M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, après l’échec de la commission mixte paritaire au début du mois d’avril, assumé par l’Assemblée nationale, nous examinons, en nouvelle lecture, le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.
« L’erreur est humaine, mais l’entêtement [dans son erreur] est diabolique. » Cette formule attribuée à Sénèque – cela fera plaisir à notre collègue Pascal Savoldelli (Sourires.) – garde toute sa modernité tant à l’adresse de nos collègues députés que pour ce qui concerne ce projet de loi, dont la principale mesure tend à généraliser le droit à l’erreur dans les relations entre l’administration et les administrés, particuliers comme entreprises.
Cela a été dit et répété, il s’agit d’un texte attrape-tout. Si le titre Ier comporte bien des mesures relatives au droit à l’erreur – lors de contrôles visant les usagers en matière de prestations sociales, en l’absence de certaines pièces justificatives dans la constitution d’un dossier, par l’extension et la généralisation de la pratique du rescrit –, les titres suivants sont porteurs de mesures les plus diverses : expérimentation de simplification dans la délivrance de titres, mutualisation de gestion de certificats de pensionnés de retraite, nombreuses habilitations à légiférer par ordonnance dans le domaine de la construction, accueil de la petite enfance, régime de responsabilité des agences de notation de crédit, et j’en passe.
Aussi, et afin de conserver le cap que mon groupe s’était fixé en première lecture et pour ne pas surcharger inutilement les débats en cette fin de soirée et de session extraordinaire, je concentrerai mon propos sur quelques points qui me paraissent particulièrement essentiels et qui n’ont, à mon sens, pas leur place dans ce projet de loi.
Je veux d’abord parler de l’article 38 visant, notamment, à supprimer l’obligation d’inscription au registre des représentants d’intérêts pour les associations cultuelles.
Si je remercie M. le secrétaire d’État Olivier Dussopt du compromis trouvé sur les revenus cultuels tirés d’immeubles de rapport, une promesse tenue comme à votre habitude,…
M. Julien Bargeton. Très bien !
Mme Nathalie Delattre. … la question du registre, que nous avions déjà soulevée en première lecture, continue, quant à elle, de poser des difficultés importantes. Je regrette que nous n’ayons pu parvenir à un accord ni en commission spéciale ni avec le Gouvernement sur ce point. Si elle est adoptée en l’état, cette disposition constituera un recul important par rapport à la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique.
Il n’y a rien de choquant à ce que les associations cultuelles fassent du lobbying et qu’elles soient considérées comme des représentants d’intérêts comme les autres auprès du parlement français et des pouvoirs publics ; c’est déjà le cas au niveau européen. Comme d’autres acteurs de la société civile, ces associations peuvent intervenir dans le débat public, dans le respect de la loi de 1905 et de l’article 1er de la Constitution, mais elles doivent le faire en toute transparence. Je proposerai donc de nouveau, en accord avec de nombreux collègues de cette assemblée, la suppression de l’alinéa 2 de cet article.
Pour changer de sujet et en cohérence également avec la position déjà exprimée, je demanderai de nouveau la suppression de l’article 19 portant habilitation à restructurer les réseaux de chambres d’agriculture par voie d’ordonnance. Malgré des améliorations apportées en commission spéciale, avec une meilleure prise en compte des prérogatives des chambres départementales, je continue à considérer que cette mesure est un cavalier législatif, préjudiciable aux réseaux de chambres d’agriculture.
Enfin, avec mon collègue Franck Menonville et en complémentarité avec le groupe socialiste et républicain, nous souhaitons nous associer à la volonté de garantir le droit à l’erreur dans l’application des règles administratives de la PAC, la politique agricole commune, qui posent tant de difficultés aux agriculteurs, un droit qui n’est pas assuré par le projet de loi dans sa rédaction actuelle et qu’il faut établir.
J’apporterai également mon plein soutien à l’amendement, adopté de nouveau par la commission spéciale, visant à garantir un droit à régularisation en cas d’erreur pour les collectivités territoriales. Les collectivités et leurs groupements ont effectivement besoin du regard bienveillant de l’État et des organismes de sécurité sociale dans les missions qu’ils accomplissent au quotidien et dans le cadre des procédures qu’ils engagent. Ainsi, avec cette disposition, nous aurions un dispositif complet garantissant une administration à l’écoute de tous les usagers, citoyens, entreprises et collectivités.
