par y arriver !
Ces projets sont très demandés dans les territoires. J’aime bien les challenges. J’espère, et je vais œuvrer en ce sens, que la totalité du territoire du Morbihan sera couverte de PAT à la fin de ce mandat.
M. Stéphane Travert, ministre. La présidente du conseil départemental du Finistère est en train d’en faire un !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 374 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 40 rectifié est présenté par Mme Micouleau, MM. Bonne, Milon, Lefèvre et Bonhomme, Mme Bruguière, MM. Cuypers et Dallier, Mmes Deseyne, Delmont-Koropoulis, Garriaud-Maylam, Lamure et Lopez et MM. Mandelli, Pellevat, Paul et Rapin.
L’amendement n° 165 rectifié sexies est présenté par MM. Decool, Guerriau, Capus, Chasseing et A. Marc, Mme Mélot, M. Vogel, Mme Goy-Chavent et M. Daubresse.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le I de l’article L. 310-2 du code de commerce est ainsi modifié :
1° La deuxième phrase du deuxième alinéa est supprimée ;
2° Après le deuxième alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour ce qui concerne les fruits et légumes frais, les ventes au déballage font l’objet de dispositions spécifiques :
« a) Les ventes au déballage effectuées en période de crise conjoncturelle ne sont pas concernées par la limitation de durée à deux mois ;
« b) Les ventes au déballage prévues en dehors d’une période de crise conjoncturelle doivent faire l’objet d’une autorisation préalable délivrée par le maire de la commune dont dépend le lieu de la vente et notifiée concomitamment à l’autorité administrative chargée de la concurrence et de la consommation dans le département du lieu de vente. En l’absence de réponse dans un délai de deux mois, l’autorisation est considérée comme refusée. »
L’amendement n° 165 rectifié sexies n’est pas soutenu.
La parole est à M. Pierre Cuypers, pour présenter l’amendement n° 40 rectifié.
M. Pierre Cuypers. Cet amendement vise à garantir la qualité des produits vendus aux consommateurs.
Face à la multiplication des ventes au déballage sur une partie du territoire national, il est devenu urgent de renforcer la législation actuelle pour garantir la sécurité sanitaire des consommateurs et lutter contre les pratiques commerciales déloyales.
Nombre de ventes au déballage de produits alimentaires frais ou non transformés, essentiellement des fruits et légumes, sont effectuées dans des conditions ne respectant nullement les règles les plus élémentaires d’hygiène et de traçabilité.
Régies sous l’empire du régime déclaratif, les ventes au déballage prolifèrent. Malgré une volonté de renforcer leurs contrôles, les services de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, la DGCCRF, ne se révèlent pas en mesure de juguler ce phénomène exponentiel.
Il apparaît donc nécessaire de faire évoluer la loi pour une meilleure protection des consommateurs.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission émet un avis favorable sur cet amendement, qui tend à faire passer le régime des ventes au déballage d’une déclaration préalable à un régime d’autorisation.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Le code de commerce restreint déjà les conditions de vente au déballage, y compris pour les fruits et les légumes frais. Cette vente ne peut pas excéder deux mois, que ce soit dans un même local, sur un même emplacement où dans un même arrondissement départemental.
L’adoption de cet amendement conduirait à pénaliser l’ensemble des vendeurs, même ceux qui commercialisent en toute bonne foi, ce qui serait contraire au principe de proportionnalité, sans pour autant pénaliser ceux qui voudraient contourner le code de commerce.
Nous devons évidemment travailler sur ce dossier. Je sais à quoi vous faites allusion : des vendeurs à la sauvette de fruits et légumes s’installent autour des ronds-points ou sur des parkings qui ont parfois été aménagés pour cela par les départements ou les régions.
Il s’agit, avec les moyens de contrôle de la DGCCRF, d’essayer de circonscrire au maximum de telles pratiques et d’encourager les pratiques vertueuses ; je pense à ceux qui « payent patente » et à ceux qui sont dûment inscrits au registre du commerce et qui ont la capacité de vendre les produits.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11 duovicies.
L’amendement n° 596 rectifié, présenté par MM. Jomier, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À la deuxième phrase du second alinéa de l’article L. 1313-5 du code de la santé publique, après les mots : « de l’agriculture », sont insérés les mots : « ou le ministre chargé de l’environnement ou le ministre chargé de la santé ».
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Monsieur le ministre, je n’ai rien contre vous. Simplement, M. Jomier, qui souhaite élargir certaines de vos prérogatives à vos collègues, m’a chargé de le représenter. (Sourires.)
Vous êtes actuellement le seul à pouvoir vous opposer à la délivrance d’une autorisation de mise sur le marché de produit phytosanitaire et demander à l’ANSES un nouvel examen du dossier dans un délai de trente jours.
Notre collègue propose que les ministres chargés de l’environnement ou de la santé disposent de prérogatives comparables, les produits phytosanitaires ayant également des effets dans ces deux domaines.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La loi prévoit déjà la possibilité d’interdire l’utilisation de certains produits phytopharmaceutiques, dans le cadre d’une concertation entre le ministre de l’environnement et le ministre de l’agriculture. Or nous pensons que la concertation doit être privilégiée.
La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je n’ai aucune objection de principe au fait de partager mes prérogatives avec mes collègues chargés de la santé et de l’environnement. Mais, là, cela viendrait compliquer la procédure.
De toute manière, toutes les décisions prises pour une délivrance d’autorisation de mise sur le marché sont validées en interministériel. Nous travaillons en collégialité.
La politique de l’alimentation pour la période 2018-2022 que nous avons engagée relève de onze ministères. Chacune des décisions que nous prenons est validée par les autres ministères concernés. Évidemment, c’est du travail ; il faut faire preuve de conviction.
Je prends bonne note de votre demande. Mais votre amendement est d’ores et déjà satisfait puisque les décisions sont prises en interministériel.
M. le président. Monsieur Cabanel, l’amendement n° 596 rectifié est-il maintenu ?
M. Henri Cabanel. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 596 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 656 rectifié, présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, M. M. Bourquin, Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, M. Antiste et Mmes Conconne, Espagnac et Ghali, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Ce cahier des charges ou règlement prévoit tout moyen de valorisation des producteurs agricoles locaux qui commercialisent des produits de leur propre production, qu’elle soit brute ou transformée. »
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. La demande sociétale pour une alimentation de qualité relocalisée, source de lien social entre producteurs et consommateurs, et produite par des paysans correctement rémunérés et ancrés dans leurs territoires n’a jamais été aussi forte.
Les marchés communaux pourraient constituer un puissant levier pour encourager cette dynamique, en incluant, dans les règlements de marché, des moyens de valoriser les étals des producteurs locaux de denrées alimentaires : label, affichage, emplacements réservés, etc.
De la même manière que l’article L. 611-8 du code rural et de la pêche prévoit la création de magasins de producteurs dans « une optique de valorisation de leur exploitation et de leur terroir », les marchés communaux pourraient distinguer les producteurs agricoles locaux.
Certaines communes affichent déjà des politiques très volontaristes pour favoriser l’accès des producteurs aux marchés de plein vent. Cette démarche pourrait être soutenue et encouragée en vue d’une généralisation si les consommateurs pouvaient être avisés de la composition des marchés qu’ils fréquentent.
M. le président. Les amendements nos 190 rectifié et 488 rectifié sont identiques.
L’amendement n° 190 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 488 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Corbisez, Mme N. Delattre et MM. Guérini et Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 2224-18 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Toutefois, ce cahier des charges ou règlement prévoit d’attribuer en priorité les emplacements vacants réservés à la commercialisation de denrées alimentaires aux exploitants agricoles, y compris les cotisants de solidarité. »
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 190 rectifié.
M. Fabien Gay. Cet amendement vise à répondre à la demande croissante de nos concitoyens en faveur d’une alimentation de qualité, relocalisée, source de lien social entre producteurs et consommateurs et produite par des paysans correctement rémunérés et ancrés dans leur territoire.
Les marchés communaux peuvent constituer un puissant levier pour encourager cette dynamique. Nous voulons inclure dans les règlements de marché des critères de priorité pour les producteurs locaux dans l’attribution des emplacements vacants des marchés. Certaines communes affichent déjà des politiques très volontaristes pour favoriser l’accès des producteurs aux marchés de plein vent.
Mais, pour que l’effet de levier soit opérant à grande échelle, il faut que la règle soit généralisée.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 488 rectifié bis.
M. Joël Labbé. Cet amendement est identique à l’amendement précédent, que notre collègue a très bien défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’amendement n° 656 tend à instituer une obligation générale, tandis qu’il est envisagé de créer un droit de priorité au profit des producteurs aux amendements identiques nos 190 rectifié et 488 rectifié bis.
À nos yeux, il convient de laisser ce pouvoir aux mains des maires, qui disposent de tous les éléments d’appréciation suffisants, en fonction des circonstances locales, pour favoriser la dynamique et l’attractivité des marchés communaux.
La commission demande le retrait de ces amendements. À défaut, l’avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Il est un principe de base auquel je suis attaché : la libre administration des collectivités territoriales !
M. Didier Guillaume. Voilà !
M. Stéphane Travert, ministre. Il serait tout de même malvenu que le Sénat, chambre des territoires, vienne indiquer aux maires la manière dont ils doivent organiser leur marché.
Les maires me semblent les mieux à même de décider comment ils veulent mettre en avant les commerçants non sédentaires qui viennent sur leur marché. De toute manière, cela se fait déjà souvent.
Je demande donc le retrait de ces amendements, faute de quoi l’avis serait défavorable.
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 488 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 488 rectifié bis est retiré.
Monsieur Tissot, l’amendement n° 656 rectifié est-il maintenu ?
M. Jean-Claude Tissot. Non, je le retire également, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 656 rectifié est retiré.
Et qu’en est-il de l’amendement n° 190 rectifié, monsieur Gay ?
M. Fabien Gay. Je le retire aussi, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 190 rectifié est retiré.
L’amendement n° 595 rectifié bis, présenté par MM. Tissot, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Temal, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’évolution depuis 2015 des aides à la conversion et au maintien en agriculture biologique versées aux agriculteurs dans le cadre de la politique agricole commune de l’Union européenne.
La parole est à M. Jean-Claude Tissot.
M. Jean-Claude Tissot. Il existe dans le cadre de la PAC deux types d’aides qui permettent de subventionner les agriculteurs bio : les aides à la conversion et les aides au maintien. Ces aides sont financées à hauteur de 75 % directement par l’Union européenne, à condition qu’un financement public soit assuré au niveau national à hauteur de 25 %.
Monsieur le ministre, le 20 septembre 2017, vous avez annoncé que l’État se désengagerait à compter de 2018 – je vous avais interrogé sur le sujet – et que les aides au maintien de l’agriculture biologique pourraient être suspendues, voire supprimées dans les territoires où les régions et les agences de l’eau ne compenseront pas le retrait de l’État.
Cet amendement vise donc à demander au Gouvernement d’apporter une information précise au Parlement sur l’évolution des aides en faveur de l’agriculture biologique, notamment à la lumière du désengagement de l’État concernant les aides au maintien.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Je pourrais être d’accord sur le fond. Mais je crois qu’une cinquantaine de rapports demandés par le Sénat sont déjà en attente ! La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. C’est toujours le Gouvernement qui fait les rapports demandés par les parlementaires !
L’engagement de remettre un rapport sur les aides bio, les mesures agroenvironnementales et climatiques, ou MAEC, et les paiements des aides a été pris en loi de finances. Cet amendement est donc satisfait.
Je le répète, tous les contrats qui ont été signés jusqu’au 1er janvier 2018 courent bien évidemment. Et les régions et les agences de l’eau qui en ont la volonté et la capacité sont libres de venir financer ces aides au maintien. Nous avons fait le pari de la conversion. Nous avons besoin de plus d’agriculteurs en agriculture biologique. Le crédit d’impôt en faveur de l’agriculture biologique et le plan Ambition Bio, que nous avons présenté la semaine dernière, doivent également permettre des financements en ce sens. Je pourrais aussi mentionner les innovations et les projets privés, qui donnent de bons résultats.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Monsieur le ministre, dans votre liste, vous avez oublié les paiements pour services environnementaux.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Monsieur le ministre, j’ai été très surpris par votre propos.
Nous avons légiféré sur le bio et l’accompagnement. Il y avait jusqu’à présent le rôle de l’Union européenne et celui de l’État. Désormais, vous expliquez aux autres ce qu’ils doivent faire, mais vous ne payez plus ; c’est un vrai problème !
M. Daniel Gremillet. Il est trop facile d’inviter les producteurs de bio à aller solliciter auprès des élus régionaux les aides que vous versiez jusqu’à présent ! On ne peut pas afficher une volonté politique sans mettre les moyens.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. À l’instar de Daniel Gremillet, je trouve un peu facile de se tourner vers les régions pour leur demander de compenser des financements qui ne sont plus versés ou de répondre à des difficultés !
C’est typiquement le cas chez moi à propos de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, l’ICHN. Je ne dis pas que c’est forcément le fait de l’État ; d’autres acteurs peuvent adopter cette posture. C’est facile, c’est de la politique politicienne, mais ça ne règle pas le problème de fond.
Si nous voulons apporter des réponses structurelles pérennes à des problèmes profonds qui touchent notre agriculture, il va falloir procéder et raisonner autrement !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 595 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, il reste 203 amendements à examiner.
Nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
L’amendement n° 630 rectifié, présenté par MM. Théophile, Karam, Dennemont, Hassani, Mohamed Soilihi, Patient et Patriat, Mme Rauscent, M. Bargeton et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 31 décembre 2019, un rapport évaluant les effets de la loi n° 2012-1270 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer.
La parole est à M. Dominique Théophile.
M. Dominique Théophile. Dans les régions d’outre-mer, certains produits alimentaires vendus comportent un taux de sucre nettement supérieur à ceux des produits équivalents vendus en métropole. Les industriels justifient cette différence par le fait que le fort taux de sucre permettrait de mieux conserver les aliments.
Or, en 2013, la loi visant à garantir la qualité de l’offre alimentaire en outre-mer a interdit cette disparité entre les taux de sucre. En effet, la population ultramarine est beaucoup plus touchée par l’obésité que la population hexagonale. À ce jour, cette loi n’est pourtant pas totalement appliquée par les industriels. Face à l’immobilité des acteurs sur ce problème de santé publique, nous souhaitons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les effets de la loi Lurel et qu’il nous propose des pistes d’amélioration du dispositif.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Plutôt que de prévoir la remise d’un nouveau rapport sur l’application de la loi concernant le taux de sucre des produits alimentaires vendus outre-mer, je vous propose d’interroger M. le ministre pour qu’il nous dise ce que l’on constate sur le terrain depuis l’entrée en vigueur de la loi. Qu’envisage-t-il en matière de renforcement des contrôles pour s’assurer que les taux de sucre ne diffèrent pas sensiblement par rapport aux produits équivalents vendus en métropole ? Je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je demande également le retrait de l’amendement.
Je me souviens de la nuit que nous avions passée lors de l’examen de la loi Lurel sur l’admissibilité des taux de sucre pour les outre-mer. Il est vrai que depuis trop longtemps les taux de sucre sont trop élevés dans la fabrication des aliments destinés à nos concitoyens ultramarins. Nous devons avancer sur ces sujets.
Le Gouvernement ne remettra pas de rapport. En revanche, nous allons demander à l’inspection générale de rendre un rapport sur ce sujet pour évaluer l’application de la loi Lurel. Dans la feuille de route des États généraux de l’alimentation, nous avons souhaité que soient appliqués dans les outre-mer les mêmes standards que dans le reste de l’Union européenne. Il n’y a pas de raison que les outre-mer pâtissent de ces taux supplémentaires et complémentaires, notamment en ce qui concerne le sucre. Ces taux élevés entraînent de graves problèmes de santé comme le diabète, l’obésité, etc.
M. le président. Monsieur Théophile, l’amendement n° 630 rectifié est-il maintenu ?
M. Dominique Théophile. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Monsieur le ministre, je puis vous assurer que la loi n’a eu aucun effet. Les industriels continuent à mettre plus de sucre dans les produits alimentaires. Or le taux d’obésité des enfants de moins de quatorze ans est élevé dans nos territoires, surtout en Guadeloupe où il est catastrophique. Il faut donc mettre en place un contrôle très poussé.
Je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 630 rectifié est retiré.
L’amendement n° 690 rectifié bis, présenté par Mme Guillotin, MM. Artano et A. Bertrand, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Collin et Corbisez, Mme Costes, M. Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold, Guérini et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 11 duovicies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après la sous-section 4 de la section 3 du chapitre II du titre II du livre Ier du code de la consommation, est insérée une sous-section ainsi rédigée :
« Sous-section …
« Mention de menu équilibré pour enfant dans le cadre d’une activité de restauration commerciale
« Art. L. 122-21-… – Les personnes ou entreprises qui transforment ou distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de restauration commerciale, permanente ou occasionnelle, peuvent préciser sur leurs cartes ou tout autre support, qu’elles proposent au moins un menu équilibré pour enfant sous la mention “menu Petit Gourmet”.
« Un “menu Petit Gourmet” doit contenir au moins un légume et un fruit.
« Les modalités de mise en œuvre de la mention “menu Petit Gourmet” sont précisées par un décret conjoint des ministres chargés du commerce et de la consommation. »
La parole est à M. Franck Menonville.
M. Franck Menonville. Il s’agit d’un amendement de Mme Guillotin. Trop fréquemment, il arrive que les « menus enfants » proposés par les restaurateurs ne soient constitués que d’aliments comportant une forte teneur en graisse : frites, nuggets, steaks hachés. Cette situation conduit à orienter les habitudes de consommation de l’enfant vers des formules qui nuisent à la santé.
Cet amendement vise à autoriser les restaurateurs – il ne s’agira pas d’une obligation – à mettre en avant sur leurs cartes, ou tout autre support, une mention « petit gourmet », laquelle consisterait en un menu contenant au moins un fruit et un légume.
Son adoption permettrait, d’une part, d’encourager les parents à veiller sur la qualité nutritionnelle des repas servis à leurs enfants et, d’autre part, de valoriser la démarche des restaurateurs qui intégreraient cette formule à leur carte.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. C’est une très belle initiative et j’invite les restaurateurs à la mettre en œuvre. Je ne pense pas pour autant qu’il soit nécessaire de l’inscrire dans la loi, mais il est certain que cet amendement est sympathique et qu’il converge vers les objectifs qui sont les nôtres. Je vous demande donc de le retirer ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Menonville, l’amendement n° 690 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Franck Menonville. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 690 rectifié bis est retiré.
Article 12
(Non modifié)
I. – L’article L. 230-6 du code rural et de la pêche maritime est abrogé.
II. – Le titre VI du livre II du code de l’action sociale et des familles est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Lutte contre la précarité alimentaire
« Art. L. 266-1 A. – La lutte contre la précarité alimentaire vise à favoriser l’accès à une alimentation sûre, diversifiée, de bonne qualité et en quantité suffisante aux personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale.
« Elle s’inscrit dans le respect du principe de dignité des personnes. Elle participe à la reconnaissance et au développement des capacités des personnes à agir pour elles-mêmes et dans leur environnement. L’aide alimentaire contribue à la lutte contre la précarité alimentaire.
« La lutte contre la précarité alimentaire comprend la poursuite des objectifs définis à l’article L. 1 du code rural et de la pêche maritime et par les programmes nationaux relatifs à l’alimentation, à la nutrition et à la santé.
« La lutte contre la précarité alimentaire mobilise l’État et ses établissements publics, les collectivités territoriales, les acteurs économiques, les associations, dans le cadre de leur objet ou projet associatif, ainsi que les centres communaux et intercommunaux d’action sociale, en y associant les personnes concernées.
« Art. L. 266-1. – L’aide alimentaire a pour objet la fourniture de denrées alimentaires aux personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale, assortie de la proposition d’un accompagnement. Cette aide est apportée tant par l’Union européenne que par l’État ou toute autre personne morale.
« Seules des personnes morales de droit public ou des personnes morales de droit privé habilitées par l’autorité administrative, pour une durée et selon des conditions et modalités fixées par décret en Conseil d’État, peuvent recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l’aide alimentaire.
« Ces conditions doivent notamment permettre de garantir la fourniture de l’aide alimentaire sur une partie suffisante du territoire métropolitain et d’outre-mer et sa distribution auprès de tous les bénéficiaires potentiels, d’assurer la traçabilité physique et comptable des denrées et de respecter de bonnes pratiques d’hygiène relatives au transport, au stockage et à la mise à disposition des denrées.
« Sont également déterminées par décret en Conseil d’État les modalités de collecte et de transmission à l’autorité administrative, par les personnes morales habilitées en application du deuxième alinéa, des données portant sur leur activité, sur les denrées distribuées et, une fois rendues anonymes, sur les bénéficiaires de l’aide alimentaire. La collecte et la transmission de ces données s’effectuent dans le respect de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. »
III. – Aux II et III de l’article L. 541-15-5 du code de l’environnement, les mots : « caritative habilitée en application de l’article L. 230-6 du code rural et de la pêche maritime » sont remplacés par les mots : « habilitée en application de l’article L. 266-1 du code de l’action sociale et des familles ».
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, sur l’article.
M. Pierre Ouzoulias. Je rappellerai quelques chiffres : 815 millions de personnes connaissent la malnutrition dans le monde, 38 millions sont en insécurité alimentaire grave, 16 millions d’enfants souffrent de malnutrition aiguë et, dans notre pays, 4 millions de personnes ont régulièrement recours à l’aide alimentaire.
