Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la ministre, monsieur le rapporteur général, vous avez pu entendre nos collègues s’exprimer depuis différentes travées de notre assemblée.
Madame la ministre, vous avez bien voulu apporter quelques éléments d’explication. Il n’en demeure pas moins qu’on constate, à juste titre, comme l’ont rappelé M. Brisson et Mme Darcos, que les artistes auteurs ont subi, pendant toute cette année, un manque à gagner. Ils n’ont rien vu de la compensation qui leur avait été promise.
Pour ma part, je veux bien faire confiance. L’année dernière, j’avais fait confiance à la ministre de la culture d’alors, qui m’avait contactée pour m’annoncer que les dispositions issues des travaux du Sénat seraient retirées du texte à l’Assemblée nationale, mais qu’un décret serait pris et que le problème était réglé. J’ai plutôt tendance à faire confiance, et j’estime d’ailleurs que Mme Nyssen était tout à fait sincère et volontariste sur ce dossier, tout comme l’est M. Franck Riester, que nous avons auditionné tout à l’heure.
Seulement, après les méandres de l’administration fiscale, il y a encore Bercy ! On connaît la toute-puissance de ces circuits administratifs qui bloquent souvent bien des dossiers. C’est pourquoi, pour l’instant, nous n’avons qu’à moitié confiance.
Peut-être, monsieur le rapporteur général, ces amendements ne sont-ils pas tout à fait opérationnels – vous avez raison d’attirer notre attention sur ce point –, mais nous souhaitons tout de même, par mesure de précaution, envoyer un signal fort de la mobilisation sénatoriale pour les artistes auteurs en adoptant lesdits amendements.
La situation est tout de même paradoxale : on se fait une fierté de nos auteurs, de nos écrivains, de nos artistes, on les revendique comme patrimoine de notre nation, dont ils participent au rayonnement, mais on ne prend pas les mesures adéquates en temps utile pour résoudre leurs problèmes particuliers. Il faut donc envoyer un signal fort pour résoudre définitivement ces questions.
Nous comptons donc sur vous, madame la ministre, pour faire avancer définitivement ce dossier.
Mme la présidente. Monsieur le rapporteur général, qu’en est-il en définitive de l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. J’ai bien entendu les explications des uns et des autres. Les auteurs de ces amendements les maintiennent. Je maintiens qu’ils ont un caractère peu opérationnel, mais j’ai bien compris l’intention de leurs auteurs : avoir un moyen de pression sur le Gouvernement afin que les dispositifs présentés par Mme la ministre puissent être mis en place dans les délais prévus.
J’émets donc, au nom de la commission, un avis de sagesse.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je maintiens ma demande de retrait, mais je veux répondre à M. Tourenne, qui me demandait si les 18 millions d’euros dont il est question sont une enveloppe fermée. Tel n’est pas le cas : nous nous sommes engagés à redistribuer aux artistes un montant correspondant à 0,95 % des revenus artistiques ; c’est un pourcentage, et non une somme fixe. L’enveloppe globale est simplement estimée à 18 millions d’euros. Quoi qu’il en soit, on ne divisera pas le gâteau en plus petits morceaux si plus d’artistes demandent à avoir accès à cette compensation l’année prochaine. Il n’y a donc aucune crainte à avoir.
Je veux par ailleurs expliquer pourquoi ce processus a été long. Nous avons d’abord attendu le rapport de l’IGAS et du ministère de la culture. Ensuite, nous avons mené une concertation avec les associations représentant les artistes et nous avons énormément négocié avec elles. En réalité, un très long travail a eu lieu, entre mai et septembre, avec la direction de la sécurité sociale pour trouver un accord sur un atterrissage pérenne. D’où la publication, avant la fin de l’année, d’un décret qui est d’ores et déjà rédigé.
L’engagement du Gouvernement est plein et entier. Je comprends un certain scepticisme. Ce pourrait être un procès d’intention, mais c’est sans fondement : il a simplement été techniquement assez compliqué de trouver une solution pérenne. Nous y sommes toutefois parvenus, et vous ne devriez normalement plus entendre parler de ce dossier, car l’accord qui a été conclu fait l’objet d’un large consensus.
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 101 rectifié quinquies.
(L’amendement est adopté.)
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 11, et l’amendement n° 427 rectifié bis n’a plus d’objet.
