Sommaire
Présidence de M. Vincent Delahaye
Secrétaires :
M. Éric Bocquet, M. Guy-Dominique Kennel.
Mme Nathalie Goulet ; M. le président ; M. Sébastien Meurant ; M. le président.
3. Loi de finances pour 2019. – Suite de la discussion d’un projet de loi
Écologie, développement et mobilité durables
Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens
Compte d’affectation spéciale : Aides à l’acquisition de véhicules propres
Compte d’affectation spéciale : Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
Compte d’affectation spéciale : Transition énergétique
écologie, développement et mobilité durables
Amendement n° II-442 du Gouvernement. – Adoption.
Amendement n° II-216 rectifié ter de M. Roland Courteau. – Rejet.
Amendement n° II-120 de M. Joël Bigot. – Devenu sans objet.
Amendement n° II-169 rectifié ter de Mme Martine Filleul. – Rejet.
Amendement n° II-118 de Mme Angèle Préville. – Rejet.
Amendement n° II-401 de Mme Sylvie Robert. – Rejet.
Suspension et reprise de la séance
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
Amendement n° II-217 rectifié bis de M. Franck Montaugé. – Rejet.
Amendement n° II-549 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait.
Amendement n° II-464 rectifié de M. Guillaume Gontard. – Rejet.
Amendement n° II-550 rectifié de M. Claude Kern. – Retrait.
Amendement n° II-404 de M. Guillaume Gontard. – Retrait.
Amendement n° II-66 de Mme Françoise Cartron. – Adoption.
Amendement n° II-548 de M. Guillaume Gontard. – Rejet.
Amendement n° II-181 de M. Gérard Poadja. – Adoption.
Amendement n° II-532 de M. Maurice Antiste. – Non soutenu.
Amendement n° II-167 rectifié bis de Mme Martine Filleul. – Rejet.
Vote sur les crédits de la mission
Rejet, par scrutin public n° 32, des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », figurant à l’état B, modifiés.
Mise au point au sujet d’un vote
M. Jérôme Bignon ; M. le président.
Amendement n° II-150 rectifié de M. Guillaume Gontard. – Rejet.
Amendement n° II-317 rectifié de Mme Angèle Préville. – Rejet.
Amendement n° II-551 de M. Claude Kern. – Rejet.
Adoption de l’article.
Amendement n° II-91 rectifié de M. Daniel Gremillet. – Retrait.
Articles 76 bis, 76 ter et 76 quater (nouveaux) – Adoption.
Article 76 quinquies (nouveau)
Amendement n° II-553 de M. Didier Mandelli. – Adoption.
Adoption de l’article modifié.
budget annexe : contrôle et exploitation aériens
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial
Vote sur les crédits du budget annexe
Adoption des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », figurant à l’état C.
compte d’affectation spéciale : aides à l’acquisition de véhicules propres
Amendement n° II-152 de M. Guillaume Gontard. – Rejet.
Vote sur les crédits du compte spécial
Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », figurant à l’état D.
Vote sur les crédits du compte spécial
Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », figurant à l’état D.
compte d’affectation spéciale : services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
Vote sur les crédits du compte spécial
Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », figurant à l’état D.
compte d’affectation spéciale : transition énergétique
Amendement n° II-63 de M. Julien Bargeton. – Rejet.
Vote sur les crédits du compte spécial
Adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », figurant à l’état D.
Article additionnel après l’article 84 quater
Amendement n° II-62 de M. Julien Bargeton. – Rejet.
Sport, jeunesse et vie associative
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, pour le sport
Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse
Amendement n° II-443 du Gouvernement. – Rejet.
Amendement n° II-137 de Mme Céline Brulin. – Rejet.
Amendement n° II-39 de la commission. – Retrait.
Amendement n° II-490 rectifié bis de M. Jean-Pierre Decool. – Non soutenu.
Amendement n° II-486 de M. Laurent Lafon. – Retrait.
Amendement n° II-533 de M. Jean-Jacques Lozach. – Retrait.
Amendement n° II-534 de M. Jean-Jacques Lozach. – Retrait.
Vote sur les crédits de la mission
Rejet des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.
Article additionnel après l’article 83 quater
compte rendu intégral
Présidence de M. Vincent Delahaye
vice-président
Secrétaires :
M. Éric Bocquet,
M. Guy-Dominique Kennel.
1
Procès-verbal
M. le président. Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.
2
Rappels au règlement
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour un rappel au règlement.
Mme Nathalie Goulet. Monsieur le président, madame le ministre, mes chers collègues, nous sommes le 2 décembre et, le moins que l’on puisse dire, c’est que nous sommes loin d’Austerlitz. Au regard des dégradations, de la guérilla urbaine à laquelle nous avons assisté hier dans Paris et ailleurs, ce serait plutôt Waterloo.
Je pense qu’il est tout d’abord extrêmement important d’apporter notre soutien à l’ensemble de nos forces de police et de sécurité. Mais je pense aussi que toute la mission « Sécurités » ne suffira pas au ministre de l’intérieur pour nous expliquer comment le Gouvernement compte faire cesser ces manifestations.
Il faut bien évidemment distinguer les « gilets jaunes d’origine » des casseurs, mais le résultat est le même, qu’il s’agisse de nos rues ou de l’image de notre pays à l’étranger.
Nous serions bien inspirés, au Sénat, d’organiser très rapidement un débat pour discuter de ce sujet, extrêmement dangereux et extrêmement anxiogène. Personne n’a intérêt à surfer sur une vague de populisme. Nous devons tous nous efforcer de trouver des solutions. Je pense que le Sénat serait l’endroit où les trouver, pour calmer ce mouvement sans autre direction que celle d’inquiéter à la fois les populations et nos amis étrangers, et qui donne une image de la France absolument détestable.
Je vous demande, monsieur le président, de saisir la conférence des présidents de façon que le Sénat puisse, d’une part, exprimer son soutien inconditionnel à nos forces de police et de sécurité et, d’autre part, condamner avec la plus grande fermeté ce qui s’est passé hier.
M. le président. Acte est donné de ce rappel au règlement.
La parole est à M. Sébastien Meurant, pour un rappel au règlement.
M. Sébastien Meurant. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comment ne pas faire référence à l’Histoire, en ce 2 décembre, après ce qui vient de se passer ?
Effectivement, nous sommes loin d’Austerlitz et du sacre de Napoléon. Quelle n’est pas notre indignation, en tant que parlementaires, en tant que citoyens français, devant ce qui est arrivé à l’Arc de Triomphe, à ce symbole de la France, à ce haut lieu de mémoire, au pied duquel se trouve la tombe du Soldat inconnu ! Et cela, au lendemain du centenaire de la fin de la Grande Guerre, quelques semaines après que notre pays a accueilli des dizaines de chefs d’État, les caméras du monde entier braquées sur nous.
Quelle image renvoyons-nous, madame la ministre ? Le Gouvernement doit nous rendre des comptes, à l’Assemblée nationale comme au Sénat. Il faudra bien qu’il vienne s’expliquer devant la représentation nationale pour nous dire comment, en France, on peut en arriver là.
Il n’était jamais arrivé que l’Arc de Triomphe soit saccagé, jamais arrivé que la tombe du Soldat inconnu et le drapeau français soient foulés aux pieds.
Il faudra bien trouver les moyens d’en sortir, ce qui suppose déjà de respecter les corps intermédiaires, l’Assemblée nationale et le Sénat.
Aujourd’hui, ça part dans tous les sens : le pays ne sait plus où il va. La question est de savoir comment, tous ensemble, nous pouvons en sortir et quelle solution apporter au peuple français, qui a l’impression de ne pas être entendu, ni du Gouvernement ni de ses représentants.
Dans les jours qui viennent, il faudra bien que le ministre de l’intérieur vienne s’expliquer sur ces graves manquements, à Paris comme ailleurs.
M. le président. Acte est donné de ce rappel au règlement.
3
Loi de finances pour 2019
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 146, rapport général n° 147, avis nos 148 à 153).
Nous poursuivons l’examen, au sein de la seconde partie du projet de loi de finances, des différentes missions.
SECONDE PARTIE (suite)
MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES
Écologie, développement et mobilité durables
Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens
Compte d’affectation spéciale : Aides à l’acquisition de véhicules propres
Compte d’affectation spéciale : Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
Compte d’affectation spéciale : Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
Compte d’affectation spéciale : Transition énergétique
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » (et articles 75 à 76 quinquies), du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et des comptes d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » et « Transition énergétique ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les programmes « Paysages, eau et biodiversité », « Prévention des risques », « Énergie, climat et après-mines », « Service public de l’énergie », « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ». Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, rapporter les crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » après ce qui s’est passé hier, à Paris, me donne un peu l’impression de vivre dans un autre monde.
Hasard de l’actualité, madame la ministre, permettez-moi de rappeler que le détonateur de cette exaspération tient au raidissement sur la taxe carbone et à la volonté du Gouvernement – je viens encore de l’entendre de la bouche de son porte-parole – de ne rien changer, considérant que la vérité était détenue par une partie de ceux qui nous gouvernent, et eux seuls - en clair, par l’exécutif.
La France s’est réveillée hébétée, traumatisée par des images de chaos, de guérilla urbaine. Il est urgent, madame la ministre, je vous le dis en mon nom personnel, mais aussi, je le crois, au nom de l’ensemble de mes collègues, de prendre conscience et de changer de cap.
Si l’écologie et les enjeux environnementaux nous dépassent, nous avons besoin d’associer les Français à nos décisions, d’obtenir leur adhésion à un vrai choix d’avenir.
L’an dernier, nous avons rejeté la taxe carbone, estimant que le dispositif était trop brutal et que la méthode n’était pas la bonne. Vous la maintenez encore.
Nous vous avions alors proposé d’y travailler pendant une année dans le cadre de la Conférence nationale des territoires. Vous avez rejeté cette proposition.
Récemment, j’ai dit au Président de la République, que j’ai rencontré à Pont-à-Mousson, qu’il commettait une erreur qui risquait de se transformer en faute coupable, et peut-être grave. Sans suite.