Je souhaitais souligner en préambule le paradoxe insensé qui fait que, dans nos campagnes, beaucoup de paysans produisent à perte, sans pouvoir se verser de salaire, une nourriture qui est abondante tandis que, de l’autre côté de la chaîne, malheureusement, de plus en plus de personnes ne peuvent pas payer cette nourriture. C’est aberrant et immoral. Un tel état de fait me choque, comme vous tous d’ailleurs. Nous devons avoir en tête ces chiffres terribles en abordant l’examen de cet article.
Produire mieux, c’est une bonne chose, mais il faut aussi pouvoir distribuer aux personnes qui manquent de nourriture. C’est également une nécessité.
M. le président. L’amendement n° 743, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 5
Remplacer la référence :
Art. L. 266-1 A.
par la référence :
Art. L. 266-1
II. – Alinéa 9
Remplacer la référence :
Art. L. 266-1
par la référence :
Art. L. 266-2
III. – Alinéa 10
1° Supprimer les mots :
, pour une durée et selon des conditions et modalités fixées par décret en Conseil d’État,
2° Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
La durée et les conditions dans lesquelles l’habilitation est accordée, les modalités de contrôle des personnes morales habilitées et les sanctions applicables en cas de manquements aux conditions de l’habilitation sont déterminées par décret en Conseil d’État.
IV – Alinéa 13
Remplacer la référence :
L. 266-1
par la référence :
L. 266-2
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. L’objet de cet amendement est de sécuriser le cadre normatif relatif aux contrôles de l’habilitation des associations au titre de l’aide alimentaire. Un décret concerté devra permettre de clarifier les procédures et les modalités de contrôle qui ne sont pas clairement encadrées par la loi ou par le règlement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à préciser qu’un décret en Conseil d’État détermine non seulement la durée et les conditions dans lesquelles l’habilitation est accordée aux personnes morales pouvant recevoir des contributions publiques destinées à la mise en œuvre de l’aide alimentaire, mais également les modalités de contrôle de cette habilitation et les sanctions applicables en cas de manquement à ses conditions.
Les articles R. 230-10 à R. 230-24 du code rural et de la pêche maritime prévoient déjà les conditions dans lesquelles l’habilitation peut être retirée. Un nouveau décret devrait être pris afin de tenir compte du transfert de ces dispositions du code rural au code de l’action sociale et des familles. Je ne vois pas pourquoi il convient d’ajouter cette précision dans la loi, mais le Gouvernement pourrait peut-être nous expliquer ce point. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. J’ajouterai deux chiffres, importants si l’on veut mieux encadrer la lutte contre la précarité alimentaire : sur 4,8 millions d’inscriptions à l’aide alimentaire, un tiers concernent des enfants de moins de quinze ans.
Il faut faire quelque chose, voilà pourquoi nous avons déposé cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 12, modifié.
(L’article 12 est adopté.)
Article 12 bis AA (nouveau)
L’article L. 541-15-3 du code de l’environnement est ainsi rédigé :
« Art. L. 541-15-3. – Les gestionnaires de services de restauration collective mettent en place, avant le 1er septembre 2020, un plan d’action visant à lutter contre le gaspillage alimentaire. Ce plan d’action se fonde sur un diagnostic préalable dont les modalités sont définies par décret. »
M. le président. L’amendement n° 742, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Le présent amendement a pour objet de supprimer cet article qui rend obligatoire, avant le 1er septembre 2020, la mise en œuvre, par les gestionnaires de services de restauration collective, d’un plan d’action destiné à lutter contre le gaspillage alimentaire, fondé sur un diagnostic préalable dont les modalités sont définies par décret.
Il est préférable de maintenir ces dispositions dans l’article 15, article d’habilitation de ce projet de loi. Le délai de douze mois, prévu pour la publication de l’ordonnance concernée, permettra de mettre en œuvre les consultations et la concertation nécessaires avec les représentants des collectivités locales, notamment, pour définir précisément les seuils éventuels à partir desquels les opérateurs seraient éligibles et les modalités de mises en œuvre de ces dispositions visant à lutter contre le gaspillage alimentaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement du Gouvernement vise à supprimer l’article introduit en commission afin de transcrire dans la loi un pan de l’habilitation prévue à l’article 15 : cet article prévoit la mise en œuvre par les gestionnaires de services de restauration collective d’un plan d’action destiné à lutter contre le gaspillage alimentaire fondé sur un diagnostic préalable avant le 1er septembre 2020.
Le Gouvernement a expliqué qu’il convient de mener une concertation, mais rien ne l’empêche de le faire avant de prendre un décret d’application de cet article. En outre, la date de septembre 2020 ne me semble pas très contraignante pour adopter un plan d’action de lutte contre le gaspillage alimentaire. Avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° 597 rectifié, présenté par MM. Roux, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mmes Préville, S. Robert et Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Ce plan d’action est rendu public auprès des usagers de ces services publics ainsi qu’auprès des assemblées délibérantes.
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. La mise en œuvre de ce plan d’action contre le gaspillage alimentaire repose sur un diagnostic qui doit être connu des élus, des assemblées représentatives comme des usagers.
Il s’agit en effet de permettre aux élus de prendre en compte ce diagnostic et les objectifs de réduction du gaspillage alimentaire dans les cahiers des charges qui pourraient être soumis aux gestionnaires de services de restauration publique ou influencer des décisions relatives à l’organisation, aux tarifs, à la composition des repas, aux dépenses de personnel, impactés par ce plan d’action.
Par ailleurs, les usagers doivent pouvoir connaître, de la même manière, l’impact de ce diagnostic et du plan de réduction du gaspillage alimentaire sur la qualité des produits, des services, des conditions de prise des repas, ainsi que l’impact budgétaire attendu sur les tarifs. Voilà pourquoi le présent amendement vise à prévoir que ces plans d’action soient rendus publics.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement tend à prévoir que le plan d’action visant à lutter contre le gaspillage alimentaire mis en place par le gestionnaire de service de restauration collective doit être rendu public auprès des usagers et des assemblées délibérantes. L’article actuel du code de l’environnement qui prévoit une telle démarche de lutte contre le gaspillage alimentaire par les services de restauration collective gérés par l’État et les collectivités territoriales ne prévoit pas cette publicité. Il ne me semble pas utile d’apporter cette précision dans la loi, qui fixe le principe. Le décret fixera les modalités. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La prise de conscience est réelle dans de nombreux restaurants, mais tous ne se sont pas encore engagés dans la démarche. L’article 15 du projet de loi prévoit déjà de rendre obligatoire pour certains opérateurs de la restauration collective la communication de leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire. Pour ces raisons, j’émets un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 bis AA.
(L’article 12 bis AA est adopté.)
Article 12 bis A
I. – La sous-section 1 bis de la section 3 du chapitre Ier du titre IV du livre V du code de l’environnement est complétée par un article L. 541-15-7 ainsi rédigé :
« Art. L. 541-15-7. – La restauration commerciale et les débits de boissons à consommer sur place mettent gratuitement à la disposition de leurs clients qui en font la demande des contenants réutilisables ou recyclables permettant d’emporter les aliments ou boissons non consommés sur place, à l’exception de ceux mis à disposition sous forme d’offre à volonté.
« Le présent article ne s’applique pas pour les boissons dont le contenant est soumis à un système de consigne.
« Les établissements de restauration et les entreprises de vente à emporter qui proposent la vente à emporter de plats et produits de consommation utilisent à cet effet des contenants réutilisables ou recyclables. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er juillet 2021.
M. le président. L’amendement n° 87, présenté par M. Médevielle, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Remplacer la première occurrence du mot :
La
par les mots :
Les établissements de
II. – Alinéa 3
Après la première occurrence du mot :
Le
insérer les mots :
premier alinéa du
III. – Alinéa 4
Rédiger ainsi le début de cet alinéa :
« Les établissements de restauration commerciale et les entreprises qui distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de vente à emporter utilisent à cet effet…
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à apporter une amélioration rédactionnelle et à préciser le champ d’application de l’obligation d’utilisation de contenants réutilisables ou recyclables : sont visés les établissements de restauration commerciale qui proposent une activité de vente à emporter, ainsi que les entreprises qui distribuent des produits alimentaires dans le cadre d’une activité de vente à emporter.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 231 rectifié, présenté par MM. Kern, Capo-Canellas et Mizzon, Mme Joissains, M. Henno, Mmes Sollogoub et Gatel, MM. D. Dubois et Luche et Mme Billon, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 631 rectifié ter, présenté par Mme Rauscent, MM. Théophile, Dennemont, Decool, Capus, Bargeton et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les sacs en matières plastiques à usage unique destinés à l’emballage des contenants sus-mentionnés sont interdits, à compter du 1er juin 2019, sauf pour les sacs compostables en compostage domestique et constitués, pour tout ou partie, de matières biosourcées. »
La parole est à Mme Noëlle Rauscent.
Mme Noëlle Rauscent. Il y a trois ans, le Parlement adoptait l’interdiction des sacs plastiques à usage unique dans la distribution.
Si cette mesure a pu être décriée par certains d’entre vous lors de l’examen du projet de loi relatif à la transition énergétique, nous nous sommes aujourd’hui tous habitués à cette interdiction et nous la saluons.
Pendant deux ans, jusqu’à l’entrée en vigueur de la mesure le 1er janvier 2017, les acteurs du secteur ont été accompagnés pour trouver des alternatives au sac plastique à usage unique non compostable ou non biodégradable.
Grâce à la recherche et au développement, de nombreuses solutions peu coûteuses existent.
Notre amendement est simple, mes chers collègues : il vise à élargir le champ d’application de cette interdiction des sacs plastiques à la restauration de vente à emporter. Pourquoi l’interdire à la distribution, mais l’autoriser au restaurant d’à côté ?
Par ailleurs, en cohérence avec l’article 12 bis A, il serait absurde de pouvoir emporter des aliments non consommés sur place dans un contenant réutilisable, lui-même emballé dans un sac plastique non biodégradable !
Cet amendement est donc finalement un amendement de cohérence visant à lutter contre les déchets plastiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à prévoir que les sacs en matière plastique à usage unique destinés à l’emballage des contenants alimentaires dans le cadre de ventes à emporter sont interdits à compter du 1er juin 2019, sauf pour les sacs compostables ou biosourcés.
Il est contradictoire avec l’obligation adoptée par la commission, sur l’initiative de notre collègue Noëlle Rauscent, de prévoir des contenants réutilisables ou recyclables pour la vente à emporter de denrées alimentaires, mais à partir de 2021. Pourquoi préciser une interdiction des sacs en matière plastique alors que l’article prévoit déjà que les contenants doivent être recyclables ?
Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’interdiction proposée est déjà couverte par l’interdiction des sacs de caisses en plastique à usage unique, qui a été introduite par l’article 75 de la loi sur la transition énergétique votée en 2015. Cet amendement étant satisfait, j’en demande le retrait.
M. le président. Madame Noëlle Rauscent, l’amendement n° 631 rectifié ter est-il maintenu ?
Mme Noëlle Rauscent. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 631 rectifié ter est retiré.
Je mets aux voix l’article 12 bis A, modifié.
(L’article 12 bis A est adopté.)
Article additionnel après l’article 12 bis A
M. le président. L’amendement n° 356 rectifié, présenté par MM. Danesi, Grand et Poniatowski, Mmes Garriaud-Maylam, de Cidrac, Delmont-Koropoulis, Deroche, Di Folco, Bonfanti-Dossat et Imbert, M. Brisson, Mmes Bories et A.M. Bertrand, MM. Charon et de Legge, Mmes Deromedi et Keller et MM. Laménie, Savin et Paul, n’est pas soutenu.
Article 12 bis
(Non modifié)
Le I de l’article L. 541-15-6 du code de l’environnement est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans des conditions prévues par décret, les commerces de détail s’assurent de la qualité du don lors de la cession. » – (Adopté.)
Article 12 ter
(Non modifié)
À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 111-2-2 du code rural et de la pêche maritime, après le mot : « territorialisées », sont insérés les mots : « , à la lutte contre le gaspillage et la précarité alimentaires ». – (Adopté.)
Article 12 quater
(Non modifié)
Avant le dernier alinéa de l’article L. 3231-1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – la lutte contre la précarité alimentaire. »
M. le président. L’amendement n° 614 rectifié ter, présenté par MM. Jomier, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Avant le premier alinéa
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… - Le sixième alinéa de l’article L. 3231-1 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« - la mise en place d’un système de surveillance de l’état nutritionnel de la population et de son imprégnation par les polluants chimiques, prenant en compte leurs déterminants ; ».
La parole est à M. Franck Montaugé.
M. Franck Montaugé. Cet amendement vise à intégrer l’enjeu de l’imprégnation de la population française par les polluants chimiques parmi ceux faisant l’objet d’une surveillance permanente dans le cadre du programme national nutrition santé.
Ces données de santé environnementale en population générale et par publics cibles sont extrêmement importantes et font actuellement défaut.
La seule étude consacrée à cet enjeu a été menée par l’Institut national de veille sanitaire en 2006-2007 dans le cadre de l’étude nationale nutrition santé de 2007.
Elle avait notamment révélé des concentrations sanguines en polychlorobiphényles chez les Français adultes environ cinq fois plus élevées qu’aux États-Unis et légèrement supérieures à celles observées dans les autres pays européens.
Elle avait noté une moyenne des concentrations urinaires en 2,5-DCP – un chlorophénol – environ dix fois supérieure à celle observée dans la population allemande adulte en 1998, expliquée dans l’étude par une utilisation plus importante de cette substance comme désodorisant ou antimite en France en 2007.
Elle avait enfin relevé des concentrations plus élevées en France qu’au Canada et aux États-Unis en pyréthrinoïdes, la famille d’insecticide la plus utilisée en France, tant pour les traitements des cultures que pour les applications domestiques.
Le rapport de l’étude cite, par ailleurs, parmi les facteurs influençant les biomarqueurs urinaires le lieu de résidence, notamment la proximité d’une surface agricole dédiée à la culture de la vigne, l’alimentation et l’usage d’insecticides dans le logement.
La mise en place d’un système de surveillance de l’imprégnation de la population française par les polluants chimiques, déterminés par les autorités compétentes – l’Institut de veille sanitaire, désormais intégré au sein de l’agence Santé Publique France, l’ANSES, etc. –, englobant les sources de ces polluants, permettrait de collecter les données d’exposition indispensables à la mise en œuvre d’une réelle politique de santé environnementale.
M. le président. Quel est l’avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable ?
M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis. Cet amendement vise à ajouter au programme national nutrition santé, le PNNS, la mise en place d’un système de surveillance de l’imprégnation de la population par les polluants chimiques. La version actuelle du PNNS, qui couvre la période 2017-2021, comprend des repères nutritionnels à ce sujet, en recommandant une diversification de l’alimentation en faveur de productions moins exposées aux pesticides.
Quant à la surveillance de l’exposition de la population aux produits chimiques, elle mérite d’être traitée dans un cadre plus large que les PNNS. En effet, plusieurs points relevés dans l’étude de l’Institut national de veille sanitaire de 2007, citée par les auteurs de cet amendement, ne relèvent pas de l’alimentation, comme la proximité avec une surface agricole traitée avec des produits phytopharmaceutiques ou l’utilisation de produits biocides à l’intérieur du logement.
Cette dimension multifactorielle justifie d’avoir une approche globale de l’exposition aux produits chimiques. Sur ce sujet, le troisième Plan national santé environnement prévoit plusieurs actions en complément des mécanismes de surveillance réglementaire existants, notamment sur les résidus de pesticides dans l’alimentation, l’eau potable et l’air. Il est important de poursuivre la recherche et la surveillance sanitaire sur ces sujets, mais viser cette question dans le PNNS ne nous semble pas le moyen le plus adapté pour prendre en compte tous les déterminants de cette exposition.
La commission suggère le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Il s’agit à la fois d’une préoccupation qui s’est exprimée dans le cadre des ateliers des États généraux de l’alimentation, notamment dans l’atelier 8, et d’une thématique qui a fait l’objet de plans d’action de la part de l’État et de ses opérateurs. Le Gouvernement est en train de revoir sa stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens.
Par ailleurs, dans le cadre des études d’alimentation, l’ANSES dresse régulièrement un bilan de l’exposition de la population française, notamment aux substances dites PCB, c’est-à-dire aux polychlorobiphényles.
Une nouvelle étude est en cours d’élaboration. Elle fera de nouveau un focus important sur l’ensemble des polluants chimiques.
Le souci exprimé à travers cet amendement est parfaitement louable. Il est nécessaire de poursuivre et de renforcer cette surveillance. Nous y travaillons et nous nous y employons. Le PNNS, qui se concentre sur les questions nutritionnelles, n’est pas le bon levier. Il existe, comme je l’ai déjà indiqué par ailleurs, d’autres mesures engagées par l’État et par ses opérateurs.
Dans ce contexte, je suis défavorable à l’amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 614 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 12 quater.
(L’article 12 quater est adopté.)
Article 12 quinquies
(Non modifié)
L’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie remet au Parlement un rapport avant le 1er janvier 2022 sur la gestion du gaspillage alimentaire par la restauration collective et la grande distribution. – (Adopté.)
Chapitre II
Respect du bien-être animal
Article 13
(Non modifié)
I. – Le premier alinéa de l’article 2-13 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le mot : « infractions », sont insérés les mots : « prévues par le code pénal et aux articles L. 215-11 et L. 215-13 du code rural et de la pêche maritime » ;
2° À la fin, les mots : « prévus par le code pénal » sont supprimés.
II. – Le premier alinéa de l’article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Les mots : « de six mois » sont remplacés par les mots : « d’un an » ;
2° Le montant : « 7 500 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
3° Après le mot : « refuge », sont insérés les mots : « , un établissement d’abattage ou de transport d’animaux vivants ».
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, sur l’article.
M. Joël Labbé. Nous arrivons donc au débat sur le bien-être animal. Ce sujet est essentiel, et il faut le traiter sans caricature, mais sans nier non plus les problèmes qui peuvent exister dans ce domaine.
Dans les systèmes d’élevages où la logique industrielle est poussée à son comble, l’animal n’est plus considéré comme un être vivant. Il n’est qu’une machine à produire de la viande. J’ai entendu hier, dans cet hémicycle, que, si l’on ne coupait pas les queues des cochons, ils se les mangeaient entre eux. Mais, si vous vous rendez dans un élevage de porc sur paille – il y en a en Bretagne –, ou en plein air, vous ne pourrez que le constater : les cochons y ont bien une queue sans que cela pose de problème de cannibalisme. Il faut l’entendre, car ce sont bien les conditions d’élevage qui créent ces comportements. On ne peut se cacher ces réalités !
Cela étant, je l’ai déjà dit, je ne remets pas en cause la consommation de viande, je ne prône pas une généralisation du véganisme, même si je respecte le choix de chacun. Je pense que, si un animal d’élevage a eu une vie décente, dans de bonnes conditions, sa mort, son sacrifice pour l’alimentation humaine, car il s’agit bien d’un sacrifice, peut être justifié éthiquement.
Pour moi, il s’agit donc de traiter ce sujet en favorisant toutes les mesures qui peuvent permettre d’améliorer le bien-être à la fois des éleveurs et des animaux, et de promouvoir une alimentation durable et de proximité. Les pistes de travail en ce sens sont très nombreuses.
Les conditions de vie des animaux sont souvent le reflet des conditions de vie des éleveurs. Je prendrais l’exemple de la qualité de l’air respiré dans les bâtiments d’élevage intensif : cet air où se concentrent des substances nocives est mauvais pour les animaux, qui souffrent d’infections respiratoires. Il est aussi facteur de risque pour la santé des éleveurs. Dans les abattoirs industriels, dénoncés pour les souffrances infligées aux animaux, les travailleurs ne sont pas en reste. Les tâches à effectuer et les cadences sont souvent difficiles ; les maladies professionnelles sont très fréquentes.
Si nous favorisons la qualité et la relocalisation de l’élevage, nous favorisons à la fois le bien-être des animaux et celui des éleveurs, qui trouvent une rémunération dans ces systèmes et – ils en témoignent – une fierté retrouvée de leur métier.
Les systèmes agricoles qui produisent une alimentation de qualité sont aussi des systèmes où les animaux voient la lumière du jour, ont de l’espace et ont accès à l’extérieur.
Sur le volet « mise à mort », si nous favorisons les abattoirs mobiles et les petits abattoirs locaux, nous évitons aux animaux un transport dans des conditions difficiles et une attente dans un lieu inconnu, ainsi que le mélange des troupeaux, qui est source de stress.
Je défendrai donc dans ce cadre un certain nombre d’amendements allant dans ce sens.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, sur l’article.
M. Pierre Ouzoulias. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, M. le rapporteur nous a parlé avec justesse des paysans. Je préfère utiliser ce mot, car il est beau et désigne une personne qui a un rapport avec le pays, avec l’environnement sous toutes ses formes, et donc avec le vivant.
J’ai connu un temps, pas si lointain, où les éleveurs de la petite région dont je suis originaire donnaient un nom à toutes leurs vaches. Ils amenaient la bête dans la bétaillère avec un sentiment mitigé : ils l’avaient élevée, elle avait porté des veaux qu’ils avaient vendus, et lorsqu’ils la voyaient partir pour la boucherie, il y avait une sorte de connivence entre eux qui me touchait beaucoup. Cela ne m’a jamais empêché de manger de la viande ; je dirais même « au contraire », parce que je trouve qu’il y a là une relation à la nature qui est intéressante.
Je partage le point de vue de Joël Labbé. Il faut revenir à des choses simples et naturelles. Dans la production de viande, les processus productivistes qui font disparaître complètement l’identité de l’animal sont dangereux parce qu’ils nourrissent aussi – pardonnez-moi ce jeu de mots – une réaction d’opposition à ce modèle. Et cela aboutit malheureusement aux prises de position qui ont été décrites à propos des véganes ou de toute autre forme de culte nouveau.
