M. le président. La parole est à M. Bernard Jomier, sur l’article.
M. Bernard Jomier. Je regrette que Véronique Guillotin ait retiré son amendement un peu trop tôt, car je n’ai pas eu la possibilité de répondre – positivement ! – à l’interpellation de Mme la ministre.
L’article 34 prévoit l’intégration de la couverture maladie universelle complémentaire, la CMU-C, et de l’aide à la complémentaire santé, l’ACS, dans un dispositif commun. Cela me semble être une bonne mesure de simplification. L’ACS est attribuée aux personnes dont les ressources se situent au-dessous d’un plafond d’environ 900 euros, et la CMU-C à celles dont les ressources se situent au-dessous d’un plafond d’environ 700 euros.
Cette mesure avait été présentée par le chef de l’État dans le cadre du plan Pauvreté, afin de remédier au trop faible taux de recours à l’ACS. Elle devrait être efficace.
Je veux toutefois attirer l’attention sur un point précis, car, comme le rappelait le président Milon mardi, reprenant une citation célèbre, il n’est pas impossible que, lorsque vous serez remplacée, madame la ministre, ce sera par un incapable ! (Sourires.) Or dans les mains d’un imbécile ou d’un incompétent, cette mesure pourrait faire l’objet d’une dérive.
Le dispositif de la CMU-C est un dispositif sans contribution financière. La barrière est claire et nette. À l’occasion de l’intégration de l’ACS dans le dispositif de la CMU-C, une contribution financière est établie pour les personnes qui relevaient de l’ACS, ce qui est tout à fait audible.
En tant que ministre compétente, vous êtes chargée de prendre un arrêté fixant le montant de cette contribution, qui, me semble-t-il, ne pourra pas dépasser 36 euros par mois.
Mais nous savons tous comment fonctionnent les seuils. À partir du moment où un principe de participation financière a été introduit dans le dispositif global, un futur ministre pourra revoir ce seuil par arrêté ministériel sans consulter le Parlement, contrairement au chèque santé, dont le montant a été fixé par voie législative. Il n’est pas dit que ledit seuil n’évoluera pas à la baisse. Progressivement, c’est le principe d’une CMU non contributive qui risque de disparaître.
Je ne m’oppose pas à la mesure que vous prenez, madame la ministre, et je ne vous prête aucune intention, mais j’attire votre attention sur le fait que vous ouvrez une porte et je m’en inquiète.
M. le président. La parole est à Mme Corinne Féret, sur l’article.
Mme Corinne Féret. Je souhaite à mon tour intervenir sur le principe du reste à charge ou de la contribution qui risque d’aboutir à laisser certaines personnes au bord du chemin.
La contribution maximum serait, certes, fixée à moins d’un euro par jour, mais certaines familles ne peuvent consacrer 30 euros par mois à une complémentaire santé.
Par ailleurs, le plafond proposé, fixé à 36,70 euros par mois, serait variable en fonction de l’âge du bénéficiaire, ce qui pourrait être vu comme une rupture à la règle de la sécurité sociale selon laquelle on contribue selon ses moyens et on reçoit selon ses besoins.
Je souhaitais apporter ces quelques précisions en complément de l’intervention de mon collègue, car nous avions déposé un amendement qui visait à garantir une complète rétroactivité des droits ainsi qu’une continuité de la prise en charge des frais des bénéficiaires des aides à la CMU-C, mais, malheureusement, celui-ci a été déclaré irrecevable.
M. le président. L’amendement n° 633, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 15
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…) Au septième alinéa, les mots : « au troisième alinéa » sont remplacés par les mots : « au dernier alinéa » ;
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 617, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 45, première phrase
Remplacer les mots :
Le montant de la participation
par les mots :
La participation financière
et le mot :
dû
par le mot :
due
II. – Alinéa 47, première phrase
Remplacer les mots :
du délai
par les mots :
de ce délai
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il s’agit d’un amendement rédactionnel.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 386 rectifié, présenté par MM. Daudigny et Kanner, Mmes Féret, Grelet-Certenais et Jasmin, M. Jomier, Mmes Lubin, Meunier et Rossignol, M. Tourenne, Mmes Van Heghe et Blondin, M. Fichet, Mme Guillemot, M. Magner, Mmes S. Robert et Monier, MM. Kerrouche, Tissot, Antiste, J. Bigot, P. Joly, Mazuir et Jacquin, Mme Bonnefoy, M. Duran et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 45, deuxième phrase
Supprimer les mots :
et varie selon l’âge du bénéficiaire
La parole est à M. Yves Daudigny.
M. Yves Daudigny. Nous nous étonnons de l’introduction de la notion de variabilité du prix en fonction de l’âge du bénéficiaire.
Celle-ci nous semble relever d’une logique propre à l’assurance privée, qui n’est pas et ne devrait pas être celle de la sécurité sociale.
Madame la ministre, j’imagine que vous allez me répondre que ne pas faire varier le montant de la cotisation en fonction de l’âge pénaliserait les jeunes, qui verraient leurs cotisations augmenter et seraient moins nombreux à recourir au dispositif.
Mais le présent dispositif d’aide concerne toutes les générations, et l’effort consenti en faveur des jeunes pénalise encore les personnes les plus âgées, déjà pénalisées par un certain nombre de mesures qui ont été évoquées et le seront encore au cours de nos débats.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Nous comprenons la logique sociale de l’amendement, mais la commission estime qu’il faut veiller à ce que le montant de la participation ne soit pas désincitatif pour les plus jeunes.
Elle a donc émis un avis de sagesse.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Permettez-moi tout d’abord de répondre à l’intéressante interpellation de M. Jomier.
Vous craignez, monsieur le sénateur, que la fusion envisagée n’entraîne une dérive progressive au terme de laquelle les bénéficiaires de la CMU-C pourraient se trouver en situation de contribuer.
Il est aujourd’hui prévu une protection par la loi : le seuil d’accès à la CMU contributive est fixé, par la loi, à 35 % du seuil d’accès à la CMU. Il ne pourra donc être remis en cause par arrêté ou par décret.
La CMU-C reste réservée aux personnes dont les revenus sont inférieurs à un plafond d’environ 700 euros par mois, mais un futur gouvernement pourra la détricoter un jour s’il le souhaite. Nous avons tout de même ancré dans la loi la différence entre la CMU-C et la CMU-C contributive.
Concernant l’amendement n° 386 rectifié, il est vrai que le dispositif proposé est un intermédiaire entre l’universalité de la sécurité sociale et la logique assurantielle d’accès à une complémentaire santé.
Jusqu’à présent, les bénéficiaires de l’aide à la complémentaire santé paient des cotisations de complémentaire santé plus ou moins élevées en fonction de leur âge, conformément à une logique assurantielle. Vous proposez de supprimer le critère d’âge pour le calcul de la participation financière.
Notre démarche ne s’inscrit pas dans une logique comptable. Elle est animée par le souci de trouver le critère le plus adapté pour couvrir la part complémentaire des soins et de permettre l’accès à une complémentaire.
Le critère d’âge se justifie au titre de la consommation de soins des personnes âgées ; le coût d’une complémentaire est également plus élevé pour les personnes âgées. Nous avons toutefois veillé à ce que ce surcoût soit très inférieur à celui qui existe aujourd’hui pour l’accès à une complémentaire, puisque nous l’avons plafonné à un euro par jour, soit 30 euros par mois pour des personnes âgées de 80 ans.
Quelles auraient été les autres options ? Soit instaurer une progressivité de la participation financière en fonction des revenus, ce qui n’aurait pas eu de sens car les revenus concernés se situent dans des fourchettes extrêmement faibles. Soit, comme vous le souhaitez, supprimer toute forme de critère : tout le monde paierait la même chose. Une telle option aurait tout de même été très défavorable aux jeunes et nous aurait conduits, pour être sûr de pouvoir les assurer, à leur proposer une moindre couverture.
Nous avons donc opté pour un dispositif qui conserve la logique assurantielle de la complémentaire santé, d’où ce critère d’âge, tout en essayant d’en diminuer au maximum les effets sur le coût de la CMU contributive. Cette logique pragmatique nous a semblé offrir la solution la plus équilibrée.
Nous souhaitons que les personnes accèdent à un panier de soins de qualité. Nous avons veillé à élargir le panier de soins couvert aussi bien par la CMU contributive que par la CMU-C.
Le dispositif global que nous présentons améliore l’accès à tous les dispositifs d’aide à la perte d’autonomie, notamment au fauteuil roulant. Pour les personnes handicapées, la couverture sera ainsi de meilleure qualité.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Je comprends bien le dispositif proposé par Yves Daudigny et ses collègues, mais j’entends aussi ce que dit Mme la ministre et je suivrai son avis sur cet amendement.
Nous avons, d’un côté, la prétendue universalité de l’assurance maladie, et, de l’autre, un régime assurantiel. Au bout du compte, on ne sait plus très bien qui agit, de la sécurité sociale, de l’assurance maladie ou des complémentaires santé, si bien que le système auquel nous participons tous est, quelque part, d’une grande hypocrisie.
Afin de mettre fin à une telle hypocrisie, nous pourrions réfléchir ensemble à une assurance maladie universelle, pour mettre tous ces éléments « dans le même panier », pour prendre en charge l’ensemble des remboursements. (M. Jean-Marie Vanlerenberghe, rapporteur général de la commission des affaires sociales, applaudit.)
M. René-Paul Savary. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.
M. Yves Daudigny. J’ai bien entendu l’argumentation du Gouvernement, madame la ministre, mais je ne la partage pas.
Dans la logique du système assurantiel, le montant de la cotisation est lié au montant du risque. Les cotisations sont, certes, plus faibles pour les jeunes, mais elles deviennent très élevées pour les personnes âgées.
La logique de la sécurité sociale, qui, historiquement, était aussi, me semble-t-il, celle des mutuelles, repose quant à elle sur une solidarité intergénérationnelle. Notre groupe estime que, dans le dispositif susvisé, qui est un dispositif à caractère social, la solidarité intergénérationnelle aurait dû l’emporter sur la logique assurantielle.
Madame la ministre, vous avez évoqué la question du panier de soins. Je vous avais précédemment interrogée afin de m’assurer que le panier de soins lié à la nouvelle CMU contributive permettait l’accès au 100 % santé et vous m’aviez répondu positivement. Je suppose que c’est toujours vrai, et je tiens à souligner ce point positif.
M. le président. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. La solidarité intergénérationnelle – je ne comprends pas qu’on s’en étonne – n’existe plus depuis la généralisation des complémentaires payées en partie par les entreprises, c’est-à-dire depuis que le monde qui travaille, qui a aussi le moindre risque, a pris ses responsabilités, en jouant la solidarité collectivement.
En contrepartie, les personnes âgées, notamment les plus fragiles, doivent assumer seules les frais de gestion particulièrement élevés des mutuelles. C’est là que je rejoins la proposition d’Alain Milon car elles ne peuvent continuer à les prendre en charge.
Les assurés payent des cotisations pour adhérer à l’assurance maladie, ils payent des cotisations de mutuelle et ils payent le reste à charge. Autrement dit, ils payent trois fois, alors qu’il s’agit de vases communicants. Il nous faut donc effectivement réfléchir à un système plus universel et plus clair.
Les mutuelles ont 22 % de frais de gestion. Il est certainement possible de discuter avec elles dans le cadre de l’appel d’offres relatif à la CMU-C.
Madame la ministre, nous ne sommes pas des hypocrites au Sénat, contrairement à ce qui a été dit par l’un de vos collègues ce matin même. Nous prenons nos responsabilités et assumons cette démarche qui consiste à proposer un prélèvement d’un milliard d’euros pour équilibrer ce PLFSS sans diminuer, tel que c’était prévu, le niveau de vie des retraités.
Faisons preuve d’un peu plus de clarté, madame la ministre ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Élisabeth Doineau applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Monsieur Daudigny, je comprends votre inquiétude, mais nous améliorons le dispositif par rapport à l’existant.
Outre le taux de non-recours à l’ACS, les personnes âgées qui en bénéficient payent leur mutuelle environ 120 à 130 euros par mois et touchent un chèque dont le montant est le même pour tous.
Le dispositif que nous mettons en place permettra d’abaisser ce coût à 30 euros par mois, ce qui constituera une économie substantielle pour les personnes âgées, qui bénéficieront de plus d’une meilleure couverture puisque nous avons élargi le panier de soins.
Par ailleurs, nous avons construit le dispositif de telle sorte que la partie contributive s’élève, pour un enfant, à 9 ou 10 euros. Nous sécurisons ainsi l’accès aux complémentaires pour les enfants de familles extrêmement précaires, et ce à des coûts très faibles.
Je comprends votre souhait de sortir de toute forme de logique assurantielle, mais ce dispositif va tout de même élargir l’accès aux complémentaires santé. Contrairement à la CMU-C, dont la prise en charge repose à 100 % sur l’assurance maladie, ce sont bien les mutuelles qui vont couvrir ces personnes. Il me semble donc que ce dispositif constitue une solution intermédiaire raisonnable et pragmatique.
Monsieur Savary, c’est en définitive un décroisement que vous et M. le président de la commission appelez de vos vœux. Comprenez qu’il s’agirait d’une véritable révolution de notre système !
M. Alain Milon, président de la commission des affaires sociales. Exactement !
Mme Agnès Buzyn, ministre. Le gouvernement auquel j’appartiens n’a absolument pas peur des réformes « transformantes » ! (Sourires.) Mais comme ce n’est pas l’engagement que nous avons pris devant les Français, vous me permettrez de ne pas prendre position aujourd’hui sur cette proposition disruptive ! (Nouveaux sourires.)
Pour l’heure, je vous propose donc de nous en tenir à favoriser l’accessibilité à un panier de soins de qualité aux personnes les plus précaires.
M. le président. La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.
Mme Laurence Cohen. Par ses explications, que j’apprécie, Mme la ministre touche à ce qui fait la substantifique moelle de notre débat.
Chacun avait compris, mais il est bon de le repréciser, que le Gouvernement entend maintenir la logique d’un cadre assurantiel, tout en s’efforçant – vous me pardonnerez l’expression – de limiter quelque peu les dégâts pour les personnes les plus précaires et d’améliorer une situation difficile.
J’attire toutefois votre attention, mes chers collègues, sur le fait qu’une telle logique ne permet pas de développer un système solidaire. Or la question est la suivante : peut-on, en 2018, développer un système qui permette un remboursement à 100 % de tous les soins pour toutes et pour tous ? C’est possible, et notre groupe a dégagé des propositions de financement, mais celles-ci n’ont pas été retenues par notre Haute Assemblée. Mais tel est bien le défi qui nous est posé aujourd’hui. Si l’on veut avoir un système protecteur et solidaire pour toutes et pour tous, c’est vers cela qu’il faut tendre. Or la logique du Gouvernement va à l’inverse.
À la décharge de Mme la ministre, cette logique perdure depuis longtemps, mais le Gouvernement accentue les choses. Je souhaitais simplement poser le problème et souligner que toutes les propositions de notre groupe reposent sur la logique du « 100 % sécurité sociale ».
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Agnès Buzyn, ministre. Je sais que nous avons un ordre du jour bien rempli, mais je me permets de reprendre la parole car, avec cette question, nous sommes vraiment dans le dur, sur du lourd, comme on dit.
J’entends la volonté, exprimée à la fois par le groupe communiste et le groupe LR, d’aller vers un système universel décroisé, en fait, de la couverture offerte par les complémentaires. Ce n’est pas rien !
La véritable difficulté technique serait de définir ce qui mérite d’être couvert par la solidarité nationale de ce qui peut en être exclu, afin de déterminer un panier de soins décroisé.
Le débat est intéressant, et j’aurai beaucoup de plaisir à travailler à ces questions avec vous, mais on ne peut pas les trancher dans le cadre d’un PLFSS.
Je vous propose une mesure pragmatique, qui améliore considérablement l’accès aux soins pour les plus précaires, bien qu’elle n’ait pas l’ambition que vous exprimez aujourd’hui dans cet hémicycle. C’est pourquoi je vous demande de l’adopter.
M. le président. L’amendement n° 621, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 60
Remplacer les mots :
Le b et le c
par les mots :
Les trois derniers alinéas
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. C’est un amendement non pas disruptif, mais de précision rédactionnelle. (Sourires.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° 620, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 107
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
VI bis. - À la première phrase de l’article 6-3 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989 renforçant les garanties offertes aux personnes assurées contre certains risques, le mot : « neuvième » est remplacé par le mot : « huitième ».
La parole est à Mme la rapporteur.
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Il s’agit d’un amendement de coordination.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je mets aux voix l’article 34, modifié.
(L’article 34 est adopté.)
Article additionnel après l’article 34
M. le président. L’amendement n° 566 rectifié, présenté par M. Iacovelli, Mme Conway-Mouret, MM. Marie, J. Bigot, Lurel et Leconte, Mme Monier, M. Raynal, Mmes Ghali et Artigalas, M. Houllegatte, Mme Perol-Dumont, MM. Tissot et Antiste, Mmes M. Filleul, Taillé-Polian, G. Jourda, Tocqueville et Grelet-Certenais et MM. Courteau, M. Bourquin, Manable et Vaugrenard, est ainsi libellé :
Après l’article 34
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2020, un rapport évaluant le taux de non-recours aux droits pour les personnes sortant du dispositif de l’aide sociale à l’enfance.
La parole est à Mme Nadine Grelet-Certenais.
Mme Nadine Grelet-Certenais. Le présent amendement a pour objet de demander une évaluation précise du taux de non-recours aux droits pour les personnes sortant du dispositif de l’aide sociale à l’enfance, ou ASE. Je pèse mes mots : il s’agit bien d’une demande d’évaluation et non de rapport.
Les mineurs et les jeunes majeurs qui sortent du dispositif de l’aide sociale à l’enfance sont une population fragilisée, notamment sur le plan de la santé. C’est pourquoi nous avions déposé un amendement qui, nous le regrettons, a été retoqué sur le fondement de l’article 40 de la Constitution.
Il avait pour objet de permettre aux personnes qui sortent du dispositif de l’ASE de bénéficier de la protection complémentaire dès lors qu’elles ne sont rattachées à aucun autre régime d’affiliation à l’assurance maladie jusqu’à leur vingt-cinquième anniversaire. Je pense notamment à celles dont les parents ont été déchus de leur autorité parentale
En clair, il n’existe aujourd’hui aucun maintien systématique de l’affiliation à la CMU-C pour ces mineurs et ces jeunes majeurs. Cela engendre des ruptures d’accès aux soins pour cette population particulièrement fragilisée et parfois en voie de marginalisation sociale et familiale.
En l’absence de débat sur cette question, le présent amendement a pour objet de demander un diagnostic au Gouvernement, afin de lutter efficacement contre cette fracture. C’est un sujet qui doit faire consensus, car il concerne des milliers de mineurs et de jeunes majeurs en France.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, rapporteur. Vous parlez d’une demande de diagnostic, madame Grelet-Certenais, mais l’article additionnel que votre amendement vise à insérer prévoit bien la remise d’un rapport.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
La situation des jeunes qui sortent du dispositif de l’ASE est toutefois un sujet réel. Madame la ministre, pourriez-vous nous préciser les mesures que le Gouvernement envisage de prendre ?
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Agnès Buzyn, ministre. Madame la sénatrice, vous pointez un vrai sujet de préoccupation. Dès mon arrivée dans mon ministère, je me suis engagée à améliorer l’accompagnement et l’accès aux droits fondamentaux des enfants qui sont confiés à l’ASE, notamment leur droit à la santé qui, on le voit bien, n’est pas toujours respecté.
Le plan local d’accompagnement du non-recours, des incompréhensions et des ruptures, ou PLANIR, prévoit la signature, par chaque conseil départemental, d’une convention avec la CPAM pour repérer très tôt les jeunes qui sortent de l’ASE et leur assurer l’accès à la CMU-C.
Outre ce dispositif, sur lequel nous sommes vigilants, nous travaillons actuellement à une stratégie de protection de l’enfance dont l’un des axes porte sur les droits à la santé. Des propositions seront faites très prochainement. Je ne peux pas vous en dire plus aujourd’hui, mais des actions concrètes vont être mises en œuvre par le Gouvernement.
Il ne me semble donc pas nécessaire de prévoir un rapport supplémentaire, mais soyez assurée qu’il s’agit d’un sujet de préoccupation pour la ministre que je suis.
M. le président. Madame Grelet-Certenais, l’amendement n° 566 rectifié est-il maintenu ?
Mme Nadine Grelet-Certenais. L’idée est de pouvoir vérifier que les départements passent cette convention pour que la couverture des personnes concernées soit effective.
Je ne maintiens toutefois pas mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 566 rectifié est retiré.
Article 35
I. – L’article 20-11 de l’ordonnance n° 96-1122 du 20 décembre 1996 relative à l’amélioration de la santé publique, à l’assurance maladie, maternité, invalidité, au financement de la sécurité sociale à Mayotte et à la caisse de sécurité sociale de Mayotte est ainsi rédigé :
« Art. 20-11. – Les assurés dont les ressources n’excèdent pas 50 % du montant du plafond fixé à l’article L. 861-1 du code de la sécurité sociale applicable dans les collectivités mentionnées à l’article L. 751-1 du même code bénéficient d’une prise en charge intégrale de la participation mentionnée à l’article 20-2 de la présente ordonnance par leur régime d’assurance maladie. »
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er mai 2019.
M. le président. La parole est à M. Abdallah Hassani, sur l’article.
M. Abdallah Hassani. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent article prévoit pour Mayotte une prise en charge intégrale, par l’assurance maladie, du ticket modérateur sur les soins de ville pour les personnes ayant des ressources modestes. Comme vous le savez, 84 % de la population mahoraise vit sous le seuil de pauvreté.
Je voterai bien sûr cet article, mais je souhaite faire quelques observations.
Si cette mesure permet de lever tous les frais financiers afférents à l’accès aux soins de ville, encore faut-il que ces soins existent. Or, à Mayotte, ils sont embryonnaires.
L’île ne compte, en libéral, que vingt et un médecins, quinze sages-femmes et cinq dentistes, pour une population équivalente à celle de Bordeaux. Nombre d’entre eux sont débordés de travail et épuisés.
Il s’agit en fait de désengorger le centre hospitalier de Mamoudzou. Or je crains que les assurés n’aient le sentiment qu’il s’agit de les éloigner davantage encore d’un hôpital en manque de praticiens et surchargé en raison de l’afflux massif d’immigrés illégaux, notamment de femmes venant accoucher. C’est un sujet très sensible à Mayotte.
Aussi faut-il rassurer la population. Une nouvelle politique de consultation vient d’être mise en place avec le renforcement des soins sur rendez-vous, la mise en place d’un forfait de dix euros et d’une facture pour les non-assurés sociaux, tout en maintenant la gratuité des soins pour les femmes enceintes et les enfants. Il faut une politique volontariste de développement de l’offre, tant en ville qu’à l’hôpital.
Le Gouvernement a décidé de créer à Mayotte une agence régionale de santé. C’est une avancée majeure. Des travaux d’extension et de modernisation du centre hospitalier sont prévus. La prévention au plus près des populations est indispensable, et je salue la création à Mayotte d’un diplôme universitaire d’animateur en santé communautaire.
Quant aux médecins libéraux et hospitaliers, il faut faciliter leur venue et leur maintien dans l’île. Madame la ministre, il se dit que vous préparez un décret en ce sens pour les hospitaliers. Pouvez-vous nous le confirmer ? Nous n’attirerons pas les praticiens s’ils craignent pour leur sécurité et celle de leur famille, ni si leurs enfants ne peuvent y suivre une scolarité normale, sans compter que, je le répète, nombre d’entre eux sont débordés de travail et exténués.