M. Vincent Delahaye. C’est compliqué. Avant-hier, j’étais sur le terrain, à Massy, avec le préfet de l’Essonne : ce département compte trois brigades motorisées spécialisées, ce qui n’est pas considérable pour un territoire de 1,2 million d’habitants, mais c’est déjà ça. Or ces brigades cessent de travailler à vingt heures, alors que, tout le monde le sait, c’est entre minuit et trois ou quatre heures du matin que le phénomène est le plus prégnant. Personnellement, j’en ai entendu un à trois heures du matin, cette nuit.
Mme Éliane Assassi. Moi aussi !
M. Vincent Delahaye. C’est pourquoi, madame la ministre, il faut songer à créer des brigades spécialisées de nuit, qui ne seraient peut-être pas les brigades existantes, dans les périodes chaudes, quand il fait beau ; ce n’est pas utile en hiver, quand il pleut. Il est vrai que les périodes actuelles sont les plus pénibles pour nos concitoyens, qui ont parfois du mal à bien dormir.
Quatrièmement, on ne peut se contenter de répression, il faut de la dissuasion. C’est aussi le but de ce texte. Certes, l’emprisonnement n’est peut-être pas la meilleure solution ni la mesure la plus adaptée (M. le président de la commission des lois s’exclame), mais il présente un caractère dissuasif.
Pour que cet objectif soit atteint, madame la ministre, il faut communiquer sur le texte – nous avons évoqué l’idée que le Président de la République le signe de façon solennelle –, sur la répression et sur les auteurs interpellés. Les parlementaires que nous sommes, mais aussi les élus locaux et les maires dans leurs bulletins municipaux doivent communiquer sur les sanctions issues du texte que l’on va adopter. C’est par cette diffusion de l’information que l’on dissuadera un certain nombre d’auteurs de réaliser ces méfaits. Un tel travail est très important !
Cinquièmement, il faut réaliser un travail de prévention, de proximité, de conviction et de dialogue avec les jeunes. Certes, il est en grande partie déjà réalisé dans de nombreuses villes. L’idéal – malheureusement, on l’atteint rarement – serait de trouver des terrains adaptés pour les jeunes qui veulent faire du motocross ou des acrobaties ; les autres ne cherchent qu’à empoisonner la vie quotidienne des gens. Je sais que c’est très difficile.
Dans mon secteur, de tels terrains étaient disponibles, je regrette que le préfet ait empêché cette mesure pour des raisons de sécurité. Le risque zéro n’existe pas, et il faut selon moi accepter parfois quelques problèmes de sécurité, si cela permet de résoudre d’autres problèmes.
Pour conclure, ce texte est une étape. Il faut continuer à travailler tous ensemble sur ce problème qui empoisonne la vie quotidienne des Français et compléter les dispositifs existants. Avec ce texte, nous allons susciter de la joie et de l’espoir. Il ne faut pas décevoir ! (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen. – M. Jean-Pierre Sueur applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Noël Cardoux. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Noël Cardoux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il est difficile d’intervenir à la fin d’une discussion générale : tout a été dit ou presque.
Je me contenterai d’ajouter quelques éléments et de faire référence à une récente étude du Conseil national du bruit et de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, relativement récente – elle date de 2016 –, qui chiffre à 57 milliards d’euros le coût social du bruit en France.
Le bruit généré par le trafic routier représente 11,5 milliards d’euros, la moitié étant due aux nuisances causées par les deux-roues. De tels montants méritent d’être cités. Certes, c’est une vision réductrice du problème – nous avons largement discuté des problèmes de réunions de motos, de dangerosité des comportements, de mise en danger de la vie d’autrui –, mais cela constitue un aspect non négligeable, que l’on retrouve partout en France.
Certains ont employé l’expression de « rodéo urbain », constatant que ce phénomène commençait à se propager en province. Jean-Pierre Sueur l’a souligné, dans le Loiret, nous avons été interpellés par de nombreux maires, notamment celui de Fleury-les-Aubrais, commune suburbaine d’Orléans et seconde ville du département.