Je voulais insister sur ce point à l’amorce de la discussion sur ce chapitre II, pour que nous en revenions aux choses saines et simples que je viens de décrire.
M. le président. L’amendement n° 380 rectifié bis, présenté par MM. Duplomb, Gremillet et Adnot, Mme Bonfanti-Dossat, MM. Bonne, Bouchet, Brisson et Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chevrollier et Danesi, Mmes L. Darcos, Deroche, Di Folco et Gruny, MM. Genest, Huré et Laménie, Mme Lamure, M. Lefèvre, Mme Lopez, MM. Meurant, Morisset, Paccaud, Paul, Pierre, Poniatowski et Priou, Mme Puissat, MM. Rapin, Revet et Sido et Mme Thomas, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 2-13 du code de procédure pénale est abrogé.
La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. Je commencerai mon propos en reprenant ce que vient d’évoquer Pierre Ouzoulias : il a raison, encore aujourd’hui, les animaux ont un nom.
Encore aujourd’hui, les éleveurs ont un cœur et ils ont, effectivement, un pincement au cœur lorsqu’ils se séparent de leurs animaux.
Encore aujourd’hui, des éleveurs versent des larmes face à la détresse, à la maladie, à la souffrance ou à la perte d’un animal.
Notre amendement vise des pratiques qui sont à l’inverse de cela, qui utilisent des montages photographiques, voire des photos sorties de leur contexte, pour faire de la procédure, pour parler de la maltraitance des animaux.
On pourrait citer un grand nombre d’exemples de ces images passées en boucle, encore une fois sorties totalement de leur contexte, uniquement pour mentir et manipuler, et qui ne reflètent pas la réalité de ce qui se passe dans les élevages, dans les abattoirs, dans les lieux où vivent des animaux.
Je souhaite tout simplement qu’à l’occasion de la discussion de cet amendement, nous puissions avoir un débat. Car c’est trop facile ! Il ne s’agit pas que la loi aille dans un seul sens et qu’elle ne permette pas de connaître ce qu’il y a dans le cœur des éleveurs, quelle est réellement la vie de celles et ceux qui sont au contact des animaux, y compris dans les abattoirs. Ce point est important.
Me permettez-vous, monsieur le président, de présenter dès maintenant notre amendement suivant n° 377 rectifié, qui est de repli ?
M. le président. Je vous en prie, mon cher collègue.
M. Daniel Gremillet. Si notre premier amendement tendait à provoquer le débat – Mme la rapporteur donnera son avis à cet égard –, celui-ci vise à limiter la possibilité de se porter partie civile aux seules associations reconnues d’utilité publique.
M. le président. L’amendement n° 377 rectifié, présenté par MM. Duplomb, Gremillet, Adnot et Babary, Mmes A.M. Bertrand et Bonfanti-Dossat, M. Bonne, Mme Bories, MM. Bouchet, J.M. Boyer, Brisson et Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chevrollier et Danesi, Mmes L. Darcos, Di Folco et Gruny, M. Huré, Mme Imbert, MM. Kennel et Laménie, Mme Lamure, M. Lefèvre, Mme Lopez, MM. Meurant, Morisset, Paccaud, Paul, Pierre, Pointereau, Poniatowski et Priou, Mme Thomas, MM. Sido, Revet et Rapin et Mme Puissat, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Les mots : « régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans » sont remplacés par les mots : « reconnue d’utilité publique » ;
Cet amendement a été défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’amendement n° 380 rectifié bis vise à abroger l’article du code de procédure pénale qui permet aux associations de se porter partie civile en cas de maltraitance animale. Il tend donc à revenir sur l’extension – à vrai dire assez limitée – du droit des associations de se porter partie civile tel qu’elle est prévue dans cet article. Cela conduirait à abroger tout droit pour ces associations de se porter partie civile dans les cas de maltraitance animale déjà visés par le droit existant.
Nous pouvons tous entendre vos arguments, mon cher collègue. Ils reposent sur la volonté de dénoncer ce qui est parfois perçu comme une utilisation abusive de ce droit. Nous avons tous à l’esprit les interprétations excessives qu’en font certaines associations. Je vous invite toutefois à éviter tout excès en la matière.
Tout d’abord, l’article 2-13 du code de procédure pénale, dont les grandes lignes datent de 1976, permet d’ores et déjà aux associations de défense et de protection des animaux ainsi qu’aux fondations d’utilité publique de se porter partie civile pour les infractions reconnues dans le code pénal.
Le seul apport de l’article 13 du projet de loi consiste à étendre la liste des infractions visées à certaines de celles prévues dans le code rural. Or, s’il pouvait exister une incertitude sur le champ des dispositions visées dans le texte initial, elle a été totalement levée et ce champ a été très limité par l’Assemblée nationale : seront concernés les seuls délits visés à l’article L. 215-11 dudit code, c’est-à-dire les délits de mauvais traitements qui y figuraient déjà, et qui sont étendus au transport et à l’abattage, et ceux visés à l’article L. 212-13 du même code, qui réprime le transport d’animaux sans autorisation.
Pour tous ces motifs, je vous demande, mon cher collègue, de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’amendement de repli n° 377 rectifié vise à traiter de façon discriminatoire et injustifiée les associations de protection des animaux par rapport à l’ensemble des autres associations, dont le droit de se porter partie civile est reconnu par le code de procédure pénale. Il s’agit en effet d’exiger pour ces associations, et pour elles seules, une reconnaissance d’utilité publique, au lieu d’une simple déclaration régulière depuis au moins cinq ans.
Cette dernière condition est exigée pour toutes les associations visées aux articles 2-1 et 2-24 du code de procédure pénale, sur des sujets aussi divers que la lutte contre le racisme, les violences, le harcèlement sexuel, la protection de l’enfance en danger, et bien d’autres.
En outre, même si l’on devait admettre un traitement différencié pour ces associations, les conditions requises pour qu’elles soient reconnues d’utilité publique seraient, nous le savons bien, rapidement réunies, et ce sans aucune difficulté, tout au moins par les plus grandes et les plus connues d’entre elles. L’objectif poursuivi ne serait pas atteint, sauf à vouloir donner encore plus d’écho à ces associations.
L’avis est donc défavorable sur cet amendement de repli.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je voudrais rappeler quelques points relatifs à la stratégie que nous développons en matière de bien-être animal.
Tout d’abord, faire du bien-être animal une priorité, ce n’est pas stigmatiser les éleveurs. Et c’est bien normal, puisque les éleveurs ont besoin que leurs animaux vivent bien et soient en bonne santé. Le facteur d’avenir de l’élevage français, c’est le bien-être animal, lequel participe à l’amélioration de la santé animale.
Un animal qui vit bien tombe moins souvent malade, il est essentiel de le rappeler.
Cette stratégie que nous souhaitons développer est d’abord liée à l’innovation, avec la création du premier centre de référence autour du bien-être animal. Des travaux de recherche seront menés pour proposer aux professionnels des alternatives à leurs pratiques actuelles.
Nous allons accompagner les éleveurs dans leur pratique quotidienne, les opérateurs dans les abattoirs et les transporteurs d’animaux.
Il s’agit également de former, à la fois, dans nos lycées agricoles, qui dispensent un enseignement d’excellence, mais aussi via le guide des bonnes pratiques et les outils diagnostiques du bien-être, afin d’aider les éleveurs de l’ensemble des filières.
Nous allons renforcer l’exigence en termes de formation des agents qui travaillent dans les abattoirs.
Sera créée, pour les vétérinaires, une chaire de bien-être animal au sein de VetAgro Sup.
Toutes ces mesures sont les conditions sine qua non pour réussir et être au rendez-vous des attentes sociétales sur le bien-être animal.
Il s’agit aussi de contrôler et de sanctionner, en renforçant les procédures de contrôle interne sur les abatteurs, en nommant un responsable de protection animale dans tous les abattoirs, en prévoyant une protection des lanceurs d’alerte.
L’obligation de contrôle interne sera formalisée sous la forme d’audits réguliers, la transparence des moyens de contrôle mise en œuvre, l’organisation des contrôles améliorée sur le terrain, la formation initiale renforcée. Nous reviendrons ultérieurement sur la question des sanctions prévues. Les agents suivront une formation relative aux suites judiciaires et administratives.
Nous allons permettre aux associations de se porter partie civile sur la base des constats des contrôles officiels.
Enfin, nous améliorerons la communication et la formation sur l’expérimentation, par exemple dans le cadre du Conseil national de l’alimentation, de l’étiquetage relatif à l’origine des produits, et sur d’autres marqueurs attendus par nos concitoyens.
L’abrogation de l’article 2-13 du code de procédure pénale aurait pour conséquence d’affaiblir le dispositif que nous proposons, en supprimant le principe du droit de se porter partie civile pour les infractions de maltraitance animale. Je précise d’ailleurs que les associations ne peuvent se porter partie civile que sur la base de contrôles officiels réalisés par des agents formés et assermentés.
J’émets donc un avis défavorable sur ces deux amendements.
M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.
M. Michel Raison. L’amendement de Daniel Gremillet est très important pour engager le débat, faire le tri et éviter les amalgames.
Il ne faut pas confondre la maltraitance animale et les modes d’élevage. Il ne faut pas non plus se tromper : le fond de la pensée de ceux qui, de façon vicieuse, instillent certaines idées pour mettre à mal tous les élevages, est en fait qu’il ne faut plus consommer du tout de produits d’origine animale, y compris le lait, les œufs et évidemment la viande.
Même si les véganes ne représentent que 0,3 % de la population, ils parviennent à mettre en place une communication pour instiller petit à petit, dans la société, l’idée que les animaux seraient maltraités.
Depuis des siècles, les élevages n’ont jamais été conduits de la même façon selon qu’il s’agissait de bovins lait, de bovins viande, de lapins, de poules, de cochons… Au Moyen Âge, les porcs vivaient dans des cases, mangeaient beaucoup moins bien qu’aujourd’hui et ne voyaient pas non plus la lumière du jour.
Je ne sais pas si vous avez déjà visité des élevages de porcs en plein air, mais ils ne sont pas très heureux ! Les truies attrapent la brucellose, elles tuent une partie de leurs petits, et l’hiver elles vont très mal. Elles ne connaissent pas tellement le bonheur !
Soyons francs, la durée de vie d’un cochon est d’environ six mois, qu’il soit élevé en plein air, sur caillebotis ou sur paille. Si l’on sondait leur syndicat, les porcs nous diraient qu’il leur est bien égal de vivre sur paille ou sur caillebotis, mais qu’ils n’ont pas forcément envie de finir sous forme de saucisson ! (Sourires.) Et c’est vrai, quel que soit le mode d’élevage… Il nous faut donc être cohérents !
Je veux rassurer notre collègue Pierre Ouzoulias, les vaches à lait ont toujours un nom et sont toujours aimées. Les poules, quant à elles, n’ont jamais eu de nom,…
M. Didier Guillaume. Elles ont des dents !
M. Michel Raison. … pas plus que de dents, mais elles ne sont pas malheureuses pour autant. (Nouveaux sourires.) Ne faisons pas d’amalgame !
Je sais que Daniel Gremillet est rassuré, et qu’il a présenté un amendement d’appel. Ce ne sont pas les éleveurs conduisant normalement leur élevage qui pourront être condamnés après le vote de ce projet de loi, mais seulement ceux qui maltraitent leurs animaux. Or, aujourd’hui déjà, il n’est pas permis de maltraiter les animaux ! Les condamnations de personnes qui maltraitent les animaux, cela existe déjà…
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Michel Raison. Comme je suis un peu rapporteur, je prends un peu plus de temps, monsieur le président… (Rires.)
Ceux qui maltraitent les animaux ne sont d’ailleurs pas forcément éleveurs. Il peut certes s’agir d’un éleveur bio, ou non bio, mais aussi d’une personne qui « collectionne » chez elle des chiens ou des serpents. J’ai connu de tels cas dans mon département, et nous avons dû les dénoncer. Voilà ce qu’est le mal-être animal !
Dans leur grande majorité, les éleveurs traitent bien leurs animaux ; sinon, les vaches n’auraient plus de lait, les cochons ne pousseraient plus et les poules ne pondraient plus d’œufs ! C’est cela, le bien-être animal, et c’est la base de l’élevage. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. Cela ne me plaît pas de le rappeler, mais la même règle s’applique à tous. Je vous prie donc, mes chers collègues, de respecter vos temps de parole afin de ne pas créer de situations injustes.
La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote, et pour deux minutes trente !
M. Arnaud Bazin. Les occasions de reprendre la parole ne manqueront pas…
Vous ne vous étonnerez pas qu’un vétérinaire dise quelques mots sur le bien-être animal et la condition animale, en apportant quelques nuances à ce qui vient d’être dit.
Personne ici, je crois, ne soutiendra les actions extrémistes, totalement déplorables, menées par des groupuscules à l’idéologie ultra-minoritaire, qui essaient peut-être ainsi d’influencer les uns et les autres. Pour autant, mes chers collègues, nous commettrions une terrible erreur en refusant de prendre en compte les évolutions qui sont à l’œuvre dans notre société.
Des évolutions de comportement se produisent en permanence. Nous sommes quelques-uns ici à être âgés de plus de cinquante ans ; si nous devions faire la liste des comportements de tous ordres – pas seulement ceux qui ont trait aux animaux – qui avaient cours il y a cinquante ans et que l’on ne tolère plus aujourd’hui, cela nous prendrait toute la nuit. On en trouverait énormément !
On observe dans notre société une évolution de notre rapport à l’animal. Je considère d’ailleurs, pour ma part, qu’il est un peu dommage d’entrer dans ce débat uniquement au travers de considérations liées à l’élevage et à l’abattage des animaux, car le problème est beaucoup plus vaste.
Je plaide pour que nous menions une réflexion globale sur cette question. Cela prendra du temps, mais si nous ne le faisons pas, d’autres la mèneront à notre place et nous serons à la traîne, au risque que nos éleveurs subissent des injustices. Car moi non plus, je ne confonds pas l’élevage et les mauvais traitements ; ces questions sont bien plus complexes que cela.
Nous ne devons à aucun moment perdre de vue la contrainte économique qui existe. Nous pourrions en effet, en prenant des mesures irréfléchies, recueillir des résultats contraires à ceux que nous souhaitons. S’il arrivait, par exemple, que nous mettions en grande difficulté nos éleveurs, qu’une production s’éteigne chez nous et que nous soyons envahis de produits d’origine animale élaborés ailleurs dans des conditions que nous réprouvons, nous aurions alors exporté la maltraitance hors de notre pays. Du point de vue de la cause que nous défendons, nous n’aurions rien gagné.
Cette réflexion globale à laquelle je nous invite prendra du temps et nécessitera que l’on dépasse largement les questions de l’élevage, de l’abattage et du transport des animaux. (M. Franck Montaugé applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour explication de vote.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Je souscris aux propos d’Arnaud Bazin. J’ai bien entendu, aussi, ce qu’a dit Michel Raison. Il ne saurait être question de faire d’amalgame, ce serait totalement contre-productif.
Je comprends les inquiétudes de Daniel Gremillet. Mais on ne peut juger les actions de toutes les associations de protection animale, qui font un travail indéniable sur le terrain depuis des années, à l’aune de celles d’une ou deux associations parfaitement extrémistes. Celles-ci, par ailleurs, maîtrisent parfaitement les codes de l’information et ont compris comment les choses fonctionnaient en France.
Nous n’avons pas encore évoqué l’importance d’internet. Lorsque des films et des témoignages sont diffusés sur les réseaux, ils infusent dans la société française.
J’ai assisté au débat qui a lieu dans l’hémicycle depuis trois jours, et j’ai appris beaucoup de choses. J’ai ainsi beaucoup entendu évoquer la notion de pragmatisme. En tant qu’élus, nous devons précisément être pragmatiques et répondre aux attentes de nos concitoyens, dès lors qu’ils ont reçu ces informations et demandent des réponses.
Je souhaite que nous ayons un débat apaisé, qui attestera de la qualité délibérative du Sénat, mais on ne peut pas ignorer certaines questions.
Opposer bien-être des éleveurs et bien-être animal serait une erreur, même s’il y a des contingences économiques, dont nous allons discuter.
À titre personnel, je ne voterai pas ces amendements, qui représenteraient un recul.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je l’ai dit d’emblée, et je le répète à Céline Boulay-Espéronnier, certains d’entre nous ont encore le temps d’aller sur le terrain et de voir ce qui se passe dans les élevages, partout en France, et dans les autres lieux de rassemblement des animaux, comme les marchés et les abattoirs. J’ai un grand respect pour les femmes et les hommes qui travaillent dans ces lieux, et je ne voudrais pas que les signaux que nous sommes en train d’envoyer soient dépourvus de cette dimension de respect pour leur travail.
Comme partout, lorsque l’être humain est en cause, il y a des personnes qui dérapent. On ne peut ni les soutenir ni les cautionner, car elles sont condamnables. Monsieur le ministre, il n’y a aucun problème sur ce point ! Mais je ne voudrais pas qu’une personne, parce qu’elle travaille avec des animaux, sur les marchés ou dans un abattoir, soit jetée en pâture et jugée uniquement à charge.
Je veux vous rassurer, madame la rapporteur, je vais retirer le premier de mes amendements. Mais je souhaitais que, durant quelques instants, de manière très apaisée, on parle aussi des éleveurs de façon positive. Je suis heureux du dialogue qui s’instaure entre nous parce que, encore une fois, ce sujet est très profond.
Je vais également retirer mon second amendement, de repli, que nous avons souhaité déposer à cause de la situation que nous connaissons. Car le film continue ! Le président du syndicat des bouchers demande à être protégé, et des boucheries sont attaquées parce qu’elles travaillent et vendent de la viande !
Sur ce véritable sujet de société, je souhaite, encore une fois, que nous ayons un débat apaisé. Je retire donc mes amendements et vous remercie, mes chers collègues, pour les échanges que nous venons d’avoir. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. Les amendements nos 380 rectifié bis et 377 rectifié sont retirés.
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Le débat que nous venons d’avoir a été plutôt serein et apaisé.
Cher Daniel Gremillet, si vous ne les aviez pas retirés, je n’aurais pas voté ces amendements, la commission ayant émis un avis défavorable. Je tiens cependant à dire que vous vous êtes fait avec beaucoup de sobriété et de calme le porte-parole d’un certain nombre d’éleveurs, mais aussi d’autres professionnels.
Mon département des Yvelines compte ainsi l’un des derniers abattoirs porcins d’Île-de-France, qui est régulièrement la cible d’associations tout à fait désagréables, qui y entrent par effraction, prennent des photos et diffusent des images montées.
Ces personnes ne se rendent pas compte de ce qu’elles font, au-delà des animaux, aux hommes qui travaillent dans ces abattoirs ! Je pense notamment au propriétaire de cet établissement, M. Vincent Harang, qui fait consciencieusement son travail depuis des années. Il en a « bavé » pour que son abattoir reste ouvert et que les cochons normands et d’Île-de-France ne parcourent pas des kilomètres avant d’être abattus. Mon cher Joël Labbé, cet abattoir a un rôle extrêmement important de structuration de la filière alimentaire pour les circuits courts en région parisienne.
Ce cri du cœur des éleveurs et des transformateurs, nous devons l’entendre.
M. le président. Je mets aux voix l’article 13.
(L’article 13 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 13
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 208 rectifié bis, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après le premier alinéa de l’article L. 215-11 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Tout manquement grave ou répété aux obligations définies à l’annexe I du règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 sur la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes constitue un mauvais traitement au sens du premier alinéa du présent article. »
II. - La section 4 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Pour les transports d’animaux se déroulant entièrement sur le territoire français, il est prévu les conditions particulières suivantes :
« 1° La durée maximale de voyage des animaux domestiques est fixée à huit heures pour les espèces bovine, ovine, caprine, porcine et les équidés domestiques et à quatre heures pour les volailles, les oiseaux domestiques et les lapins domestiques ;
« 2° Par dérogation, une autorisation préalable peut être délivrée pour un voyage d’une durée supérieure, dans une limite maximale de douze heures de transport, par un vétérinaire qui atteste de la capacité des animaux à réaliser ce voyage sans risque d’être blessés ou de subir des souffrances inutiles ;
« 3° Les femelles gravides qui ont passé les deux tiers de la période de gestation prévue ne sont pas considérées comme aptes à être transportée.
« Un décret précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Je trouve que notre discussion est de très grande qualité, et j’aimerais la poursuivre un peu, avec votre permission, en passant rapidement sur l’amendement.
Monsieur Raison, dans mon pays, les vaches n’ont plus de nom, parce qu’il s’est produit un changement radical des modes d’élevage. Un éleveur qui gère seul un cheptel de 120 vaches n’a plus le temps de leur donner des noms… (M. Michel Raison s’exclame.)
Par ailleurs, les vaches ne vont plus à l’étable. La procession biquotidienne que j’ai connue n’existe plus.
M. Michel Raison. Des vaches à lait ou allaitantes ?
M. Pierre Ouzoulias. Ce sont des limousines, les meilleures vaches du monde ! (Sourires.)
En tant qu’historien, j’ai beaucoup travaillé sur les problèmes d’alimentation, sur une période deux mille ans. Cela donne du recul !
Dans l’Antiquité, cela va vous surprendre, la consommation de viande était liée quasi uniquement au culte et à la religion : on consommait de la viande en référence aux dieux et dans un cadre cultuel.
La consommation de viande telle qu’on la connaît aujourd’hui est un fait extrêmement moderne et récent, qui date des années cinquante et soixante.
On constate aujourd’hui, partout dans le monde, une baisse de la consommation de viande, que l’on a du mal à interpréter. Je vous le dis en historien, on peine à comprendre pourquoi des évolutions se produisent de façon aussi radicale dans le mode d’alimentation.