Voilà trois jours, je siégeais au Conseil national de la transition énergétique en face du Premier ministre. Avec plus de solennité encore, et de gravité, j’ai plaidé pour une pause et, surtout, pour l’ouverture du dialogue. Que nous dit le Gouvernement aujourd’hui ? Qu’il ne change pas d’avis, qu’il ne change pas de vérité, qu’il ne change pas de cap.
Le pays est en train de se dresser, madame la ministre. Nous l’avons dit l’année dernière, il y a urgence à agir. Je vous le dis ici solennellement : le Gouvernement doit agir avec toutes les parties prenantes, au premier rang desquelles les corps intermédiaires et les deux assemblées parlementaires – comme l’exécutif, nous tirons notre légitimité du suffrage universel : direct pour l’Assemblée nationale et indirect pour le Sénat, à travers le vote des grands électeurs qui ont choisi, trois mois après les élections législatives, de doter le Sénat d’un panorama politique différent. Il est de la responsabilité du Gouvernement d’en tenir compte.
Enfin, pour qu’il n’y ait absolument aucune méprise, je m’associe aux propos de nos collègues : nous devons tout faire, avec le Gouvernement et les forces de l’ordre, pour pacifier la situation. Rien, jamais, n’autorise de telles violences.
Il est indispensable, madame la ministre, je le redis une dernière fois, de répondre à la colère qui continue de gronder. C’était à Paris hier, mais c’est aussi vrai dans nos provinces, dans nos villes et dans nos campagnes. La colère est là, parce que l’incompréhension règne face à une position dure et aveugle.
Tout cela ne m’empêchera pas, madame la ministre, de revenir – malheureusement très rapidement – sur les enjeux budgétaires qui traduisent un décalage entre les intentions affichées et les actes.
Cela est vrai du plan Climat, très en deçà de ce qu’avait imaginé et proposé le ministre d’État de l’époque, Nicolas Hulot. Ce décalage entre les actes et les intentions révèle finalement l’échec des politiques menées.
En ce qui concerne les enjeux auxquels doivent faire face les opérateurs, les agences de l’eau, au plus près des territoires, restent sous contrainte, dans un contexte d’extension de leurs missions.
Les agences de l’eau sont aujourd’hui confrontées à un effet de ciseaux important, entre la diminution de leurs moyens et l’élargissement de leurs missions, ce qui les conduira inévitablement à resserrer leur budget d’intervention et donc à provoquer des frustrations, des désaccords et, parfois, de la colère avec leurs mandants, notamment les communes.
La subvention pour charges de service public de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, dont le financement a été entièrement rebudgétisé en 2018, passe de 609 millions d’euros à 603 millions en 2019.
Là encore, cette baisse est contradictoire : il est demandé à l’ADEME de faire plus, notamment dans le cadre du développement de la chaleur renouvelable et de la politique de prévention des déchets, avec moins de moyens.
Les charges de service public de l’énergie, retracées dans le programme 345 « Service public de l’énergie » et dans le compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », sont le révélateur des insuffisances de l’État : après avoir beaucoup, beaucoup, beaucoup prélevé de contribution au nom de l’écologie, son faible retour en termes de participation est patent.
Il me revient, madame la ministre, de vous dire que nous rejetterons, dans l’ensemble, les crédits de la mission. Nous aurons l’occasion, avec les différents rapporteurs, compte d’affectation spéciale par compte d’affectation spéciale, de vous confirmer à la fois nos acceptations, mais également nos désaccords.
Comme beaucoup d’entre nous, je suis sensible aux enjeux sociétaux, environnementaux et écologiques. J’ai voulu vous dire, alors que s’ouvre aujourd’hui la COP24, à Katowice, en Pologne, la frustration, la déception et la part de colère qui est la mienne devant l’attitude très fermée du Gouvernement.
D’ici à la fin de cette matinée, j’espère que le climat aura commencé à se réchauffer – je parle du climat politique. Au-delà de notre débat d’aujourd’hui, c’est aussi l’avenir de notre pays qui se joue. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains – Mme Sophie Joissains applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme le rapporteur spécial.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial de la commission des finances, pour les programmes « Infrastructures et services de transports » et « Affaires maritimes ». Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, à mon tour je voudrais dire quelques mots de l’actualité dramatique que nous vivons depuis plusieurs semaines, et tout particulièrement depuis hier.
Au lendemain d’actes de violence inadmissibles, je veux dénoncer, comme nous tous, les attaques et les dégradations inacceptables contre des symboles de la République et dire mon soutien total aux forces de l’ordre.
La grande majorité des « gilets jaunes », qui s’expriment depuis maintenant plusieurs semaines, nous lance un appel. Le message est fort, le besoin de dialogue impératif, mais extrêmement difficile en l’absence d’interlocuteurs structurés.
Nous devons tous pacifier la situation pour tenter de construire cet indispensable dialogue. Il nous faut aussi, madame la ministre, entendre l’exigence de rendre compte de l’utilisation de la fiscalité carbone. J’ai été très impressionnée de constater que les « gilets jaunes » ne sont pas contre l’environnement. Bien au contraire, ils adhèrent aux objectifs, notamment pour leurs enfants, mais ils demandent à être mieux accompagnés et que cette fiscalité qui pèse sur eux soit totalement réinvestie dans des actions d’accompagnement de la transition énergétique.
Mais j’en viens à l’objet de cette intervention.
Je voulais tout d’abord inscrire mon rapport dans la perspective du projet de loi d’orientation des mobilités, que le Sénat examinera au début de l’année prochaine. Ce texte comportera pour la première fois une programmation financière pluriannuelle des infrastructures de transports pour la période 2018-2037, programmation que notre commission avait réclamée à l’issue des travaux de notre groupe de travail consacré à cette question et présidé par notre ancienne et dynamique collègue Marie-Hélène des Esgaulx.
Cette programmation prévoit que l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, sera dotée de 13,4 milliards d’euros sur la période 2018-2022 pour investir dans les infrastructures de transport, soit un peu moins de 2,7 milliards d’euros par an, puis de 14,3 milliards d’euros sur la période 2023-2027, soit 2,9 milliards d’euros par an.
Si beaucoup parmi nous espéraient des chiffres plus ambitieux, je tiens à relever à ce stade que les 13,4 milliards d’euros annoncés pour les cinq années à venir constituent un effort financier très significatif, puisqu’ils représentent une hausse de 40 % des crédits consacrés aux infrastructures par rapport à la période de cinq ans précédente.
Cette augmentation des moyens marque cinq priorités que vous rappelez régulièrement, madame la ministre.
La première consiste à mieux entretenir et moderniser les réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux existants, dont l’état s’était considérablement dégradé.
La deuxième priorité consiste à désaturer les grands nœuds ferroviaires, ce qui permet d’améliorer le fonctionnement des services ferroviaires du quotidien – RER, TER – et de rendre plus crédible la perspective d’une réalisation de certaines LGV – 2,6 milliards d’euros y seraient consacrés.
La troisième priorité serait le désenclavement routier des villes moyennes et des territoires ruraux, à travers une vingtaine d’opérations au sein des contrats de plan État-régions, pour un montant de 1 milliard d’euros. Ces opérations sont très attendues par un grand nombre d’élus locaux et par l’ensemble de nos collègues.
Vous faites du développement des mobilités propres, auxquelles je suis très attachée, comme beaucoup d’entre nous, la quatrième de ces priorités. Vous prévoyez d’y consacrer un peu plus de 1 milliard d’euros sur dix ans.
La dernière priorité est celle du rééquilibrage, tant attendu, du transport de marchandises de la route vers le train et le transport fluvial. Là encore, les crédits consacrés s’élèveront à 1 milliard d’euros sur cinq ans et à 2,3 milliards sur dix ans.
Voilà pour ce qui concerne le projet de loi d’orientation sur les mobilités, même si ce texte risque de se traduire également par un décalage, voire par un renoncement, à certaines opérations – je pense notamment au projet d’autoroute A45, entre Lyon et Saint-Étienne, dont vous avez déjà annoncé l’arrêt.
Les dépenses de l’État en faveur des transports sont réparties entre l’AFITF et le programme 203.
Comme chaque année, nous ne disposons pas du budget de l’AFITF pour l’année suivante, seulement de quelques orientations : 200 millions d’euros supplémentaires, avec un effort particulier consenti pour la régénération des réseaux.
Un bémol toutefois, madame la ministre : après le renoncement du gouvernement précédent à la taxe « poids lourd » qui devait servir de recettes pour l’AFITF, c’est le projet de vignette qui est désormais abandonné. Le budget de cette agence connaîtra très rapidement un déséquilibre financier de 500 millions d’euros.
Les crédits du programme 203 sont en très légère hausse. Je dirai quelques mots des trois grands opérateurs qui en relèvent.
SNCF Réseau poursuivra le grand plan de modernisation et bénéficiera prochainement d’une situation financière assainie grâce à la reprise de 35 milliards d’euros de sa dette par l’État en 2020 et en 2022. Cela mérite d’être souligné.
Le coût du Grand Paris Express a été réévalué de manière probablement plus réaliste et raisonnable, pour tenir compte d’éléments de risque, à 35 milliards d’euros, contre 25 milliards précédemment. Vous proposez d’augmenter les moyens humains, ce qui est tout à fait souhaitable eu égard à l’ampleur de ce qui constitue le projet du siècle en matière d’infrastructures.
Voies navigables de France va devoir consentir d’importants efforts de réduction de ses personnels, avec une centaine d’équivalents temps plein en moins par an.
Le Gouvernement a plutôt pris en compte les priorités que notre commission avait identifiées, en particulier la nécessité d’investir pour nos réseaux routier, ferroviaire et fluvial.
J’en viens au programme 205 « Affaires maritimes », dont la dotation s’établit à 162,6 millions d’euros. Je note l’effort consenti pour acquérir de nouveaux patrouilleurs.
Si je partage certaines des réserves formulées par Jean-François Husson, en particulier sur l’insuffisance du programme d’accompagnement des ménages pour la transition écologique, je suis favorable aux crédits des programmes de transport 203 et 205.
