M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 411.
Mme Michelle Meunier. Cet amendement a aussi pour objet la suppression de l’article 50.
En effet, nous ne comprenons pas la logique du Gouvernement qui tend, en même temps, à renforcer les pouvoirs de l’inspection du travail dans ses contrôles et ses sanctions contre la fraude au travail détaché et à alléger les obligations pesant sur les employeurs qui y ont recours.
Par ailleurs, le cadre législatif du travail détaché est remanié tellement régulièrement que l’inspection du travail n’a pas le temps d’intégrer ces modifications que ces dernières ont déjà changé. En outre, une nouvelle directive européenne vient d’être adoptée en ce domaine, comme mon collègue l’a souligné. Inutile donc de modifier une énième fois le dispositif avant la transposition de ladite directive.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Il est vrai que nous nous sommes, nous aussi, interrogés sur les accords bilatéraux, qui avaient le mérite d’assouplir les règles déclaratives, sans remettre en cause, sur le fond, l’intégralité du dispositif relatif au détachement. La commission a décidé, vous vous en souvenez, d’apporter des précisions au travers d’un certain nombre d’amendements, afin d’éviter les entreprises dites « boîtes aux lettres », etc.
Cela étant, le débat est caduc dans la mesure où l’amendement n° 684 du Gouvernement que nous allons examiner vise à supprimer ces accords.
La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques, mais tout cela est bien éphémère, si j’ose dire, puisque nous allons rediscuter de cette question dans quelques instants.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est défavorable à ces deux amendements identiques. Oui, il s’agit d’amendements de teasing, si je puis dire, et nous allons parler plus au fond du sujet dans quelques instants.
Permettez-moi simplement de dire qu’il ne faut pas confondre deux sujets : celui du travail détaché, dont on veut renforcer les règles – nous en reparlerons avec la transposition de la directive – et celui qui est lié à certaines activités frontalières. Aujourd’hui, la France est le seul pays européen à connaître une situation compliquée non pas parce que l’on contrôle le travail détaché, mais parce que l’on applique les mêmes règles pour tous.
Comme le sport est un sujet d’actualité, je prendrai un exemple en la matière : si un journaliste sportif vient couvrir le Tour de France durant une journée ou deux, il doit faire une déclaration de détachement de travailleur. (M. Pascal Savoldelli s’exclame.) Il en est de même pour l’Orchestre philharmonique de Berlin, le Bayern de Munich ou encore les participants aux salons accueillis au parc des expositions de la porte de Versailles. Pour autant, nous en sommes d’accord, ce n’est pas cela le travail détaché.
En revanche, la DIRECCTE devra donner son avis pour vérifier que l’on ne s’engouffre pas dans le véritable travail détaché pour le Bayern de Munich, par exemple.
Il faut régler certains problèmes liés aux activités frontalières, qui ne sont pas dommageables en soi. Celles-ci ne constituent pas un véritable détachement, mais sont considérées comme telles en France, et seulement en France, avec toutes les obligations afférentes.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Ma collègue Michelle Meunier l’a indiqué, nous nous interrogeons sur, d’un côté, l’allégement des obligations et, de l’autre, les pouvoirs renforcés pour l’inspection du travail et les moyens qui lui sont alloués.
En effet, depuis plusieurs années, nous le savons, on enregistre une baisse continue du nombre d’agents de contrôle, qu’ils soient contrôleurs du travail ou inspecteurs du travail. Cette diminution devant se poursuivre davantage encore cette année et l’année prochaine, on se demande bien comment les agents pourront mettre en œuvre ces prérogatives. Madame la ministre, à la question que je vous ai posée sur ce sujet lors de votre audition par la commission des finances, le 19 juin dernier, vous m’avez répondu qu’il n’y avait pas de problème, puisque le nombre d’inspecteurs ou d’agents de contrôle était suffisant au regard des normes de l’Organisation internationale du travail et que, surtout, vous aviez recentré les priorités de l’inspection du travail sur la santé et les conditions de travail, le travail illégal, la fraude au détachement et l’égalité salariale. Pourquoi pas ?… Peut-être que les agents de contrôle de l’inspection du travail se dispersaient jusqu’à présent dans leurs activités… Toutefois, les précédentes priorités étaient identiques !