Croyez-moi, les quelques excités que vous avez cités n’ont aucune relation avec cette forte baisse de la consommation de viande, qui trouve son ancrage dans l’appréhension par les personnes de leur rapport à la nature. C’est quelque chose de très profond sur lequel il faut travailler. Il faut se dire que la consommation de viande va continuer à baisser, c’est une évidence !
Par ailleurs, j’enseigne à des étudiants l’histoire de l’agriculture, et je suis effrayé de constater que certains gamins ne connaissent plus du tout les campagnes ; il faut leur expliquer la différence entre la paille et le foin ! Quels que soient nos débats, il y a un problème de fond : la méconnaissance absolue, totale et définitive entre le monde urbain et le monde de la campagne. Pour rendre service aux agriculteurs, il faudrait rapprocher les uns et les autres.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.
L’amendement n° 397 rectifié quater est présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Monier, Lienemann, Conway-Mouret et Préville et M. Jomier.
L’amendement n° 513 rectifié est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Corbisez, Mme Laborde et M. Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rétabli :
« Art. L. 214-… – Pour les transports d’animaux se déroulant entièrement sur le territoire français, la durée maximale du voyage des animaux domestiques est fixée à huit heures pour les espèces bovine, ovine, caprine, porcine et les équidés domestiques et à quatre heures pour les volailles, les oiseaux domestiques et les lapins domestiques.
« Par dérogation, une autorisation préalable peut être délivrée pour un voyage d’une durée supérieure, dans une limite maximale de douze heures de transport, par un vétérinaire qui atteste de la capacité des animaux à réaliser ce voyage sans risque d’être blessés ou de subir des souffrances inutiles.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
L’amendement n° 397 rectifié quater n’est pas soutenu.
La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 513 rectifié.
M. Joël Labbé. Cet amendement vise à encadrer les durées de transport des animaux sur le territoire français, en les fixant à huit heures pour les espèces bovine, ovine, caprine et porcine, et à quatre heures pour les volailles et les lapins.
Ce sujet est essentiel à un double titre : pour le bien-être des animaux, mais aussi – je le répète – parce qu’il nous faut sortir des absurdités liées à la mondialisation de l’alimentation.
Est-il logique de transporter pendant plus de douze heures des animaux vivants, alors que nous pouvons relocaliser les productions au bénéfice des consommateurs, de l’environnement, de l’économie locale et des éleveurs ou des paysans ?
Pourquoi infliger inutilement des conditions de transport difficiles aux animaux ? En parallèle, on abandonne le soutien aux petits abattoirs de proximité qui, nous le savons tous, sont en grande difficulté, lorsqu’ils existent encore ! Je défendrai d’ailleurs un amendement sur ce sujet ultérieurement.
J’ose espérer que le présent amendement fera l’objet d’un consensus. Il est d’ores et déjà très équilibré, puisqu’il prévoit une durée de transport qui peut aller, avec dérogation, jusqu’à douze heures, si un vétérinaire donne un avis favorable. Il est également compatible avec le droit européen, lequel ne fait pas obstacle à d’éventuelles mesures nationales plus contraignantes visant à améliorer le bien-être des animaux au cours des transports se déroulant entièrement sur le territoire d’un État membre, ou pour les transports maritimes au départ du territoire d’un État membre.
Par ailleurs, un certain nombre d’États membres demandent à ce que soient renforcées les exigences en matière de limitation de la durée des transports. C’est le cas de l’Allemagne, du Danemark, de la Belgique, des Pays-Bas, qui ont porté cette demande lors du Conseil européen du 15 novembre 2016.
La France ne sera donc pas isolée si elle adopte une telle position. On parlait précédemment des demandes et des attentes sociétales : cela en fait partie.
M. le président. L’amendement n° 113 rectifié sexies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel, de Belenet et Paul, Mme Goy-Chavent et M. Daubresse, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Pour les transports d’animaux se déroulant entièrement sur le territoire français, la durée maximale de voyage des animaux domestiques est fixée à seize heures pour les espèces bovine, ovine, caprine, porcine et les équidés domestiques et à huit heures pour les volailles, les oiseaux domestiques et les lapins domestiques.
« Par dérogation, une autorisation préalable peut être délivrée pour un voyage d’une durée supérieure, dans une limite maximale de douze heures de transport, par un vétérinaire qui atteste de la capacité des animaux à réaliser ce voyage sans risque d’être blessés ou de subir des souffrances inutiles.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement vise à limiter la durée maximale de transport des animaux vivants.
Le règlement européen n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes réglemente le transport des animaux vivants entre les pays de l’Union européenne et définit les modalités des contrôles opérés à l’entrée ou à la sortie de celle-ci.
Ce règlement ne fixe aucune limitation de durée maximale de transport, mais uniquement des limites de temps de route successifs : 29 heures pour les bovins, ovins et caprins, 24 heures pour les chevaux et pour les porcs, 19 heures pour les animaux non sevrés. Au-delà, les animaux doivent être déchargés, alimentés, abreuvés et bénéficier d’un temps de repos de 24 heures avant de reprendre la route.
Chaque État membre de l’Union européenne est soumis à l’application de ce règlement. Cependant, l’article 1er du règlement prévoit que ce dernier « ne fait pas obstacle à d’éventuelles mesures nationales plus contraignantes visant à améliorer le bien-être des animaux au cours des transports se déroulant entièrement sur le territoire d’un État membre ou pour les transports maritimes au départ du territoire d’un État membre ».
Depuis plusieurs années, les ONG de protection des animaux dénoncent régulièrement, en s’appuyant sur des enquêtes détaillées, des conditions de transport non compatibles avec la protection minimale des animaux. Un des problèmes les plus récurrents est la durée des transports. Cet amendement vise donc à combler ce vide juridique.
Sources de stress, de blessures, de douleurs et de souffrances, les transports peuvent couvrir des distances de plus de 3 000 kilomètres et durer plusieurs jours. Selon un rapport de l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, paru en 2004, après quelques heures le bien-être des animaux se détériore sévèrement.
En 2012, le Parlement européen s’était d’ores et déjà prononcé pour une limitation à 8 heures de la durée de transport des animaux destinés à l’abattage, appuyé par une pétition signée par plus d’un million de citoyens européens.
La Fédération des vétérinaires d’Europe soulignait en septembre 2016 « les graves déficiences subsistant lors de l’exportation des bovins […] conduisant à la souffrance, l’épuisement et parfois même la mort des animaux », appelant à « décourager autant que possible les transports longues distances », à « remplacer le transport d’animaux vivants par le transport des carcasses » et déclarant, en conclusion, que « les animaux devraient être élevés aussi près que possible des lieux où ils sont nés et abattus aussi près que possible de leur lieu de production ».
Par ailleurs, un certain nombre d’États membres demandent aujourd’hui une révision du règlement n° 1/2005 précité afin de renforcer les exigences sur la limitation de la durée des transports. C’est ainsi le cas de la Suède, appuyée par l’Allemagne, le Danemark, la Belgique, l’Autriche et les Pays-Bas, qui a porté cette demande lors du Conseil européen du 15 novembre 2016, en affirmant qu’« afin d’améliorer le bien-être animal, il est crucial de réexaminer les dispositions [du règlement n° 1/2005], notamment sur les temps de parcours ».
M. le président. L’amendement n° 410 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Lienemann et Conway-Mouret, M. Devinaz, Mme Préville et M. Manable, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 411 rectifié ter, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Conway-Mouret et Lienemann, M. Devinaz et Mme Préville, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements visent à limiter la durée de transport des animaux vivants, pour les transports se déroulant exclusivement sur le territoire français.
Or, vous l’avez dit, mes chers collègues, les règles applicables en matière de transport sont harmonisées au niveau européen : elles fixent déjà un certain nombre de prescriptions, qui peuvent toujours paraître insuffisantes aux uns ou aux autres.
À titre d’information, les animaux ne peuvent voyager plus de 8 heures, sauf si le moyen de transport remplit toute une série de conditions très précises.
Je rappelle, par ailleurs, que l’article 13 du projet de loi a étendu le délit de maltraitance au transport. Nous avons doublé les sanctions et permis aux associations de se porter partie civile en cas d’infraction constatée.
J’ajoute, enfin, qu’imposer une règle, même pertinente, sur le seul territoire français n’aurait au final que peu d’intérêt, ces sujets devant être traités à l’échelle européenne.
Pour toutes ces raisons, l’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Nous sommes là en pleine surtransposition, puisque le transport des animaux est encadré par une réglementation européenne.
Pour autant, nous pouvons travailler sur des cas pour lesquels il est possible d’améliorer les conditions de transport des animaux. Je pense, par exemple, aux femelles gravides aux deux tiers de la gestation : nous pouvons soit prévoir des arrêts, soit refuser de donner des autorisations de transport pour les femelles à ce stade de la gestation.
Mais, pour le reste, faisons attention : en adoptant des amendements comme ceux-ci sur la limitation de la durée du transport d’animaux vivants, vous tuez le Salon de l’agriculture ! En effet, comme il faut bien évidemment plus d’une dizaine d’heures en camion pour rejoindre Paris depuis un territoire très éloigné comme la Savoie ou le fond du Pays basque, il ne sera plus possible de transporter les animaux pour venir participer à cette grande vitrine internationale qu’on appelle la ferme France.
C’est pourquoi nous avons veillé, dans le plan d’action prioritaire en faveur du « bien-être animal », à faire en sorte, pour ce qui concerne les conditions de transport, d’assurer le bien-être des animaux, et à permettre aux associations de se porter partie civile après des contrôles officiels relevant des manquements au bien-être animal.
J’émets donc un avis défavorable sur ces amendements, qui font de la surtransposition. Un travail est à faire sur les femelles gravides aux deux tiers de la gestation, car cela semble être une mesure de bon sens. Mais, encore une fois, il faut faire attention à ne pas limiter le transport pour le reste des animaux vivants. J’ai pris l’exemple du Salon de l’agriculture,…
M. Didier Guillaume. C’est un bon exemple !
M. Stéphane Travert, ministre. … mais je pense aussi au transport d’animaux vivants vers d’autres pays pour lesquels les temps de transport sont un peu plus longs. Il faut bien évidemment prendre toutes les précautions, mais aussi veiller à ne pas tuer des pans entiers de notre économie tournés vers l’exportation ni les grands rassemblements ou rendez-vous comme le Salon de l’agriculture.
M. Didier Guillaume. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Monsieur le ministre, je voudrais vous poser deux questions.
J’ai assisté hier matin, avec quelques-uns de nos collègues parlementaires, à un colloque traitant de ces questions. Le représentant des transporteurs qui était présent – il était d’ailleurs très intéressant de l’entendre – nous a dit que la réglementation sur le temps de travail des chauffeurs était incompatible avec celle sur le transport des animaux vivants. Il nous a en outre indiqué qu’il alertait l’administration depuis, de mémoire, plus de dix ans sur ce sujet sans avoir eu de réponse.
Je voudrais savoir si cette question vous avait été communiquée et ce qu’en pense l’administration. Je n’ai pas eu le temps, depuis hier, de vérifier ces éléments d’un point de vue technique, mais il faut nous interroger sur l’incompatibilité entre les deux réglementations, qui conduit, semble-t-il, au non-respect de l’une des deux.
Ensuite, j’entends bien tout ce qu’on nous dit sur les améliorations possibles et les contraintes qui s’imposent aux uns et aux autres en matière de transport, mais j’aimerais connaître les moyens de contrôle réellement mis en œuvre par l’administration.
C’est une bonne chose d’édicter un certain nombre de règles, mais on est tout de même beaucoup plus rassuré quand des contrôles réguliers et efficaces confirment que tout se passe bien. Pour tout vous dire, ce n’est pas ce que nous avons entendu encore récemment.
Je souhaiterais que vous puissiez, monsieur le ministre, si ce n’est aujourd’hui, du moins plus tard – car j’imagine bien qu’un certain nombre de vérifications doivent être faites –, nous apporter des éléments de précision sur ces deux questions.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Monsieur le sénateur, vous avez raison de poser la question des temps de transport des animaux et des temps de conduite pour les chauffeurs.
Vous savez que les temps de conduite sont contrôlés par la police et la gendarmerie grâce au disque. Quant aux temps de transport des animaux, ils le sont par la DGAL, la direction générale de l’alimentation. Un travail est donc effectué de ce côté-là.
La question que vous soulevez nous est régulièrement posée : c’est la raison pour laquelle des contrôles sont effectués. Vous devez voir comme moi, si vous voyagez souvent, des camions de transport d’animaux, de volailles, arrêtés pour permettre le contrôle, à la fois, du temps de route du chauffeur avec la vérification du disque et de la durée de transport entre le lieu de départ et la destination pour les animaux.
Aujourd’hui, dans les départements, 3 965 agents travaillent à ces contrôles pour toute la chaîne alimentaire, auxquels s’ajoutent 535 agents dans les régions.
J’ajouterai que, pour toutes les questions sanitaires, qui préoccupent aujourd’hui la société, nous avons prévu une augmentation de 12 millions d’euros dans le budget pour 2018, parce que nous considérons que ces sujets sont absolument essentiels. Parmi ces questions figurent les contrôles relatifs au bien-être animal. Nous allons encore renforcer, au travers de ce projet de loi, les moyens dont nous disposons pour travailler à cette question.
J’espère avoir répondu à vos questions, monsieur le sénateur.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 208 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 113 rectifié sexies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 599 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Pour les transports d’animaux au départ du territoire français et à destination de pays tiers de l’Union européenne, les conditions particulières suivantes s’appliquent :
« 1° Un accord de partenariat entre la France et le pays tiers de destination encadre la protection des animaux durant le transport, l’abattage et les opérations annexes. Il encadre l’application des recommandations relatives au bien-être animal durant l’élevage, le transport et l’abattage, de l’Organisation mondiale de la santé animale dans le pays de destination ;
« 2° L’organisateur de transport dispose d’un certificat pour l’exportation délivré par les autorités compétentes permettant de garantir que le traitement et l’abattage des animaux exportés au sein du pays importateur sont conformes aux recommandations de l’Organisation mondiale de la santé animale relatives au bien-être animal jusqu’au point d’abattage. L’organisateur de transport doit justifier d’une traçabilité complète de la chaîne logistique dans le pays de destination, du transport à l’abattage des animaux exportés, appuyé d’un audit indépendant des standards de bien-être animal appliqués.
« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement, déposé par Mme Rossignol, tend à introduire un encadrement spécifique des exportations d’animaux vivants vers des pays hors de l’Union européenne, par l’obligation d’introduire dans les accords de partenariat avec les pays de destination des clauses encadrant la protection des animaux dans ces pays, ainsi que la mise en place d’un certificat à l’export sur le modèle australien.
En effet, chaque année, environ 3 millions d’animaux sont exportés de l’Union européenne vers des pays tiers, notamment vers l’Afrique et le Moyen-Orient. La France figure parmi les premiers exportateurs, principalement vers les pays d’Afrique du Nord.
La réglementation européenne relative à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes s’applique théoriquement aux animaux même lorsqu’ils ont quitté l’Union européenne.
Pourtant, une fois franchies les frontières de l’Europe, la réalité est tout autre : les voyages peuvent durer jusqu’à 14 jours dans des conditions d’extrême densité de chargement, sous des chaleurs dépassant parfois les 40 degrés, sans temps de repos approprié, ni suffisamment de nourriture ou d’eau ; l’engraissement et l’abattage à l’arrivée se déroulent dans des conditions qui, pour la plupart, sont contraires aux standards internationaux de l’Organisation mondiale de la santé animale, l’OIE.
Depuis 2011, à la suite de nombreux scandales relatifs aux conditions de traitement des animaux dans les pays de destination, l’Australie a mis en place un système assurantiel, qui exige des exportateurs de garantir que les animaux seront traités à l’arrivée en conformité avec les recommandations de l’OIE sur le bien-être animal.
Le présent amendement s’inspire de l’exemple australien, en prévoyant un encadrement des règles d’exportation des animaux vivants vers des pays hors de l’Union européenne.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Il s’agirait d’encadrer les exportations vers des pays tiers hors de l’Union européenne par l’obligation de conclure des accords de partenariat avec les pays de destination et de disposer d’un certificat à l’export, afin de s’assurer de la protection de ces animaux dans ces pays de destination.
Là encore, si elle n’est pas négociée dans le cadre d’accords commerciaux multilatéraux, une telle obligation serait particulièrement discriminante pour les seules exportations françaises et, par ailleurs, peu contrôlable.
L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Les autorités françaises ne peuvent pas imposer aux pays tiers les actions qu’ils doivent mener dans ce domaine, mais elles s’appuient sur plusieurs leviers d’action aux niveaux international et européen.
Des dispositifs de communication ont été développés avec des pays tiers, comme Israël, pour échanger sur l’état général des animaux lors du déchargement dans le pays importateur. La France développe de nombreuses coopérations avec les pays tiers pour partager ses expériences dans les domaines de la sécurité sanitaire, de la santé et de la protection animales.
Au niveau européen, les autorités françaises veillent à ce que le bien-être animal soit bien couvert dans le cadre des négociations menées par la Commission. S’agissant des accords de libre-échange entre l’Union et les pays tiers, et dans chaque négociation, il s’agit de mettre en place une coopération internationale se matérialisant par des échanges d’informations et d’expertises, qui permettent de promouvoir et de développer des standards tant internationaux qu’européens. Un tel objectif a été rappelé dans le plan d’action de l’accord économique et commercial global avec le Canada.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 599 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 409 rectifié ter, présenté par Mmes Rossignol, Conway-Mouret, Lienemann et Jasmin, MM. Vallini et Devinaz, Mmes G. Jourda et Préville et M. Jomier, n’est pas soutenu, non plus que l’amendement n° 408 rectifié ter, présenté par Mmes Rossignol, Jasmin et Lienemann, M. Vallini, Mme Conway-Mouret, M. Devinaz, Mmes Préville et G. Jourda et M. Jomier.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 598 rectifié, présenté par Mme Rossignol, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – S’agissant de l’exploitation des couvoirs industriels aux fins de produire des poules pondeuses, les opérations de sexage des femelles s’effectuent de façon prénatale par la mise en œuvre des techniques de spectrométrie. Le recours à tout dispositif mécanique destiné à entraîner la mort de poussins mâles par broyage est interdit.
« Les établissements exploités sur le modèle d’un sexage après éclosion et équipés d’un dispositif mécanique de mise à mort avant l’entrée en vigueur du présent article bénéficient d’une dérogation les autorisant à les utiliser jusqu’au 31 décembre 2021. »
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement, déposé, comme les précédents, par Mme Rossignol, vise à interdire le recours à tout dispositif mécanique destiné à entraîner la mort de poussins mâles par broyage. Les couvoirs industriels produisent 90 millions de poussins chaque année aux fins de sélectionner des poules de races pondeuses. À l’éclosion, 50 millions d’entre eux s’avèrent être des poussins mâles et sont donc broyés vivants.
Si un arrêté du 12 décembre 1997 autorise l’utilisation de ces dispositifs mécaniques de broyage, il est temps d’affirmer que faire naître des animaux pour les tuer à leur naissance n’est ni éthiquement acceptable ni économiquement rentable.
M. le président. L’amendement n° 398 rectifié quater, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Conway-Mouret, Lienemann et Monier, MM. Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Manable et Jomier, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 214 rectifié, présenté par Mmes Benbassa et Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 214-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2020, le gazage et le broyage des poussins mâles et des canetons femelles sont interdits. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements restant en discussion ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces deux amendements visent à interdire le broyage des poussins mâles dans les élevages de poules pondeuses d’ici à 2022, pour l’amendement n° 598 rectifié, et des poussins mâles et des canetons femelles d’ici à 2020, pour l’amendement n° 214 rectifié.
Nous sommes tous particulièrement mal à l’aise face à ces pratiques, mais il n’existe pas, à ce jour, de méthodes alternatives qui soient parfaitement validées et industrialisables à court terme. Nous sommes néanmoins vigilants sur ce sujet, que nous avons pu évoquer, à l’occasion des auditions, avec les industriels porteurs de nouveaux projets. Les travaux de recherche progressent, d’ailleurs financés par l’État. Lors des débats à l’Assemblée nationale, M. le ministre a ainsi rappelé que la France finançait à hauteur de 4,3 millions d’euros un projet de recherche sur le sexage des embryons, malheureusement non encore abouti à ce stade.
Dès que nous disposerons de cette solution alternative, il nous faudra interdire sans délai le broyage d’animaux vivants, dont chacun convient de la brutalité. D’ici là, je suis contrainte d’émettre un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. S’il y a un principe sur lequel nous pouvons être d’accord, c’est qu’il faut trouver une solution de remplacement suffisamment pertinente, qu’aucun pays n’a encore trouvée à ce stade.
En Allemagne, a été développée une technique, la spectrométrie, qui suppose de faire un trou dans chaque œuf. Nous avons conclu une convention avec une société française, à hauteur de 4,3 millions d’euros et dont le terme a été fixé à 2024, pour parfaire cette technique. Parce que nous avons besoin de temps pour y travailler, parce que la recherche et l’innovation, portées par les instituts techniques, n’ont pas suffisamment avancé, il convient de ne pas inscrire dès à présent de telles dispositions dans la loi.