Lors de la première lecture, la majorité des membres du RDSE se sont abstenus sur le vote de ce projet de loi. Nous conditionnons, comme en première lecture, notre vote à l’adoption des amendements précités et, plus précisément, de celui qui porte sur la suppression de l’alinéa 2 de l’article 38 et l’obligation d’inscription des associations cultuelles au registre des représentants d’intérêts que nous demandons. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain, ainsi qu’au banc des commissions. – M. Julien Bargeton ainsi que Mmes Cécile Cukierman et Michèle Vullien applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission spéciale, madame, monsieur les rapporteurs, nous sommes réunis ce soir – peut-être même prolongerons-nous nos débats dans la nuit – pour procéder à une nouvelle lecture du projet de loi dit « pour un État au service d’une société de confiance ». Il s’agit d’un texte aux ambitions multiples, dont l’objet central est de promouvoir l’établissement d’une nouvelle relation entre l’État et les citoyens, en leur qualité d’usagers de l’administration. Cette relation se veut être basée sur la confiance.
Je pense que nous pouvons tous ici appeler de nos vœux l’émergence d’une telle « société de confiance », même si l’on pourrait nous opposer que, au cours des derniers mois, le Gouvernement a semblé peu disposé à suivre cette voie : non-communication du rapport du Comité Action publique 2022 aux membres dudit comité ; échec de la négociation dans la mise en œuvre du dispositif de contractualisation avec les collectivités locales, deux exemples emblématiques parmi d’autres qui incitent plutôt à la méfiance.
Instaurer cette relation de confiance nécessite d’ajuster et de moderniser la pratique administrative.
Le droit à l’erreur constitue une innovation intéressante en ce qu’il écarte la possibilité de sanctionner le citoyen ayant commis une erreur de bonne foi et cherchant à la régulariser. Ce dispositif présente l’avantage de sortir l’administré de l’état de suspicion presque systématique qui prévalait jusqu’ici : après tout, si la présomption d’innocence guide notre procédure pénale, la même démarche ne serait-elle pas tout aussi naturelle dans les relations entre administration et administrés ?
Le droit au contrôle, contrepartie du droit à l’erreur, ouvre un droit pour le citoyen d’être contrôlé et donc de pouvoir s’assurer qu’il respecte bien la norme.
Mettre en œuvre ces deux droits permet d’établir les conditions d’une confiance mutuelle : pour l’administration, le citoyen ne sera plus systématiquement présumé comme étant délibérément en faute, tandis que, pour ses interlocuteurs, l’administration ne sera plus vue comme disposée à systématiquement les sanctionner, y compris ceux qui le seraient de bonne foi.
Autour de ce diptyque s’articulent de nombreuses autres mesures. Le rapport de certaines d’entre elles avec l’objet général du projet de loi est parfois ténu. Cela a conduit le Sénat à proposer une nouvelle dénomination de ce texte fourre-tout, « attrape-tout », multipliant les mesures expérimentales ou les habilitations à légiférer par ordonnance. Le nouveau titre « projet de loi renforçant l’efficacité de l’administration pour une relation de confiance avec le public » paraissait plus en adéquation avec le contenu réel du texte. Mais les députés ont considéré que ce titre tendait à « récuser la philosophie même du projet de loi dont l’ambition est, en changeant l’État, de susciter de nouveaux comportements sociaux ».
Mes chers collègues, il me semble que les dispositions hétéroclites de ce texte ne sont pas la parfaite illustration de cette ambition. En effet, dans le projet de loi adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale, nous trouvons de nombreuses mesures portant sur la modernisation des pratiques administratives : il s’agit notamment du développement des rescrits administratifs et autres actes opposables, du recours aux médiateurs, de la dématérialisation ou encore de l’essor du guichet unique. Je pense aussi à d’autres mesures concernant la simplification et l’évaluation des mesures administratives, comme la possibilité d’effectuer des regroupements volontaires d’établissements dans l’enseignement supérieur, la mise en place du « relayage » au domicile dans l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie ou encore la demande de plusieurs rapports au Gouvernement.
Enfin, je citerai des mesures plus éloignées de l’objet principal du texte, celles qui sont relatives aux énergies renouvelables, mais aussi au régime des associations cultuelles et à la responsabilité des agents publics.
