M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 59 rectifié bis. Il s’agit en fait de la reprise d’une disposition adoptée par le Sénat le 31 janvier 2017, à l’article 20 de la proposition de loi mentionnée par Mme Muriel Jourda. Cet amendement, je le rappelle, vise à supprimer le principe de l’attribution automatique des crédits de réduction de peine pour tous les condamnés détenus et à adapter en conséquence le régime actuellement prévu à l’article 721-1 du code de procédure pénale pour les réductions supplémentaires, qui deviendrait le seul régime de réductions de peine. La réduction de peine ne serait plus un droit octroyé par provision. L’amendement prévoit, par conséquent, une refonte du régime de ces réductions de peine, afin que celles-ci soient corrélées au comportement du détenu en détention.

En conséquence, je demanderai à M. Leroy de bien vouloir retirer les amendements nos 116 rectifié bis, 117 rectifié bis et 118 rectifié bis, au profit de l’amendement n° 59 rectifié bis.

Enfin, pour ce qui concerne l’amendement n° 268 rectifié bis, je reprends l’argumentation que j’ai précédemment opposée à Mme Laborde. L’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’émets un avis défavorable sur les cinq amendements.

Les crédits de réduction de peine ont été institués par la loi Perben II de 2004. Ils ont remplacé les réductions de peine pour bonne conduite, qui devaient faire l’objet de décisions spéciales du juge de l’application des peines après chaque année de détention, mais qui, en pratique, étaient systématiquement accordées, sauf mauvaise conduite du condamné.

La loi Perben II a ainsi apporté une simplification importante, inspirée des exemples étrangers, notamment celui du Canada, où le crédit de réduction de peine est automatiquement calculé au moment de l’incarcération. Ce n’est qu’en cas de mauvaise conduite que le JAP peut le retirer.

Par ailleurs, la loi de décembre 2005 a institué la surveillance judiciaire, qui peut être imposée aux condamnés les plus dangereux à leur libération. La durée de cette surveillance judiciaire est égale aux réductions de peine dont ils ont bénéficié.

Enfin, la loi du 15 août 2014 a institué le suivi post-libération, qui s’applique à tous les condamnés et permet un suivi pendant une même durée.

Cet ensemble de dispositifs vise à favoriser l’amendement de l’auteur d’infractions et à faciliter son suivi à l’issue de son temps de détention. Les crédits de réduction de peine en font partie. Ils sont en réalité indispensables, à la fois pour éviter les sorties sèches et pour inciter les détenus à bien se comporter en détention. Il ne me semble donc pas opportun de les supprimer.

Madame Laborde, vous proposez de supprimer les aménagements de peine et les crédits de réduction de peine pour les personnes condamnées pour violences conjugales. Je pense que nous n’avons pas besoin, à ce stade, de modifier les dispositions législatives pénales existantes. En revanche, nous devons agir pour protéger les femmes victimes de violences sexuelles, et ce dans trois cadres.

Premièrement, il faut faciliter le dépôt de plainte. Je ne les détaille pas, mais nous avons pris un certain nombre de mesures à cette fin, dont certaines figurent dans ce projet de loi.

Deuxièmement, nous devons également protéger les victimes, avec le téléphone « grave danger » et les ordonnances de protection civile et pénale qui sont prononcées par les juges. Ces ordonnances de protection visent à éloigner le conjoint violent. Il faut évidemment trouver un domicile pour celui-ci, mais c’est une autre question.

Troisièmement, il faut juger plus rapidement : c’est tout l’objet de ce projet de loi, et particulièrement de la création du tribunal criminel départemental.

M. le président. Monsieur Leroy, les amendements nos 116 rectifié bis, 117 rectifié bis et 118 rectifié bis sont-ils maintenus ?

M. Henri Leroy. Je me rallie à l’amendement n° 59 rectifié bis, qui, bénéficiant d’un avis favorable de la commission, sera certainement adopté.

Je retire mes trois amendements.

M. le président. Les amendements nos 116 rectifié bis, 117 rectifié bis et 118 rectifié bis sont retirés.

Je mets aux voix l’amendement n° 59 rectifié bis.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 45 - Amendement n° 268 rectifié bis
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Article additionnel après l'article 45 - Amendement n° 141

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 45, et l’amendement n° 268 rectifié bis n’a plus d’objet.

L’amendement n° 140, présenté par MM. Sueur et J. Bigot, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Kerrouche, Leconte, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Jasmin, Lubin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 45

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le titre II du livre III du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 622 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elle peut aussi être demandée au bénéfice de toute personne reconnue coupable d’un crime ou d’un délit lorsque sa culpabilité résulte d’aveux obtenus par l’usage de la torture. » ;

2° Au premier alinéa de l’article 624-2, après le mot : « application », sont insérés les mots : « du premier alinéa ».

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Cet amendement important vise à élargir les possibilités de saisir la cour de révision et de réexamen de demandes en révision d’une condamnation pénale au bénéfice de toute personne dont la culpabilité résulte d’aveux obtenus par l’usage de la torture.

Il a été inspiré par une affaire qui a défrayé l’actualité et qui continue à intéresser les habitants de l’Indre. Nombre d’entre eux ont le sentiment qu’une erreur judiciaire a été commise.

M. Jean-Paul Chanteguet, alors député de l’Indre, et moi-même avions déposé une proposition de loi sur ce sujet à la suite du rejet de la sixième requête en révision du procès de Raymond Mis et Gabriel Thiennot. Ces deux hommes, aujourd’hui décédés, ont été condamnés il y a plus de soixante ans à quinze ans de prison pour le meurtre du garde-chasse Louis Boistard, retrouvé mort le 31 décembre 1946 dans un étang de la Brenne. Arrêtés avec un groupe de chasseurs au début de 1947, ils étaient passés aux aveux, avant de se rétracter. Ils n’ont ensuite jamais cessé de clamer leur innocence, affirmant avoir subi de graves sévices et avoir été torturés durant les huit jours de leur garde à vue. Les doutes sur une possible erreur judiciaire étaient tels que, en juillet 1954, le président René Coty leur a accordé sa grâce. MM. Mis et Thiennot ont été libérés à la moitié de leur peine.

Cet amendement prévoit d’inscrire dans la loi un nouveau cas de révision d’une condamnation pénale lorsque des aveux ont été obtenus par usage de la torture. L’adopter permettra à notre pays de se conformer à l’article 4 du protocole n° 7 de la Convention européenne des droits de l’homme. Cet amendement fait également écho à la mission d’information sur l’évaluation de la loi du 20 juin 2014 relative à la réforme des procédures de révision et de réexamen d’une condamnation pénale définitive, mise en place par la commission des lois de l’Assemblée nationale en 2016. Je rappelle que les rapporteurs de cette mission d’information ont notamment considéré qu’il était nécessaire de permettre la révision d’une condamnation en cas d’existence d’un vice de procédure fondamental, évoquant ainsi explicitement l’affaire Mis et Thiennot.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Cet amendement a été inspiré par une affaire particulière, à savoir la condamnation de MM. Raymond Mis et Gabriel Thiennot en 1957 à la suite d’aveux dont certains, voire beaucoup, soupçonnent qu’ils ont été obtenus sous la torture.

Selon la commission, la modification du dispositif n’apparaît pas adaptée, particulièrement au regard du droit applicable tel qu’il résulte des dispositions de la loi du 20 juin 2014 relative à la réforme des procédures de révision et de réexamen d’une condamnation pénale définitive. En effet, une procédure en révision est possible dès lors qu’il existe un indice de nature à faire naître un doute sur la culpabilité de la personne condamnée. C’est la raison pour laquelle l’avis est défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. L’avis du Gouvernement est également défavorable.

Monsieur Sueur, l’extension de la procédure de révision que vous souhaitez ne me semble pas utile. En effet, en cas d’aveux obtenus par la torture, la procédure serait annulée et ne pourrait donc donner lieu à une condamnation. Si tel n’était pas le cas, elle ferait l’objet d’une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme, ce qui conduirait au réexamen du procès.

Vous le disiez vous-même, votre amendement vise à permettre la réouverture du procès Mis et Thiennot. Cela ne paraît pas justifier une remise en cause de la logique de la procédure de révision et de réexamen. La révision nécessite un fait nouveau, le réexamen une condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme.

MM. Mis et Thiennot ont été condamnés à l’issue de trois procès en cour d’assises, avant d’être graciés par le président René Coty. Par une décision du 16 mars 2015, la commission d’instruction de la cour de révision et de réexamen a déclaré la demande irrecevable en l’absence d’un fait nouveau ou d’un élément inconnu de la juridiction au jour du procès.

Votre amendement ne me paraît pas apporter une solution pertinente au cas difficile et douloureux que vous avez évoqué.

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

M. Jean-Pierre Sueur. Je comprends ces arguments, mais, en même temps, il y a là quelque chose d’étrange. En effet, la révision d’un procès est forcément rétroactive ; il s’agit de considérer qu’une décision, prise il y a longtemps, doit être revue, parce que des arguments plaident en ce sens. Or la réalité invoquée de la torture est une chose qui mérite d’être prise en considération.

Sans doute, vous pouvez soutenir que l’on a parlé de torture avant et me dire : « Circulez, il n’y a rien à voir ! ». Pour ma part, je rendrai compte de ce débat aux habitants de ce département, qui se mobilisent et qui continuent de demander justice, ou ce qu’ils pensent être la justice – en tout cas, à demander le droit à la révision du procès –, pour ces deux personnes. Mais je crois vraiment qu’ils ne comprendront pas cette décision.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 140.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article additionnel après l'article 45 - Amendement n° 140
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Article 45 bis (nouveau)

M. le président. L’amendement n° 141, présenté par MM. Sueur et J. Bigot, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Kerrouche, Leconte, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Jasmin, Lubin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 45

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa de l’article 785 du code de procédure pénale, les mots : « dans le délai d’une année seulement à compter du décès » sont remplacés par les mots : « dans le délai de vingt ans à compter du décès ».

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur.

M. Jean-Pierre Sueur. Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise la réhabilitation.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission a émis un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Défavorable.

M. Jean-Pierre Sueur. C’est dur !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 141.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 45.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente-cinq.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt heures cinq, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Philippe Dallier.)

PRÉSIDENCE DE M. Philippe Dallier

vice-président

M. le président. La séance est reprise.

Nous reprenons la discussion, en procédure accélérée, du projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

Dans la discussion du texte de la commission, nous en sommes parvenus à l’article 45 bis.

Article additionnel après l'article 45 - Amendement n° 141
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Article additionnel après l'article 45 bis - Amendement n° 139

Article 45 bis (nouveau)

L’article 709-2 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ce rapport annuel comprend également une présentation de la politique pénale et d’aménagement des peines du ministère public, une présentation de la jurisprudence du tribunal de grande instance en matière de peines privatives de liberté, ainsi qu’une synthèse des actions et conclusions de la commission de l’exécution et de l’application des peines du tribunal. » ;

2° À la dernière phrase, après le mot : « public », sont insérés les mots : « et transmis au Parlement ».

M. le président. L’amendement n° 191, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cet amendement vise à supprimer l’article 45 bis, introduit dans le texte par la commission des lois.

En effet, il me semble inutile de complexifier le rapport sur l’exécution des peines, établi chaque année par le procureur, dès lors qu’il est déjà prévu un rapport annuel de politique pénale par les articles 30, 35 et 39-1 du code de procédure pénale.

Surtout, il ne paraît pas justifié de prévoir que ces rapports devront être adressés par les procureurs au Parlement. Cela serait inutile, puisque ces rapports sont déjà rendus publics, mais cela me semble en outre poser un problème constitutionnel au regard de la séparation des pouvoirs. C’est en effet au Gouvernement, et, en l’espèce, au ministre de la justice, garde des sceaux, de rendre compte devant le Parlement de sa politique pénale, et non pas aux différentes autorités judiciaires.

Au reste, l’article 39-1 du code précité prévoit que chaque procureur de la République adresse au procureur général un rapport de politique pénale ; l’article 35 prévoit que le procureur général adresse une synthèse de ces rapports au garde des sceaux ; l’article 30 prévoit que le garde des sceaux, au vu de ces rapports, élabore un rapport annuel sur l’application de la politique pénale sur l’ensemble du territoire de la République. En outre, l’article 30 précise que ce rapport annuel est transmis au Parlement et qu’il peut donner lieu à un débat devant l’Assemblée nationale et devant le Sénat.

Tel est l’objet de cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. La commission, en raison des constats qu’elle a faits sur le terrain lors de ses différents déplacements, a exprimé le besoin de savoir comment les choses se passent et quelles sont les relations entre le parquet, le juge d’application des peines et les directeurs pénitentiaires. Elle souhaite disposer d’une vision exacte de l’exécution des peines et elle a pensé que ce document était utile. C’est la raison pour laquelle elle a inséré cette disposition dans la loi.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. J’entends bien votre préoccupation, monsieur le rapporteur, mais je veux tout de suite vous rassurer : c’est moi-même qui vous rendrai compte de l’exécution des peines, comme la loi m’y oblige – je n’y vois d’ailleurs que des avantages –, dans le cadre du rapport général que je vous présenterai sur ma politique pénale.

M. le président. La parole est à M. Jacques Bigot, pour explication de vote.

M. Jacques Bigot. Nous ne parlons pas de la même chose, madame la garde des sceaux ! Il nous paraît logique que le Gouvernement présente un rapport global sur la politique pénale, en relation avec le ministère de l’intérieur.

Toutefois, il s’agit ici d’amener les juridictions, notamment celles qui doivent travailler sur un projet de juridiction, à mener une réflexion globale, y compris au travers d’échanges avec l’administration pénitentiaire, comme les services pénitentiaires d’insertion et de probation, les SPIP, sur la politique appliquée dans le secteur géographique – comment on exécute les peines, quel est l’état de la récidive, etc. Nous avons besoin de tout cela.

Peut-être la formulation retenue n’est-elle pas la bonne – si nous disposions de plus de temps pour nos échanges, nous pourrions l’affiner –, mais ne pas exiger une certaine cohérence départementale avec les tribunaux de grande instance que vous voulez unifier me semble une erreur.

Sur le terrain, il faut trouver une solution ; celle que la commission propose n’est peut-être pas tout à fait bonne, mais on ne peut se contenter de dire que le rapport du Gouvernement répond à ce besoin. En effet, ce rapport n’est pas local. Je reviendrai sur cette question à propos d’autres amendements.

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Monsieur Bigot, il appartient au garde des sceaux de faire la synthèse de ces rapports locaux et de vous la présenter. C’est le rôle du garde des sceaux, et c’est ce que je ferai !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 191.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 137, présenté par MM. J. Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Kerrouche, Leconte, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Jasmin, Lubin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un alinéa ainsi rédigé :

…° Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Ce rapport est présenté et fait l’objet d’échanges au sein du conseil de juridiction. Il est également présenté au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, ainsi qu’au sein des conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance. »

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Cet amendement tend à procéder du même esprit, car M. le rapporteur François-Noël Buffet et moi-même partageons cette préoccupation – nous la partagions d’ailleurs déjà avec le président de la commission des lois, quand nous avons travaillé, voilà un an, sur la proposition de loi sur le redressement de la justice.

Manifestement, il n’existe pas d’échanges non seulement au sein des juridictions, mais encore entre les juridictions et le terrain. Madame la garde des sceaux, comment voulez-vous que l’on développe les travaux d’intérêt général si l’on n’associe pas globalement les élus locaux à la démarche ?

La volonté qui sous-tend cet amendement est que ce rapport, s’il existe, ce que vous ne souhaitez pas, soit présenté et discuté au sein du conseil de juridiction et du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, le CLSPD.

Vous avez parlé précédemment du fameux téléphone sans contact, qui est aujourd’hui un succès national. Or ce dispositif s’est développé à partir d’échanges avec le procureur de la République de Strasbourg au sein du conseil intercommunal de prévention de la délinquance, lorsque j’étais président de la communauté urbaine. Le procureur demandait au conseil les moyens de financer ces premiers téléphones, parce qu’il ne recevait aucun moyen de la Chancellerie. On voit donc bien que c’est grâce à la collaboration entre les collectivités locales et le procureur de secteur que l’on a réussi à développer des choses.

La même question se posera lorsque vous voudrez créer de nouveaux centres de détention – vous savez de quoi je parle, madame la garde des sceaux. Il faut pouvoir échanger avec les collectivités locales.

Nous le savons bien, dans les territoires, la plupart des délinquants se trouvent dans un secteur géographique donné. Ils se retrouvent pour commettre leurs méfaits dans nos métropoles ou dans notre environnement, puis ils se retrouvent dans les maisons d’arrêt du secteur. Nous avons donc besoin de travailler ensemble. Les magistrats n’y sont pas toujours prêts, et je pense qu’il faut les y forcer un peu.

Tel est le sens de cet amendement ; si ce rapport existe dans la version définitive du texte, il serait utile qu’il soit présenté au sein du conseil de juridiction et des CLSPD.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. La possibilité que vous évoquez, monsieur Bigot, me convient parfaitement.

Néanmoins, je veux vous faire observer que le projet de loi que je défends permet d’inclure désormais les avocats dans les conseils de juridiction. En outre, il est évident, bien que ce ne soit pas prévu par le texte, que ces conseils de juridiction doivent établir des contacts avec les autorités locales. C’est dans le cadre de ce dialogue élargi que l’ensemble des problèmes relatifs à la juridiction doit être discuté, et c’est ce qui est fait à peu près partout.

Je ne vois pas pourquoi il serait nécessaire d’introduire cette disposition dans la loi. Aussi, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 137.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 45 bis, modifié.

(Larticle 45 bis est adopté.)

Article 45 bis (nouveau)
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Article additionnel après l'article 45 bis - Amendement n° 142

Articles additionnels après l’article 45 bis

M. le président. L’amendement n° 139, présenté par MM. J. Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Kerrouche, Leconte, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Jasmin, Lubin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 45 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l’article L. 132-5 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « judiciaire », sont insérés les mots : « ou des membres du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance ».

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Au travers de cet amendement, je propose une légère modification du code de la sécurité intérieure, dont l’article L. 132-5 prévoit que le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance puisse se saisir, sur l’initiative des magistrats, des pratiques pénales et de l’exécution des peines. Je propose que l’on précise que cette saisine peut se faire sur l’initiative des magistrats ou des membres du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance.

En effet, il faut permettre aux élus locaux, dans ces instances, de dire aux magistrats qu’ils souhaitent échanger sur l’exécution des peines ou encore sur les moyens de la justice. C’est d’ailleurs le seul lieu où il pourrait y avoir un échange, notamment sur le développement des travaux d’intérêt général.

Il y va de l’intérêt de la justice. C’est la raison pour laquelle nul ne peut envisager, selon moi, d’émettre un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Nous allons le savoir très vite, mon cher collègue ! (Sourires.)

Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Cette disposition consacrera une habitude existante. J’émets donc un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Vous aviez raison, monsieur Bigot ! (Nouveaux sourires.)

Je mets aux voix l’amendement n° 139.

(Lamendement est adopté.)

Article additionnel après l'article 45 bis - Amendement n° 139
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Article 45 ter (nouveau)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 45 bis.

L’amendement n° 142, présenté par MM. J. Bigot et Sueur, Mme de la Gontrie, MM. Kanner, Durain, Kerrouche, Leconte, Fichet et Houllegatte, Mmes Préville, Meunier, Jasmin, Lubin et Blondin, MM. Jeansannetas, Cabanel et Montaugé, Mmes G. Jourda, Taillé-Polian et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 45 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au deuxième alinéa de l’article L. 132-13 du code de la sécurité intérieure, après les mots : « autorité judiciaire », sont insérés les mots : « ou des membres du conseil intercommunal de sécurité et de prévention de la délinquance »

La parole est à M. Jacques Bigot.

M. Jacques Bigot. Dans le même esprit, cet amendement vise à mettre en place des peines alternatives et à modifier encore le code de sécurité intérieure. Il s’agit d’une disposition analogue à celle de l’amendement précédent, sauf qu’elle concerne non pas les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, mais les conseils intercommunaux de sécurité et de prévention de la délinquance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. François-Noël Buffet, corapporteur. Favorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Favorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 142.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 45 bis.

Article additionnel après l'article 45 bis - Amendement n° 142
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Article additionnel après l'article 45 ter - Amendement n° 114 rectifié ter

Article 45 ter (nouveau)

I. – Le code pénal est ainsi modifié :

1° L’article 131-36-1 est ainsi modifié :

a) Le début du premier alinéa est ainsi rédigé : « En matière criminelle ou correctionnelle, la juridiction de jugement… (le reste sans changement). » ;

b) Le deuxième alinéa est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le suivi socio-judiciaire emporte, pour le condamné, l’obligation de se soumettre, sous le contrôle du juge de l’application des peines et pendant une durée déterminée par la juridiction de jugement, à des mesures de surveillance et d’assistance, prévues aux articles 132-44 et 132-45, destinées à prévenir la récidive et à assurer sa réinsertion sociale.

« La durée du suivi socio-judiciaire ne peut excéder trois ans en cas de condamnation pour un délit, dix ans pour un délit commis en récidive ou mentionné à l’article 706-47 du code de procédure pénale ou vingt ans en cas de condamnation pour crime. Toutefois, en matière correctionnelle, cette durée peut être portée à vingt ans par décision spécialement motivée de la juridiction de jugement ; lorsqu’il s’agit d’un crime puni de trente ans de réclusion criminelle, cette durée est de trente ans ; lorsqu’il s’agit d’un crime puni de la réclusion criminelle à perpétuité, la cour d’assises peut décider que le suivi socio-judiciaire s’appliquera sans limitation de durée, sous réserve de la possibilité pour le tribunal de l’application des peines de mettre fin à la mesure à l’issue d’un délai de trente ans, selon les modalités prévues à l’article 712-7 du même code. » ;

c) À la dernière phrase du troisième alinéa, les mots : « juge de l’application des peines » sont remplacés par les mots : « président du tribunal de grande instance ou le juge par lui désigné » ;

2° Les articles 131-36-2 et 131-36-3 sont abrogés ;

3° À la seconde phrase du premier alinéa de l’article 131-36-4 et au second alinéa de l’article 131-36-12, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;

4° Les articles 221-9-1, 221-15, 222-65, 224-10, 227-31 et 421-8 sont abrogés ;

5° L’article 222-48-1 est ainsi rédigé :

« Art. 222-48-1. – En cas de condamnation pour une infraction définie aux articles 222-8, 222-10, 222-12, 222-13, 222-14 et 222-18-3 commise sur un mineur de quinze ans par un ascendant légitime, naturel ou adoptif, ou par toute autre personne ayant autorité sur la victime, le suivi socio-judiciaire est obligatoire en matière correctionnelle lorsqu’il s’agit de violences habituelles, sauf en cas de condamnation à une peine d’emprisonnement assortie du sursis avec mise à l’épreuve ou si le tribunal correctionnel considère, par décision spécialement motivée, qu’il n’y a pas lieu de prononcer cette mesure ; en matière criminelle, la cour d’assises délibère de façon spécifique sur le prononcé d’un suivi socio-judiciaire. »

II. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 763-3 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les références : « aux articles 131-36-2 et 131-36-3 » sont remplacées par la référence : « au deuxième alinéa de l’article 131-36-1 » ;

b) À la troisième phrase du troisième alinéa, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième » ;

2° La première phrase du premier alinéa de l’article 763-5 est ainsi rédigée : « En cas d’inobservation des obligations mentionnées à l’article 131-36-1 du code pénal ou de l’injonction de soins, le juge de l’application des peines saisit, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, par requête motivée, le président du tribunal de grande instance ou un juge par lui désigné afin que soit mis à exécution tout ou partie de l’emprisonnement fixé par la juridiction en application du quatrième alinéa de l’article 131-36-1 du code pénal. » ;

3° Au quatrième alinéa de l’article 763-10, le mot : « troisième » est remplacé par le mot : « quatrième ».