Mme la rapporteur l’a dit, il est compréhensible que ces pratiques mettent mal à l’aise un grand nombre de personnes. Mais il convient de raisonner sur le temps long, pour trouver des processus pertinents. Un prototype a été mis au point. La phase de développement industriel va suivre et passera par le suivi des plans de filière. Il revient en effet à chaque filière concernée de travailler sur ces questions.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 213 rectifié est présenté par Mmes Benbassa et Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 407 rectifié ter est présenté par Mmes Rossignol, Lienemann, Jasmin, Conway-Mouret et Monier, MM. Vallini, Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Manable et Jomier.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 214-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2020, la caudectomie des porcelets est interdite. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 213 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 407 rectifié ter n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Appelons les choses par leur nom, nous parlons ici de la caudectomie des porcelets. La coupe systématique des queues est déjà interdite par la réglementation communautaire : la section partielle de la queue peut être réalisée, non sur une base de routine, « mais uniquement lorsqu’il existe des preuves que des blessures causées aux mamelles des truies ou aux oreilles ou aux queues d’autres porcs ont eu lieu » et après que d’autres mesures ont été mises en œuvre.
Il est nécessaire de préserver cette possibilité en cas de besoin et de responsabiliser les professionnels sur le cadre strict de la réglementation. J’ai souhaité, dans le droit-fil de la stratégie en faveur du bien-être animal, que puissent être identifiées les causes de stress dans les élevages, le cannibalisme étant souvent une conséquence du stress. Par ailleurs, j’attends que cette question soit traitée à l’occasion des expérimentations, que je compte mener avec la filière, sur l’utilisation d’analgésiques et d’anesthésiques pour gérer la douleur.
C’est pourquoi je suis défavorable à une telle interdiction et, donc, à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.
M. Joël Labbé. Sans vouloir prolonger le débat, je rappellerai que couper systématiquement la queue des cochons est le résultat des élevages « concentrationnaires », il n’y a pas d’autres mots. On a évoqué le broyage de 50 millions de poussins mâles par an. Tout cela est inadmissible : ce n’est pas humain ! Je comprends ce qui a été dit, et, moi non plus, je n’ai pas de solution toute faite. Mais il faut nous donner des perspectives pour sortir de l’impasse actuelle, ce qui implique d’en finir avec l’hyperconcentration. Là encore, la relocalisation de l’élevage et de l’alimentation constituerait déjà une bonne partie de la réponse.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 212 rectifié est présenté par Mmes Benbassa et Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 400 rectifié quater est présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Monier, Jasmin, Conway-Mouret et Lienemann, MM. Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Jomier et Manable.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 214-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« À compter du 1er janvier 2020, la castration à vif des porcelets est interdite. »
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 212 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 400 rectifié quater n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement porte sur la pratique de la castration à vif des porcelets. Pour les mêmes motifs que sur les amendements précédents, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Il existe aujourd’hui plusieurs méthodes alternatives à la castration à vif des porcelets. En l’absence de castration, il est possible de mettre en place un dispositif de sélection à l’abattoir par une personne chargée de détecter et de retirer les carcasses malodorantes. Une telle mesure présente tout de même quelques limites, car un employé de l’abattoir passera son temps à renifler les carcasses de porcs : là aussi, appelons les choses par leur nom !
Sinon, on peut envisager la castration par immunothérapie, donc par injection. Cela n’est pas sans poser problème, ne serait-ce qu’au consommateur, lequel n’est pas forcément disposé à acheter de la viande de porc provenant d’un animal à qui l’on a fait une injection particulière en vue de sa castration.
Enfin, il existe la castration avec des analgésiques par un acte vétérinaire. C’est la voie que certains pays ont choisie, faisant intervenir les vétérinaires dans les élevages. Le dispositif représente un coût économique pour les éleveurs et une charge importante pour les vétérinaires. Il faudrait donc pouvoir l’évaluer.
Je souhaite poursuivre le travail dans ce domaine. Nous avons convenu, avec la filière porcine, parce que c’est inscrit dans tous les plans de filière et que nous collaborons très régulièrement sur le fond des sujets, que chacune de ces méthodes puisse faire l’objet d’une expérimentation et être testée en vue, éventuellement, de faire évoluer la réglementation en la matière.
J’ai également saisi le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, le CGAAER, sur la gestion de la douleur et l’utilisation des anesthésiques et des analgésiques dans les élevages. Son retour est attendu pour novembre 2018. Dans l’attente de ces expérimentations et du rapport, je suis défavorable à cet amendement, qu’il serait prématuré d’adopter compte tenu de ce que je viens d’expliquer.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Vouloir sélectionner les carcasses à l’abattoir en éliminant celles qui dégagent une odeur désagréable ne permettant pas leur commercialisation est un procédé tout de même assez choquant. Comment justifier d’avoir produit autant de viande pour finalement la détruire ? Cela me paraît très peu défendable.
En ce qui concerne la castration, je vous ai écouté avec intérêt, monsieur le ministre. Des solutions sont à l’étude. Il faut faire des progrès, mais en respectant l’économie des élevages, et c’est là qu’est la difficulté. On peut raisonnablement espérer que le travail commun engagé entre la filière et l’administration aboutisse à quelques solutions.
Monsieur Labbé, je comprends que la caudectomie des porcelets puisse choquer, mais, je le dis franchement, elle est très loin d’être la pratique la plus répréhensible et la plus choquante parmi tout le panel des interventions existantes en matière d’élevage. S’il ne restait que ce problème, on pourrait malheureusement s’en contenter, surtout, cela a été rappelé, que cette technique n’est autorisée que quand aucune autre n’est applicable.
M. le président. L’amendement n° 314 rectifié bis, présenté par M. Longeot, Mme Vullien, MM. Détraigne, Henno, Janssens, Moga et Louault, Mme Dindar, M. Mizzon, Mme Billon, MM. Vanlerenberghe et Prince, Mme Gatel et MM. Bockel, L. Hervé, Capo-Canellas, Canevet et Cigolotti, n’est pas soutenu.
Article 13 bis A
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-11 ainsi rétabli :
« Art. L. 214-11. – La mise en production de tout nouveau bâtiment d’élevage de poules pondeuses élevées en cages est interdite à compter de l’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 395 rectifié ter est présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Lienemann, Conway-Mouret, Meunier et Monier, M. Devinaz, Mmes Préville et G. Jourda et M. Jomier.
L’amendement n° 439 rectifié nonies est présenté par Mmes Boulay-Espéronnier, Delmont-Koropoulis et Bruguière, M. Pellevat, Mme Deromedi, M. Rapin, Mmes Garriaud-Maylam, Lassarade et Renaud-Garabedian, MM. Bansard et Daubresse, Mmes Goy-Chavent et Lanfranchi Dorgal et MM. Sido et Laménie.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – L’usage de système en cage est interdit pour tout établissement d’élevage de poules pondeuses.
« Les établissements qui ont mis en place un système d’élevage en cage avant l’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous sont autorisés à utiliser ces systèmes d’élevage jusqu’au 31 décembre 2021 pour la commercialisation d’œufs coquilles et jusqu’au 31 décembre 2024 pour tout autre mode de commercialisation.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article sur la base de la définition des systèmes alternatifs à la cage aménagée contenue dans la directive 1999/74/CE du Conseil du 19 juillet 1999 établissant les normes minimales relatives à la protection des poules pondeuses. »
L’amendement n° 395 rectifié ter n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 439 rectifié nonies.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. L’utilisation de systèmes d’élevage en cage pour les poules pondeuses est aujourd’hui perçue de façon négative, affaiblissant la confiance des consommateurs dans les filières d’élevage françaises. Et pour cause, dans certains élevages, les poules sont détenues dans des conditions incompatibles avec les impératifs biologiques de leur espèce, contrevenant ainsi aux dispositions de l’article L. 214-1 du code rural et de la pêche maritime. Les consommateurs sont non seulement moins confiants, mais aussi plus inquiets.
Cet amendement vise donc à traduire dans la législation française le remplacement, à l’échéance de 2022, conformément à une promesse du président Macron, de l’élevage en batterie des poules pondeuses au profit des élevages alternatifs. Évidemment, un échéancier progressif est prévu, de sorte que, en 2025, tous les œufs coquilles soient issus d’élevages alternatifs. Un accompagnement financier devra être mis en place, afin de soutenir les producteurs dans cette évolution de leurs systèmes d’élevage.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission, qui souhaite s’appuyer davantage sur les engagements de la filière de développer des modes d’élevage alternatifs et de parvenir à 50 % d’œufs coquilles issus de ces derniers à l’horizon de 2022. La commission émet donc un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Madame la sénatrice, l’engagement du Président de la République, qu’il a pris pendant la campagne, est de faire en sorte que 50 % des œufs coquilles vendus aux consommateurs soient issus de modes d’élevage alternatifs à la cage, c’est-à-dire issus d’élevages en plein air ou au sol.
Pour cela, nous travaillons avec la filière, laquelle, dans le cadre de son plan de filière qu’elle nous a présenté au mois de décembre dernier, a l’ambition de parvenir à ce que plus de la moitié des œufs soient produits suivant un système alternatif à la cage à l’horizon de 2022. Cela permettra notamment que la totalité des œufs coquilles vendus aux consommateurs soient issus de volailles élevées dans le cadre desdits systèmes de production alternatifs à la cage. À cet effet, l’article 13 bis A prévoit que tout nouveau bâtiment d’élevage devra être destiné à ces modes d’élevage alternatifs. À partir du moment où la présente loi sera promulguée, il sera interdit de construire un bâtiment d’élevage de poules pondeuses élevées en cage. Celles-ci devront être élevées soit en plein air, soit au sol.
Souvenez-vous, en 2012, la réglementation européenne avait évolué, à la suite d’une demande très forte de faire agrandir les cages, justement au regard de cette question du bien-être animal. L’ensemble des exploitants ayant ainsi rénové leurs poulaillers ont consenti des investissements très lourds, de plusieurs millions d’euros, lesquels doivent pouvoir être rentabilisés dans le temps.
Pour cette raison, nous avons décidé, non pas d’interdire purement et simplement l’élevage en cage, mais de le faire évoluer au fur et à mesure de la construction de nouveaux poulaillers. Les éleveurs qui ont investi en 2012 dans l’agrandissement de leurs cages auront à faire des investissements supplémentaires dans quelques années. Tout cela va venir très vite, l’évolution dans ce domaine induisant une rotation des systèmes d’élevage relativement rapide. À ce moment-là, nous pourrons considérer, in fine, que l’élevage en cage aura pratiquement disparu. Dans 80 % des cas, les travaux de rénovation des bâtiments engagés en 2012 ne sont pas encore payés ; or les éleveurs ont naturellement besoin de gagner leur vie.
Heureusement, la filière œuf française fonctionne très bien, garantissant une production d’œufs français totalement autonome et de qualité. Cela nous donne quelques marges de manœuvre pour accompagner les investissements de la filière. Nous avons trouvé un accord avec cette dernière sur l’engagement à tenir ; elle partage notre objectif. Nous attendons que la loi soit promulguée pour mettre la procédure en œuvre. Sur ce sujet, nous avançons, et dans le bon sens.
J’émets donc un avis défavorable sur l’amendement.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour explication de vote.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 439 rectifié nonies est retiré.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L’amendement n° 203 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 512 rectifié bis est présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, A. Bertrand et Castelli, Mme Costes, MM. Corbisez et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Gabouty, Gold et Guillaume, Mmes Jouve et Laborde et MM. Léonhardt, Menonville et Vall.
L’amendement n° 632 est présenté par Mme Schillinger, MM. de Belenet, Théophile et les membres du groupe La République En Marche.
L’amendement n° 744 est présenté par le Gouvernement.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
nouveau bâtiment
par les mots :
bâtiment nouveau ou réaménagé
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 203 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. J’observe des métamorphoses extrêmement rapides dans le comportement des consommateurs. Là où je fais mes courses – j’ai bien en tête le rayonnage des œufs –, les seuls œufs achetés sont ceux qui sont marqués du code 0 ou du code 1, point final. Les consommateurs n’achètent plus les autres parce que, quand ils consomment un œuf, ils ont en tête la malheureuse poule dans sa cage, ce qui les bloque.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Tant mieux !
M. Pierre Ouzoulias. Est-ce positif ou stupide ? Je ne sais pas, mais c’est la réalité. On peut continuer à défendre certaines pratiques, mais les consommateurs ont fait leur choix et, sincèrement, je pense que celui-ci est définitif.
De temps en temps, il y a donc des combats d’arrière-garde qui ne méritent pas d’être menés ; il faut adapter les méthodes et écouter un peu les consommateurs parce que de toute façon, in fine, ce sont eux qui décideront.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 512 rectifié bis.
M. Joël Labbé. Je veux préciser que cet amendement vise à revenir à la rédaction des députés ; dans le texte qui nous est parvenu de l’Assemblée nationale, il n’y avait pas que des choses qui n’allaient pas. C’est le cas, selon moi, de cette disposition, qui mentionne les bâtiments nouveaux et les bâtiments réaménagés.
On parle bien là de réaménagements ; un éleveur dont le bâtiment doit être rénové est obligé de s’inscrire dans le nouveau système. Cette mesure est d’ailleurs destinée à leur éviter d’investir dans des domaines qui les mèneraient dans une impasse.
Cet amendement est mesuré, équilibré, très défendable – de toute façon, les députés y reviendront –, donc je souhaite qu’il soit adopté.
M. le président. La parole est à M. Dominique Théophile, pour présenter l’amendement n° 632.
M. Dominique Théophile. Cet amendement a été défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 744.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements sont contraires à la position de la commission, qui a réintroduit dans le texte la possibilité de réaménagements ; il n’y a pas lieu d’interdire tout réaménagement d’un bâtiment existant. En effet, les filières se sont engagées à basculer dans des modes alternatifs d’élevage, elles ont bien entendu les demandes sociétales et elles sont prêtes à y répondre.
En outre, une telle interdiction pourrait s’avérer contre-productive, y compris pour le bien-être animal, car on peut tout à fait imaginer qu’un producteur soit amené à faire des aménagements accessoires, mais bénéfiques aux animaux.
En pratique, le recentrage de l’interdiction sur les bâtiments nouveaux n’affaiblit nullement la portée de la disposition, dès lors que, au vu des perspectives de marché, aucun producteur ne trouverait aujourd’hui un intérêt économique à réaménager son bâtiment dans l’objectif, non pas de répondre à une difficulté ponctuelle ou d’améliorer le bien-être des animaux, mais d’augmenter sa production d’œufs en cage ou de démarrer une nouvelle production.
Il s’agit donc d’accompagner ces éleveurs, qui, vous l’avez dit, monsieur le ministre, ont été amenés à faire beaucoup d’investissements ces dernières années, et qui ont répondu chaque fois aux sollicitations sociétales. Il faut, j’y insiste, les accompagner dans cette phase de transition.
La commission émet donc un avis défavorable sur ces amendements identiques.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. L’avis de la commission va à l’encontre de ce qu’a décidé la filière, dont nous avons reçu les représentants à de nombreuses reprises.
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Nous aussi !
M. Stéphane Travert, ministre. Bien sûr, et c’est bien normal !
Nous leur avons aussi adressé un courrier, que nous avions rédigé avec eux, afin de rappeler nos engagements et ceux qu’ils peuvent prendre, notamment sur la question des réaménagements de poulailler.
Il ne faut pas baisser la garde pour ce qui concerne ces réaménagements ; c’est une autre question qui se pose et il est dommage que la commission n’aille pas dans le sens du travail de la filière. Néanmoins, elle en a parfaitement le droit, elle est totalement libre de ses choix.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Je l’avoue, j’ai un peu de mal à trancher entre les arguments de la commission et ceux du ministre, et il faudrait sans doute plus de deux minutes trente pour voir clair dans cette affaire…
En revanche, il y a une chose dont je suis absolument certain : je me souviens précisément, comme si c’était hier, de quelques visites d’inspection que j’ai faites dans un poulailler de ponte, donc d’élevage de poules en cage, voilà vingt-cinq ans. Je m’en souviens encore parce que c’étaient des conditions d’élevage que j’avais trouvées abominables – pourtant j’ai pas mal de recul sur ces questions, j’ai visité un certain nombre d’élevages pendant et après mes études, puis occasionnellement. Franchement, l’élevage de poules en cage dans ces conditions est indéfendable, à tout point de vue.
Donc, si vous nous dites, monsieur le ministre, que la chose est réglée avec la filière et que l’objectif est de faire disparaître ce mode d’élevage, j’entends cet engagement. Nous serons tout de même attentifs au calendrier, puisque c’est un élément officiel qui nous est donné.
En ce qui concerne ces amendements, je reste perplexe, donc je m’abstiendrai.
M. le président. La parole est à M. Didier Guillaume, pour explication de vote.
M. Didier Guillaume. J’ai bien entendu tous les arguments, je me retrouve tout à fait dans ce qu’a dit le ministre.
Ces amendements ne sont pas coercitifs. L’éleveur qui a son bâtiment et qui n’y fait pas de travaux peut poursuivre son activité ; il n’y a aucun problème, on ne lui imposera rien, il restera dans une filière qui est ce qu’elle est.
Je connais bien, moi aussi, la filière avicole ; je rencontre souvent ses membres, et son président n’est pas loin de chez moi. Ces éleveurs ne demandent qu’à s’améliorer, mais tout cela coûte cher.
En revanche, il s’agit, au travers de ces amendements, d’interdire tout nouveau bâtiment de poules pondeuses en cage – là-dessus, je pense qu’il y a unanimité –,…
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Bien sûr !
M. Didier Guillaume. … et les réaménagements de bâtiment. Évidemment, il s’agit non pas de viser les cas où l’on change une porte, mais ceux où l’on fait un investissement, comme le ministre le disait tout à l’heure.
J’ai bien aimé ce qu’a dit notre ami Pierre Ouzoulias ; la population sait ce qu’elle veut, elle sait ce qu’elle achète comme œufs.
Donc, cette disposition n’est pas coercitive et le Sénat s’honorerait, à mon avis, en envoyant ce signal. Quand la loi sera promulguée, je ne sais pas quand exactement, pour tout réaménagement d’importance, il faudra changer la situation ; à charge pour le ministre de faire avancer de son côté les négociations avec la filière avicole, pour que tout cela entraîne des évolutions.
Nous avons été très consensuels dans ce débat sur le bien-être animal. Je n’ai pas souhaité m’exprimer plus tôt sur les autres sujets, j’ai voté comme la commission et comme le ministre sur tous les amendements, mais il me semble que, sur ceux-ci, il faut y réfléchir un peu, car cela vaut la peine d’envoyer ce signal.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je crois que nous avons la même lecture globale dans cet hémicycle, monsieur le ministre. Je pense ne pas trahir la pensée de Mme la rapporteur en disant que, en réalité, la commission ne souhaite pas exclure le réaménagement global à l’intérieur d’un bâtiment. Ce que nous avons en tête en modifiant le texte de l’Assemblée nationale, c’est la réparation d’un trou dans le toit qui pourrait provoquer un accident, ce sont les réparations à l’intérieur de bâtiments…
M. Didier Guillaume. Bien sûr !
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Je vous propose donc de suivre l’avis de la commission et d’adopter notre nouvelle rédaction, et je pense que l’on trouvera une rédaction alternative en commission mixte paritaire pour exclure la réparation, mais non le réaménagement global du bâtiment. Nous sommes à peu près d’accord, me semble-t-il.
M. le président. La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.
M. Alain Richard. Il me semble que la réponse à cette interrogation n’est pas très compliquée, mais je crains qu’elle ne figure même pas dans le texte de l’Assemblée nationale.
M. Didier Guillaume. Non, en effet !
M. Alain Richard. Il me semble évident que la distinction entre ce qui est un réaménagement en profondeur et ce qui est une réparation doit relever d’un décret qui précise le texte. Il faut donc prévoir quelque part un renvoi au décret.
M. Didier Guillaume. Il faudrait sous-amender l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. L’intervention de Mme la présidente de la commission des affaires économiques correspond à ce que je voulais dire. Il faut vraiment comprendre, monsieur le ministre, que nous sommes tout près d’aboutir. Dans la conception de la commission, présentée par notre rapporteur, il peut même y avoir des réaménagements à l’intérieur du bâtiment qui concernent le bien-être des animaux.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Comme un aérateur.
M. Daniel Gremillet. Il serait dommage que les éleveurs ne puissent pas les réaliser. C’est un point tout simple d’aménagement du bâtiment, de vie à l’intérieur des bâtiments.
Par ailleurs, autre point, vous l’avez évoqué vous-même, monsieur le ministre, la réglementation européenne et française concernant les poules et l’élevage a connu une évolution terrible qui a nécessité des investissements très importants pour les éleveurs. Dans le grand Ouest, notamment, bon nombre d’élevages ont fermé leurs portes parce qu’ils n’étaient pas en capacité de réaliser ces investissements très lourds. Il faut que l’on soit donc en mesure de permettre la viabilité économique des élevages.
Si l’on change les règles du jeu relatives au bien-être animal et aux conditions d’élevage dans l’aviculture, il faut aussi que l’on ait les moyens financiers d’accompagner la filière, sinon plus personne n’investira dans notre pays, et, comme pour d’autres productions, on importera encore un peu plus d’œufs et de volailles.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 203 rectifié, 512 rectifié bis, 632 et 744.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 13 bis A.
(L’article 13 bis A est adopté.)
Article additionnel après l’article 13 bis A
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 399 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Lienemann, Conway-Mouret et Jasmin, M. Devinaz et Mme Préville, n’est pas soutenu.
L’amendement n° 112 rectifié septies, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel, de Belenet et Paul, Mme Goy-Chavent, M. Daubresse et Mme Schillinger, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… - L’usage de système en cage est interdit pour tout établissement d’élevage cunicole.
« Les établissements qui ont mis en place d’autres systèmes d’élevage avant l’entrée en vigueur de la loi n° … du … pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous sont autorisés à utiliser ces logements jusqu’au 31 décembre 2024 pour les lapins d’engraissement et jusqu’au 31 décembre 2029 pour les reproducteurs et le précheptel.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement tend à interdire progressivement l’élevage des lapins en cage.