L’amendement n° 376 rectifié ter, présenté par M. Gilles, Mmes Lavarde et Gruny, MM. Morisset, Brisson et Charon, Mmes A.M. Bertrand, Lopez, Lanfranchi Dorgal et Delmont-Koropoulis et M. H. Leroy, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – La section 12 du chapitre 7 du titre 3 du livre 1 du code de la sécurité sociale est abrogée.
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-Marie Morisset.
M. Jean-Marie Morisset. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a créé une taxe sur le chiffre d’affaires des distributeurs de tabac, afin de financer le fonds de lutte contre le tabagisme à hauteur de 130 millions d’euros par an.
Cette taxe pose aujourd’hui d’importants problèmes de recouvrement qui mettent en péril le financement de la lutte contre le tabagisme, la répercussion de la taxe sur les fabricants de tabac étant actuellement source de nombreux contentieux juridiques.
En effet, la taxe sur les distributeurs de tabac ne concerne qu’un seul acteur économique majeur : la société Logista, qui assure la distribution de la quasi-totalité des produits de tabac en France. Cette société est actuellement en péril, ne pouvant assumer seule cette charge fiscale qui devrait peser directement sur les fabricants de tabac.
C’est la raison pour laquelle le présent amendement vise à réintégrer la taxe sur les distributeurs dans les droits d’accises sur les produits de tabac, par une augmentation à due concurrence de la part spécifique de ces droits.
En éliminant le risque contentieux et en faisant supporter le paiement de la fiscalité par les fabricants de tabac, et non plus par les distributeurs, la mesure proposée garantit les moyens dédiés à la lutte contre le tabagisme, dans le cadre du nouveau fonds de lutte contre les addictions liées aux substances psychoactives créé à l’article 38 du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Nous avons déjà débattu de cette question l’année dernière. Je répète donc ce qui avait déjà été dit alors : la contribution sociale sur le chiffre d’affaires des distributeurs de tabac constitue une ressource précieuse pour alimenter le fonds de lutte contre le tabagisme, qui sera bientôt élargi aux addictions liées à toutes les substances psychoactives.
Par ailleurs, remplacer cette contribution par un relèvement des droits d’accises ne garantit pas une taxation des fabricants, puisque ces droits sont exigibles des fournisseurs à la mise en consommation ou à l’importation. Il est d’ailleurs compliqué de taxer directement des fabricants qui se situent très majoritairement – 95 %, si je ne m’abuse – à l’étranger. La contribution à la charge des fournisseurs est donc incontournable.
Pour toutes ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 376 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
Mme la présidente. L’amendement n° 500, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre 2 du titre 4 du livre 2 du code de la sécurité sociale est complété par une section ainsi rédigée :
« Section…
« Contribution des revenus financiers des sociétés financières et non financières
« Art. L. 242-… – Les revenus financiers des sociétés tenues à l’immatriculation au registre du commerce et des sociétés conformément à l’article L. 123-1 du code de commerce, entendus comme la somme des dividendes bruts et assimilés et des intérêts bruts perçus, sont assujettis à une contribution dont le taux est égal à la somme des taux des cotisations patronales assises sur les rémunérations ou gains perçus par les travailleurs salariés ou assimilés. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Actuellement, une partie des dividendes sont soumis aux prélèvements sociaux : contribution sociale généralisée, contribution au remboursement de la dette sociale, prélèvement social, contribution additionnelle et prélèvement de solidarité.
Toutefois, l’affaire des « CumEx Files », révélée par une dizaine de médias le mois dernier, a démontré la gigantesque évasion fiscale dont sont victimes des États européens, parmi lesquels l’Allemagne, le Danemark et la France, pour un préjudice estimé à plus de 55 milliards d’euros.
Une bande de traders, de banques et d’avocats a mis en place un système pour frauder le fisc allemand. Exploitant une faille de la loi, ils se sont en effet échangé de gros volumes d’actions, au moment précis où le dividende était versé aux actionnaires, afin de brouiller l’identité des véritables bénéficiaires de ces titres.
Cette affaire a mis au jour des montages financiers sur les dividendes qui permettent de douter de la réalité de l’efficacité des systèmes existants.
C’est la raison pour laquelle nous proposons de mettre à contribution les revenus financiers afin de dégager de nouvelles recettes pour financer la protection sociale.
À rebours des politiques d’exonérations de cotisations patronales – nous avons déjà expliqué à plusieurs reprises qu’elles endettent la sécurité sociale –, nous proposons de soumettre à cotisations sociales les dividendes bruts.
Je rappelle que le montant des dividendes versés par les entreprises françaises en 2018 a été de 51 milliards d’euros, soit le montant le plus important d’Europe.
Nous proposons donc, mes chers collègues, de mettre à contribution les revenus financiers des sociétés financières et non financières, afin d’inciter l’embauche et l’investissement. Voilà une proposition qui, je l’espère, vous séduira !
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Ces revenus sont de toute façon déjà inclus dans le champ de l’imposition normale applicable aux sociétés. Je ne vois donc pas ce que l’adoption de cet amendement apporterait de plus. (Mme Laurence Cohen s’exclame.) L’avis de la commission sur cet amendement est donc défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. L’amendement n° 497, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 14-10-4 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Une contribution de solidarité des actionnaires d’un taux de 2 % sur l’ensemble des dividendes des entreprises. »
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme Cathy Apourceau-Poly. Nos aînés sont de plus en plus nombreux. Le vieillissement mécanique de la population fait croître les besoins, notamment en matière d’autonomie. Aujourd’hui plus que jamais, le secteur de l’autonomie, qu’il s’agisse des aides à domicile, des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, EHPAD, ou des familles de personnes âgées en perte d’autonomie, est à bout de souffle.
Si, sur le principe, notre groupe a toujours été opposé à la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, c’est que nous estimons que ce n’est pas aux seuls retraités de payer pour leur autonomie. De l’argent, il y en a ; il suffit de se donner les moyens d’aller le chercher !
Par cet amendement, nous réclamons donc la création, en miroir de la CASA actuelle, d’une contribution de solidarité des actionnaires, prélevée sur les dividendes perçus à hauteur de 2 %. Cette contribution permettrait d’abonder les comptes de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie d’un montant proche de 1 milliard d’euros. Cette somme permettrait d’assurer une revalorisation des tarifs de l’aide à domicile jusqu’à approcher 25 euros de l’heure. Ces structures traversent une véritable situation de crise ; elles nous appellent au secours !
Parce qu’il y a urgence, parce qu’il est nécessaire de revaloriser ce secteur – la part des plus de quatre-vingts ans dans la population sera multipliée par quatre en quelques années – et parce que la solidarité n’existe que si elle est intergénérationnelle, nous vous demandons, mes chers collègues, de voter cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Il a semblé à la commission qu’il s’agissait plutôt d’un amendement d’appel que d’un dispositif opérationnel. Par ailleurs, les revenus du capital et du patrimoine financent déjà la prise en charge de la perte d’autonomie, via une fraction des prélèvements sociaux sur ces revenus. À partir de 2019, s’y ajoutera une fraction de la CSG. Enfin, la concertation sur la dépendance récemment lancée sous l’égide de Dominique Libault a précisément pour mandat de proposer de nouvelles pistes de financement plus structurelles. Attendons ! La commission a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Nous avons lancé une très grande consultation citoyenne sur l’évolution de notre modèle de prise en charge de la perte d’autonomie, avec un volet sociétal, mais aussi, évidemment, un volet financier. Nous ne souhaitons donc pas engager la moindre réforme du financement de la dépendance avant le projet de loi qui sera déposé sur ce sujet à la fin de l’année 2019. L’avis du Gouvernement sur cet amendement est donc lui aussi défavorable.
Mme la présidente. L’amendement n° 501, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les assurances santé à but lucratif sont taxées à hauteur de 20 % de leur bénéfice annuel. Le produit de cette taxe est affecté à la branche maladie des comptes de la sécurité sociale.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Comme une grande concertation est menée, madame la ministre, j’espère que cette piste de financement vous inspirera.
Cela dit, le présent amendement a pour objet de créer une nouvelle taxe s’appliquant aux assurances santé à but lucratif. Nous proposons de taxer celles-ci à hauteur de 20 % de leurs bénéfices annuels. Le produit de cette taxe sera affecté à la branche maladie des comptes de la sécurité sociale.
La direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques du ministère des solidarités et de la santé, la DREES, a publié son bilan sur l’ouverture depuis le 1er janvier 2016 du marché des complémentaires de santé aux assureurs privés lucratifs : ce document montre que cette ouverture du marché a largement bénéficié aux assureurs privés au détriment des mutuelles.
Ainsi, parmi les neuf organismes qui ont accru leurs parts de marché entre 2015 et 2016, cinq sont des assureurs et quatre des institutions de prévoyance. Huit de ces groupes étaient déjà des acteurs majeurs des complémentaires et ont donc conforté leurs positions, contrairement aux acteurs mutualistes. Depuis l’ouverture du marché, ces organismes ont dégagé 900 millions d’euros supplémentaires – j’insiste sur ce montant.
Les organismes mutualistes ont, eux, souffert de la mesure, puisqu’ils perdent des parts de marché. Or ils exercent leur activité sans but lucratif.
Puisque l’ouverture du marché aux organismes de santé à but lucratif a tant bénéficié à ces derniers, leur permettant de dégager quasiment un milliard d’euros de bénéfices supplémentaires, il nous semble normal que ceux-ci soient mis à contribution. En effet, la santé n’est pas et ne doit pas être considérée comme un bien marchand. Il appartient à l’État d’exercer un contrôle sur les activités des assureurs privés, afin d’être sûr que leur priorité reste la santé de leurs assurés et non la seule augmentation de leurs bénéfices.
Pour cette raison, nous proposons la création de cette taxe additionnelle, qui permettra d’apporter d’importantes recettes à la sécurité sociale, lesquelles pourront être affectées à la branche maladie, toujours déficitaire.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Cet amendement vise à instaurer une taxe de 20 % sur le bénéfice des sociétés d’assurance au profit de la branche maladie. Sur ce point, nous pouvons reprendre les commentaires que nous avons formulés sur vos précédentes propositions, ma chère collègue.
Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Le Gouvernement émet également un avis défavorable sur cet amendement.
Je rappelle que ces organismes complémentaires sont déjà soumis à la taxe de solidarité additionnelle, la TSA, qui rapporte 4,6 milliards d’euros. Par ailleurs, leurs bénéfices sont susceptibles d’être assujettis à l’impôt sur les sociétés.
Mme la présidente. L’amendement n° 498, présenté par Mmes Cohen, Apourceau-Poly, Lienemann et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Après l’article 11
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À la quatrième phrase du premier alinéa du 1 de l’article 231 du code général des impôts, après les mots : « les collectivités locales, », sont insérés les mots : « des établissements publics de santé, ».
II. – Le I s’applique à la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2019.
III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. La commission demande l’avis du Gouvernement.
En effet, cet amendement vise à exonérer les hôpitaux publics du versement de la taxe sur les salaires, afin de leur permettre de dégager des ressources supplémentaires. Toutefois, les financements publics dont bénéficient les hôpitaux intègrent d’ores et déjà la dépense que représente cette taxe. On parle ainsi d’un effet circulaire : on paie d’une main, on reprend de l’autre – ou l’inverse. Or nous n’avons aucune garantie qu’en exonérant les hôpitaux publics de la taxe sur les salaires ceux-ci ne voient pas, dans le même temps, leurs subventions réduites à due concurrence.
En réalité, dans sa réponse au référé de la Cour des comptes sur ce sujet, cette année, le Premier ministre a même confirmé qu’« une diminution à due concurrence des subventions et dotations publiques octroyées aux employeurs concernés devrait être opérée » en cas d’extension de l’exonération aux hôpitaux.
Dans ces conditions, la disposition proposée n’aura aucun effet positif sur les finances des hôpitaux publics.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Tout à fait !
M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Par ailleurs, comme nous l’avons évoqué en commission, un risque de rupture d’égalité devant les charges publiques existe, pas seulement entre établissements publics et établissements privés à but non lucratif, mais aussi entre certains établissements de santé privés à but lucratif qui paient la taxe sur les salaires, dans la mesure où toutes les activités de dispensation des soins sont exonérées de TVA.
Par conséquent, comprenez que nous ne soyons guère enthousiastes à la lecture de cet amendement. Il faut tout de même répondre à la Cour des comptes de façon plus précise ou plus satisfaisante que ne l’a fait que Premier ministre.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je partage l’avis du rapporteur général de la commission des affaires sociales sur le risque d’irrégularité au plan juridique. La taxe sur les salaires est un substitutif à la TVA dans le secteur public ou dans le secteur privé à but non lucratif. Une telle exonération provoquerait une rupture d’égalité devant les charges publiques, puisque les établissements privés à but lucratif demeureraient assujettis à la TVA, alors qu’ils exercent des missions de même nature.
De plus, l’adoption de cet amendement créerait une différence de traitement entre les établissements publics de santé qui seraient exonérés de la taxe sur les salaires, alors que les établissements privés à but non lucratif demeuraient, eux, assujettis à la même taxe. Il y a bien un défaut de rédaction.
Au-delà, cette proposition permettrait de réduire la circularité bizarre de la taxe sur les salaires, qui est payée par les établissements de santé et qui finance en même temps le système de santé.
Nous avons demandé un rapport sur le sujet ; il est en cours de rédaction. Compte tenu de la complexité de la question sur les plans tant juridique que financier – elle a évidemment une incidence considérable sur le fonctionnement des établissements –, nous proposons d’attendre les préconisations globales issues du rapport susvisé avant de prendre la moindre mesure de ce type.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement, qui est prématuré. Compte tenu des masses salariales en jeu et de la complexité des modes de tarification, il nous faut effectuer un important travail préalable, qui prendra encore plusieurs mois. Le Gouvernement rediscutera avec vous de ce sujet l’année prochaine, madame la sénatrice.
Mme la présidente. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Au cours d’une réunion sur ce texte, la commission a émis un avis favorable sur cet amendement, sous réserve que nous y apportions des modifications, à savoir élargir cette disposition aux établissements privés à but non lucratif, ce que nous avons bien volontiers accepté. Pour nous, c’était vraiment Noël, car il est très rare que la commission des affaires sociales accepte un amendement que nous présentons chaque année ! (Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.)
J’apprécie particulièrement la réponse de Mme la ministre. En effet, cela fait un moment que nous travaillons sur ce sujet. Nous avons d’ailleurs eu l’occasion de lui en parler lors d’un rendez-vous avec des députés. Mes collègues et moi-même avons soumis cette proposition, y compris lorsque j’ai rencontré un certain nombre de membres de directions d’établissements hospitaliers publics. Ceux-ci, quels qu’ils soient, l’ont reçue d’une oreille plutôt favorable.
La réponse de Mme la ministre constitue un pas en avant extrêmement intéressant, parce qu’elle ouvre une fenêtre – j’espère que cette fenêtre s’ouvrira en grand – pour examiner les choses de plus près. Une telle mesure serait véritablement importante pour les hôpitaux, compte tenu de leur état.
Par conséquent, devant cette perspective positive, qui sera, je pense, accueillie avec soulagement par les établissements, et tout en restant vigilants, mais optimistes, nous retirons cet amendement.
Mme la présidente. L’amendement n° 498 est retiré.
Article 11 bis (nouveau)
I. – À la quatrième phrase du premier alinéa du 1 de l’article 231 du code général des impôts, après le mot : « communaux, », sont insérés les mots : « de l’établissement mentionné à l’article L. 1222-1 du code de la santé publique, ».
II. – Le I s’applique à la taxe sur les salaires due à raison des rémunérations versées à compter du 1er janvier 2019. – (Adopté.)
Article 11 ter (nouveau)
I. – L’article L. 137-16 du code de la sécurité sociale est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est complété par les mots : « sans préjudice de l’application des quatrième à dernier alinéas du présent article » ;
2° Les troisième et quatrième alinéas sont remplacés par trois alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de la contribution mentionnée à l’article L. 137-15 du présent code est fixé à 10 % pour les versements des entreprises prévus à l’article L. 3332-11 du code du travail lorsque l’entreprise abonde la contribution versée par le salarié ou la personne mentionnée à l’article L. 3332-2 du même code pour l’acquisition d’actions ou de certificats d’investissement émis par l’entreprise ou par une entreprise incluse dans le même périmètre de consolidation ou de combinaison des comptes au sens de l’article L. 3344-1 dudit code.
« Les entreprises qui ne sont pas soumises à l’obligation de mettre en place un dispositif de participation des salariés aux résultats de l’entreprise prévue à l’article L. 3322-2 du même code sont exonérées de cette contribution sur les sommes versées au titre de la participation aux résultats de l’entreprise mentionnée au titre II du livre III de la troisième partie du même code et au titre de l’intéressement mentionné au titre Ier du même livre III ainsi que sur les versements des entreprises mentionnés au titre III dudit livre III quel que soit le support sur lequel ces sommes sont investies.
« Les entreprises qui emploient au moins cinquante salariés et moins de deux cent cinquante salariés sont exonérées de cette contribution sur les sommes versées au titre de l’intéressement mentionné au titre Ier du même livre III. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2019.