Pour ma part, j’évoquerai Sully-sur-Loire, ville chère à mon cœur, puisque j’en ai été le maire. On connaît surtout Sully-sur-Loire pour le château du ministre d’Henri IV et parce que la partie de la Loire inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO commence là. Cependant, dans le département, Sully-sur-Loire est connue pour ses rodéos urbains, ainsi que par la provocation à laquelle se livre un certain nombre d’individus, au point que le maire est totalement exaspéré et que, cette année, lors de la cérémonie des vœux, il a interpellé les parlementaires présents, les pressant de trouver des solutions pour limiter ce phénomène.
Dès le mois de janvier dernier, au Sénat, j’étais prêt à prendre en main ce problème avant de me rendre compte – Vincent Delahaye l’a rappelé – qu’une proposition de loi, cosignée par 51 sénateurs, avait été déposée par notre ancienne Caroline Cayeux au mois d’octobre 2015, mais n’avait jamais été inscrite à l’ordre du jour de nos travaux. Je me suis également aperçu que Vincent Delahaye avait déposé une proposition de loi cosignée par plus de cent cinquante sénateurs, ce qui n’est pas négligeable. J’ai donc décidé d’être pragmatique et de m’en tenir à cela, sûr que nous trouverions un consensus sur ce sujet.
Ensuite, le Gouvernement a repris la main. C’est de bonne guerre, c’est du pragmatisme aussi et on ne vous le reprochera pas, madame la ministre. Vous avez travaillé avec Vincent Delahaye et profité de cette initiative parlementaire, affirmant qu’il s’agissait d’une coproduction. Il est bon que vous ayez reconnu le rôle des sénateurs.
Ce texte est fondé ; il va maintenant falloir l’utiliser d’une manière intelligente. Je ne reviendrai pas sur tous les éléments qui ont été décrits concernant la matérialité de l’infraction.
Jusqu’à présent, les textes étaient extrêmement disparates et leur application était difficile. Quand j’étais maire, combien de fois ai-je entendu la gendarmerie me dire : « Comment voulez-vous que l’on mesure une vitesse sur cinquante mètres en zone urbaine ? Nous n’avons pas de cinémomètre ! Et pour mesurer l’intensité du son, il faut une formation spécifique. » Les gendarmes étaient complètement démunis.
Même si elle est imparfaite, cette proposition de loi est une base. Certes, il faudra des circulaires d’application et ce texte devra prendre son essor et son rythme de croisière. Je pense toutefois qu’un grand pas a été franchi et que, une fois adopté, ce texte sera de nature à apaiser les inquiétudes des populations urbaines mais aussi rurales. En effet, même si c’est moins aigu dans les zones rurales, le sentiment d’insécurité que cela provoque dans la population est extrêmement prégnant.
Par ailleurs, il faudrait relancer certaines opérations. Il a été fait tout à l’heure allusion à la coopération entre police, gendarmerie et police municipale, ainsi qu’à l’utilisation de la vidéoprotection, qui s’est de plus en plus développée depuis quelques années.
Il faudrait partir sur des bases contractuelles et de travail en commun. À ce sujet, madame la ministre, nous avons des outils à notre disposition : ce sont les conseils locaux ou intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD ou CISPD.
Le souvenir qu’il m’en reste du temps où j’étais maire, c’est une extrême lourdeur de fonctionnement ; c’étaient souvent des assemblées de bavardages. (Mme Annie Guillemot approuve.) Surtout, il était bien difficile de trouver des dates avec tous les acteurs concernés – le représentant de l’État, le procureur, le haut gradé de la gendarmerie. Et quand la date était fixée, la veille, pour des raisons parfaitement compréhensibles, les uns et les autres annulaient leur présence, si bien que ces conseils étaient totalement inefficaces !
À condition que l’on donne les instructions pour qu’elles fonctionnent convenablement, ces instances pourraient travailler sur ce texte, s’en emparer et avoir des résultats efficaces. C’est en tout cas une piste à suivre.