Notre assemblée, notamment sur l’initiative de ses deux rapporteurs, avait réalisé un important travail d’amélioration et de mise en cohérence du texte initial. Malheureusement, et en dépit des efforts des sénateurs, les discussions en commission mixte paritaire n’ont pu donner lieu à un accord. L’une des raisons de cet échec a notamment été l’insistance de nos collègues députés du groupe La République En Marche à inscrire coûte que coûte à l’article 34 des dispositions tendant à remettre en cause les résultats des appels d’offres relatifs à la production d’électricité en mer à partir de l’énergie mécanique du vent.
Comme l’a si justement rappelé le rapporteur Jean-Claude Luche, si le Sénat ne peut être en désaccord avec l’objectif poursuivi, à savoir diminuer le coût de l’électricité pour les consommateurs, il ne pouvait rester muet sur la forme : des dispositions introduites par un amendement de dernière minute du Gouvernement – encore un, ai-je envie de dire ! –, échappant ainsi à l’avis du Conseil d’État et à l’étude d’impact. Si l’on en croit les déclarations du Président de la République au cap Fréhel, un accord sur la renégociation des contrats a été trouvé avec les trois consortiums lauréats. Que de temps perdu, alors même que le calendrier législatif de ces dernières semaines a été très chargé ! Je loue ici la sagesse de la commission spéciale, qui n’a pas souhaité rouvrir le débat.
Cependant, ce texte présente de nombreux éléments intéressants, mais dont la portée a été affaiblie par une étude d’impact jugée insuffisante par la commission spéciale, par un manque de lisibilité et par des changements d’arbitrage du Gouvernement sur des points importants. C’est, par exemple, le cas de l’article 38 relatif au statut des cultes. Était-il indispensable de traiter cette question complexe dans ce projet de loi ? Sans doute pas ! La dernière version de cet article, adoptée par l’Assemblée nationale et acceptée par la commission spéciale, a été en grande partie vidée de son contenu.
Le travail législatif effectué jusqu’à présent a permis d’améliorer le texte, et nous continuerons de le faire ce soir.
À l’occasion de la nouvelle lecture, les députés ont toutefois affiché leur désir d’aboutir à un compromis. Ils ont, à cette occasion, maintenu vingt et un articles dans la rédaction issue des travaux du Sénat. C’est la même volonté qui a animé les membres de la commission spéciale ; en témoigne la limitation du droit à l’erreur des collectivités territoriales aux petites communes. Cependant, sur d’autres points, comme les multiples demandes de rapport prévues aux articles 40, 41, 42 et 46, le Sénat n’a pas abandonné sa philosophie.
Le ministre de l’action et des comptes publics s’est engagé devant les députés à faire en sorte que les décrets d’application soient tous publiés avant le 31 décembre 2018. Plus rien ne s’oppose désormais à ce que le projet de loi entre en vigueur et, espérons-le, instaure cette société de confiance que nous appelons tous de nos vœux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à la suite de l’échec de la commission mixte paritaire le 5 avril dernier, nous voici aujourd’hui amenés à discuter en nouvelle lecture du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance. Ce texte, que l’on a pu résumer en deux mots – « confiance » et « simplification » –, a nourri de nombreux espoirs avant même son dépôt. Sont ici en jeu non seulement la confiance des citoyens envers leur administration, mais également la confiance des entreprises en l’efficacité de l’État.
Sur le plan de la simplification, le projet de loi procède du constat suivant lequel l’imbrication des procédures entrave trop souvent le bon fonctionnement des services publics, encourageant conséquemment la défiance des particuliers comme des entreprises. Ces espoirs, il faut bien le dire, ont été largement déçus.
Le projet de loi transmis par l’Assemblée nationale était parsemé de mesures superfétatoires. Nous nous sommes donc attachés à les faire disparaître en commission spéciale, puis en séance publique, contribuant ainsi à ancrer le texte dans la réalité.
Le Sénat s’est ainsi montré constructif, tentant de donner à ce texte une cohérence qui lui faisait défaut. Tout en supprimant un grand nombre de rapports parfaitement inutiles, nous avions cherché à sauvegarder les prérogatives du Parlement, en limitant rigoureusement la durée des habilitations à légiférer, la loi ne pouvant et ne devant se faire en permanence sans le Parlement.
Pourtant, à en croire le Gouvernement et sa majorité à l’Assemblée nationale, qui n’ont pas voulu entendre nos remarques, cette attitude constructive était vaine. Ainsi, malgré notre volonté de trouver un compromis, les députés ont choisi de faire échouer la réunion de la commission mixte paritaire, butant en particulier sur la reconnaissance du droit à l’erreur au bénéfice des collectivités locales et sur la question de l’éolien en mer.
Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des arguments avancés en CMP. Je profite toutefois de l’occasion pour saluer la sagacité et la ténacité de la commission spéciale du Sénat et de ses rapporteurs qui, dans un esprit toujours positif et prospectif, n’ont déposé que vingt-quatre amendements. Cela prouve la volonté du Sénat de trouver un compromis, malgré les soixante-huit articles restant encore en discussion.
Après ces remarques sur la forme, j’en viens maintenant au fond.
Là encore, plusieurs points sont à déplorer, à commencer par l’article 2 relatif aux droits à l’erreur et au droit au contrôle. La commission spéciale du Sénat avait proposé plusieurs améliorations du dispositif, afin de le rendre plus incitatif, mais nous n’avons pas été écoutés par l’Assemblée nationale. C’est donc une bonne chose que la commission spéciale, par la voie d’amendements de son corapporteur, persiste à vouloir améliorer ce mécanisme.
J’émets, pour ma part, plus de réserves à propos de l’article 2 bis A, qui prévoyait d’étendre le bénéfice du droit à l’erreur aux collectivités territoriales. Si je demeure convaincue du bien-fondé de cette disposition, je ne pense pas qu’il faille à tout prix s’engager dans des compromis et dévoyer l’esprit initial de l’article en réservant le bénéfice de cette disposition aux communes de moins de 3 500 habitants et aux EPCI dont aucune commune membre n’a plus de 3 500 habitants.
Si votre proposition est compréhensible, madame la rapporteur, je ne m’en satisfais pas. Aucun seuil n’est fixé pour les administrés ou les entreprises. Aussi, parce qu’il doit en être ainsi pour les collectivités locales que nous représentons, j’ai déposé un amendement pour y remédier, comme je l’avais déjà fait en première lecture, et j’ai bien noté votre avis de sagesse bienveillante. Nous ne devons pas nous contenter de dispositions « par défaut ». Il est de notre devoir de ne pas stigmatiser certaines collectivités et de répondre ainsi aux attentes des maires et des exécutifs locaux.
Vous l’aurez malgré tout compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste n’est pas opposé à l’esprit de ce texte. Les objectifs sont louables. Nous déplorons en revanche la forme du débat et le sabotage de la CMP par l’Assemblée nationale. Nous voterons bien entendu ce projet de loi, en espérant que les recommandations et améliorations du Sénat trouveront un écho auprès de nos collègues députés. Il y va de la clarté et de l’efficience des dispositifs contenus dans ce texte. Les administrations, les citoyens et les collectivités locales attendent ces mesures avec impatience : ne les décevons pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je dirai quelques mots non pas pour répondre aux orateurs, mais pour faire quelques commentaires après la discussion générale.
Je veux d’abord vous remercier les uns et les autres du ton constructif de vos interventions et de votre volonté partagée, me semble-t-il, de faire en sorte que les dispositions faisant consensus entre les deux assemblées et le Gouvernement puissent trouver leur application dans les meilleures conditions.
C’est un exercice un peu singulier qui nous réunit ce soir dans la mesure où, comme l’a rappelé Mme la rapporteur, le texte dont nous débattons n’a pas fait l’objet d’un accord en CMP, pour des raisons que les uns et les autres ont évoquées. Mais, dans le même temps, au cours du débat, presque un tiers des dispositions et des préconisations portées par votre assemblée y ont été intégrées. De la même manière, nous avions accepté d’inscrire de nombreuses dispositions proposées par les députés lors de l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale. Je dis cela pour vous prévenir de l’avis fréquemment défavorable aux amendements en discussion que je formulerai et m’en excuser par avance. En effet, je le répète, nous avons déjà intégré nombre de dispositions qui nous ont été proposées. Nous espérons que la suite du débat et, surtout, la mise en application de cette loi nous permettront d’avancer.
Par ailleurs, je souligne que ce texte traite, certes, des relations entre l’administration et les usagers, mais il contient aussi des dispositions propres à la simplification. Dès lors que l’on entre dans le champ de la simplification, il peut s’ensuivre un effet d’amoncellement, des mesures nécessitant du liant.