En France, 37 millions de lapins sont élevés dans des cages grillagées, où l’espace de vie est très restreint – l’équivalent d’une feuille de format A4 par lapin –, source de stress, d’inconfort permanent et de blessures, empêchant l’expression de leurs comportements naturels les plus fondamentaux. La hauteur des cages utilisées est ainsi insuffisante pour que les lapins puissent se relever sur leurs pattes arrière.
Un avis scientifique portant sur l’influence des systèmes actuels de logement et d’élevage sur la santé et le bien-être des lapins domestiques d’élevage, adopté le 11 octobre 2005 par l’Autorité européenne de sécurité des aliments, l’EFSA, a mis en lumière les nombreux problèmes de bien-être animal et de santé qui y sont observés.
L’EFSA souligne en effet que les taux de maladie et de mortalité des lapins élevés en cages sont intrinsèquement hauts, en raison d’une forte exposition aux maladies parasitaires. Plus de dix ans plus tard, les mêmes problèmes perdurent et aucune mesure n’a été prise pour y remédier.
La France, qui est le deuxième pays européen producteur de lapins élevés pour leur viande, ne dispose d’aucune législation sur le bien-être des lapins, contrairement à d’autres pays européens, comme la Belgique, qui interdit l’utilisation de cages, ou l’Allemagne et l’Autriche, qui définissent des standards minimaux.
En mars 2017, le Parlement européen a d’ailleurs adopté une résolution sur l’adoption de normes minimales relatives à la protection des lapins d’élevage, encourageant les éleveurs de lapins à éliminer les cages.
Cet amendement vise donc à mettre en place des standards minimaux de bien-être des animaux en élevage cunicole, en incluant l’interdiction des systèmes en cage au profit des systèmes de parcs collectifs enrichis à compter du 1er janvier 2025 pour les lapins d’engraissement, et du 1er janvier 2030 pour les reproducteurs et le précheptel.
M. le président. L’amendement n° 426 rectifié septies, présenté par Mme Boulay-Espéronnier, M. Danesi, Mmes Garriaud-Maylam, Delmont-Koropoulis, de Cidrac, Goy-Chavent, Deromedi et Lanfranchi Dorgal et M. Sido, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 3 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Tout établissement d’élevage cunicole détient les lapins d’engraissement soit dans des parcs collectifs enrichis et les animaux reproducteurs ainsi que le précheptel dans des conditions respectant l’article L. 214-1 et définies par arrêté du ministre chargé de l’agriculture, soit dans des cages individuelles dont la surface minimale est définie par arrêté ministériel de manière à respecter les impératifs biologiques de l’espèce.
« Les établissements qui ont développé d’autres modes d’élevage avant l’entrée en vigueur du présent article bénéficient d’une dérogation les autorisant à les exploiter jusqu’au 31 décembre 2024 pour les lapins d’engraissement et jusqu’au 31 décembre 2029 pour les reproducteurs et le précheptel.
« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article. »
La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Cet amendement procède du même esprit que l’amendement précédent sur l’élevage avicole ; il faut être logique.
En complément de ce que vient de dire mon collègue, je veux souligner le taux de mortalité très haut des lapins élevés dans ces cages si exiguës – la référence à la feuille de papier A4 est marquante –, puisque 30 % des lapins décèdent avant l’âge de maturité, ce qui représente évidemment un manque à gagner pour les éleveurs.
Autre donnée : alors que la consommation de viande de lapin représente 2 % de la consommation globale de viande en France, l’élevage du lapin représente 10 % des antibiotiques à usage vétérinaire vendus en France. Cela est évidemment dû à la surpopulation.
Alors que la consommation de viande de lapin ne cesse de baisser, un mode d’élevage plus conforme au bien-être animal serait de nature à rassurer le consommateur et à favoriser la filière cunicole.
Vous avez parlé de parcs collectifs enrichis, monsieur Lagourgue, c’est une des solutions possibles. En tout cas, les établissements qui ont développé d’autres modes d’élevage bénéficient d’une dérogation jusqu’au 31 décembre 2024, date portée au 31 décembre 2029 pour les reproducteurs et le précheptel.
M. le président. L’amendement n° 204 rectifié, présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 13 bis A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La mise en production de tout bâtiment nouveau ou réaménagé d’élevage de lapins élevés en cages est interdite à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Après les poules, les lapins… Je vais reprendre ma tenue de paysan.
Le problème ne réside pas dans les clapiers ; j’aime beaucoup nourrir les lapins en clapier, et le principal danger pour eux, c’est le goupil, le renard.
Au travers de cet amendement, nous essayons de limiter les usines à viande, les bâtiments où l’animal est traité comme une réserve de protéines et nourri uniquement à cette fin. C’est catastrophique pour toute la filière et cela jette le discrédit sur l’ensemble de l’élevage de qualité, dans lequel on essaie d’avoir un autre rapport à ce que l’on produit.
Il faut donc, là aussi, envoyer un message et dire qu’il faut, à un moment, passer à autre chose, car cela n’est plus possible.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission propose, plutôt que de procéder par interdiction, de faire confiance aux filières, qui ont pris des engagements forts en la matière. Je le rappelle, le plan de la filière cunicole pour la période 2018-2022 s’engage à faire passer de 1 % à une proportion comprise entre 20 % et 25 % la part de viande de lapin produite dans des élevages alternatifs.
La commission a donc émis un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Je veux appeler l’attention de ceux qui demandent l’interdiction de la cage pour les lapins sur un point : un lapin, hors de sa cage, est tout de suite épris d’une grande liberté, et vous ne le voyez plus… (Sourires.)
M. Pierre Ouzoulias. Un sénateur aussi ! (Nouveaux sourires.)
M. Stéphane Travert, ministre. Cela met donc fin à l’élevage.
Bien évidemment, il y a tout de même un travail à faire si l’on veut conserver les lapins et avoir une filière cunicole digne de ce nom. Or on a une filière sérieuse et un beau plan de filière en la matière. Cette filière a des difficultés, parce que l’on consomme de moins en moins de lapin ; il y a clairement ici un problème d’image. Néanmoins, il y a des débouchés commerciaux à trouver, à travailler. Nous suivons cela de près.
Un travail est mené par convention avec un institut technique pour déterminer ce qui serait le bâtiment du futur pour les lapins. Il faudra maintenir des cages, mais suffisamment aménagées, où l’animal puisse se tenir levé sur ses pattes arrière, où il puisse avoir un espace où se mouvoir.
Ce travail est en cours. Le Gouvernement est soucieux de cette évolution et espère que l’on pourra déterminer le meilleur système permettant de limiter le recours aux cages.
Par conséquent, je suis défavorable à ces amendements, qui ne prennent pas en compte les aspects que nous souhaitons mettre en avant.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. On a changé de catégorie d’animaux, on parle ici de mammifères, des animaux plus évolués, dont le psychisme est plus complexe. Indépendamment de la fragilité particulière du lapin par rapport à l’élevage, cet aspect joue un rôle dans le stress, qui est plus souvent constaté chez ces animaux.
Je suis très intéressé par ce que vous dites, monsieur le ministre. On continuera d’élever le lapin en cage, évidemment, notamment parce qu’il faut le protéger des vecteurs extérieurs de maladies, qui déciment les élevages – notamment la myxomatose, mais aussi la maladie hémorragique du lapin. On ne peut pas envisager raisonnablement d’élever des lapins en extérieur, cela n’a pas de sens, on les élèvera toujours dans des cages.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Dans des clapiers !
M. Arnaud Bazin. Cela dit, entre la cage d’aujourd’hui, qui est tout de même un instrument de torture, d’une certaine façon, et un mode plus raisonnable d’élevage, il y a un pas ; il faut absolument que la filière s’engage dans cette direction et nous devons la soutenir.
J’en reviens en effet à ce que j’indiquais précédemment, cela doit se faire dans des conditions économiques qui maintiennent nos élevages, qui leur permettent d’être viables. Si l’on importe en masse de Chine des lapins congelés et élevés dans on ne sait quelles conditions, comme cela se fait à l’occasion, on ne permettra pas à nos éleveurs d’avoir un prix d’équilibre. Il est donc nécessaire d’adopter une approche globale.
Néanmoins, j’entends ce que vous dites, monsieur le ministre, et le travail avec la filière est effectivement indispensable.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 112 rectifié septies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 426 rectifié septies.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. Joël Labbé. Monsieur le président, je souhaiterais revenir sur le vote des amendements identiques nos 203 rectifié, 512 rectifié bis, 632 et 744, relatifs à l’élevage en cage des poules pondeuses.
Pourriez-vous nous indiquer le décompte des voix, car nous avons un doute sur le sort de ces amendements ?
M. le président. Mon cher collègue, le vote étant intervenu et son résultat ayant été proclamé, il ne saurait être question de le remettre en cause. J’ajoute que nous sommes trois à avoir procédé au décompte des voix.
Article 13 bis
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant les réalisations concrètes en matière d’amélioration du bien-être animal au regard des objectifs fixés par les plans de filière des organisations interprofessionnelles mentionnées à l’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, sur l’article.
Mme Patricia Morhet-Richaud. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le respect du bien-être animal est un sujet important de préoccupation, notamment pour nos concitoyens. Bien qu’elle soit très clivante, je pense que nous devons aborder cette question avec pragmatisme et sans aucun dogmatisme. C’est pourquoi je regrette que le bien-être animal ne soit pas considéré dans toutes les filières, de manière transversale. En effet, l’article 13 bis prévoit de faire évaluer les réalisations concrètes en matière d’amélioration du bien-être animal au regard des objectifs fixés par les plans de filière des organisations interprofessionnelles.
Pourtant, le pastoralisme est exclu de ce dispositif, puisque la souffrance occasionnée par les attaques de loups sur les animaux d’élevage n’est pas prise en compte par le projet de loi.
En application de l’article L. 214-5 du code rural et de la pêche maritime, un centre national de référence sur le bien-être animal a été créé le 28 février 2017. J’ai déposé récemment un amendement, qui a été déclaré irrecevable, tendant à demander une expertise technique sur l’impact de la prédation et des mesures de protection sur le bien-être des animaux d’élevage. En effet, à titre d’exemple, le nombre d’avortements enregistrés par les éleveurs sur les brebis prédatées est très significatif. Les animaux qui survivent sont en réelle souffrance, et je regrette que cette souffrance animale ne suscite pas le même intérêt que d’autres. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. L’amendement n° 745, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport portant sur les évolutions souhaitées et les réalisations concrètes des volets relatifs au bien-être animal prévus par les plans de filière des organisations interprofessionnelles mentionnées à l’article L. 632-1 du code rural et de la pêche maritime.
La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Le présent amendement est important ; il vise à préciser que le rapport attendu du Gouvernement porte sur l’adéquation entre les évolutions souhaitées et les réalisations concrètes en matière de bien-être animal prévues dans les plans de filière élaborés par les organisations interprofessionnelles à l’issue des États généraux de l’alimentation. Il nous faut évidemment évaluer les actions conduites par les filières en matière de bien-être animal, au regard des attentes sociétales telles qu’elles se sont exprimées au cours des États généraux de l’alimentation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission s’est trouvée perplexe face à cet amendement, elle a eu du mal à bien en comprendre le sens. Il y est question de « réalisations concrètes », mais celles-ci ne figurent a priori pas dans les plans de filière, lesquelles ne comportent que des engagements. Vous dites que ce n’est pas un rapport d’évaluation, mais alors quel est véritablement l’objet de ce rapport ?
La commission a donc émis, du fait de cette confusion, un avis défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 13 bis.
(L’article 13 bis est adopté.)
Article additionnel après l’article 13 bis
M. le président. L’amendement n° 401 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini et Mmes Jasmin, Lienemann, Conway-Mouret et Préville, n’est pas soutenu.
Article 13 ter
(Non modifié)
La sous-section 1 de la section 1 du chapitre IV du titre V du livre VI du code rural et de la pêche maritime est complétée par des articles L. 654-3-1 et L. 654-3-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 654-3-1. – L’exploitant de chaque établissement d’abattage désigne, pour l’aider à assurer le respect des mesures de protection des animaux au moment de leur mise à mort et des opérations annexes, une personne responsable de la protection animale.
« Art. L. 654-3-2. – Chaque établissement d’abattage établit les procédures appropriées de recueil des signalements émis par les membres de leur personnel ou par des collaborateurs extérieurs et occasionnels régies par les I et II de l’article 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. »
M. le président. L’amendement n° 403 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Jasmin, Conway-Mouret et Lienemann, M. Devinaz et Mme Préville, n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 13 ter.
(L’article 13 ter est adopté.)
Articles additionnels après l’article 13 ter
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 114 rectifié septies est présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue et Malhuret, Mme Mélot, MM. Wattebled, Vogel, de Belenet et Paul, Mme Goy-Chavent et MM. Delahaye et Daubresse.
L’amendement n° 600 rectifié bis est présenté par Mme Rossignol, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 4 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Pour tout transport maritime de plus de huit heures au départ du territoire français, l’organisateur de transport désigne un responsable de protection des animaux, présent à bord de chaque navire de transport de bétail et pour toute la durée du voyage, qui s’assure du respect des dispositions du règlement (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 sur la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes. Le responsable du bien-être des animaux, titulaire du certificat d’aptitude professionnelle mentionné à l’article 17, paragraphe 2 du même règlement (CE) n° 1/2005, est indépendant, désigné par l’autorité compétente, et lui fait directement rapport, ainsi qu’à l’organisateur du transport, sur les questions relatives au bien-être des animaux. Il est en mesure d’exiger que le personnel du navire, le transporteur et l’organisateur de transport prennent les mesures correctives nécessaires pour garantir le respect des dispositions réglementaires applicables.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue, pour présenter l’amendement n° 114 rectifié septies.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement prévoit la nomination d’un responsable de la protection des animaux, ou RPA, sur les navires bétaillers, sur le modèle de la législation en vigueur dans les abattoirs.
Le règlement n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes réglemente le transport des animaux vivants entre les pays de l’Union européenne et définit les modalités de contrôles opérés à l’entrée ou à la sortie de l’Union européenne.
Chaque État membre de l’UE est soumis à l’application de ce règlement ; cependant, l’article 1er du règlement prévoit qu’il « ne fait pas obstacle à d’éventuelles mesures nationales plus contraignantes visant à améliorer le bien-être des animaux au cours des transports se déroulant entièrement sur le territoire d’un État membre ou pour les transports maritimes au départ du territoire d’un État membre ».
Les conditions de transport maritime sont aujourd’hui insuffisamment encadrées par la réglementation européenne, qui ne comporte que peu de dispositions spécifiques au transport maritime. Or, de nombreux problèmes de protection des animaux ont été documentés dans le cas particulier de ces transports par mer. Un rapport publié en 2017 par l’ONG Animal Welfare Foundation faisait état d’infractions importantes et régulières à la réglementation, en particulier en raison de l’absence de tout contrôle des animaux à bord des navires et de personnel de bord compétent pour en assurer la protection.
Afin d’y remédier, et à l’instar de ce qui est en place dans les abattoirs en vertu du règlement n° 1099/2009, cet amendement vise à mettre en place un responsable de la protection des animaux sur les navires bétaillers.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 600 rectifié bis.
M. Franck Montaugé. Cet amendement, déposé par Mme Rossignol., vise à instaurer un responsable de la protection des animaux sur les navires bétaillers.
Le règlement européen du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes réglemente le transport des animaux vivants entre les pays de l’Union européenne et définit les modalités de contrôles opérés à l’entrée ou à la sortie de l’Union européenne.
Chaque État membre de l’Union européenne est soumis à l’application de ce règlement. Cependant, l’article 1er du règlement prévoit qu’il « ne fait pas obstacle à d’éventuelles mesures nationales plus contraignantes visant à améliorer le bien-être des animaux au cours des transports se déroulant entièrement sur le territoire d’un État membre ou pour les transports maritimes au départ du territoire d’un État membre ».
Les conditions de transport maritime sont aujourd’hui insuffisamment encadrées par le règlement européen, qui ne comporte que peu de dispositions spécifiques au transport maritime. Or de nombreux problèmes de protection des animaux ont été documentés dans le cas particulier de ces transports par mer.
Afin d’y remédier, et à l’instar de ce qui est en place dans les abattoirs en vertu du règlement n° 1099/2009, cet amendement vise donc à mettre en place un responsable de la protection des animaux sur les navires bétaillers.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. En visant les navires au départ du territoire français, la contrainte pénaliserait prioritairement les navires français et l’exportation d’animaux issus d’élevages français.
Et qu’adviendrait-il, mes chers collègues, de l’autorité du responsable de la protection des animaux, dont on nous dit qu’il serait indépendant, mais qui devrait bien être payé par quelqu’un une fois quittées les eaux territoriales françaises ?
Pour l’ensemble de ces raisons, l’avis de la commission est défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. La désignation d’un RPA serait de nature à inciter le transporteur à se dédouaner de ses propres obligations de formation de son équipage en matière de protection des animaux durant le transport.
Les autorités françaises s’emploient à rechercher des modalités pratiques de mise en œuvre des formations prévues pour les équipages des navires et les dockers dans les ports de chargement.
Légiférer au sujet de la désignation d’un RPA à bord des navires n’est pas opportun, compte tenu de la réglementation européenne existante.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 114 rectifié septies et 600 rectifié bis.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 433 rectifié sexies est présenté par Mmes Boulay-Espéronnier, Delmont-Koropoulis, Garriaud-Maylam, Goy-Chavent et Deromedi, M. Bazin, Mme Berthet, M. Sido et Mme Lanfranchi Dorgal.
L’amendement n° 601 rectifié est présenté par Mme Rossignol, MM. Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 5 du chapitre IV du titre Ier du livre II du code rural et de la pêche maritime est complétée par un article L. 214-… ainsi rédigé :
« Art. L. 214-… – Les établissements d’abattage doivent satisfaire aux obligations de formation de leurs opérateurs. Ces derniers doivent avoir le niveau de compétence approprié à la réalisation des opérations de mise à mort et opérations annexes qu’ils sont amenés à effectuer, et ce, sans causer aux animaux de douleur, détresse ou souffrance évitables. À compter du 31 décembre 2020, les opérateurs en exercice, à l’exception de ceux pouvant justifier d’une expérience professionnelle valant équivalence, doivent être titulaires d’un certificat de compétence et de connaissances au regard du respect de la réglementation en matière de protection des animaux délivré par le représentant de l’État dans le département, pour chaque opération et catégorie d’animal correspondant à leur affectation au sein de leur établissement employeur.
« En outre, les personnels concernés bénéficient d’une formation continue, leur permettant notamment de conformer leur pratique aux progrès acquis dans le domaine des connaissances et des techniques en matière de prévention et de lutte contre toute souffrance animale évitable.
« Leur niveau de compétence est périodiquement évalué. Les établissements d’abattage assument la charge de la formation continue et de l’évaluation périodique des compétences des opérateurs.
« Le contenu, les modalités d’obtention du certificat de compétence ainsi que le contenu de la formation continue dispensés aux détenteurs du certificat de compétence concernant la protection des animaux dans le cadre de leur mise à mort, les modalités d’évaluation des connaissances et des techniques mises en œuvre pour le renouvellement éventuel du certificat de compétence sont définis par arrêté du ministre chargé de l’agriculture.
« Les modalités déclaratives des établissements d’abattage en matière de respect des obligations d’évaluation périodique des compétences et de formation professionnelle continue de leurs opérateurs ainsi que les mesures de sanctions encourues en cas de violation de ces obligations sont définies par arrêté du ministre chargé de l’agriculture. »
La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 433 rectifié sexies.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Il semble pour le moins préjudiciable et aberrant que, pour des opérateurs exerçant aux postes d’abattage, l’obtention d’un certificat d’aptitude, pourtant prévue par la réglementation, ne soit pas, encore aujourd’hui, effectivement exigée. À ce défaut courant de formation initiale s’ajoute l’absence de formation continue.
Pourtant, le règlement européen n° 1099/2009 du 24 septembre 2009, entré en vigueur en France le 1er janvier 2013, recommandait la délivrance d’un certificat de compétence en matière de protection animale pour les opérateurs chargés de la mise à mort en abattoir. Or, cinq ans après, il est toujours très mal appliqué, à la faveur d’un régime transitoire d’application instauré pour permettre l’adaptation des exploitants des établissements. En effet, de nombreux opérateurs sur la chaîne de mise à mort exercent cette mission délicate sans être titulaires de ce certificat.
L’amélioration des conditions d’abattage et le contrôle de la bonne application des procédures en vigueur exigent ce contrôle d’aptitude. Aujourd’hui, la fiche de Pôle emploi pour « tueur en abattoir », dans la case « niveau de formation, niveau d’aptitude et de compétence requis », mentionne : « aucun » !
À l’opposé des sacrificateurs procédant à l’abattage rituel, qui, eux, se voient imposer une certification obligatoire, il est urgent, au vu des scandales qui ont éclaté récemment, que l’on impose un délai de régularisation pour satisfaire à cette obligation de bon sens.
La vérification de la validation de la formation requise, puis la charge d’une formation continue doivent incomber aux établissements d’abattage.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bonnefoy, pour présenter l’amendement n° 601 rectifié.
Mme Nicole Bonnefoy. Il est identique et donc défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission entend vos arguments avec une certaine surprise puisque, officiellement, ces personnels doivent disposer d’un certificat attestant de leur compétence, de leurs connaissances au regard du respect de la réglementation en matière de protection des animaux. Ce certificat, intitulé « protection des animaux dans le cadre de leur mise à mort », est délivré par le préfet, sous réserve du respect d’exigences en matière de formation et de réussite à une évaluation.