Quand on examine aujourd’hui les données qui nous sont transmises par le ministère du travail lors des auditions ou dans les réponses aux questionnaires portant sur les crédits de la mission « Travail et emploi », que j’envoie en tant que rapporteur spécial, avec mon collègue Emmanuel Capus, on voit bien aujourd’hui que 44 % des principales missions exercées par l’inspection du travail concernent la santé au travail, avec, notamment, le risque amiante et celui de chutes de hauteur et 30 % d’entre elles quasiment ont trait à la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement. En fait, les priorités sont les mêmes, elles n’ont pas changé, mais les moyens, eux, diminuent et les exigences augmentent.
On se demande comment on va faire pour mettre vraiment tout cela en place, à moins que ce ne soit là que de la communication…
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. Bon, votre réponse était sympa, madame la ministre, elle nous a permis un petit moment de détente… Mais quand on parle de la contiguïté des pays concernés par cette question, avec 500 000 salariés, j’espère que l’exemple du journaliste sportif ou du commercial participant à un salon ne sortira pas de cette enceinte ! Ce n’est pas du tout la typologie du problème des travailleurs détachés ni celle des filières concernées.
M. Pascal Savoldelli. Certes, mais…
M. Pascal Savoldelli. C’est mieux de le dire !
M. Pascal Savoldelli. C’est mieux de le dire, mais quand même…
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Il n’a pas écouté !
M. Pascal Savoldelli. Sauf à ne pas connaître les territoires ni le monde de l’entreprise !
Mme le rapporteur nous invite à considérer l’amendement n° 684 du Gouvernement. Je vous pose donc de nouveau deux questions.
Premièrement, les régions frontalières ont-elles été associées ? Vous ne pouvez pas me taxer de réflexe partisan ou idéologique – aucun président de région ne porte notre étiquette politique ! – ; nous nous préoccupons des collectivités territoriales. Les régions frontalières ont-elles été, oui ou non, consultées, celles de notre pays, mais aussi celles des pays contigus ? Je souhaiterais avoir une réponse à cette première question.
Deuxièmement, des entreprises ou des groupes à visée transnationale – je vise le monde de l’entreprise : il nous est forcément commun ici – ont-ils été associés à cette décision ? Merci de vos réponses, madame la ministre.
M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour explication de vote.
Mme Véronique Guillotin. On parle effectivement des connaissances et des spécificités des territoires.
J’irai pour ma part dans le sens de l’article 50. La réalité, c’est qu’il y a des travailleurs détachés au sens où certains veulent bien l’entendre, mais il y a aussi des zones frontalières, je dirai même des zones transfrontalières.
Résidant sur un territoire transfrontalier franco- luxembourgeois, à un kilomètre de la frontière, je constate que les frontières sont abolies par un espace de vie en commun. Des espaces contigus ou, en tout cas, de coopération existent également par l’intermédiaire d’outils que l’on appelle les GECT, les groupements européens de coopération territoriale. On voit aujourd’hui la difficulté à faire vivre ces territoires : les habitants ont des espaces de consommation, de vie, de travail, qui sont aussi français que luxembourgeois, et il leur est compliqué dans la vie courante et quotidienne de s’y retrouver, à cause du trop grand nombre de freins administratifs et législatifs.
Toutes les mesures visant à favoriser la fluidité, y compris d’un point de vue économique – du côté français, on a un mal fou à trouver du travail –, vont dans le bon sens.
M. Pascal Savoldelli. On n’a pas de réponse de la ministre ?… Merci pour les parlementaires !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 226 et 411.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. L’amendement n° 684, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéas 4 à 7
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Cet amendement me donne l’occasion d’expliquer la stratégie plus globale concernant la lutte contre les fraudes au détachement pour répondre à la question qui m’a été posée.
Lors de l’examen des amendements précédents, on a parlé d’un problème mineur pour aborder ensuite un problème majeur. Après l’article 52, je vous proposerai un amendement visant à vous demander une habilitation à transposer rapidement dans notre droit interne la nouvelle directive européenne relative au détachement de travailleurs, qui vient d’être adoptée définitivement.
Il y a deux sujets différents. Le sujet principal concerne le détachement de travailleurs qui, tant qu’il n’est pas de nature à créer une concurrence déloyale ni du dumping social, n’est pas un problème, mais en devient un s’il a des conséquences économiques ou sociales négatives. Le détachement augmente beaucoup, avec 560 000 travailleurs détachés en France l’année dernière, soit une augmentation de 46 %, ce qui constitue une forte augmentation. Les flux augmentent aussi dans d’autres pays. C’est la raison qui explique l’importance de cette directive sur les travailleurs détachés.