Il est certain que nous voulons aller plus loin encore en matière de simplification. Il est aussi certain que nous voulons réussir la mise en œuvre de ce texte pour faire en sorte que son application soit la plus concrète possible. C’est la raison pour laquelle, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, nous avons d’ores et déjà mobilisé les administrations. À cet égard, je puis vous annoncer que, dès ce soir, sur le portail du ministère de l’économie, des finances, de l’action et des comptes publics – www.economie.gouv.fr – et, plus spécifiquement, dans l’onglet propre à la DGFiP, est ouverte la plateforme de consultation des entreprises sur l’article 7, qui vise à définir par ordonnance les conditions d’une relation de confiance entre l’entreprise et l’administration. Ainsi, un peu par anticipation, nous avons commencé à consulter les entreprises, notamment sur la meilleure façon de bâtir cette relation de confiance.
Je veux dire à M. le rapporteur, et en écho à un certain nombre d’interventions, que si nous souhaitons maintenir les dispositions relatives à l’éolien offshore, c’est parce que les accords annoncés doivent être conclus avant la fin du mois et qu’ils sont en bonne voie de l’être. Nous avons besoin de cette base légale dans le cadre de nos discussions – vous avez parlé, me semble-t-il, de « rapport de force », pour ne pas dire une forme de pression – et en cas d’échec in fine. En la matière, ce qui nous rassemble – je salue moi aussi la volonté de la commission spéciale de laisser le Gouvernement avancer –, c’est la volonté de continuer à développer l’éolien offshore dans des conditions acceptables pour l’économie et les comptes publics.
Enfin, je ferai un clin d’œil au sénateur Pascal Savoldelli, qui a eu quelques mots qui se voulaient peut-être quelque peu provocateurs : Sénèque, qui a été cité à plusieurs reprises, disait qu’il est plus facile de se contenir que de se retirer d’une querelle. Je ne rentrerai donc pas dans la querelle ce soir.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant l’examen du texte de la commission, permettez-moi de faire quelques brèves observations sur les conditions dans lesquelles ce projet de loi a été examiné.
Tout d’abord, je formulerai des regrets à la suite de nombreux orateurs dans la discussion générale.
Mon premier regret concerne la durée bien trop longue d’examen de ce texte, déposé, je le rappelle, à la fin du mois de novembre 2017 et pour lequel le Gouvernement avait engagé la procédure accélérée. Nous sommes à la fin du mois de juillet ! Cette extrême lenteur, en clair ce temps perdu, n’est aucunement imputable au Parlement. Il est imputable au Gouvernement, qui a volontairement tardé et se retrouve pris au piège de l’accumulation des textes de cette session extraordinaire.
Le deuxième regret porte sur l’intrusion de débats extérieurs, vous venez d’en parler, monsieur le secrétaire d’État, au cœur même du projet de loi, lesquels ont nui à sa cohérence. Quel rapport entre l’efficacité de l’administration et la relation de confiance à établir avec les citoyens et les éoliennes maritimes ou les modes de garde de la petite enfance ?
Mon troisième regret, enfin, c’est celui d’avoir vu dans nos débats deux conceptions différentes de ce que doit être la navette parlementaire et, plus généralement, le rôle du Parlement, entre l’Assemblée nationale et le Sénat. L’échec de la réunion de la commission mixte paritaire le 4 avril dernier en a été une triste illustration, puisque nos collègues députés nous ont tout simplement et tout bonnement reproché de rechercher des compromis !
Ensuite, je déplore l’impréparation des textes présentés par le Gouvernement. Cela conduit à des demandes d’habilitation formulées sans aucune idée de ce que seront les orientations retenues et également à des changements de cap en cours de navette qui nuisent à la clarté des débats.
Pour terminer sur une note plus optimiste, je veux souligner quelques motifs de satisfaction.
Au cours de l’examen de ce texte, le Sénat a démontré sa capacité à moderniser ses méthodes de travail, puisque nous avons examiné en première lecture une partie des articles selon la procédure de la législation en commission.
M. Julien Bargeton. C’est vrai !
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Par ailleurs, la formule de la commission spéciale a produit des effets positifs. Nos débats ont été constructifs, riches, attentifs, et je tiens en cet instant à en remercier tous mes collègues ainsi que, bien évidemment, Mme et M. les rapporteurs. La commission spéciale, en faisant travailler des sénateurs de toutes les commissions sur des sujets qui ne sont pas abordés dans leurs commissions permanentes de rattachement, est un facteur d’ouverture et de cohésion.
Si l’on prend en compte la globalité du projet de loi et la proportion très importante des articles adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées, il est clair que les objectifs poursuivis, à savoir renforcer l’efficacité de l’administration et établir et conforter une relation de confiance avec le public, ont bien été partagés et soutenus ; c’est là l’essentiel.
Il nous reste, lors de cette nouvelle lecture, à convaincre le Gouvernement et l’Assemblée nationale sur quelques sujets. J’en retiendrai pour ma part deux : la nécessité pour l’État d’accorder aux collectivités locales la même bienveillance qu’il accorde aux citoyens et aux entreprises – un sujet important, pour ne pas dire majeur – et l’importance de prendre en compte les réalités de terrain et de ne pas imposer de cadre trop rigide, par exemple pour ce qui concerne les référents dans les maisons de services au public. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission spéciale.
projet de loi pour un état au service d’une société de confiance
TITRE PRÉLIMINAIRE
DISPOSITIONS D’ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION
Article 1er et annexe
(Non modifié)
La stratégie nationale d’orientation de l’action publique, annexée à la présente loi, est approuvée.
Annexe
(Non modifié)
La présente stratégie nationale énonce les orientations et les objectifs de l’action publique vers une société de confiance, d’ici à 2022.
I. – (Non modifié)
II. – Vers une action publique modernisée, simplifiée, décentralisée et plus efficace
L’action publique fait l’objet d’évaluations régulières, notamment quant à son efficacité, son mode d’organisation et sa capacité à satisfaire les usagers dans leurs demandes de conseils et de services. Les statistiques sur la mise en œuvre des pénalités sont publiées, en distinguant celles figurant dans les propositions de rectification ou les notifications de bases imposées d’office de celles maintenues à l’issue de la procédure de redressement.
Les missions de l’administration sont régulièrement évaluées, y compris de manière indépendante, notamment quant à leur pertinence pour répondre aux nouveaux besoins de la société. L’évaluation de l’administration associe les personnes intéressées, dont les propositions sont prises en compte pour l’organisation et l’adaptation de l’action publique.
L’organisation de l’administration s’adapte constamment à l’évolution de ses missions en tenant compte des nécessités de l’aménagement du territoire.
Les agents publics bénéficient régulièrement d’une formation et d’un accompagnement leur permettant de s’adapter aux évolutions des missions de l’administration.
L’organisation administrative prend en considération la diversité et la spécificité des territoires.
Les moyens pour mener à bien l’action publique sont déterminés en fonction de leur adaptation aux objectifs, quantitatifs et qualitatifs, à atteindre.
L’action publique n’entraîne l’édiction d’une norme que si celle-ci est strictement nécessaire à sa réalisation.
L’action publique doit permettre la réduction des délais administratifs.
Toute décision publique prend en compte le coût qu’elle implique pour son auteur, ses destinataires et les tiers ainsi que la complexité des règles particulières qu’ils doivent appliquer et respecter. Ce coût et ces règles doivent être limités au strict nécessaire et proportionnés aux objectifs à atteindre.
L’administration prend en considération les contraintes horaires du public dans ses horaires d’ouverture et met en œuvre les moyens nécessaires permettant d’organiser un accueil téléphonique efficient.
La proximité territoriale doit permettre à l’administration d’assurer le service public sur tout le territoire de la République, notamment grâce à l’implantation des maisons de services au public.
L’administration doit assurer, notamment aux personnes vulnérables ou n’utilisant pas l’outil numérique, des possibilités de communication et de médiation adaptées à leurs besoins et à leur situation.
Tout usager des services publics doit pouvoir consulter l’état de sa situation administrative et de l’avancement du traitement de ses démarches et demandes.
Le Gouvernement se fixe pour objectifs, s’agissant de l’administration de l’État :
1° La dématérialisation de l’ensemble des démarches administratives, en dehors de la première délivrance d’un document d’identité, d’ici à 2022, avec la prise en compte des besoins d’accompagnement des citoyens ayant des difficultés d’accès aux services dématérialisés ;
2° L’institution du droit pour toute personne de ne pas être tenue de produire à l’administration une information déjà détenue ou susceptible d’être obtenue auprès d’une autre administration.
L’État, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les autres personnes publiques et les personnes morales de droit privé chargées d’une mission de service public administratif concourent à la mise en œuvre de la présente stratégie nationale.