Peut-être conviendrait-il de s’assurer du respect de ces dispositions. Dans la mesure où celles-ci existent déjà, l’avis de la commission est plutôt défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. J’ajoute que la formation réglementaire dont nous parlons est dispensée par un organisme habilité par le ministère de l’agriculture. Cette habilitation est renouvelée tous les cinq ans. Les organismes dispensateurs de la formation, au nombre de 21, sont habilités eux-mêmes par les services du ministère de l’agriculture. Au 31 décembre 2017, quelque 12 304 opérateurs ont été formés.
Je souhaite par ailleurs, et c’est l’un des objectifs de la stratégie en faveur du bien-être animal que nous avons présentée, rehausser très prochainement le niveau d’exigence de ce type de formation. Je suis donc défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 433 rectifié sexies et 601 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Article 13 quater A
(Non modifié)
Dans un délai de six mois à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, à titre expérimental et sur la base du volontariat, pour une durée de deux ans, un dispositif de contrôle par vidéo des postes de saignée et de mise à mort, visant à évaluer l’efficacité des protocoles et l’application de la réglementation du bien-être animal, est mis en œuvre.
Un décret, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, précise les catégories d’établissements concernés, les procédés de mise en œuvre de ce contrôle vidéo, les modalités de recueil de l’avis conforme du comité social et économique ou, à défaut, des institutions représentatives du personnel, les modalités de maintenance, d’utilisation ainsi que les règles d’archivage et de mise à disposition et de recueil des données collectées par les enregistrements vidéo aux fins d’éventuels contrôles administratifs.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, sur l’article.
M. Joël Labbé. Nous abordons la question de la vidéosurveillance. Nous comprenons l’objectif de protection des animaux, qui est d’éviter les dérapages.
Toutes les investigations montrent les conditions de travail extrêmement difficiles dans les abattoirs, en particulier aux postes de saignée. Il faut l’admettre, peu de personnes accepteraient de travailler dans de telles conditions, pour une telle activité. Comment le nier ? Nous mangeons de la viande, pour ceux qui en mangent encore, mais peu d’entre nous supporteraient d’abattre des animaux huit heures par jour. Ce sont là des conditions extrêmes.
Accuser les individus qui dérapent sans remettre en cause le système ne changera pas les choses pour les animaux. Dans les abattoirs, les deux souffrances, animale et humaine, sont liées. Il faut évidemment travailler sur les conditions de travail, la formation, la réduction des cadences. Un journaliste d’investigation ayant passé six mois dans un abattoir a souligné que 30 % à 40 % des effectifs pour les saignées sont composés d’intérimaires et que la formation est absolument inexistante.
On sait que les cadences et les vitesses des chaînes sont des éléments qui peuvent avoir un impact sur la capacité des salariés à respecter l’ensemble des règles.
Dans ce contexte, comment éviter les dérapages ? Mais aussi, comment éviter les dérapages dans l’autre sens, par un contrôle qui atteint les droits des salariés ?
La proposition d’un contrôle vidéo, même à titre expérimental et sur la base du volontariat, ne me paraît pas acceptable. C’est l’entreprise qui sera volontaire, et non les salariés. Nous ne pouvons pas demander à des humains salariés de passer l’intégralité de leur temps de travail sous surveillance vidéo.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les amendements identiques nos 234, présenté par M. Courteau, et 404 rectifié bis, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Monier, Lienemann, Jasmin et Conway-Mouret et M. Féraud, ne sont pas soutenus.
L’amendement n° 641 rectifié, présenté par Mme Boulay-Espéronnier, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de la présente loi, un dispositif de contrôle par vidéo des postes de saignée et de mise à mort, visant à évaluer l’efficacité des protocoles et l’application de la réglementation du bien-être animal, est mis en œuvre.
Les procédés de mise en œuvre de ce contrôle vidéo, l’information des salariés relative à ces procédés, leurs modalités de maintenance, d’utilisation ainsi que les règles d’archivage et de mise à disposition des enregistrements vidéos aux fins d’éventuels contrôles administratifs sont précisés par arrêté du ministre chargé de l’agriculture.
La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. S’agissant du contrôle vidéo en abattoir, je ne comprends toujours pas de quoi nous avons peur. De gros problèmes ont été identifiés dans environ 30 % des abattoirs. Nous nous accordons tous sur le fait que le consommateur a besoin d’être rassuré. Le consommateur averti devient un citoyen consommateur, un « consommacteur ». La consommation de viande est en baisse depuis plusieurs années, et rien n’est fait pour rassurer le consommateur, qui peut croire qu’on lui cache des choses.
Évidemment, il y a des postes très difficiles dans les abattoirs, nous le savons, et les personnes qui les occupent doivent absolument être respectées. Nous en avons auditionné plusieurs, et toutes disent qu’elles pourraient se soumettre au contrôle par vidéo sous l’impulsion du management et du Gouvernement. Je pense personnellement que c’est une question de pédagogie. La caméra est un outil. L’arsenal législatif est important, mais nous avons besoin de plus de moyens de contrôle. Il ne s’agit nullement de stigmatiser des métiers extrêmement difficiles. La caméra pourrait, par exemple, mettre en évidence des problèmes liés aux cadences, ce qui permettrait de remédier à un certain nombre de difficultés.
Si cet amendement n’est pas adopté, considérez-le comme un amendement d’appel. Une véritable réflexion en profondeur doit être engagée sur ces sujets, qui ont infusé dans la société française. Ce serait un tort de croire que les questionnements s’arrêteront parce que nous avons légiféré pendant plusieurs jours. Les associations qui ont diffusé des images vidéo dans des abattoirs recommenceront. Nous pouvons condamner leur action, mais c’est une forme d’information. Nous devons y réfléchir.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. La commission est favorable à une expérimentation de la vidéosurveillance, mais sur la base du volontariat, avec l’accord des salariés et de l’exploitant. Cette expérimentation nous semble plus équilibrée et respectueuse de l’ensemble des droits des salariés que la généralisation de la vidéosurveillance.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le bien-être animal à l’arrivée des abattoirs et dans les abattoirs est effectivement une question qui traverse la société, tout comme celle des salariés qui y travaillent, notamment aux postes d’abattage, dans des conditions difficiles. Il est compliqué d’exercer ce métier, parfois en 2x8 ou en 3x8, ce qui provoque un turn-over énorme et le recours à des personnels insuffisamment qualifiés pour le faire bien.
Aujourd’hui, à travers la charte sur le bien-être animal, nous souhaitons accompagner, former et, le cas échéant, sanctionner. Donc, accompagner, c’est former les gens qui travaillent dans les abattoirs à ces postes difficiles à faire le meilleur geste possible, celui qui occasionnera le moins de souffrance à l’animal. Nous y travaillons.
Il s’agit ensuite de sanctionner, bien évidemment, les gestes et les méthodes totalement répréhensibles, comme les actes de violence sur les animaux au moment où ils sont dans la chaîne d’abattage. Il ne faut pas en faire une généralité, et vous ne l’avez d’ailleurs pas fait, mais force est de constater que les mauvais traitements sur les animaux existent. C’est pourquoi nous avons souhaité relever les niveaux de sanction. C’est pourquoi nous avons prévu aussi la désignation d’un référent responsable de la protection animale dans chaque abattoir, en quelque sorte un lanceur d’alerte qui puisse prévenir certaines dérives.
L’article 13 quater A prévoit l’expérimentation de la vidéosurveillance, ce qui permettra d’évaluer les conditions d’utilisation de ce dispositif. Si la vidéosurveillance est un moyen de contrôle interne que l’abattoir peut choisir de mettre en place pour atteindre ses obligations, il convient donc de ne pas être prescriptif en la matière.
La vidéosurveillance touche aux droits des salariés. Son installation, comme dans toute entreprise, suppose l’accord du CHSCT ; les salariés doivent accepter d’être filmés de façon permanente, c’est la moindre des choses.
Il est en outre impossible, dans de nombreux cas, de déceler la souffrance des animaux, car il faut être présent physiquement pour la constater. Soulignons par ailleurs l’impossibilité de qualifier les infractions, sauf dans des cas très exceptionnels. Enfin, il est impossible, derrière un écran vidéo, de mettre un terme à la souffrance des animaux.
Tous ces points méritent d’être éclaircis avant d’envisager la généralisation du dispositif, d’où notre proposition d’une expérimentation sur la base du volontariat. Je pense que certains abattoirs, ayant à cœur de démontrer qu’ils ne remettent pas en cause les principes du bien-être animal, installeront de tels dispositifs.
J’ai décidé de porter à la connaissance des consommateurs les dispositifs de contrôle interne choisis par les abattoirs. Il est aussi nécessaire de poursuivre les travaux en cours, notamment sur l’éthique des abattoirs, au sein du Conseil national de l’alimentation. Nous attendons à ce sujet un rapport du CGAAER.
Laissons donc l’expérimentation se dérouler sur la base du volontariat, puis avançons en ce sens. C’est ainsi que nous agissons avec les professionnels. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement, comme il l’avait fait à l’Assemblée nationale sur un amendement rédigé dans les mêmes termes, émet un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Monsieur le ministre, vous nous avez dit, concernant la formation, que nos amendements n’étaient pas nécessaires, parce que 21 organismes étaient reconnus, 12 000 agents formés, etc. Dont acte !
Là, vous nous dites que, du fait du turn-over, des personnels dépourvus en partie des qualifications requises pouvaient occuper des postes de mise à mort. Il y a donc tout de même des soucis !
Vous nous indiquez ensuite que les comportements inappropriés doivent être sanctionnés. Or la vidéosurveillance vise précisément à prévenir ces mauvais comportements. La sanction arrive trop tard, le mal est déjà fait.
La vidéosurveillance est déjà pratiquée dans d’autres pays européens. Certains abattoirs français l’ont déjà mise en œuvre ou s’apprêtent à le faire. C’est un mouvement qui est appelé à se généraliser.
Évidemment, il y a la question des salariés. Il faut cependant rappeler que le problème n’est pas la caméra, mais ce que l’on fait des images. Il est prévu, si j’ai bien compris, que ce soit le vétérinaire responsable de la surveillance qui visionne les images. Il ne s’agit donc pas d’un rapport d’employé à patron, mais de la surveillance de la mise en œuvre d’une fonction dans des conditions correctes. Cela doit pouvoir s’envisager.
Nous l’avons bien compris, monsieur le ministre, cette expérimentation est un point d’équilibre, et nul ici ne souhaite stigmatiser les personnes qui travaillent dans les abattoirs. J’adhère aux propos introductifs de notre collègue Labbé, si ce n’est que je ne vois pas de difficulté à introduire la vidéo. Je pense que celle-ci, de toute façon, va s’imposer dans les années qui viennent.
Il serait bon que l’expérimentation soit mise en œuvre rapidement et que nous, parlementaires, soyons informés de ses premiers résultats voire de ses modalités précises. Le sujet est d’importance ; il fait l’objet d’une demande sociale extrêmement forte. Sans mélanger les besoins profonds de notre société et les excès de certaines associations, je le répète, nous ne pourrons pas y couper. Autant y répondre dans les meilleures conditions possible.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Sensible à vos arguments, monsieur le ministre, à ceux de mes collègues Daniel Gremillet, Michel Raison, avec lesquels nous en avons débattu, sensible à l’avis défavorable de la commission, je vais retirer l’amendement. Je formulerai néanmoins trois remarques.
D’abord, les élus locaux que nous sommes connaissent les difficultés, souvent idéologiques, liées à la vidéosurveillance. Dans l’espace public, où elle est très présente, on parle d’ailleurs de vidéoprotection, car cela dépend du point de vue dans lequel on se place. La question de la pédagogie, que j’évoquais tout à l’heure, est donc très importante.
Ensuite, qu’il me soit permis de rappeler que 80 % de nos concitoyens demandent la vidéosurveillance dans les abattoirs et que nous sommes la représentation nationale. Le pragmatisme, c’est aussi d’être en phase avec ces aspirations. Pour l’avenir, rediscutons donc en profondeur de ces questions.
Enfin, la vidéoprotection est présente dans plus de 50 % des abattoirs en Angleterre, dans 70 % ou 80 % des abattoirs aux Pays-Bas, et cela se passe très bien. Il faut prendre les bonnes idées là où elles se trouvent !
Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 641 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 29 rectifié quater, présenté par M. Fouché, Mme Goy-Chavent, MM. Guerriau, Decool et Sido, Mmes Joissains et Mélot, MM. A. Marc, Mizzon, Wattebled et Lagourgue, Mmes Delmont-Koropoulis et Boulay-Espéronnier et M. Chasseing, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
et sur la base du volontariat
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Cette expérimentation est réalisée dans au moins un établissement d’abattage par département sur la base du volontariat. À défaut, il est procédé à un tirage au sort par les services compétents. Un décret fixe les modalités de ce tirage au sort.
La parole est à M. Jean-Louis Lagourgue.
M. Jean-Louis Lagourgue. Cet amendement tend à mettre en œuvre un engagement présidentiel.
La révélation de cas de maltraitance animale a jeté le discrédit sur les 263 abattoirs que compte la France. Il s’agit aujourd’hui de redonner confiance aux éleveurs et aux consommateurs dans la filière d’abattage. Il s’agit également de permettre aux salariés des établissements d’abattage de travailler dans de bonnes conditions et d’être fiers du travail qu’ils accomplissent.
Cela fait plusieurs années que le Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire préconise le renforcement des contrôles et la mise en place de caméras au niveau des postes de saignée.
La mise en place de la vidéosurveillance poursuit un triple objectif : la prévention, la formation et la répression. S’il est difficile de qualifier la souffrance animale sur la base de vidéos, il est en revanche aisé de mettre en lumière une mauvaise pratique d’abattage ou un comportement maltraitant. Il s’agit d’évaluer l’efficacité des protocoles et l’application de la réglementation du bien-être animal.
Aussi, en proposant une expérimentation, l’article 13 quater A va indubitablement dans le bon sens. L’argument du Big Brother n’est pas sérieux. Cette expérimentation sera en effet réalisée sous le contrôle de la CNIL, qui n’autorise pas que les salariés soient sous surveillance permanente ou constante.
En revanche, on ne peut se satisfaire d’une expérimentation sur la base du volontariat sans aucune solution de repli. Le présent amendement a donc pour objet de prévoir que cette expérimentation sera réalisée dans un établissement d’abattage par département, sur la base du volontariat ou, à défaut, par tirage au sort.
M. le président. Le sous-amendement n° 347, présenté par M. Bazin, est ainsi libellé :
Amendement n° 29, dernier alinéa
Remplacer les mots :
au moins un établissement d’abattage par département
par les mots :
trois établissements d’abattage au niveau national
La parole est à M. Arnaud Bazin.
M. Arnaud Bazin. Je retire ce sous-amendement, monsieur le président.
M. le président. Le sous-amendement n° 347 est retiré.
L’amendement n° 549 rectifié bis, présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Roux, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mmes Blondin, Monier et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
et sur la base du volontariat
par les mots :
, sur la base du volontariat et à la demande de la majorité des salariés des établissements concernés
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à apporter une précision sur l’expérimentation de la vidéosurveillance, car il nous semble important de demander l’accord de la majorité des salariés de l’établissement concerné. Il est tout de même question de filmer en permanence les salariés sur leur lieu de travail.
Il s’agit par ailleurs de valoriser les démarches qui pourraient être entreprises par les salariés souhaitant faire toute la transparence sur leur pratique au quotidien. Néanmoins, l’effet pervers serait que les dirigeants de l’abattoir puissent ainsi surveiller leurs salariés en permanence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. L’amendement n° 29 rectifié quater est contraire à la position de la commission, qui n’a pas modifié le dispositif transmis par l’Assemblée nationale et ne souhaite pas, en particulier, qu’il puisse être dérogé à la règle du volontariat. La commission est donc défavorable au principe du tirage au sort.
L’amendement n° 549 rectifié bis est également contraire à la position de la commission, qui tient au volontariat fondé à la fois sur l’accord de l’exploitant et sur celui des salariés. La commission est donc défavorable à une expérimentation à la seule demande des salariés.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. Le recours au tirage au sort est une atteinte à la liberté d’entreprendre. Comme je le disais tout à l’heure, j’ai décidé de porter à la connaissance des consommateurs les dispositifs de contrôle interne qui ont été choisis par les abattoirs. L’avis du Gouvernement est donc défavorable sur l’amendement n° 29 rectifié quater.
Concernant l’amendement n° 549 rectifié bis, les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation seront définies par décret, après un avis de la CNIL. Elles préciseront les modalités de recueil de l’avis des institutions représentatives du personnel. L’ajout proposé n’est pas du domaine de la loi. À ce titre, j’émets donc un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. J’ai retiré mon sous-amendement parce que, réflexion faite, considérant le nombre d’abattoirs concernés, le chiffre que j’avais proposé était manifestement insuffisant. Le choix d’un abattoir par département, en revanche, me paraît excessif, puisque l’on compte plus de 100 départements et 263 abattoirs.
Je voudrais que M. le ministre puisse nous préciser le nombre d’abattoirs engagés dans l’expérimentation qui lui paraît raisonnable pour que nous puissions en tirer des conclusions substantielles. Moyennant quoi, je me rangerai à l’avis de la commission et du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Si vous le permettez, monsieur le sénateur, je reviendrai vers vous plus tard, afin de vous donner une information suffisamment objectivée et fiable.
M. le président. La parole est à M. Michel Raison, pour explication de vote.
M. Michel Raison. Je voudrais vous livrer une réflexion. Je n’ai aucune idée préconçue, mais j’ai des craintes. Notre débat concerne uniquement les abattoirs, mais si nous élargissons la réflexion à toutes les professions qui effectuent des gestes délicats, à même de provoquer des accidents, des polémiques médiatiques, et que des caméras sont installées chez tous ces professionnels, notre société deviendra difficile à gérer.
Je pense surtout au personnel. Il est vrai que le métier d’abatteur est dur, mais nous pourrions citer bien d’autres professions délicates, dans le domaine animal et bien au-delà. Malgré les préconisations de la CNIL, l’image existe, elle peut donc un jour être diffusée. Elle pourrait aussi, comme l’a souligné M. Cabanel, être utilisée par l’employeur.
Nous devons engager la réflexion largement au-delà de l’abattoir. Le sujet me fait peur, et je le dis.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 29 rectifié quater.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 549 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 13 quater A.
(L’article 13 quater A est adopté.)
Articles additionnels après l’article 13 quater A
M. le président. L’amendement n° 402 rectifié quater, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini, Mmes Conway-Mouret, Lienemann, Jasmin et Monier, MM. Devinaz et Kerrouche, Mmes Préville et G. Jourda et MM. Manable et Jomier, n’est pas soutenu, non plus que l’amendement n° 405 rectifié ter, présenté par Mme Rossignol, M. Vallini et Mmes Jasmin, Lienemann, Conway-Mouret et Préville.
Article 13 quater
(Non modifié)
La deuxième phrase du premier alinéa de l’article L. 811-1 du code rural et de la pêche maritime est complétée par les mots : « et à la sensibilisation au bien-être animal ». – (Adopté.)
M. le président. Monsieur le ministre, mes chers collègues, il est minuit. Je vous propose de prolonger nos travaux afin de terminer l’examen de ce chapitre du projet de loi qui est consacré au respect du bien-être animal.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
Article 13 quinquies
(Non modifié)
À titre expérimental et pour une durée de quatre ans à compter de la publication du décret prévu au dernier alinéa du présent article, des dispositifs d’abattoirs mobiles sont expérimentés dans l’objectif d’identifier les éventuelles difficultés d’application de la réglementation européenne.
L’expérimentation fait l’objet d’une évaluation, notamment de sa viabilité économique et de son impact sur le bien-être animal, dont les résultats sont transmis au Parlement au plus tard six mois avant son terme. Cette évaluation établit des recommandations d’évolution du droit de l’Union européenne.
Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 205 rectifié est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard, Mme Benbassa et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 471 rectifié est présenté par MM. Labbé, Arnell et Artano, Mme M. Carrère, MM. Castelli, Corbisez et Guérini, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall.
L’amendement n° 660 rectifié est présenté par M. Tissot, Mmes Préville et Taillé-Polian, MM. M. Bourquin, Duran et Dagbert, Mme Guillemot, M. Iacovelli, Mme Lienemann, M. Lurel, Mme Meunier, MM. Vaugrenard et Antiste et Mmes Conconne, Espagnac et Ghali.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
L’expérimentation porte également sur les petits abattoirs non mobiles dans les zones non pourvues d’abattoirs de proximité ou mal desservies.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 205 rectifié.
M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement porte sur la problématique des petits abattoirs. Sans répéter ce qui a déjà été dit, beaucoup de ces petites structures ont été fermées. Or il est aujourd’hui possible d’en rouvrir un certain nombre, parce que les normes d’hygiène sont plus faciles à faire respecter.
Notre amendement vise donc à engager une expérimentation pour compléter la couverture de notre pays en petits abattoirs, car ils présentent un avantage pour les éleveurs et les animaux.
M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour présenter l’amendement n° 471 rectifié.
M. Joël Labbé. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Maurice Antiste, pour présenter l’amendement n° 660 rectifié.
M. Maurice Antiste. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements visent à étendre l’expérimentation prévue pour les abattoirs mobiles aux petits abattoirs non mobiles dans les zones non pourvues d’un abattoir de proximité ou qui sont mal desservies.
La commission s’est interrogée sur l’opportunité d’une telle extension, qui pourrait être intéressante, mais ne l’a finalement pas retenue, car en réalité, l’article n’apporte rien qui n’existe déjà : les abattoirs mobiles sont autorisés par le droit européen, qui prévoit aussi la possibilité de déroger à un certain nombre de règles, à l’exception bien entendu de celles relatives à l’hygiène pour lesquelles il existe une obligation de résultat – ce sont ces règles qui sont les plus lourdes pour les exploitants.
Le seul apport de cet article consiste à rappeler qu’il est possible de le faire et, au terme de l’expérimentation, d’évaluer les difficultés qui auraient été identifiées.