Lorsque nous sommes arrivés aux affaires, il y a quatorze mois, le texte révisé de la directive de 1996 – la première révision – qui était sur la table devait être signé trois semaines plus tard, mais nous avons considéré qu’il n’était pas assez protecteur sur le plan social ni au regard des engagements en matière de concurrence pour les PME et les TPE.
La France d’abord, suivie ensuite par l’Allemagne et bien d’autres pays – une très large majorité des pays d’ailleurs –a adopté cette directive après renégociation, et le processus européen vient de s’achever il y a quelques jours. Cette directive, qui est maintenant transposable dans notre droit interne, est importante en ce qu’elle permettra un salaire égal à travail égal, en prenant en compte tous les éléments de rémunération, ce qui n’était pas le cas avant – on pouvait déduire certains éléments de rémunération –, ainsi qu’un contrôle renforcé et coordonné du travail détaché pour lutter contre la fraude – le détachement de certains travailleurs ne pose aucun problème, mais il existe des cas de fraudes et de fraudes organisées, à l’image des entreprises « boîtes aux lettres », par exemple, un sujet bien connu. On va donc pouvoir transposer dans notre droit interne toute une série de mesures. Voilà le sujet principal du travail détaché : il s’agit de réguler mieux pour éviter le dumping social et assurer la protection des salariés ainsi que l’égalité de traitement, afin de ne pas nuire à la concurrence.
Le sujet que l’on traite ici est mineur si j’ose dire, il concerne les frontaliers ordinaires, ceux qui viennent travailler dans notre pays un ou deux jours ou plus régulièrement, mais dans le cadre d’une prestation de services ; je veux parler des salariés qui rendent un service ou assurent une livraison dans le pays frontalier ou des cadres qui, au sein d’une entreprise, voyagent toutes les semaines ; je pense aux cadres d’Airbus, dont l’équipe est binationale. Dans ce cas, la DIRECCTE pourra procéder à des évaluations, simplifier la procédure pour accorder des dérogations. Mais c’est là effectivement une petite partie du sujet, qu’il faut néanmoins traiter, l’essentiel ayant trait à la question de la directive sur les travailleurs détachés, que nous examinerons ultérieurement.
Pour en revenir à l’amendement n° 684 – excusez-moi d’avoir extrapolé, mais il était important d’apporter ces précisions –, nous proposons de supprimer les alinéas 4 à 7 de l’article 50.
Le Gouvernement avait prévu la possibilité de conclure des accords bilatéraux avec des pays frontaliers. Or il s’avère que cette solution n’apparaît pas aujourd’hui la plus adaptée aux situations visées. L’alternative efficace, c’est la possibilité d’évaluer au cas par cas la situation particulière des entreprises, en vue de bien distinguer le « minifrontalier ordinaire », si je puis dire, exceptionnel ou quotidien, mais qui n’exerce pas vraiment un travail détaché, du travailleur détaché.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Madame la ministre, comme vous l’avez précisé, les amendements nos 684 et 685 du Gouvernement traitent d’un sujet similaire.
Je ne reviendrai pas sur l’amendement n° 750, dont nous avons débattu hier de minuit à minuit et demi. Cela étant, permettez-moi d’intervenir sur la forme, avant d’en venir au fond sur votre amendement.
Le texte que nous avons reçu du Gouvernement évoquait, dans ses alinéas 4 à 7, les accords bilatéraux. Nous avons passé du temps, lors des auditions, à évoquer ces accords. On nous a dit que ceux-ci étaient demandés par les Allemands, notamment, sur la forme. Nous avons aussi passé du temps à amender les mesures prévues pour découvrir jeudi – ô surprise ! – un amendement visant à supprimer ces alinéas, qui sont, madame la ministre, vos propres alinéas. Je suis désolée de vous le dire, mais cette pratique contredit le discours du Gouvernement sur sa volonté de respecter le Parlement. À moins qu’il ne s’agisse là d’impréparation…
En tout état de cause, et avec tout le respect que j’ai pour vous, je ne puis pas laisser passer cet amendement du Gouvernement. La commission propose donc un avis de sagesse.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Je veux préciser trois choses.
Premièrement, j’entends ce que vous dites, mais cet amendement a été déposé dans les formes et dans les délais.
Deuxièmement, pour vous dire la vérité, il ne vous aura pas échappé qu’il y a eu un changement de gouvernement en Allemagne. Nous avons rediscuté des conditions pour aboutir à quelque chose qui convient aux deux pays et aux autres pays limitrophes. Il importait de régler le problème et on l’a fait dans les formes.
Troisièmement, permettez-moi de revenir sur les modalités. Vous m’avez demandé si des consultations avaient eu lieu. On a fait des tests auprès des entreprises. Il s’agit en fait d’un amendement de bon sens. Pour ce qui concerne les modalités d’application, nous allons nous concerter avec les régions, notamment le Grand Est, le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-Palatinat, qui sont directement concernées. On les a écoutées, mais on va examiner ensemble les modalités d’application.
M. Pascal Savoldelli. Merci de la réponse, madame la ministre ! La concertation a tout de même lieu, mais après !
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Avis favorable alors…
M. le président. Je mets aux voix l’article 50, modifié.
(L’article 50 est adopté.)
Article additionnel après l’article 50
M. le président. L’amendement n° 685, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 50
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre III du titre VI du livre II de la première partie du code du travail est complété par un article L. 1263-8 ainsi rédigé :
« Art. L. 1263-8 – L’autorité administrative, saisie par un ou plusieurs employeurs détachant de manière récurrente des salariés dans les conditions prévues aux 1° et 2° de l’article L. 1262-1 ou par un organisme ayant mandat, peut aménager les modalités selon lesquelles les obligations prévues aux I et II de l’article L. 1262-2-1 et à l’article L. 1263-7 sont satisfaites lorsque sont apportées à l’appui de leur demande les informations attestant du respect des dispositions légales et des stipulations conventionnelles dans les matières énumérées à l’article L. 1262-4.
« Les aménagements consentis pour une durée ne dépassant pas un an sont notifiés au demandeur.
« Pendant la durée ainsi fixée, l’autorité administrative peut demander communication des documents prévus par l’article L. 1263-7.
« L’autorité administrative met fin aux aménagements accordés en vertu du premier alinéa soit lorsque les modalités définies sur le fondement du premier alinéa n’ont pas été respectées, soit en cas de constat d’un manquement aux règles applicables dans les matières énumérées à l’article L. 1262-4.
« La demande de renouvellement des aménagements est assortie de tout élément attestant du respect des dispositions légales et des stipulations conventionnelles dans les matières énumérées à l’article L. 1262-4 pour la période écoulée.
« Un décret en Conseil d’État détermine la nature des aménagements pouvant être accordés en vertu du présent article. »
La parole est à Mme la ministre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Sagesse.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 50.
Article 51
I. – Au I de l’article L. 1262-2-1 du code du travail, les références : « articles L. 1262-1 et L. 1262-2 » sont remplacées par les références : « 1° et 2° de l’article L. 1262-1 et à l’article L. 1262-2 ».
II. – Au 1° de l’article L. 1262-4-4 du code du travail, les mots : « , ou son représentant désigné en application de l’article L. 1262-2-1 » sont supprimés.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 227 est présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 412 est présenté par Mmes Meunier et Grelet-Certenais, M. Daudigny, Mmes Féret et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lienemann, Lubin et Rossignol, M. Tourenne, Mme Van Heghe et les membres du groupe socialiste et républicain et apparentés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour présenter l’amendement n° 227
Mme Laurence Cohen. Il fallait faire évoluer la législation sur le travail détaché en permettant, notamment, aux entreprises étrangères sans représentation dans notre pays de détacher temporairement un ou plusieurs salariés, en vue d’y réaliser, par exemple, une mission commerciale ponctuelle. En l’espèce, l’entreprise n’aurait plus l’obligation de déclaration par le biais d’un correspondant et devrait en quelque sorte se débrouiller toute seule avec l’inspection du travail en France. Cela va nécessiter une très forte mobilisation des services du ministère du travail. À cet égard, j’estime que l’on demande beaucoup à l’inspection du travail, alors que les moyens humains et financiers qui lui sont alloués se réduisent comme peau de chagrin – ce point est à souligner.
En outre, cet assouplissement risque de permettre la mise en place de stratégies de contournement de la législation française par un certain nombre d’employeurs étrangers. C’est pourquoi nous proposons de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à Mme Michelle Meunier, pour présenter l’amendement n° 412.
Mme Michelle Meunier. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Ces deux amendements identiques visent à supprimer l’article qui aménage les règles de détachement pour « compte propre » des entreprises.
Nous en sommes d’accord, cet article dispense les entreprises de la déclaration préalable de détachement et de la désignation d’un correspondant, mais le prestataire devra toujours respecter les règles relatives au détachement – il est important de le rappeler.
Il s’agit plutôt – cela nous a été confirmé – d’une procédure de simplification. Cet article nous paraissant présenter un intérêt, la commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Muriel Pénicaud, ministre. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements identiques.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 227 et 412.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 51.
(L’article 51 est adopté.)
Article 52
L’article L. 1262-4-6 du code du travail est abrogé.
M. le président. L’amendement n° 495, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article L. 1262-4-6 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 1262-4-6. – Tout employeur établi hors de France qui détache un salarié sur le territoire national est assujetti à une contribution égale à la différence entre le montant des cotisations patronales acquittées dans le pays d’origine et celui qui devrait l’être si elles étaient dues en France.
« Les modalités de calcul de cette compensation sont fixées par décret en Conseil d’État.
« La contribution est recouvrée selon les règles applicables en matière de créances étrangères à l’impôt et au domaine. »
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Dans les faits, le code actuel fixait une contribution minimale des entreprises étrangères pour faciliter la mise en place du système de traitement des données. Il faut croire que les moyens de conception et de mise en œuvre de ce système ont été réunis, puisque l’article 52 prévoit la suppression pure et simple de la contribution.
À la vérité, la contribution n’a jamais fait l’objet du moindre recouvrement, alors même que, comme beaucoup d’impôts de faible quotité, elle présentait l’avantage de permettre l’identification des entreprises recourant au travail détaché.
On notera que, en même temps, pour tenir l’équilibre, d’une certaine manière, l’article 53 prévoit de majorer les amendes administratives pour infraction au travail détaché, sans en majorer le montant maximal, soit dit en passant.
Pour notre part, nous préférons tirer parti de la discussion de ce projet de loi pour modifier le contenu de cet article du code du travail. En lieu et place d’un financement des systèmes d’information du ministère du travail, qui n’a d’ailleurs jamais été mis en place finalement, nous sommes partisans du versement d’une sorte de différentiel des cotisations sociales patronales, au bénéfice de notre système de sécurité sociale.
Les modes de financement de la sécurité sociale sont différents d’un pays l’autre et les taux applicables aux cotisations de la part patronale plutôt variables. Seuls, en effet, les deux royaumes de Suède et de Belgique ont des montants de cotisations patronales plus élevés. Mais il convient de noter que, si les coûts du travail dans l’industrie sont proches en France et en Allemagne, l’Allemagne dispose d’un différentiel en sa faveur dans le secteur des services, fondé sur le développement d’un grand nombre de « petits boulots » mal payés dans le domaine des services connexes aux activités industrielles.
D’ailleurs, c’est pour cette raison que l’on a créé en France le CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, et mis en œuvre le pacte de responsabilité et de solidarité. Objectif dépassé au-delà de toute espérance : 29 % des contrats de travail signés depuis le début de l’année sont des contrats d’un jour !
Tel est le sens de cet amendement que je vous invite à adopter, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. Cher collègue, l’article 52 vise effectivement à supprimer la contribution financière relative à la déclaration préalable de détachement, que l’on appelle le droit de timbre, d’un montant de quarante euros. Vous proposez de la remplacer par la contribution différentielle en matière de cotisations sociales pour les prestataires qui détachent des salariés en France, dont le montant dépassera largement les quarante euros, vous avez parfaitement raison.
Cela dit, cet amendement est contraire au droit européen.
En effet, le règlement européen d’avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale prévoit que ce sont les règles du pays d’origine qui s’appliquent pendant les deux premières années d’un détachement en matière de sécurité sociale.
J’ajoute que la Commission européenne a présenté en décembre 2016 une proposition de révision de ce règlement, qui est toujours débattue. Aussi, je vous invite à y apporter votre contribution.
M. Fabien Gay. Avec vous !
Mme Frédérique Puissat, rapporteur. En tout état de cause, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 52.
(L’article 52 est adopté.)
Article additionnel après l’article 52
M. le président. L’amendement n° 681 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 52
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de transposer les dispositions de la directive (UE) 2018/957 du Parlement européen et du Conseil du 28 juin 2018 modifiant la directive 96/71/CE concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d’une prestation de services.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.
La parole est à Mme la ministre.