Je rends hommage au rapporteur de la commission, qui a souhaité que ce texte soit voté conforme. Quelques collègues ont déposé des amendements ; j’espère qu’ils auront la sagesse de les retirer, car l’attente est énorme. Si l’on sait que, ce soir, ce texte a été adopté conforme par le Sénat et qu’il sera bientôt promulgué, certaines communes aborderont le mois d’août de façon plus sereine. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, du groupe Union Centriste et du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen, ainsi qu’au banc des commissions.)
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer.
Mme Agnès Canayer. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, il est vrai qu’intervenir en dernier est complexe. Néanmoins, il est important d’avoir cette discussion, car, sur ce texte, les attentes, tant de nos concitoyens que des élus locaux confrontés à ce véritable fléau des rodéos motorisés, sont extrêmement fortes.
L’arrivée du printemps, des beaux jours, du chant des oiseaux et de la convivialité entre voisins et amis est attendue par beaucoup, mais elle est aussi redoutée par tous ceux qui, dans les banlieues, mais aussi, dorénavant, dans les centres urbains et les zones plus rurales, subissent la violence des rodéos motorisés.
L’agression que ce phénomène suscite est constitutive d’un véritable trouble à l’ordre public. Elle porte atteinte à la sécurité publique par la mise en danger des passants, mais aussi des chauffards eux-mêmes, qui conduisent souvent avec une vitesse excessive, s’emparent des trottoirs, des pistes cyclables et les parcourent à contresens sens, en weeling – c’est-à-dire sur la roue arrière –, réunissant ainsi toutes les conditions pour mettre en danger la vie d’autrui de manière délibérée.
C’est aussi un trouble à la tranquillité publique, puisque les nuisances sonores sont aussi une caractéristique des rodéos. Ces deux-roues souvent trafiqués et dépassent régulièrement le seuil de tolérance de 120 décibels.
Ces troubles à répétition créent une véritable insécurité pour les habitants et une forte exaspération, que ceux-ci expriment continuellement auprès des élus locaux. Au Havre, il n’est pas un lundi sans que le téléphone du maire sonne régulièrement pour faire remonter l’exaspération des citoyens. Bien plus, l’absence de réponse à la hauteur entraîne un sentiment d’impuissance chez les élus et d’impunité chez leurs auteurs.
Dépourvues de moyens, les autorités publiques cherchent des solutions innovantes. Dans mon département de la Seine-Maritime, où ce fléau touche toutes les grandes villes, plusieurs actions ont été testées. À Rouen, pas plus tard que la semaine dernière, une opération d’envergure anti-rodéos a été menée, occupant pendant six heures les forces de la police nationale et de la police municipale, ainsi que d’autres agents encore, pour tenter d’arrêter les contrevenants. Résultat : zéro quad, zéro moto ; aucun véhicule n’a été intercepté lors de cette opération.
Au Havre, nous mettons en place, grâce au CLSPD – celui-là travaille relativement bien, mon cher collègue Jean-Noël Cardoux –, des opérations de publicité sur la destruction des quads et motos saisis, coordonnées avec l’État, le maire, les forces de police, pour tenter de sensibiliser et toucher les auteurs d’infraction. Certes, ce n’est que de la médiatisation, mais ce sont aujourd’hui à peu près les seuls moyens effectifs qu’ont à disposition ces autorités. Force est de constater que les effets de ces mesures restent faibles et que l’exaspération augmente !
Il est donc urgent de trouver des solutions pour enrayer ces comportements. Grâce au travail coordonné de l’Assemblée nationale et du Sénat sur ce texte, rendu possible par l’action menée par mon collègue Vincent Delahaye, nous obtiendrons l’efficacité recherchée.
Néanmoins, il reste un problème important : mettre en œuvre ces mesures et donner de véritables moyens pour interpeller en flagrant délit les auteurs de ces infractions.
Aujourd’hui, de peur de créer des accidents mortels, les forces de police se refusent à intervenir. Or, si les interpellations a posteriori, sur le fondement notamment d’images de vidéoprotection, permettent de sanctionner quelques comportements délictueux, cette réponse reste très insuffisante face à l’ampleur du problème.