La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’expérimentation qui est prévue à cet article porte sur les abattoirs mobiles, car ce caractère présente des particularités que nous devons prendre en compte.
Or ces amendements concernent les abattoirs non mobiles, dont la situation, quelle que soit leur taille, est différente, dans la mesure où ils relèvent du régime général. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
J’en profite pour revenir sur cette expérimentation relative aux abattoirs mobiles. Nous avons souhaité la mettre en place, sous réserve de garanties en termes de réglementation et de sécurité sanitaire. Il faut savoir qu’il s’agit malgré tout d’investissements importants, aux alentours de 3 à 4 millions d’euros, et qu’un abattoir mobile représente environ quatre semi-remorques. Ils ne sont donc pas si mobiles que cela !
Pour participer à l’expérimentation, les opérateurs devront déposer un dossier très complet, qui inclura toute la nomenclature et les mesures environnementales et sanitaires nécessaires pour un abattoir. En effet, nous devons bien évidemment rester très attentifs à la sécurité sanitaire des aliments que consomment nos concitoyens.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Je suivrai l’avis de la commission sur ces amendements, même si la question qu’ils soulèvent est très intéressante.
Monsieur le ministre, vous avez cité des chiffres, que je ne peux que confirmer, sur le prix de ces abattoirs mobiles. Dans le département des Vosges, nous avons créé deux abattoirs de proximité, mais nous avons décidé qu’ils ne seraient pas mobiles pour des raisons de coût.
En tout cas, il est important de raisonner en termes de bassin de production et je suis persuadé que ce sont les petits abattoirs de proximité, aux normes européennes, qui permettront d’alimenter les fermes auberges, la restauration collective, les circuits courts… Ce type d’abattoirs n’est d’ailleurs pas en opposition avec ceux de plus grande taille ; ils sont complémentaires.
Par ailleurs, il est intéressant de noter que, dans les Vosges, comme dans d’autres départements, ce sont les agriculteurs qui se sont emparés du sujet, pas les pouvoirs publics ni les collectivités. Ce sont les agriculteurs qui, ensemble, ont créé des coopératives chargées d’installer et de faire fonctionner ces abattoirs de proximité.
Comme le disaient Mme la rapporteur et M. le ministre, nous disposons donc aujourd’hui des outils pour faire cela, mais c’est un sujet très intéressant tout de même.
Les abattoirs industriels ne peuvent pas tout faire : les abattoirs de proximité de mon département peuvent par exemple assurer la traçabilité de l’animal jusqu’au bout, y compris pour les abats, et les animaux sont abattus dans les vingt-quatre heures, ce qui n’est pas possible dans une structure industrielle. Vous le voyez, les différents types d’abattoirs sont, je le redis, complémentaires.
Je comprends les raisons des avis défavorables que Mme la rapporteur et le Gouvernement ont donnés sur ces amendements, mais ceux-ci soulèvent une question importante : la reconquête des marchés de proximité.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Ce que je viens d’entendre me conforte dans l’impression que j’ai depuis un moment que les éleveurs veulent se réapproprier, pour un certain nombre d’entre eux en tout cas, les conditions d’abattage de leurs animaux.
Si les agriculteurs élèvent leurs animaux dans de bonnes conditions, ce n’est pas pour qu’ils soient maltraités au moment du transport ou de l’abattage.
M. Daniel Gremillet. Exactement !
M. Arnaud Bazin. C’est un message fort de la part de nos éleveurs !
Pour ma part, je me réjouis de cette expérimentation sur les abattoirs mobiles, qui n’est pas une petite affaire. Elle suppose des investissements importants, mais comme elle concerne un moment particulier, qui couronne en quelque sorte l’ensemble du travail de l’éleveur, elle participe de ce mouvement de réappropriation que je viens d’évoquer.
Monsieur le ministre, si les abattoirs de proximité, qui viennent d’être évoqués et qui sont complémentaires des structures de taille plus importante, se développent, votre administration aura-t-elle les moyens de garantir la qualité du processus et des produits sur l’ensemble du territoire national ? En clair, aurez-vous assez de vétérinaires ?
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour explication de vote.
M. Franck Montaugé. Cette discussion est très intéressante et je voudrais vous faire part d’une expérience locale, que j’ai vécue il y a environ deux ans en tant que président de l’agglomération du Grand Auch. Lorsque la question du devenir de l’abattoir s’est posée, la collectivité a fait le choix de racheter le foncier et l’immobilier et d’engager sa modernisation et sa mise aux normes, tandis que les éleveurs ont créé eux-mêmes une société d’exploitation, qui loue l’installation à la collectivité.
Je voudrais attirer l’attention de M. le ministre sur la position des services de l’État : ils privilégiaient alors – je ne crois pas que cela ait beaucoup changé depuis – l’accompagnement de gros outils d’abattage de taille régionale.
Or cet abattoir de taille modeste, environ 12 000 tonnes par an, fonctionne depuis deux ans maintenant et il démontre chaque jour que ce type de structure a toute sa place sur le territoire.
Je voulais vous faire part de cette expérience, parce qu’il existe plusieurs modèles d’abattage, chacun ayant des conséquences sur la manière dont les éleveurs s’emparent de leur propre activité. Cela pose aussi la question de la stratégie nationale conduite par l’État.
Il est vraiment intéressant de noter, dans l’expérience, positive, que j’ai vécue, que ce sont les éleveurs, en se constituant en société et avec l’accompagnement des collectivités, qui ont sauvé l’outil industriel et réussi à convaincre l’État.
J’en tire la conclusion qu’il faut laisser faire les acteurs de terrain. Ils sont les mieux à même, dans le cadre de modèles économiques validés, de présider aux destinées d’outils industriels comme cet abattoir de proximité.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Je voudrais préciser à M. Bazin que, si des abattoirs mobiles sont créés, l’État devra nécessairement mettre en place les effectifs de vétérinaires pour les accompagner. C’est une obligation, pas un choix ! D’ailleurs, je vous ai parlé tout à l’heure d’une enveloppe de 12 millions d’euros supplémentaires consacrée dans le budget pour 2018 à la sécurité sanitaire et aux contrôles ; c’est cette enveloppe qui permettra, si besoin, la création de postes de vétérinaires.
Un abattoir ne peut pas fonctionner en l’absence de vétérinaire pour le contrôler. C’est une obligation de résultat pour l’État !
En ce qui concerne l’expérience évoquée par M. Montaugé, c’est-à-dire un projet porté par les collectivités et les éleveurs, c’est évidemment une bonne solution, dès lors que la viabilité économique est avérée. Une telle structure rend service aux éleveurs et permet de répondre aux besoins de proximité des commerces et des structures de restauration collective. C’est d’ailleurs l’objectif du projet de loi dont nous discutons.
Je rappelle que le grand plan d’investissement peut accompagner ce type de projets, qui se situent dans des territoires ruraux et contribuent à la transformation de l’agriculture.
Dans le cadre de nos travaux sur les zones défavorisées simples, les ZDS, il est évident que, pour maintenir de l’élevage dans certaines zones, il est intéressant de permettre aux éleveurs de faire abattre leurs bêtes dans de bonnes conditions sans avoir à parcourir des centaines de kilomètres.
Je ne doute pas qu’Olivier Allain, qui a reçu pour mission de s’occuper du grand plan d’investissement, aura à cœur d’aller chercher des projets de ce type sur le territoire. Ces projets transformants peuvent rendre service à des territoires en difficulté, comme le sont aujourd’hui certaines communes qui sortent du zonage de l’indemnité compensatoire de handicaps naturels, l’ICHN.
M. le président. La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour explication de vote.
M. Pierre Ouzoulias. Je ne maîtrise pas tous les aspects techniques du dossier des abattoirs, mais je souhaite revenir, sans prolonger le débat, sur ce qu’a dit très justement notre collègue Arnaud Bazin.
Il est essentiel que les agriculteurs se réapproprient la totalité de la chaîne de production, jusqu’à la transformation et la vente. Le type d’expériences évoquées va véritablement dans le bon sens et nous les soutenons, parce qu’ils participent du développement d’un nouveau modèle qui s’appuie sur les circuits courts et la proximité. Il nous faut mettre en place des solutions qui favorisent un meilleur ancrage de l’agriculture dans les terroirs et un rapprochement avec les consommateurs.
Finalement, nous revenons à des choses qui étaient courantes dans nos campagnes il n’y a pas si longtemps que cela. Chez moi, dans le Limousin, on disait : Soquesam dins las piedas daus reires, c’est-à-dire : il faut marcher dans les traces des ancêtres ». Malheureusement, nous avons un peu oublié cette maxime !
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. Je me réjouis de la mise en place de cette expérimentation, qui va dans le bon sens, mais comme cela a été dit, nous devons aussi avoir une attention particulière et bienveillante pour les petits abattoirs non mobiles.
Une telle orientation est cohérente avec la volonté de développer et de structurer des filières de qualité et de proximité. Elle permet d’apporter des réponses à de multiples enjeux : le bien-être animal, l’organisation des filières économiques locales, la qualité de l’alimentation ou encore l’aménagement du territoire.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 205 rectifié, 471 rectifié et 660 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 603 rectifié, présenté par MM. Roux, Cabanel et Montaugé, Mmes Bonnefoy et Artigalas, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Raynal, Mme Taillé-Polian, M. Tissot, Mme Tocqueville, MM. Kanner et Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après le mot :
économique
insérer les mots :
, de ses conséquences sur le réseau d’abattoirs existant
La parole est à M. Henri Cabanel.
M. Henri Cabanel. Cet article prévoit d’expérimenter, pour une durée de quatre ans, le recours à des abattoirs mobiles. Il s’agit notamment de répondre aux besoins d’abattage en petites unités ou d’urgence. Nous partageons la nécessité de mener une réflexion et une expérimentation sur ce sujet. Toutefois, nous estimons aussi que la création de structures mobiles pourrait fragiliser les abattoirs de proximité existants.
La rédaction actuelle de cet article 13 quinquies prévoit que cette expérimentation se traduira par une évaluation de la viabilité économique et de l’impact sur le bien-être animal de ces unités mobiles. Nous proposons de compléter cette évaluation, afin qu’elle ne se réduise pas aux seuls abattoirs mobiles, mais qu’elle prenne en compte les conséquences sur l’ensemble de la filière, dont le réseau de proximité existant.
La préservation d’un réseau de proximité est un atout pour la qualité et la sécurité sanitaire, ainsi que pour le respect du bien-être animal.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Cet amendement nous semble pertinent. Avis favorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 13 quinquies, modifié.
(L’article 13 quinquies est adopté.)
Articles additionnels après l’article 13 quinquies
M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers amendements sont identiques.
L’amendement n° 209 est présenté par Mme Cukierman, M. Gontard et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 438 rectifié est présenté par Mmes Boulay-Espéronnier et Goy-Chavent.
L’amendement n° 550 rectifié est présenté par MM. Cabanel et Montaugé, Mme Artigalas, M. M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Kanner, Roux, Bérit-Débat et J. Bigot, Mmes Bonnefoy, Cartron et M. Filleul, M. Jacquin, Mme Préville, M. Raynal, Mmes Taillé-Polian et Tocqueville, M. Fichet, Mme Blondin et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 13 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les abattoirs situés dans un même département et dans les départements limitrophes de toute exploitation d’élevage sont tenus de s’organiser pour assurer un service d’abattage d’urgence pour les animaux accidentés transportables, au sens du règlement européen (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes, et un service de réception des animaux accidentés non transportables, au sens du chapitre VI de la section I de l’annexe III au règlement (CE) n° 853/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale, abattus d’urgence en dehors d’un abattoir. Ce service est assuré tous les jours ouvrés de l’année entre cinq heures et dix-sept heures. Les abattoirs ne respectant pas ces obligations sont tenus d’indemniser l’apporteur par la prise en charge financière de la valeur monétaire de l’animal et de l’euthanasie.
Un arrêté du ministre de l’agriculture précise les conditions de mise en œuvre du présent article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias, pour présenter l’amendement n° 209.
M. Pierre Ouzoulias. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à Mme Céline Boulay-Espéronnier, pour présenter l’amendement n° 438 rectifié.
Mme Céline Boulay-Espéronnier. Cet amendement propose de fixer un niveau d’ambition élevé pour le service d’abattage d’urgence, tout en limitant les contraintes pour les abattoirs : les horaires iraient de 5 heures à 17 heures, au lieu de 5 heures à 20 heures, et les jours concernés ne seraient que les jours ouvrés, plutôt que 365 jours par an.
Les accidents touchent chaque année de nombreux animaux d’élevage, sans aucun lien avec la maltraitance animale. Selon Interbev, 50 000 bovins sont accidentés chaque année dans les élevages français.
La prise en charge rapide des animaux accidentés est nécessaire pour plusieurs raisons : ne pas causer de souffrance inutile aux animaux ; limiter les risques sanitaires, l’allongement des délais d’attente pouvant se matérialiser par de la fièvre ou une propagation des lésions ; se placer dans un souci de réduction du gaspillage alimentaire, les animaux non pris en charge quarante-huit heures après l’accident ne pouvant réglementairement plus être abattus en vue d’une commercialisation de leur viande.
Or les abattoirs reçoivent les animaux accidentés transportables et les carcasses d’animaux accidentés non transportables sur une base volontaire. Cette activité étant peu rentable pour eux, elle est de moins en moins proposée aux éleveurs. Les délais d’attente des animaux en ferme et le risque de non-prise en charge des animaux accidentés s’accroissent donc au fur et à mesure que ces services disparaissent. Il convient donc de les remettre en place.
M. le président. La parole est à M. Franck Montaugé, pour présenter l’amendement n° 550 rectifié.
M. Franck Montaugé. Cet amendement vise à rétablir un service d’abattage d’urgence, dans chaque département, de 5 heures à 17 heures, pour les animaux accidentés transportables.
Il vient répondre à une attente forte du monde agricole, car le nombre de bêtes perdues chaque année du fait de l’absence de ce type de service est de plus en plus important. Selon l’interprofession, 50 000 bovins sont accidentés annuellement.
La prise en charge rapide de ces animaux accidentés est nécessaire pour des raisons à la fois de souffrance animale, de risque sanitaire et de gaspillage alimentaire.
M. le président. L’amendement n° 472 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano, Castelli, Corbisez, Guérini et Guillaume, Mme Laborde et MM. Léonhardt, Menonville, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 13 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À partir du 1er janvier 2020, les abattoirs situés dans un même département et dans les départements limitrophes de toute exploitation d’élevage sont tenus d’assurer un service d’abattage d’urgence pour les animaux accidentés transportables, au sens du règlement européen (CE) n° 1/2005 du Conseil du 22 décembre 2004 relatif à la protection des animaux pendant le transport et les opérations annexes, et un service de réception des animaux accidentés non transportables, au sens du chapitre VI de la section I de l’annexe III au règlement (CE) n° 853/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale, abattus d’urgence en dehors d’un abattoir.
Ce service est assuré tous les jours ouvrés de l’année entre cinq heures et dix-sept heures.
Un arrêté du ministre chargé de l’agriculture détermine les modalités d’application du présent article.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Cet amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 501 rectifié, présenté par MM. Labbé, Arnell, Artano et Corbisez, Mme N. Delattre et M. Vall, est ainsi libellé :
Après l’article 13 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
À partir du 1er juillet 2019, les abattoirs sont tenus de consulter et d’informer régulièrement, par tous moyens utiles, l’État, leurs clients ainsi que les éleveurs du département dans lesquels ils sont situés, de l’activité et des caractéristiques de leur service d’abattage d’urgence et, le cas échéant, de l’absence de service d’abattage d’urgence.
Un arrêté du ministre chargé de l’agriculture détermine les conditions de mise en œuvre de cette disposition.
La parole est à M. Joël Labbé.
M. Joël Labbé. Il s’agit d’un amendement de repli concernant la question de l’abattage d’urgence. Il vise à éclairer les éleveurs, les clients des abattoirs, l’État et les collectivités sur le fonctionnement réel des dispositifs d’abattage d’urgence existants.
Un arrêté du ministre de l’agriculture permettra d’établir une liste des éléments à transmettre, par exemple les horaires d’ouverture, le nombre de demandes d’abattage d’urgence, en identifiant celles qui ont été satisfaites, ou encore la part des saisies sanitaires. Cet arrêté pourra fixer la liste des destinataires de ces informations et la fréquence de leur envoi.
Ces informations pourront servir de base aux discussions entre abattoirs, éleveurs, clients, État et collectivités, par exemple lors des groupes locaux de concertation et de dialogue sur les abattoirs – appelés comités locaux abattoirs – mis en place à partir de 2017, afin d’émettre des recommandations sur l’évolution des services d’abattage d’urgence.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Anne-Catherine Loisier, rapporteur. Ces amendements visent à rendre obligatoire l’organisation d’un service d’abattage d’urgence avec une permanence relativement large, ce qui ne serait pas économiquement supportable.
Je rappelle que chaque département qui possède un abattoir doit déjà disposer d’un abattoir spécialisé dans l’abattage d’urgence.
Pour ces raisons essentiellement économiques, la commission a donné un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Stéphane Travert, ministre. L’obligation d’instaurer un service d’abattage d’urgence est intéressante et relève, effectivement, de la loi, mais il est indispensable, avant d’adopter une telle mesure, d’en prévoir les modalités de financement. Il reste aussi à vérifier que le maillage territorial des abattoirs permet l’installation d’un tel service.
Nous devons donc travailler en amont, avec les filières, pour identifier les endroits où le dispositif peut être mis en place de manière utile et fiable, sans fragiliser les structures existantes.
J’ajoute, en ce qui concerne l’amendement n° 501 rectifié de M. Labbé, qu’il ne relève pas du domaine de la loi.
Le Gouvernement est donc défavorable à l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Arnaud Bazin, pour explication de vote.
M. Arnaud Bazin. Je suis assez surpris qu’un tel service n’existe pas. Je me suis éloigné de ces sujets depuis quelques années et je n’avais pas relevé que nous étions si défaillants. Monsieur le ministre, je vous donne acte de votre bonne volonté, mais quels sont exactement vos objectifs en la matière ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Il y a deux aspects : le modèle économique, donc le financement d’un tel service, et la liberté d’entreprendre de l’exploitant de l’abattoir. Si l’exploitant ne veut pas mettre en place l’abattage d’urgence, il est difficile de l’y contraindre. Pour autant, un tel service répond à de vraies demandes sur le territoire. C’est pourquoi nous devons ensemble travailler sur cette question.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. L’idée est intéressante, mais nous devons faire très attention. Mettre en place un tel service est très difficile économiquement. En effet, du fait des exigences de sécurité alimentaire, un animal abattu en urgence est le plus souvent impropre à la consommation. Un abattage d’urgence ne peut être effectué qu’après l’avis d’un vétérinaire ; sans cela, l’animal ne peut pas entrer dans la chaîne de l’abattage. En tout cas, un animal qui ne peut pas être admis sur cette chaîne est normalement impropre à la consommation.
M. Arnaud Bazin. Et il va à l’équarrissage…
M. Daniel Gremillet. Absolument !
L’objectif de diminuer la souffrance animale et de réduire le gaspillage est très bon, mais il y a des difficultés.
Certaines choses devraient être reconsidérées : souvenons-nous que, quand nous étions jeunes, nos parents avaient le droit d’abattre des animaux à la ferme, lorsqu’ils étaient blessés, et que la viande était partagée dans le village une fois que le vétérinaire avait donné son accord ! J’ai été élevé comme cela et je suis toujours là, mais les évolutions sanitaires ne permettent plus ce genre de pratiques.
C’est pourquoi je vais suivre l’avis de Mme la rapporteur et de M. le ministre. Encore une fois, l’idée est bonne, mais elle nécessite des moyens énormes, alors même qu’il ne sera, souvent, pas possible de consommer la viande. Prise isolément, cette mesure ne pourra entraîner qu’une grande déception.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Stéphane Travert, ministre. Je souhaite apporter un dernier élément d’information. Les services du ministère réfléchissent actuellement à la question de l’autorisation des abattages sur une exploitation agricole, lorsqu’un animal n’est pas transportable. Évidemment, diverses conditions doivent être réunies : présence d’un vétérinaire, respect de règles sanitaires et d’hygiène… En outre, c’est un vétérinaire appartenant aux services du ministère qui peut aujourd’hui décider, le cas échéant, si la viande est impropre à la consommation ou non. Vous le voyez, le problème est complexe.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 209, 438 rectifié et 550 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Monsieur Labbé, l’amendement n° 501 rectifié est-il maintenu ?
M. Joël Labbé. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 501 rectifié est retiré.
Mes chers collègues, nous avons examiné 227 amendements au cours de la journée ; il en reste 140.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
6
Clôture de la session ordinaire de 2017-2018
M. le président. Madame la ministre, mes chers collègues, aux termes du premier alinéa de l’article 28 de la Constitution, « le Parlement se réunit de plein droit en une session ordinaire qui commence le premier jour ouvrable d’octobre et prend fin le dernier jour ouvrable de juin ».
Je vais lever la dernière séance de la session ordinaire, qui sera close samedi 30 juin à minuit.
À partir du lundi 2 juillet, le Parlement sera réuni en session extraordinaire.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 2 juillet 2018, à quatorze heures trente et le soir :
Ouverture de la session extraordinaire.
Suite du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (n° 525, 2017-2018) ;
Rapport de M. Michel Raison et Mme Anne-Catherine Loisier, fait au nom de la commission des affaires économiques (n° 570, 2017-2018) ;
Avis de M. Pierre Médevielle, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 563, 2017-2018) ;
Texte de la commission (n° 571, 2017-2018).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée le samedi 30 juin 2018, à zéro heure trente.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD