Sommaire
Présidence de M. David Assouline
Secrétaires :
M. Éric Bocquet, Mme Catherine Deroche.
2. Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique. – Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Amendement n° 1138 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles additionnels après l’article 59
Amendement n° 2 rectifié bis de Mme Anne-Marie Bertrand. – Retrait.
Amendement n° 604 de Mme Annie Guillemot. – Rejet.
Amendement n° 6 rectifié de M. Roger Karoutchi. – Retrait.
Amendement n° 605 de Mme Annie Guillemot. – Devenu sans objet.
Amendement n° 10 rectifié bis de M. Roger Karoutchi. – Retrait.
Amendement n° 7 rectifié bis de M. Roger Karoutchi. – Retrait.
Amendement n° 241 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Amendement n° 320 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 321 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 59 bis C (nouveau) – Adoption.
Article additionnel après l’article 59 bis C
Amendement n° 322 de Mme Cécile Cukierman. – Rejet.
Articles 59 bis D, 59 bis E, 59 bis F, 59 bis G et 59 bis H (nouveaux) – Adoption.
Amendement n° 609 de Mme Annie Guillemot. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 59 bis J, 59 bis K, 59 bis L, 59 bis M, 59 bis N et 59 bis O (nouveaux) – Adoption.
Amendement n° 798 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 60
Amendement n° 1141 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État auprès du ministre de la cohésion des territoires
Amendement n° 608 de Mme Martine Filleul. – Rejet.
Amendement n° 380 rectifié de M. Jean-Marc Boyer. – Rejet.
Amendement n° 483 de M. Alain Duran. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 62
Amendement n° 412 de M. Jérôme Bascher. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Amendement n° 407 rectifié ter de M. Jean-Pierre Decool. – Retrait.
Amendement n° 382 rectifié de M. Jean-Marc Boyer. – Retrait.
Amendement n° 861 de M. Frédéric Marchand. – Retrait.
Amendement n° 486 de M. Alain Duran. – Non soutenu.
Amendement n° 413 rectifié bis de M. Jérôme Bascher. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Article 62 quater (nouveau) – Adoption.
Article additionnel après l’article 62 quater
Articles 62 quinquies (nouveau) et 63 – Adoption.
Article additionnel après l’article 63
Amendement n° 636 rectifié de M. Patrice Joly. – Rejet.
Articles 63 quater et 63 quinquies (nouveau) – Adoption.
Article additionnel après l’article 63 quinquies
Amendement n° 480 rectifié de M. Patrick Chaize. – Retrait.
Amendement n° 748 rectifié bis de M. Patrick Chaize. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article additionnel après l’article 64 bis
Amendement n° 303 rectifié de M. Patrick Chaize. – Retrait.
Amendement n° 1075 du Gouvernement. – Rejet.
Adoption de l’article.
Adoption de l’article.
Article 64 quinquies (nouveau)
Amendement n° 448 rectifié de Mme Victoire Jasmin. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 64 quinquies
Amendement n° 476 rectifié bis de M. Patrick Chaize. – Retrait.
Article additionnel après l’article 54 quinquies (précédemment réservé)
Amendement n° 1069 rectifié du Gouvernement. – Rejet.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques
Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires
Suspension et reprise de la séance
3. Services de paiement dans le marché intérieur. – Adoption définitive en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission
Discussion générale :
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances, rapporteur
Clôture de la discussion générale.
Article 1er ter A (suppression maintenue)
Amendement n° 1 de la commission. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Articles 1er ter, 2, 3, 4 et 6 – Adoption.
Adoption définitive du projet de loi dans le texte de la commission.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
Conclusions de la conférence des présidents
5. État au service d’une société de confiance. – Adoption en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
Discussion générale :
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics
Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission spéciale
M. Jean-Claude Luche, rapporteur de la commission spéciale
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale
Clôture de la discussion générale.
Amendement n° 10 de Mme Angèle Préville. – Rejet.
Adoption de l’ensemble de l’article et de l’annexe.
Amendement n° 16 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Amendement n° 17 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 6 rectifié de Mme Sylvie Vermeillet. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 3 bis AA (suppression maintenue)
Amendement n° 30 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 18 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles 4 bis B et 4 ter – Adoption.
Article 4 quinquies (suppression maintenue)
Article 6 bis (suppression maintenue)
Amendement n° 19 de M. Éric Bocquet. – Retrait.
Adoption de l’article.
Articles 7 bis, 9 et 10 – Adoption.
Amendement n° 20 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 12 bis (suppression maintenue)
Amendement n° 21 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles 14 et 14 bis – Adoption.
Amendement n° 31 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 22 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Amendement n° 23 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 32 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Articles 17 et 17 bis A – Adoption.
Article 17 bis B (suppression maintenue)
Article 17 ter (suppression maintenue)
Adoption de l’article.
Amendement n° 36 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Article 23 ter (suppression maintenue)
Amendement n° 12 de Mme Claudine Lepage. – Retrait.
L’article demeure supprimé.
Amendement n° 2 rectifié de Mme Nathalie Delattre. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 25 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article 26 ter (suppression maintenue)
Amendement n° 26 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Article additionnel après l’article 28
Article 28 bis (suppression maintenue)
Amendement n° 27 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° 28 de M. Éric Bocquet. – Rejet.
Amendement n° 37 de la commission. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
Articles 34 bis A à 34 bis D (suppression maintenue)
Articles 34 quinquies et 35 – Adoption.
Articles 35 bis A à 35 bis C (supprimés)
Amendement n° 8 de M. Michel Vaspart. – Rejet.
L’article demeure supprimé.
Articles 35 ter et 37 – Adoption.
Amendement n° 3 rectifié bis de M. Alain Houpert. – Non soutenu.
Adoption de l’article.
Article 40 (supprimé)
Amendement n° 34 rectifié de Mme Élisabeth Lamure. – Retrait.
Adoption de l’article.
Adoption du projet de loi dans le texte de la commission, modifié.
6. Adoption des conclusions de la conférence des présidents
compte rendu intégral
Présidence de M. David Assouline
vice-président
Secrétaires :
M. Éric Bocquet,
Mme Catherine Deroche.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Évolution du logement, de l'aménagement et du numérique
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (projet n° 567, texte de la commission n° 631, rapport n° 630, tomes I et II, avis nos 604, 606 et 608).
La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, j’appelle chacun d’entre vous à procéder à un examen…
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. En quelque sorte, monsieur le ministre !
Il nous reste 45 amendements à examiner, et deux sujets importants à étudier, la copropriété et le numérique – notre collègue Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, qui a assisté à l’ensemble des débats, attend ce moment avec impatience !
Je vous invite à vous montrer efficaces, mes chers collègues, dans tous les sens du terme, et vous propose, si les groupes politiques en sont d’accord, de limiter les explications de vote sur l’ensemble à un seul orateur par groupe.
M. le président. Je vous remercie, madame la présidente, de l’aide que vous venez d’apporter au président de séance. (Sourires.)
Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus, au sein du titre IV, à l’article 59.
TITRE IV (suite)
AMÉLIORER LE CADRE DE VIE
Chapitre IV
Améliorer le droit des copropriétés
Article 59
(Non modifié)
I. – Le code de la construction et habitation est ainsi modifié :
1° Le vingt-deuxième alinéa de l’article L. 441-1 est complété par les mots : « ou d’une opération de requalification des copropriétés dégradées définie aux articles L. 741-1 et L. 741-2. » ;
2° L’article L. 615-6 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du I, les mots : « ou sur requête » sont supprimés ;
b) Le premier alinéa du III est ainsi rédigé :
« III. – Les conclusions de l’expertise sont notifiées, avec la décision qui l’ordonne, au propriétaire, au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires ou, s’il y a lieu, à l’administrateur provisoire ou au représentant légal de la société d’attribution, de la société civile immobilière ou de la société coopérative de construction, au représentant de l’État dans le département, au maire de la commune ou au président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat. Cette notification vaut intervention forcée à l’instance. » ;
c) Au deuxième alinéa du même III, le mot : « judiciaire » est remplacé par les mots : « au représentant de l’État dans le département » ;
d) Au dernier alinéa dudit III, les mots : « après avoir entendu les parties dûment convoquées » sont remplacés par les mots : « les parties ayant été dûment entendues ou appelées » ;
e) Au premier alinéa du IV, après le mot : « copropriétaires, », sont insérés les mots : « aux copropriétaires, » ;
3° L’article L. 741-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Pour assurer le relogement, à titre temporaire ou définitif, des occupants des logements dans les copropriétés situées dans le périmètre des opérations mentionnées au premier alinéa du présent article, le maire et le président de l’établissement public de coopération intercommunale, signataires de la convention prévue au troisième alinéa du présent article, peuvent user des prérogatives qu’ils tiennent des troisième et avant-dernier alinéas de l’article L. 521-3-3. » ;
4° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 741-2, les mots : « , si le site comporte une ou plusieurs copropriétés bénéficiant d’un plan de sauvegarde défini à l’article L. 615-1 du présent code » sont supprimés et les mots : « au dernier » sont remplacés par les mots : « à l’avant-dernier ».
II. – L’article L. 522-1 du code de l’expropriation pour cause d’utilité publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret pris sur l’avis conforme du Conseil d’État peut autoriser la prise de possession d’un ou plusieurs immeubles dégradés situés dans le périmètre défini par le décret mentionné à l’article L. 741-2 du code de la construction et de l’habitation, dont l’acquisition est prévue pour la réalisation d’une opération d’aménagement déclarée d’utilité publique, lorsque des risques sérieux pour la sécurité des occupants rendent nécessaires la prise de possession anticipée et qu’un projet de plan de relogement des occupants a été établi. »
II bis. – À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 313-4 du code de l’urbanisme, après le mot : « état, », sont insérés les mots : « d’amélioration de l’habitat, comprenant l’aménagement, y compris par démolition, d’accès aux services de secours ou d’évacuation des personnes au regard du risque incendie, ».
III. – Les dispositions prévues au 2° du I sont applicables aux procédures ouvertes à compter de la date de publication de la présente loi.
M. le président. L’amendement n° 1138, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 10
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :
3° L’article L. 741-1 est ainsi modifié :
a) La première phrase du dernier alinéa est complétée par les mots : « qui peut être délégué à l’opérateur chargé de la mise en œuvre de l’opération » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
II. – Alinéa 12
Remplacer cet alinéa par six alinéas ainsi rédigés :
4° L’article L. 741-2 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa, les mots : « , si le site comporte une ou plusieurs copropriétés bénéficiant d’un plan de sauvegarde défini à l’article L. 615-1 du présent code » sont supprimés et les mots : « au dernier » sont remplacés par les mots : « à l’avant-dernier » ;
b) Au deuxième alinéa, les mots : « établissement public chargé de réaliser » sont remplacés par les mots : « opérateur chargé de conduire » ;
c) Au troisième alinéa, après les mots : « présent article », sont insérés les mots : « ou, le cas échéant, un autre opérateur désigné par l’État pouvant être délégataire du droit de préemption » ;
d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La conduite de l’opération mentionnée au premier alinéa du présent article est définie aux 1° et 2° de l’article L. 321-1-1 du code de l’urbanisme. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur de la commission des affaires économiques. Actuellement, la conduite d’une opération de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national, ou ORCOD-IN, peut exclusivement être confiée aux établissements publics fonciers de l’État, en application de l’article L.741-2 du code de la construction et de l’habitation et de l’article L.321-1-1 du code de l’urbanisme.
Or les périmètres d’intervention des EPF d’État ne couvrent pas l’ensemble du territoire national. Il est donc nécessaire de prévoir la possibilité d’intervention d’un autre opérateur, désigné par l’État, dans le cas où la commune dans laquelle est située l’ORCOD d’intérêt national n’est pas couverte par un EPF d’État.
Cet amendement institue par ailleurs la possibilité, dans une ORCOD de droit commun, de déléguer le droit de préemption urbain à l’opérateur en charge de la conduite de l’ORCOD.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre de la cohésion des territoires. Nous commencerons cet après-midi de travail par un avis favorable du Gouvernement, mesdames, messieurs les sénateurs !
M. Roger Karoutchi. Si cela pouvait être le cas plus souvent…
M. Jacques Mézard, ministre. Ce n’est pas la première fois, quand même ! (Sourires.) Et il faut aussi que les amabilités soient réciproques ! (Nouveaux sourires.)
Pour en revenir à l’amendement, c’est une mesure de bon sens que le Gouvernement souhaitait également proposer pour faciliter la mise en œuvre d’une ORCOD-IN. Lorsqu’il n’y a pas d’établissement public foncier d’État, il sera très utile de pouvoir faire intervenir un autre opérateur, d’autant que la question des copropriétés dégradées est vraiment un gros chantier qui attend l’État et les collectivités.
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Le groupe socialiste et républicain votera cet amendement. Après étude, il apparaît répondre à un vrai besoin et correspondre à de vraies situations.
M. le président. Je mets aux voix l’article 59, modifié.
(L’article 59 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 59
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié bis, présenté par Mme A.M. Bertrand, MM. Longuet et Brisson, Mme Garriaud-Maylam, MM. Raison, de Nicolaÿ et Perrin, Mmes Duranton, Morhet-Richaud et Lanfranchi Dorgal, M. Danesi, Mme Delmont-Koropoulis, M. Vaspart, Mme Deromedi, M. Pellevat, Mme F. Gerbaud, M. Sido, Mme Deseyne, M. B. Fournier et Mmes Lherbier et Bories, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 9 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un article 9-… ainsi rédigé :
« Art. 9-… – Tout article d’un règlement de copropriété ou d’un état descriptif de division empêchant la transformation d’un immeuble en logement, ou soumettant ce changement d’usage à autorisation, est réputé non écrit. »
La parole est à Mme Chantal Deseyne.
Mme Chantal Deseyne. Cet amendement prévoit la possibilité pour un propriétaire d’aménager des bureaux pour les transformer en locaux d’habitation sans être tenu de recueillir l’avis de tous les copropriétaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je peux comprendre l’intention des auteurs de cet amendement, mais je m’interroge aussi sur la portée de cette proposition.
C’est la raison pour laquelle je m’en remets à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. En l’état, il est plutôt défavorable.
La destination de l’immeuble est normalement déterminée par le règlement de copropriété, document contractuel qui lie l’ensemble des copropriétaires. L’intention est bonne, mais la solution juridique retenue pourrait engendrer plus de difficultés qu’elle n’en résoudrait.
Mme Chantal Deseyne. Je retire cet amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié bis est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 604, présenté par Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un article L. 18-1 … ainsi rédigé :
« Art. L. 18-1 …. – En cas de manquement du syndic aux obligations contractuelles, légales, réglementaires ou déontologiques, le président du conseil syndical convoque une assemblée générale pour voter un nouveau contrat de syndic. Celui sortant ne peut ni prélever les honoraires pour la durée restante de son mandat, ni réclamer des dommages et intérêts, à moins de justifier, par une décision judiciaire, le vote abusif de la résiliation du contrat. »
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. La loi du 10 juillet 1965 sur l’organisation et le fonctionnement des copropriétés ne prévoit aucune sanction à l’égard du syndic professionnel qui manquerait à ses obligations vis-à-vis du conseil syndical ou des copropriétaires.
Le syndic étant le seul représentant légal du syndicat des copropriétaires, il ne peut s’assigner lui-même en cas de carence.
Nous en arrivons ainsi parfois à des situations ubuesques où le conseil syndical est paralysé, car il ne peut agir face aux carences du syndic.
Il serait souhaitable de rééquilibrer les relations entre le syndic, le conseil syndical et les copropriétaires. Il faut également redynamiser les copropriétés pour répondre, par exemple, aux enjeux de rénovation des copropriétés, y compris de rénovation énergétique.
Cet amendement prévoit la possibilité pour le syndicat des copropriétaires de résilier le contrat de syndic si le syndic ne respecte pas ses obligations légales ou réglementaires.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié, présenté par MM. Karoutchi, Babary, Bazin, Bizet et Bonhomme, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Bruguière, M. Cambon, Mme Chauvin, MM. Cuypers et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi et Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam, F. Gerbaud et Gruny, MM. Hugonet et Kennel, Mme Lassarade, MM. Laufoaulu, Le Gleut et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lopez, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau, MM. Pierre, Poniatowski, Rapin, Reichardt, Revet, Schmitz et Sido, Mme Thomas et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un article L. 18-1 … ainsi rédigé :
« Art. L. 18-1 …. – En cas de manquement du syndic aux obligations contractuelles, légales, réglementaires ou déontologiques, le président du conseil syndical peut convoquer une assemblée générale pour voter un nouveau contrat de syndic. Celui sortant ne peut ni prélever les honoraires pour la durée restante de son mandat, ni réclamer des dommages et intérêts, à moins de justifier, par une décision judiciaire, le vote abusif de la résiliation du contrat. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Je serai bref, car il s’agit au fond du même amendement.
La loi, depuis cinquante ans, a imposé des obligations de plus en plus nombreuses aux syndics, notamment pour répondre au problème de l’équilibre entre le conseil syndical et le syndic, mais, dans sa mansuétude, elle n’a prévu aucune sanction en regard de ces obligations.
En pratique, dans la plupart des situations, le syndic vous répond : « Vous avez certainement raison sur le fond, cher ami, mais, comme aucune sanction n’est prévue, je fais ce que je veux ! »
À travers cet amendement, nous voulons, en substance, adresser le message suivant : « Mesdames et messieurs les syndics, nous avons beaucoup d’amitié et de respect pour vous, mais, puisqu’il y a des obligations légales, acceptez le risque d’une sanction si jamais vous ne les respectez pas ! »
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur ces deux amendements en discussion commune.
En cas de manquement du syndic à ses obligations, l’amendement n° 6 rectifié prévoit la possibilité, pour le président du conseil syndical, de convoquer une assemblée générale pour voter un nouveau contrat de syndic. L’amendement n° 604 fait, lui, obligation au président du conseil syndical de convoquer une assemblée générale dans ce même cas.
Mes chers collègues, le conseil syndical peut, à tout moment, demander la convocation d’une assemblée générale pour voter un nouveau contrat de syndic. Le droit en vigueur vous donne satisfaction sur ce point.
Quant à la sanction proposée - le syndic sortant ne pourra alors plus prélever ses honoraires -, je ne suis pas certaine qu’elle soit véritablement recevable sur le plan juridique, car cela permettrait à des copropriétaires de se faire en partie justice eux-mêmes.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Il est défavorable, sur les deux amendements.
Je comprends l’objectif et les motifs des auteurs de ces amendements, qui entendent naturellement répondre au mécontentement des associations de conseils syndicaux, lequel est tout à fait logique dans la situation actuelle.
Aux termes de la loi de 1965 modifiée et du décret de 1967, lorsqu’il y a carence du syndic – c’est assez fréquent, nous en sommes tous conscients – ou conflit d’intérêts, comme l’a rappelé Mme la rapporteur, tout intéressé peut solliciter la désignation par le juge d’un administrateur ad hoc chargé de convoquer l’assemblée générale appelée à désigner un nouveau syndic.
Ces dispositions ne répondent certes pas complètement à vos préoccupations, messieurs les sénateurs. Je suis toutefois tellement conscient de la difficulté que, dans le cadre des discussions que nous menons actuellement avec la Chancellerie pour modifier le texte, nous travaillons à une solution juridique qui permettrait de vous donner pleine satisfaction.
Celle que vous avancez ne me semble pas adaptée. Ces amendements prévoient en effet de sanctionner le syndic en l’empêchant de prélever ses honoraires pour la durée restante de son mandat ou de réclamer des dommages et intérêts, à moins de justifier par une décision judiciaire le vote abusif de la résiliation du contrat. Cette rédaction me paraît juridiquement assez contestable.
Je m’engage à ce que le sujet soit étudié et à ce que des solutions vous soient présentées dans le cadre du travail que nous avons engagé, même si je sais que le Sénat ne votera pas l’habilitation.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, pensez-vous vraiment qu’il se trouvera un conseil syndical pour aller demander au juge de bien vouloir convoquer l’assemblée générale de son immeuble ? La convocation n’aura pas lieu avant deux ans, au mieux !
Certes, on peut changer de syndic, mais vous devez pour cela avoir des motifs légitimes – et qu’est-ce qu’un motif légitime ?- et en apporter la preuve. C’est donc extraordinairement difficile, sauf faute énorme du syndic.
Quand un conseil syndical et un syndic en arrivent à entretenir ce type de relations, la situation devient ingérable. Le conseil syndical, qui représente réellement les copropriétaires, doit pouvoir dire : « Voilà comment nous souhaitons gérer la copropriété », et le syndic ne doit pas pouvoir lui répondre : « Que ma gestion vous plaise ou non, je reste votre syndic ! » C’est impossible !
Je remercie infiniment M. le ministre de réfléchir à des solutions rédactionnelles d’ensemble, mais, franchement, la rédaction actuelle se traduit par un déséquilibre entre les conseils syndicaux et les syndics.
Cela étant, je ne me fais pas d’illusion sur la suite, il s’agit surtout d’un amendement d’appel et je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 6 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l’amendement n° 604.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 5 rectifié ter, présenté par MM. Karoutchi, Babary, Bazin, Bizet et Bonhomme, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Bruguière, M. Cambon, Mme Chauvin, MM. Cuypers et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi et Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam, F. Gerbaud et Gruny, MM. Hugonet et Kennel, Mme Lassarade, MM. Laufoaulu, Le Gleut et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lopez, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau, MM. Pierre, Poniatowski, Rapin, Reichardt, Revet, Schmitz et Sido, Mme Thomas, MM. Vogel, P. Dominati et Bansard et Mme Renaud-Garabedian, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de manquement aux obligations contractuelles, légales, réglementaires ou déontologiques du syndic en place, le président du conseil syndical peut l’assigner pour le contraindre de s’exécuter. L’engagement de la procédure judiciaire est décidé par une majorité des membres du conseil syndical et consigné dans un procès-verbal. Les frais peuvent être avancés par le président du conseil syndical et remboursés par le syndicat des copropriétaires sur présentation de justificatifs. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Je serai bref, l’argumentation étant la même que pour l’amendement précédent portant sur le contrat de syndic.
En cas de faute, si le syndic ne respecte pas ses obligations contractuelles, nous souhaitons que le président du conseil syndical soit en capacité d’engager une procédure judiciaire, décidée à la majorité des membres du conseil syndical.
M. le président. L’amendement n° 605, présenté par Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de manquement aux obligations contractuelles, légales, réglementaires ou déontologiques du syndic en place, le syndicat des copropriétaires représenté par son président peut l’assigner pour le contraindre de s’exécuter. L’engagement de la procédure judiciaire est décidé à la majorité simple des membres du conseil syndical. »
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Cet amendement est de la même veine que le précédent. Notre collègue Roger Karoutchi et moi-même avons dû procéder aux mêmes auditions. (Sourires.)
J’ai entendu ce qu’a dit M. le ministre, mais nous ne pouvons pas laisser les choses en l’état.
Il conviendrait donc, selon moi, d’adopter cet amendement, plus restreint et plus opérationnel que l’amendement n° 604, qui permet au syndicat des copropriétaires de contraindre le syndic à exécuter ses missions et à assumer ses responsabilités en cas de carence.
Il sera possible d’améliorer le dispositif d’ici à la commission mixte paritaire, en attendant qu’une réponse consolidée soit apportée à ce problème dans le cadre du travail mentionné par M. le ministre.
C’est un vrai problème.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements en discussion commune.
En cas de faute du syndic, il paraît peu probable que le syndicat des copropriétaires souhaite poursuivre sa collaboration avec lui. Sa révocation par l’assemblée générale paraît alors incontournable.
Pour autant, confier cette action spécifiquement au président du conseil syndical nous semble soulever plusieurs difficultés. Outre qu’une telle disposition serait de nature à remettre en cause les grands équilibres de la gouvernance des copropriétés, elle conduirait également à accroître la responsabilité du président du conseil syndical, avec, à la clef, un risque financier important pour lui.
Le président du conseil syndical devra-t-il prendre en charge les frais d’avocats et de procédure ainsi que l’éventuelle condamnation à des frais irrépétibles ou à des dommages et intérêts s’il venait à être débouté de son action ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Comme Mme la rapporteur, le Gouvernement est défavorable à ces amendements, ce qui ne signifie pas que le problème n’existe pas, monsieur Daunis.
Aujourd’hui, la jurisprudence a résolu la difficulté en permettant à la copropriété de faire désigner un administrateur ad hoc, y compris en référé, lorsqu’il s’agit pour la copropriété d’agir en justice contre le syndic.
Nous travaillons actuellement avec la Chancellerie pour essayer de consacrer cette jurisprudence dans l’évolution législative à venir et ainsi mieux répondre à la préoccupation exprimée par les auteurs de ces amendements.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Je comprends les réponses qui nous sont apportées. Toutefois, madame la rapporteur, tout à l’heure, vous me disiez que, pour changer de contrat de syndic, il fallait prouver la faute et, pour ce faire, aller devant le juge.
Ici, je propose que le président du conseil syndical puisse ester en justice, mais vous suggérez que le plus simple est de rompre le contrat. On ne s’en sort plus ! Que faire ? Aller en justice ou rompre le contrat ?
À Paris comme dans toutes les grandes villes, la plupart des syndics sont devenus de véritables usines. Ils gèrent des dizaines et des dizaines de biens de manière extraordinairement méthodique, sans lien réel avec l’immeuble, et ne connaissent pas plus les copropriétaires que les présidents de conseil syndical.
Ces gros syndics disposent souvent d’une batterie d’avocats qui répondent eux-mêmes aux demandes des copropriétaires. Sous-entendu : « Un jour, il y a longtemps, votre conseil syndical nous a choisis comme syndic. Depuis, il en est ainsi, quoi qu’il advienne ! »
Il faut impérativement donner aux conseils syndicaux la capacité de se défendre.
Je ne retirerai pas cet amendement. Nous serons sans doute battus, mais, à un moment, on ne peut pas simplement dire aux copropriétaires de saisir le juge.
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. J’ai du mal à comprendre les positions de Mme la rapporteur et de M. le ministre.
Le président du conseil syndical n’a pas la personnalité juridique lui permettant d’ester en justice. Qui peut le faire ? Le syndic ! On demande donc au syndic de porter lui-même l’attaque…contre le syndic !
La seule possibilité pour le conseil syndical est de saisir la justice pour que soit nommé un administrateur. Je vous laisse imaginer les délais, mes chers collègues, et l’encombrement de la justice qui en résulte.
La législation actuelle génère des situations ubuesques et multiplie les possibilités de conflits, aucun régulateur ne pouvant intervenir vis-à-vis du syndic.
Je rejoins mon collègue Roger Karoutchi : l’évolution des syndics est telle aujourd’hui qu’il est parfois difficile pour le conseil syndical d’avoir un interlocuteur.
J’aimerais vraiment que nous puissions adopter au moins cet amendement, pour débloquer certaines situations. Nous pourrons par la suite réfléchir à consolider un dispositif plus large.
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Sans vouloir allonger le débat, je signale néanmoins que le président du conseil syndical est un copropriétaire parmi d’autres. L’accroissement de sa responsabilité et les risques financiers associés pourraient être de nature à dissuader les candidats. Rappelons que les présidents de conseil syndical sont bénévoles et que leurs responsabilités sont de plus en plus lourdes.
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Mézard, ministre. Je me souviens d’un temps où j’enseignais le droit de la copropriété, postérieurement à la loi de 1965. Le sujet que vous évoquez aujourd’hui a été soulevé dès la mise en application de cette loi. Si le problème était facile à résoudre, il le serait déjà depuis belle lurette !
C’est la jurisprudence qui a construit le système permettant la désignation d’un administrateur ad hoc. L’article 18 de la loi de 1965 donne en effet mandat au syndic pour représenter en justice le syndicat des copropriétaires, et c’est une difficulté en cas de procédure contre le syndic. De même, lorsque des copropriétaires minoritaires gagnent, se pose le problème de l’imputation des frais, notamment en cas de condamnation aux dépens. La jurisprudence est abondante sur ce sujet.
Nous essayons de trouver une formule qui permette d’avancer dans la direction que vous souhaitez, mais votre proposition risque de poser autant de difficultés qu’elle est censée en résoudre. C’est un sujet très difficile.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 59, et l’amendement n° 605 n’a plus d’objet.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 8 rectifié bis est présenté par MM. Karoutchi, Babary, Bazin, Bizet, Bonhomme et Bouchet, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cuypers et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi et Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam, F. Gerbaud et Gruny, MM. Hugonet et Kennel, Mme Lassarade, MM. Laufoaulu, Le Gleut et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lopez, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau et MM. Pierre, Poniatowski, Rapin, Reichardt, Revet, Savin, Schmitz, Sido et Vogel.
L’amendement n° 19 rectifié ter est présenté par M. Delahaye, Mme Guidez, M. Janssens, Mme Vullien, MM. Capo-Canellas, Bonnecarrère, Laugier, Kern, Moga et Canevet, Mmes Billon, Sollogoub et Létard et M. Delcros.
L’amendement n° 606 rectifié est présenté par Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le sixième alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par une phrase ainsi rédigée : « En cas d’absence de transmission des pièces, au-delà d’un délai d’un mois à compter de la demande du conseil syndical, des pénalités par jour de retard sont imputées sur les honoraires de base du syndic dont le montant est défini dans le contrat de mandat. »
La parole est de nouveau à M. Roger Karoutchi, pour présenter l’amendement n° 8 rectifié bis.
M. Roger Karoutchi. Que du bonheur ! (Sourires.)
Cette fois, madame la rapporteur, monsieur le ministre, vous ne pourrez pas vous référer au juge dans vos argumentations respectives.
Lorsque le conseil syndical ou son président demande au syndic un certain nombre de pièces, notamment en cas de conflit, ce dernier n’est tenu à aucun délai pour les communiquer. Or les syndics prennent souvent leur temps, et parfois même l’éternité !
L’amendement est extrêmement simple : il prévoit que le syndic doit fournir les documents dans le délai d’un mois.
M. Claude Kern. Cet amendement, présenté principalement par notre collègue Vincent Delahaye, mais qui a été cosigné par un certain nombre d’entre nous, vient d’être très bien défendu par M. Karoutchi.
M. Marc Daunis. Selon les personnes que nous avons auditionnées, plusieurs années s’écoulent parfois entre la demande du conseil syndical et la transmission des documents par le syndic. Il paraît donc souhaitable de fixer un délai.
Mais je reviens sur l’argument financier avancé par Mme la rapporteur. En cas de condamnation, notamment pour procédure abusive intentée contre le syndic, les sommes seraient imputées aux copropriétaires, et non au président du conseil syndical, qui n’aurait donc pas à les financer sur ses propres deniers. Que l’action soit intentée collectivement par les copropriétaires ou via le président du conseil syndical, une condamnation aurait les mêmes effets financiers pour les copropriétaires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Sur ces trois amendements identiques, qui prévoient des pénalités de retard en cas de non-transmission de pièces ou de documents demandés par le conseil syndical, la commission émet un avis favorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Nous avions prévu un avis défavorable…
Messieurs, je ne sais pas si vous avez auditionné des syndics. Manifestement, vous avez surtout auditionné des représentants de conseils syndicaux.
Le Sénat, dans sa sagesse, votera comme il l’entend.
Je note toutefois qu’il est de plus en plus difficile de trouver des syndics, à tout le moins pour les copropriétés en difficulté : on ne se précipite pas !
M. Philippe Dallier. C’est vrai !
M. Jacques Mézard, ministre. On parlera tout à l’heure du nombre de copropriétés en difficulté, c’est un vrai sujet.
Je n’ai pas d’affection particulière pour les syndics. Si vous considérez qu’il faut une sanction financière lorsqu’ils ne délivrent pas assez rapidement les pièces, cela ne m’empêchera pas de dormir ! Vous leur adresserez un message, et nous verrons ensuite par quelles dispositions précises nous pourrons exercer sur eux une légitime pression.
Nous avons toutefois un problème de fond avec le fonctionnement des syndics, leur formation, aussi. Cela devient parfois extrêmement préoccupant. Dans les copropriétés qui vont bien, dans les arrondissements sans difficulté, la concurrence s’exerce et l’on trouve des candidats, mais, dans les zones difficiles, on ne trouve parfois plus de syndics.
Cela ne veut pas dire qu’il ne doit pas y avoir des règles et des moyens de pression dans les mains du conseil syndical pour que le travail soit bien fait, mais il ne faudrait pas non plus placer les syndics dans des situations telles que les candidats deviendraient impossibles à trouver.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. Quelques mots pour tenter de faire évoluer M. le ministre vers un avis favorable, que je quémande…
J’entends bien l’argument sur les copropriétés en difficulté, mais dans ces situations, le conseil syndical est tellement content qu’un syndic veuille bien s’occuper de la copropriété qu’il ne va pas lui déclarer la guerre ! En tout cas, il y a peu de chances.
De deux choses l’une. Si les choses vont bien dans la copropriété, si les relations sont normales, tant mieux ! C’est d’ailleurs ce qui se passe dans l’immense majorité des cas. Mais quand il existe des problèmes, voire un conflit, il faut aider les conseils syndicaux, en leur donnant un peu plus de pouvoirs.
Si le législateur a régulièrement renforcé les obligations des syndics, c’est bien qu’il estimait que certaines difficultés pouvaient survenir. À ce moment-là, il est quand même curieux de ne pas avoir prévu de sanctions.
Si les obligations des syndics sont accrues, il me semble normal, en contrepartie, de prévoir des sanctions en cas de conflit.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 8 rectifié bis, 19 rectifié ter et 606 rectifié.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 59.
L’amendement n° 10 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi, Bazin, Bizet et Bonhomme, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Bruguière, MM. Cambon, Cuypers et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi et Duranton, M. B. Fournier, Mmes Garriaud-Maylam, F. Gerbaud et Gruny, MM. Hugonet et Kennel, Mme Lassarade, MM. Laufoaulu, Le Gleut et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lopez, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau, MM. Pierre, Poniatowski, Rapin, Reichardt, Revet, Schmitz et Sido, Mme Thomas, M. Vogel, Mme Renaud-Garabedian et M. Bansard, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le sixième alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le président du conseil syndical peut interroger l’établissement bancaire où sont déposés les fonds de la copropriété afin d’obtenir toutes informations sur le statut du compte bancaire de la copropriété et sur les opérations enregistrées sur les relevés bancaires. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Nous restons sur un sujet proche. Normalement, le compte bancaire destiné à la gestion d’un immeuble est séparé des autres comptes gérés par le syndic. En réalité, comme il n’y a aucun contrôle et que les conseils syndicaux n’ont pas accès au compte bancaire de la copropriété, certains syndics ne mettent pas cette procédure de séparation en place.
Il paraîtrait pourtant normal que le président du conseil syndical puisse avoir accès au compte bancaire de la copropriété, puisque ce compte est alimenté par les contributions des copropriétaires.
C’est quand même un comble d’abonder un compte, sans jamais pouvoir y accéder ni savoir ce qui s’y passe. Cet amendement vise donc à faire respecter un certain équilibre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cet amendement ouvre un précédent en matière de secret bancaire.
Le secret bancaire protège aujourd’hui tous les clients des banques contre les demandes d’information formulées par des tiers.
Seuls quelques cas justifiés par des situations judiciaires ou administratives précises prévoient la levée du secret bancaire. Un tel amendement repose, en revanche, sur le souhait de particuliers que des problèmes rencontrés dans le cadre de leurs relations avec le syndic puissent être réglés.
En outre, d’un point de vue opérationnel, cet amendement viendrait mettre les conseillers bancaires en position délicate : comment s’assurer que la demande vient bien du président du conseil syndical ? Comment vérifier que celui-ci est bien habilité pour ce faire et qu’il n’agit pas à titre personnel ? Comment procéder aux vérifications imposées par les réglementations sur la lutte contre le terrorisme, qui prennent de plus en plus de place dans le travail quotidien des conseillers bancaires ?
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement, car nous considérons qu’il est satisfait. Je n’ai donc pas la même approche que la commission…
Nous avons fait appel sur ce point à la sagacité de la Chancellerie, qui m’a indiqué que la disposition prévue par l’amendement est une possibilité d’ores et déjà ouverte par l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965, qui permet au conseil syndical de recevoir communication, sur sa demande, de tout document intéressant le syndicat – nous n’allons pas reprendre l’ensemble des débats que nous venons d’avoir sur cette question…
À partir du moment où le compte bancaire est séparé et qu’il est ouvert au nom du syndicat de copropriétaires, c’est ce dernier qui en est le titulaire, le syndic n’étant que le détenteur de la signature et celui qui le fait fonctionner durant son mandat. De ce fait, les copropriétaires, par la voix du conseil syndical, ne peuvent se voir opposer le secret bancaire de l’article L. 511-33 du code monétaire et financier. Dont acte !
M. le président. Monsieur Karoutchi, l’amendement n° 10 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Roger Karoutchi. Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je constate que la réponse de la commission et celle du Gouvernement ne sont pas les mêmes… Pour la commission, cet amendement porte atteinte au secret bancaire, tandis que, pour le Gouvernement, il est satisfait, ce qui signifie d’une certaine façon qu’il y a déjà violation du secret bancaire… Magnanime, je vais considérer que tout cela est égal !
J’entends bien les arguments du ministre, mais le problème, c’est que certains syndics ne mettent pas en place de comptes séparés ou mettent ces comptes à leur nom, en refusant de communiquer des informations au conseil syndical.
Je vais donc retirer l’amendement, mais je mets une condition, monsieur le ministre : il faut trouver des moyens pour contrecarrer la manière de fonctionner de certains syndics, par exemple en permettant à l’assemblée générale de copropriété de demander que le compte bancaire de l’immeuble soit au nom du syndicat, et pas du syndic. (M. le ministre opine.)
Je retire mon amendement.
M. le président. L’amendement n° 10 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 7 rectifié bis, présenté par MM. Karoutchi, Bazin, Bizet et Bonhomme, Mme Bories, M. Bouchet, Mme Bruguière, M. Cambon, Mme Chauvin, MM. Cuypers et Daubresse, Mmes Delmont-Koropoulis, Deroche, Deromedi, Duranton, Garriaud-Maylam, F. Gerbaud et Gruny, M. Kennel, Mme Lassarade, MM. Laufoaulu, Le Gleut et Lefèvre, Mmes Lherbier et Lopez, MM. Mandelli et Mayet, Mme Micouleau, MM. Pierre, Rapin, Reichardt, Revet, Savin, Schmitz et Sido, Mme Thomas et MM. Vogel et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° Le e du II de l’article 24 est abrogé ;
2° Le b de l’article 25 est complété par les mots : » , sous réserve des dispositions de l’article 26-1 » ;
3° L’article 26-1 est rétabli dans la rédaction suivante :
« Art. 26-1. – Par dérogation aux dispositions de l’article 25, lorsque certains copropriétaires proposent d’effectuer, à leurs frais, des travaux d’accessibilité aux personnes handicapées ou à mobilité réduite qui affectent les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble, l’autorisation ne peut leur être refusée que par un vote intervenant dans les conditions prévues au premier alinéa de l’article 26, motivé par l’atteinte portée par les travaux à la structure de l’immeuble ou à ses éléments d’équipements, ou leur non-conformité à la destination de l’immeuble.
« Un décret précise les conditions d’exécution des travaux, qui sont effectués sous la surveillance du syndic.
« Les contestations doivent être formées dans un délai de quinze jours à compter de la date de la délibération de l’assemblée générale des copropriétaires et sont portées devant le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés.
« Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables aux travaux d’accessibilité qui incombent au syndicat en vertu de dispositions législatives ou réglementaires. »
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Nous avons parlé hier de la question de l’accessibilité, sur laquelle revient cet amendement. En raison de la complexité du sujet, je souhaite que le Gouvernement se penche sur le problème et je lui fais confiance pour le régler. Dans ces conditions, je retire cet amendement.
M. le président. L’amendement n° 7 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 241, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La seconde phrase du troisième alinéa de l’article 44 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 tendant à favoriser l’investissement locatif, l’accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l’offre foncière est ainsi rédigée : « Le syndic convoque les représentants des associations dans les mêmes conditions que les copropriétaires et conformément aux dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. »
La parole est à Mme Michelle Gréaume.
Mme Michelle Gréaume. Par cet amendement, nous proposons l’ajout d’un article visant à faire en sorte que le syndic, qui détient les coordonnées des représentants des locataires, les convoque au même titre et dans les mêmes conditions qu’un copropriétaire.
Cet amendement part du constat que la vente de logements sociaux entraîne, de fait, la création d’une copropriété. Si le bailleur assure généralement les fonctions de syndic, il a tout à fait le droit d’externaliser cette mission.
Dans le même temps, il est aussi très fréquent qu’un tissu associatif existe dans ces immeubles et qu’il perdure après les opérations d’accession à la propriété.
Dans ce cadre, la loi du 23 décembre 1986 précise que les représentants des locataires sont « invités » par le syndic à participer à l’assemblée générale et peuvent y prendre la parole sur tous les points inscrits à l’ordre du jour.
Toutefois, vous en conviendrez, il s’agit d’une simple invitation, et non d’une convocation au sens strict, comme cela est prévu pour un copropriétaire.
Autrement dit, le représentant des locataires ne se voit pas communiquer les différents documents venant en appui des résolutions prévues à l’ordre du jour : arrêté des comptes, projets de contrats, devis…
De même, l’information peut lui être communiquée quelques jours seulement avant la tenue de l’assemblée générale, alors que les copropriétaires doivent être convoqués avec un délai de prévenance d’au moins trois semaines.
Le présent amendement vise ainsi à rétablir une certaine égalité entre les différentes parties.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Actuellement, le syndic informe les représentants des associations de locataires, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, de la date, de l’heure, du lieu et de l’ordre du jour de l’assemblée générale. Il s’agit d’une simple invitation et rien ne justifie que les associations de locataires bénéficient du même traitement que les copropriétaires.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Même avis, monsieur le président.
La loi du 23 décembre 1986 prévoit déjà un ensemble de mesures permettant l’information des associations de locataires : possibilité d’assister à l’assemblée générale et de formuler des observations sur les questions inscrites à l’ordre du jour ; obligation pour le syndic d’informer les représentants des associations, par courrier recommandé avec accusé de réception, de la date, de l’heure, du lieu et de l’ordre du jour de l’assemblée générale ; accès aux différents documents concernant la détermination et l’évolution des charges locatives.
Le texte actuel prévoit donc déjà de larges moyens d’information pour les associations de locataires. Évidemment, on peut aussi estimer que c’est à elles de représenter directement les copropriétaires !
M. le président. La parole est à Mme Michelle Gréaume, pour explication de vote.
Mme Michelle Gréaume. Le moins que l’on puisse dire est que la question des copropriétés semble, dans le cadre de ce débat, trouver enfin la place qui lui revient.
Dans les problématiques du logement, on avait presque oublié que cette forme d’immeuble collectif fait largement partie du paysage urbain et que la centaine de milliers de copropriétés en difficulté polarise une bonne partie de la crise actuelle.
Il ne faut pas oublier que la loi relative à l’investissement locatif et à l’accession à la propriété de logements sociaux, dite LILAS ou loi Méhaignerie, a favorisé la diffusion de la propriété immobilière, mais plus encore celle de la dette immobilière des ménages.
Selon une enquête de l’INSEE datant de 2013, un quart des copropriétés connaissent des situations plus ou moins avérées d’impayés de charges communes, pouvant conduire, comme on a pu le voir dans certaines situations déjà évoquées, à l’émergence, dans de très grands ensembles en difficulté, de ce qu’on appelle parfois des « bateaux ivres ».
Il convient également de remarquer qu’un tiers des logements en copropriété sont occupés par des locataires et qu’un cinquième de ces logements ont acquis, avec le temps, le statut de résidence secondaire ou de logement vacant. La vacance de logements dans les copropriétés représentait, selon l’enquête de l’INSEE, l’équivalent d’un million de logements sociaux.
Quand on cherche des solutions socialement acceptables au problème du logement, on pourrait se demander si la location à un niveau de loyer proche des plafonds sociaux de logements vacants dans des copropriétés ne pourrait constituer une voie à explorer.
Cela étant, la présence plus ou moins importante de locataires en titre dans les copropriétés justifie, à notre avis, que ceux-ci soient pleinement informés de la vie de la structure et puissent notamment participer, dans les limites posées par leur situation, aux assemblées générales de copropriétaires régulièrement convoquées.
L’article 44 de la loi Méhaignerie, qui entendait développer l’accession à la propriété par la revente de logements sociaux, entre autres démarches, avait reconnu aux associations de locataires représentatives un embryon de droits, que nous souhaitons ici renforcer, en faisant de la présence aux assemblées générales des représentants des locataires occupants une obligation.
Leur apport aux réflexions menées dans le cadre de la copropriété ne pourra que constituer un plus pour la qualité de la démocratie interne.
C’est sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 634 rectifié bis est présenté par MM. Vaugrenard, Daunis et Iacovelli, Mme Guillemot, M. Kanner, Mme Artigalas, MM. Cabanel et M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mmes M. Filleul, Grelet-Certenais, Harribey et Lienemann, MM. P. Joly, Jomier et Kerrouche, Mmes Lubin, Monier et S. Robert, MM. Roger et Sueur, Mme Taillé-Polian, M. Temal, Mme Tocqueville, M. Tourenne et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 651 rectifié est présenté par Mme de la Provôté, MM. Janssens et Henno, Mme Vullien, M. Moga, Mme Billon, MM. Bonnecarrère et Longeot, Mmes Morin-Desailly et Guidez, MM. Détraigne, Delahaye et Lafon, Mme Kauffmann, MM. Cigolotti, Médevielle, L. Hervé et Delcros et Mmes Gatel et Létard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 59
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article 7 de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires, le mot : « unanime » est remplacé par les mots : « des deux tiers ».
La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour présenter l’amendement n° 634 rectifié bis.
M. Yannick Vaugrenard. L’association syndicale libre, l’ASL, est le dispositif foncier le mieux adapté pour la gestion des cours communes des ensembles édifiés sous forme d’îlots composés de bâtiments et de cours communes.
L’article 7 de l’ordonnance de juillet 2004 exige l’unanimité des propriétaires indivis lors de la constitution d’une ASL. Il en résulte souvent, malheureusement, une situation de blocage, l’unanimité n’étant que très rarement obtenue.
Cette difficulté empêche de mettre en œuvre des outils de gestion de ces espaces indivis, qu’il s’agisse de la nomination d’un syndic, de l’entretien et des travaux divers qui sont à réaliser. Des projets de rénovation en cœur d’îlot ne peuvent donc aboutir, et ce malgré la mise en place par les collectivités de dispositifs incitatifs auprès des copropriétaires.
Ces cours communes non entretenues et ouvertes sur les voies publiques des centres-villes entraînent une dégradation de la qualité des espaces collectifs, ainsi qu’une baisse de l’attractivité des logements.
Nous proposons donc une mesure de simplification par l’assouplissement des règles de constitution d’une ASL pour faciliter les rénovations en cœur d’îlot. Pour cela, il est prévu de passer de la règle de l’unanimité à celle des deux tiers.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour présenter l’amendement n° 651 rectifié.
Mme Sonia de la Provôté. Cet amendement est identique à celui qui vient d’être présenté et je n’ajouterai que quelques compléments.
Les cours communes dont il est question sont des espaces extraordinaires ; elles sont assez fréquentes dans les villes reconstruites qui font souvent partie du patrimoine du XXe siècle.
Ces cœurs d’îlot sont de nature variée : dans certains, l’espace privé est bien cerné ; dans d’autres, la distinction entre les parties publiques et privées n’est pas toujours très nette et l’usage qui en est fait a beaucoup évolué au fil du temps.
Or les copropriétaires ne sont pas forcément les mêmes entre, d’une part, les cours communes et les cœurs d’îlot et, d’autre part, le bâti. En outre, il n’est pas toujours facile d’identifier certains copropriétaires.
Aujourd’hui, ces espaces, qui représentent un énorme potentiel de développement pour les villes concernées, sont souvent à l’abandon ou voient leurs usages détournés, que ce soit en garages ou en arrière-boutiques, créant ainsi des zones indéterminées et masquées à la vue du public en plein cœur de nos villes. Les reconquérir est un enjeu important pour ces villes, dites de la reconstruction.
Pour pallier ce problème, qui a été identifié depuis de nombreuses années, il faut pouvoir définir clairement les parties aménagées par les autorités publiques et celles prises en charge par les propriétaires privés.
C’est une nécessité pour améliorer le fonctionnement de nos villes, en particulier sur le plan qualitatif. Ces lieux constituent par exemple une formidable opportunité pour créer de nouveaux espaces verts, ce qui n’est pas si facile à réaliser dans ces centres-villes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission demande l’avis du Gouvernement sur ces deux amendements identiques.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Seulement à son avis…
M. Jacques Mézard, ministre. … et notre avis est défavorable.
Je comprends l’objectif des auteurs de ces amendements : quand on est amené à gérer une collectivité, on connaît les difficultés que rencontrent les îlots qui ont été évoqués.
Mais la réponse apportée dans cet amendement pose un problème de fond : autoriser la constitution d’une association syndicale libre à la majorité des deux tiers des propriétaires revient à imposer à ceux qui ne sont pas d’accord de participer à l’association et d’y contribuer financièrement.
Certes, cette mesure peut faciliter la gestion de certains ensembles immobiliers complexes, qui sont souvent constitués de copropriétés verticales et de lots détenus individuellement, mais les regroupements de ces copropriétaires de biens immobiliers voisins se font aujourd’hui sur une base strictement contractuelle. Ces regroupements, vous l’avez dit, servent à réaliser ou entretenir des aménagements spécifiques, par exemple des espaces verts, une voirie privée ou encore des digues.
Une association syndicale libre est une personne morale de droit privé. La mise en œuvre de l’amendement conduirait à ce que certains propriétaires voient entrer leur bien, contre leur gré, dans le périmètre d’une personne morale de droit privé avec obligation de lui verser une participation financière. La seule alternative pour les copropriétaires qui ne seraient pas d’accord serait de se départir de leur droit de propriété.
Si je comprends parfaitement l’objectif de cet amendement – nous voyons tous, sur le terrain, les situations concrètes qui sont visées –, la mesure proposée constitue, à mon sens, une atteinte disproportionnée au droit de propriété. C’est pour cette raison que l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Yannick Vaugrenard, pour explication de vote.
M. Yannick Vaugrenard. Monsieur le ministre, je ne partage pas votre opinion. Je ne crois pas que cette mesure constitue, pour reprendre votre expression, une atteinte disproportionnée au droit de propriété.
Dans votre réponse, vous semblez comprendre la situation, mais je n’entends pas vos propositions pour trouver une solution.
Quelle est la question qui nous est collectivement posée ? Dans beaucoup de villes détruites presque entièrement pendant la Seconde Guerre mondiale et reconstruites dans les années qui ont suivi, il est impossible de gérer certaines cours d’immeubles.
Il faut répondre à cette préoccupation pour améliorer l’environnement de ces lieux et ne pas peser sur la valeur des logements. Dans le droit actuel, les collectivités territoriales n’arrivent pas à trouver de solution pour rendre ces quartiers attractifs et ce sont les centres-villes qui sont concernés.
Madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, soyez attentives à notre demande ! Elle fait suite à un colloque qui a eu lieu à Saint-Nazaire et qui a regroupé les représentants de plusieurs villes reconstruites dans les années 1950 à 1970, notamment Le Havre, Saint-Nazaire, Royan et Brest.
Au-delà des aspects strictement juridiques, que je peux comprendre, je souhaite que l’on puisse trouver une solution efficace et crédible à ce problème et j’en appelle à la responsabilité de la commission et du Gouvernement.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. La question des cours communes a été évoquée. De mon côté, je voudrais pointer du doigt le problème des copropriétés verticales.
Je vous donne un exemple : je connais une situation, où sont imbriqués un parking, dont une partie est publique, une autre privée, des logements sociaux, une crèche, des commerces en rez-de-chaussée et, en dessous, un bassin de rétention qui récupère les eaux pluviales d’une copropriété privée voisine.
Ce sont des problèmes insolubles, pour ne pas employer un autre terme… (Sourires.) Au bout du compte, c’est la ville qui prend les choses en charge. Si elle ne le faisait pas, il ne se passerait rien ! C’est un sujet important qui concerne à la fois les cours communes et les copropriétés verticales.
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Mes chers collègues, vous avez été nombreux à pointer du doigt les difficultés de certaines copropriétés et associations syndicales libres. Par conséquent, je vous propose que la commission des affaires économiques constitue, dès la rentrée prochaine, un groupe de travail consacré à ces problèmes, qui sont parfois insolubles dans l’état actuel du droit, pour reprendre le mot utilisé par Philippe Dallier… (Sourires.)
M. Philippe Dallier. Bonne idée !
M. Charles Revet. Il y a du travail à faire !
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Mon intervention rejoint celle que vient de faire la présidente de la commission. La proposition qu’elle nous fait m’apparaît d’autant plus importante que la vente d’une partie du patrimoine des bailleurs sociaux va amplifier les imbrications dont parlait notre collègue Dallier.
Je vis aussi ce genre de problèmes dans ma commune et je peux vous assurer qu’ils seront multipliés avec l’accélération de la vente des logements sociaux. La gestion de nombreuses copropriétés va devenir encore plus complexe et il faut mettre en place les outils pour faire face à ces situations.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. J’accepte bien évidemment la proposition de la présidente de la commission, qui va nous permettre de trouver des solutions adaptées. Nous devrons d’ailleurs nous inspirer du travail réalisé par les collectivités locales concernées, notamment au sein du Club Prisme. J’ajoute que la ville de Caen était également représentée au colloque évoqué par Yannick Vaugrenard.
Ces espaces de statut privé, dont on ne connaît pas toujours les copropriétaires, ont un rôle très important à jouer dans l’aménagement des villes et dans le renouvellement urbain, y compris en termes de construction de logements, si l’on veut reconstruire la ville sur la ville. Ils constituent un potentiel très important pour les collectivités, surtout si nous nous situons dans l’optique de construire plus, plus vite, moins cher et mieux !
M. le président. Madame le rapporteur, vous aviez demandé l’avis du Gouvernement. Quel est maintenant l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Mme la présidente de la commission a annoncé le lancement d’un groupe de travail sur la question posée par ces deux amendements identiques, dont je demande, par conséquent, le retrait.
M. le président. Monsieur Vaugrenard, l’amendement n° 634 rectifié bis est-il maintenu ?
M. Yannick Vaugrenard. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 634 rectifié bis est retiré.
Madame de la Provôté, l’amendement n° 651 rectifié est-il maintenu ?
Mme Sonia de la Provôté. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 651 rectifié est retiré.
Article 59 bis A (nouveau)
Le II de l’article 14-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Le cinquième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Cette affectation doit tenir compte de l’existence de parties communes spéciales ou de clefs de répartition des charges. » ;
2° La seconde phrase du septième alinéa est ainsi rédigée : « Ce montant est de 5 % du budget prévisionnel mentionné à l’article 14-1, sauf décision contraire de l’assemblée générale fixant un taux supérieur. »
M. le président. L’amendement n° 320, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 3
Remplacer le taux :
5 %
par le taux :
10 %
La parole est à M. Fabien Gay.
M. Fabien Gay. Notre débat sur les copropriétés est très intéressant et je vais dans le sens de Mme la présidente de la commission, quand elle propose de créer un groupe de travail sur ces questions.
Si j’étais un peu provocateur, j’aurais cependant tendance à relever une certaine contradiction entre ce que nous pouvons entendre dans ce débat, en particulier sur les copropriétés en difficulté, et la mesure qui a été adoptée pour vendre en bloc des logements sociaux. En effet, il est évident que cette vente entraînera l’augmentation du nombre des copropriétés dégradées.
Nous devons mener un véritable débat politique sur ces questions, mais je reviens pour l’instant à l’objet même de cet amendement.
La réalisation de travaux d’importance dans un ensemble régi par la loi de 1965 peut s’avérer un moment difficile dans le déroulement de la vie de la structure, même lorsque ces travaux peuvent être rendus nécessaires par le temps ou la législation. Je pense par exemple aux travaux liés au ravalement des façades ou encore à ceux permettant l’amélioration des performances énergétiques de l’immeuble.
Depuis la promulgation de la loi de 1965, des avancées se sont produites dans le domaine de la formalisation et de la préparation des gros travaux et des réparations de l’immeuble, amenant notamment à la constitution obligatoire d’un fonds de réserve utilisable pour faire face aux dépenses occasionnées par la réalisation de tel ou tel programme de travaux.
C’est la loi ALUR qui, fort intelligemment, a rendu obligatoire la constitution de cette réserve. Il s’agit d’éviter, autant que faire se peut, le traumatisme des appels de charges particulièrement élevés, intervenant lorsque le fonds de réserve est loin de mettre à disposition les moyens nécessaires.
Il ne faut jamais oublier que, malgré le respect des normes fixées par l’ordre public, la réalisation de travaux en copropriété nécessite également l’assentiment majoritaire des copropriétaires, de surcroît dans le cadre d’une majorité qualifiée.
Il convient donc de lisser autant que possible les conditions de financement des travaux de réparation et de rénovation des immeubles en copropriété, tout en appelant les syndicats à la vigilance sur le placement temporaire des fonds mis en réserve et sur la mobilisation et la sollicitation de l’ensemble des modes de financement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission s’en remet à la sagesse du Sénat. L’argument des auteurs de l’amendement, qui préfèrent augmenter le fonds de travaux, plutôt que de recourir à des augmentations ponctuelles, éventuellement importantes, des charges, est pertinent. Néanmoins, porter le montant de ce fonds à 10 % du budget prévisionnel annuel a évidemment des conséquences non négligeables.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. L’avis du Gouvernement est défavorable. L’amendement a pour objet de doubler la cotisation obligatoire versée chaque année par les copropriétaires pour le fonds de travaux, en faisant passer ce fonds de 5 % à 10 % du budget prévisionnel.
Or ce dispositif ne s’applique effectivement que depuis le 1er janvier 2017, soit un peu plus d’un an. Nous ne disposons pas du recul nécessaire pour l’évaluer.
M. le président. Je mets aux voix l’article 59 bis A.
(L’article 59 bis A est adopté.)
Article 59 bis B (nouveau)
Le dernier alinéa du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Les mots : « , à compter du 1er janvier 2015, » sont supprimés ;
2° Il est ajouté une phrase ainsi rédigée : « Un décret précise la liste des documents devant être accessibles en ligne dans un espace sécurisé mentionné à la première phrase du présent alinéa. »
M. le président. L’amendement n° 321, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Au début de cet article
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Dans le septième alinéa du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, la référence : « 24 » est remplacée par la référence : « 25 ».
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. La profession de syndic de copropriété appelle l’exercice de compétences élargies. Il est notoire que des problèmes sont déjà apparus dans certaines copropriétés du fait du comportement discutable de certains gestionnaires oubliant un peu facilement les nécessités de la mise en concurrence. Vous avez raison, monsieur le ministre, pour certaines copropriétés, il est parfois difficile de trouver un syndic, mais cela n’excuse pas tout.
La gestion d’une copropriété digne de ce nom, comptant plusieurs dizaines, voire centaines de logements, nécessite la conclusion d’un certain nombre de contrats d’entretien et de maintenance concernant, notamment, l’entretien des ascenseurs, celui des espaces verts, le nettoyage des parties communes, la maintenance de l’éclairage des parties communes, de l’ouverture automatisée du portail d’accès et des digicodes d’accès aux logements, sans parler des contrats pouvant porter sur la plomberie, l’entretien éventuel du parking, les ordures ménagères, la désinsectisation, les canalisations, etc.
Bien souvent, il s’agit de contrats dont les montants sont réduits, et qui peuvent faire l’objet d’appels d’offres de gré à gré.
Les syndics professionnels ont souvent, par leur expérience et, parfois, leur habitude, une sorte de « carnet d’adresses » d’entreprises dont ils prennent en général l’attache et requièrent les services pour la ou les copropriétés dont ils ont obtenu le contrat de gestion.
Nous n’avons rien contre le recours quasi régulier à telle ou telle entreprise par tel ou tel syndic, mais nous souhaitons toutefois que la majorité retenue en assemblée générale de copropriété pour en décider soit la majorité prévue par l’article 25 de la loi de 1965.
À nos yeux, une telle mesure permettra la mise en œuvre de choix de gestion plus facilement admis par les copropriétaires, en pleine connaissance de cause, ce qui ne peut que faciliter la vie quotidienne de chaque structure.
C’est en ce sens que nous avons déposé cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Si l’on comprend l’intention des auteurs de l’amendement, on peut néanmoins s’interroger sur le risque de rigidification du dispositif que comporte leur proposition.
Néanmoins, la commission a décidé de s’en remettre, de nouveau, à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Que de sagesse ! C’est presque le trop-plein ! (Rires.)
J’ai bien compris que c’était la fête des syndics cet après-midi. (Sourires.) Certes, tout ce qui se passe dans les syndicats de copropriétaires n’est pas parfait. On a malheureusement un certain nombre d’exemples démontrant qu’il y a des problèmes, mais tous les syndics ne sont pas incompétents ou malhonnêtes, heureusement !
Votre amendement a pour objet de changer la règle de majorité pour la passation d’une convention entre le syndic et une personne ou une entreprise liée directement ou indirectement au syndic.
Aujourd’hui, en application de la loi Hoguet – un député qui s’était en son temps beaucoup préoccupé du droit de la copropriété –, ce type de convention requiert un vote à la majorité simple, c’est-à-dire la majorité des copropriétaires présents ou représentés à l’assemblée générale. L’article 4-1 de cette loi fait, en outre, obligation au syndic, avant toute conclusion d’un contrat avec une personne ou une entreprise, d’informer le syndicat des copropriétaires des éventuels liens directs de nature capitalistique ou des liens de nature juridique qu’il aurait avec ces entreprises ou ces personnes.
Vous souhaitez que le vote de ces contrats se fasse à la majorité absolue, c’est-à-dire à la majorité des voix de tous les copropriétaires, qu’ils soient présents, représentés, ou absents et non représentés. Cette règle de majorité est donc beaucoup plus lourde.
Vous posez en fait la question du conflit d’intérêts, mais le fait d’augmenter la majorité requise n’est pas le gage d’une meilleure protection du syndicat des copropriétaires. Cela aura surtout pour effet de complexifier davantage la prise de décision. Ce qui compte, c’est l’information totale du syndicat des copropriétaires. Voilà pourquoi je suis plutôt défavorable à cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’article 59 bis B.
(L’article 59 bis B est adopté.)
Article 59 bis C (nouveau)
Le troisième alinéa du I de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Le syndic engage une politique de maîtrise des charges par la mise en concurrence, tous les trois ans, des contrats qui se reconduisent annuellement par tacite reconduction, et avant l’arrivée de l’échéance pour les contrats signés pour une période de plus de deux ans. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 59 bis C
M. le président. L’amendement n° 322, présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 59 bis C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Avant le dernier alinéa du II de l’article 18 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – d’alerter le conseil syndical lorsqu’il apparaît qu’un ou plusieurs copropriétaires ou titulaires de lots n’ont pas acquitté leurs charges pendant une période d’au moins trois mois. À défaut de réaction du conseil syndical, le syndic est habilité à informer de la situation le maire de la commune d’implantation de l’immeuble, de même que le président de l’établissement public de coopération intercommunale en charge de l’habitat et du logement. »
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. La crise du logement se révèle aussi dans la situation de nombreuses familles, qui, vivant dans des copropriétés en difficulté, ont très tôt été dans l’incapacité de faire face au règlement des charges collectives de l’immeuble et, plus encore, à la nécessaire constitution du fonds de réserve indispensable aux travaux de maintenance et de réparation.
Ce schéma de lente, mais sûre dégradation d’un ensemble bâti, nous avons pu le constater à Grigny 2, à La Forestière et au Chêne Pointu, à Clichy-sous-Bois, ou encore dans l’ensemble des Bosquets à Montfermeil, directement voisin des précédents. Il s’agit là d’exemples connus de ce que l’on pourrait appeler des « bateaux ivres », où plus rien, ou presque, ne tenait debout, la structure ne fonctionnant plus, avant une puissante intervention publique de requalification des quartiers concernés.
Selon le rapport de notre ancien collègue Dominique Braye, désormais en fonction à l’Agence nationale de l’habitat, plus de 100 000 copropriétés connaîtraient aujourd’hui des difficultés de fonctionnement, allant du recouvrement des charges locatives à la programmation des travaux de réparation, sans parler des problèmes posés, dans certains cas, par la cohabitation entre propriétaires occupants, accédants à la propriété et locataires.
Le fonctionnement des copropriétés et leur évolution, singulièrement depuis l’adoption de la loi Méhaignerie, qui en a multiplié le nombre, imposent que des mesures soient prises, autant que faire se peut, ce qui implique de donner un nouveau rôle aux syndics, avec engagement de leur responsabilité en cas d’aggravation de la situation.
Il s’agit ainsi de faire en sorte que les syndics mènent une action de prévention des impayés de charges locatives des copropriétaires. Il convient de tirer les conclusions qui s’imposent : la prise en charge précoce de ces difficultés de paiement permet, comme on peut le constater avec les impayés locatifs sociaux, de trouver les voies et les moyens de la résolution des problèmes.
Nous proposons donc que le syndic dispose d’un droit d’alerte préventif à l’endroit du syndicat de copropriété au sujet des situations de difficultés temporaires de règlement des charges communes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La question soulevée par les auteurs de cet amendement est importante. On peut néanmoins s’interroger sur la mise en œuvre du dispositif proposé.
Actuellement, le syndic doit informer le conseil syndical lorsqu’à la clôture des comptes les impayés atteignent 25 % des sommes exigibles. Il doit alors saisir sur requête le juge d’une demande de désignation d’un mandataire ad hoc. Pour les copropriétés de plus de deux cents lots, le pourcentage des impayés déclenchant la saisine est fixé à 15 %. Je pense qu’il convient d’en rester là, votre dispositif me semblant difficile à mettre en application. Néanmoins, je comprends vos intentions.
Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. J’ai le même avis que la commission. J’entends l’argument qui vient d’être développé par M. Savoldelli, lequel souhaite aller vers davantage de prévention de ce type de situation. C’est comme pour un locataire : lorsqu’un copropriétaire commence à ne plus payer, plus on intervient rapidement, plus on a des chances de rétablir la situation in bonis.
Votre proposition pose néanmoins un certain nombre de problèmes. D’abord, le délai de trois mois ne correspond pas à trois appels de charges, comme c’est le cas pour un locataire, mais à un seul appel trimestriel.
J’y vois une autre difficulté. Si le syndic fait correctement son travail, il doit s’assurer que le copropriétaire verse la provision. Le cas échéant, il peut mettre en application les dispositions législatives et réglementaires, mais n’est-ce pas un peu excessif de prévoir par la loi que les membres du conseil syndical pourront avoir connaissance du retard de paiement au terme d’un délai aussi court. L’intervention amiable est quelque chose d’utile pour avertir, aider le copropriétaire, mais l’information du conseil syndical, donc, le plus souvent, de l’ensemble de la copropriété, sur la situation difficile d’un des copropriétaires me semble exagérée.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 322.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Article 59 bis D (nouveau)
L’article 1er de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « comprenant chacun une partie privative et une quote-part de parties communes » sont supprimés ;
2° Après le premier alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« Le lot de copropriété comporte obligatoirement une partie privative et une quote-part de parties communes, lesquelles sont indissociables.
« Ce lot peut être un lot transitoire, formé d’une partie privative constituée d’un droit de construire précisément défini quant aux constructions qu’il permet de réaliser, et d’une quotepart de parties communes correspondante. » – (Adopté.)
Article 59 bis E (nouveau)
Après l’article 1er de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il est inséré un article 1-1 ainsi rédigé :
« Art. 1-1. – En cas de mise en copropriété d’un immeuble bâti existant, l’ensemble du statut s’applique à compter du premier transfert de propriété d’un lot.
« Pour les immeubles à construire, le fonctionnement de la copropriété découlant de la personnalité morale du syndicat de copropriétaires prend effet lors de la livraison du premier lot.
« L’immatriculation du syndicat de copropriétaires est sans conséquence sur l’application du statut. » – (Adopté.)
Article 59 bis F (nouveau)
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° L’article 3 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« – le droit d’affichage. » ;
2° Après l’article 37, il est inséré un article 37-1 ainsi rédigé :
« Art. 37-1. – Les droits de construire, d’affouiller et de surélever sont des droits accessoires aux parties communes et appartiennent au syndicat des copropriétaires. Ils ne peuvent faire l’objet d’une convention par laquelle un propriétaire ou un tiers se les réserverait.
« Toutefois, ces droits peuvent constituer la partie privative d’un lot transitoire visé à l’article 1er.
« La décision de cession d’un droit accessoire autre que le droit de surélever est prise à la majorité prévue par l’article 26. » – (Adopté.)
Article 59 bis G (nouveau)
Après l’article 6-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, sont insérés trois articles 6-2 à 6-4 ainsi rédigés :
« Art. 6-2. – Les parties communes spéciales sont celles affectées à l’usage et à l’utilité de plusieurs copropriétaires. Elles sont la propriété indivise de ces derniers.
« Il ne peut y avoir de parties communes spéciales en l’absence de charges spéciales et réciproquement.
« Les décisions afférentes aux seules parties communes spéciales peuvent être prises soit au cours d’une assemblée spéciale, soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires. Dans ce dernier cas, seuls prennent part au vote les copropriétaires à l’usage et à l’utilité desquels sont affectées ces parties communes, sauf atteinte à la destination de l’immeuble ou aux droits des copropriétaires.
« Art. 6-3. – Les parties communes à jouissance privative sont les parties communes affectées à l’usage et à l’utilité exclusifs d’un copropriétaire. Elles appartiennent indivisément à tous les copropriétaires ou, pour les parties communes spéciales, à plusieurs d’entre eux.
« Le droit de jouissance privative est un droit réel, perpétuel et susceptible de prescription acquisitive. Il est nécessairement accessoire à un lot de copropriété. Il ne peut en aucun cas constituer la partie privative d’un lot.
« Art. 6-4. – L’existence des parties communes spéciales et de celles à jouissance privative est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété ou l’état descriptif de division. » – (Adopté.)
Article 59 bis H (nouveau)
L’article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Seul le syndicat des copropriétaires peut se prévaloir de l’absence d’habilitation du syndic à agir en justice. » – (Adopté.)
Article 59 bis I (nouveau)
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° Après l’article 17-2, il est inséré un article 17-3 ainsi rédigé :
« Art. 17-3. – Le syndic est élu par l’assemblée générale aux conditions de majorité des articles 25 et 25-1 pour une durée maximale de trois ans renouvelable. Le mandat du syndic désigné par le règlement de copropriété ne peut excéder un an à compter de la date d’application du statut, telle que prévue à l’article 1-1 de la présente loi.
« À défaut de nomination du syndic par l’assemblée générale des copropriétaires convoquée à cet effet, le syndic est désigné par le président du tribunal de grande instance saisi à la requête d’un ou plusieurs copropriétaires, du maire de la commune ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d’habitat du lieu de situation de l’immeuble, ou de tout intéressé. » ;
2° Les troisième à cinquième alinéas de l’article 21 sont supprimés.
M. le président. L’amendement n° 609, présenté par Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Il s’agit d’un amendement de suppression de l’article. La loi ALUR a instauré la mise en concurrence, tous les trois ans, du contrat de syndic. L’objectif est d’assurer une meilleure offre à un meilleur coût.
Nous souhaitons supprimer les dispositions adoptées en commission sur les modalités de désignation du syndic, qui remettent notamment en cause le principe de la mise en concurrence obligatoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je demande le retrait de l’amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable. Cette proposition est contraire à la position de la commission, qui a tenu à supprimer la mise en concurrence du contrat de syndic.
Pour autant, je rappelle que rien n’empêche le conseil syndical ou un copropriétaire de procéder à une telle mise en concurrence.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jacques Mézard, ministre. Le Gouvernement est favorable à cet amendement, en cohérence avec sa position constante sur la nécessité de prévoir dans la loi la mise en concurrence des syndics, même si j’ai dit tout à l’heure que, dans certains cas, la concurrence était difficile à trouver, faute de candidats.
Actuellement, le conseil syndical doit procéder tous les trois ans à une mise en concurrence de plusieurs projets de contrat de syndic, avant la tenue de l’assemblée générale de renouvellement ou de désignation du syndic. À mon sens, il n’est pas souhaitable de supprimer cette obligation. Certes, madame la rapporteur, la possibilité est toujours ouverte, mais autant l’imposer par la loi. Si la concurrence ne s’exerce pas, en l’absence d’autre candidat, le conseil syndical en tirera les conséquences.
M. le président. Je mets aux voix l’article 59 bis I.
(L’article 59 bis I est adopté.)
Article 59 bis J (nouveau)
L’article 18-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour cette consultation, le copropriétaire peut être représenté par la personne de son choix. » – (Adopté.)
Article 59 bis K (nouveau)
L’article 19-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « les autres provisions prévues à ce même article » sont remplacés par les mots : « ou au I de l’article 14-2 ou des sommes appelées au titre de l’approbation des comptes, les provisions prévues à ces mêmes articles » ;
2° Au deuxième alinéa, les mots : « et devenues exigibles » sont remplacés par les mots : « ou au I de l’article 14-2 et devenues exigibles ou des sommes appelées au titre de l’approbation des comptes ». – (Adopté.)
Article 59 bis L (nouveau)
Le dernier alinéa de l’article 21 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est supprimé. – (Adopté.)
Article 59 bis M (nouveau)
Le I de l’article 22 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° À la troisième phrase du troisième alinéa, le taux : « 5 % » est remplacé par le taux : « 10 % » ;
2° Après la troisième phrase du troisième alinéa, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Chacun des époux, copropriétaires communs ou indivis d’un lot, peut recevoir personnellement des délégations de vote, dans les conditions et limites prévues par le présent article. Tout mandataire désigné peut subdéléguer son mandat à une autre personne, à condition que cela ne soit pas interdit par le mandat. » ;
3° Le troisième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Lorsque le syndic a reçu des mandats sans indication de mandataire, il ne peut ni les conserver pour voter en son nom, ni les distribuer lui-même aux mandataires qu’il choisit. » ;
4° Les deux derniers alinéas sont remplacés par six alinéas ainsi rédigés :
« Ne peuvent ni recevoir de mandat pour représenter un copropriétaire, ni présider l’assemblée générale :
« – le syndic, son conjoint, le partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité, son concubin ;
« – les ascendants et descendants du syndic ainsi que ceux de son conjoint ou du partenaire lié à lui par un pacte civil de solidarité ou de son concubin ;
« – les préposés du syndic, leur conjoint, le partenaire lié à eux par un pacte civil de solidarité, leur concubin ;
« – les ascendants et descendants des préposés du syndic ainsi que ceux de leur conjoint ou du partenaire lié à eux par un pacte civil de solidarité ou de leur concubin.
« Tout copropriétaire peut voter par correspondance ou par voie électronique dans des conditions définies par décret en Conseil d’État. Le copropriétaire qui vote par correspondance ou par voie électronique est considéré comme présent. » – (Adopté.)
Article 59 bis N (nouveau)
La loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifiée :
1° Le h du II de l’article 24 est abrogé ;
2° Le f de l’article 25 est ainsi modifié :
a) Les mots : « À moins qu’ils ne relèvent de la majorité prévue par l’article 24 » sont supprimés ;
b) Sont ajoutés les mots : « , qu’ils soient ou non imposés par les lois et règlements ». – (Adopté.)
Article 59 bis O (nouveau)
Au premier alinéa de l’article 42 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, le mot : « dix » est remplacé par le mot : « cinq ». – (Adopté.)
Article 59 bis
(Non modifié)
Après l’article L. 255-7 du code de la construction et de l’habitation, il est inséré un article L. 255-7-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 255-7-1. – Pour l’application de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant statut de la copropriété des immeubles bâtis, la signature d’un bail réel solidaire est assimilée à une mutation et le preneur est subrogé dans les droits et obligations du bailleur, sous réserve des dispositions suivantes :
« 1° Le preneur dispose du droit de vote pour toutes les décisions de l’assemblée générale des copropriétaires, à l’exception de décisions prises en application des d et n de l’article 25 et des a et b de l’article 26 de la même loi ou de décisions concernant la modification du règlement de copropriété, dans la mesure où il concerne les spécificités du bail réel solidaire. Le bailleur exerce également les actions qui ont pour objet de contester les décisions pour lesquelles il dispose du droit de vote. Aucune charge ne peut être appelée auprès du bailleur y compris pour des frais afférents aux décisions prises par lui ou pour son compte ;
« 2° Chacune des deux parties peut assister à l’assemblée générale des copropriétaires et y formuler toutes observations sur les questions pour lesquelles elle ne dispose pas du droit de vote. » – (Adopté.)
Article 60
I. – (Non modifié) Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à procéder par voie d’ordonnance à l’adoption de la partie législative d’un code relatif à la copropriété des immeubles bâtis afin de regrouper et organiser l’ensemble des règles régissant le droit de la copropriété. Le Gouvernement peut, à ce titre, apporter les modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l’état du droit, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet.
II. – (Supprimé)
III. – L’ordonnance mentionnée au I est prise dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la publication de la présente loi.
Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance.
M. le président. L’amendement n° 798, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Rétablir le II dans la rédaction suivante :
II. – Le Gouvernement est également autorisé à prendre par voie d’ordonnance, dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, les mesures relevant du domaine de la loi visant à améliorer la gestion des immeubles et à prévenir les contentieux, destinées à :
1° Redéfinir le champ d’application et adapter les dispositions de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis au regard des caractéristiques des immeubles, de leur destination et de la taille de la copropriété, d’une part, et modifier les règles d’ordre public applicables à ces copropriétés, d’autre part ;
2° Clarifier, moderniser, simplifier et adapter les règles d’organisation et de gouvernance de la copropriété, celles relatives à la prise de décision par le syndicat des copropriétaires ainsi que les droits et obligations des copropriétaires, du syndicat des copropriétaires, du conseil syndical et du syndic.
II. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
III. – Les ordonnances mentionnées aux I et II sont respectivement prises dans un délai de vingt-quatre mois et de douze mois à compter de la publication de la présente loi.
III. – Alinéa 4
Remplacer les mots :
de l’ordonnance
par les mots :
de chaque ordonnance
La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Mézard, ministre. Cet amendement vise à rétablir l’habilitation à légiférer par ordonnance pour la réforme du droit de la copropriété. J’imagine qu’il ne va pas susciter un enthousiasme délirant…
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Ou démesuré… (Sourires.)
M. Jacques Mézard, ministre. … ou même démesuré de la part de la commission. Je sais ce que le Sénat pense des ordonnances.
M. Charles Revet. Vous le pensiez aussi !
M. Jacques Mézard, ministre. Tout à fait, mais cela n’a pas empêché tous les gouvernements successifs, y compris ceux que vous souteniez, d’y recourir.
M. Charles Revet. C’est pourquoi il ne faut pas le faire aujourd’hui. (Rires.)
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. On a perdu, donc on en tire les conséquences. (Nouveaux rires.)
M. Jacques Mézard, ministre. Trêve de plaisanterie, je vais essayer d’expliquer ce que nous souhaitons faire avec cette habilitation, dont la demande figurait dans le texte initial. Le Sénat, dans sa grande sagesse, s’exprimera ensuite comme il le juge approprié.
Je vous fais d’abord remarquer que nous avons su retirer d’autres demandes d’habilitation. Je pense à la restructuration du secteur des bailleurs sociaux. Nous avons eu le temps de beaucoup travailler les uns et les autres et nous avons réussi à mettre en place le dispositif complet dans la loi ÉLAN. Néanmoins, cela n’a pas été le cas sur la question de la copropriété. Or cette question, et les débats que nous venons d’avoir le démontrent amplement, est devenue extrêmement préoccupante.
Je ne dis pas que rien n’a été fait avant. Il y a déjà eu des évolutions législatives depuis la loi de 1965 et le décret de 1967. Il n’en reste pas moins qu’aujourd’hui nous dénombrons beaucoup de copropriétés dégradées. Avec M. le secrétaire d’État, Julien Denormandie, nous avons demandé à tous les préfets de faire un bilan dans chaque département et de nous faire remonter un inventaire des copropriétés les plus dégradées, ainsi que de celles qui menacent de verser dans cette situation. Il s’avère qu’aujourd’hui leur nombre est très important, ce qui rend nécessaire une intervention de la puissance publique.
Il y a déjà eu, dans le passé, des interventions. Ce fut le cas avec les procédures ORCOD-IN, notamment à Clichy-sous-Bois, dont M. Savoldelli a parlé. Il en faut d’autres. En effet, cet hiver, nous avons eu affaire à des copropriétés extrêmement dégradées à Marseille – mais il y en a ailleurs –, ce qui nous a fait prendre conscience de la nécessité de mettre en place les moyens pour la puissance publique d’intervenir, et donc réformer le droit de la copropriété.
À cette fin, un travail a été enclenché avec la Chancellerie. J’ai rencontré personnellement Mme le garde des sceaux sur ce sujet. Bien évidemment, madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, quelle que soit l’évolution législative, je ferai en sorte que le Sénat soit totalement associé à cette entreprise, ce qui me semble tout à fait légitime.
Nous avons besoin d’intervenir – les différents amendements qui viennent d’être défendus en sont l’illustration –, d’une part, par une réforme de la loi de 1965 et du décret de 1967, et, d’autre part, par le fléchage de moyens financiers plus importants venant de l’État et de structures comme l’ANAH pour pouvoir intervenir plus lourdement, en association avec les collectivités locales et à leur demande. En effet, je le répète, la situation est devenue extrêmement préoccupante, avec des situations très graves. Je vous ferai grâce du rappel d’événements précis, concrets, survenus cet hiver dans certaines copropriétés, où il a fallu procéder au déménagement de l’ensemble des habitants, ou plutôt devrais-je dire des occupants, lesquels étaient plus nombreux que les habitants. Telle est la réalité que nous rencontrons sur le terrain.
Madame la présidente de la commission, madame la rapporteur, j’entends déjà ce que vous allez dire. En tout cas, je tiens à redire de manière très claire que si, in fine, nous recourons à une ordonnance, je m’engage à le faire en co-construction avec la Haute Assemblée.
M. Antoine Lefèvre. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Sans surprise, la commission est défavorable à cette demande d’habilitation. On l’a dit et redit depuis la conférence de consensus sur le logement. Ce sujet du droit de la copropriété est extrêmement important et appelle, chacun s’accorde à le dire, de la simplification et de la clarification. En effet, ce droit n’a que très peu évolué depuis la loi de 1965.
Pour autant, nous avons eu une démarche différente. Après la conférence de consensus sur le logement, nous avons souhaité réserver le recours à l’ordonnance à la partie purement technique, c’est-à-dire la codification. En revanche, nous n’y sommes pas favorables sur d’autres points qui ont été soulevés par la conférence, notamment parce qu’un certain nombre de professionnels ne sont pas favorables à ce que l’on puisse légiférer par ordonnance sur un sujet aussi important pour nos concitoyens. Preuve en est le nombre d’amendements déposés sur notre texte, qui intègre directement un certain nombre de mesures, pas toutes, ce qui vous montre que nous avons travaillé de façon équilibrée. Vous ne pouvez que le constater, beaucoup des dispositions que nous avons reprises sont issues des travaux de la conférence de consensus sur le logement. Elles nous semblaient donc assez consensuelles pour être inscrites dans le dur.
Il y a, en revanche, d’autres dispositions sur la réforme du droit de la copropriété que nous n’avons pas jugé opportun d’inclure dans le texte, car elles ne nous semblaient pas suffisamment mûres ni consensuelles.
Je veux également souligner que cette réforme était envisagée depuis l’été 2017, comme l’a rappelé le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi, mais, dans l’étude d’impact, rien ne justifie véritablement de recourir directement aux ordonnances. Traditionnellement, on invoque la nécessité de légiférer rapidement ou la technicité du sujet. Sur la partie « codification », nous sommes d’accord, s’agissant d’un sujet très technique. En revanche, rien ne montre que l’ordonnance soit un véhicule normatif permettant d’aller plus vite en la matière. C’est ce que nous avons essayé de démontrer. C’est la raison pour laquelle nous en resterons à la ligne de conduite qui a été la nôtre sur d’autres sujets.
M. le président. Je mets aux voix l’article 60.
(L’article 60 est adopté.)
Article additionnel après l’article 60
M. le président. L’amendement n° 607, présenté par Mmes Lienemann et Guillemot, MM. Iacovelli, Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 60
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 255-7 du code de la construction et de l’habitation est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans les immeubles en copropriété où l’ensemble des logements, ou à défaut l’ensemble des logements d’un volume distinct, font l’objet de baux réels solidaires auprès d’un même organisme de foncier solidaire, les titulaires de baux réels solidaires confèrent au syndicat des copropriétaires la gestion de leurs droits réels indivis, en complément des missions qui lui sont attribuées notamment par l’article 14 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis. Le règlement de copropriété peut également prévoir un mandat de recouvrement des redevances au profit du syndic en l’application de l’article L. 255-8 du présent code. »
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Le dispositif du bail réel solidaire, qui est un dispositif d’accession sociale à la propriété, repose sur une dissociation entre le foncier, détenu par un organisme de foncier solidaire, un OFS, et le bâti, acquis par un particulier souhaitant en faire sa résidence principale.
Lorsque des baux réels solidaires sont conclus sous le régime de la copropriété, les droits sur le sol des copropriétaires ne constituent pas une partie commune, contrairement aux copropriétés traditionnelles. Cet amendement a pour objet de confier la gestion de ces droits au syndicat des copropriétaires et de prévoir la possibilité de confier, par une disposition du règlement de copropriété, le recouvrement des redevances dues au titre du bail réel solidaire au syndic de copropriété.
Cette précision nous semble utile et nécessaire pour éviter des situations de flou ou de conflit.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Sur ce sujet technique, je demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d'État auprès du ministre de la cohésion des territoires. Nous avons discuté en fin de semaine dernière de l’intérêt des OFS. Je persiste et signe : pour répondre aux problèmes de prix du foncier, l’une des meilleures solutions est le développement massif des OFS. J’ai notamment salué la décision prise par la commission des affaires économiques tendant à faire entrer dans le quota SRU les logements créés dans le cadre de ce dispositif. Il me semble que cela va dans le bon sens. D’ailleurs, M. le sénateur Gay pointait du doigt tout l’intérêt du démembrement.
En l’espèce, monsieur Daunis, vous évoquez un point juridique très particulier. À partir du moment où il y a ce démembrement, le terrain appartient à l’office et non pas à ceux qui ont l’usufruit. Je ne suis pas convaincu que votre proposition soit la meilleure façon de répondre juridiquement au problème majeur que vous soulevez, tout simplement parce que l’on va demander à un syndic de gérer un espace dont il n’a pas la propriété, alors que c’est un syndic de copropriété. Je demande donc le retrait de votre amendement, faute de quoi j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. J’ai bien compris l’argument développé par M. le secrétaire d’État sur ce sujet très technique. Néanmoins je considère qu’il s’agit là d’un vrai problème. J’émets donc un avis favorable sur l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Je remercie Mme la rapporteur. S’il y a un calage juridique d’ici à la réunion de la commission mixte paritaire, nous devrions pouvoir régler ce point. Je rappelle simplement qu’il ne serait pas obligatoire de confier la gestion au syndic. L’amendement ouvre simplement la possibilité de le faire.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 60.
Chapitre V
Numérisation du secteur du logement
Article 61
(Non modifié)
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est habilité à prendre par voie d’ordonnance, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi pour :
1° Définir un régime d’agrément des prestataires qui assistent les propriétaires et les locataires dans l’établissement du contrat de location à l’aide d’outils numériques permettant à la fois d’établir des contrats de location conformes à la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 et d’assurer la transmission automatique des données relatives à ces contrats prévue au 2° du présent I ;
2° Améliorer la connaissance des données relatives aux contrats de location relevant de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 précitée en :
a) Déterminant les obligations et modalités de transmission à l’État et à l’association nationale mentionnée à l’article L. 366-1 du code de la construction et de l’habitation des données relatives à ces contrats, y compris ceux en cours d’exécution à la date d’entrée en vigueur de l’ordonnance, en prévoyant, le cas échéant, des règles spécifiques pour les contrats donnant droit à des avantages fiscaux liés à l’investissement locatif ;
b) Prévoyant les sanctions applicables en cas de non-respect des règles adoptées sur le fondement du a ;
c) Déterminant les modalités de conservation et d’utilisation de ces données par l’État et l’association mentionnée au même a ;
d) Déterminant les conditions de la mise à disposition du public des résultats des traitements effectués sur ces données.
II. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de l’ordonnance prévue au I. – (Adopté.)
Article 61 bis
I. – Le quinzième alinéa de l’article 3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ces extraits du règlement de copropriété sont communiqués par voie dématérialisée, sauf objection explicite d’une des parties au contrat. »
II. – Après le sixième alinéa de l’article 3-3 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le dossier de diagnostic technique est communiqué au locataire par voie dématérialisée, sauf objection explicite d’une des parties au contrat. »
M. le président. L’amendement n° 1141, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Alinéas 1 et 3
Après le mot :
sauf
rédiger ainsi la fin de ces alinéas :
opposition explicite de l’une des parties au contrat. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 61 bis, modifié.
(L’article 61 bis est adopté.)
Chapitre VI
Simplifier le déploiement des réseaux de communications électroniques à très haute capacité
Article 62
(Non modifié)
I. – Le B du II de l’article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « un » ;
1° bis Au même premier alinéa, sont ajoutés les mots : « , sauf accord du maire ou du président de l’intercommunalité sur un délai plus court » ;
2° Au deuxième alinéa, le mot : « deux » est remplacé par le mot : « un ».
II. – Le I est applicable aux dossiers d’information transmis à compter de la publication de la présente loi.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteur, nous allons entamer l’examen des articles concernant la lettre N du titre de ce projet de loi. À l’instar de certains de mes collègues, je ne peux que regretter que ce chapitre apparaisse comme assez pauvre dans ce contexte. Néanmoins, je voudrais insister sur le grand intérêt de ces mesures, qui sont censées permettre, à la fois, une simplification indispensable et une accélération nécessaire. Je veux croire que ce texte y participera. J’y reviendrai, si vous le voulez bien, au cours de nos débats.
Pour l’heure, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, je tiens à vous dire que le Gouvernement a aussi sa carte à jouer pour accélérer certaines procédures. Vous y avez répondu en partie, et je m’en félicite, avec la publication récente de la circulaire qui permettra le recensement des sites de téléphonie mobile, à laquelle vous avez associé les collectivités. Il reste malgré tout quelques compléments à fournir.
A contrario, je tiens à exprimer mon inquiétude et à vous interpeller sur la suspension du guichet du plan France très haut débit. Cette décision inquiète les collectivités, et, reconnaissez-le, ne constitue pas un bon signal pour l’avenir. Les élus, comme nos concitoyens, ont besoin de visibilité et de prévisibilité. Nul doute que nos débats permettront d’apporter des réponses utiles.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Je voudrais juste souligner un certain nombre de points, après vous avoir remercié, monsieur Chaize, d’avoir travaillé avec nous sur ces sujets depuis de longs mois maintenant. Je salue également la qualité des travaux de la commission des affaires économiques, qui n’a eu de cesse d’enrichir le texte pour que, aujourd’hui, le N du titre de ce projet de loi soit majuscule.
Je voudrais insister, ensuite, sur l’engagement très ambitieux du Gouvernement en faveur du numérique. Celui-ci n’est pas un luxe ; c’est un droit pour tous. Nous avons adopté des dispositions très fortes en ce sens, qu’il s’agisse de l’internet à haut débit et très haut débit ou de la téléphonie mobile : concernant cette dernière, un accord essentiel a été conclu avec les quatre opérateurs, il y a maintenant six mois.
Aux termes de cet accord, les opérateurs investiront 3 milliards d’euros d’argent nouveau dans les zones où, jusqu’à présent, ils ne s’engageaient pas parce que ce n’était pas suffisamment rentable. Pour vous donner un ordre d’idée, depuis janvier dernier, plus de 2 000 communes ont basculé des anciennes générations de téléphonie mobile – 2G et 3G – à la 4G. Nous avons d’ores et déjà publié un premier arrêté : 485 communes, correspondant aux anciennes zones blanches, doivent enfin être couvertes et le seront toutes dans un délai de douze à vingt-quatre mois.
Monsieur le rapporteur pour avis, la circulaire que vous évoquez a pour objet d’identifier tous les nouveaux sites qui seront couverts dans les prochaines années. Chaque opérateur devra couvrir 5 000 nouveaux sites ; un certain nombre d’entre eux seront mutualisés. Voilà les engagements que l’État et les opérateurs ont pris.
Le troisième pilier de notre stratégie numérique et mobile est la simplification du déploiement sur le terrain. Nous avons déjà abordé ce sujet dans le cadre du débat sur le rôle des architectes des Bâtiments de France ; n’y revenons donc pas. Ce chapitre du projet de loi comporte d’autres dispositions qui permettront d’accélérer ce déploiement.
Enfin, monsieur le rapporteur pour avis, je veux répondre en quelques mots à votre interpellation au sujet de la fermeture supposée du guichet France Mobile. De fait, ce n’est absolument pas une fermeture, mais simplement une suspension, le temps qu’un nouveau dispositif, l’appel à manifestation des engagements locaux, ou AMEL, dont on aura l’occasion de reparler, fasse l’objet de retours de l’ensemble des collectivités.
Cela signifie que nous interrogeons les collectivités et les porteurs de projets afin de déterminer s’ils souhaitent que des financements privés viennent compléter certains projets, ce qui bénéficierait grandement aux citoyens, mais aussi aux collectivités, qui financent ces projets en premier lieu, et à l’État, qui y prend également une part. Ce guichet n’est donc que suspendu le temps que soit finalisé le dispositif AMEL.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 242 est présenté par Mme Cukierman, M. Gay, Mme Gréaume et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
L’amendement n° 1004 rectifié est présenté par MM. Labbé et Dantec, Mme N. Delattre, MM. Guérini et Guillaume et Mme Laborde.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Fabien Gay, pour présenter l’amendement n° 242.
M. Fabien Gay. L’article 62 supprime le délai qui s’impose entre le dépôt du dossier d’information au maire, ou DIM, et celui de l’autorisation d’urbanisme. Il réduit en outre à un mois le délai de dépôt du DIM avant travaux pour les personnes exploitantes entreprenant des modifications substantielles de leur installation radioélectrique existante.
Dans le cas d’une nouvelle installation, les services gestionnaires des mairies devront ainsi instruire les demandes d’autorisation d’urbanisme en même temps que les dossiers d’information relatifs au champ électromagnétique. Une telle situation prévalait avant la loi du 9 février 2015 relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques, ou loi Abeille.
Cette réduction de délai vise à faciliter l’objectif national de déploiement des réseaux mobiles à très haut débit sur l’ensemble du territoire national d’ici à 2022. Selon l’étude d’impact, réduire les délais permettrait en effet aux opérateurs de gagner un temps précieux dans leurs calendriers de déploiement des antennes de téléphonie mobile.
Si l’objectif en lui-même semble désirable – la France est en retard sur ses voisins européens dans le domaine du très haut débit –, nous ne pensons pas en revanche que le développement du très haut débit doive se faire au détriment de la concertation collective et locale. En effet, celle-ci permet, non seulement l’acceptation de ce développement par un plus grand nombre d’acteurs sociaux, mais aussi un développement juste et cohérent pour l’ensemble des populations et à travers l’ensemble des territoires.
Cet article dépossède le maire de son pouvoir de négociation et de concertation dans ce domaine, ce que nous ne souhaitons pas.
De plus, un très grand nombre d’études ont démontré la nocivité, réelle ou potentielle, des ondes électromagnétiques. Si le caractère cancérigène des ondes n’a pas encore été démontré scientifiquement, les médecins recommandent néanmoins de faire attention et, notamment, d’éloigner les ondes et les éléments radioélectriques des enfants. Ainsi, réduire les délais administratifs, c’est faciliter la vitesse de déploiement sur tout le territoire du très haut débit, mais c’est aussi, potentiellement, impacter négativement la santé publique.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous proposons de supprimer cet article.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour présenter l’amendement n° 1004 rectifié.
M. Ronan Dantec. Il y a quelques jours, alors que – j’en frémis encore – nous étions sur le point de rouvrir le débat sur l’éolien, notre collègue Daniel Gremillet était intervenu dans la discussion d’une excellente manière. Il nous avait exhortés à nous souvenir de la longueur des débats qui avaient été nécessaires pour que nous aboutissions à un consensus : il ne faudrait pas, avait-il mis en garde, que nous rouvrions de tels débats en permanence, à chaque nouveau texte !
Or c’est exactement ce que nous sommes en train de faire. La loi Abeille avait nécessité bien du travail pour aboutir à des compromis, parmi lesquels ce délai de deux mois. Deux mois, ce n’est pas énorme : imaginez seulement que le mois d’août soit l’un d’entre eux !
Si l’on demande au maire d’organiser la concertation en un mois seulement, il y aura des citoyens qui auront le sentiment qu’on leur impose quelque chose sans en avoir discuté. On est donc sûr de multiplier, encore une fois, les oppositions, ce qui irait plutôt à l’encontre de l’objectif affiché de cette mesure, à savoir l’accélération du déploiement du réseau.
C’est d’autant plus vrai quant au calendrier : si les opérateurs savent que le délai est de deux mois, ils n’attendent pas de recevoir l’accord pour une première installation avant d’entamer la discussion sur une autre ; ils séquencent le tout de la même manière que le délai soit d’un mois ou de deux.
Il est donc à mes yeux extrêmement dangereux de revenir sur l’équilibre qui avait été trouvé. Cela suscitera plus d’oppositions et ira contre l’intérêt des opérateurs et du déploiement. C’est pourquoi, mes chers collègues, nous vous proposons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission considère que la rédaction de l’article 62 issue des débats en séance publique à l’Assemblée nationale ménage un équilibre tout à fait satisfaisant entre, d’une part, la préservation de l’information et de la consultation des maires et, d’autre part, le déploiement plus rapide des infrastructures numériques.
Les auteurs de ces amendements proposent d’en rester au droit en vigueur, tant pour les implantations nouvelles que pour les modifications substantielles des infrastructures existantes. Toutefois, le droit en vigueur ne permet pas, de fait, d’accélérer les déploiements, accélération qui constitue tout de même une forte attente de nos concitoyens et des élus locaux.
La commission a donc émis un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Son avis sera lui aussi défavorable, et ce pour les mêmes raisons.
J’ajouterai simplement que nous avons discuté de ces nouveaux délais avec les associations d’élus locaux. Cette mesure est issue des demandes de ces associations, qui considèrent effectivement que le délai de deux mois est parfois trop long.
Je veux aussi insister sur le fonctionnement actuel du délai. Quand un porteur de projet dépose ce fameux DIM, rien ne peut plus se passer pendant un délai de deux mois. Il ne peut pas commencer les travaux. Ce texte prévoit quant à lui, non seulement de réduire le délai à un mois, mais encore de permettre aux élus locaux, qui sont les maîtres d’ouvrage, et aux opérateurs de commencer les travaux d’emblée s’ils en décident ainsi. Cela aussi représente pour nous une avancée essentielle.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 242 et 1004 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 608, présenté par Mmes M. Filleul et Guillemot, MM. Iacovelli, Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Nous avons la volonté d’accélérer et de faciliter l’aménagement numérique de notre République, qui est indispensable.
Néanmoins, il ne faut pas que cela se fasse aux dépens des prérogatives que détient le maire, en particulier dans le domaine de l’urbanisme, ni encore aux dépens de la nécessaire concertation.
C’est pourquoi je propose, par cet amendement, une autre solution que celle qui a été évoquée précédemment : il s’agit de supprimer l’alinéa 2 de cet article, et donc de conserver pour la concertation le délai de deux mois.
Cela me semble particulièrement nécessaire au vu de la défiance qu’éprouvent actuellement nos concitoyens envers les ondes électromagnétiques. Le délai de deux mois que nous proposons leur permettra de rencontrer les opérateurs et d’approfondir la concertation.
En revanche, notre solution est modérée, puisqu’elle permet de s’adapter avec souplesse aux situations diverses : le maire peut toujours renoncer à ce délai s’il juge que la concertation n’est pas nécessaire.
M. le président. L’amendement n° 380 rectifié, présenté par M. J.M. Boyer, Mme Bonfanti-Dossat, M. Danesi, Mme Deromedi, M. Duplomb, Mme Garriaud-Maylam et MM. Lefèvre, Perrin, Poniatowski, Priou, Raison et Rapin, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
1° Le premier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation, pour les installations radioélectriques situées dans les zones relevant du dispositif de couverture ciblée arrêtées par le ministre en charge des communications électroniques, le dossier d’information est déposé au plus tard au moment du dépôt de la demande d’autorisation d’urbanisme ou de la déclaration préalable. » ;
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Mme Filleul a développé à l’instant l’argumentaire qui aurait été le mien sur cet amendement : j’estime donc qu’il est défendu.
M. le président. L’amendement n° 483, présenté par M. Duran, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements restant en discussion ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. L’objet de ces amendements est sensiblement similaire à celui des amendements de suppression qui ont été rejetés à l’instant. Or la commission a convenu que le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale préserve un équilibre satisfaisant entre, d’une part, l’information et la consultation des maires et, d’autre part, le déploiement plus rapide des infrastructures numériques. Dès lors, quelles que soient les propositions qui sont faites, son avis ne peut être que défavorable.
L’amendement n° 608 vise à rétablir un délai de deux mois, sauf accord du maire. La rédaction actuelle de l’article 62 paraît préférable en l’état.
Quant à l’amendement n° 380 rectifié, il vise à en rester au droit en vigueur, sauf en ce qui concerne le dispositif de couverture ciblée. Là encore, nous préférons la rédaction actuelle de l’article 62.
L’avis de la commission sur ces deux amendements est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Il est lui aussi défavorable, pour les raisons développées par Mme le rapporteur et les arguments que j’ai invoqués.
M. le président. Je mets aux voix l’article 62.
(L’article 62 est adopté.)
Article additionnel après l’article 62
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° 383 rectifié est présenté par MM. J.M. Boyer, Brisson et Danesi, Mme Deromedi, MM. Duplomb, Gremillet, Houpert, Laménie, Lefèvre, Perrin, Pierre, Raison et Sido, Mmes Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam et MM. Husson, Poniatowski, Priou et Rapin.
L’amendement n° 485 est présenté par M. Duran.
L’amendement n° 860 est présenté par M. Marchand, Mme Rauscent et les membres du groupe La République En Marche.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 62
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le II de l’article L. 34-9-1 du code des postes et communications électroniques est ainsi modifié :
1° Le C est abrogé ;
2° Au D, les références : « aux B et C » sont remplacées par la référence : « au B ».
La parole est à M. Antoine Lefèvre, pour présenter l’amendement n° 383 rectifié.
M. Antoine Lefèvre. Le présent amendement vise à privilégier la réalité du contrôle de champs électromagnétiques par une mesure a posteriori, qui s’avère plus fiable que la simulation a priori, par définition théorique, qui est délivrée au maire à sa demande avant toute installation radioélectrique.
Un dossier d’information, prévu au B de l’article L. 34–9–1 du code des postes et communications électroniques, doit être remis au maire avant toute installation radioélectrique par les opérateurs de communications électroniques. Ce document peut comporter, à la demande du maire, une simulation de l’exposition aux champs électromagnétiques résultant du fonctionnement de l’installation. La demande très fréquente de simulation théorique de l’exposition aux champs électromagnétiques induit chez les opérateurs des contraintes d’ingénierie qui ne permettent pas l’exploitation pleine et entière des technologies à leur disposition. Concrètement, les opérateurs s’interdisent de modéliser des puissances d’émission supérieure à 6 volts par mètre – valeur d’attention recommandée par l’ANFR, l’Agence nationale des fréquences – qui permettraient pourtant d’améliorer significativement la qualité de couverture mobile d’un territoire situé en zone blanche.
Au-delà de cette disposition, l’ANFR veille, en toute hypothèse, au respect des limites réglementaires. Des mesures de contrôle peuvent également être effectuées sur son initiative ou à la demande de citoyens. Chaque citoyen peut de surcroît demander auprès de l’ANFR que des mesures soient effectuées chez lui, gratuitement.
M. le président. L’amendement n° 485 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Didier Rambaud, pour présenter l’amendement n° 860.
M. Didier Rambaud. J’aimerais tout d’abord rappeler combien il est important que la généralisation d’une couverture mobile de qualité pour l’ensemble des Français et des territoires soit une priorité. En cela, l’accord sur la couverture mobile du 14 janvier dernier est de bon augure ; je tenais à saluer votre engagement personnel sur ce dossier, monsieur le secrétaire d’État.
Dans la perspective de la mise en œuvre de cet accord, les opérateurs devront concentrer l’ensemble des moyens humains et des ressources techniques dont ils disposent de manière à réussir ce défi.
Toutefois, les opérateurs font face à des recours quasi systématiques à la demande préalable de simulation théorique de l’exposition aux ondes électromagnétiques. Cela les empêche d’exploiter pleinement les technologies dont ils disposent.
D’une part, ces simulations sont moins fiables que les contrôles a posteriori ; d’autre part, elles nécessitent la mobilisation de ressources et de budgets importants chez les opérateurs, au détriment de la nécessaire accélération de la couverture mobile attendue, à raison, par tous les Français et tous les territoires.
Il paraît donc opportun, mes chers collègues, de privilégier la réalité du contrôle des champs électromagnétiques par une mesure a posteriori, qui s’avère plus fiable que la simulation a priori délivrée au maire, à sa demande, avant toute installation radioélectrique, simulation qui, par définition, reste théorique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Ces amendements visent à supprimer la possibilité pour le maire de demander une simulation préalablement à l’implantation d’une installation radioélectrique.
Certes, cette simulation est théorique, par définition, mais elle permet tout de même au maire de disposer d’un document plus précis que le DIM s’il perçoit des réticences de sa population. En outre, elle n’est en rien obligatoire.
Elle constitue donc un outil mis à la disposition du maire afin de lui permettre de s’assurer de l’adhésion de la population vivant sur le territoire de sa commune au projet d’implantation d’une installation radioélectrique.
Enfin, c’est une disposition introduite par la loi Abeille, qui ne date que de 2015. Nous modifions déjà le délai inscrit dans cette loi pour transmettre le DIM. Il me semble que le recul nous manque pour modifier plus avant les outils dont cette loi a doté les maires.
En conséquence, je vous saurais gré, mes chers collègues, de bien vouloir retirer ces amendements, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Je suis convaincu que l’adoption de tels amendements serait contre-productive.
On pourrait en effet se dire que la possibilité de demander ces plans d’exposition rajoute potentiellement des délais ou, à tout le moins, complexifie les procédures. Mme le rapporteur a toutefois très justement rappelé que cette demande est optionnelle : c’est le maire qui peut l’activer. Il le fait dans le cas où un projet pourrait être compliqué parce que lui-même ou la population de sa commune ne sont pas convaincus. Il faut alors pouvoir fournir le plus d’informations possible afin de convaincre ceux qui pourraient être réticents au projet. Dès lors, ôter au maire cette possibilité ferait in fine encourir des délais supérieurs.
C’est pourquoi, messieurs les sénateurs, le Gouvernement souhaite le retrait de vos amendements, faute de quoi son avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Rambaud, l’amendement n° 860 est-il maintenu ?
M. Didier Rambaud. Non, monsieur le président : j’ai presque été convaincu par les arguments de Mme le rapporteur et de M. le secrétaire d’État. Par conséquent, je le retire.
M. le président. L’amendement n° 860 est retiré.
Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 383 rectifié est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 383 rectifié est retiré.
Article 62 bis A
(Non modifié)
Après le deuxième alinéa du B du II de l’article L. 34-9-1 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Jusqu’au 31 décembre 2022, par dérogation au régime prévu aux deux premiers alinéas du présent B, les travaux ayant pour objectif l’installation de la quatrième génération du réseau de téléphonie mobile sur un équipement existant font l’objet d’une information préalable du maire, dès lors que le support ne fait pas l’objet d’une extension ou d’une rehausse substantielle. » – (Adopté.)
Article 62 bis
(Non modifié)
Après l’article L. 2122-1-3 du code général de la propriété des personnes publiques, il est inséré un article L. 2122-1-3-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 2122-1-3-1. – L’article L. 2122-1-1 n’est pas applicable lorsque le titre d’occupation est destiné à l’installation et à l’exploitation d’un réseau de communications électroniques ouvert au public. »
M. le président. L’amendement n° 412, présenté par M. Bascher, n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 62 bis.
(L’article 62 bis est adopté.)
Article 62 ter
À titre expérimental, par dérogation à l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme et jusqu’au 31 décembre 2022, les décisions d’urbanisme autorisant ou ne s’opposant pas à l’implantation d’antennes de radiotéléphonie mobile avec leurs systèmes d’accroche et leurs locaux et installations techniques ne peuvent pas être retirées.
Cette disposition est applicable aux décisions d’urbanisme prises à compter d’un mois après la publication de la présente loi.
Au plus tard le 30 juin 2022, le Gouvernement établit un bilan de cette expérimentation.
M. le président. L’amendement n° 407 rectifié ter, présenté par MM. Decool, Guerriau et Lagourgue, Mme Mélot, MM. Chasseing, Wattebled, A. Marc et Lefèvre, Mme Garriaud-Maylam et MM. Moga, Revet, Fouché et Bignon, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. Cet amendement vise à rétablir le droit de retrait des maires pour les décisions de non-opposition aux déclarations préalables et les décisions de délivrance de permis de construire. Ce droit avait en effet été supprimé par la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale en ce qui concerne les constructions destinées aux communications électroniques.
L’article L. 424–5 du code de l’urbanisme, modifié par l’article 134 de la loi ALUR de 2014, dispose que le maire peut retirer la décision d’autorisation d’urbanisme en cas d’illégalité dans les trois mois suivant sa délivrance.
L’exposition du public aux champs électromagnétiques suscite des questions de la part de nos concitoyens ; de nombreux maires sont sollicités sur ce sujet. Or les pouvoirs du maire en matière d’implantation d’antennes relais sont déjà très limités et se réduisent essentiellement à ses pouvoirs en matière d’urbanisme ; ils s’exercent le plus souvent à l’occasion de la demande de déclaration préalable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Je vous rappelle, mon cher collègue, qu’il ne s’agit à ce stade que d’une expérimentation. Le caractère expérimental de cet article est d’ailleurs le bienvenu, car cette disposition n’est pas anodine. Il conviendra, bien sûr, de dresser le bilan de cette expérimentation avant d’envisager toute pérennisation. La commission a jugé que c’était un garde-fou nécessaire et susceptible d’éviter un certain nombre d’abus.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; sinon, l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. L’expérimentation court jusqu’en 2022 : un tel laps de temps est en effet strictement nécessaire pour lancer le plan de couverture numérique et mobile que j’évoquais dans mes propos liminaires sur cet article.
Le Gouvernement demande donc lui aussi le retrait de cet amendement, faute de quoi son avis sera défavorable.
M. le président. Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 407 rectifié ter est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Non, monsieur le président. J’ai été convaincu par l’argument de Mme le rapporteur : laissons donc courir cette expérimentation jusqu’en 2022 ! En outre, j’ai envie d’être agréable tant à Mme le rapporteur qu’à M. le secrétaire d’État. Par conséquent, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 407 rectifié ter est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 382 rectifié, présenté par MM. J.M. Boyer, Brisson et Danesi, Mme Deromedi, MM. Duplomb, Genest, Gremillet, Houpert et Laménie, Mme Lamure, MM. Lefèvre, Mouiller, Perrin, Pierre, Raison et Sido, Mmes Bonfanti-Dossat et Garriaud-Maylam et MM. Poniatowski, Priou et Rapin, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
1° Supprimer les mots :
À titre expérimental,
2° Après l’année :
2022
insérer le mot :
inclus
II. – Alinéa 3
Remplacer le mot :
juin
par le mot :
septembre
La parole est à M. Antoine Lefèvre.
M. Antoine Lefèvre. L’amendement est défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 861, présenté par M. Marchand, Mme Rauscent et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
Alinéa 1
1° Supprimer les mots :
À titre expérimental,
2° Après l’année :
2022
insérer le mot :
inclus
La parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. L’amendement est également défendu, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 486, présenté par M. Duran, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos 382 rectifié et 861 ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. L’article 62 ter a lui aussi un caractère expérimental. Cela ne fragilise en rien les déploiements qui seront effectués sur son fondement. Accélérer les déploiements dans un cadre équilibré, voilà la ligne qui a été retenue par la commission des affaires économiques.
Je vous demande donc, mes chers collègues, de bien vouloir retirer ces amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Monsieur Lefèvre, l’amendement n° 382 rectifié est-il maintenu ?
M. Antoine Lefèvre. Les désirs de Mme le rapporteur sont pour moi des ordres : je retire donc mon amendement, monsieur le président. (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° 382 rectifié est retiré.
Monsieur Rambaud, l’amendement n° 861 est-il maintenu ?
M. Didier Rambaud. M. le secrétaire d’État ayant confirmé le désir de Mme le rapporteur, je retire moi aussi mon amendement, monsieur le président. (Nouveaux sourires.)
M. le président. L’amendement n° 861 est retiré.
L’amendement n° 413 rectifié bis, présenté par M. Bascher, n’est pas soutenu.
Je mets aux voix l’article 62 ter.
(L’article 62 ter est adopté.)
Article 62 quater (nouveau)
L’article L. 122-3 du code de l’urbanisme est ainsi modifié :
1° Après le mot : « naturels », sont insérés les mots : « , à l’établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public » ;
2° Après le mot : « impérative », la fin de cet article est ainsi rédigée : « ou, dans le cas des communications électroniques, est nécessaire pour améliorer la couverture du territoire. » – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 62 quater
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 484 est présenté par M. Duran.
L’amendement n° 862 est présenté par M. Marchand, Mme Rauscent et les membres du groupe La République En Marche.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’article 62 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 122-11 du code de l’urbanisme est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Les réseaux de communications électroniques de nature à améliorer la couverture numérique. »
L’amendement n° 484 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Didier Rambaud, pour présenter l’amendement n° 862.
M. Didier Rambaud. Cet amendement s’inscrit dans la philosophie du présent projet de loi : il s’agit d’offrir à tous les Français un service numérique à la hauteur de leurs besoins.
Certains territoires, notamment les zones de montagne, doivent bénéficier d’une attention toute particulière, que ce soit pour inciter nos jeunes à y rester ou pour permettre aux entreprises de s’y développer en bénéficiant de tous les avantages qu’apporte le numérique.
Pour ce faire, nous souhaitons faciliter la possibilité d’implanter des sites mobiles dans ces zones rurales de montagne.
À l’heure où notre réponse est parfois rendue excessivement difficile par le code de l’urbanisme, nous voulons simplifier les procédures pour assurer davantage de souplesse aux opérateurs.
Cette souplesse se fera sans risque trop important, car nos élus seront la clef de cette installation. Le PLU pourra en effet préciser les conditions d’insertion des pylônes pour leur parfaite intégration dans la zone.
Nous sommes, bien évidemment, attachés à notre patrimoine naturel, à sa valorisation et à sa conservation. Mais comme on peut détruire un pylône aussi vite, voire plus vite, qu’on ne le construit, nous devons mettre en place toutes les mesures permettant de faciliter le déploiement numérique et ainsi d’éviter la dévitalisation de ces territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Votre amendement, mon cher collègue, est satisfait par l’article 62 quater, inséré dans le texte par la commission. Cet article permet de déroger à l’obligation de construire en continuité de l’urbanisation. Je vous invite donc à retirer votre amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. J’estime également que cet amendement est satisfait. Nous avons eu ce débat ces dernières semaines, durant toute la préparation de l’examen de ce texte. Je fais exactement la même analyse de ce point que Mme le rapporteur : votre demande, monsieur le sénateur, est désormais satisfaite, puisque l’article qui a été ajouté par la commission rend notamment possibles des dérogations dans les zones de montagne au titre de l’article L. 122–3 du code de l’urbanisme.
Le Gouvernement souhaite donc lui aussi le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Rambaud, l’amendement n° 862 est-il maintenu ?
M. Didier Rambaud. Il n’y a pas photo : je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 862 est retiré.
Article 62 quinquies (nouveau)
La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l’urbanisme est ainsi modifiée :
1° Le deuxième alinéa de l’article L. 121-17 est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « énergie », sont insérés les mots : « et à la réalisation des obligations de service public mentionnées à l’article L. 35 du code des postes et des communications électroniques » ;
b) À la deuxième phrase, le mot : « électriques » est supprimé ;
c) À la troisième phrase, les mots : « du même code » sont remplacés par les mots : « du code de l’énergie » ;
2° L’article L. 121-25 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « définies à l’article L. 121-4 du code l’énergie » sont remplacés par les mots : « et d’intérêt général définies aux articles L. 121-4 du code de l’énergie et L. 35 du code des postes et des communications électroniques » ;
b) Au deuxième alinéa, après le mot : « électriques », sont insérés les mots : « et de communications électroniques ». – (Adopté.)
Article 63
I. – L’article L. 48 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° A Au premier alinéa, après la deuxième occurrence du mot : « réseaux », sont insérés les mots : « déployés ou projetés » ;
1° Le c est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « bénéficiant de servitudes ou lié par une convention de passage définie avec le propriétaire » sont supprimés ;
b) À la fin de la seconde phrase, les mots : « bénéficiant de la servitude ou visée par la convention de passage en suivant au mieux le cheminement de cette servitude ou de ce passage » sont remplacés par les mots : « déjà existante, en suivant au mieux son cheminement » ;
2° À la première phrase du cinquième alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « un ».
II. – (Non modifié) Le 2° du I s’applique aux demandes d’autorisation pour lesquelles l’information prévue au cinquième alinéa de l’article L. 48 du code des postes et des communications électroniques est transmise à compter de la publication de la présente loi.
III (nouveau). – L’article L. 51 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° La première phrase du premier alinéa du I est ainsi modifiée :
a) Après le mot : « représentants », sont insérés les mots : «, que le réseau soit implanté sur la propriété ou non, » ;
b) Après le mot : « afin », sont insérés les mots : « de permettre le déploiement de réseaux et » ;
2° Le IV est ainsi modifié :
a) À la première phrase, après le mot : « est », sont insérés les mots : « projeté ou » ;
b) À la deuxième phrase, après le mot : « pas », sont insérés les mots : « l’établissement d’un réseau d’initiative publique ou » et les mots : « du réseau d’initiative public » sont remplacés par les mots : « d’un réseau d’initiative publique ». – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 63
M. le président. L’amendement n° 636 rectifié, présenté par M. P. Joly, Mme M. Filleul, M. Iacovelli, Mme Guillemot, MM. Daunis et Kanner, Mme Artigalas, MM. Cabanel et M. Bourquin, Mme Conconne, MM. Courteau, Duran, Montaugé, Tissot, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Devinaz, Mmes Grelet-Certenais, Harribey et Lienemann, MM. Jomier et Kerrouche, Mmes Lubin, Monier et S. Robert, MM. Roger et Sueur, Mme Taillé-Polian, M. Temal, Mme Tocqueville, MM. Tourenne, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 63
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le neuvième alinéa de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« …) Les conditions d’accès aux réseaux dans les zones définies par le III de l’article 52, les articles 52-1 et 52-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, par les articles 119, 119-1 et 119-2 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie et par l’article L. 34-8-5 du présent code. À ce titre, lorsque le réseau d’un opérateur ne permet pas d’obtenir un signal suffisant, alors même que le réseau d’un autre opérateur permet de l’obtenir, un accès au réseau doit être rendu obligatoire pour tous les usagers via l’itinérance ; ».
La parole est à M. Patrice Joly.
M. Patrice Joly. Cet amendement vise à apporter une réponse à la fracture numérique qu’on constate dans beaucoup de territoires, en particulier ruraux.
Nous entendons, à travers lui, généraliser l’itinérance en téléphonie mobile : l’ensemble des abonnés d’un opérateur pourra bénéficier des réseaux d’autres opérateurs dans les communes, notamment rurales, qui ne sont couvertes que par un seul opérateur. Je pense en particulier au département où je suis élu, la Nièvre, où il faudrait quatre ou cinq abonnements pour pouvoir disposer de l’ensemble du potentiel de couverture téléphonique.
D’ailleurs, il se trouve que des professionnels – notamment des médecins et des vétérinaires – ont souscrit des abonnements de téléphonie mobile en Belgique afin de bénéficier d’ores et déjà de l’itinérance : ainsi, ils peuvent, avec un seul abonnement, passer du réseau d’Orange à celui de SFR ou de Free.
La proposition que je vous fais permettrait d’améliorer de manière très sensible la couverture en téléphonie mobile sans coût supplémentaire ni pour les opérateurs privés ni pour les finances publiques.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. M. le secrétaire d’État a rappelé, il y a quelques instants, qu’un programme visant à couvrir les zones aujourd’hui mal couvertes est engagé sur la base de l’accord conclu en janvier dernier entre les opérateurs, le Gouvernement et l’ARCEP, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes. Ce programme prévoit notamment la couverture de 5 000 nouvelles zones, avec une mutualisation active sur au moins 2 000 nouveaux sites.
À nos yeux, imposer le recours à l’itinérance, quelle que soit la situation, par des dispositions législatives remettrait en cause cet accord, alors même que tous les opérateurs se sont engagés à investir.
L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Monsieur le sénateur, la situation est en effet un peu ubuesque : aujourd’hui, si vous voulez avoir accès à tous les réseaux, il faut souscrire un forfait étranger. En vérité, intuitivement, nous nous demandons tous pourquoi ne pas imposer l’itinérance : cela réglerait le problème !
J’en conviens, mais le fait est que le secteur de la téléphonie mobile est fondé sur l’avantage concurrentiel qu’acquiert chaque opérateur au regard de la qualité du réseau qu’il offre à ses abonnés. Pourquoi choisit-on l’un plutôt que l’autre ? C’est parce qu’il permet de mieux capter le réseau.
Au-delà de l’accord historique que je mentionnais, tous les efforts d’investissement que déploient les opérateurs sont fondés sur l’avantage compétitif qu’ils acquièrent en développant leur réseau.
Dès lors, si l’on dispose que l’investissement consenti par un opérateur jusqu’à présent bénéficie à tous les autres, une sorte de poker menteur s’instaurera entre eux tous, et tous cesseront d’investir. En effet, chacun attendra que l’autre investisse pour pouvoir bénéficier de son réseau, car il coûte toujours beaucoup plus cher d’investir en capital que de payer des frais de locations pour utiliser le réseau des autres.
Je comprends totalement l’idée des auteurs de cet amendement, mais j’estime aussi, très sincèrement, que la conséquence directe de son adoption serait, comme l’a dit Mme le rapporteur, l’arrêt des investissements de la part des opérateurs.
C’est pourquoi l’avis du Gouvernement sur cet amendement est défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Dominique Vérien, pour explication de vote.
Mme Dominique Vérien. L’itinérance est aujourd’hui une solution, en dépit du déploiement de nouveaux pylônes.
Dans mon village, un pylône Free va être construit. J’en suis assez contente, parce que seul SFR y passe aujourd’hui. Cela dit, à trois kilomètres, il n’y a plus ni Free ni SFR, mais seulement Bouygues ; trois kilomètres plus loin, c’est encore un autre opérateur : la situation est vraiment très compliquée !
Certes, monsieur le secrétaire d’État, j’entends votre raisonnement, mais je ne le comprends pas complètement. Il me semble en effet que les opérateurs se refacturent entre eux. Dès lors, si un opérateur, dans le cadre de cette itinérance, constate qu’il doit souvent verser des frais à un autre pour une zone donnée, il trouvera tout à fait un intérêt à aller investir sur ce territoire. Sinon, cela signifie que le maillage est suffisant et que nous aurons tous accès à une couverture téléphonique.
Je suis favorable à cet amendement. Il est très important que l’itinérance puisse se mettre en place. Même si les pylônes sont en train d’être installés, il faudra quelques mois avant que les autres opérateurs ne viennent se greffer sur l’opérateur d’origine et donc – si je suis optimiste – que nous puissions utiliser notre téléphone. Je crains malheureusement que cela ne prenne plutôt quelques années.
M. le président. La parole est à M. Patrice Joly, pour explication de vote.
M. Patrice Joly. Il faut rappeler la situation dans laquelle nous nous trouvons.
Nous avons la possibilité d’améliorer immédiatement, de manière très sensible et, je le souligne, sans coût supplémentaire – pas plus pour les opérateurs que pour les finances publiques – la couverture du territoire national en téléphonie mobile et, ce faisant, d’apporter un service de bien meilleure qualité à nos concitoyens dans des zones où ils se sentent parfois délaissés. Vous savez à quel point cela a une incidence sur la considération qu’ils estiment qu’on leur porte.
De ce point de vue, nous avons aujourd’hui une responsabilité particulière, à la fois en termes de service public, en termes politiques, voire en termes philosophiques. Mes collègues qui représentent des territoires comme le mien prennent, je crois, conscience de la situation et de l’opportunité qui nous est offerte.
L’itinérance, ce n’est pas la mutualisation. Ce qu’annonce le Gouvernement est très bien, mais prendra nécessairement du temps en réalisations techniques, administratives, etc. Il ne faut surtout pas renoncer et il importe surtout d’éviter ce que vient d’évoquer M. le secrétaire d’État, à savoir un renoncement à l’investissement. L’État a des capacités de négociation dans le cadre de l’attribution des fréquences.
Nous avons l’occasion aujourd’hui d’adresser un signe significatif à une partie importante de la population. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous invite à adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. J’ai l’impression d’être revenu quelques mois en arrière.
J’ai été l’un de ceux qui défendaient un amendement de ce type, lequel a d’ailleurs été adopté, ce que j’ai ensuite regretté. En effet, l’itinérance a eu pour conséquence qu’aucun opérateur ne prend plus la décision d’investir !
Il vaut donc mieux aller dans le sens proposé par le Gouvernement et la commission. Je m’y suis résolu, après avoir discuté à la fois avec des techniciens, l’ARCEP et des opérateurs, à l’époque où la région Grand Est connaissait un problème important en matière de très haut débit fixe : j’ai été convaincu qu’il ne fallait pas être partisan de l’itinérance.
Nous sommes tous en attente à la fois du très haut débit fixe et du très haut débit mobile. Le très haut débit fixe connaît une avancée significative, notamment avec des modèles comme celui du Grand Est : un système concessif a été mis en place, avec plus de 60 % d’investissements privés, ce qui libère de l’investissement public, réalisé à parité par l’État et les collectivités locales, et permet d’avancer sur le très haut débit mobile.
On imagine que l’itinérance pourrait être une solution. Eh bien, non ! Pour la partie mobile, le programme doit être accompli par les opérateurs, c’est ce qui compte. D’ailleurs, en quelques années maintenant, on doit régler le problème, le contraire serait inacceptable. Qu’en fin de mandature le problème du fixe et du mobile soit pratiquement réglé dans une majorité de territoires doit être un enjeu.
Nous avançons, mais l’adoption de cet amendement serait contre-productive.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. René-Paul Savary a bien résumé le débat que nous avons eu lors de la loi Montagne : j’ai été mis en minorité, alors que j’appelais à ne pas voter l’itinérance qui a eu pour effet immédiat un arrêt de tous les investissements des opérateurs de téléphonie mobile.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Il faut vraiment avoir cela en tête.
Si tout le territoire était couvert par au moins un opérateur, on pourrait à la limite s’interroger. Ce n’est pas le cas pour nos communes, ne l’oublions pas. En outre, cela ne correspond pas aux ambitions fixées dans le cadre du plan, à savoir couvrir les voies de communication. Il s’agit également d’un enjeu fort pour les usages de demain, notamment pour le véhicule connecté.
L’adoption de cet amendement serait donc un très mauvais signal. La téléphonie mobile est un secteur concurrentiel et les règles de la concurrence doivent s’appliquer. À ce titre, je ne suis même pas persuadé que cet amendement aille très loin, si jamais il était voté.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Je souhaite revenir sur ce que j’ai dit et répondre à Mme la sénatrice Dominique Vérien.
Investir des centaines de millions, voire des milliards d’euros – ce sont bien de telles sommes que les opérateurs investissent chaque année – n’a rien à voir avec le fait de payer pendant des années un droit de passage ou un droit d’utilisation des infrastructures des autres.
Pour une entreprise, il est évidemment beaucoup plus profitable de louer une infrastructure développée que d’en être à l’origine avec tous les risques que cela implique.
Monsieur le sénateur Patrice Joly, pendant cette première année, avec d’autres membres du Gouvernement, j’ai passé un temps considérable à chercher à améliorer, en association avec de nombreuses personnalités, en particulier Patrick Chaize, la situation du développement du numérique et du mobile.
Nous avons accompli des choses qui n’avaient jamais été faites avant. Je pense à l’accord du mois de janvier dernier : pour la première fois, des fréquences de téléphonie mobile seront attribuées aux opérateurs sans contrepartie financière – contrairement à ce qui s’est toujours fait et l’argent allait au budget de l’État –, mais à condition que ceux-ci investissent sur le territoire.
C’est massif : cela représente 5 000 nouvelles infrastructures par opérateur, un certain nombre d’entre elles étant mutualisées. D’ici à la fin de l’année 2020, 20 000 communes passeront de la 2G ou 3G à la 4G. Cela signifie une amélioration sur tous les axes de communication, qu’ils soient ferrés ou routiers.
Cet investissement permettra de réaliser en trois ans l’équivalent de ce qui a été accompli dans les quinze dernières années.
Soyez assuré, monsieur le sénateur, que, si votre proposition permettait de résoudre les problèmes, nous aurions tout fait pour aller dans ce sens. Je suis convaincu, à l’instar de M. le rapporteur pour avis, que cela va au contraire tout figer et tout bloquer.
Si, collégialement, nous étions satisfaits de la situation actuelle et si tous les opérateurs avaient investi, nous pourrions retenir votre proposition, quand bien même, comme l’a souligné M. le rapporteur pour avis, elle n’est pas très constitutionnelle, car ce serait bénéfique pour tout le monde.
Or, aujourd’hui, nous le savons tous : il y a encore un manque massif d’investissements sur notre territoire. Il faut donc laisser jouer la libre concurrence, qui a l’avantage de différencier les uns et les autres en matière d’investissement.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Sagesse du Sénat !
Article 63 bis
La seconde phrase du quatrième alinéa de l’article L. 33-6 du code des postes et des communications électroniques est complétée par les mots : « et garantit l’accessibilité des parties communes aux opérateurs pour l’exploitation des lignes mentionnées au premier alinéa, pour le raccordement du point d’accès lorsque celui-ci est situé à l’intérieur des limites de la propriété privée, ainsi que pour la construction et la maintenance du raccordement des utilisateurs finals ». – (Adopté.)
Article 63 ter
(Supprimé)
Article 63 quater
L’article 24-2 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« L’assemblée générale est tenue de désigner l’opérateur de communications électroniques chargé d’assurer la prestation mentionnée au premier alinéa au plus tard douze mois suivant la date de réception d’une première offre, sauf à ce qu’une majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix s’y oppose. » ;
2° (nouveau) Le troisième alinéa est supprimé. – (Adopté.)
Article 63 quinquies (nouveau)
Le code de la construction et de l’habitation est ainsi modifié :
1° L’intitulé du titre III du livre Ier est ainsi rédigé : « Chauffage, communications électroniques, fourniture d’eau et ravalement des immeubles – Lutte contre les termites » ;
2° Après la section 3 du chapitre IV du titre III du livre Ier, est insérée une section 4 ainsi rédigée :
« Section 4 : Information sur l’accès aux réseaux fixe et mobile de communications électroniques
« Art. L. 134-8. – En cas de vente de tout ou partie d’un immeuble bâti, une fiche d’information relative à l’accès aux réseaux fixes et mobiles de communications électroniques est transmise à l’acquéreur dans les conditions et selon les modalités prévues aux articles L. 271-4 à L. 271-6. Cette fiche est issue des offres commerciales localement disponibles complétées par les informations issues des bases de données nationales dont celles des observatoires fixes et mobiles de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, correspondant à l’adresse du bien.
« En cas de location de tout ou partie d’un immeuble bâti, cette fiche est jointe à des fins d’information au contrat de location lors de sa conclusion, sauf s’il s’agit d’un contrat de bail rural ou d’un contrat de location saisonnière.
« S’agissant des informations issues des bases de données nationales, le locataire ne peut se prévaloir à l’encontre du bailleur des informations contenues dans la fiche d’information. » ;
3° L’article L. 271-4 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– après le 9°, il est inséré un 10° ainsi rédigé :
« 10° La fiche d’information relative à l’accès aux réseaux fixes et mobiles de communication électroniques prévue à l’article L. 134-8 du présent code. » ;
– au dernier alinéa, les références : « 4° et 7° » sont remplacées par les références : « 4°, 7° et 10° » ;
b) Le dernier alinéa du II est ainsi modifié :
– après les mots : « performance énergétique », sont insérés les mots : « ou dans la fiche d’information relative à l’accès aux réseaux fixes et mobiles de communications électroniques » ;
– les mots : « qui n’a » sont remplacés par les mots : « qui n’ont » ;
4° Au premier alinéa de l’article L. 271-5, la référence : « et 8° » est remplacée par les références : « , 8° et 10° » ;
5° Au premier alinéa de l’article L. 271-6, la référence : « et 7° » est remplacée par les références : « , 7° et 10° ». – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 63 quinquies
M. le président. L’amendement n° 480 rectifié, présenté par M. Chaize, Mme Morhet-Richaud, MM. Bizet, Vaspart et Mandelli, Mme de Cidrac, M. Daubresse, Mmes Deromedi et Raimond-Pavero, M. B. Fournier, Mmes Thomas et Chain-Larché, M. H. Leroy, Mmes Bories et Chauvin, M. D. Laurent, Mmes Lassarade, F. Gerbaud et Deroche, MM. de Nicolaÿ, Perrin, Raison, Bascher et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, Pellevat, Rapin et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 63 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le 11° de l’article L. 36-7 du code des postes et des communications électroniques est complété par une phrase ainsi rédigée : « Pour les communications électroniques mobiles, ces cartes donnent une image fidèle de la couverture et de la qualité des services proposés aux usagers. »
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Cet amendement vise à imposer une mesure réelle de la couverture mobile proposée à l’ensemble des citoyens sur le territoire par l’ARCEP.
À l’heure actuelle, l’ARCEP effectue des mesures ponctuelles de la qualité réelle de service proposé aux utilisateurs et met à disposition du public une carte des déploiements fibre et une carte de la couverture mobile. Ces cartographies sont construites de façon théorique à partir des informations transmises au régulateur par les opérateurs de communications électroniques.
En outre, un nouvel observatoire couvrant toutes les technologies numériques – fibre, cuivre, câble, réseau hertzien – devrait être mis en place par l’ARCEP d’ici à la fin de l’année 2018, pour permettre à chacun de connaître la qualité de la couverture offerte aux citoyens à l’échelle de l’adresse.
L’objet de cet amendement est donc de prévoir que les données mises à disposition du public par l’ARCEP se fondent sur des mesures réelles. Celles-ci pourraient être réalisées en mobilisant le réseau des facteurs de La Poste, qui rencontrent chaque jour directement plus d’un million de personnes et sillonnent les territoires. Les expérimentations sur le sujet sont d’ailleurs très concluantes.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cette démarche semble particulièrement bienvenue. En tant qu’élus, nous devons être exigeants sur la qualité des cartes de couverture pour que le diagnostic posé soit le bon, que la concurrence soit stimulée par une plus grande transparence sur le marché et qu’ainsi les attentes de nos concitoyens soient satisfaites.
Par conséquent, malgré des réserves sur le dispositif, la commission considère que le sujet est suffisamment important pour l’ensemble de nos concitoyens pour qu’elle s’en remette à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettra un avis défavorable.
Ce n’est pas que je ne partage pas votre analyse, monsieur le sénateur, vous avez mille fois raison : à partir du moment où l’on établit des cartes, il faut que celles-ci soient le plus possible conformes à la réalité. Sur ce sujet, vous connaissez notre attachement ; en témoigne la transparence des observatoires nouveaux que nous sommes en train de lancer.
Pour autant et c’est pour cela que le Gouvernement a pris cette position, cet amendement vise à inscrire dans la loi que l’ARCEP se fonde sur des données dites réelles. Quelles sont-elles ? Vous proposez que l’ensemble de nos postiers aillent réaliser les tests eux-mêmes.
D’autres dispositions ont été mises en place. Je pense à la plateforme France Mobile, que beaucoup d’entre vous connaissent et qui s’appuie sur des données réelles directement remontées par nos citoyens, selon une autre méthodologie. Il existe également les données des opérateurs, mais s’agit-il de données réelles ou non ? Il semble difficile de le définir.
Sur le fond, monsieur le sénateur, vous avez évidemment raison. En revanche, je pense que ce n’est pas du domaine législatif. Bien sûr, l’ARCEP est une autorité indépendante, mais c’est au Gouvernement de faire en sorte que tous nos travaux s’appuient sur les données les plus réelles possible. C’est ce que nous faisons et tentons de faire jour après jour. Reste que cela relève de la responsabilité du Gouvernement, avec les élus locaux, non de la loi.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Aujourd’hui, il existe des applications nouvelles, qui permettent de mesurer les données de l’ensemble des opérateurs. L’une d’entre elles s’appelle OpenBarres : elle a été conçue notamment avec le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, et l’ARCEP.
L’ensemble des élus de mon département en ont été dotés. Ainsi, lors de nos déplacements dans le département, nous pouvons mesurer exactement la puissance des signaux reçus de l’ensemble des opérateurs. Nous savons ainsi précisément à quel endroit le réseau passe ou ne passe pas.
Ce procédé permettra d’avoir des cartes réelles par la mobilisation d’applications.
Pour ma part, j’invite le Sénat à équiper l’ensemble des sénateurs de cette application gratuite…
M. François Bonhomme. Oui !
M. René-Paul Savary. … – je ne suis pas sûr qu’elle le soit encore, peut-être l’a-t-elle été au moment de son expérimentation –, qui permet dans tous les secteurs des départements de connaître exactement la réalité de l’écoute et de comparer ces cartes aux documents publiés par les opérateurs.
J’ai cosigné cet amendement, qui constitue une avancée. Les postiers ont aussi un rôle essentiel à jouer. Comme ils se déplacent partout, à des heures et des jours différents – c’est important –, nous pourrons ainsi avoir une cartographie relativement réaliste.
M. le président. J’espère que cette application est gratuite, sinon, c’était de la publicité sauvage ! (Sourires.)
Monsieur Chaize, l’amendement n° 480 rectifié est-il maintenu ?
M. Patrick Chaize. Si M. le secrétaire d’État donne son engagement de faire en sorte que ces mesures soient mises en place, je suis prêt à retirer cet amendement.
Des outils existent déjà, d’autres se développent et il y en a de plus en plus, mais ce qu’il faut, c’est la volonté de présenter des cartes très proches de la réalité. Il n’y a rien de pire pour les particuliers ou pour les élus que nous sommes que de découvrir sur une carte que notre commune est couverte, alors même que nous savons parfaitement qu’elle ne l’est pas ! C’est d’ailleurs très contre-productif.
Monsieur le secrétaire d’État, il faut mener une action forte en ce sens auprès de l’ARCEP et auprès des acteurs.
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Bien évidemment, je m’engage sur ce point, mais il en est un autre, essentiel lui aussi.
Si nous avons ce débat, c’est bien parce que la qualité de service qui avait été définie n’était pas la bonne ; c’est pourquoi nous l’avons redéfinie.
Par ailleurs, dans tous les programmes de couverture mobile antérieurs, nous avons en quelque sorte donné les clefs du camion aux opérateurs eux-mêmes, puisqu’on leur demandait d’installer les nouveaux poteaux, c’est-à-dire l’infrastructure, là où ils pensaient que c’était le mieux. C’était une erreur, car les opérateurs avaient leur propre vision du déploiement.
La dynamique que nous avons lancée, avec l’accord conclu au mois de janvier dernier, consiste à donner les clefs du camion aux collectivités et à l’État. Ainsi, dans chaque département, des équipes projets identifient les zones à couvrir. Dans certains départements – je suis sûr que c’est le cas dans vos territoires –, les syndicats mixtes ou les collectivités ont fait appel à des bureaux d’études pour que d’autres types de cartographie soient réalisés – il y a autant de situations que de départements. C’est la meilleure garantie de disposer de données réelles.
M. Patrick Chaize. Je retire cet amendement, monsieur le président !
M. le président. L’amendement n° 480 rectifié est retiré.
Article 64
L’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques est ainsi modifié :
1° (nouveau) Après le quatrième alinéa du I, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« – aux engagements de déploiement et de services souscrits par un opérateur par voie de convention auprès des collectivités territoriales et de leurs groupements ; »
2° Le huitième alinéa du III est ainsi rédigé :
« – lorsque la personne en cause ne s’est pas conformée à une mise en demeure portant sur le respect d’obligations de déploiement prévues par l’autorisation d’utilisation de fréquences qui lui a été attribuée ou d’obligations de déploiement résultant d’engagements pris en application de l’article L. 33-13, une sanction pécuniaire dont le montant est proportionné à la gravité du manquement, apprécié notamment au regard du nombre d’habitants, de kilomètres carrés ou de sites non couverts pour un réseau radioélectrique ou du nombre de locaux non raccordables pour un réseau filaire, sans pouvoir excéder le plus élevé des montants suivants : soit un plafond fixé à 1 500 € par habitant non couvert ou 3 000 € par kilomètre carré non couvert ou 450 000 € par site non couvert pour un réseau radioélectrique, ou 1 500 € par logement non raccordable et 5 000 € par local à usage professionnel non raccordable ou 450 000 € par zone arrière de point de mutualisation sans complétude de déploiement pour un réseau filaire, soit un plafond fixé à 3 % du chiffre d’affaires hors taxes du dernier exercice clos, taux porté à 5 % en cas de nouvelle violation de la même obligation ; ».
M. le président. L’amendement n° 748 rectifié bis, présenté par M. Chaize, Mme Morhet-Richaud, MM. Bizet, Vaspart et Mandelli, Mme de Cidrac, M. Daubresse, Mmes Deromedi et Raimond-Pavero, M. B. Fournier, Mmes Thomas et Chain-Larché, M. H. Leroy, Mmes Bories et Chauvin, M. D. Laurent, Mmes Lassarade, F. Gerbaud et Deroche, MM. de Nicolaÿ, Perrin, Raison, Bascher et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, Pellevat, Rapin et Savary, est ainsi libellé :
I. - Avant l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… - L’article L. 33-13 du code des postes et communications électroniques est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Cette procédure peut également concerner les déploiements prévus dans le cadre d’une convention locale qui est transmise conjointement par l’opérateur qui souscrit les engagements et par la collectivité ou le groupement de collectivités concerné au ministre chargé des communications électroniques. Ce dernier s’assure de la cohérence du projet local avec les dispositifs nationaux avant d’effectuer la saisine de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes prévue au premier alinéa du présent article. »
II. - Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. L’article 64, adopté en commission des affaires économiques, a notamment pour objet d’étendre le champ d’application des sanctions prévues à l’article L. 36-11 du code des postes et des communications électroniques aux cas de non-respect d’engagements de déploiement souscrits par un opérateur par voie de convention avec les collectivités territoriales.
Les appels à manifestation d’engagements locaux, les AMEL, sont un outil prometteur pour compléter les déploiements dans la zone d’initiative publique et éviter que le contribuable ne soit mis inutilement à contribution, alors qu’une offre privée peut émerger. Il n’est pas à exclure que d’autres démarches puissent conduire à des conventionnements locaux entre des opérateurs et des collectivités ou groupements de collectivités.
Cet amendement vise à approfondir la démarche entamée par la commission des affaires économiques en intégrant pleinement les engagements pris dans le cadre des AMEL et de toutes autres démarches locales dans la planification du déploiement du très haut débit en France. Le ministre chargé des communications électroniques doit être le garant de la cohérence de l’ensemble du dispositif national du déploiement du très haut débit en France, afin d’éviter par exemple les duplications inutiles.
À cet égard, la procédure prévue à l’article L. 33-13 du code des postes et des communications électroniques paraît plus adaptée à la prise d’engagements contraignants par les opérateurs. Celle-ci prévoit notamment un avis ex ante du régulateur sur les propositions d’engagements, qui est utile pour sécuriser les déploiements. En outre, leur acceptation par le ministre chargé des communications électroniques garantit la prise en compte des objectifs nationaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Vous l’avez signalé, monsieur le sénateur, l’article adopté en commission visait entre autres à permettre à l’ARCEP de sanctionner ses engagements. Par cet amendement, vous restreignez de fait la rédaction adoptée par la commission. Néanmoins, celle-ci a considéré que, sur cette disposition, vous proposiez une clarification du cadre juridique applicable aux appels à manifestation d’engagements locaux. C’est la raison pour laquelle sa position a évolué en faveur de cet amendement.
La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet également un avis favorable sur cet amendement.
Depuis le mois de janvier dernier, nous faisons en sorte qu’il n’y ait plus d’engagement la main sur le cœur : nous voulons des engagements contraignants. Vous avez raison, il y avait un manque, il faut que les projets AMEL puissent aussi être opposables au titre de l’article L. 33-13 dont nous avons tant parlé.
M. le président. Je mets aux voix l’article 64, modifié.
(L’article 64 est adopté.)
Article 64 bis
Les conditions mentionnées au second alinéa du I de l’article 33 de l’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics ne sont pas applicables aux marchés publics de conception-réalisation conclus en vue de l’établissement d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques en application de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
Les acheteurs peuvent confier à un opérateur économique une mission globale portant sur la conception, la construction, la maintenance et l’exploitation d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques en application de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales.
Ces dispositions sont applicables aux contrats conclus à compter de la publication de la présente loi et au plus tard le 31 décembre 2022. – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 64 bis
M. le président. L’amendement n° 303 rectifié, présenté par M. Chaize, Mme Morhet-Richaud, MM. Bizet, Vaspart, Manable et Mandelli, Mme de Cidrac, M. Daubresse, Mmes Deromedi et Raimond-Pavero, M. B. Fournier, Mmes Thomas et Chain-Larché, M. H. Leroy, Mmes Bories et Chauvin, M. D. Laurent, Mmes Lassarade, F. Gerbaud et Deroche, MM. de Nicolaÿ, Perrin, Raison, Bascher et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, Pellevat, Rapin et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 64 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 323-12 du code de l’énergie est complété par les mots : « en prenant en compte l’objectif d’aménagement numérique du territoire, afin de faciliter le déploiement des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique ».
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Il s’agit d’un amendement dont l’objet se veut pragmatique et très opérationnel.
Il faut que, de plus en plus, les réseaux de communications électroniques puissent utiliser les supports de réseaux électriques. Cela paraît de bon sens, mais, sur le terrain, les difficultés sont là et les contraintes techniques imposées par l’opérateur de réseaux de distribution d’énergie électrique ne facilitent pas cette mise en œuvre.
Il s’agit donc de prévoir que l’arrêté technique interministériel qui régit le cadre des calculs pour la pose des réseaux de communications électroniques sur les réseaux de distribution publique puisse être revu de façon pragmatique et facilite enfin l’utilisation de ses propres ouvrages, tant sur les aspects de charges que sur les aspects d’interdistance.
Jusqu’à présent, les réseaux de communications électroniques étaient des réseaux électriques et, pour des raisons de sécurité, les réseaux en cuivre avaient des interdistances à respecter. La fibre optique étant un câble inerte qui ne transporte pas d’électricité, on pourrait réduire les distances et faciliter ainsi l’utilisation des réseaux de basse tension.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission demande l’avis du Gouvernement. Même si elle est pleinement en accord avec l’objectif visé, un certain nombre d’interrogations apparaissent.
D’abord, la mention d’un objectif n’entraînerait pas nécessairement l’adoption de nouvelles dispositions réglementaires par le Gouvernement.
Ensuite, est-il pertinent de ne faire référence qu’à une seule préoccupation particulière, alors que le réseau de distribution pourrait également être adapté à d’autres impératifs, comme la mobilité électrique ?
Enfin, il semble que ce type de précision pourrait davantage relever des dispositions relatives aux missions de base du gestionnaire du réseau de distribution.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement.
Ce qui est en cause, c’est l’arrêté de 2001, qui vise à déterminer les caractéristiques techniques des réseaux électriques aériens susceptibles d’accueillir les fibres numériques.
Il faut traiter le sujet à l’échelon réglementaire et non pas législatif ; nous avons déjà commencé à le faire en travaillant avec les opérateurs concernés. J’en prends l’engagement et je suis sûr que nous pourrons poursuivre les discussions sur ce sujet.
M. le président. La parole est à M. Patrick Chaize, pour explication de vote.
M. Patrick Chaize. Monsieur le président, comme j’ai un nouvel engagement de M. le secrétaire d’État, je retire cet amendement et lui fais cette proposition : je suis prêt à participer à ce groupe de travail pour faire en sorte que les choses aillent dans le bon sens !
M. le président. L’amendement n° 303 rectifié est retiré.
Article 64 ter (nouveau)
La section 1 du chapitre II du titre Ier du livre II du code des postes et des communications électroniques est complétée par un article L. 33-14 ainsi rédigé :
« Art. L. 33-14. – En cas d’absence de fourniture en gros d’offres d’accès activé, tout opérateur exploitant des infrastructures de communications électroniques à très haut débit en fibre optique permettant de desservir un utilisateur final fait droit aux demandes raisonnables d’accès activé à ce réseau émanant d’opérateurs de services, en vue de fournir des services de communications électroniques aux utilisateurs finals.
« L’accès est fourni dans des conditions économiques et techniques transparentes, raisonnables et non discriminatoires.
« L’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en contrôle le respect et sanctionne les manquements constatés dans les conditions prévues à l’article L. 36-11. »
M. le président. L’amendement n° 1075, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Par cet amendement, le Gouvernement propose de supprimer l’article 64 ter introduit en commission pour des raisons similaires à celles que j’ai développées sur l’itinérance.
Si cet article demeure, dès lors que vous développerez des réseaux numériques, vous devrez accepter que tous les opérateurs qui n’auront pas fait ces investissements commercialisent eux aussi l’ensemble de ces fibres numériques, ce qu’on appelle les offres activées de fibre. Ce faisant, cela réduit les investissements, la compétition entre les opérateurs et in fine diminue la rapidité de couverture à l’échelle du territoire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cet amendement est contraire à la position de la commission. En effet, en introduisant l’article 64 ter, celle-ci a souhaité obliger les opérateurs à offrir une offre d’accès à leur fibre activée.
L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Je mets aux voix l’article 64 ter.
(L’article 64 ter est adopté.)
Article 64 quater (nouveau)
À la seconde phrase de l’article 31 de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, les mots : « à partir du 1er juillet 2017 » sont remplacés par les mots : « au 31 décembre 2018 ».
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, messieurs les ministres, madame le rapporteur, mes chers collègues, vous me pardonnerez d’être un peu bavard, mais il faut bien justifier le N de ce projet de loi ÉLAN. (Sourires.)
Cet article concerne la création d’une base adresse nationale, dont nous avons malheureusement déjà parlé dans de nombreux textes abordant le numérique. Ainsi, lors de la discussion du projet de loi pour une République numérique, Axelle Lemaire m’avait donné l’assurance qu’une solution serait apportée dans les plus brefs délais. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi. Et alors ?
M. Patrick Chaize, rapporteur pour avis de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Lors de l’examen de la loi Montagne, un article précisant la mise en place de cette base au 1er juillet 2017 confirmait cette volonté. À ce jour, rien n’est encore opérationnel.
Monsieur le secrétaire d’État, il y a urgence et je vous assure que cela peut se régler de façon simple. Il faut une volonté affirmée.
J’en profite aussi pour évoquer deux autres sujets, qui pourront trouver une solution assez rapidement.
Je pense au modèle conceptuel de données, dit Grace THD, sur lequel les collectivités, dans un souci d’efficacité, se sont substituées à l’État. Cette situation ne peut malheureusement pas durer.
Un regard attentif doit également être porté sur les demandes de garanties d’emprunt sollicitées par les organismes prêteurs qui mettent les collectivités en difficulté.
Vous le voyez, monsieur le secrétaire d’État, vous avez la capacité d’accélérer par des actions simples, rapides et concrètes.
M. le président. Je mets aux voix l’article 64 quater.
(L’article 64 quater est adopté.)
Article 64 quinquies (nouveau)
Le IV de l’article L. 1111-10 du code général des collectivités territoriales est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation aux dispositions du présent article, les communes membres d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent financer toute opération d’investissement pour l’établissement et l’exploitation d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques en application de l’article L. 1425-1 du présent code. Ce financement est encadré par les modalités prévues au V de l’article L. 5214-16, à l’article L. 5215-26 et au VI de l’article L. 5216-5. »
M. le président. L’amendement n° 448 rectifié, présenté par Mme Jasmin, M. Lurel, Mme Grelet-Certenais, MM. Lalande et Bérit-Débat, Mme Féret, M. Jacquin, Mme Monier, M. Marie, Mme Espagnac et M. Mazuir, est ainsi libellé :
I. – Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation au IV de l’article L. 5211-30, ce financement par une commune des collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution entre dans la détermination du coefficient d’intégration fiscale pour le calcul de la dotation d’intercommunalité perçue par l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont elle est membre. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Victoire Jasmin.
Mme Victoire Jasmin. Cet amendement vise à renforcer l’incitation pour les communes des collectivités territoriales régies par l’article 73 de la Constitution à investir, grâce au concours financier de leur EPCI, dans l’amélioration de la couverture numérique de leurs territoires.
En outre-mer, la problématique des nombreuses zones blanches existe encore. Leur couverture en réseaux haut débit est indispensable en termes tant d’aménagement du territoire que de développement économique ou touristique.
L’article 64 quinquies a pour vocation d’encourager les communes à investir dans l’établissement et l’exploitation d’infrastructures et de réseaux de communications électroniques par le bénéfice de fonds de concours abondés par leur EPCI.
Les fonds de concours sont des modes de financement croisés simples, mais très encadrés, qui permettent une solidarité et une coopération intercommunale afin de soutenir des investissements stratégiques sur des communes de l’EPCI.
Aussi, par cet amendement, il s’agit pour les communes de ces collectivités territoriales qui, pour certaines, souffrent d’un véritable isolement numérique de renforcer l’incitation financière pour leurs EPCI, en majorant leur dotation globale de fonctionnement.
Cette mesure incitative peut être limitée dans le temps, mais c’est une nécessité, compte tenu des enjeux pour nos territoires, afin de réduire les écarts et de favoriser l’égalité des chances entre les familles et les territoires, et l’égal accès à des formations universitaires.
Cette majoration serait dérogatoire, puisqu’une meilleure couverture des nombreuses zones blanches en réseaux haut débit est indispensable tant en matière d’aménagement du territoire, qu’en matière de développement économique et touristique, mais également dans la prévention des risques majeurs.
Aussi, il serait souhaitable, grâce à cette disposition, en raison de l’insularité de ces territoires d’outre-mer et du surcoût plus important du déploiement des réseaux de communication – fibre et haut débit –, de majorer la dotation des EPCI qui les accompagnent dans cette démarche.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement. Il s’agit de dispositifs fiscaux qui pourront être évoqués lors de l’examen de la prochaine loi de finances.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 64 quinquies.
(L’article 64 quinquies est adopté.)
Article additionnel après l’article 64 quinquies
M. le président. L’amendement n° 476 rectifié bis, présenté par M. Chaize, Mme Morhet-Richaud, MM. Bizet, Vaspart et Mandelli, Mme de Cidrac, M. Daubresse, Mmes Deromedi et Raimond-Pavero, M. B. Fournier, Mmes Thomas et Chain-Larché, M. H. Leroy, Mmes Bories et Chauvin, M. D. Laurent, Mmes Lassarade, F. Gerbaud et Deroche, MM. de Nicolaÿ, Perrin, Raison, Bascher et Gremillet, Mme Garriaud-Maylam et MM. Revet, Pellevat, Rapin et Savary, est ainsi libellé :
Après l’article 64 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’avant-dernier alinéa du I de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les projets de réseaux de communications électroniques d’initiative publique mentionnés au présent article peuvent inclure le raccordement des entreprises à un réseau à très haut débit en fibre optique ouvert au public lorsqu’il est démontré que la seule initiative privée des opérateurs déclarés en application du I de l’article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques, y compris mutualisée, ne permet pas, à moyen terme, d’assurer ce raccordement. »
La parole est à M. Patrick Chaize.
M. Patrick Chaize. Cet amendement vise à accélérer le déploiement des réseaux de communications électroniques à très haut débit en fibre optique, en permettant aux réseaux d’initiative publique de raccorder des entreprises, dès lors qu’il est démontré que les opérateurs ne procèdent pas au raccordement prévu à moyen terme.
Il s’agit d’une atteinte proportionnée au principe de libre concurrence, dans la mesure où cette disposition vise à pallier l’insuffisance de l’initiative privée à défaut d’une carence de celle-ci. Pas moins de 6 949 communes seraient concernées.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Cet amendement semble en effet satisfait par le droit en vigueur, puisque le raccordement des entreprises par les réseaux d’initiative publique, sujet, certes, important, est financé, lorsqu’il y a carence de l’initiative privée, dans le cadre du plan France très haut débit. La commission demande donc le retrait de l’amendement. À défaut, elle y sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Julien Denormandie, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet le même avis que la commission. L’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction actuelle, permet déjà, dès lors qu’il y a carence constatée du réseau privé, aux réseaux d’initiative publique d’intervenir, après en avoir informé l’ARCEP.
M. le président. Monsieur Chaize, maintenez-vous l’amendement n° 476 rectifié bis ?
M. Patrick Chaize. Avant de le retirer, monsieur le président, je veux préciser que cet amendement vise en fait les zones C2O/CLAN, que les opérateurs privés avaient en quelque sorte préemptées, alors même qu’elles faisaient partie des territoires couverts par les réseaux d’initiative publique. Par le biais, notamment, d’aides financières, les collectivités se voient interdire d’investir sur ces zones. C’est tout à fait inacceptable.
Voilà le point que je voulais mettre en exergue et je souhaiterais, monsieur le ministre, que vous y portiez attention, afin de conserver au dispositif toute sa cohérence dans les zones d’initiative publique. Sous cette réserve, j’accepte de retirer mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 476 rectifié bis est retiré.
Chapitre VII
Diffusion par voie hertzienne de données horaires du temps légal français
Article 65
I. – Après le I ter de l’article L. 43 du code des postes et des communications électroniques, il est inséré un I quater ainsi rédigé :
« I quater. – L’Agence nationale des fréquences gère la diffusion par voie hertzienne terrestre, en France métropolitaine, de données horaires du temps légal français. À cet effet, elle est chargée :
« 1° De passer tous les actes, contrats ou marchés nécessaires à la diffusion de données horaires par voie hertzienne terrestre ;
« 2° D’assurer, en coordination avec les entités intervenant dans la production et la mise à disposition du signal horaire, l’optimisation du système technique, l’information des utilisateurs et l’évaluation du dispositif au regard des perspectives d’évolution des modalités techniques de diffusion ;
« 3° De mettre en œuvre, sur proposition conjointe du ministre chargé des communications électroniques et des autres ministres concernés et après décision du conseil d’administration de l’agence, l’extinction de la diffusion par voie hertzienne terrestre de données horaires. »
II. – (Non modifié) Les dispositions prévues au I entrent en vigueur à compter d’une date fixée par arrêté du ministre chargé des communications électroniques, et au plus tard deux ans après la promulgation de la présente loi.
À compter de cette date, l’Agence nationale des fréquences se substitue de plein droit à l’État dans les marchés et conventions conclus par l’État pour assurer la continuité de la diffusion par voie hertzienne terrestre de données horaires du temps légal français. Ces marchés et conventions sont exécutés dans les conditions antérieures jusqu’à leur échéance, sauf accord contraire des parties. La substitution de l’Agence nationale des fréquences à l’État n’entraîne aucun droit à résiliation ou à indemnisation pour les cocontractants. L’Agence nationale des fréquences et l’État informent conjointement les cocontractants de cette substitution. – (Adopté.)
Chapitre VIII
Dispositions spécifiques à la Corse
Article 66
Au I de l’article L. 4425-28 du code général des collectivités territoriales, le mot : « dix-sept » est remplacé par le mot : « dix-neuf ». – (Adopté.)
Article additionnel après l’article 54 quinquies (précédemment réservé)
M. le président. L’amendement n° 1069 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Après l’article 54 quinquies
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de créer une agence de l’État dotée de la personnalité morale, compétente pour l’ensemble du territoire national, chargée de lutter contre les fractures territoriales et d’accompagner les mutations des territoires, en conduisant des programmes d’intervention et en soutenant, en lien avec les collectivités territoriales et les autres opérateurs de l’État, des projets territoriaux.
Cette ordonnance fixe notamment :
1° Les instances de gouvernance de cette agence, leur rôle, les modalités de désignation de leurs membres et les catégories de personnes représentées en leur sein, incluant notamment des élus locaux et nationaux ;
2° Les conditions dans lesquelles des personnes publiques intervenant dans les domaines de compétence de l’agence, en particulier des établissements publics, sont soit intégrées à l’agence, soit associées à la conduite de ses missions ;
3° Les conditions dans lesquelles les représentants de l’État au niveau déconcentré peuvent agir en qualité de délégué territorial de l’agence ;
4° Les catégories de ressources publiques ou privées de l’agence ;
5° Les modalités de transfert des personnels et des biens, droits et obligations des administrations et des établissements publics intégrés à l’agence.
II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, à prendre par voie d’ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi afin de créer une réserve thématique visant à ce que toute personne volontaire puisse servir des projets de territoire soutenus par l’agence.
III. – Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chacune des ordonnances prévues au I et II.
IV. – Dans un délai de douze mois à compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance prévue au I, le Gouvernement remet un rapport au Parlement relatif à la mise en place de l’agence. Ce rapport analyse en outre, à la suite de cette mise en place :
- la simplification des démarches visant à faciliter l’émergence de projets de territoires ;
- la prise en compte de la différenciation de territoires pour proposer une réponse adaptée ;
- la proximité de la réponse apportée aux acteurs locaux selon le principe de subsidiarité pour soutenir leur projet de territoire.
La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Mézard, ministre. Par cet amendement, le Gouvernement demande au Parlement de l’habiliter à procéder par ordonnance en vue de préparer la création d’une agence nationale de la cohésion des territoires. Disons-le clairement, il s’agit de trouver un véhicule législatif permettant d’accélérer le processus, tout en associant au maximum, je le dis très clairement, la Haute Assemblée, particulièrement concernée par cette question, puisqu’elle représente les collectivités locales en application de l’article 24 de la Constitution.
S’il n’est pas possible de le faire dans le cadre du projet de loi ÉLAN, comme les échanges que nous avons eus avec Mme la présidente de la commission des affaires économiques le laissent supposer, nous trouverons un autre véhicule législatif plus adapté.
Le commissaire général à l’égalité des territoires, chargé de la préfiguration de cette agence, et moi-même avons la volonté d’aboutir, pour faire de cette agence un véritable instrument au service des collectivités territoriales. Je m’empresse d’ajouter que la représentation des collectivités territoriales au sein de la gouvernance de l’agence sera absolument indispensable.
Je prends acte du fait que la commission ne semble pas souhaiter émettre un avis favorable sur cet amendement. Nous nous efforcerons, le plus rapidement possible et en concertation, bien sûr, avec la Haute Assemblée, d’avancer sur le sujet.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Dominique Estrosi Sassone, rapporteur. Effectivement, monsieur le ministre, le fait que cet amendement, qui vise à donner au Gouvernement la possibilité de créer par ordonnance la future agence nationale de la cohésion des territoires, nous soit proposé si tardivement ne permet pas à la commission des affaires économiques, en l’état actuel des débats, d’émettre un avis favorable.
Pour autant, nous avons bien entendu que l’intention du Gouvernement était de trouver un véhicule législatif véritablement adapté. Peut-être déciderez-vous de déposer un projet de loi. En tout cas, sachez que le Sénat, pas plus tard que le 13 juin dernier, en adoptant une proposition de loi déposée sur l’initiative de nombreux collègues, dont Bruno Retailleau, Philippe Bas et Mathieu Darnaud, et issue des travaux de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, s’était prononcé en faveur de la création de cette agence.
Nous avons bien entendu, monsieur le ministre, vos engagements. Nous ne doutons pas que vous pourrez les tenir en continuant à associer le Sénat à vos travaux, notamment sur les deux points qui nous paraissent essentiels : la gouvernance de cette agence nationale de la cohésion des territoires et la conduite des missions qu’elle aura à exercer.
Pour l’heure, l’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Notre groupe est, bien sûr, favorable à la création d’une agence de l’État chargée de lutter contre les fractures territoriales et d’accompagner les mutations des territoires. Le Président de la République l’avait d’ailleurs annoncée en juillet 2017, lors de la conférence nationale des territoires qui s’est tenue au Sénat, et confirmée lors du congrès de l’Association des maires de France, indiquant qu’une telle agence serait un outil de mobilisation des ressources et des savoir-faire, pour faciliter les projets à l’échelle locale.
Les mois se sont écoulés, sans que nous ayons eu d’informations sur les différents scénarii envisagés par le Gouvernement. Nous avons essayé d’en savoir plus sur les contours de cette nouvelle agence, au travers de diverses auditions ou dans le cadre de l’examen de la proposition de loi sur l’équilibre territorial qu’évoquait à l’instant Mme la rapporteur. Nous n’avons pas obtenu de réponse. Un rapport du commissariat général à l’égalité des territoires était annoncé pour la fin du mois de juin : qu’en est-il ?
Par cet amendement, extrêmement sobre tant dans sa rédaction que dans son objet, le Gouvernement nous invite en quelque sorte à faire preuve de créativité. Il nous propose de travailler sur les contours de cette agence, qu’il s’agisse des équilibres à retenir, de la représentation des élus à assurer, des actions prioritaires à envisager, des territoires cibles à définir.
Il paraît donc sage, aujourd’hui, de ne pas voter cet amendement et de nous mettre au travail. Naturellement, monsieur le ministre, nous sommes pleinement disposés à participer, aux côtés de tous nos collègues de la commission des affaires économiques et, plus largement, du Sénat, aux travaux de préfiguration de cette agence.
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. Cet amendement a été déposé par le Gouvernement de façon quelque peu brutale. Pourtant, il se trouve que la création d’une telle agence a été envisagée dans pas moins de deux textes d’initiative sénatoriale : la proposition de loi relative à l’équilibre territorial et à la vitalité de la démocratie locale du président Philippe Bas, ainsi que la proposition de loi pour la revitalisation des centres-bourgs de nos collègues Rémy Pointereau et Martial Bourquin. Toutes deux ont été adoptées par notre assemblée en juin dernier.
Compte tenu non seulement de l’importance des enjeux de la cohésion des territoires, mais également de l’environnement favorable dont une telle mesure bénéficie au Sénat, pourquoi recourir, dès lors, à la procédure des ordonnances ? Pourquoi procéder ainsi, par le biais d’un amendement de dernière minute, non examiné par la commission compétente au fond, à savoir la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ?
Le groupe Union Centriste regrette profondément ce choix, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, qui dénote, à l’égard du Sénat et du Parlement dans son ensemble, un certain manque de confiance. Voilà qui n’est pas à la hauteur des enjeux.
Notre groupe s’inquiète, en outre, du flou qui persiste autour de cette agence que vous souhaitez créer. Quelles seront exactement ses missions ? Comment fonctionnera-t-elle ? Quelle position occupera-t-elle par rapport aux différentes agences et structures existantes intervenant dans ce champ, si vaste, de la cohésion des territoires ? Fusionnera-t-elle avec certaines, en supervisera-t-elle d’autres, entraînera-t-elle la disparition de quelques-unes ? Quel financement sera prévu ? Qui sera chargé de la gérer ? Qui y prendra les décisions ? Quels seront les élus présents ? Un bilan sera-t-il tiré de l’action des agences existantes avant qu’il soit procédé à leur refonte ?
Ces questions, majeures, restent malheureusement sans réponse. Nous n’entendons pas créer une instance de plus, fût-elle porteuse d’un nom doux et plein d’espérance, sonnant si bien aux oreilles des élus locaux. Ces remarques, qui tiennent tant à la forme qu’au fond de votre proposition, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, constituent donc autant de raisons pour lesquelles le groupe Union Centriste ne votera pas, en l’état, l’amendement du Gouvernement. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1069 rectifié.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Vote sur l’ensemble
M. le président. Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Jean-Pierre Leleux, pour explication de vote.
M. Jean-Pierre Leleux. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons au terme de l’examen, au long cours, de ce projet de loi ÉLAN. Je commencerai par féliciter Mme la rapporteur, les membres de la commission des affaires économiques, l’ensemble des rapporteurs pour avis, du travail important qui a été mené pour aboutir, aujourd’hui, à un texte globalement acceptable.
Toutefois, vous le comprendrez, je ne peux m’empêcher de mettre un bémol à ce satisfecit, compte tenu de la perception qui est la mienne de ce texte, tel qu’il va, comme je le présume, être adopté dans quelques instants. Certes, la cause, que j’ai défendue au nom de la commission de la culture, ne concerne que quelques-uns de ses très nombreux articles et qu’une petite partie de l’ensemble. Mais cette cause, à savoir le maintien de la règle actuelle pour ce qui concerne la mission de service public qu’assurent les architectes des Bâtiments de France, revêt, de mon point de vue, une importance plus que symbolique.
Je voudrais dire ici mon regret de ne pas avoir su convaincre le Sénat de rester fidèle à la position qu’il avait adoptée voilà moins de deux ans sur ce sujet, largement débattu lors de l’examen de la loi relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.
Telle est la raison de mon bémol et, donc, de mon abstention sur ce projet de loi.
M. le président. La parole est à M. Philippe Dallier, pour explication de vote.
M. Philippe Dallier. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voilà arrivés au terme de ce marathon de huit jours et six très longues soirées. Je commencerai, au nom du groupe Les Républicains, par remercier Mme la rapporteur, Dominique Estrosi Sassone, ainsi que les rapporteurs pour avis, Patrick Chaize, Marc-Philippe Daubresse et Jean-Pierre Leleux, sans oublier Mme la présidente de la commission des affaires économiques, Sophie Primas. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – MM. Alain Marc et Marc Daunis applaudissent également.)
Le travail abattu a été considérable, ce qui est toujours le cas sur les textes ayant trait au logement. Celui-ci comptait soixante-cinq articles au départ, beaucoup plus à son arrivée devant le Sénat et encore davantage maintenant. Je ne manquerai pas non plus de saluer MM. les ministres, qui nous ont consacré beaucoup de temps. Les débats ici, au Sénat, ont été de qualité. C’est, me semble-t-il, ce que tout le monde retiendra : alors qu’ailleurs l’agitation semblait l’emporter, nous, nous avons continué à travailler.
Désormais, que va-t-il rester de ce travail ? C’est la question et nous souhaitons que la commission mixte paritaire parvienne à un accord, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État. Il y a, de ce point de vue, des sujets auxquels le Sénat tient tout particulièrement. Je n’en citerai que quelques-uns, faute de temps.
Il s’agit, d’abord, de la place des maires dans le dispositif. Cela a été dit et répété, que ce soit sur les grandes opérations d’urbanismes, les GOU, ou sur la vente HLM, il faudra absolument conserver ce lien entre les élus locaux, les maires, en particulier, et les commissions d’attribution, dans le cadre de la réorganisation des bailleurs.
Il s’agit, ensuite, des dispositions relatives à la réorganisation des bailleurs et à la vente HLM, conséquences de la dernière loi de finances, que nous subissons tous, y compris les bailleurs. Nous nous sommes efforcés de faire au mieux, tout du moins d’éviter le pire, qui aurait été d’ouvrir la vente HLM au privé et, partant, de le faire bénéficier d’un grand effet d’aubaine.
Enfin, nous espérons que nos collectivités ne seront pas mises en difficulté. Je pense une nouvelle fois aux maires, particulièrement à ceux qui sont sous le coup de l’article 55 de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains, la loi SRU. Nous n’avons pas détricoté la loi SRU, nous en avons conservé l’ossature, rappelant qu’elle avait déjà été adaptée. Nous sommes allés un peu plus loin, avec deux dispositions intéressantes : l’instauration d’un contrat, défendue par Mme la rapporteur ; la reconnaissance du rôle de l’intercommunalité, souhaitée par Marc-Philippe Daubresse. J’ajouterai l’adoption de l’amendement que j’ai porté sur la prise en compte de la mixité, mais vue sous l’angle des villes qui comptent déjà de nombreux ménages pauvres.
Le travail qui a été fait est de qualité. Je suis très heureux, au nom du groupe Les Républicains, d’annoncer que nous voterons ce texte. Je terminerai en vous redisant, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, que nombre de dispositions sont les conséquences de la loi de finances. J’espère que ce que nous aurons fait ici permettra d’éviter la chute de la construction de logements. Les premiers chiffres du premier semestre de 2018 pour ce qui concerne les sociétés d’économie mixte et les offices montrent une baisse de 10 %. La situation risque de s’aggraver. Rendez-vous donc à la fin de l’année, et même un peu plus tard ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote.
M. Marc Daunis. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après de nombreux jours, huit au total, et de nombreuses nuits, nous achevons l’examen du projet de loi ÉLAN. Le débat fut bon et honore notre Haute Assemblée.
À chaque fois, les dispositions du texte ont été recentrées sur leurs problématiques respectives et resituées dans leur contexte historique. Je tenais à vous remercier, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, de la qualité des échanges que nous avons pu avoir. Vous avez su, particulièrement dans les moments clés du débat, laisser le temps nécessaire à la discussion, alors même qu’elle était contrainte par la procédure accélérée, qui n’est pas celle que j’affectionne le plus.
Je voulais aussi saluer, madame la présidente, l’excellent travail fait en commission, même si, par moments, nous avons dû accélérer. J’adresse des remerciements à nos rapporteurs de façon générale, avec une mention particulière pour vous, madame Estrosi Sassone : je salue non seulement votre opiniâtreté, ce qui n’étonnera personne, mais aussi votre esprit d’ouverture, peut-être plus surprenant (Exclamations sur de nombreuses travées.) pour moi qui suis votre collègue des Alpes-Maritimes, sans oublier votre résistance, avec cette capacité de maintenir certains caps, parfois erronés, mais en le faisant toujours avec beaucoup de constance et de respect mutuel.
Voilà, mes chers collègues, ce qui fait un bon débat, d’autant qu’il a été d’une grande clarté, permettant d’identifier les points de divergence. S’il se murmure que nous aboutirons à une commission mixte paritaire conclusive, celle-ci devra intégrer certains éléments pour nous fondamentaux : sur la place des maires et des communes, que ce soit dans les GOU, les programmes partenariaux d’aménagement ou la vente de logements, nous n’entendons pas céder un pouce de terrain. Néanmoins, dans la mesure où trop d’éléments de déséquilibre ont été introduits dans le texte, mon collègue Xavier Iacovelli les développera plus avant, le groupe socialiste et républicain votera contre ce texte.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais à mon tour rendre hommage au travail considérable qui a été fait. Ce fut, avec plus de mille amendements, un véritable marathon pour Mme la rapporteur, qui nous a tous impressionnés.
Je tiens tout de même à dire que je me sens quelque peu déprimé après la discussion d’hier soir. J’ai le sentiment qu’il est bien difficile d’avancer dès que le Sénat évoque les questions climatiques et que les vagues de chaleur ont tendance à rester à la porte de cet hémicycle climatisé.
Il y a une question centrale : les émissions de gaz à effet de serre dues aux logements représentent, M. le secrétaire d’État nous l’a rappelé, 40 % du total des émissions. Ce projet de loi aurait dû montrer la cohérence de l’approche gouvernementale, au regard des paroles fortes, très fortes même, du Président de la République, et d’une stratégie sur le logement censée permettre de tenir nos objectifs internationaux.
La semaine dernière, les services de l’État, par le biais de la direction générale de l’énergie et du climat, ont rappelé que nous ne tenions pas nos objectifs climatiques, en raison, principalement, des émissions du secteur du logement. Selon les chiffres avancés, dans les toutes prochaines années, nous dépasserons notre budget carbone, par rapport à la stratégie sur laquelle nous nous sommes engagés dans le cadre de l’accord de Paris, de 26 % entre 2019 et 2023 pour ce même secteur du logement.
Il y avait donc urgence dans ce projet de loi à mettre nos actes en cohérence avec nos objectifs. J’ai le sentiment que nous n’y arrivons pas, que le Gouvernement a quelques difficultés en la matière, mais que le Sénat en a encore plus.
Mes chers collègues, visiblement, et c’est une difficulté, les priorités ne sont pas les mêmes pour toutes les commissions. Pour la commission du développement durable, la question climatique est très présente. Pour celle des affaires économiques, c’est plutôt la volonté de réduire les charges des entreprises qui revient en boucle. Cela donne des textes totalement déséquilibrés.
Je prendrai un exemple pour illustrer mon propos. Nous avons fait un travail important sur la révision de la loi Littoral. S’agissant du problème des « dents creuses », vous aurez noté que les écologistes présents ont été extrêmement conciliants sur l’accord trouvé à l’Assemblée nationale. Chacun sentait bien qu’il fallait avancer et nous avons su faire preuve d’intelligence collective pour affiner la législation pour répondre à des difficultés connues. Cela étant, dans quelques décennies, les historiens – s’il en reste – ne manqueront pas de s’étonner que nous ayons passé autant de temps sur ce sujet des dents creuses, dans le cadre de révision de la loi Littoral, alors que se dessinait une trajectoire sur le climat annonçant que des pans entiers de notre littoral seraient submergés d’ici à dix, quinze ou vingt ans.
Notre incapacité à trouver une cohérence d’ensemble m’interpelle et je souhaiterais que nous y réfléchissions collectivement, parce que nous ne pourrons continuer ainsi. Les crises se précisent, voilà que la Grèce et la Suède sont touchées aujourd’hui. C’est donc un appel à la cohérence que je lance. Compte tenu de ce que notre assemblée a décidé, notamment sur la non-opposabilité des diagnostics de performance énergétique, et de l’absence de vision à moyen terme sur la réhabilitation, les deux écologistes du groupe du RDSE voteront aussi contre ce texte, sans compter qu’il prévoit un certain nombre d’assouplissements extrêmement inquiétants, mais je n’y reviendrai pas.
M. le président. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, madame la présidente de la commission des affaires économiques, madame la rapporteur, mes chers collègues, je m’associe aux propos de Marc Daunis, pour saluer, au nom du groupe socialiste et républicain, le travail réalisé en commission et depuis huit jours dans cet hémicycle. Je remercie également le Gouvernement de son écoute : au travers de nos échanges, si virulents qu’ils puissent avoir été à certains moments, c’est la démocratie qui s’exprime.
Malgré tout, pour faire suite à ce qu’a exprimé Marc Daunis, je soulignerai que trop de lignes rouges ont été franchies sur ce projet de loi ÉLAN. Être transgressif…
M. Jean-François Husson. … et disruptif !
M. Xavier Iacovelli. … n’implique pas de devoir revenir sur les acquis sociaux de nos concitoyens.
Création d’un bail mobilité, que nous pourrions qualifier de « bail précarité », atteintes manifestes aux rapports locatifs, dévitalisation chirurgicale de la loi SRU, suppression de l’obligation de rendre 100 % des logements accessibles : après avoir financièrement déstabilisé la politique du logement en adoptant une vision budgétaire et non pas économique et humaine, vous vous attaquez maintenant aux fondamentaux républicains de notre politique en faveur du logement, à savoir la mixité sociale et l’accès au logement pour tous.
S’il est un projet politique humaniste qui peut nous rassembler, c’est bien celui de la construction d’une société plus inclusive. L’accessibilité en est un des principes fondateurs. Elle ne peut être réduite à des considérations techniques, ni faire l’objet d’un calcul sur la base de pourcentages. Il n’y a pas de négociation, de compromis possible lorsque seuls 6 % des logements sont accessibles aux personnes en situation de handicap.
Il en va de même sur la mixité sociale, ciment de notre République. Si nous ne réussissons pas ce défi, en laissant la ségrégation territoriale et les inégalités s’accroître, nous menaçons, de fait, son existence.
En remettant en cause la loi SRU, en la grignotant par tous les bouts, vous allez organiser la concentration de la pauvreté dans certaines villes et dédouaner les autres de leurs obligations et de leur devoir de mixité. Il ne faut jamais l’oublier, s’il y a des quartiers sensibles, c’est parce qu’il y a des quartiers insensibles. Nous n’accepterons pas de foncer, tête baissée, dans l’impasse d’une cohabitation entre « ghettos de riches » et « ghettos de pauvres ».
Le projet de loi soumis à notre vote s’inscrit dans une logique de centralisme, de privatisation et de financiarisation du patrimoine français du logement. Il acte une fragilisation des locataires par rapport aux propriétaires.
Pour toutes ces raisons, pour les 4 millions de personnes mal logées, qui ne vont pas voir leur situation s’améliorer, le groupe socialiste et républicain votera contre ce projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique. (Mme Martine Filleul applaudit.)
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à la fin de ce débat, malheureusement, nos craintes sont confirmées. Il s’agit en effet d’un énième projet de loi de déréglementation et de dérégulation.
Voilà un texte de marchandisation du logement, qui fait de l’habitat un objet d’investissement et de spéculation. Il s’inscrit dans une longue lignée de textes sur le logement et l’aménagement, qui mettent à mal les grands principes du droit au logement. Je pense, bien évidemment, aux atteintes à la loi Littoral, à la loi SRU, à la protection du bâti héritée de la loi Malraux.
Les règles de la commande publique ont été balayées pour laisser place au libre choix, afin de construire moins bien et plus cher, sans contrainte de qualité ni de durabilité.
Finalement, ce texte nous invite à une course folle au gigantisme, que ce soit par le renforcement de l’échelon intercommunal ou par le regroupement forcé des bailleurs.
La privatisation du parc de logements publics et sa vente aux promoteurs privés, par lots, sont encouragées. Il faut bien permettre au privé de mettre la main sur le fameux « pactole » des loyers dans les logements publics.
L’encadrement des loyers a été enterré, et un bail mobilité institué. Ces dispositifs ont en commun de pénaliser, encore et toujours, des locataires captifs, contraints de laisser, dans leurs loyers, la majorité de leurs revenus.
Que dire encore de la mise à mal de l’accessibilité pour les personnes en situation de handicap, de l’absence de dispositif pour lutter contre les expulsions locatives, qui sont l’antithèse même du droit au logement ? Comment répondre, dans ces conditions, au droit au logement pour tous et en tout point du territoire ? Comment satisfaire aux besoins nécessaires de construction de logements accessibles ?
Avec ce texte, vous avez donné quitus aux desiderata des lobbies du BTP et de la construction, ce qui va à l’encontre des principes de solidarité et de dignité. Est-ce donc cela le nouveau monde ? Ce projet de loi, au final, aggravera le mal-logement et la situation des demandeurs, nous en sommes convaincus. Il ne donne aucune réponse sur le niveau d’engagement de l’État en faveur d’une politique publique du logement. Rien, non plus, sur les problématiques du foncier ou de l’engagement nécessaire pour la réhabilitation du parc.
Nous vous donnons rendez-vous au prochain débat sur le projet de loi de finances. Nous verrons si vous êtes si déterminés à augmenter les aides à la pierre. Nous verrons s’il y a des solutions à mettre en œuvre pour cesser d’aller prendre de l’argent aux offices, de rogner sur les APL.
Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au nom de mon groupe, je tenais à saluer la qualité exceptionnelle de nos débats, en séance comme en commission, et j’y associe le Gouvernement. Malgré tout, vous l’aurez compris, sans surprise, nous voterons contre ce texte.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le présent projet de loi était très attendu par les acteurs du logement, afin de « construire mieux, plus vite et moins cher ».
Les outils d’un véritable « choc de l’offre » sont bien présents : création de grandes opérations d’urbanisme, simplification des procédures en matière d’opérations d’aménagement, libération du foncier public, transformation de bureaux vacants, accélération du contentieux de l’urbanisme, restructuration du secteur du logement social. Le texte propose en outre des mesures visant à protéger nos concitoyens les plus fragiles par l’extension de la réquisition d’urgence, la création du bail mobilité ou le renforcement de la lutte contre les marchands de sommeil.
Toutefois, des équilibres essentiels du projet de loi ont été bouleversés lors de son examen au Sénat. Je pense en particulier à l’introduction de nombreuses entorses à la loi SRU, contraires à son esprit. Si l’excellent travail de la rapporteur a permis d’éviter un détricotage plus important de cette loi, nous considérons que la conjugaison de plusieurs éléments – l’allongement de la liste des logements comptabilisés au titre de la loi SRU, l’entrée dans le droit commun des communes franciliennes ou les nouvelles expérimentations introduites pour les communes n’ayant pas atteint leurs objectifs – réduit considérablement sa portée. Or l’offre de logements sociaux reste très insuffisante dans certains territoires, où il demeure impossible, pour de nombreux ménages, d’accéder à un logement au sein du parc privé.
Nous le savons, le Sénat a souhaité, en toute légitimité, renforcer le pouvoir des maires dans le cadre des grandes opérations d’urbanisme. Nous considérons, pour notre part, que ces mesures contribueront à bloquer des projets, pourtant demandés et attendus par les collectivités, et affecteront la cohérence des périmètres aménagés, au risque d’entraver, tout simplement, leur réalisation.
La loi Littoral a également fait l’objet de dérogations, qui restent malgré tout limitées. Nous saluons la solution trouvée par le Gouvernement pour la Corse, dont certains territoires sont également soumis à la loi Montagne.
Pour ces raisons, la très grande majorité du groupe du RDSE s’abstiendra. Nous espérons néanmoins une issue conclusive en CMP.
Je souhaiterais, pour conclure, saluer le travail de la rapporteur et de la présidente de la commission. Je voudrais également souligner l’écoute et la sagesse dont ont fait preuve les ministres. Cher Jacques Mézard, le sénateur affleure toujours derrière le ministre ! (Sourires.)
M. Julien Bargeton. Déjà, Napoléon perçait sous Bonaparte !
M. Jean-Claude Requier. En appréciant son pragmatisme, je lui dédierai cette citation du chanteur MC Solaar (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.) : « Pour aller de l’avant, il faut prendre du recul. Car prendre du recul, c’est prendre de l’élan. » De l’ÉLAN… Comme votre projet de loi, monsieur le ministre ! (Rires et applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi que sur des travées du groupe La République En Marche, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme Sonia de la Provôté, pour explication de vote.
Mme Sonia de la Provôté. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous arrivons, enfin, au terme de l’examen du projet de loi ÉLAN, fruit d’un long travail dont le Sénat a été un véritable fer de lance.
Je me joins à mes collègues pour remercier notre rapporteur, Mme Dominique Estrosi Sassone, et la présidente de la commission des affaires économiques, Mme Sophie Primas, non seulement pour leur travail, mais aussi pour leur ténacité et bien d’autres qualités dont elles ont su faire preuve au cours de ces longs débats. Je salue également le travail des autres commissions, qui ont largement porté les évolutions de ce texte, et, en particulier, l’intervention de Jean-Pierre Leleux.
Le texte que nous nous apprêtons à voter apporte des réponses à certaines de nos interrogations quant au futur des politiques du logement, de la ville et de l’aménagement. Il facilite notamment la conduite de projets urbains, ouvre la loi SRU à des adaptations locales bienvenues et vient moderniser le régime de la copropriété. Il reprend également une grande partie des mesures de la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, que le Sénat avait largement approuvée.
La Haute Assemblée a veillé à ce que les territoires et les élus locaux soient pleinement associés à la conduite des projets d’aménagement et à ce que les objectifs de construction intègrent une dimension qualitative.
Le groupe Union Centriste a, pour sa part, soutenu des propositions ambitieuses sur l’ensemble des dispositions du texte, et nous sommes heureux qu’un grand nombre d’entre elles aient été adoptées. Nous espérons que la CMP conservera les mesures introduites par le Sénat. Nous regrettons cependant que l’avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France, soutenu par la commission de la culture, n’ait pas été rétabli. Les nombreuses dérogations à la loi MOP interrogent aussi sur le souci de défendre la diversité et la qualité architecturales du projet urbain.
Fidèle à ce qu’il est, le groupe Union Centriste votera ce projet de loi – dans sa majorité, non à l’unanimité. Nous resterons effectivement vigilants quant à sa mise en œuvre et, plus largement, à l’évolution de nos politiques d’aménagement et de logement.
Après la récente succession de textes ayant porté sur ces domaines, nous appelons de nos vœux une stabilisation de la réglementation du secteur, afin de permettre son évaluation dans la sérénité, comme l’exigent les enjeux.
Nos discussions ont rouvert de nombreux chantiers, en les modifiant, alors même que certains émanaient de lois récentes : loi MOP, loi ALUR, loi SRU, loi Grenelle II, loi Littoral, et j’en passe. Le temps est clairement venu de nous arrêter ! Nous devons nous poser, voir comment la situation évolue sur le terrain et veiller à calmer cette ardeur législative. Laissons la loi s’appliquer sur les territoires ! Permettons aux élus locaux d’en prendre toute la mesure ! Nous verrons ensuite, dans quelques années, s’il faut proposer une nouvelle évolution législative pour répondre à des enjeux futurs. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Rémy Pointereau applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton, pour explication de vote.
M. Julien Bargeton. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nos débats touchent à leur fin, des débats qui ont commencé, il y a non pas une semaine, mais bien plusieurs mois. Durant cette période, le Sénat a joué son rôle. Il a initié, dès 2018, une conférence de consensus, qui a réuni l’ensemble des parties prenantes. Ces travaux ont nourri le texte du Gouvernement et permis d’anticiper nos débats. En outre, dès le travail en commission, notre assemblée a enrichi le texte – je remercie d’ailleurs la rapporteur pour son travail. Elle l’a précisé au cours des débats en séance, dans une atmosphère détendue malgré la complexité des sujets abordés.
Plusieurs priorités retenues sont déterminantes pour notre groupe : une simplification des procédures pour construire mieux, plus et plus vite ; une refonte du secteur du logement social ; l’élaboration d’outils pour lutter contre l’assignation à résidence ; la mise en œuvre de mesures pour améliorer le cadre de vie des Français. Toutefois, plusieurs modifications ont légèrement déséquilibré le texte ou ont affaibli sa portée : des mesures de simplification ont été rendues moins effectives ; plusieurs débats relatifs à l’accessibilité des logements ou au regroupement d’organismes d’HLM méritent d’être repris, afin de trouver un compromis acceptable ; les modifications apportées à la loi SRU doivent être revues d’ici à la CMP.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe La République En Marche ne s’opposera pas à ce texte,…
M. Philippe Dallier. C’est déjà pas mal !
M. Julien Bargeton. … mais il ne le votera pas : nous nous abstiendrons. C’est une abstention bienveillante,…
M. Roger Karoutchi. Positive !
M. Julien Bargeton. … positive, en effet, constructive, car l’équilibre du texte, s’il a été modifié, n’a pas été chamboulé.
Je remercie les ministres d’avoir nourri l’espoir pendant ces débats que la commission mixte paritaire puisse aboutir à un accord. Certes, du travail reste à faire au regard des sujets qui sont en suspens entre les deux assemblées, mais il appartient désormais au Gouvernement de s’investir pour que la CMP soit conclusive. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche, ainsi que sur des travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret, pour explication de vote.
M. Claude Malhuret. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, après plus de soixante heures de discussion et 1 156 amendements, nous arrivons au terme de nos débats.
La multiplication des articles et des amendements témoigne de la vigueur du travail parlementaire et de la diversité des sensibilités politiques qui se sont exprimées. Mais peut-être faudrait-il réfléchir au calendrier législatif, pour limiter le risque que des décisions aussi importantes pour nos concitoyens ne soient prises, parfois, sous l’empire de la fatigue et sans la plus grande vigilance nécessaire…
Je tiens à remercier les présidents de séance pour l’animation des débats, le ministre de la cohésion des territoires, qui a su nourrir les échanges de son expérience d’élu auvergnat, le secrétaire d’État pour sa patience, les rapporteurs, ainsi que l’ensemble de nos collègues qui se sont mobilisés sur ce texte.
Notre groupe a formulé et soutenu un certain nombre de propositions, portant sur l’assouplissement de la loi SRU, l’inclusion sociale des personnes handicapées, la qualité de l’air intérieur, l’harmonisation du droit, la précarité énergétique ou encore le développement des énergies renouvelables. Nous sommes restés fermes sur les décisions touchant directement aux pouvoirs du maire en matière d’urbanisme et de logement.
Le Sénat a contribué à renforcer la place des élus locaux dans les grandes décisions concernant leur territoire.
Dans l’ensemble, le texte répond à nos attentes, même si je partage le regret exprimé, voilà quelques instants, par Jean-Pierre Leleux et Sonia de la Provôté à propos des avis des architectes des Bâtiments de France.
Si la politique n’est que le bon sens appliqué aux grandes choses, il me semble que l’esprit de cette loi de simplification en matière de logement est de l’ordre du bon sens ; nous la voterons. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Indépendants – République et Territoires, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Rémy Pointereau, pour explication de vote.
M. Rémy Pointereau. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais remercier, très sincèrement, les rapporteurs pour avis, la rapporteur, Dominique Estrosi Sassone, ainsi que les membres de la commission des affaires économiques, tout particulièrement sa présidente, Sophie Primas, de leur remarquable travail, qui a permis d’enrichir le projet de loi ÉLAN. Je pense notamment à l’article 54, qui reprend une grande partie des dispositions de la proposition de loi portant Pacte national pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, que nous avions présentée, avec mon collègue Martial Bourquin, et qui a été adoptée ici, au Sénat, à l’unanimité.
Je souhaite bien sûr qu’en CMP le texte issu de nos travaux soit examiné avec bienveillance et objectivité par nos collègues de l’Assemblée nationale et sous l’œil avisé et vigilant de M. le ministre Jacques Mézard, que je remercie de son écoute attentive. Il sait pertinemment le travail sérieux que nous menons dans cette assemblée. Lundi matin, vous nous disiez encore, monsieur le ministre, que, si vous siégiez toujours dans cet hémicycle, vous tiendriez un discours identique au nôtre et, en tant que sénateur, ne vous départiriez pas de cette volonté d’améliorer les textes proposés par le Gouvernement.
J’en appelle aux 288 sénateurs et sénatrices qui ont voté la proposition de loi portant Pacte national pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs : s’ils veulent que ce texte prospère à l’Assemblée nationale, qu’ils votent le présent projet de loi. C’est une question de cohérence, tout simplement ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à Mme la présidente de la commission.
Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques. Nous y sommes ! Depuis lundi 16 juillet, nous avons siégé soixante-quatre heures dans cet hémicycle et nous avons examiné 1 156 amendements, dont 188 ont été adoptés, auxquels s’ajoutent les 440 amendements déjà adoptés en commission. Le Sénat a donc fait son œuvre dans l’élaboration de cette loi, qui est importante pour nos concitoyens.
Nous avons travaillé dans une ambiance extérieure pour le moins particulière – je pense ne choquer personne en disant cela –, ce qui n’a pas empêché notre assemblée de faire son devoir, d’assumer ses responsabilités, dans le respect des différents groupes politiques et, bien sûr, du Gouvernement. Ce travail a mobilisé un grand nombre de personnes, sans se limiter d’ailleurs à la sphère politique, puisqu’il a été fait appel aussi à la sphère civile.
Désormais, une nouvelle étape s’ouvre. Nous avons tout l’été pour continuer à échanger avec nos collègues de l’Assemblée nationale pour trouver les voies et moyens de la sagesse permettant de déboucher sur une CMP conclusive, ce qui, je n’en doute pas, cher collègue Dallier, favorisera un débat budgétaire clair.
Nos préoccupations dans cet hémicycle, vous le savez, sont celles des élus locaux. Si nous les avons repositionnés au centre des décisions, c’est pour qu’ils ne perdent pas ce qui fait leur essence même, à savoir la capacité à dessiner et inventer les communes pour les générations futures. Les priver de cette compétence les ferait définitivement disparaître et, en les faisant disparaître, nous ferions disparaître, naturellement, les communes.
Nos préoccupations sont aussi, bien sûr, celles de nos concitoyens. Pour eux, nous avons souhaité accompagner et parfois renforcer certaines dispositions en vue de desserrer les contraintes et d’améliorer les capacités à construire plus vite et mieux, y compris du logement social.
Nous pensons que les modifications apportées à la loi SRU sont loin d’être caricaturales. Elles sont également loin des attentes, exprimées parfois violemment, des élus locaux. Néanmoins, il s’agit de dispositions pragmatiques : elles reconnaissent les difficultés des élus locaux, elles visent à leur redonner confiance et à prendre en compte les nouvelles organisations territoriales et la répartition des compétences votées postérieurement à l’adoption de la loi SRU.
Cela étant, je le dis en présence du préfet Morvan, je regrette que nous n’ayons pu mettre en place l’agence nationale de la cohésion des territoires. Là aussi, le travail est devant nous, et nous prendrons toute notre part dans cette œuvre utile à nos territoires.
Au nom de tous, je voudrais remercier Dominique Estrosi Sassone, qui a réalisé un travail, à la fois quantitatif et qualitatif, exceptionnel. (Applaudissements sur la plupart des travées.) Nous connaissons ses talents. À titre personnel, j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler avec elle durant ces quelques mois.
Mes chers collègues, je vous remercie tous de votre présence. Ce texte a probablement été celui qui, dans la période récente, nous a le plus mobilisés, le plus longtemps, y compris jusqu’à des heures tardives.
Je remercie les rapporteurs pour avis – Patrick Chaize, Jean-Pierre Leleux, Marc-Philippe Daubresse – et nos collègues de tous les groupes politiques qui s’impliquent depuis plusieurs mois sur ce texte : Philippe Dallier, Valérie Létard, Marie-Noëlle Lienemann, Marc Daunis et tous les autres.
Mes remerciements vont également aux auteurs des propositions de loi que nous avons intégrées dans le présent texte : Michel Vaspart, Rémy Pointereau, Martial Bourquin, Jacques Genest, Patrick Chaize, François Calvet et Marc Daunis.
Je remercie le ministre Jacques Mézard et le secrétaire d’État Julien Denormandie. Les échanges que nous avons eus avec eux ont été extrêmement appréciés par tous. Certes, nous n’avons pas toujours été d’accord – nous avons su nous le dire –, mais, quand nous sommes tombés d’accord, ce fut plutôt sympathique. Comme je l’ai indiqué, le travail est devant nous et, dans ce cadre, j’espère que nous saurons faire perdurer cette qualité de relation et de travail.
J’en profite pour remercier les équipes des ministres. Nous avons eu avec elles des relations très constructives.
Vous ne m’en voudrez pas d’adresser également des remerciements à l’ensemble des collaborateurs de la commission des affaires économiques, ainsi que des autres commissions sollicitées, qui ont réalisé un travail absolument gigantesque. (Applaudissements.)
Je terminerai en remerciant tous les présidents qui se sont succédé au plateau et qui ont permis l’examen serein de ce texte. (Applaudissements sur la plupart des travées.)
M. le président. Ayant présidé une vingtaine d’heures de débat sur ce projet de loi, je voudrais adresser mes remerciements aux services de la Séance. Ces services sont rarement mentionnés. Pourtant, sur des textes de cette nature, ils abattent un travail absolument phénoménal, un travail de « chirurgien », qui nous apporte des éclairages bienvenus. (Applaudissements.)
Personne ne demande plus la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté.) (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jacques Mézard, ministre. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom du secrétaire d’État Julien Denormandie, en mon nom personnel et au nom de l’ensemble du Gouvernement, je tiens à vous adresser nos remerciements pour la qualité du travail réalisé, une fois de plus, dans la sérénité. Cela a été rappelé par Mme la présidente de la commission des affaires économiques, en dépit des sujets qui étaient soulevés à l’extérieur et qui, très logiquement, sont parvenus jusqu’ici, le Sénat a continué à travailler de façon efficace.
Le Sénat a avancé des propositions, dont certaines ont reçu des avis favorables du Gouvernement. Je signale que, même si nous avons porté devant la Haute Assemblée quelques amendements de suppression, beaucoup des propositions incluses dans le texte de la commission ont été acceptées par le Gouvernement.
Une fois de plus, la Haute Assemblée a montré sa capacité à proposer – je n’en doutais pas. Une fois de plus, nous avons pu constater le travail réalisé sur toutes les travées. J’ai d’ailleurs noté que des amendements émanant des sept groupes du Sénat ont été adoptés. Je m’en réjouis, comme je m’étais réjoui, à l’Assemblée nationale, de l’adoption d’amendements émanant de tous les groupes. C’est la preuve de l’intérêt du débat démocratique et parlementaire. Je ne dirai jamais autre chose, quelles que soient les circonstances. (Applaudissements sur la plupart des travées.)
Je remercie tout particulièrement la présidente de la commission des affaires économiques pour le travail totalement confiant et transparent qu’elle a mené dans le respect des sensibilités des uns et des autres.
Je voudrais remercier la rapporteur pour le travail considérable qu’elle a effectué et saluer sa grande compétence sur le sujet.
Enfin, je tiens à tous vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs.
Il y aura une CMP. Nous souhaitons, avec le secrétaire d’État, qu’elle aboutisse. Bien sûr, cela dépend du Gouvernement, mais cela dépend aussi du Sénat, car, pour parvenir à une CMP conclusive, il faut que chacun fasse des efforts.
Encore une fois, merci pour ce travail et la qualité des débats ! (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, du groupe La République En Marche, du groupe socialiste et républicain, du groupe Les Indépendants – République et Territoires, du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante, est reprise à dix-huit heures cinq.)
M. le président. La séance est reprise.
3
Services de paiement dans le marché intérieur
Adoption définitive en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur (projet n° 644, texte de la commission n° 672, rapport n° 671).
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances. Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureuse d’être de nouveau devant vous pour débattre de ce projet de loi qui a pour objet de ratifier l’ordonnance du 9 août 2017 portant transposition de la directive concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite « services de paiement 2 », ou « DSP 2 ». Cette directive procède à la mise à jour de la DSP 1. Deux grandes avancées sont attendues : favoriser l’innovation dans le cadre de nouveaux services et asseoir la confiance du marché grâce à un cadre assurant la sécurité des paiements.
En matière d’innovation, la directive permet l’entrée de nouveaux acteurs, tout en préservant la sécurité du consommateur. Ces nouveaux acteurs sont les agrégateurs de comptes – ils offrent un nouveau service de visualisation dans un lieu, au travers d’un support unifié, de l’ensemble des informations financières des particuliers – et les initiateurs de paiement, qui permettent de faciliter les virements pour les usagers, en particulier pour les achats en ligne. Nous pensons que ces nouveaux services apportent une réelle valeur ajoutée au financement de l’économie et à l’innovation financière.
Pour ce qui concerne la sécurisation, la directive améliore les droits du consommateur, puisque les franchises en cas de perte ou de vol d’une carte de paiement sont ramenées de 150 euros à 50 euros. La directive renforce également le droit à l’information dont bénéficie le consommateur. Il est ainsi plus clairement informé du prix des prestations de paiement, des facultés de résiliation contractuelle ainsi que des voies de recours.
La directive constitue en outre un véritable progrès en matière de renforcement des normes de sécurité d’accès aux données des comptes de paiement des utilisateurs. Le mécanisme dit d’« authentification forte » est généralisé pour toutes les opérations de paiement en ligne au-dessus d’un seuil de 30 euros.
Enfin, la directive renforce les conditions d’agrément et de la supervision des établissements de paiement, en particulier en développant les pouvoirs des superviseurs des pays dans lesquels des établissements exercent librement leurs services.
Le Gouvernement a souhaité, au travers de ce projet de loi de ratification, compléter le dispositif défini dans l’ordonnance sur trois principaux points.
Le premier concerne l’accompagnement de la pratique dite du « cashback », c’est-à-dire du rendu d’espèces complémentaires à la demande du client lors d’un achat. Ce service existe chez la plupart de nos voisins. La directive Services de paiement 2 prévoit uniquement que ce service peut être fourni sans être soumis aux règles prévalant pour les services de paiement. Elle laisse de fait aux États le soin d’en définir les modalités pratiques d’exercice. Grâce à ces dispositions, que je vous remercie d’avoir adoptées en première lecture, les commerçants pourront proposer un nouveau service à leurs clients, qu’ils pourront facturer s’ils le souhaitent.
Le deuxième point résulte d’un amendement que vous avez adopté et dont l’objet est de clarifier la rédaction du code monétaire et financier pour que la loi étende explicitement le bénéfice de la garantie des dépôts aux sommes déposées par les sociétés de financement, les établissements de paiement et les établissements de monnaie électronique, lorsque ces sommes ne sont pas déposées en leur nom et pour leur compte propre. Je tiens à préciser que, en aucun cas, cet amendement n’a pour effet d’assujettir les sociétés de financement, les établissements de paiement et les établissements de monnaie électronique au mécanisme de garantie des dépôts ; il vise uniquement à protéger leurs clients lorsque des sommes sont déposées pour leur compte.
Le troisième point est l’accélération de la sécurisation des conditions d’exercice de l’activité des nouveaux acteurs du numérique.
La directive renvoie à une norme technique réglementaire de l’Autorité bancaire européenne les modalités informatiques d’accès aux comptes de paiement par ces nouveaux acteurs. Cette norme technique prévoit que les banques développent des interfaces de communication sécurisées, appelées API. Elle doit entrer en vigueur dix-huit mois après son adoption, soit en septembre 2019.
Nous vous avons donc proposé d’anticiper cette entrée en vigueur, afin de sécuriser au plus vite l’usage de ces données particulièrement sensibles pour les consommateurs. Après avoir été testée, l’API sera rendue obligatoire si elle satisfait aux exigences de performance et de qualité définies par la norme technique et si elle assure que les nouveaux acteurs tiers pourront continuer d’exercer leur activité.
Monsieur le rapporteur, vous avez toutefois appelé à raison notre attention sur la sécurisation des données qui ne sont pas issues de comptes de paiement, notamment les données de comptes d’épargne, et qui sont également utilisées par les agrégateurs de comptes et initiateurs de paiement.
Le Gouvernement partage la volonté de soutenir les acteurs innovants tout en maîtrisant les risques attachés à leur activité pour ce qui excède le champ de la directive DSP 2.
Je rappelle au préalable que les virements ne sont possibles, en théorie, qu’à partir d’un compte de paiement. Ils ne sont en aucun cas autorisés depuis un compte d’épargne vers des bénéficiaires tiers, y compris pour le livret A.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur de la commission des finances. Ça, c’est la théorie !
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. En ce qui concerne le risque lié au maniement et à la divulgation d’informations sur les comptes d’épargne, si nous partageons cette finalité d’une sécurisation accrue du recours à ces données, après examen – je m’y étais engagée lors de la première lecture –, nous ne sommes pas convaincus par le dispositif qui avait été proposé par votre commission des finances.
L’introduction d’une obligation d’assurance et d’une obligation d’enregistrement auprès de l’ACPR, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, serait susceptible d’induire en erreur l’usager, celui-ci pouvant s’estimer protégé par l’existence d’une assurance, alors que certains risques inhérents à la pratique du web scraping demeureraient identiques. En outre, des mesures ad hoc propres au droit national pourraient être considérées comme imposant une contrainte qui n’existe pas dans d’autres États membres, ce qui pourrait brouiller le message d’attractivité et de lutte contre la surtransposition que nous portons par ailleurs.
Nous avons donc travaillé à une approche alternative, fondée sur les dispositions du règlement général sur la protection des données, le RGPD, qui prévoit un régime de responsabilité pour tout responsable de traitement de données que sont les prestataires de services de paiement. Ce règlement prévoit des obligations de sécurisation des données personnelles à la charge des responsables de traitement, assorties d’importantes sanctions en cas de violation et d’un droit de l’usager à réparation en cas de violation de ces règles.
Les échanges parlementaires autour de ce projet de loi m’ont convaincue de l’opportunité d’inviter la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la CNIL, à travailler étroitement avec la Banque de France, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ainsi que l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information, l’ANSSI, afin de clarifier, au regard du RGPD, les modalités adéquates et sûres d’accès aux données financières des usagers.
Je vous informe que nous saisissons cette semaine ces autorités afin de les inviter à émettre des recommandations permettant d’apporter un niveau de sécurité optimale dans l’accès aux comptes autres que les comptes de paiement.
Je rappelle que nous avons en parallèle saisi la Commission européenne pour l’inviter à établir un cadre juridique unifié au niveau européen sécurisant l’utilisation de l’ensemble des données financières individuelles, incluant les données issues de comptes d’épargne.
Enfin, je viens de saisir l’Inspection générale des finances d’une mission visant à élaborer des propositions pour cartographier de manière plus précise les risques suscités par ces nouveaux services et alimenter ces travaux au niveau européen.
Cette approche permettra d’offrir un cadre à la fois sécurisé pour les consommateurs, et proportionné juridiquement, pour le développement des services d’information sur les comptes.
Je tiens à vous remercier, mesdames, messieurs les sénateurs, et vous, en particulier, monsieur le rapporteur, du dialogue qui s’est instauré pour trouver ces voies de progrès.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur général de la commission des finances, rapporteur. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous abordons la nouvelle lecture du projet de loi visant à ratifier l’ordonnance du 9 août 2017, laquelle porte elle-même transposition de la directive du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, communément appelée DSP 2.
Je le dis d’emblée : nous n’avons aucun désaccord fondamental sur ce texte, madame la secrétaire d’État. Cette directive est utile, car elle améliore le marché intérieur des paiements, prend en compte les très nombreuses évolutions qui sont intervenues depuis la directive DSP 1 en 2017. En particulier, elle tient compte du formidable essor des fintech, en encadrant l’activité des agrégateurs de comptes et des initiateurs de paiement.
L’ordonnance prévoit une transposition globalement fidèle de la directive et fait bon usage des marges de manœuvre laissées aux États membres. Pour toutes ces raisons, nous souscrivons pleinement à sa ratification. L’article 1er qui y procède figurait d’ailleurs parmi les trois articles adoptés conformes dès la première lecture.
Le Sénat avait adopté treize amendements au texte voté par l’Assemblée nationale, majoritairement des mesures de correction, de coordination et d’amélioration. Nous avions par ailleurs soutenu, moyennant quelques aménagements, les deux articles additionnels 1er bis et 1er ter insérés par l’Assemblée nationale, ayant notamment pour objet d’introduire en France la pratique du cashback – pardonnez-moi tous ces anglicismes –, qui permet à un commerçant de fournir des espèces à l’occasion d’une opération d’achat. Cette disposition peut être utile, notamment en zone rurale où les distributeurs de billets sont parfois inexistants.
Cela ne peut donc nous être contesté : le Sénat s’est pleinement inscrit dans une démarche positive. Pour autant, la commission mixte paritaire a échoué le 19 avril dernier, en raison d’un article additionnel – l’article 1er ter A – introduit par notre commission des finances et visant à apporter une réponse concrète au problème des comptes non couverts par la directive. Je rappellerai brièvement l’enjeu de cet article.
Dans le cadre de la DSP 2, les agrégateurs de comptes et des initiateurs de paiement doivent s’enregistrer ou obtenir un agrément auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution et sont tenus de communiquer avec le gestionnaire de compte par le biais d’un canal de communication sécurisé et standardisé. Surtout, en cas de fraude ou de fuite des données, l’utilisateur peut être indemnisé immédiatement par sa banque, laquelle peut ensuite « se retourner » vers le prestataire tiers, qui doit souscrire une assurance pour garantir le remboursement. Cette obligation d’assurance est cruciale, dès lors que le capital minimum exigé n’est que de 50 000 euros. Il est aisément imaginable que, en cas de problème majeur, le capital social risque d’être insuffisant pour rembourser un grand nombre de consommateurs victimes de fraude.
La directive et, donc, l’ordonnance qui la transpose en droit français ont une limite majeure : elles ne concernent que les comptes de paiement, soit les « comptes courants », alors que les services actuellement offerts aux utilisateurs portent sur tous les comptes et produits d’épargne, sur lesquels doit porter l’essentiel de la rémunération des opérateurs. En cas de fraude ou de fuite de données sur ces comptes, l’utilisateur pourrait ainsi difficilement être indemnisé : d’une part, la banque pourrait considérer qu’elle n’y est pas tenue, puisque le consommateur a fourni ses identifiants à un tiers et, d’autre part, la fintech qui verrait sa responsabilité engagée n’aurait pas nécessairement les moyens d’y procéder, faute d’assurance obligatoire et de fonds propres suffisants.
Dans l’attente d’une solution européenne, le Sénat, vous y avez fait allusion, madame la secrétaire d’État, avait adopté un dispositif assurantiel permettant de protéger les utilisateurs : ceux-ci avaient au moins la garantie d’obtenir une indemnisation auprès du prestataire tiers, qui devait, à cette fin, souscrire une assurance complémentaire. En nouvelle lecture, l’Assemblée nationale a choisi de supprimer ce dispositif sur le fondement de trois arguments que je ne partage pas totalement.
Tout d’abord, nous ne proposons pas une surtransposition de la directive. Nous n’utilisons pas les marges de manœuvre laissées par ce texte pour imposer des exigences réglementaires plus strictes, allant au-delà du minimum requis par la norme européenne. Notre dispositif vise à encadrer une activité qui se situe hors du champ de la directive.
Par ailleurs, au-delà de la question de la surtransposition, le dispositif pourrait, selon les députés et le Gouvernement, entraîner des effets pervers et se heurterait à des difficultés d’application. Sur ce point, j’admets bien volontiers qu’une solution européenne serait préférable à une solution nationale transitoire, nécessairement imparfaite et susceptible de poser des problèmes de concurrence sur un marché aussi intégré que celui des services de paiement. Néanmoins, il me paraît difficile d’attendre une nouvelle directive sans rien faire, compte tenu des enjeux importants pour le consommateur. Il existe d’ailleurs des précédents, à l’exemple de la loi Sapin II du 9 décembre 2016, qui a protégé les épargnants en interdisant la publicité pour les produits financiers « toxiques », ces produits qui permettaient de gagner beaucoup d’argent en un jour, mais aussi de perdre tout en une minute ! Le législateur avait anticipé la directive.
Toute solution nationale transitoire étant par nature imparfaite, elle doit être évaluée pour déterminer si les inconvénients induits par son adoption excèdent les bénéfices attendus en termes de protection des consommateurs.
Ensuite, toujours selon les députés et le Gouvernement, le dispositif porté par le Sénat engendrerait des distorsions de concurrence au détriment des acteurs français.
En réalité, cette obligation d’assurance pourrait être appliquée aux prestataires étrangers au titre de leur activité en France si elle est déclarée « d’ordre public », même si la société a son siège social hors de l’Hexagone. Cela exige qu’elle réponde à des objectifs d’intérêt général au sens du droit européen, ce qui me semble manifestement être le cas.
Enfin, on nous oppose le fait que cette obligation d’assurance conduirait à donner aux utilisateurs un « faux sentiment de sécurité ».
M. Julien Bargeton. C’est un risque !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Il existe effectivement un risque que les prestataires tiers décident de s’assurer auprès d’entreprises installées dans des pays peu regardants sur le plan prudentiel. Il s’agit toutefois d’une difficulté commune à toutes les obligations d’assurance. C’est au régulateur européen des assurances d’intervenir si une société n’est pas sérieuse.
Quel que soit son sort final, notre dispositif a eu le mérite d’inciter le Gouvernement à se saisir de sujets ne figurant pas dans le texte initial. Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de l’écoute dont vous avez fait preuve à plusieurs reprises à notre égard. Vous avez déjà évolué sur un certain nombre de points que vous avez rappelés à l’instant.
Premièrement, devant le Sénat, vous aviez annoncé le lancement d’une « mission de réflexion pour formuler des propositions adéquates à porter auprès de nos partenaires européens et de la Commission européenne » et susceptible, « le cas échéant, [de] conduire à formuler toute mesure transitoire pertinente à adopter au niveau national ». Vous venez de confirmer le lancement de la mission.
Deuxièmement, devant l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, vous avez annoncé que la Commission européenne avait été saisie pour « établir un cadre juridique unifié au niveau européen sécurisant l’utilisation de l’ensemble des données financières individuelles et incluant les données issues de comptes d’épargne ».
Enfin, troisièmement, vous avez indiqué devant l’Assemblée nationale que le Gouvernement saisirait la CNIL pour qu’elle édicte des « lignes directrices » relatives aux modalités d’accès aux comptes non couverts par la directive, en travaillant avec l’ANSSI, l’ACPR et la Banque de France – vous l’avez confirmé. Son travail pourrait se fonder sur le règlement général sur la protection des données.
Ces engagements constituent indéniablement un premier pas qui va dans la bonne direction, mais la solution proposée par le Gouvernement n’est pas non plus exempte d’imperfections.
Tout d’abord, comme l’a rappelé Philippe Dallier en commission, les lignes directrices de la CNIL n’ont pas de valeur contraignante. Surtout, l’informatique évolue à une telle vitesse que les directives en la matière, aussi précises soient-elles, ont du retard par rapport aux avancées technologiques.
M. Philippe Dallier. Exact !
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Ensuite, l’intervention de la CNIL ne résout pas le cœur du problème, à savoir le risque que les prestataires tiers se trouvent dans l’incapacité d’indemniser les utilisateurs en cas de piratage. Ces pratiques sont malheureusement fréquentes, y compris sur des sites très connus prétendant consacrer des milliards d’euros à la sécurité. L’exemple des GAFA montre bien qu’il ne s’agit pas d’un risque théorique. Or, là, il s’agit de l’épargne des Français. Les enjeux sont donc plus importants que le piratage de leur compte Facebook.
Le Gouvernement a donc évolué. Il a apporté des réponses à nos questions, même si elles sont insuffisantes et imparfaites. Nos efforts n’ont pas été vains, et l’échec de la commission mixte paritaire a eu pour effet d’inciter le Gouvernement à avancer.
Pourquoi n’avons-nous pas déposé aujourd’hui une motion tendant à opposer la question préalable ? Tout simplement, parce que nous sommes favorables sur le fond à la directive transposée. En outre, l’Assemblée nationale, en nouvelle lecture, a conservé la quasi-totalité de nos amendements.
La commission des finances a donc fait le choix d’adopter sans modification le texte issu de l’Assemblée nationale pour présenter en séance le rétablissement du dispositif assurantiel adopté à l’article 1er ter A. Nous souhaitons ainsi, avant que le Sénat ne prenne une position définitive, entendre le Gouvernement confirmer et préciser ses engagements. Je pourrais en effet vous faire en deux minutes la démonstration que l’on peut, depuis un compte d’épargne, transférer directement de l’argent, même si c’est interdit en théorie.
J’attends vos réponses, madame la secrétaire d’État, et vous remercie encore de votre écoute.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier.
M. Jean-Claude Requier. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, après les riches discussions sur le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dit ÉLAN, porté par le M. le ministre Jacques Mézard, nous revenons à des textes de taille plus modeste, avec une discussion plus restreinte.
L’échec de la commission mixte paritaire le 19 avril dernier nous conduit à cet examen en nouvelle lecture du projet de loi de transposition de la directive Services de paiement, qui porte le sobre acronyme de DSP 2.
L’ordonnance du 9 août 2017, qui a été ratifiée à l’article 1er du projet de loi, porte diverses modifications du code monétaire et financier. Comme je l’ai indiqué en première lecture, la précédente directive, dite « DSP 1 », avait déjà été complètement transposée, si bien que le travail de transposition était cette fois-ci plus limité. Ainsi, l’ordonnance ne comporte « que » 35 articles, alors que la nouvelle directive, dite « DSP 2, » en compte 117 ! Mais elle concerne tous les États membres, alors que la France est plus solidement armée juridiquement.
Cette ordonnance est entrée en vigueur le 13 janvier dernier, la veille de l’expiration du délai fixé. C’est donc une transposition dans les temps. À titre de comparaison, environ la moitié des États membres n’a pas encore pris de mesure de transposition. Cela montre encore une fois que la France respecte parfaitement ses obligations communautaires, ce dont je me félicite avec vous, madame la secrétaire d’État. Depuis 2009, nous sommes ainsi constamment restés sous le taux cible de déficit de transposition de 1 %.
Le groupe du RDSE souscrit aux mesures proposées par le texte, qu’il s’agisse du renouvellement du cadre juridique afin de préciser les conditions d’exercice des services de paiement – les PSIP et les PSIC – ou du renforcement de la sécurité des clients avec l’« authentification forte », pour n’en citer que quelques-unes.
Comme en première lecture, nous soutiendrons l’abaissement de 150 euros à 50 euros de la franchise payée par l’utilisateur en cas de paiements non autorisés à la suite d’un vol, d’une perte ou d’un détournement d’instrument de paiement. Il s’agit d’une mesure de réelle protection des consommateurs, a fortiori dans un domaine où l’asymétrie entre le client et le professionnel est particulièrement prononcée.
L’article 1er bis, également adopté conforme, encadre le cashback. Cette pratique – moi qui suis un rural, j’avoue l’avoir découverte en commission des finances –, encore peu répandue en France, pourrait se révéler utile à condition d’être correctement encadrée pour éviter les abus, en particulier dans les zones rurales où les distributeurs automatiques d’espèces sont plus rares et plus éloignés. Cela pose, au passage, une vraie question en termes d’aménagement du territoire et de développement économique.
Le point de désaccord entre nos deux assemblées demeure l’article 1er ter A, introduit par notre commission des finances en première lecture, supprimé par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, et que le rapporteur soumet de nouveau à notre vote.
Comme cela a été expliqué, cet article prévoit l’engagement de la responsabilité des prestataires et établissements initiateurs d’ordres de paiement, ainsi que des agrégateurs de données de comptes de placement en cas d’opération non autorisée, d’accès non autorisé ou frauduleux à ces données ou d’utilisation non autorisée ou frauduleuse de ces données. Bien qu’elle sorte du champ de la directive, cette mesure vise également à protéger les consommateurs face à des technologies qui se développent très rapidement, ce qui me semble encore une fois indispensable.
Bien sûr, il existe un risque de surtransposition à laquelle nous sommes par essence hostiles. Toutefois, ce n’est pas un sujet anodin, puisqu’il s’agit de l’épargne des Français. C’est pourquoi je suis, à titre personnel, favorable à l’amendement du rapporteur, même si j’entends les arguments du Gouvernement et que je reconnais qu’un accord au niveau européen aurait été préférable. La directive DSP 2 date déjà de 2015. Il apparaît difficile d’attendre une nouvelle directive, alors que les technologies évoluent rapidement dans ce domaine, comme cela a été indiqué.
En conclusion, et compte tenu du haut niveau de technicité de ce débat, j’indique que les membres du groupe du RDSE, dans leur entière liberté de vote, se partageront entre un soutien à l’amendement du rapporteur et un soutien à la position du Gouvernement. Mais tous sont favorables à ce texte.
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton.
M. Julien Bargeton. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, nous examinons aujourd’hui en nouvelle lecture le projet de loi de ratification de l’ordonnance du 9 août 2017, transposant la directive dite « DSP 2 » relative aux services de paiement dans le marché intérieur.
Cette directive a fait l’objet d’une transposition rapide de la part de la France. Notre pays a fait ce choix utilement, parce qu’il s’agit, à travers ce texte, d’atteindre plusieurs objectifs : favoriser l’innovation et, ainsi, faire de la place de Paris l’un des leaders mondiaux – nous y tenons, dans le contexte du Brexit –, assurer la protection des consommateurs et garantir la sécurité de leurs données.
La directive a été complétée par un amendement du Gouvernement, pour permettre le développement du cashback. Je souligne une nouvelle fois cette avancée pour les Français, non seulement pour ceux de nos concitoyens qui vivent en milieu rural, où il n’y a pas toujours de distributeur automatique, mais aussi pour les commerçants, comme nouveau service et comme moyen de gestion plus efficace de leurs encours en caisse.
Principalement, la directive encadre et réglemente deux secteurs d’activité en plein essor.
Le premier est celui des services d’initiation de paiement, intermédiaires traitant la demande d’un détenteur d’un compte de paiement, dont l’activité fluidifie la réalisation des virements.
Le second secteur est celui des agrégateurs d’informations, qui fournissent aux particuliers ou aux entreprises une vision globale de leurs finances, sur l’ensemble des comptes qu’ils détiennent dans une ou plusieurs banques, et qui conseillent l’utilisateur dans sa gestion en proposant de nouvelles offres. On compte déjà 4 millions d’utilisateurs de ce service en France et 15 millions en Europe.
À mon sens, ces types d’entreprises sont utiles pour les Français, pour leur simplifier la vie et accompagner au mieux la gestion de leurs comptes et de leurs placements. Notre pays en a besoin. C’est donc avec satisfaction que notre groupe a pris connaissance des avis par lesquels les rapporteurs de la commission des affaires européennes et de la commission des finances relèvent qu’il n’y a pas de surtransposition.
Cela étant, non-surtransposition ne veut pas dire sécurité au rabais : la directive crée des garanties fortes pour les usagers, notamment en renforçant les pouvoirs des superviseurs, comme l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
La directive renforce également la supervision transfrontalière des établissements de paiement et prévoit un mécanisme d’échange d’informations entre les autorités de supervision. Elle renforce aussi la sécurité des transactions ; l’accès des comptes de paiement devra s’effectuer à travers un système qui combine plusieurs facteurs d’authentification.
En outre, la directive apporte une réponse fiable à la question de l’accès aux données par ces nouveaux prestataires. Il s’agit là d’un sujet clef. Actuellement, ces entreprises utilisent la technique du web scraping – partons pour ce bon français ! –, qui consiste à extraire de manière automatique les données du web. Grâce aux identifiants de leurs clients, ces prestataires récupèrent ainsi quantité d’informations, ce qui pose des difficultés de sécurité juridique.
La directive élève en conséquence les standards de sécurité, en prévoyant que les prestataires tiers s’identifient auprès des banques. Ces derniers ne pourront donc plus utiliser les identifiants de leurs clients.
En première lecture, la commission des finances, sur l’initiative du rapporteur, a souhaité renforcer les garanties de sécurité de ces nouvelles activités. Notre assemblée a ainsi adopté un article additionnel qui met en place l’obligation d’assurance. C’est sur ce point, vous le savez, que la commission mixte paritaire a échoué le 19 avril dernier.
L’article additionnel est repris aujourd’hui dans un amendement, dont les dispositions comprennent, notamment, cette fameuse obligation d’assurance ; les autres possibilités prévues existent déjà aujourd’hui.
Toutefois, pour le dire aussi délicatement que possible, les dispositions de cet amendement ne réduisent pas les risques auxquels ses auteurs prétendent répondre : l’obligation d’assurance n’apporte rien à la sécurité des transactions elle-même. En revanche, le fait que cette proposition ne soit pas opérationnelle ne dispense pas de mesures complémentaires.
Madame la secrétaire d’État, j’ai, moi aussi, noté vos engagements, notamment quant au rôle que pourrait jouer la CNIL. Certes, nous le savons, c’est à l’échelle européenne que cette question pourra être réglée ; néanmoins, l’engagement de saisine de la CNIL, laquelle présentera ses recommandations pour encadrer le secteur, est un pas utile pour répondre aux légitimes interrogations de M. le rapporteur. J’y insiste, la solution qu’il préconise ne permet pas d’y répondre parfaitement, mais, en tout cas, la question qu’il pose doit être réglée.
Chers collègues, il faut préserver un texte d’équilibre, entre la liberté d’innover pour les acteurs et les conditions de sécurité nécessaires à l’exercice de ces nouvelles activités. Sur l’ensemble de ces travées, je le crois, nous nous rassemblons sur ce point : il faut en terminer avec des surréglementations qui bloquent l’activité et empêchent nos entreprises de faire. Je suis même persuadé que c’est là une ritournelle que nous tous entendons souvent dans nos territoires.
Notre groupe suivra cette ligne d’équilibre, et, pour rester fidèles à nos engagements politiques de simplification, nous ne soutiendrons pas la surtransposition de la directive DSP 2. (M. Arnaud de Belenet applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le moins qu’on puisse dire, à l’heure où nous examinons en nouvelle lecture ce texte de transposition de directive européenne, c’est que la question de la sécurité des opérations financières est bel et bien au cœur de la discussion. C’est d’ailleurs le débat qui nous anime depuis le début de l’examen de ce projet de loi.
Nous avons bien étudié l’intéressant rapport de notre rapporteur, présentant les limites de la transposition et ce qu’on pourrait appeler, en l’espèce, les lignes de fuite du cadre juridique ainsi fixé. Sous certains aspects, nous sommes, avec ce qui procède de la législation française, dans une situation autrement plus valable et pertinente que dans celle découlant de l’imparfaite rédaction de la directive. Il convient de le noter, une fois encore.
Finalement, le rapporteur, prenant acte de la position unanime de la commission des finances du Sénat, a proposé de réintroduire dans le texte du projet de loi l’article 1er ter A, qui, à nos yeux, assure une meilleure sécurité des opérations. C’est une approche responsable, que nous approuvons : la transposition des textes européens dans le droit français, si tant est qu’elle soit la source d’une partie significative de notre travail parlementaire, est un exercice qu’il convient de justement mesurer.
Y a-t-il surtransposition d’une directive, comme certains le disent souvent, notamment depuis un peu plus d’un an, à la suite du changement de majorité qui a eu lieu au Palais-Bourbon ? Ou bien sommes-nous confrontés à un discours convenu, qui tente de nous faire accepter un recul de la qualité des lois et des cadres juridiques propres à notre pays ?
La question du débat européen doit donc, à nos yeux, être renouvelée à la lumière de l’expérience.
Il n’y a pas, de notre point de vue, de surtransposition de directive. Non, il y a, en bien des domaines, un droit français bien plus protecteur que le socle souvent fragile du droit européen ; un droit national dont nous devrions défendre, au regard de la position de nos partenaires, la spécificité et la qualité des garanties, plutôt que d’en rabattre sur le niveau d’exigence et de sécurité, notamment.
C’est ce débat qui compte, alors même que, bien souvent, on couvre l’Europe d’opprobre, en oubliant un peu rapidement qu’elle n’est rien d’autre que la construction politique découlant des majorités d’idées qui président au fonctionnement de ses instances, notamment de la Commission.
C’est d’ailleurs dans ce contexte, au-delà des considérations techniques propres au présent texte, que le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance, que nous allons examiner dans la suite de cette séance, comprend certaines dispositions concernant l’activité bancaire. Je pense, singulièrement, à la question de l’information des emprunteurs quant à la réalité du taux d’intérêt applicable et appliqué à leur prêt.
Vous me direz que tout cela est peut-être éloigné des considérations techniques du projet de loi ; mais avouez tout de même que s’interroger sur les services de paiement peut fort bien conduire à s’interroger sur l’accessibilité bancaire et sur ses limites, notamment parce que, en la matière, les directives européennes ne résolvent rien, et que nous avons encore beaucoup à faire et à inventer.
Si le droit au compte existe dans notre pays, force est de constater qu’il demeure très faiblement utilisé et que la réalité est plutôt celle de l’exclusion bancaire, sujet sur lequel, je dois le dire, nous attendons une initiative signifiante du Gouvernement. La remarque vaut également pour les frais bancaires, dont le moins qu’on puisse dire est qu’ils constituent, pour les établissements de crédit, une source quasi inépuisable de marges.
En l’état actuel du débat, nous n’avons donc aucun problème à ce que le présent texte ressemble à ce que nous propose M. le rapporteur.
Mes chers collègues, il nous paraissait utile d’apporter ces analyses rapides, du point de vue politique. Et, vous en conviendrez, je ne vous ai pas parlé cash ! (Sourires.)
M. Julien Bargeton. C’est vrai !
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros.
M. Bernard Delcros. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, par-delà son apparente technicité, le texte que nous examinons aujourd’hui est d’une grande importance. Au fond, il s’agit de protéger le consommateur, de sécuriser nos concitoyens dans de nouvelles pratiques dont on sait qu’elles ne cesseront de se développer, tout simplement parce qu’elles accompagnent les progrès technologiques, qui ne s’arrêteront pas.
Aujourd’hui, seulement 4 % des Français savent ce qu’est une fintech, alors que chaque semaine en France des millions d’euros sont échangés via des applications. Il est donc de notre responsabilité de législateur, non pas d’entraver ou de freiner ces pratiques, qui accompagnent l’innovation technologique, mais de les encadrer pour les sécuriser, afin de protéger les utilisateurs.
C’est par ces entreprises de type start-up, par leur dynamisme et leur capacité d’innovation, combinés à l’essor des nouvelles technologies et du paiement en ligne, que de nouveaux services sont apparus. Ce sont ces nouveaux services que vise la directive. Les précédents orateurs l’ont rappelé, ils sont de deux types : premièrement, les services d’agrégation d’informations, dont le principe est de permettre au consommateur disposant de plusieurs comptes bancaires de bénéficier d’une vision consolidée de l’ensemble de ses comptes tenus par différentes banques, via une interface unique ; deuxièmement, les services d’initiation de paiement, qui permettent au consommateur de demander à un intermédiaire de présenter et d’exécuter des opérations de paiement en son nom auprès de sa banque, à travers ces nouvelles applications bancaires.
Tels sont les acteurs et les services que vise cette directive, dite « DSP 2 », laquelle vient opportunément actualiser la première directive sur les services de paiement.
La première directive, ou DSP 1, avait amorcé le marché unique de paiement, avec l’uniformisation de la réglementation en matière de marché de paiement au sein de l’Union européenne. Elle avait ainsi contribué à la sécurisation des données et des transactions financières tout en permettant aux nouveaux acteurs de trouver une place aux côtés des acteurs bancaires traditionnels. Mais, nous le savons, l’essor du commerce en ligne et des innovations en matière de paiement nous oblige aujourd’hui à actualiser cette DSP et à créer le cadre d’une réelle concurrence entre ces nouveaux acteurs et les banques.
En France, 4 millions de consommateurs ont déjà eu recours à un agrégateur de comptes et 2,5 millions à un initiateur de paiement. Il est dès lors essentiel de sécuriser ces nouveaux services en leur offrant un cadre réglementaire dans lequel ils pourront se développer.
Ainsi, la directive donne un statut juridique aux activités de service d’initiation de paiement et d’information des comptes. En leur offrant ce statut, elle les définit, les reconnaît et surtout les encadre, ce qui permet in fine une meilleure protection des consommateurs.
Nous le savons, le développement technologique, éminemment dynamique, est une chance pour notre économie. Mais nous devons lui donner un cadre, qu’il convient d’adapter sans cesse pour tenir compte de son évolution très rapide. Le but est, toujours, de sécuriser les consommateurs.
Cette directive va dans le sens de l’amélioration du quotidien des utilisateurs. C’est pourquoi sa transposition, qui – je le rappelle à mon tour – était prévue par la loi Sapin II, procède du bon sens : on ne peut pas transiger avec la sécurité des consommateurs.
La commission mixte paritaire a échoué à la suite du refus de l’Assemblée nationale d’étendre l’obligation d’assurance à l’ensemble des services financiers concernés par les agrégateurs d’informations, et non simplement aux comptes de paiement. En résumé, si l’utilisateur dispose d’une application agrégeant l’ensemble de ses comptes et produits d’épargne, seuls ses comptes courants seraient demain assurés dans une limite, mentionnée par M. le rapporteur, de 50 000 euros. Or ce plafond, prévu par la directive, est extrêmement faible en cas de fraude massive.
Il existe donc une insuffisance juridique. Les livrets A, les contrats d’assurance, les comptes-titres ne seraient pas assurés dans la mesure où ils ne sont pas des comptes de paiement. Ce seraient ainsi 80 % des comptes agrégés qui sortiraient du champ de l’assurance prévue par la directive. C’est pourquoi, en commission des finances, nous avons adopté l’amendement présenté par notre rapporteur, Albéric de Montgolfier, visant à maintenir l’article 1er ter A, et donc à permettre l’indemnisation des utilisateurs en cas de fraude ou de fuite de données, quel que soit le produit financier concerné. Cet enjeu de sécurité nous paraît extrêmement important.
Pour conclure, permettez-moi, madame la secrétaire d’État, d’évoquer la proposition 16 du rapport CAP 2022, qui a été publié récemment et dont on a beaucoup parlé.
Ce rapport préconise la suppression progressive des paiements en espèces. Pouvez-vous nous indiquer si vous envisagez de donner suite à cette proposition ? Si elle était retenue, ne risque-t-on pas d’empiéter sur les libertés individuelles et, en définitive, de renforcer le contrôle que pourraient exercer les acteurs économiques que l’on souhaite par ailleurs réglementer ? (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste. – M. Arnaud de Belenet applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Rémi Féraud.
M. Rémi Féraud. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, chers collègues, ce projet de loi ratifie l’ordonnance de 2017, qui vise à transposer en droit français la directive européenne du 25 novembre 2015 dite « DSP 2 ». Les précédents orateurs en ont déjà rappelé les enjeux : rétablir l’équilibre entre la reconnaissance de nouveaux acteurs – les initiateurs de paiement et les agrégateurs d’informations – et les banques qui détiennent les fonds de leurs clients, tout en mettant en place des règles imposées à ces nouveaux acteurs.
Les initiateurs de paiement seront soumis au régime d’agrément des établissements de paiement et devront disposer d’un capital minimal de 50 000 euros.
Les agrégateurs de comptes seront, quant à eux, soumis à un régime plus souple d’enregistrement, sans contrainte en matière de capital minimal. En revanche, ils devront contracter une assurance de responsabilité civile professionnelle.
En outre, du point de vue de la protection des données des consommateurs, le projet de loi comprend plusieurs avancées : il limite le risque d’asymétrie réglementaire en alignant les normes de sécurité entre les pays européens ; il impose également ce qu’on appelle un standard technique d’« authentification forte », c’est-à-dire l’usage d’un mot de passe unique, généralement reçu par SMS, avant d’effectuer le paiement en ligne.
De plus, la technologie dite « API » permettra aux agrégateurs et aux initiateurs d’accéder aux comptes de paiement via une interface plus sécurisée. Ainsi, elle limitera les risques liés au web scraping.
La Commission européenne ayant pris du retard dans l’élaboration des règles techniques relatives aux API, celles-ci ne pourront être mises en œuvre qu’à la fin août 2019. Or, nous le savons, il s’agit d’un enjeu majeur de sécurité. Un amendement du Gouvernement, adopté en première lecture, permet d’anticiper en France la mise en place de normes techniques réglementaires en la matière : c’est une bonne chose.
Enfin, le projet de loi encadre le développement du cashback. Il est utile que cette pratique soit entérinée. Mais il est également nécessaire de l’encadrer strictement, pour éviter la fraude et le blanchiment d’argent. Le présent texte le permet.
La sécurité des paiements est donc l’élément central de cette directive. Que ce soit grâce à l’authentification forte pour les transactions en ligne ou grâce aux règles plus strictes encadrant les initiateurs et les agrégateurs, les consommateurs seront mieux protégés.
Pourtant, madame la secrétaire d’État, ce texte présente une lacune, à propos de laquelle nous vous avons alertée en première lecture, et qui a conduit à l’échec de la commission mixte paritaire.
Comme l’a rappelé M. le rapporteur, dans certaines situations, le consommateur courrait toujours le risque de se trouver seul responsable en cas de fraude sur des comptes non couverts par la directive. Il s’agit des comptes d’épargne et de crédit. Ces derniers sont totalement absents des dispositifs de protection des consommateurs inscrits dans la directive, lesquels se concentrent sur les seuls comptes de paiement.
Vous nous dites qu’il s’agit de suivre les recommandations émises et d’encourager la fintech. Pourtant, c’est souvent elle qui nous alerte sur le fait que 80 % des comptes agrégés sont des comptes d’épargne et de crédit ; c’est elle qui sollicite une réglementation plus étendue et adaptée, alors que les banques se montrent en général réticentes.
La commission mixte paritaire a échoué, là où elle aurait dû être l’occasion pour le Gouvernement de présenter la solution de substitution que vous vous étiez, ici même en première lecture, engagée à présenter.
Jusqu’à présent, vous en êtes restée à la version initiale du texte, avec comme seule boussole le refus de la surtransposition de la directive. Toutefois, il y a quelques instants, nous avons entendu les intentions que vous avez exprimées, pour que nous puissions avancer sur le sujet.
Rappelons quand même que, dans l’état actuel du texte présenté par le Gouvernement, en cas de fraude sur un compte d’épargne ou de crédit, le détenteur ne pourrait obtenir de remboursement ni auprès de sa banque ni auprès du prestataire.
Le groupe socialiste et républicain ne saurait se satisfaire d’une telle situation : il n’est pas raisonnable de s’en remettre à une éventuelle future directive qui prendrait en compte cette problématique, tant les délais nécessaires seraient longs, alors même que, nous le savons, les innovations dans le domaine financier sont, elles, très rapides.
En conséquence, nous approuverons l’amendement proposé par M. le rapporteur. Cet amendement tend à mieux protéger les consommateurs, ce qui nous paraît indispensable. Bien sûr, nous voterons le texte ainsi modifié, comme nous l’avons fait en première lecture : la transposition de cette directive est très importante pour notre pays. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret.
M. Claude Malhuret. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, en ratifiant l’ordonnance portant transposition de la directive européenne concernant les services de paiement dans le marché intérieur, nous ferons œuvre de modernisation de notre code monétaire et financier, en l’adaptant aux évolutions de l’industrie financière et, surtout, à la numérisation de l’économie.
Cette modification de notre droit est nécessaire à la fois pour l’activité des entreprises et pour la protection des consommateurs, la sécurité et la responsabilisation des acteurs financiers. C’est ce dernier point qui a fait échouer la commission mixte paritaire, de façon un peu étonnante étant donné la technicité de ce texte et son caractère de véhicule de transposition.
Nos collègues députés ont repoussé l’introduction d’un nouvel article 1er ter A par le Sénat, proposant d’instaurer un dispositif permettant de sécuriser les utilisateurs des agrégateurs de comptes pour les comptes autres que les comptes de paiement. En effet, le texte de la directive nous met face à une difficulté, cela a été dit : elle ne concerne que les comptes courants. Il s’agit d’une limite majeure, dans la mesure où les services offerts portent sur l’ensemble des comptes et produits d’épargne, comme le livret A et l’assurance vie. Aujourd’hui, 80 % des comptes agrégés ne seraient pas des comptes de paiement.
Face à ce flou juridique, notre responsabilité est de mieux protéger les consommateurs, et le dispositif proposé par le Sénat semble être un pis-aller pour ce faire. L’Assemblée nationale l’a jugé simpliste, mais, pour l’instant, elle n’a pas proposé de dispositif de substitution.
Quelle est la solution ? Laisser persister un flou juridique mettant en péril les épargnants jusqu’à l’adoption de la prochaine directive ? On sait que cela peut prendre des mois, voire des années. Or nous pouvons agir immédiatement, même avec un expédient qui pourra être affiné.
Cette difficulté, qui devrait être levée si les deux assemblées et le Gouvernement y mettent du leur, est bien la seule de ce texte : l’ordonnance prévoit une transposition globalement fidèle de la directive et fait bon usage des marges de manœuvre laissées aux États membres. Elle comporte trois dispositions essentielles, qui ont été rappelées.
Tout d’abord, elle pose les bases d’un droit d’accès aux comptes de paiement, en consacrant de nouveaux acteurs dans cette activité.
Ensuite, elle renforce les normes de sécurité des données, en rendant obligatoire l’authentification forte et en précisant les modes d’accès du client à son compte de paiement en ligne.
Enfin, elle consolide les droits des utilisateurs de services de paiement et améliore la supervision transfrontalière des établissements de paiement et des établissements de monnaie électronique.
Cette directive vise également à développer en France une pratique répandue en Europe, celle du cashback, c’est-à-dire la possibilité de retirer des espèces chez un commerçant au moment d’un paiement. Ce service était théoriquement applicable en France, mais, à défaut de cadre juridique prévoyant ses modalités d’application, il ne pouvait être mis en œuvre.
Ce texte constitue une nouvelle étape vers la création d’un marché unique numérique dans l’Union européenne. Il encouragera le développement de systèmes de paiement en ligne et mobiles innovants, ce qui stimulera l’économie et la croissance.
Il me semble que les difficultés soulevées par la commission mixte paritaire ne sont pas insurmontables. Elles nécessitent, pour être levées, une réflexion commune sur la question des agrégateurs de comptes. J’espère que nos débats permettront de faire émerger une solution. Dans le cas contraire, nous voterons pour la version du texte proposée par le Sénat.
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. Monsieur le président, madame le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant de parler du contenu de ce texte, il me semble nécessaire de revenir sur la procédure.
Madame le secrétaire d’État, sur la forme, notre groupe tient en effet à vous faire part de ses regrets de voir l’inscription aussi tardive à notre ordre du jour de ce projet de loi, en nouvelle lecture. Cela illustre, une nouvelle fois, la complète désorganisation de nos débats, du fait de la très mauvaise gestion de l’ordre du jour par le Gouvernement.
Dois-je vous rappeler que nous sommes le 25 juillet 2018, que ce texte a été déposé par le Gouvernement sur le bureau de l’Assemblée nationale le 7 novembre 2017, puis inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale le 8 février 2018 seulement, soit trois mois plus tard ? Le Sénat, lui, l’a examiné en séance publique dès le 22 mars. La commission mixte paritaire s’est tenue le 19 avril ; la nouvelle lecture n’a eu lieu à l’Assemblée nationale que le 5 juillet, et, aujourd’hui, 25 juillet, au Sénat.
Ainsi, la gestation de ce projet de loi, depuis son dépôt, aura pris quasiment neuf mois, alors même qu’il s’agit de transposer une directive de 2015… Ce n’est absolument pas sérieux vis-à-vis du Parlement européen et du Conseil !
J’exprime ce mécontentement au nom du groupe auquel j’appartiens, et tout particulièrement au nom de Jean-François Rapin, rapporteur pour la commission des affaires européennes, qui n’a pas pu adapter son agenda aux changements de dernière minute qu’a connus notre ordre du jour et qui aurait dû porter ce message.
Cette méthode est d’autant moins sérieuse que ce texte ne pose pas de réelles difficultés. Notre groupe avait rappelé, en première lecture, l’intérêt de ce projet de loi de ratification, qui va permettre la transposition en droit français de la directive européenne du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur, dite « DSP 2 ».
Cette seconde directive prend en compte les évolutions technologiques survenues depuis la directive DSP 1 de 2007, même si, depuis 2015, nous sommes peut-être déjà en retard. Elle prend notamment en compte l’émergence de nouveaux acteurs, tant pour l’initiation de paiement que pour l’information sur les comptes. L’enjeu va au-delà de la simple dématérialisation des services bancaires : désormais, des acteurs externes aux banques permettent aux utilisateurs de consulter sur un même site l’ensemble de leurs comptes détenus dans plusieurs établissements bancaires et de donner des ordres de paiement sans même passer par leur banque. En résultent de légitimes questions d’agrément de ces nouveaux acteurs et de sécurité des transactions.
En dix ans, une réglementation a été mise en place, plus allégée que pour les institutions bancaires traditionnelles, puisque ces nouveaux acteurs ne disposent pas de fonds. Ces agrégateurs de comptes et initiateurs de paiement demeurent néanmoins soumis au superviseur, l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui peut prendre des mesures conservatoires temporaires allant jusqu’à la suspension du service.
Ce texte apporte donc des garanties, pour les banques comme pour les utilisateurs, et va permettre le développement des nouveaux services de paiement dans un cadre mieux défini. C’est la raison pour laquelle le Sénat a adopté le projet de loi à l’unanimité en première lecture.
Toutefois, la commission mixte paritaire a échoué.
Nous constatons une fois encore que les initiatives du Sénat sont systématiquement censurées par la majorité de l’Assemblée nationale, même lorsqu’il s’agit de mesures de bon sens, adoptées très largement, voire à l’unanimité par la Haute Assemblée.
La commission mixte paritaire a échoué, car les députés n’ont pas souhaité retenir l’article 1er ter A inséré dans le texte par le Sénat. Les précédents orateurs l’ont déjà largement rappelé : cet article visait à permettre d’amorcer le débat sur la question des comptes d’épargne, qui ne sont pas concernés par la directive, étant donné que cette dernière se limite aux comptes de paiement. C’est pourtant une question essentielle, puisque l’utilisateur, souvent sans en avoir conscience, prend le risque de se retrouver seul responsable en cas de fraude sur les comptes non couverts par la directive. Dans une telle situation, il ne pourrait obtenir un remboursement ni auprès de sa banque, dans la mesure où il a donné à un tiers ses identifiants d’accès, ni auprès du prestataire tiers, qui ne serait de toute façon pas solvable, en l’absence d’assurance.
Dans l’attente d’une solution européenne sur la question des comptes d’épargne, cet article proposait donc de garantir la possibilité pour l’utilisateur d’obtenir un remboursement auprès du prestataire tiers, en affirmant la possibilité d’engager la responsabilité du prestataire tiers en cas de fraude, afin de rendre inopposables les clauses contractuelles contraires ; en introduisant une obligation d’assurance, afin de garantir la solvabilité du prestataire tiers ; et, enfin, en fixant une obligation d’immatriculation auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, afin de permettre un suivi de ces activités.
Notre rapporteur, Albéric de Montgolfier, dont je tiens à saluer la qualité du travail sur ce texte, a déposé un amendement pour insérer de nouveau cet article. Il est bel et bien nécessaire d’évoluer très rapidement sur ce point à l’échelle européenne. Notre groupe soutiendra cet amendement, et vos réponses, madame le secrétaire d’État, guideront notre vote sur l’ensemble du texte. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
projet de loi ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du parlement européen et du conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur
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Article 1er ter A
(Suppression maintenue)
M. le président. L’amendement n° 1, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Après l’article L. 522-7-1 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 522-7-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 522-7-2. - I. - Nonobstant toute clause contraire, les prestataires de services de paiement qui fournissent le service mentionné au 7° ou au 8° du II de l’article L. 314-1 et qui, à la demande de l’utilisateur, initient un ordre ou lui permettent d’accéder aux données concernant ses comptes sur livret, ses comptes à terme, ses comptes-titres, ses comptes sur lesquels sont inscrits des titres, avoirs ou dépôts au titre des produits d’épargne mentionnés au chapitre Ier du titre II du livre II, ses crédits mentionnés au titre Ier du livre III du code de la consommation ou ses bons, contrats de capitalisation ou placements de même nature souscrits auprès d’entreprises d’assurance peuvent voir leur responsabilité engagée à l’égard de l’utilisateur en cas d’opération non autorisée, d’accès non autorisé ou frauduleux à ces données ou d’utilisation non autorisée ou frauduleuse de ces données qui leur est imputable.
« II. - Les établissements de paiement, les établissements de monnaie électronique et les prestataires de services d’information sur les comptes mentionnés au I doivent disposer d’une assurance de responsabilité civile professionnelle ou d’une autre garantie comparable les couvrant contre l’engagement de leur responsabilité et être en mesure de justifier à tout moment de leur situation au regard de cette obligation.
« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de cette obligation, les critères permettant de déterminer le montant minimal de l’assurance de responsabilité civile professionnelle ainsi que les délais dans lesquels l’indemnisation doit intervenir.
« III. - Les prestataires et établissements mentionnés au II doivent être immatriculés sur un registre unique, qui est librement accessible au public et tenu par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
« Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’immatriculation sur ce registre et détermine les modalités de la tenue de ce dernier ainsi que les informations qui doivent être rendues publiques. »
La parole est à M. le rapporteur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Cet amendement est bien connu de chacun, notamment du Gouvernement, avec lequel nous en avons abondamment discuté.
Dans la discussion générale, les orateurs de tous les groupes ont parlé de la sécurité que l’on doit offrir aux utilisateurs de services d’épargne qui, ayant communiqué à des agrégateurs d’épargne les codes d’accès à leurs comptes, pourraient être victimes de fraudes, d’utilisations de leurs données ou, pis, de transferts de fonds.
Nous aurions souhaité, depuis la commission mixte paritaire, trouver une solution plus élaborée et plus sûre. Faute d’une telle solution, la commission des finances, après avoir unanimement appelé le Gouvernement à agir, m’a demandé de déposer à nouveau cet amendement, au moins à titre d’appel. Il a pour objet d’instaurer une obligation d’assurance pour les agrégateurs et initiateurs offrant des services sur des comptes et produits d’épargne non couverts par la directive DSP 2.
Sans doute d’autres solutions existent-elles. L’une, qui ne relève évidemment pas de la loi, mais du pouvoir réglementaire, consisterait à interdire les transferts directs d’un compte d’épargne vers un tiers, en appliquant strictement la réglementation en vigueur en théorie.
Lorsqu’on passe par un initiateur ou un agrégateur de paiement, on est protégé par l’agrément et l’obligation d’assurance. Le problème se pose pour les transferts directs d’un compte d’épargne vers un tiers, car, dans ce cas, aucune protection ne s’applique.
Si nous insistons beaucoup sur cette question, c’est parce que, s’agissant d’un livret d’épargne, à plus forte raison d’une assurance vie, les enjeux sont sans commune mesure avec ceux associés à un compte courant, sur lequel on a quelques milliers d’euros : ce sont des dizaines, voire des centaines de milliers d’euros qui pourraient être siphonnés à la suite d’un accès frauduleux aux comptes.
J’aimerais que le Gouvernement prenne sur cette question les engagements précis que nous attendons de lui.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Delphine Gény-Stephann, secrétaire d’État. Comme M. le rapporteur l’a souligné, le cœur du sujet est l’accès aux comptes d’épargne et ce que celui-ci permet.
En vertu de la législation actuelle, les virements ne sont, en théorie, pas possibles à partir d’un compte d’épargne ; ils ne le sont qu’à partir d’un compte de paiement. Dans le cadre de nos travaux et échanges, nous avons constaté des pratiques non conformes à cette législation. Je puis vous assurer, monsieur le rapporteur, que je veillerai à l’application de la législation.
Cette règle entre dans le champ du contrôle permanent de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, qui doit mettre en place les contrôles en la matière. Sur votre conseil, monsieur le rapporteur, ou du moins pour répondre à votre souci, j’écrirai spécifiquement à cette autorité pour appeler son attention sur le nécessaire respect de cette obligation par l’ensemble des établissements bancaires.
Nous avons eu des discussions également avec la Fédération bancaire française, qui a confirmé qu’elle était attachée à cette règle et qu’elle évoquerait le sujet avec ses membres.
Je le répète : il n’est pas question de laisser perdurer cette situation sur les comptes d’épargne, qui n’ont pas à être utilisés comme des comptes de paiement.
Il me semble, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, qu’au bénéfice de cette volonté de faire respecter la législation, vous devriez accepter de revoir votre position sur le rétablissement de l’article 1er ter A. En effet, nous sommes ennuyés par l’amendement n° 1, dont l’adoption ferait peser une nouvelle règle contraignante sur les fintech, et plutôt sur celles qui sont basées en France. Même si, en théorie, elle s’appliquera aussi aux acteurs étrangers, on sait bien que le contrôle de ces obligations d’assurance est extrêmement complexe.
Par ailleurs, le sénateur Féraud a affirmé qu’il n’y aurait pas de recours en cas de fraude. Si ! Il y a bien entendu la possibilité d’engager la responsabilité extracontractuelle de droit commun et, surtout, la possibilité nouvelle de le faire au titre des dispositions du RGPD imposant une sécurisation forte, puisque proportionnée à la sensibilité des données.
Cette obligation de sécurisation sera rendue encore plus efficace par la publication de lignes directrices que nous souhaitons et dont nous avons discuté avec la CNIL, qui s’est déclarée compétente en la matière.
Il y a donc bien une responsabilité qui est établie et renforcée par le RGPD, et une autorité va émettre des recommandations pour donner tout son poids à ce dispositif.
Subsidiairement, le sénateur Delcros a abordé la suppression des paiements en espèces, qui est l’une des mesures mentionnées dans le rapport CAP 2022. L’objectif de réduire l’utilisation du cash et de promouvoir les paiements dématérialisés, peu coûteux, ergonomiques et accessibles à tous, est de nature à améliorer les parcours client, à limiter la fraude et à améliorer la transmission de la politique monétaire. Nous y souscrivons donc.
Le ministère de l’action et des comptes publics a déjà entrepris plusieurs actions visant à promouvoir des solutions de paiement dématérialisées au sein des collectivités publiques, notamment en limitant les seuils de paiements en espèces. Le déploiement des paiements dématérialisés pour l’ensemble des achats doit aussi être facilité en élargissant l’acceptation des paiements de petits montants par carte, en faisant baisser les commissions supportées par les commerçants et en généralisant le paiement sans contact. C’est une action de sensibilisation que nous voulons poursuivre.
Enfin, la Commission européenne mène actuellement une étude pour apprécier les conséquences d’une suppression des pièces de 1 et 2 centimes pour l’économie européenne. Elle offrira un éclairage utile sur la question de la réduction des pièces. Évidemment, nous devons être attentifs au risque de hausse des prix que pourrait comporter une telle suppression.
Dans ces différentes orientations, il est moins question de supprimer complètement les espèces que d’assurer les conditions du développement des moyens de paiement dématérialisés et modernes.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur. Vous avez bien compris que Mme la secrétaire d’État appelle au retrait de l’amendement.
J’ai obtenu une partie des réponses à mes questions et un certain nombre d’engagements. L’Inspection générale des finances sera saisie cette semaine, si ce n’est déjà fait. La Commission européenne et la CNIL le seront également. C’est un élément de réponse par rapport à la sécurité.
La vraie sécurité, je suis d’accord, ce n’est pas l’obligation d’assurance, c’est de passer par un moyen de paiement sécurisé. Si très rapidement la Banque de France et l’ACPR font appliquer la réglementation, une partie du problème, celle qui concerne la fraude, sera très largement résolue, même si la question de l’accès aux données ne sera pas totalement réglée.
Vous avez expliqué, madame la secrétaire d’État, qu’on peut toujours engager la responsabilité de sa banque. Dans le cas d’une banque qui accepterait un virement externe interdit par la réglementation, je ne sais pas quelle serait la jurisprudence. Cela peut conduire à un débat intéressant. Reste qu’il est préférable de prévoir un système plus simple et plus sûr, qui permette de ne pas aller devant les tribunaux.
Mme la secrétaire d’État a pris des engagements dont nous vérifierons très rapidement le respect. Plusieurs rendez-vous sont devant nous : le projet de loi de finances pour 2019, mais aussi le plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises, ou PACTE, qui comporte des dispositions relatives à l’assurance.
L’examen du projet de loi PACTE, qui devrait intervenir assez rapidement, nous permettra de vérifier que les engagements de Mme la secrétaire d’État sont tenus et que le risque de fraude est écarté. Si je constate qu’il est toujours possible de faire des virements externes sans être protégé, je serai amené à proposer de nouveau une mesure de sécurisation des consommateurs.
Au bénéfice des engagements pris et compte tenu de l’échéance précise et prochaine du projet de loi PACTE, qui permettra une vérification, je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° 1 est retiré.
En conséquence, l’article 1er ter A demeure supprimé.
Article 1er ter
(Non modifié)
L’article 34 de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur est ainsi modifié :
1° A À la seconde phrase du III, le mot : « État » est remplacé par le mot : « état » ;
1° Au premier alinéa du VIII, après la première occurrence du mot : « article », sont insérés les mots : « et sans préjudice des dispositions du VIII bis » ;
2° Après le même VIII, il est inséré un VIII bis ainsi rédigé :
« VIII bis. – Jusqu’à dix-huit mois après l’entrée en vigueur de l’acte délégué adopté en vertu du 1 de l’article 98 de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 susvisée, un décret précise les conditions de cette entrée en vigueur et celles suivant lesquelles les prestataires de services de paiement fournissant le service d’initiation de paiement, d’une part, et les prestataires de services de paiement fournissant le service d’information sur les comptes, d’autre part, communiquent de manière sécurisée avec les utilisateurs de services de paiement et les prestataires de services de paiement gestionnaires de comptes, selon des modalités conformes aux dispositions relatives aux normes sécurisées de communication prévues par l’acte délégué susmentionné et permettant aux prestataires de services de paiement fournissant le service d’initiation de paiement et aux prestataires de services de paiement fournissant le service d’information sur les comptes de continuer à exercer leurs activités. » ;
3° Au premier alinéa du XI, les mots : « mentionnée au premier alinéa du VIII du présent article » sont remplacés par les mots : « définie par le décret mentionné au VIII bis du présent article et au plus tard dix-huit mois après l’entrée en vigueur de l’acte délégué adopté en vertu du 1 de l’article 98 de la directive (UE) 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 susvisée ».
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er ter.
(L’article 1er ter est adopté.)
Article 2
(Non modifié)
Le chapitre III du titre III du livre Ier du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° L’article L. 133-1 est ainsi modifié :
a) Le VI devient le VII ;
b) Le VI est ainsi rétabli :
« VI. – Le présent chapitre ne s’applique pas aux opérations de paiement effectuées entre prestataires de services de paiement pour leur propre compte. » ;
1° bis À la fin de la seconde phrase du b du I de l’article L. 133-1-1, les mots : « du dispositif de sécurité personnalisé » sont remplacés par les mots : « des données de sécurité personnalisées » ;
2° À l’article L. 133-2, les mots : « des troisième et quatrième » sont remplacés par les mots : « des deux derniers » ;
2° bis Au deuxième alinéa du I de l’article L. 133-10, les mots : « frais pour » sont remplacés par les mots : « frais proportionnés aux coûts induits par » ;
2° ter Au premier alinéa de l’article L. 133-17-1, les mots : « motivées ou documentées » sont remplacés par les mots : « motivées et documentées » ;
2° quater Au deuxième alinéa de l’article L. 133-21, après les mots : « mauvaise exécution », sont insérés les mots : « ou de la non-exécution » ;
2° quinquies L’article L. 133-22 est ainsi modifié :
a) À la première phrase du premier alinéa du I, les références : « articles L. 133-5 et L. 133-21 » sont remplacées par les références : « de l’article L. 133-5, des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-21 et de l’article L. 133-24 » ;
b) Le II est ainsi modifié :
– au premier alinéa, les références : « des articles L. 133-5 et L. 133-21 » sont remplacées par les références : « de l’article L. 133-5, des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-21 et de l’article L. 133-24 » ;
– à la première phrase du troisième alinéa, les références : « des articles L. 133-5 et L. 133-21 » sont remplacées par les références : « de l’article L. 133-5, des deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-21 et de l’article L. 133-24 » ;
c) Au IV, les mots : « mauvaise exécution » sont remplacés par les mots : « non-exécution, la mauvaise exécution ou l’exécution tardive » ;
3° Au 5° du II de l’article L. 133-28, la référence : « l’article L. 133-23 » est remplacée par les références : « les articles L. 133-20, L. 133-23 et L. 133-23-1 » ;
4° À la fin du 3° du II de l’article L. 133-39, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
5° Au 4° du II de l’article L. 133-40, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
6° Au 1° du III du même article L. 133-40, le mot : « susvisée » est remplacé par le mot : « précitée » ;
7° Au 3° du II de l’article L. 133-41, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
8° Au 1° du III du même article L. 133-41, le mot : « susvisée » est remplacé par le mot : « précitée » ;
9° L’article L. 133-45 est ainsi modifié :
a) Le début de la première phrase du dernier alinéa est ainsi rédigé : « Lorsque l’utilisateur de services de paiement est un consommateur, le prestataire de services de paiement l’informe d’au moins une instance… (le reste sans changement). » ;
b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque l’utilisateur de services de paiement n’est pas un consommateur, le prestataire de services de paiement l’informe de l’existence ou non d’une instance de règlement extrajudiciaire telle que définie à l’avant-dernier alinéa du présent article. » – (Adopté.)
Article 3
(Non modifié)
Le livre III du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° A Le II de l’article L. 312-4-1 est ainsi modifié :
a) Le 2° est complété par les mots : « pour les dépôts qu’elles ont effectués en leur nom et pour leur compte propre » ;
b) Les 4° et 5° sont complétés par les mots : « pour les dépôts qu’ils ont effectués en leur nom et pour leur compte propre » ;
1° À l’article L. 314-5, la référence : « VII » est remplacée par la référence : « I » ;
2° L’article L. 351-1 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « mentionnées aux », la fin de la première phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « premier, deuxième, troisième et dernier alinéas du II de l’article L. 312-1-1 et, lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, à l’article L. 314-12 et au III de l’article L. 314-13. » ;
b) Au second alinéa, les mots : « au premier alinéa du I, au II de l’article L. 312-1-1, au III de l’article L. 314-13 lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, au VII de l’article L. 314-13 » sont remplacés par les mots : « aux I et IV de l’article L. 312-1-1, au I de l’article L. 314-13, ainsi qu’au IV du même article L. 314-13 lorsque le client est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, ». – (Adopté.)
Article 4
(Non modifié)
Le livre V du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° AA (Supprimé)
1° A L’article L. 521-3-2 est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« La Banque de France s’assure de la sécurité des services reposant sur des instruments de paiement spécifiques et de la pertinence des normes applicables en la matière. Si elle estime qu’un de ces instruments de paiement spécifiques présente des garanties de sécurité insuffisantes, elle peut recommander à son émetteur de prendre toutes mesures destinées à y remédier. Si ces recommandations n’ont pas été suivies d’effet, elle peut, après avoir recueilli les observations de l’émetteur, décider de formuler un avis négatif publié au Journal officiel.
« Pour l’exercice de cette mission, la Banque de France procède aux expertises et se fait communiquer, par l’émetteur ou par toute personne intéressée, les informations utiles concernant les instruments de paiement spécifiques et les terminaux ou les dispositifs techniques qui leur sont associés.
« Les entreprises mentionnées au présent article adressent à la Banque de France un rapport annuel justifiant de la sécurité des instruments de paiement spécifiques qu’elles émettent et gèrent. » ;
1° Au premier alinéa du I de l’article L. 522-3, la référence : « II » est remplacée par la référence : « III » ;
2° À la première phrase du III de l’article L. 522-8, la deuxième occurrence des mots : « des activités » est supprimée ;
2° bis Le I de l’article L. 522-11 est complété par un d ainsi rédigé :
« d) Représente une menace pour la stabilité du système de paiement ou la confiance en celui-ci en poursuivant son activité de services de paiement. » ;
2° ter Au dernier alinéa du II de l’article L. 522-11-2, après le mot : « et », est insérée la référence : « du I » ;
3° Le 1° du II de l’article L. 522-13 est ainsi modifié :
a) À la fin du premier alinéa, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
b) À la première phrase du second alinéa, le mot : « susvisée » est remplacé par le mot : « précitée » ;
3° bis (Supprimé)
4° Au III de l’article L. 525-9, la référence : « L. 526-25 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 » ;
4° bis À la première phrase du second alinéa de l’article L. 526-12, les références : « L. 526-8 et L. 526-9 » sont remplacées par les références : « L. 526-8 à L. 526-10 » ;
4° ter L’article L. 526-15 est complété par un 4° ainsi rédigé :
« 4° Représente une menace pour la stabilité du système de paiement ou la confiance en celui-ci en poursuivant son activité de services de paiement. » ;
5° Au deuxième alinéa du II de l’article L. 526-19, la référence : « L. 526-26 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 » ;
6° À la fin du I de l’article L. 526-24, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
7° À l’article L. 526-28, la référence : « 3° » est remplacée par la référence : « I » ;
7° bis Au II de l’article L. 526-30, la référence : « L. 522-7 » est remplacée par la référence : « L. 522-7-1 » ;
8° À la fin du 1° ter de l’article L. 561-2, la référence : « L. 526-25 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 ». – (Adopté.)
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Article 6
(Non modifié)
Le livre VII du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° A À la section 3 du chapitre Ier du titre V, l’article L. 751-2-1 devient l’article L. 751-2-1 A ;
1° B À la section 2 du chapitre Ier du titre VI, l’article L. 761-1-2 devient l’article L. 761-1-2 A ;
1° L’article L. 741-2-1 A, ainsi que les articles L. 751-2-1 A et L. 761-1-2 A tels qu’ils résultent, respectivement, des 1° A et 1° B du présent article, sont ainsi modifiés :
a) La deuxième ligne du tableau du second alinéa du I est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-1, à l’exception du III, L. 133-1-1, à l’exception du II, L. 133-2 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 133-3 et L. 133-4 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
» ; |
a bis) La sixième ligne du même tableau est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-10 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 133-11 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
» ; |
a ter) La huitième ligne dudit tableau est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-13 à L. 133-17 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
|
L. 133-17-1 |
Résultant de la loi n° … du … |
||
L. 133-18 et L. 133-19 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
» ; |
a quater) À la dixième ligne de la seconde colonne du même tableau, la référence : « l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 » est remplacée par la référence : « la loi n° … du …» ;
a quinquies) À la onzième ligne de la seconde colonne du même tableau, la référence : « l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 » est remplacée par la référence : « la loi n° … du …» ;
b) La treizième ligne du même tableau est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-27 |
Résultant de l’ordonnance n° 2009-866 du 15 juillet 2009 |
|
L. 133-28 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
c) À la fin du 3° du II, le mot : « susvisée » est remplacé par les mots : « concernant les services de paiement dans le marché intérieur » ;
d) Après le même 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Le II de l’article L. 133-1 est ainsi rédigé :
« “II. – Le présent chapitre s’applique si le prestataire de services de paiement du bénéficiaire et celui du payeur sont situés sur le territoire de la République et que l’opération est réalisée en euros ou en francs CFP.” ; »
e) (Supprimé)
2° La dernière ligne du tableau du second alinéa du I de l’article L. 741-2-1 A et de l’article L. 751-2-1 A, tel qu’il résulte du 1° A du présent article, est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-39 à L. 133-41 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 133-42 à L. 133-44 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
||
L. 133-45 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
3° Le 3° du II de l’article L. 751-2-1 A, tel qu’il résulte du 1° A du présent article, est ainsi modifié :
a) Le 3° est complété par les mots : « ne sont pas applicables » ;
b) Le 10° est abrogé ;
4° L’article L. 761-1-2 A, tel qu’il résulte du 1° B du présent article, est ainsi modifié :
a) La dernière ligne du tableau du second alinéa du I est remplacée par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 133-39 à L. 133-41 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 133-42 à L. 133-44 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
||
L. 133-45 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
b) Le 9° du II est abrogé ;
4° bis La treizième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 743-2, L. 753-2 et L. 763-2 est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 312-4-1, à l’exception des 6°, 8° et 9° du II |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 312-5, L. 312-6 et L. 312-7 à L. 312-8-1 |
Résultant de l’ordonnance n° 2015-1024 du 20 août 2015 |
» ; |
5° (Supprimé)
5° bis La seconde phrase des articles L. 743-3, L. 753-3 et L. 763-3 est supprimée ;
6° Les mêmes articles L. 743-3, L. 753-3 et L. 763-3 sont complétés par un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 351-1 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
7° Les articles L. 743-7-1 et L. 753-7-1 sont ainsi modifiés :
a) À la troisième ligne de la première colonne du tableau du second alinéa du I, les mots : « et de son II » sont supprimés ;
a bis) À la cinquième ligne de la seconde colonne du même tableau, la référence : « loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 » est remplacée par la référence : « loi n° … du …» ;
b) À la douzième ligne de la première colonne dudit tableau, la référence : « L. 313-14 » est remplacée par la référence : « L. 314-14 » ;
c) Le 1° du II est ainsi rédigé :
« 1° Le II de l’article L. 314-2 est ainsi rédigé :
« “II. – Le présent chapitre s’applique si le prestataire de services de paiement du bénéficiaire et celui du payeur sont situés sur le territoire de la République et que l’opération est réalisée en euros ou en francs CFP.” ; »
7° bis L’article L. 763-7-1 est ainsi modifié :
a) À la fin de la troisième ligne de la première colonne du tableau du second alinéa du I, les mots : « et de son II » sont supprimés ;
a bis) À la cinquième ligne de la seconde colonne du même tableau, la référence : « la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 » est remplacée par la référence : « la loi n° … du …» ;
b) À la douzième ligne de la première colonne dudit tableau, la référence : « L. 313-13 » est remplacée par la référence : « L. 314-13 » ;
c) Le 1° du II est ainsi rédigé :
« 1° Le II de l’article L. 314-2 est ainsi rédigé :
« “II. – Le présent chapitre s’applique si le prestataire de services de paiement du bénéficiaire et celui du payeur sont situés sur le territoire de la République et que l’opération est réalisée en euros ou en francs CFP.” ; »
7° ter Après la quatrième ligne du tableau du second alinéa du I des articles L. 745-8, L. 755-8 et L. 765-8, est insérée une ligne ainsi rédigée :
« |
L. 521-3-2 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
8° Au début du troisième alinéa de l’article L. 745-8, est ajoutée la mention : « II. – » ;
9° Le tableau du second alinéa du I des articles L. 745-8-1, L. 755-8-1 et L. 765-8-1 est ainsi modifié :
a) La deuxième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 522-1 et L. 522-2 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
|
L. 522-3 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
b) La sixième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 522-6 à L. 522-7-1 |
Résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 |
|
L. 522-8 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
9° bis Le second alinéa du I des articles L. 745-8-4, L. 755-8-4 et L. 765-8-4 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« L’article L. 525-6 est applicable dans sa rédaction résultant de l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur.
« L’article L. 525-9 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
9° ter Le tableau du second alinéa du I des articles L. 745-8-5, L. 755-8-5 et L. 765-8-5 est ainsi modifié :
a) Les septième et huitième lignes sont remplacées par trois lignes ainsi rédigées :
« |
L. 526-12 |
Résultant de la loi n° … du … |
|
L. 526-13 et L. 526-14 |
Résultant de la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 |
||
L. 526-15 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
b) À la dixième ligne de la seconde colonne, la référence : « l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 » est remplacée par la référence : « la loi n° … du … » ;
c) La onzième ligne est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 526-20 et L. 526-27 |
Résultant de la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 |
|
L. 526-28 |
Résultant de la loi n° … du … |
» ; |
d) À la treizième ligne de la seconde colonne, la référence : « l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 » est remplacée par la référence : « la loi n° … du …» ;
10° Au b du 1° du III des articles L. 745-13, L. 755-13 et L. 765-13, la référence : « L. 526-25 » est remplacée par la référence : « L. 526-24 » ;
11° Le I de l’article L. 765-13 est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 561-2 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
b) Au quatrième alinéa, la référence : « L. 561-2, » est supprimée ;
12° Le I des articles L. 746-2, L. 756-2 et L. 766-2 est ainsi modifié :
a) Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’article L. 612-2 est applicable dans sa rédaction résultant de la loi n° … du … ratifiant l’ordonnance n° 2017-1252 du 9 août 2017 portant transposition de la directive 2015/2366 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 concernant les services de paiement dans le marché intérieur. » ;
b) Au début du troisième alinéa, les mots : « Les articles L. 612-2 et L. 612-21 sont applicables dans leur » sont remplacés par les mots : « L’article L. 612-21 est applicable dans sa ». – (Adopté.)
M. le président. Les autres dispositions du projet de loi ne font pas l’objet de la nouvelle lecture.
Vote sur l’ensemble
M. le président. Personne ne demande la parole ?…
Je mets aux voix, dans le texte de la commission, l’ensemble du projet de loi.
(Le projet de loi est adopté définitivement.)
M. le président. Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je dois suspendre la séance à dix-neuf heures vingt pour permettre la tenue de la conférence des présidents. Je serais donc contraint d’interrompre Mme la secrétaire d’État si nous entamions à présent l’examen en nouvelle lecture du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.
En conséquence, je vais suspendre la séance ; elle sera reprise à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-neuf heures dix, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
4
Conférence des présidents
M. le président. Les conclusions adoptées par la conférence des présidents réunie ce jour sont consultables sur le site du Sénat. Elles seront considérées comme adoptées en l’absence d’observations d’ici à la fin de la séance.
conclusions de la conférence des présidents
Jeudi 26 juillet 2018
À 10 h 30
- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement fédéral autrichien relatif à la réadmission des personnes en situation irrégulière (texte de la commission, n° 654, 2017-2018)
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 25 juillet à 15 heures
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi relative à l’encadrement de l’utilisation du téléphone portable dans les établissements d’enseignement scolaire (texte de la commission, n° 681, 2017-2018)
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 25 juillet à 15 heures
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination (texte de la commission, n° 633, 2017-2018)
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 25 juillet à 15 heures
À 14 h 30 et le soir
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, renforçant la lutte contre les rodéos motorisés (texte de la commission, n° 674, 2017-2018)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois.
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 25 juillet à 15 heures
- Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la lutte contre la manipulation de l’information (n° 623, 2017-2018) et proposition de loi organique, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la lutte contre la manipulation de l’information (n° 629, 2017-2018)
La proposition de loi a été envoyée à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication avec une saisine pour avis de la commission des lois.
La proposition de loi organique a été envoyée à la commission des lois.
Elles feront l’objet d’une discussion générale commune.
• Réunion des commissions pour examiner les amendements de séance : mercredi 25 juillet matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale commune : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale commune : mercredi 25 juillet à 15 heures
- Nouvelle lecture de la proposition de loi relative à la mise en œuvre du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération (texte de la commission, n° 676, 2017-2018)
Ce texte a été envoyé à la commission des lois.
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : mercredi 25 juillet à 15 heures
Lundi 30 juillet 2018
À 14 h 30 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (A.N., n° 1168)
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : à l’ouverture de la réunion de la commission
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : jeudi 26 juillet matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 30 juillet à 12 heures
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : lundi 30 juillet début d’après-midi et à la suspension du soir
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : vendredi 27 juillet à 15 heures
Mardi 31 juillet 2018
À 9 h 30
- 26 questions orales
L’ordre d’appel des questions sera fixé ultérieurement.
• n° 0074 de M. Yannick BOTREL à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur
(Application de la législation en matière de non-désignation des conducteurs par une entreprise)
• n° 0185 de M. Yannick VAUGRENARD à M. le ministre de l’économie et des finances
(Situation du centre hospitalier de Saint-Nazaire)
• n° 0234 de M. Daniel CHASSEING à Mme la ministre, auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports
(Rénovation de la ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse)
• n° 0243 de M. Jean-Claude LUCHE à Mme la ministre des solidarités et de la santé
(Statut des aides à domicile et des aides-soignants)
• n° 0278 de Mme Anne-Catherine LOISIER à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Difficultés de classement des activités et des emplois dans la filière du cheval)
• n° 0294 de M. Laurent LAFON à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice
(Projet d’implantation d’une prison à Limeil-Brévannes)
• n° 0302 de M. Jean-Marie MIZZON à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire
(Réforme du code minier)
• n° 0303 de M. Olivier CIGOLOTTI à Mme la ministre des solidarités et de la santé
(Situation des salariés du secteur de l’accompagnement à domicile)
• n° 0307 de Mme Catherine TROENDLÉ à Mme la ministre du travail
(Publication des chiffres sur la population active)
• n° 0359 de M. Rémi FÉRAUD à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice
(Situation des mineurs étrangers isolés)
• n° 0377 de M. Pierre CUYPERS à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Législation européenne relative au biocontrôle)
• n° 0392 de M. Antoine LEFÈVRE à Mme la ministre du travail
(Devenir des maisons de l’emploi)
• n° 0395 de M. Jean-Pierre SUEUR à Mme la ministre des solidarités et de la santé
(Suivi des femmes victimes du Distilbène)
• n° 0396 de Mme Marie-Françoise PEROL-DUMONT à Mme la ministre des solidarités et de la santé
(Accueil des enfants atteints d’autisme lourd)
• n° 0397 de M. Michel RAISON à M. le ministre de la cohésion des territoires
(Contrats de redynamisation de sites de défense et dispositif « Pinel »)
• n° 0405 de M. Jean-François RAPIN à Mme la ministre des solidarités et de la santé
(Augmentation des agressions de professionnels de santé)
• n° 0406 de Mme Françoise CARTRON à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Statut des pêcheurs professionnels en eau douce)
• n° 0407 de M. Daniel LAURENT à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Reconnaissance de la saliculture comme activité agricole)
• n° 0408 de M. Fabien GAY à M. le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire
(Risques environnementaux de Montagne d’or)
• n° 0413 de Mme Nadia SOLLOGOUB à M. le ministre de l’action et des comptes publics
(Calendrier de notification et de versement des dotations aux collectivités locales)
• n° 0414 de Mme Patricia MORHET-RICHAUD à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Remède contre le feu bactérien)
• n° 0416 de M. Roland COURTEAU à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Intempéries du 7 juillet 2018 dans l’Aude)
• n° 0417 de M. Didier MANDELLI à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation
(Nouvelle cartographie des zones défavorisées)
• n° 0418 de Mme Anne-Marie BERTRAND à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation
(Devenir du recrutement en école d’orthophonie)
• n° 0424 de M. Franck MONTAUGÉ à M. le ministre de l’économie et des finances
(Activité « relation clients » d’Engie)
• n° 0425 de Mme Nadine GRELET-CERTENAIS à Mme la ministre des solidarités et de la santé
(Remise en cause du droit à l’interruption volontaire de grossesse dans la Sarthe)
À 14 h 30 et le soir
- Conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi d’orientation et de programmation renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes (texte de la commission, n° 687, 2017-2018)
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 45 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 30 juillet à 15 heures
- Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie (A.N., n° 1106)
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 30 juillet à 16 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mardi 31 juillet matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : à l’ouverture de la discussion générale
• Réunion de la commission pour examiner les amendements de séance : à l’issue de la discussion générale
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 30 juillet à 15 heures
- Éventuellement, sous réserve de sa transmission, suite de la nouvelle lecture du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (A.N., n° 1168)
- Clôture de la première session extraordinaire 2017-2018
SECONDE SESSION EXTRAORDINAIRE 2017-2018
ORDRE DU JOUR CONDITIONNEL ET PRÉVISIONNEL DE LA SESSION EXTRAORDINAIRE DE SEPTEMBRE 2018
(sous réserve de la publication du décret du Président de la République portant convocation du Parlement en session extraordinaire)
Mardi 25 septembre 2018
À 15 heures
- Ouverture de la seconde session extraordinaire 2017-2018
- Sous réserve de sa transmission, nouvelle lecture du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (A.N., n° 1135)
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 17 septembre à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mercredi 19 septembre matin
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance : lundi 24 septembre à 12 heures
• Réunions de la commission pour examiner les amendements de séance : mardi 25 septembre matin, début d’après-midi et mercredi 26 septembre matin
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 24 septembre à 15 heures
À 16 h 45
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 25 septembre à 12 h 30
À 17 h 45 et le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite de la nouvelle lecture du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (A.N., n° 1135)
Mercredi 26 septembre 2018
À 14 h 30 et, éventuellement, le soir
- Sous réserve de sa transmission, suite de la nouvelle lecture du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (A.N., n° 1135)
SESSION ORDINAIRE 2018-2019
SEMAINE DE CONTRÔLE
Mardi 2 octobre 2018
À 14 h 30
- Ouverture de la session ordinaire 2018-2019
- Sous réserve de son dépôt, proposition de résolution en application de l’article 34-1 de la Constitution, sur le pastoralisme
• Temps attribué à l’auteur de la proposition de résolution : 10 minutes
• Temps attribué aux orateurs des groupes dans la discussion générale : 1 heure
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 1er octobre à 15 heures
• Les interventions des orateurs vaudront explications de vote.
À 16 h 45
- Questions d’actualité au Gouvernement
• Délai limite pour l’inscription des auteurs de questions : mardi 2 octobre à 12 h 30
À 17 h 45
- Explications de vote puis vote sur la proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, relative à la désignation aléatoire des comités de protection des personnes (n° 489, 2017-2018) (demandes des groupes Les Républicains et Union Centriste)
Ce texte a été envoyé à la commission des affaires sociales. Il est examiné conformément à la procédure de législation en commission selon laquelle le droit d’amendement des sénateurs et du Gouvernement s’exerce en commission.
• Délai limite pour le dépôt des amendements de commission : lundi 24 septembre à 12 heures
• Réunion de la commission pour le rapport et le texte : mardi 25 septembre en début d’après-midi
• Délai limite pour le dépôt des amendements de séance, en application de l’article 47 quater, alinéa 1, du Règlement : lundi 1er octobre à 15 heures
• Lors de la séance, seuls peuvent intervenir le Gouvernement, les représentants de la commission pendant 7 minutes et, pour explication de vote, un représentant par groupe pour une durée ne pouvant excéder 5 minutes chacun, ainsi qu’un sénateur ne figurant sur la liste d’aucun groupe pour une durée ne pouvant excéder 3 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans la discussion générale : lundi 1er octobre à 15 heures
Mercredi 3 octobre 2018
À 14 h 30
- Débat sur la réforme du baccalauréat (demande de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication)
• Temps attribué à la commission de la culture, de l’éducation et de la communication : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 15 questions-réponses :
2 minutes maximum par question
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
En cas de réplique, 30 secondes supplémentaires pour l’auteur de la question
• Conclusion par l’auteur de la demande du débat : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 2 octobre à 15 heures
- Débat sur la politique industrielle et l’avenir de notre industrie (demande de la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays)
• Temps attribué à la mission d’information sur Alstom et la stratégie industrielle du pays : 8 minutes
• Réponse du Gouvernement
• Après la réponse du Gouvernement, séquence de 15 questions-réponses :
2 minutes maximum par question
Possibilité de réponse du Gouvernement pour une durée équivalente
En cas de réplique, 30 secondes supplémentaires pour l’auteur de la question
• Conclusion par l’auteur de la demande du débat : 5 minutes
• Délai limite pour les inscriptions de parole dans le débat : mardi 2 octobre à 15 heures
Prochaine réunion de la conférence des présidents :
mercredi 26 septembre 2018 à dix-neuf heures trente.
5
État au service d'une société de confiance
Adoption en nouvelle lecture d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. L’ordre du jour appelle la discussion en nouvelle lecture du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture, pour un État au service d’une société de confiance (projet n° 613, texte de la commission n° 659, rapport n° 658).
Dans la discussion générale, la parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le président, madame, monsieur les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai plaisir à me retrouver devant votre assemblée pour cette nouvelle lecture du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.
Je tiens tout d’abord à vous remercier sincèrement de votre engagement tout au long de nos échanges. Ils ont été respectueux, constructifs, intenses aussi, puisque, depuis la présentation du texte en première lecture à l’Assemblée nationale, nous avons eu au total près de cent heures de débat avec les parlementaires. Au terme de ce long cheminement de la rue de l’Université à celle de Vaugirard, je ne doute pas que vous connaissiez toutes et tous ce projet de loi à la lettre. Je me contenterai donc d’en rappeler l’esprit.
Le projet de loi comprend deux volets : le premier porte sur la confiance et concrétise l’engagement du Président de la République d’un droit à l’erreur pour les particuliers comme pour les entreprises ; le second concerne la simplification des démarches administratives.
Ce projet de loi est l’un des deux piliers d’un cadre équilibré en matière de relations entre l’administration et ses usagers. Le premier pilier, dont nous allons continuer de débattre ensemble, est celui de la bienveillance vis-à-vis de l’usager de bonne foi. Le second, que Gérald Darmanin défend aujourd’hui même devant votre assemblée et devant l’Assemblée nationale, est le renforcement de notre politique de lutte contre la fraude. Contre tous ceux qui enfreignent volontairement les règles, l’État ne doit faire preuve d’aucune faiblesse ni d’aucune tolérance.
S’agissant plus précisément de l’apport de la Haute Assemblée au présent projet de loi, en dépit de l’échec de la commission mixte paritaire, près d’un tiers des dispositions adoptées par les sénateurs en première lecture ont été reprises. Je pense notamment à l’encadrement de la durée de contrôle par l’URSSAF pour les entreprises de moins de vingt salariés ou à l’extension du rôle des commissions des impôts directs et des taxes, au sein desquelles siègent des professionnels.
Le Gouvernement souhaite que cette nouvelle lecture se déroule dans l’exact même état d’esprit. Nous ferons ainsi preuve de la même écoute.
Nous continuerons aussi à respecter deux principes qui nous paraissent essentiels.
Premièrement, le projet de loi n’est pas un texte de simplification, même s’il contient des simplifications. Le ministre de l’action et des comptes publics vous a adressé, comme il s’y était engagé, un état des lieux précis des lois de simplification que nos prédécesseurs ont fait adopter. Vous connaissez la stratégie que nous mettons en œuvre en la matière : désormais, chaque projet de loi contient un volet de mesures de simplification thématiques qui lui sont adossées.
À cette méthode s’ajoute une exigence : deux normes supprimées pour toute nouvelle norme créée. Avant l’actuel quinquennat, le Gouvernement prenait une centaine de décrets chaque année instaurant des contraintes nouvelles, soit trente à trente-cinq décrets tous les quatre mois. Durant les quatre derniers mois de l’année dernière, les ministères n’ont proposé que douze décrets de cette nature, et seuls cinq ont été pris, qui ont conduit à l’abrogation parallèle de dix contraintes existantes. On en parle peu, mais c’est là un changement concret dans le fonctionnement de nos administrations.
Par ailleurs, nous œuvrons aussi pour diminuer de manière extrêmement sévère le nombre de circulaires et, surtout, pour supprimer celles qui sont devenues obsolètes.
Deuxièmement, le projet de loi porte sur la seule relation entre l’administration et les usagers. Cela continue, je le sais, d’être un motif de désaccord entre la majorité sénatoriale et le Gouvernement. Nous considérons qu’il n’a pas vocation à régler les relations entre les différentes administrations, notamment entre l’État et les collectivités territoriales.
À l’inverse, grâce, notamment, à votre vigilance, nous avons tenu à ce que l’ensemble des propositions nées des débats n’induisent pas de charges ou de complexité supplémentaires pour les collectivités territoriales. C’est d’autant plus justifié alors que nous avons engagé avec elles une politique de contractualisation.
Le temps législatif est, certes, essentiel ; en même temps, le rendez-vous que nous ne devons pas manquer est celui de l’exécution. Nous avons déjà commencé à nous y atteler, car, en matière d’action publique, il n’y a que les preuves qui comptent.
L’ensemble des décrets d’application seront publiés avant le 31 décembre 2018. Les ordonnances s’inscrivent dans un calendrier un peu différent, qui dépend de l’ampleur des travaux. Nous veillerons à les élaborer dans la plus grande concertation. Nous veillerons également à la mise en œuvre aussi rapide que possible de chaque disposition.
La mise en œuvre opérationnelle du texte est aussi à privilégier. Ainsi, nous allons accompagner de façon inédite la mise en œuvre effective de la loi.
Outre les initiatives déjà lancées sur lesquelles nous allons nous appuyer, comme l’élargissement des horaires des services publics, nous allons construire avec les usagers et les agents les modalités concrètes de mise en œuvre des dispositions du texte, en mobilisant toutes les forces vives dans les territoires pilotes. À partir de ces territoires, nous pourrons tirer tous les enseignements nécessaires à la mise en œuvre effective de la loi dans tout le pays.
Ainsi, le référent unique pour les entreprises sera expérimenté dans le Pas-de-Calais, en Côte-d’Or et dans le Maine-et-Loire, en repartant des besoins des entreprises et des dynamiques locales existantes. Nous fonctionnerons ainsi pour tous les grands chantiers de la future loi. Les administrations sont d’ores et déjà à la tâche, afin de lancer ces travaux sitôt la loi promulguée.
Par ailleurs, pour maintenir une pression – bienveillante, évidemment – sur l’exécution de la loi, nous aurons besoin de l’ensemble des parlementaires, besoin de vous toutes et tous. Votre contribution passera par l’exercice de vos missions d’évaluation traditionnelles, mais aussi par le Conseil de la réforme porté par les députés et auquel nous souhaitons que des sénateurs puissent être associés. Nous apporterons tout notre appui à cette initiative en mobilisant nos administrations.
Mais la loi seule, votée, exécutée et suivie par nous tous, ne suffira pas. Nous sommes conscients que nous aurons besoin d’investir. Tel est le sens des annonces faites le 20 juin dernier avec Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État, en ce qui concerne les lauréats du Fonds pour la transformation de l’action publique. Dans ce cadre, 700 millions d’euros seront consacrés à la transformation de nos administrations sur la durée du quinquennat ; 200 millions d’euros d’autorisations d’engagement sont prévus dès cette année.
Ainsi, 5 millions d’euros sont affectés au financement d’une application permettant un meilleur ciblage du contrôle fiscal, grâce à l’intelligence artificielle et au data mining.
Ce fonds inscrit pleinement ses investissements dans le cadre de la nouvelle société de confiance. De même, quand une procédure est dématérialisée, notre seule volonté est de simplifier la vie des usagers, celle des administrations et de réduire le risque d’erreur.
Ce même effort d’investissement, nous le ferons pour la formation des agents publics. C’est l’une des actions prioritaires du schéma directeur 2018-2020 pour la formation professionnelle des agents de l’État, qui vise à diffuser auprès de l’ensemble des agents une culture renouvelée de la relation à l’usager, fondée sur l’accompagnement, le conseil et la bienveillance. Pour la seule année 2018, 250 millions d’euros de crédits de formation ont d’ores et déjà été réorientés autour des objectifs de transformation de l’action publique.
Enfin, pour mesurer les effets concrets de ces transformations, nous ferons preuve de transparence vis-à-vis de l’ensemble des Français. Nous suivrons l’évolution de leurs relations avec l’administration et la progression de la confiance par la mise en place d’un baromètre de la confiance, dont nous rendrons les résultats publics chaque année. Gérald Darmanin et moi-même souhaitons que la publication de ces résultats donne lieu à un débat avec l’ensemble des parlementaires.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, investir dans la transformation et en mesurer les effets sont des principes sur lesquels, je le sais, nous saurons nous retrouver. Ils marquent la volonté du Gouvernement de bâtir un nouveau modèle d’action publique, au service de l’ensemble des Français. (M. Julien Bargeton, ainsi que Mme et M. les rapporteurs applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Pascale Gruny, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi avait suscité beaucoup d’attentes avant même son dépôt. Malgré une certaine déception quant à son véritable contenu, nous avions choisi d’aborder son examen de manière constructive. À cet esprit d’ouverture du Sénat, les députés de la majorité ont opposé une fin de non-recevoir, leur intransigeance conduisant à l’échec de la commission mixte paritaire. Quel mépris à l’égard du travail accompli par le Sénat pour enrichir et clarifier le texte initial ! Malgré tout, nous continuons à rechercher le compromis, et une convergence demeure possible.
S’agissant de l’article 2, qui crée un droit à l’erreur et un droit au contrôle au bénéfice des usagers dans leurs relations avec l’administration, l’Assemblée nationale a rétabli le texte issu de ses travaux en première lecture, sans vraiment examiner le travail du Sénat. Notre commission spéciale a donc rétabli le texte du Sénat, qui ne visait qu’à préciser et à rendre plus incitatif le dispositif proposé.
L’Assemblée nationale a supprimé l’extension du droit à l’erreur aux collectivités territoriales dans leurs relations avec l’État. Or je demeure convaincue de son utilité, comme vous, je pense, mes chers collègues. J’ai donc proposé à la commission spéciale, qui l’a adoptée, une rédaction de compromis réservant le bénéfice du dispositif aux plus petites communes et aux EPCI les plus modestes. De nombreux maires nous font part régulièrement de leurs difficultés d’interprétation des textes. Ce droit à l’erreur doit leur apporter davantage de sécurité juridique.
Je comprends la volonté de certains d’entre vous de ne pas opérer de distinction entre collectivités et d’ouvrir le dispositif plus largement. Je m’en remettrai à la sagesse de notre assemblée sur ce sujet.
Par ailleurs, je pense que nous pouvons nous féliciter de l’adoption par l’Assemblée nationale du report de trois ans, au 1er juillet 2021, de l’inclusion des élus locaux et des fonctionnaires dans le champ d’application du répertoire numérique des représentations d’intérêts prévu par la loi Sapin II. Cette avancée est à mettre au crédit du Sénat.
Si la commission mixte paritaire n’a pas abouti, ce n’est pas, en tout cas, à cause des dispositions fiscales du projet de loi.
Tout d’abord, plusieurs dispositions ont fait l’objet d’une adoption conforme en première lecture, dont la garantie fiscale, l’une des avancées les plus notables du texte en faveur des contribuables.
Dans le même esprit, le Sénat avait introduit un article additionnel prévoyant que, à l’issue d’un contrôle, le courrier adressé au contribuable mentionnerait non seulement les points faisant l’objet de rectifications, mais aussi les points que le vérificateur a examinés et qu’il considère comme conformes à la loi fiscale. Les députés ont apporté leur soutien à cette mesure et l’ont étendue aux contributions indirectes.
Introduite par le Sénat, la dispense d’obligation de télédéclaration pour les contribuables résidant dans une zone blanche a été maintenue par l’Assemblée nationale.
En définitive, rien d’ambitieux dans ce projet de loi. Le droit à l’erreur existe en effet depuis bien longtemps en matière fiscale.
Trois motifs importants de désaccord demeurent sur les articles fiscaux du projet de loi, mais nous ne perdons pas espoir d’aboutir à un compromis.
Premièrement, l’article prévoyant la publication des rescrits, que l’Assemblée nationale a supprimé, a été rétabli par notre commission spéciale dans une rédaction de compromis, limitée aux demandes présentant un intérêt général, et non plus une portée générale, de façon à laisser une plus grande marge d’appréciation à l’administration.
Deuxièmement, en ce qui concerne l’ouverture au public des données relatives aux transactions immobilières, nous avons choisi de rétablir les garanties nécessaires à la protection de la vie privée, mais dans une version de compromis compatible avec un dispositif d’open data. À l’heure du règlement général sur la protection des données, nous ne pouvons aller à rebours de l’histoire.
Troisièmement, nous avons précisé, comme en première lecture, le champ de l’habilitation prévue pour relancer la relation de confiance, tout en conservant un apport bienvenu des députés, qui permettrait à l’administration de labelliser les sociétés engagées dans le dispositif dans une logique de responsabilité fiscale des entreprises.
J’en viens aux dispositions touchant aux affaires sociales.
En ce qui concerne la médiation, l’Assemblée nationale a créé un dispositif juridique commun à l’ensemble des branches du régime général de la sécurité sociale, tenant compte de nos préoccupations.
Le projet de loi prévoit aussi, à titre expérimental, un cadre dérogatoire au droit du travail pour permettre la mise en place de prestations de relayage des proches aidants. Nous rétablirons l’encadrement de cette expérimentation, en rendant applicable la convention collective des salariés du particulier employeur.
De même, nous rétablirons un article modulant le montant de l’annulation des exonérations de cotisations sociales encourue par l’employeur lorsqu’il omet de déclarer certaines heures supplémentaires ou qu’une prestation de services est requalifiée en travail salarié.
Enfin, je vous proposerai à nouveau de supprimer l’habilitation demandée par le Gouvernement pour réformer par ordonnances les règles qui régissent les modes d’accueil du jeune enfant. Outre qu’il s’agit clairement d’un cavalier législatif, le champ de cette habilitation me semble excessivement large.
Je vous fais confiance, monsieur le secrétaire d’État. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. Jean Bizet. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. Jean-Claude Luche, rapporteur de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en première lecture, le Sénat avait cherché à donner plus de substance à ce projet de loi un peu fourre-tout. Malgré notre volonté d’aboutir, la commission mixte paritaire a échoué sur deux points, dont l’un, portant sur les éoliennes en mer, n’avait été voté ni par l’Assemblée nationale ni par le Sénat, ce qui est tout de même assez inédit.
Pour cette nouvelle lecture, nous avons à nouveau choisi de jouer le jeu en améliorant le texte, car nous ne désespérons pas que le Gouvernement ou nos collègues députés finissent par nous entendre.
En matière de rescrit, l’Assemblée nationale a certes conservé les procédures sectorielles introduites par le Sénat, mais elle les a complétées de nombreux dispositifs inédits dans des domaines variés au mépris de la règle de l’entonnoir. Notre commission les a donc supprimés.
S’agissant du rescrit en matière juridictionnelle, nous avons adopté une solution de compromis qui permet de conserver le dispositif du Gouvernement tout en précisant son champ d’application. L’expérimentation sera limitée aux décisions relatives aux déclarations d’utilité publique et aux déclarations d’insalubrité, ce qui évitera d’engorger les juridictions administratives.
En matière d’information des usagers, notre commission a de nouveau ramené le délai maximal de délivrance du certificat d’information à trois mois, ce qui suffira amplement puisqu’il s’agit simplement de lister les règles applicables à une activité et non de les interpréter.
Concernant la désignation de référents unique dans les maisons de service au public, malgré nos réticences sur le principe, nous avons également adopté une rédaction de compromis qui permettra de s’assurer de l’accord de tous les participants.
La commission a en revanche rétabli la modulation de la durée des contrôles administratifs que nous avions introduite en première lecture au profit des TPE. Cette différenciation est à la fois légitime sur le fond et parfaitement réalisable sur le plan pratique.
De même, nous sommes également revenus à notre texte afin de garantir que les transferts de compétences des chambres départementales d’agriculture aux chambres régionales ne puissent être expérimentés qu’avec l’accord des intéressées, car nous croyons en la capacité des acteurs territoriaux à s’organiser de la façon la plus efficace possible sans qu’il faille les y contraindre.
En matière d’enseignement supérieur, je me réjouis que les députés aient confirmé le délai d’habilitation fixé à six mois par le Sénat et que les modalités de sortie de l’expérimentation des regroupements aient été sécurisées.
Concernant la participation du public aux projets qui ont une incidence sur l’environnement, l’Assemblée nationale a rétabli la possibilité de remplacer l’enquête publique par une consultation par voie électronique. Elle est même allée plus loin que le texte initial, qui limitait cette expérimentation aux seuls projets agricoles, en l’étendant à l’ensemble des projets soumis à autorisation environnementale, c’est-à-dire à tous les projets d’installations classées. Considérant que l’enquête publique est nécessaire pour permettre l’acceptabilité des projets, nous avons de nouveau supprimé cette expérimentation.
Le Gouvernement a aussi profité de la nouvelle lecture pour faire ratifier l’ordonnance de 2017 sur l’autorisation environnementale. Une telle ratification par voie d’amendement porte atteinte aux droits du Parlement, qui ne dispose pas du temps nécessaire pour examiner le texte et y apporter si besoin des modifications. C’est pourquoi nous l’avons supprimée.
S’agissant des éoliennes en mer, chacun a en tête l’émoi suscité par l’amendement qu’avait présenté le Gouvernement pour renégocier sous la menace d’une annulation le prix des six parcs déjà attribués et notre opposition quasi unanime en première lecture. Depuis lors, les négociations avec les lauréats que nous avions appelées de nos vœux ont abouti à une réduction substantielle des dépenses de l’ordre de 15 milliards d’euros sur les vingt ans prévus pour les contrats d’achat. Malgré ce résultat favorable, la façon dont le Gouvernement a géré ce dossier doit nous interpeller.
Sur le fond, si l’amendement a certainement joué comme un levier dans les négociations, pourquoi le maintenir malgré l’aboutissement de ces dernières ? En droit, l’État pourra toujours annuler les décisions d’attribution jusqu’à la signature des contrats d’achat.
Nous ne savons rien, du reste, de la manière dont l’accord a été formalisé, de ses conséquences éventuelles sur l’emploi et sur la filière industrielle ou encore de la façon dont les économies annoncées ont été calculées. Je suppose toutefois que vous nous donnerez un certain nombre d’informations sur ce sujet, monsieur le secrétaire d’État. J’ajoute que ces dernières ont été en partie gonflées, puisque le coût du raccordement, jusqu’alors intégré dans le tarif d’achat, sera désormais couvert par le tarif d’utilisation des réseaux : c’est près de 1,2 milliard d’euros que l’on fera ainsi passer d’une ligne de facture à l’autre. De même, l’occupation du domaine public à titre gratuit occasionnera une perte de recettes publiques de l’ordre de 360 millions d’euros qui n’est pas comptabilisée.
Enfin, la possibilité pour l’État de revenir sur des accords déjà conclus est un mauvais signal envoyé aux entreprises qui souhaitent investir dans notre pays, a fortiori dans un texte censé faire renaître la confiance.
M. le président. Il faut conclure !
M. Jean-Claude Luche, rapporteur. Malgré tout, parce que le débat a déjà eu lieu en première lecture et parce qu’il faut prendre acte des résultats des négociations, nous avons choisi de ne pas y revenir. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Julien Bargeton.
M. Julien Bargeton. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, il y a deux cent trente ans jour pour jour, Wolfgang Amadeus Mozart achevait la composition de la symphonie n° 40, qui allait devenir l’une des pièces maîtresses du répertoire. Plus aride, le texte que nous examinons une dernière fois en séance publique constitue pourtant, je veux le croire, une véritable partition pour rénover les relations entre les usagers et leurs administrations.
Les Français sont attachés au service public. Le baromètre Delouvrier, qui mesure la satisfaction des usagers, indique que, en 2017, 72 % des Français étaient satisfaits, soit une progression de 5 points par rapport à 2014.
Dans le même temps, il n’est pas interdit d’interroger la pertinence de ces services publics, a fortiori à la lumière de la révolution numérique dans nos vies et dans nos villes. M. Thierry Tuot, conseiller d’État, estime le coût de la suradministration à environ 3 points de PIB. Demain, il s’agira de repenser avant de dépenser.
Le droit à l’erreur est devenu, au gré de nos débats, la mesure phare de ce projet de loi. C’est, nous le savons tous, une attente forte de nos concitoyens et de nos entreprises. Nous avons, par l’adoption d’un amendement de notre collègue Patricia Schillinger, étendu le champ de ce droit au code de la sécurité sociale. D’autres apports importants du Sénat ont été retenus. J’en ai dénombré à peu près une trentaine ; je me suis peut-être trompé, mais je crois que cela doit nous conduire à nuancer certains propos sur l’évolution de ce texte.
Cela étant, et c’est principalement sur ce point qu’a échoué la commission mixte paritaire qui s’est réunie en avril, l’extension du droit à l’erreur aux collectivités locales pose un certain nombre de questions.
L’objet du texte est bien d’améliorer la relation qu’entretient le citoyen avec l’ensemble des administrations. Cette extension interroge en droit : comment une personne morale de droit public pourrait-elle se prévaloir d’un droit à l’erreur au profit de l’État ? La réponse est claire : le droit de la responsabilité des personnes morales est orienté vers l’administré et il obéit à des règles spéciales. De même, doit-on étendre ce droit à l’erreur aux relations entre les collectivités elles-mêmes, au risque de créer une tutelle ? Enfin, imaginons-nous un citoyen qui pourrait se prévaloir d’une erreur d’une collectivité qui ferait elle-même usage de son droit à l’erreur envers l’État ? On atteindrait un niveau d’insécurité juridique dangereux pour les Français et pour les entreprises. Je ne suis pas contre par principe, mais je pense que ce droit mériterait d’être retravaillé et approfondi s’il devait être introduit.
Nous avons aussi d’autres désaccords sur ce texte, notamment à l’article 34, mais je crois que c’était principalement sur la méthode ; nous pouvons donc nous retrouver sur le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale.
Enfin, il y a un désaccord sur l’article 38, qui porte sur les cultes. Comme je l’ai dit en commission spéciale, ce sujet mérite que l’on prenne le temps de mener une vraie réflexion sur la place des lobbies en démocratie. Sur ce point, chère Nathalie Delattre, notre groupe s’abstiendra, mais seulement dans l’attente d’un vrai débat sur la liste des représentants d’intérêts.
Ces désaccords ne doivent pas occulter les apports de ce texte, qui prévoit des changements importants : présomption de bonne foi qui pèse sur l’usager, expérimentation du référent unique dans les maisons de services au public, généralisation du rescrit, limitation de la durée des contrôles sur nos TPE ou PME.
Je souhaiterais m’arrêter un instant sur le titre III, intitulé « Un dispositif d’évaluation renouvelé », qui a été en partie vidé de sa substance ; je le regrette. Nous sommes tous attachés au renforcement des pouvoirs d’évaluation des politiques publiques par le Parlement, en particulier par le Sénat. Ce n’est certes pas incompatible avec la communication de rapports relatifs au suivi de l’application des bonnes pratiques ou des expérimentations par le Gouvernement, mais il est vrai qu’un bon rapport est un rapport utile.
Dès le début de la discussion de ce texte, vous avez insisté, monsieur le secrétaire d’État, sur le service après-vote au travers d’un conseil de la réforme aux mains du Parlement qui se réunirait régulièrement. Nous allons tester une nouvelle méthode de travail, qui peut ne pas fonctionner, mais qui aura le mérite d’exister et d’être innovante. Cela me fait penser au mot de Jules Renard : « La porcelaine cassée dure plus que la porcelaine intacte. » Tout n’est pas parfait, contrairement à Mozart, mais nous prévoyons le nécessaire pour corriger les fausses notes.
Quoi qu’il en soit, les sénateurs auront à cœur d’appuyer votre action, notamment auprès des services déconcentrés de l’État, que ce soit la DGFiP ou les DIRECCTE, dans nos territoires.
Le numérique est un levier de solidarité, y compris dans les grandes villes. C’est au prix de ces adaptations que nous redonnerons confiance aux jeunes générations dans l’action publique, trop longtemps cantonnée aux moyens et pas assez tournée vers les résultats. Notre crédibilité passe par un sursaut d’efficacité que le projet de loi veut encourager, et j’espère qu’il en sera l’augure.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous voici donc réunis pour débattre d’un projet de loi dont le moins qu’on puisse dire est qu’il a fait l’objet lors de sa présentation d’une offensive de communication pour le moins insistante. Je sens un acquiescement de votre part, monsieur le secrétaire d’État, et ça me met en confiance. (Sourires.)
Je ne sais plus de quand date le premier message à caractère davantage publicitaire qu’informatif relatif à la formidable avancée du droit que constitue le « droit à l’erreur »…
M. Pascal Savoldelli. Je vous remercie monsieur le secrétaire d’État. Nous allons finir par travailler en binôme… (Nouveaux sourires.)
Le droit à l’erreur était alors présenté comme la reconnaissance de la possibilité pour le contribuable ou le cotisant de ne pas produire la déclaration juste. Mais, ce dont je suis certain, c’est que le droit à l’erreur existe déjà et que sa « légalisation » procède de ce que j’appelle de l’enfoncement de porte ouverte. De plus, l’actualité la plus récente a mis en évidence les limites qu’on pouvait supposer au texte que nous réexaminons. Puisqu’on parle de confiance, vous voyez jusqu’où le dérapage pourrait aller…
M. Julien Bargeton. C’est tiré par les cheveux !
M. Pascal Savoldelli. J’y viendrai à la fin de mon propos.
Pour le reste, on ne peut isoler ce texte de son contexte. En effet, il doit être appréhendé en rapport avec la mise en cause du statut des fonctionnaires – no comment ! –, avec le CAP 2022 – franchement… – de réduction d’effectifs – 20 000 emplois rien qu’à la DGFiP – et avec le développement des contrats de mission et autres emplois contractuels. Outre que la recette est assez ancienne, comment peut-on faire de la bonne administration, avec la sécurité juridique et la confiance qui conviennent, quand on place les acteurs de ces administrations en situation d’insécurité professionnelle ?
Le projet de loi ne remet nullement en question les politiques qui, de révision générale des politiques publiques en modernisation de l’action publique, ont largement entamé la crédibilité du service public par l’abandon marqué de la présence territoriale des services déconcentrés des différentes administrations. Le pire, c’est qu’il les prolonge et en accentue les défauts et travers, pour faire de cas d’espèce la matrice de la suraccumulation législative que nous connaissons.
Le texte fait ainsi cohabiter des mesures à caractère général avec des mesures tout à fait circonstanciées ou circonstancielles dont nous pouvons nous demander, au demeurant, ce qui les a inspirées. Peut-être est-ce simplement la volonté de répondre aux attentes d’on ne sait quel groupe de pression ou groupement d’intérêts désireux de bénéficier de l’onction de la loi pour prolonger son action. Il est vrai que, depuis un an, nous ne sommes plus dans le régime des partis – normalement, vous devriez applaudir (Sourires sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.) –, mais que nous sommes passés à celui des lobbies, du mouvementisme, de la confusion des genres pouvant aller jusqu’à la sécurité des déplacements présidentiels !
Sur le strict plan du droit, qui doit être le même pour tous, fondé sur l’égalité entre les citoyens, nous ne sommes pas certains, à l’instar du Défenseur des droits, que ce texte apporte beaucoup. Outre qu’il va sans doute accuser les effets de la fracture numérique, à peu près irréversible tant que vivront en France des personnes nées avant la Seconde Guerre mondiale, le projet de loi risque de voir les dispositifs envisagés bénéficier essentiellement aux personnes déjà les plus à même de les mobiliser et de renforcer ainsi les inégalités d’accès au droit – c’est n’est pas que moi qui le dis, c’est aussi M. Toubon.
Il est évident que, dans la société de confiance décrite par le texte, excusez-moi cette formule, mais elle a le mérite d’être explicite, ce sera avocat-conseil pour les uns et écrivain public pour les autres. Il faut tout de même que chacun reste dans sa condition…
On ne peut enfin que souligner les liens existant entre ce texte et la conception de l’entreprise que portent le Gouvernement et sa majorité. Ils se situent en effet dans le droit fil des seules attentes des conseils d’administration de groupes industriels et financiers, attentes caractérisées par le respect de normes minimales au plan social, économique, administratif ou comptable. Qu’est-ce donc, par exemple, que cet article sur le prélèvement à la source dans les entreprises de moins de vingt salariés ? D’un côté, on a une exigence croissante de l’irresponsabilité sociale et, de l’autre, une perception de ressources publiques sans cesse plus importante !
Avec ce projet de loi, il sera demain nettement plus facile de frauder l’impôt sur les sociétés que d’obtenir illicitement une allocation de RSA. Qu’est-ce donc que cette société de confiance qui va passer la main sur la fraude au petit pied et ne va pas se donner les moyens de poursuivre la grande délinquance financière ?
Le projet de loi propose quelques mesurettes frappées au coin du bon sens – c’est pourquoi nous voterons un certain nombre d’amendements et d’articles –, mais il déguise en même temps les véritables enjeux attendus par nos concitoyens. Nous ne nous rallierons donc pas à ce texte d’inégalité entre usagers et administration.
Notre collègue Julien Bargeton a cité la symphonie de Mozart pour faire référence à Jupiter.
M. Julien Bargeton. Ce n’est pas la même symphonie : c’est la symphonie n° 41 !
M. Pascal Savoldelli. Après ce qu’a dit votre Président, cet humour-là ne me fait pas rigoler.
Quand le Président de la République parle comme une petite frappe des banlieues, je n’ai vraiment pas envie de rire.
M. le président. Il faut conclure !
M. Pascal Savoldelli. C’est pourquoi, mon cher collègue, je vous renvoie à Sénèque : « Ayez moins de confiance dans les faveurs de la fortune, c’est la plus légère des déesses. » (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Mme Angèle Préville. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous partageons la philosophie de ce texte. Nous croyons en cette société de confiance qu’appelle le projet de loi. Nous saluons les mesures de simplification qu’il porte et nous nous félicitons, entre autres dispositions, de la suppression des sanctions pour toute première erreur d’un usager de bonne foi. Nous restons cependant en alerte et pour le moins perplexes sur de nombreux points.
Après l’échec de la commission mixte paritaire et le renvoi en nouvelle lecture qui nous réunit aujourd’hui, de nombreuses dispositions que nous avions votées avec la majorité sénatoriale ont été supprimées.
Nous saluons le nouveau travail des rapporteurs et des sénatrices et sénateurs de la commission spéciale, notamment sur le droit à l’erreur au bénéfice des collectivités ou sur la suppression de l’article concernant les modes d’accueil de la petite enfance – disposition plutôt incongrue, les modes d’accueil de la petite enfance ne pouvant se négocier a minima à moindre formation et à moindre encadrement. Nous saluons également les mesures en faveur des chambres d’agriculture.
Cette nouvelle lecture nous donne l’occasion de revenir sur des points problématiques que j’articulerai autour de deux axes.
Le premier porte sur l’esprit général du texte.
Les mesures portées dans le projet de loi – nous ne le répéterons jamais assez – touchent à des domaines multiples. Parmi les mesures relatives à la relation entre les citoyens, les entreprises et les administrations, je citerai le rescrit fiscal, les maisons d’accueil du public, les régimes d’autorisation environnementale, les certificats d’information ou encore le code du travail.
Le titre Ier vise à créer les conditions d’une confiance retrouvée du public dans l’administration en concentrant l’action de cette dernière sur ses missions d’accueil et de conseil. Peut-on y répondre en restreignant le champ de l’accès au droit ?
La confiance dans l’administration n’est pas exclusivement celle des entreprises ; elle est également celle des citoyens. À cet égard, il me semble que l’administration n’est pas aujourd’hui en mesure d’accompagner les plus fragiles.
Le Défenseur des droits, que nous avons auditionné, a pointé une fracture numérique qui touche les publics vulnérables. Beaucoup trop de nos concitoyens ne bénéficient pas des droits et des services auxquels ils peuvent prétendre. Ils sont des millions ! Il est nécessaire de restaurer la confiance afin qu’elle puisse profiter à tous. Une enquête de 2017 publiée par le Défenseur des droits souligne que 27 % des Français n’ont pas accès à internet ou éprouvent des difficultés à réaliser leurs démarches administratives sur internet.
Avec le groupe socialiste et républicain, nous avions déposé un amendement visant à introduire des dispositions qui nous semblaient répondre à cette problématique des publics marginalisés – j’entends par là ceux qui ont des problèmes d’accès à l’outil informatique ou qui résident dans des zones blanches. La commission a refusé d’inscrire dans la stratégie nationale cette prise en compte de la marginalisation numérique pour que les économies réalisées par la dématérialisation profitent à la réduction de cette fracture.
Or, aujourd’hui, 15 % des foyers n’ont pas accès à internet, 500 communes sont considérées comme des zones blanches et beaucoup de nos concitoyens ne disposent pas d’équipements numériques suffisants ou ne maîtrisent pas l’outil numérique. Nous avons donc redéposé cet amendement en vue du nouvel examen du projet de loi en séance publique. J’espère que, dans sa sagesse, la chambre haute reconsidérera le sujet. Pouvons-nous laisser des millions de nos concitoyens au bord du chemin ?
J’en viens à mon deuxième axe.
Le texte que nous examinons ne nous semble pas non plus répondre à la question des moyens. L’extension du champ du rescrit, par exemple, peut-elle vraiment s’articuler avec une baisse du nombre de fonctionnaires ? En clair, plus de travail et moins de moyens ! Le risque est d’ores et déjà annoncé : une modification des responsabilités et des tâches des fonctionnaires.
Je m’attacherai à présent à certaines mesures clés du texte.
Pour commencer, je ne peux que féliciter la commission spéciale pour son travail sur l’extension du droit à régularisation en cas d’erreur au bénéfice des collectivités territoriales. Comme les usagers de l’administration, elles ont besoin du regard bienveillant de l’État dans le cadre des missions quotidiennes qu’elles effectuent. Il s’agit d’un marqueur à leur égard. Je pense tout particulièrement aux petites communes, qui sont souvent – nous ne pouvons que le regretter – démunies face à la complexité juridique des procédures dont elles ont la charge.
Monsieur le secrétaire d’État, au vu des sujets entrant dans le cadre de l’examen de ce texte, et par esprit d’équité, comment ne pas donner un droit à l’erreur aux collectivités locales, dont je rappelle qu’elles ne sont pas des administrations ?
Dans le cadre de l’extension du droit à l’erreur, le groupe socialiste et républicain avait également déposé en première lecture un amendement relatif à la déclinaison de la politique agricole commune. Cet amendement, adopté en séance publique par le Sénat, a été rejeté en nouvelle lecture par les deux commissions spéciales. J’en appelle à votre vigilance quand nous examinerons cet amendement, car nos agriculteurs doivent eux aussi faire face à la complexité croissante des dossiers sans pour autant bénéficier d’un appui technique pour les remplir. L’agriculture est un secteur clé qui ne saurait être négligé dans ce projet de loi.
Le doute est aussi très fort sur l’expérimentation de la régionalisation des chambres d’agriculture. Monsieur le secrétaire d’État, j’espère que le point de vue du Sénat sur l’article 19 sera entendu par l’Assemblée nationale. Le transfert aux chambres régionales d’agriculture des missions des chambres départementales ne peut en aucun cas se faire sans l’accord de ces dernières.
Plus surprenant et clivant, enfin, le retrait des associations cultuelles du champ des représentants d’intérêts. La loi relative à la transparence de la vie publique, dite Sapin II, avait tranché le débat en définissant un représentant d’intérêts comme une organisation de droit privé qui exerce régulièrement une activité ayant pour finalité d’influencer la décision publique, notamment en matière législative ou réglementaire, et entrant en communication avec des décideurs publics.
Notre logique n’est pas de discriminer, mais de rétablir l’obligation pour les associations religieuses de se déclarer comme telles. D’ailleurs, qui pourrait encore soutenir que les associations religieuses n’ont pas eu d’influence sur les parlementaires, et cela dans un passé très récent ? C’est une question d’honnêteté intellectuelle.
Un sentiment d’étonnement s’impose quand on compare votre empressement à renouer la confiance avec les associations cultuelles et la défiance, voire le mépris dont vous faites preuve envers les corps intermédiaires.
La confiance que nous appelons de nos vœux est une confiance retrouvée avec nos citoyens autour d’un engagement républicain, d’un accès égal aux droits. Pourquoi remettre en cause l’une des valeurs fortes de notre République, la laïcité, quand ce texte en appelle à une confiance retrouvée du public avec l’administration ?
Nous en appelons en toute logique à une cohérence dans la transparence de la vie publique. L’actualité m’oblige à vous faire remarquer que cette transparence et cette confiance que vous appelez, nous souhaiterions également et avant tout la voir portée au plus haut sommet de l’État.
Vous l’aurez compris, sans évolution notable sur les sujets qui nous opposent, le groupe socialiste et républicain s’abstiendra sur ce texte. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, ainsi que sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à M. Claude Malhuret. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste.)
M. Claude Malhuret. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui à nouveau un texte important pour refonder les relations entre l’administration et les usagers ; un texte qui peut être mis en perspective avec le discours du Président de la République devant le Congrès et avec vos annonces datant du début du mois, monsieur le secrétaire d’État, sur la réforme de vos services.
Le Gouvernement souhaite faire du retour de la confiance un axe majeur de son action. Il y réussit assez bien pour nos concitoyens, pour nos entreprises et pour les investisseurs, qui ont retrouvé confiance dans l’économie française. Il y réussit moins avec les élus locaux et avec les collectivités, avec lesquels la distance est malheureusement encore la règle, même si je connais votre souci des territoires, monsieur le secrétaire d’État.
Ce texte participe du choc de confiance que vous voulez créer à tous les niveaux de la société. Son importance tient avant tout à l’ambition d’un véritable changement de culture au sein de l’administration. Cela fait des années que nous essayons d’instaurer une culture de la confiance entre les administrations, les citoyens et les entreprises. Cela fait des années que nous cherchons à créer une administration plus responsable, plus ouverte, plus diligente et respectueuse des intérêts des forces vives de la Nation. Sans confiance, il ne peut y avoir ni sécurité juridique, ni croissance économique, ni surtout d’unité nationale.
Nous déplorons ainsi l’échec de la commission mixte paritaire, mais les désaccords étaient trop profonds. La commission spéciale du Sénat, présidée par Jean-François Husson, avait pourtant pris l’initiative de nombreux amendements pragmatiques de clarification, de précision ou tout simplement de suppression des dispositions les moins pertinentes. Elle avait également permis des évolutions substantielles, comme l’extension du bénéfice du droit à l’erreur aux collectivités territoriales et à leurs groupements.
Nous avions toutefois regretté en première lecture que cette volonté d’efficacité et de bon sens ait été poussée un peu loin sur certaines parties du texte. De même, la chasse légitime de notre commission à l’incompétence négative avait conduit à vider de leur substance plusieurs dispositions intéressantes du texte issu de l’Assemblée nationale.
Ces changements ont paru trop importants à nos collègues députés pour être pris en compte. Reconnaissons néanmoins, monsieur le secrétaire d’État, que tout n’est pas à jeter dans ce texte du Sénat, qui a beaucoup travaillé, et de façon constructive.
S’agissant du droit à l’erreur des collectivités territoriales, nous espérons des réponses plus étoffées que la position de principe selon laquelle celles-ci ne sont pas des usagers. Certes, mais les petites communes se trouvent souvent dans des situations comparables à celle d’usagers fragiles face à la complexité des normes et des procédures.
Vous nous proposez, dans le projet de réforme constitutionnelle, un droit à la différenciation des collectivités. Vous nous avez annoncé, monsieur le secrétaire d’État, une déconcentration de proximité de la part de l’administration fiscale. Allons au bout de la logique, et je vous le propose, admettons, sinon un droit à l’erreur des collectivités, du moins une meilleure articulation entre la décentralisation et la déconcentration dont les rythmes différents déboussolent parfois les élus et les usagers.
Enfin, je voudrais conclure en rappelant les responsabilités qui pèsent sur l’administration dans la mise en œuvre de ce texte. Celui-ci appelle en effet de nombreuses expérimentations, de nombreuses habilitations, de nombreux décrets d’application et des exigences d’évaluation. En un mot, une grande responsabilité pèse sur le Gouvernement et les administrations pour faire de ce texte une réussite concrète et tangible.
L’adoption de ce texte doit être non pas une fin, mais le début d’une nouvelle logique pour l’administration. Celle-ci sera largement responsable de son échec ou de son succès. Alors que vous commencez la restructuration de vos services, c’est autour de cette nouvelle logique de conseil et d’accompagnement que les équipes et les pratiques doivent être rénovées.
En fin de compte, ce texte n’est qu’un début : l’administration devra mériter, en se réformant, la confiance que le législateur et l’ensemble des Français placeront en elle pour simplifier et améliorer leur quotidien. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre.
Mme Nathalie Delattre. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, après l’échec de la commission mixte paritaire au début du mois d’avril, assumé par l’Assemblée nationale, nous examinons, en nouvelle lecture, le projet de loi pour un État au service d’une société de confiance.
« L’erreur est humaine, mais l’entêtement [dans son erreur] est diabolique. » Cette formule attribuée à Sénèque – cela fera plaisir à notre collègue Pascal Savoldelli (Sourires.) – garde toute sa modernité tant à l’adresse de nos collègues députés que pour ce qui concerne ce projet de loi, dont la principale mesure tend à généraliser le droit à l’erreur dans les relations entre l’administration et les administrés, particuliers comme entreprises.
Cela a été dit et répété, il s’agit d’un texte attrape-tout. Si le titre Ier comporte bien des mesures relatives au droit à l’erreur – lors de contrôles visant les usagers en matière de prestations sociales, en l’absence de certaines pièces justificatives dans la constitution d’un dossier, par l’extension et la généralisation de la pratique du rescrit –, les titres suivants sont porteurs de mesures les plus diverses : expérimentation de simplification dans la délivrance de titres, mutualisation de gestion de certificats de pensionnés de retraite, nombreuses habilitations à légiférer par ordonnance dans le domaine de la construction, accueil de la petite enfance, régime de responsabilité des agences de notation de crédit, et j’en passe.
Aussi, et afin de conserver le cap que mon groupe s’était fixé en première lecture et pour ne pas surcharger inutilement les débats en cette fin de soirée et de session extraordinaire, je concentrerai mon propos sur quelques points qui me paraissent particulièrement essentiels et qui n’ont, à mon sens, pas leur place dans ce projet de loi.
Je veux d’abord parler de l’article 38 visant, notamment, à supprimer l’obligation d’inscription au registre des représentants d’intérêts pour les associations cultuelles.
Si je remercie M. le secrétaire d’État Olivier Dussopt du compromis trouvé sur les revenus cultuels tirés d’immeubles de rapport, une promesse tenue comme à votre habitude,…
M. Julien Bargeton. Très bien !
Mme Nathalie Delattre. … la question du registre, que nous avions déjà soulevée en première lecture, continue, quant à elle, de poser des difficultés importantes. Je regrette que nous n’ayons pu parvenir à un accord ni en commission spéciale ni avec le Gouvernement sur ce point. Si elle est adoptée en l’état, cette disposition constituera un recul important par rapport à la loi de 2013 relative à la transparence de la vie publique.
Il n’y a rien de choquant à ce que les associations cultuelles fassent du lobbying et qu’elles soient considérées comme des représentants d’intérêts comme les autres auprès du parlement français et des pouvoirs publics ; c’est déjà le cas au niveau européen. Comme d’autres acteurs de la société civile, ces associations peuvent intervenir dans le débat public, dans le respect de la loi de 1905 et de l’article 1er de la Constitution, mais elles doivent le faire en toute transparence. Je proposerai donc de nouveau, en accord avec de nombreux collègues de cette assemblée, la suppression de l’alinéa 2 de cet article.
Pour changer de sujet et en cohérence également avec la position déjà exprimée, je demanderai de nouveau la suppression de l’article 19 portant habilitation à restructurer les réseaux de chambres d’agriculture par voie d’ordonnance. Malgré des améliorations apportées en commission spéciale, avec une meilleure prise en compte des prérogatives des chambres départementales, je continue à considérer que cette mesure est un cavalier législatif, préjudiciable aux réseaux de chambres d’agriculture.
Enfin, avec mon collègue Franck Menonville et en complémentarité avec le groupe socialiste et républicain, nous souhaitons nous associer à la volonté de garantir le droit à l’erreur dans l’application des règles administratives de la PAC, la politique agricole commune, qui posent tant de difficultés aux agriculteurs, un droit qui n’est pas assuré par le projet de loi dans sa rédaction actuelle et qu’il faut établir.
J’apporterai également mon plein soutien à l’amendement, adopté de nouveau par la commission spéciale, visant à garantir un droit à régularisation en cas d’erreur pour les collectivités territoriales. Les collectivités et leurs groupements ont effectivement besoin du regard bienveillant de l’État et des organismes de sécurité sociale dans les missions qu’ils accomplissent au quotidien et dans le cadre des procédures qu’ils engagent. Ainsi, avec cette disposition, nous aurions un dispositif complet garantissant une administration à l’écoute de tous les usagers, citoyens, entreprises et collectivités.
Lors de la première lecture, la majorité des membres du RDSE se sont abstenus sur le vote de ce projet de loi. Nous conditionnons, comme en première lecture, notre vote à l’adoption des amendements précités et, plus précisément, de celui qui porte sur la suppression de l’alinéa 2 de l’article 38 et l’obligation d’inscription des associations cultuelles au registre des représentants d’intérêts que nous demandons. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain, ainsi qu’au banc des commissions. – M. Julien Bargeton ainsi que Mmes Cécile Cukierman et Michèle Vullien applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Lavarde. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission spéciale, madame, monsieur les rapporteurs, nous sommes réunis ce soir – peut-être même prolongerons-nous nos débats dans la nuit – pour procéder à une nouvelle lecture du projet de loi dit « pour un État au service d’une société de confiance ». Il s’agit d’un texte aux ambitions multiples, dont l’objet central est de promouvoir l’établissement d’une nouvelle relation entre l’État et les citoyens, en leur qualité d’usagers de l’administration. Cette relation se veut être basée sur la confiance.
Je pense que nous pouvons tous ici appeler de nos vœux l’émergence d’une telle « société de confiance », même si l’on pourrait nous opposer que, au cours des derniers mois, le Gouvernement a semblé peu disposé à suivre cette voie : non-communication du rapport du Comité Action publique 2022 aux membres dudit comité ; échec de la négociation dans la mise en œuvre du dispositif de contractualisation avec les collectivités locales, deux exemples emblématiques parmi d’autres qui incitent plutôt à la méfiance.
Instaurer cette relation de confiance nécessite d’ajuster et de moderniser la pratique administrative.
Le droit à l’erreur constitue une innovation intéressante en ce qu’il écarte la possibilité de sanctionner le citoyen ayant commis une erreur de bonne foi et cherchant à la régulariser. Ce dispositif présente l’avantage de sortir l’administré de l’état de suspicion presque systématique qui prévalait jusqu’ici : après tout, si la présomption d’innocence guide notre procédure pénale, la même démarche ne serait-elle pas tout aussi naturelle dans les relations entre administration et administrés ?
Le droit au contrôle, contrepartie du droit à l’erreur, ouvre un droit pour le citoyen d’être contrôlé et donc de pouvoir s’assurer qu’il respecte bien la norme.
Mettre en œuvre ces deux droits permet d’établir les conditions d’une confiance mutuelle : pour l’administration, le citoyen ne sera plus systématiquement présumé comme étant délibérément en faute, tandis que, pour ses interlocuteurs, l’administration ne sera plus vue comme disposée à systématiquement les sanctionner, y compris ceux qui le seraient de bonne foi.
Autour de ce diptyque s’articulent de nombreuses autres mesures. Le rapport de certaines d’entre elles avec l’objet général du projet de loi est parfois ténu. Cela a conduit le Sénat à proposer une nouvelle dénomination de ce texte fourre-tout, « attrape-tout », multipliant les mesures expérimentales ou les habilitations à légiférer par ordonnance. Le nouveau titre « projet de loi renforçant l’efficacité de l’administration pour une relation de confiance avec le public » paraissait plus en adéquation avec le contenu réel du texte. Mais les députés ont considéré que ce titre tendait à « récuser la philosophie même du projet de loi dont l’ambition est, en changeant l’État, de susciter de nouveaux comportements sociaux ».
Mes chers collègues, il me semble que les dispositions hétéroclites de ce texte ne sont pas la parfaite illustration de cette ambition. En effet, dans le projet de loi adopté en nouvelle lecture par l’Assemblée nationale, nous trouvons de nombreuses mesures portant sur la modernisation des pratiques administratives : il s’agit notamment du développement des rescrits administratifs et autres actes opposables, du recours aux médiateurs, de la dématérialisation ou encore de l’essor du guichet unique. Je pense aussi à d’autres mesures concernant la simplification et l’évaluation des mesures administratives, comme la possibilité d’effectuer des regroupements volontaires d’établissements dans l’enseignement supérieur, la mise en place du « relayage » au domicile dans l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie ou encore la demande de plusieurs rapports au Gouvernement.
Enfin, je citerai des mesures plus éloignées de l’objet principal du texte, celles qui sont relatives aux énergies renouvelables, mais aussi au régime des associations cultuelles et à la responsabilité des agents publics.
Notre assemblée, notamment sur l’initiative de ses deux rapporteurs, avait réalisé un important travail d’amélioration et de mise en cohérence du texte initial. Malheureusement, et en dépit des efforts des sénateurs, les discussions en commission mixte paritaire n’ont pu donner lieu à un accord. L’une des raisons de cet échec a notamment été l’insistance de nos collègues députés du groupe La République En Marche à inscrire coûte que coûte à l’article 34 des dispositions tendant à remettre en cause les résultats des appels d’offres relatifs à la production d’électricité en mer à partir de l’énergie mécanique du vent.
Comme l’a si justement rappelé le rapporteur Jean-Claude Luche, si le Sénat ne peut être en désaccord avec l’objectif poursuivi, à savoir diminuer le coût de l’électricité pour les consommateurs, il ne pouvait rester muet sur la forme : des dispositions introduites par un amendement de dernière minute du Gouvernement – encore un, ai-je envie de dire ! –, échappant ainsi à l’avis du Conseil d’État et à l’étude d’impact. Si l’on en croit les déclarations du Président de la République au cap Fréhel, un accord sur la renégociation des contrats a été trouvé avec les trois consortiums lauréats. Que de temps perdu, alors même que le calendrier législatif de ces dernières semaines a été très chargé ! Je loue ici la sagesse de la commission spéciale, qui n’a pas souhaité rouvrir le débat.
Cependant, ce texte présente de nombreux éléments intéressants, mais dont la portée a été affaiblie par une étude d’impact jugée insuffisante par la commission spéciale, par un manque de lisibilité et par des changements d’arbitrage du Gouvernement sur des points importants. C’est, par exemple, le cas de l’article 38 relatif au statut des cultes. Était-il indispensable de traiter cette question complexe dans ce projet de loi ? Sans doute pas ! La dernière version de cet article, adoptée par l’Assemblée nationale et acceptée par la commission spéciale, a été en grande partie vidée de son contenu.
Le travail législatif effectué jusqu’à présent a permis d’améliorer le texte, et nous continuerons de le faire ce soir.
À l’occasion de la nouvelle lecture, les députés ont toutefois affiché leur désir d’aboutir à un compromis. Ils ont, à cette occasion, maintenu vingt et un articles dans la rédaction issue des travaux du Sénat. C’est la même volonté qui a animé les membres de la commission spéciale ; en témoigne la limitation du droit à l’erreur des collectivités territoriales aux petites communes. Cependant, sur d’autres points, comme les multiples demandes de rapport prévues aux articles 40, 41, 42 et 46, le Sénat n’a pas abandonné sa philosophie.
Le ministre de l’action et des comptes publics s’est engagé devant les députés à faire en sorte que les décrets d’application soient tous publiés avant le 31 décembre 2018. Plus rien ne s’oppose désormais à ce que le projet de loi entre en vigueur et, espérons-le, instaure cette société de confiance que nous appelons tous de nos vœux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Marie Bockel applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Vermeillet. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
Mme Sylvie Vermeillet. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à la suite de l’échec de la commission mixte paritaire le 5 avril dernier, nous voici aujourd’hui amenés à discuter en nouvelle lecture du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance. Ce texte, que l’on a pu résumer en deux mots – « confiance » et « simplification » –, a nourri de nombreux espoirs avant même son dépôt. Sont ici en jeu non seulement la confiance des citoyens envers leur administration, mais également la confiance des entreprises en l’efficacité de l’État.
Sur le plan de la simplification, le projet de loi procède du constat suivant lequel l’imbrication des procédures entrave trop souvent le bon fonctionnement des services publics, encourageant conséquemment la défiance des particuliers comme des entreprises. Ces espoirs, il faut bien le dire, ont été largement déçus.
Le projet de loi transmis par l’Assemblée nationale était parsemé de mesures superfétatoires. Nous nous sommes donc attachés à les faire disparaître en commission spéciale, puis en séance publique, contribuant ainsi à ancrer le texte dans la réalité.
Le Sénat s’est ainsi montré constructif, tentant de donner à ce texte une cohérence qui lui faisait défaut. Tout en supprimant un grand nombre de rapports parfaitement inutiles, nous avions cherché à sauvegarder les prérogatives du Parlement, en limitant rigoureusement la durée des habilitations à légiférer, la loi ne pouvant et ne devant se faire en permanence sans le Parlement.
Pourtant, à en croire le Gouvernement et sa majorité à l’Assemblée nationale, qui n’ont pas voulu entendre nos remarques, cette attitude constructive était vaine. Ainsi, malgré notre volonté de trouver un compromis, les députés ont choisi de faire échouer la réunion de la commission mixte paritaire, butant en particulier sur la reconnaissance du droit à l’erreur au bénéfice des collectivités locales et sur la question de l’éolien en mer.
Je ne reviendrai pas sur l’ensemble des arguments avancés en CMP. Je profite toutefois de l’occasion pour saluer la sagacité et la ténacité de la commission spéciale du Sénat et de ses rapporteurs qui, dans un esprit toujours positif et prospectif, n’ont déposé que vingt-quatre amendements. Cela prouve la volonté du Sénat de trouver un compromis, malgré les soixante-huit articles restant encore en discussion.
Après ces remarques sur la forme, j’en viens maintenant au fond.
Là encore, plusieurs points sont à déplorer, à commencer par l’article 2 relatif aux droits à l’erreur et au droit au contrôle. La commission spéciale du Sénat avait proposé plusieurs améliorations du dispositif, afin de le rendre plus incitatif, mais nous n’avons pas été écoutés par l’Assemblée nationale. C’est donc une bonne chose que la commission spéciale, par la voie d’amendements de son corapporteur, persiste à vouloir améliorer ce mécanisme.
J’émets, pour ma part, plus de réserves à propos de l’article 2 bis A, qui prévoyait d’étendre le bénéfice du droit à l’erreur aux collectivités territoriales. Si je demeure convaincue du bien-fondé de cette disposition, je ne pense pas qu’il faille à tout prix s’engager dans des compromis et dévoyer l’esprit initial de l’article en réservant le bénéfice de cette disposition aux communes de moins de 3 500 habitants et aux EPCI dont aucune commune membre n’a plus de 3 500 habitants.
Si votre proposition est compréhensible, madame la rapporteur, je ne m’en satisfais pas. Aucun seuil n’est fixé pour les administrés ou les entreprises. Aussi, parce qu’il doit en être ainsi pour les collectivités locales que nous représentons, j’ai déposé un amendement pour y remédier, comme je l’avais déjà fait en première lecture, et j’ai bien noté votre avis de sagesse bienveillante. Nous ne devons pas nous contenter de dispositions « par défaut ». Il est de notre devoir de ne pas stigmatiser certaines collectivités et de répondre ainsi aux attentes des maires et des exécutifs locaux.
Vous l’aurez malgré tout compris, mes chers collègues, le groupe Union Centriste n’est pas opposé à l’esprit de ce texte. Les objectifs sont louables. Nous déplorons en revanche la forme du débat et le sabotage de la CMP par l’Assemblée nationale. Nous voterons bien entendu ce projet de loi, en espérant que les recommandations et améliorations du Sénat trouveront un écho auprès de nos collègues députés. Il y va de la clarté et de l’efficience des dispositifs contenus dans ce texte. Les administrations, les citoyens et les collectivités locales attendent ces mesures avec impatience : ne les décevons pas ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je dirai quelques mots non pas pour répondre aux orateurs, mais pour faire quelques commentaires après la discussion générale.
Je veux d’abord vous remercier les uns et les autres du ton constructif de vos interventions et de votre volonté partagée, me semble-t-il, de faire en sorte que les dispositions faisant consensus entre les deux assemblées et le Gouvernement puissent trouver leur application dans les meilleures conditions.
C’est un exercice un peu singulier qui nous réunit ce soir dans la mesure où, comme l’a rappelé Mme la rapporteur, le texte dont nous débattons n’a pas fait l’objet d’un accord en CMP, pour des raisons que les uns et les autres ont évoquées. Mais, dans le même temps, au cours du débat, presque un tiers des dispositions et des préconisations portées par votre assemblée y ont été intégrées. De la même manière, nous avions accepté d’inscrire de nombreuses dispositions proposées par les députés lors de l’examen de ce texte par l’Assemblée nationale. Je dis cela pour vous prévenir de l’avis fréquemment défavorable aux amendements en discussion que je formulerai et m’en excuser par avance. En effet, je le répète, nous avons déjà intégré nombre de dispositions qui nous ont été proposées. Nous espérons que la suite du débat et, surtout, la mise en application de cette loi nous permettront d’avancer.
Par ailleurs, je souligne que ce texte traite, certes, des relations entre l’administration et les usagers, mais il contient aussi des dispositions propres à la simplification. Dès lors que l’on entre dans le champ de la simplification, il peut s’ensuivre un effet d’amoncellement, des mesures nécessitant du liant.
Il est certain que nous voulons aller plus loin encore en matière de simplification. Il est aussi certain que nous voulons réussir la mise en œuvre de ce texte pour faire en sorte que son application soit la plus concrète possible. C’est la raison pour laquelle, comme je l’ai dit dans mon propos liminaire, nous avons d’ores et déjà mobilisé les administrations. À cet égard, je puis vous annoncer que, dès ce soir, sur le portail du ministère de l’économie, des finances, de l’action et des comptes publics – www.economie.gouv.fr – et, plus spécifiquement, dans l’onglet propre à la DGFiP, est ouverte la plateforme de consultation des entreprises sur l’article 7, qui vise à définir par ordonnance les conditions d’une relation de confiance entre l’entreprise et l’administration. Ainsi, un peu par anticipation, nous avons commencé à consulter les entreprises, notamment sur la meilleure façon de bâtir cette relation de confiance.
Je veux dire à M. le rapporteur, et en écho à un certain nombre d’interventions, que si nous souhaitons maintenir les dispositions relatives à l’éolien offshore, c’est parce que les accords annoncés doivent être conclus avant la fin du mois et qu’ils sont en bonne voie de l’être. Nous avons besoin de cette base légale dans le cadre de nos discussions – vous avez parlé, me semble-t-il, de « rapport de force », pour ne pas dire une forme de pression – et en cas d’échec in fine. En la matière, ce qui nous rassemble – je salue moi aussi la volonté de la commission spéciale de laisser le Gouvernement avancer –, c’est la volonté de continuer à développer l’éolien offshore dans des conditions acceptables pour l’économie et les comptes publics.
Enfin, je ferai un clin d’œil au sénateur Pascal Savoldelli, qui a eu quelques mots qui se voulaient peut-être quelque peu provocateurs : Sénèque, qui a été cité à plusieurs reprises, disait qu’il est plus facile de se contenir que de se retirer d’une querelle. Je ne rentrerai donc pas dans la querelle ce soir.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission spéciale.
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avant l’examen du texte de la commission, permettez-moi de faire quelques brèves observations sur les conditions dans lesquelles ce projet de loi a été examiné.
Tout d’abord, je formulerai des regrets à la suite de nombreux orateurs dans la discussion générale.
Mon premier regret concerne la durée bien trop longue d’examen de ce texte, déposé, je le rappelle, à la fin du mois de novembre 2017 et pour lequel le Gouvernement avait engagé la procédure accélérée. Nous sommes à la fin du mois de juillet ! Cette extrême lenteur, en clair ce temps perdu, n’est aucunement imputable au Parlement. Il est imputable au Gouvernement, qui a volontairement tardé et se retrouve pris au piège de l’accumulation des textes de cette session extraordinaire.
Le deuxième regret porte sur l’intrusion de débats extérieurs, vous venez d’en parler, monsieur le secrétaire d’État, au cœur même du projet de loi, lesquels ont nui à sa cohérence. Quel rapport entre l’efficacité de l’administration et la relation de confiance à établir avec les citoyens et les éoliennes maritimes ou les modes de garde de la petite enfance ?
Mon troisième regret, enfin, c’est celui d’avoir vu dans nos débats deux conceptions différentes de ce que doit être la navette parlementaire et, plus généralement, le rôle du Parlement, entre l’Assemblée nationale et le Sénat. L’échec de la réunion de la commission mixte paritaire le 4 avril dernier en a été une triste illustration, puisque nos collègues députés nous ont tout simplement et tout bonnement reproché de rechercher des compromis !
Ensuite, je déplore l’impréparation des textes présentés par le Gouvernement. Cela conduit à des demandes d’habilitation formulées sans aucune idée de ce que seront les orientations retenues et également à des changements de cap en cours de navette qui nuisent à la clarté des débats.
Pour terminer sur une note plus optimiste, je veux souligner quelques motifs de satisfaction.
Au cours de l’examen de ce texte, le Sénat a démontré sa capacité à moderniser ses méthodes de travail, puisque nous avons examiné en première lecture une partie des articles selon la procédure de la législation en commission.
M. Julien Bargeton. C’est vrai !
M. Jean-François Husson, président de la commission spéciale. Par ailleurs, la formule de la commission spéciale a produit des effets positifs. Nos débats ont été constructifs, riches, attentifs, et je tiens en cet instant à en remercier tous mes collègues ainsi que, bien évidemment, Mme et M. les rapporteurs. La commission spéciale, en faisant travailler des sénateurs de toutes les commissions sur des sujets qui ne sont pas abordés dans leurs commissions permanentes de rattachement, est un facteur d’ouverture et de cohésion.
Si l’on prend en compte la globalité du projet de loi et la proportion très importante des articles adoptés dans les mêmes termes par les deux assemblées, il est clair que les objectifs poursuivis, à savoir renforcer l’efficacité de l’administration et établir et conforter une relation de confiance avec le public, ont bien été partagés et soutenus ; c’est là l’essentiel.
Il nous reste, lors de cette nouvelle lecture, à convaincre le Gouvernement et l’Assemblée nationale sur quelques sujets. J’en retiendrai pour ma part deux : la nécessité pour l’État d’accorder aux collectivités locales la même bienveillance qu’il accorde aux citoyens et aux entreprises – un sujet important, pour ne pas dire majeur – et l’importance de prendre en compte les réalités de terrain et de ne pas imposer de cadre trop rigide, par exemple pour ce qui concerne les référents dans les maisons de services au public. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission spéciale.
projet de loi pour un état au service d’une société de confiance
TITRE PRÉLIMINAIRE
DISPOSITIONS D’ORIENTATION ET DE PROGRAMMATION
Article 1er et annexe
(Non modifié)
La stratégie nationale d’orientation de l’action publique, annexée à la présente loi, est approuvée.
Annexe
(Non modifié)
La présente stratégie nationale énonce les orientations et les objectifs de l’action publique vers une société de confiance, d’ici à 2022.
I. – (Non modifié)
II. – Vers une action publique modernisée, simplifiée, décentralisée et plus efficace
L’action publique fait l’objet d’évaluations régulières, notamment quant à son efficacité, son mode d’organisation et sa capacité à satisfaire les usagers dans leurs demandes de conseils et de services. Les statistiques sur la mise en œuvre des pénalités sont publiées, en distinguant celles figurant dans les propositions de rectification ou les notifications de bases imposées d’office de celles maintenues à l’issue de la procédure de redressement.
Les missions de l’administration sont régulièrement évaluées, y compris de manière indépendante, notamment quant à leur pertinence pour répondre aux nouveaux besoins de la société. L’évaluation de l’administration associe les personnes intéressées, dont les propositions sont prises en compte pour l’organisation et l’adaptation de l’action publique.
L’organisation de l’administration s’adapte constamment à l’évolution de ses missions en tenant compte des nécessités de l’aménagement du territoire.
Les agents publics bénéficient régulièrement d’une formation et d’un accompagnement leur permettant de s’adapter aux évolutions des missions de l’administration.
L’organisation administrative prend en considération la diversité et la spécificité des territoires.
Les moyens pour mener à bien l’action publique sont déterminés en fonction de leur adaptation aux objectifs, quantitatifs et qualitatifs, à atteindre.
L’action publique n’entraîne l’édiction d’une norme que si celle-ci est strictement nécessaire à sa réalisation.
L’action publique doit permettre la réduction des délais administratifs.
Toute décision publique prend en compte le coût qu’elle implique pour son auteur, ses destinataires et les tiers ainsi que la complexité des règles particulières qu’ils doivent appliquer et respecter. Ce coût et ces règles doivent être limités au strict nécessaire et proportionnés aux objectifs à atteindre.
L’administration prend en considération les contraintes horaires du public dans ses horaires d’ouverture et met en œuvre les moyens nécessaires permettant d’organiser un accueil téléphonique efficient.
La proximité territoriale doit permettre à l’administration d’assurer le service public sur tout le territoire de la République, notamment grâce à l’implantation des maisons de services au public.
L’administration doit assurer, notamment aux personnes vulnérables ou n’utilisant pas l’outil numérique, des possibilités de communication et de médiation adaptées à leurs besoins et à leur situation.
Tout usager des services publics doit pouvoir consulter l’état de sa situation administrative et de l’avancement du traitement de ses démarches et demandes.
Le Gouvernement se fixe pour objectifs, s’agissant de l’administration de l’État :
1° La dématérialisation de l’ensemble des démarches administratives, en dehors de la première délivrance d’un document d’identité, d’ici à 2022, avec la prise en compte des besoins d’accompagnement des citoyens ayant des difficultés d’accès aux services dématérialisés ;
2° L’institution du droit pour toute personne de ne pas être tenue de produire à l’administration une information déjà détenue ou susceptible d’être obtenue auprès d’une autre administration.
L’État, les collectivités territoriales et leurs groupements ainsi que les autres personnes publiques et les personnes morales de droit privé chargées d’une mission de service public administratif concourent à la mise en œuvre de la présente stratégie nationale.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, sur l’article.
M. Henri Cabanel. Apprécier l’intérêt public et l’ensemble des enjeux très en amont devrait être « la » cause commune des élus qui ont un projet et de l’administration qui va instruire les différentes phases de ce projet.
Dans la vraie vie, la réalité est tout autre : les élus foncent souvent tête baissée dans la phase d’opérationnalité et se heurtent à des administrations qui, au mieux, s’en tiennent strictement à la lettre, sans comprendre les difficultés concrètes vécues par les élus, et qui, au pire, interprètent les textes et donnent parfois des avis divergents. Le tout crée un malaise palpable sur le terrain entre les élus et les fonctionnaires de l’État et induit surtout des blocages qui nuisent in fine aux populations. Pourtant, les solutions et les pistes de travail existent pour redonner de la confiance aux trois parties prenantes : citoyens, élus et administrations.
En premier lieu, le certificat de projet, qui est peu connu et donc peu utilisé. Cet instrument de sécurité juridique et de stabilisation du droit permet au préfet de département de notifier un engagement à un porteur de projet sur les différentes procédures à respecter et les délais de délivrance des autorisations. Expérimenté en 2014 dans différents départements, il a été pérennisé au moment de la création de l’autorisation environnementale unique en tant qu’étape préalable au dépôt du dossier d’autorisation. Cette mesure est en vigueur depuis le 1er mars 2017.
Une autre solution pourrait être mise en place facilement : connecter les administrations entre elles pour décloisonner l’instruction. Une « équipe projet » serait systématiquement constituée en amont, composée d’un pilote élu et d’un pilote pour l’administration. L’idée est de mettre autour de la table toutes les administrations qui, du coup, ne pourront plus camper sur des positions figées qui se contredisent souvent.
Enfin, je rappelle l’une des propositions issues de la mission d’information relative à la démocratie, que j’ai présidée en 2017 aux côtés de Philippe Bonnecarrère, rapporteur : envisager, à long terme, la création d’une procédure continue de consultation du public couvrant toutes les phases du projet d’infrastructure et placée sous l’égide d’un garant désigné par la Commission nationale du débat public.
Tout cela ne pourra se faire qu’en changeant de méthode : changer la méthode de travail en passant d’un travail individuel à un travail collectif ; changer les postures et les mentalités. Comme le veut le projet de loi, l’administration doit revenir à sa source : le conseil et l’accompagnement.
M. le président. Monsieur Cabanel…
M. Henri Cabanel. Pour ce faire, les équipes doivent avoir une nouvelle doctrine commune. La volonté du Gouvernement de supprimer 120 000 fonctionnaires est contradictoire avec ce désir de changement. Permettez-moi de douter de la réussite de ce projet de loi. Si vous diminuez les effectifs, cela aura pour conséquence de creuser encore le fossé entre les administrations, les citoyens et les élus.
M. le président. Mes chers collègues, je vous invite vraiment à respecter le temps qui vous est imparti pour que nous puissions terminer l’examen de ce texte ce soir.
L’amendement n° 10, présenté par Mmes Préville, Taillé-Polian et Meunier, MM. Durain, Kanner et Cabanel, Mme Espagnac, MM. Lurel, Mazuir et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Les économies réalisées par la dématérialisation sont prioritairement mobilisées à la mise en œuvre de mécanismes d’accompagnement des publics exposés au risque de marginalisation numérique.
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. La dématérialisation des procédures par les services publics conduit à l’exclusion d’un certain nombre d’usagers, qui se retrouvent dans l’incapacité d’accomplir leurs démarches. C’est le cas des personnes qui résident dans les zones blanches, des personnes qui ne sont pas pourvues de matériel informatique ou encore de celles qui ne maîtrisent pas l’outil numérique.
Dans le même temps, le ministre de l’économie et des finances annonce une économie de plus de 60 millions d’euros grâce à la dématérialisation des feuilles d’impôts, des passeports ou des permis de conduire.
Il serait souhaitable qu’une partie des gains réalisés grâce à cette dématérialisation des services publics soit consacrée au financement des services d’accueil du public, aux personnes les plus vulnérables notamment, par exemple dans les maisons de services au public. Il est important de conserver une voie alternative aux services numériques pour ne pas favoriser un processus de marginalisation numérique.
C’est un fait : nous avons et garderons pour des années encore des citoyens vulnérables face au numérique. Ne les laissons pas au bord du chemin et choisissons de les accompagner tant qu’il le faudra, par esprit d’égalité et de fraternité en somme !
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Nous gardons le même point de vue qu’en première lecture au sujet de l’annexe à laquelle renvoie l’article 1er. Il s’agit de « droit mou » dont les principes ressemblent davantage à des incantations qu’à des dispositions normatives. Si vous vous souvenez de l’examen de ce texte en première lecture, vous devez vous rappeler que beaucoup de nos collègues avaient voulu ajouter énormément de phrases et de souhaits. Or nous ne désirons pas la modifier.
Sur le fond, le principe que vous évoquez, ma chère collègue, semble bien entendu louable. Toutefois, s’il devait produire des effets, il irait à l’encontre du principe d’universalité budgétaire. Il porterait également atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales.
Pour toutes ces raisons, nous sommes défavorables à l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement, exactement pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées par Mme la rapporteur.
M. le président. Je mets aux voix l’ensemble constitué par l’article 1er et l’annexe.
(L’article 1er et l’annexe sont adoptés.)
TITRE Ier
UNE RELATION DE CONFIANCE : VERS UNE ADMINISTRATION DE CONSEIL ET DE SERVICE
Chapitre Ier
Une administration qui accompagne
Article 2
I. – Le code des relations entre le public et l’administration est ainsi modifié :
1° (Non modifié) L’intitulé du titre II du livre Ier est ainsi rédigé : « Les procédures préalables à l’intervention de certaines décisions » ;
2° Le même titre II est complété par des chapitres III et IV ainsi rédigés :
« CHAPITRE III
« Droit à régularisation en cas d’erreur
« Art. L. 123-1. – Une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation ou ayant commis une erreur matérielle lors du renseignement de sa situation ne peut faire l’objet, de la part de l’administration, d’une sanction, pécuniaire ou consistant en la privation de tout ou partie d’une prestation due, si elle a régularisé sa situation de sa propre initiative ou après avoir été invitée à le faire par l’administration, qui y est tenue, dans le délai que celle-ci lui a indiqué.
« La sanction peut toutefois être prononcée, sans que la personne en cause ne soit invitée à régulariser sa situation, en cas de mauvaise foi ou de fraude.
« Les premier et deuxième alinéas ne sont pas applicables :
« 1° Aux sanctions requises pour la mise en œuvre du droit de l’Union européenne ;
« 2° Aux sanctions prononcées en cas de méconnaissance des règles préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l’environnement ;
« 3° Aux sanctions prévues par un contrat ;
« 4° Aux sanctions prononcées par les autorités de régulation à l’égard des professionnels soumis à leur contrôle.
« Art. L. 123-2. – Au sens du présent titre :
« 1° Est de mauvaise foi, toute personne ayant délibérément méconnu une règle applicable à sa situation ;
« 2° A procédé à des manœuvres frauduleuses, toute personne ayant délibérément méconnu une règle applicable à sa situation et mis en œuvre des procédés destinés à masquer cette méconnaissance ou à la présenter sous la forme d’une opération régulière, dans le but de faire obstacle au pouvoir de contrôle et de vérification de l’administration.
« En cas de contestation, la preuve de la mauvaise foi et de la fraude incombe à l’administration.
« CHAPITRE IV
« Droit au contrôle et opposabilité du contrôle
« Art. L. 124-1. – Sans préjudice des obligations qui lui incombent, toute personne peut demander à faire l’objet d’un contrôle prévu par les dispositions législatives et réglementaires en vigueur. La demande précise les points sur lesquels le contrôle est sollicité.
« L’administration procède à ce contrôle dans un délai maximum de six mois, sauf en cas de mauvaise foi du demandeur, de demande abusive ou lorsque la demande a manifestement pour effet de compromettre le bon fonctionnement du service ou de mettre l’administration dans l’impossibilité matérielle de mener à bien son programme de contrôle.
« Art. L. 124-2. – Sous réserve des droits des tiers, toute personne contrôlée peut opposer les conclusions expresses d’un contrôle effectué en application de l’article L. 124-1 à l’administration dont elles émanent, dès lors que celle-ci a pu se prononcer en toute connaissance de cause.
« Ces conclusions expresses cessent d’être opposables :
« 1° En cas de changement de circonstances de droit ou de fait postérieur de nature à affecter leur validité ;
« 2° Lorsque l’administration procède à un nouveau contrôle donnant lieu à de nouvelles conclusions expresses.
« Les premier à quatrième alinéas du présent article ne peuvent faire obstacle à l’application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l’environnement.
« Lorsque l’administration constate, à l’issue de son contrôle, une méconnaissance des règles applicables à la situation de la personne contrôlée, celle-ci peut régulariser sa situation dans les conditions prévues aux articles L. 123-1 et L. 123-2. » ;
3° Après la quatorzième ligne du tableau du second alinéa des articles L. 552-3, L. 562-3 et L. 572-1, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :
« |
L. 123-1 et L. 123-2 |
Résultant de la loi n° … du … pour un État au service d’une société de confiance |
|
L. 124-1 et L. 124-2 |
Résultant de la loi n° … du … pour un État au service d’une société de confiance |
». |
II. – (Non modifié)
M. le président. L’amendement n° 16, présenté par MM. Bocquet, Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
M. Pierre Ouzoulias. Par les hasards de l’existence, certains articles prennent un relief particulier à la lumière d’événements récents, dont je ne parlerai pas, je vous rassure, même si tout le monde comprend à quelle situation je veux faire allusion. (Sourires.) C’est le cas de l’article 2, qui prévoit, en son alinéa 6, qu’« une personne ayant méconnu pour la première fois une règle applicable à sa situation […] ne peut faire l’objet, de la part de l’administration, d’une sanction ».
Quand on prend la liste des exonérations à ce principe, on s’aperçoit qu’un certain nombre d’actes commis ces derniers jours n’y figurent pas. Dès lors, vous comprenez bien que cet article rapporté à la situation actuelle nous poserait d’énormes problèmes, puisque, tel qu’il est rédigé, il ne prend pas en compte le contexte dans lequel la faute a été réalisée.
Certains considèrent que cette faute est mineure, quand d’autres estiment qu’il s’agit d’une affaire d’État. En l’occurrence, l’article 2 nous pose un immense problème, parce que le principe sur lequel il repose est tellement vaste qu’il en devient inapproprié, compte tenu encore une fois des événements récents.
Nous vous proposons de laisser passer un certain nombre de jours, puis de revenir après un temps de réflexion avec une meilleure rédaction, car, aujourd’hui, celle-ci nous semble dangereuse.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Le présent amendement tend à supprimer l’article 2, qui instaure un droit de régularisation en cas d’erreur et un droit au contrôle au bénéfice de tout usager de l’administration.
Je peux comprendre les motivations qui vous ont conduit à déposer cet amendement, mon cher collègue, dans la mesure où j’ai moi-même déploré en première lecture l’absence d’une véritable étude d’impact sur ces dispositions. Néanmoins, j’ai tout de suite indiqué que j’adhérais au dispositif proposé, qui consiste à simplifier les démarches des usagers, dans le respect du droit. C’est pourquoi j’ai présenté une série d’ajustements, adoptés par le Sénat en première lecture, et destinés à rendre le dispositif plus précis et plus incitatif, tout en renforçant l’accès à ce nouveau droit pour tous les usagers.
Ces modifications ont de nouveau été intégrées au texte de la commission en nouvelle lecture, puisque les propositions du Sénat n’ont pas été prises en compte par l’Assemblée nationale, sans véritable justification d’ailleurs. Parmi ces propositions, et s’agissant du droit à l’erreur, nous avons notamment adopté une définition de la fraude applicable au droit à l’erreur, qui complète celle de la mauvaise foi.
Je rappelle également que le champ d’application retenu est celui des procédures dans lesquelles l’administration peut appliquer une sanction pécuniaire ou une sanction consistant dans la privation ou la suspension d’une prestation due. Ce champ est donc assez limité et concerne bien les bénéficiaires des prestations sociales.
S’agissant du droit au contrôle, enfin, nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen de l’amendement n° 17, mais je tiens simplement à rappeler que l’administration peut toujours refuser le contrôle de manière discrétionnaire, si cette décision est justifiée.
La commission est donc défavorable à l’amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. L’article 2 est la pierre angulaire du texte que nous présentons pour établir une nouvelle relation de confiance entre l’usager et l’administration. Bien que nous ayons quelques divergences avec l’approche de la commission spéciale du Sénat, nous ne souhaitons évidemment pas la suppression de cet article. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à l’amendement.
M. le président. La parole est à M. Pascal Savoldelli, pour explication de vote.
M. Pascal Savoldelli. M. le secrétaire d’État est monté au filet sur Sénèque. Moi, j’adore l’humour et l’esprit. Alors, je vais lui retourner une balle de fond de court : « Le bon juge condamne le crime sans condamner le criminel. » Ça vous fera réfléchir sur la situation actuelle.
M. Julien Bargeton. On avance…
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 9 rectifié est présenté par Mmes Préville, Taillé-Polian et Meunier, MM. Durain, Kanner et Cabanel, Mme Espagnac, MM. Lurel, Mazuir et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° 14 rectifié est présenté par M. Menonville, Mme N. Delattre, MM. Requier, Arnell et Artano, Mme Costes, MM. Gabouty et Guillaume, Mme Jouve, M. Labbé, Mme Laborde et M. Vall.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 10
Compléter cet alinéa par les mots :
, à l’exception de la déclinaison de la politique agricole commune laissée à l’appréciation des États membres
La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° 9 rectifié.
Mme Angèle Préville. Le présent projet de loi exclut de l’application du droit à l’erreur les règles issues du droit européen. Or, dans le cas de la politique agricole commune, la PAC, il existe plusieurs volets définis par les États membres.
Chaque année, pour bénéficier des aides financières européennes de la PAC, les agriculteurs doivent remplir des dossiers de demande, rédigés par l’administration et les services français, dans lesquels il n’est pas rare de se perdre. Les nouveaux dispositifs de la PAC impliquent des dossiers de plus en plus complexes, et les formulaires demandent un haut degré de précision.
Le travail quotidien de nos agriculteurs est rude, prenant, vous le savez. Ils n’ont aujourd’hui ni forcément le temps ni l’appui technique pour remplir ces dossiers. Cet amendement vise donc à faire en sorte que, dans les domaines définis par les États membres, en l’occurrence ceux qui relèvent des décisions de l’État français, le droit à l’erreur puisse s’appliquer.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Delattre, pour présenter l’amendement n° 14 rectifié.
Mme Nathalie Delattre. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Ces deux amendements tendent à inclure dans le champ d’application du droit à l’erreur les sanctions relatives à la politique agricole commune.
Comme je l’ai déjà expliqué en première lecture et en commission, si je comprends bien l’intention des auteurs de ces amendements, il n’est pas utile de formaliser expressément dans la loi le fait que les sanctions prises en application de la déclinaison de la politique agricole commune, laissées à l’appréciation des États membres, sont bien incluses dans le champ d’application du droit à l’erreur, puisque c’est déjà le cas. En effet, en application des dispositions qui figurent à l’article 2, chaque fois que les États membres disposeront d’une marge d’appréciation dans le prononcé d’une sanction, les agriculteurs pourront faire jouer leur droit à l’erreur dans les conditions de droit commun définies aux articles L. 123-1 et L. 123-2 du code des relations entre le public et l’administration, nouvellement créés par le projet de loi.
En revanche, les sanctions qui doivent être prises en application du droit de l’Union européenne et qui ne sont pas laissées à l’appréciation des États membres devront être appliquées sans qu’il soit possible d’y déroger, comme le prévoient également les dispositions de l’article 2, conformément à nos engagements juridiques européens.
En outre, ces amendements ont pour objet de réaffirmer ce principe pour une seule matière, la PAC, alors que celui-ci est d’ores et déjà satisfait et garanti par le dispositif proposé pour l’ensemble des politiques faisant l’objet d’une harmonisation européenne.
Non seulement l’objet des amendements est satisfait, mais leur adoption risquerait en plus d’induire des interprétations a contrario pour les autres politiques européennes qui pourraient éventuellement être concernées. Pour toutes ces raisons, je demande aux auteurs des amendements de bien vouloir les retirer ; à défaut, j’y serai défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Ne sont exclus du droit à l’erreur que les cas dans lesquels la France ne dispose pas de marges d’appréciation pour prononcer une sanction en application des règles européennes. Pour les agriculteurs, c’est donc seulement lorsque l’État membre n’a pas d’autre choix que d’infliger une sanction au titre de la politique agricole commune que le droit à l’erreur ne s’appliquera pas. En revanche, chaque fois que les États membres disposent d’une marge d’appréciation dans le prononcé d’une sanction, les agriculteurs pourront faire jouer leur droit à l’erreur.
Comme l’a rappelé Mme la rapporteur, ce que je dis pour les agriculteurs vaut pour l’ensemble des personnes concernées par une politique communautaire.
Considérant la demande des auteurs de cette disposition comme satisfaite, le Gouvernement a apporté son soutien à sa suppression à l’Assemblée nationale. C’est ce qui me conduit aujourd’hui à émettre un avis défavorable sur les amendements qui visent à la rétablir.
M. le président. Madame Préville, l’amendement n° 9 rectifié est-il maintenu ?
Mme Angèle Préville. Oui, monsieur le président.
M. le président. Madame Delattre, l’amendement n° 14 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nathalie Delattre. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 14 rectifié est retiré.
La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote sur l’amendement n° 9 rectifié.
M. Marc Laménie. On peut vraiment comprendre les auteurs de cet amendement, car ils prennent en compte les difficultés que rencontre le monde agricole avec toutes les démarches liées aux dossiers de demande d’aides européennes dans le cadre de la politique agricole commune. Il faut reconnaître que tout cela est particulièrement compliqué. D’ailleurs, cela fait quelques années que l’on dénonce ces pratiques technocratiques.
Cela étant, je m’alignerai sur la position des rapporteurs, en soulignant le travail considérable accompli par toutes celles et tous ceux qui, issus de commissions différentes, se sont regroupés au sein de cette commission spéciale. Je signale à ce titre que le rapport de la commission comporte 270 pages.
L’examen de cet amendement me permet aussi de rebondir modestement sur l’intitulé du chapitre Ier, dont fait partie l’article 2. Je le dis, cet intitulé est trop large. Derrière cette « administration qui accompagne », beaucoup de ministères sont concernés. Ils accompagnent aussi bien les chefs d’entreprise que les particuliers, les sociétés ou les collectivités locales.
Malgré cet amendement, dont je comprends et respecte tout à fait l’esprit, notamment parce qu’il a le mérite de poser des questions qui ne sont pas nouvelles, on peut comprendre avec un peu de recul la position des rapporteurs, à laquelle je me rallierai. (Mmes Dominique Vérien et Michèle Vullien applaudissent.)
M. le président. L’amendement n° 17, présenté par MM. Bocquet, Collombat et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 17 à 29
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pascal Savoldelli.
M. Pascal Savoldelli. Dans un premier temps, permettez-moi de relire l’avis du Conseil d’État sur le présent projet de loi.
Si « le Gouvernement entend ainsi privilégier le dialogue et le conseil au détriment du contrôle et de la sanction et renforcer la sécurité juridique des personnes », le Conseil d’État « estime qu’en créant une procédure supplémentaire sans simplifier les normes et les procédures existantes, le mécanisme du “droit au contrôle” […] n’y répond que très imparfaitement ».Il ajoute que « ce dispositif, dont le champ d’application est extrêmement vaste, pourrait porter atteinte au bon fonctionnement de l’administration dès lors qu’il prévoit que celle-ci est tenue de faire droit à cette demande dans un délai raisonnable sans tenir suffisamment compte de ses moyens et de ses effectifs ». Il « relève que les moyens des services de l’État ont souvent été fortement réduits et ne lui permettent pas toujours d’assumer ses missions premières, au risque d’exposer la responsabilité de l’État et la responsabilité pénale de ses agents ».
Je crois que ces remarques sont tout à fait fondamentales. Ne prenons qu’un seul exemple, celui de l’administration fiscale, qui, bon an mal an, réalise entre 40 000 et 45 000 contrôles sur place avec ses équipes de vérificateurs. Je vous invite, mes chers collègues, à vous reporter au document d’évaluation des voies et moyens, en annexe du projet de loi de finances, et notamment à la partie consacrée aux résultats du contrôle fiscal.
Le contrôle sur pièces est autrement plus important : il concerne plus ou moins 570 000 articles au titre de l’impôt sur le revenu, ce qui peut représenter beaucoup, mais concerne in fine moins de 200 % des articles.
Le contrôle sur place n’est pas fait pour le contribuable, disons « ordinaire ». On peut même penser, comme le fait le Conseil d’État, que « le projet du Gouvernement pourrait emporter des effets d’aubaine au bénéfice des personnes les plus à même de connaître le droit qui leur est applicable et de disposer, en interne, de compétences et de conseils juridiques adaptés à leur situation ».
Devons-nous mettre en question l’efficacité des services chargés du contrôle fiscal, élément crucial de la lutte contre la fraude, pour ce qu’on pourrait appeler un droit au contrôle, qui risque fort de n’intéresser que peu de monde, fût-il bien informé de ses droits ou particulièrement fortuné ? Déjà qu’une différence existe probablement entre ceux qui évitent les tribunaux en transigeant avec la CIF, la commission des infractions fiscales, et ceux qui sont soumis, pieds et poings liés, au verrou de Bercy.
Mes chers collègues, je vous remercie de bien vouloir voter l’amendement de notre groupe, qui rétablit l’égalité de traitement entre les contribuables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission spéciale ?
Mme Pascale Gruny, rapporteur. Le présent amendement vise à supprimer le droit au contrôle au bénéfice des usagers, prévu à l’article 2 – et auquel nous tenons beaucoup –, au motif que le dispositif proposé ne tiendrait pas compte des moyens et des effectifs de l’administration.
Or l’article L. 124-1 du code des relations entre le public et l’administration, nouvellement créé, prévoit bien que l’administration pourra toujours refuser de procéder à ce contrôle de manière discrétionnaire. Ce refus est possible dans plusieurs hypothèses : la demande est faite de mauvaise foi – vous avez parlé de ces entreprises qui pourraient tenter d’agir de manière incorrecte ou abusive – ou a manifestement pour effet de compromettre le bon fonctionnement du service ou de mettre l’administration dans l’impossibilité matérielle de mener à bien son programme de contrôle. Ces précautions sont donc bien intégrées au dispositif.
Mon cher collègue, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, pour les mêmes raisons que celles qui viennent d’être exprimées par Mme la rapporteur.
J’ajouterai simplement deux remarques.
D’abord, en matière de citations, ce n’est faire injure à personne que de dire que je préfère la prose de Sénèque à celle des auteurs du Conseil d’État. (Sourires.)
Ensuite, monsieur Savoldelli, vous avez évoqué la CIF et le verrou de Bercy.
Il se trouve que le projet de loi relatif à la lutte contre la fraude a été examiné aujourd’hui même en commission des finances à l’Assemblée nationale. Le Gouvernement, par la voix de Gérald Darmanin, a approuvé un amendement d’une députée de la majorité, Émilie Cariou. S’il est adopté in fine dans ces termes, il permettra de rendre automatique le transfert des dossiers par les services de Bercy au parquet pour toutes les fraudes constatées d’un montant supérieur à 100 000 euros, charge ensuite au parquet de définir s’il y a lieu ou non d’ouvrir une instruction et de porter plainte.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour explication de vote.
Mme Sophie Taillé-Polian. Nous aurons peut-être l’occasion de débattre en commission mixte paritaire du projet de loi relatif à la lutte contre la fraude. Je note que M. Darmanin est maintenant favorable à un dispositif auquel il était défavorable ici même il y a encore trois semaines…
Vous l’avez dit, le présent projet de loi n’est pas un texte de simplification, et on peut le regretter. Même si nous ne sommes pas opposés au droit au contrôle – c’est pourquoi nous nous abstiendrons sur l’amendement de notre collègue Savoldelli –, nous restons quand même extrêmement inquiets des effets de ce droit dans le contexte actuel d’une nouvelle réorganisation de Bercy et, surtout, d’une suppression d’un nombre extrêmement important de postes.
Par ailleurs, les rescrits ne donneront pas lieu à un allégement des contrôles, mais à un assouplissement des motifs de recouvrement, ce qui impliquera un travail important des services de Bercy.
S’agissant du droit au contrôle, nous subissons à nouveau une cure d’amaigrissement : nous aurons donc moins de contrôles ciblés sur les entreprises ou les contribuables que l’on soupçonne, ou qui laissent derrière eux un certain nombre de faits qui laissent penser à l’administration fiscale qu’il y a matière à contrôle.
Au début du mois de juillet, la presse s’est fait l’écho de la suppression de 20 000 postes à Bercy d’ici à 2022. Si, in fine, aucun chiffre n’a été officiellement donné ni par le ministre de l’action et des comptes publics ni par vous-même, monsieur le secrétaire d’État, M. Darmanin a quand même jugé illusoire de croire que les transformations ne s’accompagneront pas d’une baisse du nombre des emplois publics dans les effectifs de Bercy.
Évidemment, tout cela nous fait craindre pour la mise en œuvre du présent projet de loi, qui comporte un certain nombre de dispositions auxquelles nous sommes favorables – comme le droit à l’erreur –, parce qu’elles sont plutôt en faveur des usagers, même si l’on peut s’interroger sur le profil des usagers que celles-ci favoriseront. En effet, il s’agira principalement de ceux qui se trouvent dans une relation construite avec l’administration fiscale, ce qui n’est pas le cas de tous les usagers, notamment des personnes les plus modestes.
En ce qui concerne la mise en œuvre du droit à l’erreur, on va devoir ponctionner des moyens qui, par ailleurs, sont en baisse, alors que l’on aurait intérêt au contraire à augmenter le nombre de contrôles, et donc le nombre de contrôleurs, pour lutter contre la fraude fiscale.