Il faut donc donner aux acteurs du maintien de l’ordre public, notamment aux élus locaux, les moyens pour agir efficacement, faire cesser immédiatement ces troubles et sanctionner fortement et sévèrement les auteurs de l’infraction. C’est à cette seule condition que nous réussirons à contrecarrer le fort sentiment d’impunité et à restaurer l’autorité de l’État.
C’est avec un sentiment de pleine confiance que, à l’instar de l’ensemble de mon groupe, je voterai ce texte, convaincue qu’il constitue une réelle avancée pour redonner un sentiment de sécurité aujourd’hui. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste. – M. Jean-Claude Requier applaudit également.)
M. le président. La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
proposition de loi renforçant la lutte contre les rodéos motorisés
Article 1er
(Non modifié)
Le titre III du livre II du code de la route est complété par un chapitre VI ainsi rédigé :
« CHAPITRE VI
« Comportements compromettant délibérément la sécurité ou la tranquillité des usagers de la route
« Art. L. 236-1. – I. – Le fait d’adopter, au moyen d’un véhicule terrestre à moteur, une conduite répétant de façon intentionnelle des manœuvres constituant des violations d’obligations particulières de sécurité ou de prudence prévues par les dispositions législatives et réglementaires du présent code dans des conditions qui compromettent la sécurité des usagers de la route ou qui troublent la tranquillité publique est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
« II. – Les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 30 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis en réunion.
« III. – Les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende :
« 1° Lorsqu’il résulte d’une analyse sanguine ou salivaire que la personne a fait usage de substances ou plantes classées comme stupéfiants ou lorsque cette personne a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le présent code destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;
« 2° Lorsque la personne se trouvait sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou réglementaires du présent code ou lorsque cette personne a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le présent code et destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;
« 3° Lorsque le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou que son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu.
« IV. – Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende en cas de cumul d’au moins deux des circonstances prévues aux 1°, 2° et 3° du III du présent article.
« Art. L. 236-2. – Est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende le fait :
« 1° D’inciter directement autrui à commettre les faits mentionnés à l’article L. 236-1 ;
« 2° D’organiser un rassemblement destiné à permettre la commission des faits mentionnés au II du même article L. 236-1 ;
« 3° De faire, par tout moyen, la promotion des faits mentionnés audit article L. 236-1 ou du rassemblement mentionné au 2° du présent article.
« Art. L. 236-3. – Toute personne coupable des délits prévus aux articles L. 236-1 et L. 236-2 encourt également, à titre de peine complémentaire :
« 1° La confiscation obligatoire du véhicule ayant servi à commettre l’infraction si la personne en est le propriétaire ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, si elle en a la libre disposition. La juridiction peut toutefois ne pas prononcer cette peine par une décision spécialement motivée ;
« 2° La suspension pour une durée de trois ans au plus du permis de conduire ;
« 3° L’annulation du permis de conduire avec interdiction de solliciter la délivrance d’un nouveau permis pendant trois ans au plus ;
« 4° La peine de travail d’intérêt général selon les modalités prévues à l’article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code et à l’article 20-5 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante ;
« 5° La peine de jours-amende dans les conditions fixées aux articles 131-5 et 131-25 du code pénal ;
« 6° L’interdiction de conduire certains véhicules terrestres à moteur, y compris ceux pour la conduite desquels le permis de conduire n’est pas exigé, pour une durée de cinq ans au plus ;
« 7° L’obligation d’accomplir, à ses frais, un stage de sensibilisation à la sécurité routière.
« L’immobilisation du véhicule peut être prescrite dans les conditions prévues aux articles L. 325-1 à L. 325-3 du présent code. »
M. le président. La parole est à M. Vincent Delahaye, sur l’article.
M. Vincent Delahaye. Nous souhaitons que ce texte soit adopté conforme. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas déposé d’amendement, même si j’aurais souhaité apporter quelques modifications au texte de l’Assemblée nationale.
Parmi les propositions initiales que nous avons formulées, certaines étaient d’ordre réglementaire. Il en est une qui m’intéresse au plus haut point et sur laquelle j’aimerais entendre Mme la ministre. Elle porte sur les pots d’échappement libres, dont sont équipés un certain nombre de véhicules et qui augmentent les nuisances subies par les riverains.
Aujourd’hui, un tel équipement entraîne une amende de 11 euros. Je souhaite par conséquent que le fait d’utiliser des équipements ou dispositifs non homologués sur des véhicules mentionnés au premier alinéa soit puni d’une contravention de quatrième classe. J’aimerais que Mme la ministre prenne l’engagement que cette disposition aura rapidement une traduction réglementaire. (M. Claude Kern applaudit.)
M. le président. La parole est à M. François Grosdidier, sur l’article.
M. François Grosdidier. Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, les rodéos motorisés sont un fléau dans beaucoup de nos villes, ce que décrit parfaitement l’excellent rapport de Jacqueline Eustache-Brinio. Ces rodéos empoisonnent la vie de certains quartiers. Ils mettent en danger ceux qui les pratiquent, mais surtout les passants et souvent des enfants. Ils révoltent d’autant plus les habitants que gendarmes, policiers nationaux et municipaux paraissent impuissants à les empêcher et à interpeller leurs auteurs.
Il y a aujourd’hui une disproportion entre, d’une part, la difficulté et les risques d’intervention et, d’autre part, la réalité et la gravité de la sanction.
Ce texte améliorera donc considérablement et concrètement l’arsenal répressif, qui est le premier moyen de prévention, car il s’agit de dissuasion. Il améliorera aussi et surtout l’effectivité des dispositions et des interdictions existantes. Par la confiscation du véhicule, il est aussi le meilleur moyen de prévenir la récidive.
Enfin, nous pouvons nous réjouir de la volonté exprimée par le ministère de l’intérieur et le ministère de la justice d’accompagner la mise en œuvre effective de ces dispositions nouvelles. Nous souhaitons une concertation avec les élus municipaux et les polices municipales.
J’aurais aussi souhaité que le Gouvernement accompagne ce texte concrètement, en rétablissant les subventions aux communes pour la vidéoprotection, financement quasi systématique jusqu’il y a six ans et réduit depuis lors à peau de chagrin.
M. le président. La parole est à M. Claude Kern, sur l’article.
M. Claude Kern. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteur, mes chers collègues, cette proposition de loi, qui vient de l’Assemblée nationale – à mon tour, je souhaite rappeler l’initiative similaire de notre collègue Vincent Delahaye, d’autant que je suis l’un des nombreux cosignataires de la proposition de loi qu’il a déposée –, permet de donner une définition claire d’un délit spécifique, le délit de conduite dangereuse troublant la tranquillité publique.
De ce fait, ce délit est plus facilement caractérisable pour les forces de l’ordre. Il permettra la répression de l’incitation et de l’organisation de rodéos motorisés qui engendrent des nuisances sonores importantes, une forte insécurité dans l’espace public et donnent l’image de l’impuissance publique.
En effet, depuis des années que ce phénomène existe, force est de constater qu’il était impossible d’apporter une réponse judiciaire idoine pourtant indispensable face à une situation qui n’a cessé de prendre de l’ampleur. Aucun texte ne visait expressément cette pratique.
À titre d’exemple, lorsque j’occupais les fonctions de maire, j’étais régulièrement confronté à ces situations. Eh oui, même dans les communes rurales ! Malheureusement, les forces de l’ordre n’avaient à leur disposition que les infractions classiques – excès de vitesse ou défaut de port de casque –, qui restaient naturellement sans effet. Si nous pouvons saluer avec les égards qu’elle mérite la mise en place par le Gouvernement de la police de sécurité du quotidien, sur les missions desquelles je ne reviens pas, le législateur se devait d’intervenir en complémentarité pour permettre la caractérisation de telles infractions.
Aussi, nous ne pouvons qu’être favorables à cette initiative parlementaire qui devrait permettre à la tranquillité publique d’être restaurée dans les quartiers et les communes où ces rodéos se déroulent et aux habitants, ainsi qu’aux élus locaux, de se sentir mieux soutenus face à de telles situations.
Afin de permettre une mise en application rapide, je vous invite, mes chers collègues, à voter conforme cette proposition de loi. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme Fabienne Keller, sur l’article.
Mme Fabienne Keller. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à la suite de nombre de collègues très investis sur le sujet, je veux à mon tour insister : ce texte constitue un véritable progrès.
Madame la ministre, vous avez beaucoup œuvré pour que ce texte puisse être adopté conforme et que le délit de rodéo soit enfin créé. Vous l’avez souligné, il s’agit là d’une avancée pénale importante. Si, en plus, cela devient demain une priorité dans la sécurité du quotidien, nos concitoyens ne pourront que s’en réjouir.
Mes chers collègues, notamment vous, Mme la rapporteur, chère Jacqueline Eustache-Brinio, vous avez rappelé que l’enjeu était bien de poursuivre les auteurs. Nous savons tous que ce n’est pas simple pour les forces de police ou de gendarmerie : pour le dire avec un peu de sensibilité, le rodéo urbain ne justifie pas que l’on mette la vie d’un jeune motard en péril. Les accidents qui se sont produits peuvent à très juste titre retenir les forces de sécurité dans leur poursuite.
Il nous faut aussi œuvrer par la dissuasion et par l’exemple. Comme l’a souligné Vincent Delahaye, d’ailleurs auteur d’une remarquable proposition de loi, qui est largement à l’origine de ce progrès législatif, il nous faudra pouvoir assurer des poursuites effectives, car nous savons l’effet considérable de l’exemplarité.
C’est pourquoi, à la suite d’Agnès Canayer, je tiens à rappeler que, très souvent, les deux-roues utilisés par les auteurs des rodéos sont trafiqués : les pots d’échappement sont libres, ce qui permet de faire du bruit – l’intérêt du rodéo, c’est de déranger – et d’accélérer brutalement, puisque ces engins sont aussi « débridés ».
C’est la raison pour laquelle, comme l’a souligné à l’instant François Grosdidier, et plusieurs autres avant lui, la question de la mise en œuvre est majeure. Pour l’avoir beaucoup pratiquée, la vidéo est précieuse, mais les auteurs sont habiles et se dissimulent ; elle ne peut donc pas non plus constituer une réponse suffisante.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je présenterai des amendements pour aller encore plus loin. Madame la ministre, j’ai bien entendu votre souhait que ce texte soit adopté conforme. Vous me permettrez néanmoins de souhaiter que vous dessiniez dès à présent des mesures complémentaires, pour atteindre l’efficacité que nous souhaitons tous.
M. le président. Je mets aux voix l’article 1er.
(L’article 1er est adopté.)
Articles additionnels après l’article 1er
M. le président. L’amendement n° 1 rectifié, présenté par Mmes Keller et Garriaud-Maylam, MM. Calvet et Chaize, Mme Micouleau, M. Rapin, Mme Procaccia, M. Perrin, Mmes Dumas, Bories et Berthet et MM. Joyandet, Kennel, Pillet, Schmitz, B. Fournier, Dufaut, Bonhomme et Charon, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 321-1-1 du code de la route est ainsi modifié :
1° L’avant-dernier alinéa est ainsi rédigé :
« La confiscation du véhicule utilisé pour commettre les infractions prévues aux alinéas précédents est de plein droit, sauf décision contraire de la juridiction. » ;
2° La seconde phrase du dernier alinéa est supprimée.
La parole est à Mme Fabienne Keller.
Mme Fabienne Keller. Cette mesure complémentaire s’inscrit tout à fait dans l’esprit qui a présidé à l’élaboration de ce texte.
Il s’agit de permettre la confiscation des véhicules non soumis à réception, c’est-à-dire qui ne circulent en principe pas sur la voie publique, parce qu’ils n’y sont pas autorisés. Je pense en particulier aux mini-motos, que nous voyons néanmoins beaucoup dans nos quartiers.
L’intervention des forces de l’ordre étant délicate au moment même de la constatation d’un rodéo, il est proposé de leur permettre, lorsqu’ils sont présents dans l’espace public, de confisquer ces engins sur ce seul motif. Cela permettrait aux forces de sécurité d’intervenir sans mettre en péril l’intégrité physique du conducteur.