Il me reste à vous présenter brièvement les crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », que je vous propose d’adopter. Je vous rappelle que les trains d’équilibre du territoire, les TET, ont été largement réduits à la suite du rapport Duron, voilà deux ans. (M. Jean-François Husson, rapporteur spécial, applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial de la commission des finances, pour le programme « Expertise, information géographique et météorologie ». Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux débuter mon intervention sans rappeler, comme mes collègues l’ont fait à l’instant, combien nous avons été collectivement choqués par le saccage de l’Arc de Triomphe, ce monument national, ce symbole des valeurs de la République.
Nous sommes solidaires de nos forces de l’ordre et de nos soldats, dont la mémoire a été, hier, atteinte. Un monument qui symbolise la mémoire se doit d’être respecté. Si l’on veut être écouté et entendu dans la République, il faut en respecter les symboles.
Madame la ministre, vous allez entendre ce matin toutes les critiques qu’adresse le Sénat aux crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Comme Jean-François Husson l’a souligné à l’instant, on ne peut déconnecter ce débat de questions qui agitent notre société aujourd’hui, celle de la taxation de l’essence et du gasoil en particulier. Cette situation va évidemment servir de prisme à notre analyse.
J’interviens ici au titre du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie », ainsi que du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
Le programme 159 regroupe depuis 2017 les subventions pour charges de service public du Centre d’études et d’expertise pour les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, de l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, et de Météo France.
Ces trois opérateurs se sont vus signifier cette année une trajectoire financière dont on pourrait dire, selon une formule diplomatique, qu’elle est difficile, mais qu’elle est claire. Si je devais emprunter une phrase chère à Jean-Pierre Raffarin, je dirais que la pente des baisses de crédits est forte.
Toutefois, après avoir entendu les dirigeants de ces établissements, j’entends qu’ils préfèrent connaître la trajectoire des cinq années à venir plutôt que de continuer à découvrir, au fil des orientations données avant un conseil d’administration ou dans une loi de finances, le gel, puis le surgel de leurs crédits.
Vous avez donc donné une trajectoire enfin claire, même si elle difficile. Je veux saluer l’ensemble des personnels et des dirigeants de ces organismes, qui ont la mission particulièrement ingrate de mettre en musique ces perspectives financières assez raides.
Nous connaissons tous l’importance de Météo France, à un moment où des événements climatiques extrêmes se déroulent parfois sur nos territoires
La subvention pour charges de service public portée par le programme 159 va diminuer en 2019, à 183,8 millions d’euros. Dans le même temps, les effectifs baisseront de 94 équivalents temps plein travaillés, mouvement qui devrait se poursuivre dans les cinq ans à venir. Ce dernier chiffre montre bien combien la pente est raide.
Ces ajustements seront rendus possibles par une centralisation des activités à la Météopole de Toulouse.
Le gros enjeu des années à venir pour Météo France est l’acquisition de son nouveau supercalculateur, pour un coût total de 144 millions d’euros. Or l’État ne versera que 26,4 millions d’euros pour ce supercalculateur, au lieu des 34,4 millions espérés. Sur cette somme, 5 millions sont prévus par le projet de loi de finances pour 2019, quand 10 millions d’euros étaient attendus.
La secrétaire d’État, que j’ai interrogée en commission des finances, nous a rappelé qu’un prélèvement pouvait être opéré sur le fonds de roulement. Je voudrais tout de même alerter sur le fait que ce fonds de roulement va passer de 33 millions d’euros en 2018 à 12 millions en 2022. On peut demander à Météo France un effort sur le fonctionnement, mais on ne doit plus sacrifier l’investissement. Il s’agit d’un enjeu majeur sur lequel, madame la ministre, je souhaiterais que vous preniez un engagement clair.
Si la pente est raide pour Météo France, elle l’est tout autant pour l’IGN, qui verra sa subvention pour charges de service public baisser en 2018, à 91,7 millions d’euros, et ses effectifs perdre 63 équivalents temps plein travaillés.
Le modèle économique de l’IGN va changer avec l’avènement de l’open data. Un projet d’établissement visant à en faire l’opérateur interministériel unique en matière de données géographiques souveraines s’est fait jour. Il faut désormais procéder rapidement à une révision du décret statutaire de l’établissement et à l’élaboration d’un nouveau contrat d’objectifs et de performance, le précédent COP étant arrivé à échéance depuis bientôt trois ans.
Le CEREMA doit aussi se réinventer. Il s’est quelque peu stabilisé, après une crise très importante. Il subit une baisse de 5 millions d’euros de sa subvention pour charges de service public et de 100 équivalents temps plein travaillés.
Il s’agit, là encore, d’un cap difficile à tenir, même s’il est sans doute nécessaire au regard des contingences de la dette publique. Il y a là un vrai travail à mener sur ce point.
Je voudrais insister sur les investissements nécessaires : le matériel scientifique et technique du CEREMA doit être modernisé. Peut-être est-il possible d’assumer cette trajectoire en fonctionnement, non en investissement. Il faut lui redonner du mou en ce domaine.
J’en viens à présent au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », le BACEA, qui porte les 2,2 milliards d’euros de crédits de la direction générale de l’aviation civile, la DGAC, dont les recettes sont assises sur la croissance du trafic aérien.
Or cette croissance est plutôt bonne : elle s’élève à 4,8 % en 2018 et devrait être comprise entre 2,7 % et 5 % en 2019, cette fourchette plus large étant notamment due aux incertitudes liées au Brexit.
Air France a commencé à se réformer et à reconstruire un pacte social. Cependant, la situation du secteur me paraît particulièrement fragile.
Vous avez lancé des assises du transport aérien, ce dont je vous félicite. Comme vous le savez, le Sénat a adopté différents amendements s’inscrivant, me semble-t-il, dans la trajectoire de ces assises. Nous souhaitons simplement permettre au Gouvernement d’aller au bout des arbitrages. Je sais que vous plaidez en ce sens : la perche tendue par le Sénat me paraît devoir être saisie par l’exécutif. Il s’agit, selon moi, d’une coproduction législative utile.
Le BACEA va voir sa dette réduite. C’est une bonne chose.
Je voudrais enfin insister sur la situation de la direction des services de la navigation aérienne. J’ai commis un modeste rapport sur ce sujet, au nom de la commission des finances, voilà quelques mois. Nous sommes en situation d’alerte : nous sommes en retard et pointés du doigt à l’échelle européenne. Vous devez prendre la mesure des difficultés. Je serais sensible au fait que vous acceptiez de transmettre au Parlement les récents résultats de la mission d’inspection que vous avez lancée.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, pour le programme « Énergie, climat et après-mines ». Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, mardi dernier, le Président de la République a dit vouloir apporter aux Français « des solutions concrètes » pour les accompagner dans la transition énergétique. Il annonçait, aussi, « une grande concertation » sur ces sujets.
Madame la ministre, si le Président de la République cherche des solutions concrètes, nous en avons ! Quant à la concertation qu’il appelle de ses vœux, qu’elle commence ici et maintenant, au Sénat !
Au cours du débat, notre commission proposera plusieurs mesures d’aide à la transition, pour nos concitoyens, mais aussi pour les territoires et pour les secteurs économiques les plus impactés.
Pour que le chèque énergie ne serve pas qu’à payer des factures, nous proposerons d’en doubler le montant lorsqu’il est utilisé pour financer des travaux : cette mesure simple permettra de s’attaquer aux causes, plutôt qu’aux symptômes, de la précarité énergétique.
La fermeture programmée des dernières centrales à charbon oblige aussi à prévoir, dès maintenant, des crédits pour aider à la reconversion industrielle des sites. Madame la ministre, la signature de contrats de transition écologique ne servira à rien sans moyens budgétaires dédiés ! (Mme Sophie Joissains applaudit.)
La transition prend des formes très diverses. Ainsi, dans le nord de la France, c’est un changement du gaz distribué qui obligera certains clients à changer leur chaudière. Le Sénat alerte sur le sujet depuis le début de l’année 2017. Le Gouvernement travaille à une aide, mais nous ne voyons toujours rien venir ! Nous proposerons donc des crédits pour financer les premières aides, car il y a urgence : les premières opérations commenceront au printemps et, si les clients ne sont pas en mesure de changer leur équipement, leur alimentation sera coupée. Voilà du concret ! (Mme Sophie Joissains applaudit.)
Nous pensons aussi que, sur certains sujets, il faut aller plus vite et plus loin dans la transition : alors que les aides publiques sont très concentrées sur les énergies renouvelables électriques, n’oublions pas les énergies thermiques renouvelables. Le Gouvernement prévoit de porter le fonds chaleur de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, à 315 millions d’euros, mais sans augmenter le budget global de l’agence. Il s’agira donc d’un recyclage de crédits prélevés sur d’autres fonds. Ce n’est ni sérieux ni sécurisant sur le plan budgétaire, raison pour laquelle nous proposerons de vrais moyens supplémentaires dédiés au fonds chaleur.
Enfin, si vous souhaitez encore des mesures très concrètes, madame la ministre, je vous invite à soutenir les amendements sur le crédit d’impôt pour la transition énergétique que je défendrai la semaine prochaine. L’un vise à réintroduire un taux réduit pour les fenêtres en cas de remplacement d’un simple vitrage, opération qui permet bel et bien des économies d’énergie. L’autre tend à supprimer la condition de ressources que vous avez prévue pour les nouvelles dépenses éligibles ajoutées à l’Assemblée nationale, car il n’y a aucune raison que les classes moyennes en soient exclues.
Vous le voyez, nos propositions sont toutes simples. Il s’agit de permettre à des familles, y compris très modestes, de pouvoir accéder elles aussi à la transition énergétique, de diminuer le montant de leur facture de chauffage et de rendre celle-ci supportable. Autant d’occasions de traduire les paroles du Président de la République en actes ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mmes Nathalie Goulet et Sophie Joissains applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Pierre Corbisez, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable pour les transports routiers. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs spéciaux et rapporteurs pour avis, mes chers collègues, je partage bien évidemment le sentiment exprimé par l’ensemble des orateurs qui m’ont précédé à cette tribune concernant les événements d’hier. J’ose espérer, à ce sujet, que le Gouvernement changera de cap.
Après des années de sous-investissement dans les infrastructures routières, qui ont conduit à une détérioration de l’état des voiries et des ouvrages d’art, le projet de budget pour 2019 confirme le choix du Gouvernement d’investir en priorité dans la modernisation des réseaux existants.
Au total, 833 millions d’euros sont prévus pour financer l’entretien du réseau routier national existant, lorsque ce montant oscillait entre 610 et 680 millions d’euros les années passées. En ce qui concerne le développement de nouvelles infrastructures routières, 589 millions d’euros sont prévus, dont 389 millions d’euros provenant de l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, et 200 millions d’euros des collectivités territoriales.
L’augmentation des moyens consacrés à l’entretien du patrimoine routier doit être saluée. J’ai cependant plusieurs réserves à exprimer.
La première, c’est que les travaux menés tant par le Conseil d’orientation des infrastructures, le COI, que par les cabinets d’audit missionnés ont montré qu’il faudrait 1 milliard d’euros par an au minimum pour enrayer la dégradation du réseau existant. Nous n’y sommes donc pas encore.
La deuxième réserve concerne le budget de l’AFITF, qui nécessitera, à l’avenir, 500 millions d’euros de ressources supplémentaires au minimum, comme l’a dit ma collègue Fabienne Keller, sans que l’on sache aujourd’hui comment ce besoin de financement serait comblé, d’autant que l’idée de créer une vignette poids lourds n’est pas vraiment dans l’air du temps.
Une dernière réserve, qui est plutôt une inquiétude, concerne cette fois le réseau routier géré par les collectivités territoriales. Il semble que de nombreuses collectivités n’ont ni les moyens ni l’expertise technique suffisante pour assurer l’entretien de leur voirie et, ce qui est plus préoccupant encore, de leurs ouvrages d’art. La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a d’ailleurs créé une mission d’information pour étudier cette question et faire des propositions.
S’agissant, pour finir, des moyens dédiés au « bonus-malus automobile », le budget 2019 prévoit de renforcer le barème du malus automobile, ce qui permettra d’atteindre un niveau de recettes de 610 millions d’euros. Cette hausse des crédits devait initialement servir à financer l’extension de la prime à la conversion, l’ancienne prime à la casse, à hauteur d’environ 2 500 euros, aux véhicules rechargeables neufs ainsi qu’aux véhicules électriques et hybrides rechargeables d’occasion pour les ménages non imposables. Toutefois, M. le Premier ministre a annoncé récemment que la prime à la conversion serait finalement portée à 4 000 euros pour 20 % des ménages les plus modestes. Nous sommes donc dans l’attente du décret devant fixer le montant et, surtout, les conditions d’éligibilité de cette subvention.
Concernant le bonus automobile, je regrette la décision du Gouvernement de le limiter aux véhicules de moins de 60 000 euros. En effet, ce plafonnement ne me semble pas approprié, en particulier pour les véhicules à hydrogène, qui représentent une alternative intéressante par rapport aux véhicules tout électriques – pas de recyclage des batteries, autonomie de 600 à 700 kilomètres et moins de trois minutes pour faire le plein.
Malgré ces différentes remarques et compte tenu de l’effort réalisé en faveur de l’entretien et de la modernisation du réseau routier, la commission a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits consacrés aux transports routiers.
M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, en remplacement de M. le rapporteur pour avis. (M. François Bonhomme applaudit.)
M. Didier Mandelli, en remplacement de M. Gérard Cornu, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, pour les transports ferroviaires, collectifs et fluviaux. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comme les orateurs précédents, je ne saurais débuter sans avoir une pensée pour les événements tragiques qui se sont déroulés hier. Aucune cause ne peut justifier que de tels actes soient perpétrés ! J’espère que nous en identifierons très rapidement les auteurs.
Notre collègue Gérard Cornu ne pouvant être présent aujourd’hui, il m’a demandé d’exprimer en son nom la position de notre commission de l’aménagement du territoire et du développement durable sur les crédits dédiés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.
Lors de l’examen de ces crédits, notre commission a salué la priorité donnée par le Gouvernement à la modernisation des réseaux existants, ainsi que la démarche engagée pour rendre la trajectoire des dépenses de transport plus soutenable, par l’inscription d’un volet « programmation » dans le projet de loi d’orientation des mobilités, que nous examinerons prochainement.
Dans ce contexte, nous avons considéré que le budget de l’AFITF pour 2019, qui s’élèvera à près de 2,7 milliards d’euros, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2018, pouvait être accepté, même s’il reste contraint et conduira sans doute l’agence à retarder certains engagements, comme elle l’a déjà fait par le passé. Nous avons toutefois regretté que ce budget soit inférieur au montant préconisé par le Conseil d’orientation des infrastructures dans son scénario 2.
En ce qui concerne le volet relatif aux ressources du projet de loi d’orientation des mobilités, nous regrettons la décision malheureuse, prise par le précédent gouvernement, en 2014, de l’abandon de l’écotaxe ainsi que l’indemnisation d’Écomouv à hauteur de 800 millions d’euros, qui grèvent encore aujourd’hui le budget de l’AFITF et la privent évidemment des ressources indispensables pour réaliser le scénario médian retenu par le COI.
Du fait de cet abandon, il convient désormais de trouver des recettes supplémentaires, à hauteur de 500 millions d’euros par an. Même si le contexte actuel est difficile, la mise en place d’une vignette pour les poids lourds circulant sur les routes françaises nous paraît inéluctable. Il conviendra de concevoir un mécanisme d’allégement ou de dégrèvement pour toutes les entreprises routières qui paient des impôts en France, afin que le dispositif soit neutre pour ces dernières et permette in fine de faire payer les poids lourds étrangers qui utilisent nos infrastructures sans en assumer ne serait-ce que partiellement le coût aujourd’hui.
Enfin, concernant les crédits consacrés au transport ferroviaire, nous approuvons les mesures prises pour assainir la situation financière de SNCF Réseau, indispensables à sa transformation en société anonyme, et nous serons particulièrement vigilants, lors de l’examen du projet de loi d’orientation des mobilités, sur les crédits consacrés à la modernisation du réseau.
Pour ces différentes raisons, et avec les réserves que je viens d’exprimer, notre commission a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2019 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux. (MM. Stéphane Piednoir et Hervé Maurey applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Michel Dagbert, en remplacement de Mme la rapporteur pour avis.
M. Michel Dagbert, en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, pour les transports aériens. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je ne peux commencer cette intervention sans évoquer le contexte dans lequel cette prise de parole intervient. À mon tour, je veux saluer les forces de sécurité et répéter que, si les revendications des « gilets jaunes » sont légitimes, les désordres auxquels nous avons assisté hier attristent l’ensemble des représentants que nous sommes.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Très bien !
M. Michel Dagbert, en remplacement de Mme Nicole Bonnefoy, rapporteur pour avis. Madame la ministre, le fait que la fiscalité soit considérée par beaucoup de nos concitoyens comme punitive, les transports maritime et aérien ne faisant pas l’objet d’une taxation carbone à due proportion de la pollution qu’ils engendrent, explique en grande partie ces agissements.
Aussi, je souhaite vous inviter à faire preuve d’une grande détermination, y compris au niveau européen, afin de faire évoluer ces questions.
Nous avons également un certain nombre de craintes et de désaccords sur la privatisation d’Aéroports de Paris, mais le projet de la loi PACTE nous donnera l’occasion d’y revenir.
Plusieurs constats réalisés ces dernières années sont encore valables aujourd’hui.
Ainsi, comme les années précédentes, il convient de noter que le trafic aérien connaît une forte croissance, de près de 8 % au niveau mondial et de 6,2 % sur le plan national. Toutefois, comme les années précédentes, les compagnies françaises n’arrivent à capter qu’une partie de cette croissance et perdent des parts de marché au profit des compagnies à bas coûts, dont la dynamique de développement reste forte.
En mars dernier, vous avez lancé, madame la ministre, les assises nationales du transport aérien, dont nous nous félicitons. Ces assises s’intéressent au problème de la compétitivité des compagnies aériennes, mais aussi à la performance sociale, environnementale et territoriale du transport aérien. Depuis leur lancement, des mesures positives sont intervenues. Je pense, par exemple, à l’amendement adopté par l’Assemblée nationale, sur l’initiative du Gouvernement, visant à délester les compagnies aériennes d’une partie du coût des mesures de sécurité et de sûreté dans les aéroports parisiens. Je pense également à l’augmentation des crédits consacrés aux lignes d’aménagement du territoire, pour un montant de 4 millions d’euros.
Cependant, de réels motifs d’inquiétude demeurent.
Il en va ainsi de la situation du groupe Air France : des conflits sociaux coûteux n’ayant pas réussi à être évités, il a été procédé à un changement de gouvernance et, si un accord salarial a été conclu le mois dernier, tout n’est pas pour autant réglé et des négociations catégorielles continuent.
Enfin, la perspective de la privatisation d’Aéroports de Paris nous amène à insister sur le renforcement du cadre de la régulation, par l’accroissement des compétences techniques et des pouvoirs de l’Autorité de supervision indépendante des redevances aéroportuaires.
Pour terminer, je n’omets pas de souligner que, si son désendettement se poursuivra en 2019, le budget annexe « Contrôle et exploitations aériens » maintiendra un bon niveau d’investissement dans les programmes de modernisation des systèmes de gestion de la navigation aérienne.
Pour cette raison, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur l’adoption des crédits relatifs aux transports aériens. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Frédéric Marchand et Hervé Maurey applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Michel Vaspart, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, pour les transports maritimes. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a rendu un avis défavorable à l’adoption des crédits relatifs aux affaires maritimes et portuaires.
D’abord, la commission considère que la stabilité des crédits de ces programmes n’est pas compatible avec le développement d’une politique maritime française ambitieuse. Certes, je me félicite du fait que l’État honore l’engagement, pris au Comité interministériel de la mer – le CIMer – de 2016, de couvrir les dépenses de dragage des grands ports maritimes, mais cette mesure est normale, puisque les douze ports concernés sont placés sous la responsabilité de l’État. Cette augmentation permettra néanmoins de sécuriser la situation financière du GIE Dragages-ports.
S’agissant des crédits des affaires maritimes, je salue le maintien des exonérations de charges consenties aux armateurs, qui représentent 72 millions d’euros. Cette année, Bercy n’a pas osé supprimer la ligne.
Le gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre, a marqué sa volonté de soutenir le transport maritime dans la transition écologique. C’est notamment l’objet de l’article 18 quinquies du PLF, confirmé par le Sénat. Néanmoins, je m’étonne que ce dispositif permette au crédit-bailleur qui assure le financement du navire au gaz naturel liquéfié ou à l’hydrogène de conserver jusqu’à 20 % de l’aide fiscale du suramortissement.
Concernant le Brexit, je m’étonne du manque d’anticipation du Gouvernement sur la révision des corridors maritimes du mécanisme d’interconnexion en Europe, en lien avec le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. La Commission a proposé une révision des tracés du corridor qui relie la Mer du nord à la Méditerranée qui exclut les ports normands et bretons des nouvelles routes entre l’Irlande et le continent européen. Cette proposition de règlement est inacceptable.
Comment comptez-vous rééquilibrer la situation, madame la ministre ? Le Comité européen des régions et la rapporteur de la commission des transports et du tourisme ont déjà proposé des amendements en ce sens. Qu’en est-il de la nouvelle stratégie portuaire que le Premier ministre vous a chargée de définir ? Quels moyens sont prévus pour permettre aux ports bretons et normands d’effectuer leurs missions de contrôle sanitaire et de douane sur les marchandises anglaises ? Le modèle économique de nos ports et des compagnies maritimes est en grand danger.
Enfin, le CIMer de 2017, présidé par le Premier ministre, a pris un engagement concernant le financement de la responsabilité élargie du producteur, la REP, pour la déconstruction des navires de plaisance, en prévoyant que 1 % du produit du droit annuel de francisation et de navigation, le DAFN, serait attribué à la filière, taux qui passerait ensuite à 2 % et grimperait jusqu’à 4 % en 2021. Or vous plafonnez ce taux à 2 %. Les professionnels, qui s’étaient engagés à recycler 20 000 à 25 000 bateaux attendent ce financement. Quel financement de substitution allez-vous proposer pour respecter les engagements du CIMer de 2017 ?
Madame la ministre, le Gouvernement a, semble-t-il, une grande ambition maritime. Tant mieux ! Il faudra néanmoins avoir le courage de sortir d’une certaine technocratie des structures, puis faire évoluer, si ce n’est moderniser, la gouvernance des grands ports français. (Applaudissements sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, en remplacement de M. le rapporteur pour avis.
M. Hervé Maurey, en remplacement de M. Pierre Médevielle, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, pour la prévention des risques. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j’interviens à ce stade au nom de Pierre Médevielle, qui ne peut être présent parmi nous ce matin.
Notre commission regrette le manque global d’ambition des programmes budgétaires dédiés à la prévention des risques et au fonctionnement du ministère de la transition écologique et solidaire dans le projet de loi de finances pour 2019.
Concernant la prévention des risques, nous déplorons l’absence de tout effort notable en faveur de cette politique portant dédiée à la protection de nos concitoyens et à la préservation de l’environnement. En matière de risques naturels, l’intensification et la multiplication des aléas, liées au changement climatique, devraient pourtant inciter l’ensemble des pouvoirs publics à renforcer leur action. La tragédie humaine provoquée par les inondations dans le département de l’Aude, au début du mois d’octobre, nous rappelle une fois encore l’importance des politiques de prévention.
Concernant le fonds Barnier, après le regrettable plafonnement de ses ressources, l’an passé, pour alimenter le budget général de l’État, les modifications adoptées à l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement privilégient les dépenses consacrées aux bâtiments et aux maisons individuelles, aux dépens des outils de planification et des travaux engagés par les collectivités territoriales. Ce choix affaiblit les mesures d’anticipation et les opérations de protection les plus structurantes pour nos territoires, alors que de nombreuses communes exposées à d’importants risques naturels ne sont toujours pas couvertes par un plan de prévention ou protégées par des ouvrages suffisants.
Nous regrettons, par ailleurs, que l’Autorité de sûreté nucléaire n’ait obtenu qu’une augmentation très limitée de ses effectifs, en contradiction avec la multiplication des dossiers dont elle aura à connaître dans les prochaines années, compte tenu du vieillissement du parc et des projets de nouvelles installations.
Enfin, nous souhaitons vous alerter, madame la ministre, sur la nécessité de doter la Commission nationale du débat public, la CNDP, de moyens humains suffisants au regard du développement de ses missions. L’année 2018 a été marquée par l’organisation du premier débat public sur un plan national, en application de la réforme de 2016 sur la programmation pluriannuelle de l’énergie. Or la CNDP considère que l’insuffisance de ses moyens a eu un impact important sur les outils de mobilisation et sur la capacité à installer le débat dans la sphère publique à l’échelle nationale, ce qui est extrêmement regrettable.
Enfin, la baisse des effectifs du ministère de la transition écologique et solidaire, de l’ordre de 4 % sur deux ans, nous semble problématique. Elle ne saurait se poursuivre sans porter atteinte au pilotage des politiques du ministère et à l’accompagnement des projets en faveur de la transition écologique.
Pour ces différentes raisons, notre commission a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits dédiés à la prévention des risques et à la conduite des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, pour la biodiversité et la transition énergétique. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis défavorable à l’adoption des crédits des programmes 113, 159 et 174 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ». Ces crédits sont dédiés aux politiques de l’eau et de la biodiversité, de l’expertise, de l’information géographique et de la météorologie, ainsi que de l’énergie, du climat et de l’après-mines. Ils concentrent 1,1 milliard d’euros et baissent de moins de 1 % par rapport à l’année dernière.
Notre commission a exprimé un certain nombre d’inquiétudes, dont je vais vous retranscrire les grandes lignes.
Je ne vous cache pas, madame la ministre, que, pour l’essentiel, les interrogations ont porté sur une disproportion manifeste entre, d’une part, l’urgence liée au réchauffement climatique et l’érosion de la biodiversité et, d’autre part, la faiblesse des moyens consacrés à ces sujets, qui sont pourtant régulièrement brandis par le Gouvernement comme des priorités – ce n’est pas le seul sujet sur lequel les actes du Gouvernement sont en contradiction avec sa parole…
Cette disproportion s’observe tout d’abord dans les moyens consacrés à la politique de biodiversité : 10 millions d’euros supplémentaires pour la mise en œuvre du plan Biodiversité, c’est loin d’être suffisant !
En ce qui concerne les opérateurs, l’Agence française pour la biodiversité ne dispose, pour toute action nouvelle, que d’environ 30 millions d’euros de dépenses d’intervention non « fléchées », alors que 20 millions d’euros supplémentaires seraient nécessaires. Cet argent manque cruellement pour l’appui à la mise en œuvre concrète de la Stratégie nationale pour la biodiversité, pour le déploiement d’atlas communaux ou encore pour des campagnes de sensibilisation, mais surtout pour des actions réelles dans les territoires. En clair, il faut moins de colloques et plus d’action concrète et d’investissements dans les territoires, au bénéfice des élus locaux, qui mènent des politiques pragmatiques pour l’environnement, en lien, notamment, avec les agriculteurs.
De la même manière, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, l’ONCFS, voit ses moyens amputés de 21 millions d’euros, du fait de la baisse des redevances cynégétiques.
Enfin, cette année encore, la commission a tiré la sonnette d’alarme sur les moyens des agences de l’eau, dont les ressources sont réduites par la diminution du plafonnement de leurs redevances votée l’an dernier. Les onzièmes programmes qu’elles ont adoptés font apparaître un ciblage de leurs aides sur certaines priorités, au détriment d’autres missions pourtant essentielles, comme l’assainissement non collectif ou encore l’entretien des cours d’eau. Le sujet est essentiel, comme le prouvent, d’ailleurs, les assises de l’eau qui se tiennent actuellement. Nous attendons, dans ce domaine, du concret et des moyens, pour nos agriculteurs, pour les retenues collinaires et pour la qualité de l’eau.
Tels sont, madame la ministre, les sujets sur lesquels nous attendons vos réponses ! (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Pierre Corbisez, rapporteur pour avis, et Pierre Louault applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable. Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous examinons, ce dimanche matin, le budget de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », alors que c’est précisément une approche de l’écologie trop technocratique, trop théorique, trop dogmatique, trop punitive, trop coupée de la réalité du terrain qui a été la goutte d’essence qui a fait déborder le réservoir et conduit aux événements dramatiques que nous avons vécus et qu’il convient évidemment de condamner.
Puissent-ils au moins enfin faire prendre conscience au Gouvernement qu’il faut davantage écouter le Sénat, dont les membres sont les représentants des territoires en souffrance. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – M. Joël Bigot applaudit également.)
Les six rapporteurs de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable ont eu l’occasion de vous présenter leur avis. Je tiens à les remercier pour la qualité du travail qu’ils ont effectué.
J’évoquerai plus spécifiquement les crédits dédiés à l’environnement au sein de cette mission, ainsi que les enjeux de la fiscalité écologique. Mon collègue Jean-François Longeot abordera, pour sa part, les crédits alloués au transport.
De manière globale, nous observons avec satisfaction que les crédits de la mission sont en augmentation. Nous nous en félicitons dans le contexte actuel de restriction budgétaire, mais nous nous inquiétons de la réduction importante des effectifs – c’est l’une des plus importantes à l’échelle des différents ministères –, alors que les enjeux environnementaux et sociétaux sont tout à fait considérables.
Je veux faire trois observations sur les crédits de la mission.
Premièrement, en dépit de l’augmentation des crédits globaux, nous sommes inquiets pour certains établissements publics, tels que Météo France – Vincent Capo-Canellas l’a souligné –, dont les effectifs sont marqués par une évolution inédite, avec la suppression de 95 équivalents temps plein par an pendant cinq ans. D’ici à 2022, 40 % des effectifs auront été supprimés, alors même que les risques climatiques augmentent.
Je pourrais également citer l’ADEME, car, si les moyens affectés au fonds chaleur seront augmentés à 300 millions d’euros, cette hausse est rendue possible uniquement par l’annulation de projets antérieurs, et non par un effort financier supplémentaire en faveur de la transition écologique. Or il faudra continuer à accroître, dans les années à venir, le soutien au développement de la chaleur renouvelable, car la précarité énergétique est aujourd’hui l’un des enjeux majeurs pour les ménages. Elle ne fait que progresser, alors qu’elle aurait dû diminuer à la suite de l’adoption de la loi de transition énergétique en 2015.
Deuxièmement, je veux évoquer la question de la biodiversité – je serai bref, parce que Guillaume Chevrollier en a déjà parlé. Le Gouvernement a annoncé, voilà quelques mois, un plan qu’il a présenté comme ambitieux. Mais comment peut-on parler d’un plan ambitieux alors que le programme 113 ne prévoit que 10 millions d’euros supplémentaires pour mettre en œuvre ce plan ? Comment peut-on parler d’ambition quand les agences de l’eau voient leurs moyens diminuer à mesure que leurs missions s’étendent ?
Troisièmement, je souhaite aborder la question des objectifs de développement durable, les ODD, adoptés en 2015 par les Nations unies. En septembre 2019, un forum politique de haut niveau réunira les chefs d’État sur ce sujet à l’ONU. Le Gouvernement s’est engagé à rendre, l’année prochaine, les indicateurs de performance budgétaire cohérents avec les ODD.
Pour notre part, nous avons décidé, au sein de la commission, d’anticiper ce mouvement. Dès cette année, nos rapporteurs pour avis ont comparé, au sein de chaque programme, les indicateurs de performance budgétaire avec ceux des ODD. Force est de constater que cette comparaison révèle des limites : par leur sélectivité, certains indicateurs de performance, au sein du budget de l’État, ne sont pas en conformité avec les indicateurs des objectifs du développement durable. Il faudra y remédier. Des indicateurs complémentaires pourraient enrichir les informations existantes.
Pour terminer, je veux bien évidemment évoquer la question de la fiscalité écologique et rappeler la position de notre commission, que nous avons exprimée devant le Premier ministre jeudi dernier, lorsqu’il nous a reçus.
Les recettes issues de la fiscalité écologique doivent davantage financer la transition énergétique et beaucoup moins le budget général de l’État. Le lien entre recettes et dépenses écologiques doit pouvoir être établi de manière transparente et être mesurable.
Ensuite, des mesures sociales et économiques spécifiques doivent être prévues pour les populations les plus fragiles, notamment dans les territoires ruraux. Quand on a le choix entre la voiture et la voiture, il est difficile de faire évoluer son comportement, quelle que soit l’importance de la fiscalité écologique !
Enfin, une part de la taxe carbone doit être affectée aux collectivités territoriales, qui jouent un rôle essentiel en matière de transition écologique. Là encore, on ne peut pas demander aux collectivités locales de participer à la contribution carbone sans les faire profiter des recettes qui en découlent.
À défaut de prendre ces mesures, la fiscalité écologique sera définitivement condamnée, et la transition écologique fortement compromise. Au-delà, la prise en compte de ces différents points, même si elle n’est sans doute pas suffisante, est nécessaire au rétablissement de la paix civile et de l’ordre public dans notre pays. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains. – MM. Joël Bigot et Jérôme Bignon applaudissent également.)
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Très bien !
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de vingt minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Frédéric Marchand. (M. Henri Cabanel applaudit.)
M. Frédéric Marchand. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, soyons clairs : la transition écologique et solidaire est un véritable projet de société, qui passe par une transformation de l’ensemble des secteurs économiques et par une mobilisation de tous les acteurs, entreprises, collectivités, citoyens.
Aussi implique-t-elle une évolution des politiques portées par l’État, au travers des missions directement impulsées par le ministère de la transition écologique et solidaire comme de celles des autres administrations.
La cohérence de l’action gouvernementale sera une condition de la réussite de la transition écologique menée au service des Français et des entreprises, grâce au potentiel remarquable qu’elle constitue pour la croissance économique.
Cette démarche stratégique nationale et interministérielle a pour enjeux une meilleure qualité de vie, une meilleure santé, plus de solidarité, d’emplois, d’activité et d’innovation et, enfin, une meilleure compréhension par les citoyens de cet enjeu d’avenir.
Dans ce cadre, les crédits prévus pour 2019 permettent de financer la poursuite du plan Climat, notamment l’augmentation des capacités de production en énergies renouvelables, les mesures du plan Biodiversité, l’augmentation du montant moyen du chèque énergie, tout en préservant les crédits affectés à la prévention des risques.
À ce stade, il me semble essentiel de revenir sur l’action que conduit le Gouvernement en matière de fiscalité écologique. C’est un sujet sensible, qui suscite, depuis plusieurs semaines, des débats voire des polémiques. Des exactions inadmissibles, évoquées tout à l’heure, ont été commises hier. Rappelons-le collectivement, la colère peut être légitime, à condition d’être exprimée par des moyens légitimes. Je veux à mon tour apporter mon entier soutien à nos forces de l’ordre, face aux vandales qui s’attaquent aujourd’hui aux symboles de la République.
Oui, le verdissement de la fiscalité, c’est-à-dire l’utilisation de la fiscalité comme un levier de changement des comportements des Français, est un outil de cohérence.
En effet, il est nécessaire de taxer davantage la pollution et les émissions de gaz à effet de serre, ne serait-ce que pour rattraper notre retard au niveau européen.
Je rappelle également que cette augmentation de la fiscalité écologique intervient dans un contexte de baisse substantielle des prélèvements obligatoires dans d’autres domaines, baisse qui atteint 4,2 milliards d’euros pour l’année 2019.
Au travers de ce projet de loi de finances, le Gouvernement affirme clairement ses ambitions.
Il s’agit de poursuivre et d’accélérer la transition énergétique déclinée dans le plan Climat en poursuivant les actions concrètes en faveur de la réduction des émissions de gaz à effet de serre et des polluants atmosphériques.
Il s’agit également de renforcer la solidarité envers les plus précaires, en portant le montant du chèque énergie de 150 euros à 200 euros par an.
Il s’agit aussi de renforcer les moyens de la biodiversité, d’assurer la prévention des risques et l’information des citoyens, dans un contexte d’augmentation des phénomènes climatiques majeurs.
Par ailleurs, il convient de maintenir la priorité accordée à la régénération des réseaux de transport : la politique de mobilité doit répondre aux besoins de l’ensemble de nos concitoyens ; elle représente un facteur majeur de cohésion territoriale et sociale, en donnant accès, sur tous les territoires, aux services essentiels et à l’emploi. Elle constitue un levier majeur de la transition écologique, énergétique et solidaire de la France. Dans un cadre résolument intermodal et innovant, elle est aussi au cœur des enjeux de préservation de l’environnement et du cadre de vie des Français et d’amélioration de la compétitivité de notre économie, pour laquelle les réseaux de transport constituent un atout important.
Conformément aux priorités définies par le Gouvernement, les investissements dans le domaine des infrastructures de transport continueront de privilégier les transports de la vie quotidienne, la recherche d’une meilleure efficacité dans l’exploitation des réseaux de transport existants et leur optimisation.
En définitive, c’est un budget à l’offensive, n’en déplaise à certains, que nous présente le ministère de la transition écologique et solidaire.
Je voudrais maintenant insister sur un sujet peu évoqué, mais qui me paraît essentiel dans le cadre de sa dimension solidaire.
Jeudi dernier, M. Christophe Itier, haut-commissaire à l’économie sociale et solidaire, et François de Rugy, ministre de la transition écologique et solidaire, ont présenté le pacte de croissance pour l’économie sociale et solidaire, l’ESS, qui fixe les objectifs pour les années à venir.
Les entreprises de l’économie sociale et solidaire doivent bénéficier d’une meilleure visibilité et stabilité de leur environnement pour révéler leur potentiel de transformation.
L’économie sociale et solidaire doit être mieux reconnue et plus influente afin de pouvoir pleinement irriguer les politiques publiques et les rendre plus efficientes et innovantes. L’effet « pollinisateur » de l’ESS sur l’économie aidera à la rendre plus vertueuse sur les plans social et écologique.
Car elle fait émerger des solutions innovantes et concrètes pour répondre aux défis et enjeux sociaux majeurs de notre société. Quatre ans après la loi du 31 juillet 2014, qui a permis de fixer son cadre législatif, ce secteur doit franchir une nouvelle étape pour changer d’échelle au niveau microéconomique comme macroéconomique et révéler son potentiel.
Cette nouvelle étape se retrouve dans les crédits 2019 consacrés à l’ESS, et on ne peut que s’en féliciter. Car aujourd’hui, dans notre économie, l’économie sociale et solidaire, c’est 200 000 entreprises, 2,3 millions de salariés, 14 % de l’emploi privé, une augmentation de 23 % des emplois au cours des dernières années, 10 % du PIB et 5 000 créations d’entreprises chaque année.
Pour consolider les modèles économiques des entreprises de l’ESS et activer de nouveaux leviers de croissance, le Gouvernement fait un pari important, en proposant un allégement, dès 2019, de 1,4 milliard d’euros des cotisations patronales de toutes les entreprises de l’ESS, en encourageant le mécénat de proximité des TPE, en autorisant annuellement 10 000 euros de dons éligibles à la réduction d’impôt mécénat, en relevant à 72 500 euros le plafond de chiffre d’affaires annuel avant impôt commercial pour les associations, contre 60 000 euros aujourd’hui, afin de leur permettre de diversifier leurs recettes, sans remettre en cause leur caractère non lucratif.
En définitive, l’économie sociale et solidaire poursuit son développement. Elle est l’expression souvent directe des besoins de nos concitoyens, qui éprouvent la nécessité d’organiser eux-mêmes une réponse à un besoin collectivement ressenti, auquel le marché ne répond pas ou répond mal.
L’économie sociale ne connaît pas de sujet qui lui soit interdit ni de domaine où elle ne puisse prospérer. Nul doute que le pacte conclu jeudi et ce budget pour 2019 lui donneront un élan décisif.
Pour toutes ces raisons, le groupe LREM votera bien sûr les crédits de la mission. (M. Didier Rambaud applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, c’est dans le contexte troublé du mouvement social des « gilets jaunes » que nous examinons le budget de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
Face à l’enjeu climatique, crise planétaire, nous ne pouvons répondre par des ajustements. Le Gouvernement défend bec et ongles une politique qu’il qualifie d’« écologique ». Mais ni le discours de la méthode du Président de la République prononcé mardi, ni la présentation de la PPE, la programmation pluriannuelle de l’énergie, dans la foulée, ni les crédits du ministère de la transition écologique et solidaire que nous examinons aujourd’hui, ne permettent de donner corps à cette affirmation.
Il faudra ainsi expliquer à nos concitoyens que, malgré l’augmentation importante de la fiscalité sur les carburants, les crédits du ministère n’augmentent que de 0,22 % ! Il faudra aussi leur expliquer pourquoi seulement 19 % des recettes de la TICPE – encore moins que l’an dernier, un comble ! – viennent abonder le budget de la transition écologique.
On comprend aisément que nos concitoyens les plus démunis se sentent floués et que la « pédagogie » gouvernementale soit impuissante.
Alors entrons dans le détail.
S’agissant du budget des infrastructures de transports, nous saluons tout de même son augmentation de 5,7 % par rapport à l’année dernière. Nous mesurons l’effort, même si nous ne pouvons pas le juger suffisant, dans le contexte de dégradation globale de nos infrastructures.
S’agissant de la route, il faut renouveler 50 % des 12 000 kilomètres des routes nationales et rénover nos ponts et infrastructures. Parce qu’elles accueillent 85 % du transport de marchandises dans notre pays, nos routes sont particulièrement sollicitées, le développement graduel des 44 tonnes présentant un défi nouveau pour la robustesse de nos installations. Il est plus que temps de mettre à contribution le fret routier pour financer ces rénovations, qui ne peuvent reposer uniquement sur les contribuables.
Madame la ministre, le projet du Gouvernement en la matière se fait cruellement attendre, et son report nous inquiète.
Concernant le ferroviaire, l’augmentation des émissions françaises de CO2 et votre politique fiscale visant à contraindre l’usage de la voiture nous invitaient à imaginer que la priorité budgétaire serait mise sur le rail. Il n’en est rien ! Un effort insuffisant est fait sur la rénovation, mais aucun mécanisme ne vient compenser la diminution inexorable du réseau du quotidien qu’entraînera l’ouverture à la concurrence du réseau ferré.
À l’heure où nous parlons, le site Reporterre a recensé 27 lignes à l’arrêt, représentant 1 250 kilomètres de rail, soit 4 % du réseau, dont la moitié est d’ores et déjà condamnée. Nos compatriotes, otages de leur voiture individuelle, apprécieront.
Nous sommes également sans nouvelle de votre projet de remise à niveau du système capillaire de fret.
La situation n’est pas meilleure pour ce qui concerne les transports collectifs, le seul effort consenti par le Gouvernement concerne l’aberrant et inutile projet du Charles-de-Gaulle Express. Encore une fois, nos concitoyens apprécieront qu’en période de disette budgétaire on trouve 140 millions d’euros pour permettre aux hommes d’affaires de gagner dix minutes entre Roissy et la gare du Nord, au détriment des usagers du RER B. Cruel sens des priorités !
Hélas, ce n’est pas dans les transports collectifs que le Gouvernement envisage l’avenir des mobilités. Certes, le compte d’affectation spéciale « Aide à l’acquisition d’un véhicule propre » augmente de 63 %. Mais il porte fort mal son nom. En effet, la prime à la conversion a essentiellement servi, en 2018, à remplacer de vieux véhicules thermiques par des véhicules thermiques moins vieux ou neufs. Alors que les SUV représentent, selon l’ADEME, 32 % des ventes de véhicules neufs en 2017, chiffre en augmentation constante, on doute fort que la prime à la conversion permette réellement une baisse des émissions de CO2.
Quand bien même la prime serait réservée aux véhicules électriques, le problème serait le même, le bilan carbone de leur cycle de vie ne présentant pas une amélioration décisive par rapport à un véhicule thermique. Il est de toute façon illusoire de vouloir remplacer 40 millions de véhicules thermiques par 40 millions de véhicules électriques, alors même que nous devons diminuer notre consommation d’énergie. Là est l’enjeu. C’est vers les mobilités douces, les véhicules partagés et les transports collectifs que doivent se porter nos efforts budgétaires, si nous voulons préserver le moindre espoir de remplir nos objectifs climatiques.
S’agissant du programme « Eau et biodiversité », nous nous étonnons fortement que ses crédits n’augmentent pas, alors que le plan Biodiversité nécessite un effort de 600 millions d’euros. Les opérateurs du ministère en font les frais, avec 13 250 suppressions de postes depuis 2013.
Le budget de l’ONCFS, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, est plombé de 21 millions d’euros par l’aberrante réduction du permis de chasse et perd 39 agents. Le budget de l’AFB, l’Agence française pour la biodiversité, est à peine stabilisé, mais son directeur général estime qu’il lui manque 20 millions pour remplir correctement ses missions. La fusion des deux entités ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices.
Pire encore, alors que nos réseaux d’eau potable et d’assainissement accumulent les retards d’investissements, l’État renforce le plafond mordant des agences de l’eau et acte une baisse de leur budget de 195 millions d’euros, alors que leurs missions augmentent en permanence. Quant au CEREMA, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, il perd plus de 100 équivalents temps plein, un effort tellement considérable que l’établissement doit revoir le périmètre de ses missions.
Alors que nous déplorons la perte d’ingénierie dans nos territoires, alors que la future Agence de cohésion des territoires ne comble en rien ce manque, c’est vers l’expertise privée que les collectivités sont invitées à se tourner, au mépris de l’intérêt général et de l’impératif écologique.
Rien n’est fait pour accompagner les territoires dans leur adaptation au changement climatique. Météo France va encore perdre 90 postes par an jusqu’à la fin du quinquennat. Le fonds Barnier augmente moins que l’inflation. Après la catastrophe de l’Aude, c’est incompréhensible !
Vous l’aurez compris, madame la ministre, une politique écologique digne de ce nom mérite un budget en conséquence. Cet exercice budgétaire n’est pas à la hauteur des enjeux planétaire ni de la colère et de l’attente de nos concitoyens. Il est urgent de changer de cap et de retrouver de la lisibilité. Les recettes de la fiscalité carbone doivent être fléchées vers la transition écologique, c’est une nécessité, et notamment en s’appuyant sur les collectivités, comme l’a proposé le Sénat dans le cadre de la première partie du projet de loi de finances. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste. – Mmes Martine Filleul et Angèle Préville, ainsi que M. Joël Bigot applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon.
M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la violence, inouïe, anarchique de groupes mal identifiés, déterminés à ne rien respecter et à tout casser, nous a tous frappés, vos interventions en ont témoigné. Bien évidemment, il faut sans faiblesse rechercher et poursuivre ces individus et permettre à nos tribunaux de réprimer ces délinquants, car ce ne sont que des délinquants.
La colère et l’angoisse exprimées par le mouvement des « gilets jaunes » ne sont évidemment pas de même nature.
S’agissant de la transition écologique et de l’urgence sociale, il faut donc absolument et sans tarder reprendre la voie du dialogue.
Mon groupe partage la nécessité de poursuivre avec détermination la transition écologique, essentielle pour l’avenir de notre planète. C’est une question cruciale et urgente qui nous concerne tous. La COP de Katowice s’ouvre aujourd’hui. Son ambition est considérable, puisqu’elle prépare la COP de 2020, dont vous mesurez tous l’importance.
Toutefois, la conscience de l’urgence ne doit pas masquer celle de la pauvreté immédiate, vécue chaque jour par un grand nombre de nos compatriotes. Certes, à l’issue des discussions, une enveloppe de 11,5 milliards d’euros en crédits de paiement devrait être affectée à la mission que nous examinons. C’est à la fois beaucoup d’argent mais probablement pas assez. La mobilisation récente de milliers de Français démontre qu’aucune transition ne réussira si transition ne rime pas avec solidarité.
M. Roland Courteau. C’est sûr !
M. Jérôme Bignon. Cette dernière doit autant s’exercer entre les générations qu’au sein d’une même génération partageant une communauté de destin.
Les objectifs sont trop ambitieux pour n’être portés que par quelques pionniers convaincus et engagés. En effet, il faut limiter la pollution de l’air, des eaux et des sols, lutter contre le réchauffement climatique, protéger la biodiversité menacée par la destruction des habitats et développer des alternatives énergétiques. Mais la meilleure volonté du monde ne suffira pas à amorcer le changement, si elle n’est le fait que d’une minorité. Aucune fiscalité écologique ne sera acceptable si elle a pour corollaire l’accentuation des inégalités. Le renforcement de la prime à la conversion et l’abondement du chèque énergie ne permettant pas de compenser pleinement la hausse de la fiscalité sur l’énergie, les contributeurs les plus fragiles se retrouvent démobilisés, voire hostiles au changement.
Permettez-moi d’illustrer mon propos par quelques exemples d’actions visant à désamorcer les tensions et à améliorer le dialogue. Les moyens d’action de la Commission nationale du débat public restent très insuffisants. Si nous saluons la hausse des concertations préalables gérées par la Commission à la suite de sa réforme en 2016, les résultats des discussions, notamment sur la PPE, restent trop peu intégrés aux décisions.
Le prochain débat portant sur le plan national de gestion des matières et déchets radioactifs est très attendu. Nous espérons que le Gouvernement sera à l’écoute des besoins de la société civile et des positions qu’elle exprime. Comme dit le proverbe, prince qui n’a pas d’oreilles pour écouter n’a pas de tête pour gouverner.
Le groupe Les Indépendants – République et Territoires salue toutefois un certain nombre d’avancées présentées par le Gouvernement dans ce projet de loi de finances. Il s’agit notamment du ciblage du CITE, le crédit d’impôt pour la transition énergétique, pour le remplacement des chaudières à fioul, dès 2019, et du soutien au développement de la filière hydrogène, qui est très prometteuse et dont la technologie est stratégique pour la France.
Par ailleurs, la mission pour la préservation des zones humides que je mène avec ma collègue Frédérique Tuffnell, députée de la Charente-Maritime, qui nous a été confiée par le Premier ministre, nous conduira probablement à suggérer au Gouvernement des actions indispensables pour limiter la destruction des espaces de régulation que sont les écosystèmes des zones humides, qui concernent en France plus de 25 % de la biodiversité métropolitaine, en termes de qualité de l’eau, de biodiversité et de piège à carbone.
Néanmoins, il convient de rester vigilant, certaines mesures budgétaires et organisationnelles sont de nature à fragiliser le fonctionnement d’opérateurs dont les actions se situent au cœur de la transition écologique.
Ainsi, l’ONCFS, cela a été dit par de nombreux collègues, accusera une perte de ressources de 21 millions d’euros. Ces diminutions budgétaires nous préoccupent, car elles ont des répercussions sur les missions exercées, notamment en direction de la biodiversité et de la police de la nature.
Les agences de l’eau, qui sont des instruments essentiels de la politique de la biodiversité, voient leurs moyens diminuer, à la suite de la baisse de 123 millions d’euros du plafond annuel des redevances qui leur sont affectées. Comment feront-elles face à l’élargissement de leur mission, tout en préservant leur soutien aux collectivités locales en matière de gestion et de qualité des eaux ?
Le CEREMA accusera une baisse de crédits de 2,25 % et une perte de 101 équivalents temps plein, alors que les risques naturels sont en recrudescence permanente, comme le montrent, notamment, les inondations de l’Aude. Un trop grand nombre de communes restent exposées, sans plan de prévention des risques naturels, et démunies d’ouvrages de protection.
L’INERIS, l’Institut national de l’environnement industriel et des risques, perd 11 ETP, ses capacités de contrôle étant drastiquement réduites à un inspecteur pour 420 usines.
Enfin, Météo France gagne 5 millions d’euros sur les 144 millions d’euros nécessaires à l’installation d’un supercalculateur supplémentaire, mais l’établissement sera amputé de 40 % de ses effectifs territoriaux l’année prochaine. Or, chacun le sait, Météo France, l’INERIS et le CEREMA travaillent ensemble. Ces entités sont essentielles pour l’avenir de notre pays.
M. le président. Il faut conclure.
M. Jérôme Bignon. Dans ce contexte, c’est au vu des explications que vous nous donnerez, madame la ministre, que notre groupe s’abstiendra sur ces crédits ou votera contre.
M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli.
M. Didier Mandelli. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi de finances est toujours la traduction, l’illustration ou la déclinaison d’un projet politique au sens étymologique du terme : il s’agit d’être au service de la cité, donc du peuple. Et on ne fait pas le bonheur des gens malgré eux !
Ce budget pour 2019 ne traduit rien, sinon la volonté de dégager des recettes supplémentaires. Nous sommes sidérés, tout comme nos concitoyens, de l’abîme entre les investissements nécessaires à la transition écologique, qui sont très en deçà des besoins, et des recettes en forte hausse. En effet, jamais les mesures à caractère environnemental et énergétique n’auront rapporté autant au budget de l’État. À elle seule, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques devrait engendrer 36,3 milliards d’euros de recettes.
En 2024, la taxe carbone pour une tonne de CO2 devrait dépasser la valeur de 100 euros, six ans plus tôt que ce que prévoyait la loi relative à la transition énergétique. L’augmentation des taxes énergétiques a rapporté à l’État 3,9 milliards d’euros supplémentaires en 2018. Seulement 80 millions d’euros seront en réalité consacrés à la transition énergétique.
Ce projet de loi de finances pour 2019 opte également pour une accélération de la hausse de la fiscalité de 6,5 centimes le litre pour le diesel et de 2,9 centimes le litre pour l’essence. Vous ne pouvez douter des lourdes conséquences que cela entraîne pour les ménages, notamment dans les zones rurales où la voiture est souvent le seul moyen de locomotion. Telle est l’origine des protestations que nous avons évoquées précédemment.
Face au réchauffement climatique, ou plutôt au dérèglement climatique, terme qui me semble plus approprié, aux sécheresses et inondations dont la fréquence et l’intensité sont croissantes, à la perte de plus en plus inquiétante de notre biodiversité, il paraît décisif d’agir dès aujourd’hui et fortement. Néanmoins, rien ne laisse à penser que le Gouvernement souhaite agir. En regardant de plus près la mission « Écologie, développement et mobilité durables », on s’aperçoit, comme l’a souligné notre collègue Guillaume Chevrollier, que les moyens consacrés à la biodiversité et à la nouvelle Agence française pour la biodiversité sont largement insuffisants. Les moyens des agences de l’eau et de l’ONCFS le sont également.
Pire encore, madame la ministre, votre majorité a voté à l’Assemblée nationale un amendement limitant une fois de plus les dépenses du Fonds de prévention des risques naturels majeurs, dit « fonds Barnier, à hauteur de 105 millions d’euros au lieu de 125 millions d’euros. L’an dernier, j’étais intervenu ici même afin de dénoncer le plafonnement des recettes affectées, ponctionnées de 55 millions d’euros en 2017, de 71 millions d’euros en 2018 et de 120 millions d’euros en 2019. Cette mesure est irresponsable. Les collectivités soumises à des risques d’inondation importants auront donc encore moins de moyens que l’année dernière pour financer des travaux afin de prévenir ces catastrophes. C’est un élu de Vendée ayant vécu Xynthia voilà dix ans qui vous le dit ! En effet, compte tenu de la lenteur des procédures, seulement 35 % des travaux ont été réalisés !
Si le Gouvernement fait des efforts sur le chèque énergie et la prime à l’achat des véhicules électriques et la prime à la conversion, ces efforts restent insuffisants au regard des recettes engendrées par les taxes.
Par ailleurs, concernant le CITE, le crédit d’impôt pour la transition énergétique, j’appelle le Gouvernement à prendre des décisions claires et à s’y tenir. Soit on juge inefficace ce dispositif, comme le suggère la Cour des comptes, et on réfléchit ensemble à un nouveau dispositif, soit on le maintient avec un taux incitatif. L’entre-deux doit cesser, pour une meilleure lisibilité de tous les acteurs des filières.
Madame la ministre, l’augmentation de ces taxes aurait un sens si les recettes supplémentaires étaient consacrées à l’accompagnement de nos concitoyens vers un mode de consommation plus vertueux. Puisque tel n’est pas le cas, cette augmentation apparaît illégitime aux yeux des Français.
Si nous avons la chance de vivre dans un pays où les citoyens ont pleinement compris et intégré les enjeux de développement durable, de réchauffement climatique, de protection de la biodiversité, c’est grâce à l’important travail de pédagogie engagé, depuis plusieurs années, par tous les acteurs politiques, associatifs et du monde économique. Comme je l’ai dit lors du débat sur la COP 2024, je ne crois pas qu’une taxe fluctuante ou un Haut Conseil pour le climat résoudront, à court terme, ces questions de fond.
C’est grâce à des mesures incitatives que nous arriverons à progresser vers un modèle plus durable, avec l’objectif de modifier les comportements individuels et collectifs en suscitant l’adhésion de nos concitoyens, plutôt que de chercher à les culpabiliser et à les infantiliser.
Vous comprendrez pourquoi le Sénat a voté contre cette politique fondée sur toujours plus de taxes. Elle est injuste, car elle pénalise des ménages sans leur donner de contreparties suffisantes pour s’adapter. Elle est aussi incroyablement dangereuse, car elle désigne l’écologie et le développement durable comme responsables des hausses de la fiscalité, alors que les recettes sont destinées, pour l’essentiel, à combler les déficits publics. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)
M. Roland Courteau. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, effectivement, ne confondons pas les « gilets jaunes » avec les casseurs.
Voilà un mois, j’avais prévenu ici même M. le ministre François de Rugy, en insistant sur le fait que la transition énergétique devait être socialement inclusive, faute de quoi il y aurait problème. Sans commentaire.
Je formulerai simplement quelques remarques sur ce budget, lequel, compte tenu des enjeux, aurait gagné à être plus ambitieux, avant d’évoquer le dossier inquiétant de l’éolien flottant en Méditerranée.
Sommes-nous assurés que la fiscalité écologique, au demeurant légitime compte tenu des dérèglements climatiques, est bien fléchée, pour l’essentiel, vers la transition énergétique et écologique ? Pour ma part, j’en doute ! Il y aurait pourtant là des marges de manœuvre pour lutter contre la précarité dans laquelle risquent de basculer nombre de ménages.
Quant à la transformation du CITE en prime reportée d’un an de plus, voilà une belle occasion manquée d’accélérer la rénovation thermique chez les plus modestes ! Il est difficile, dans ces conditions, d’atteindre l’objectif de rénovation de 500 000 logements par an, d’autant que les crédits CITE sont réduits de moitié. Nous présenterons donc un amendement sur ce sujet.
Concernant le chèque énergie et sa revalorisation de 50 euros, disons-le tout net : ce montant est insuffisant pour compenser la hausse des prix et inciter à la rénovation. Nous présenterons donc un autre amendement sur ce point.
Faute de temps, je ne traiterai pas du stockage de l’électricité ou de la probable et nécessaire réforme de la structure du TURPE, le tarif d’utilisation des réseaux publics d’électricité, dans la mesure où le développement de l’autoconsommation va s’accélérer. Car il faudra bien continuer à utiliser nos réseaux et à conforter la péréquation.
J’en viens donc à l’éolien en mer : sommes-nous vraiment en route vers une nouvelle économie environnementale ? Si j’écoute les discours officiels, j’applaudis. Si je juge les actes, je suis profondément déçu. L’annonce par le Gouvernement d’un développement très limité de l’éolien en mer a eu l’effet d’une douche froide. On ne peut pas se positionner en champion de la lutte contre le changement climatique et, en même temps, donner un grand coup de frein à des projets à long terme.
L’enjeu est majeur. Il s’agit, avec l’éolien en mer, d’accélérer la transition énergétique grâce à la massification apportée par l’éolien flottant et de structurer ainsi une filière industrielle susceptible de se placer en tête du marché mondial. Faut-il, enfin, parler des nombreux emplois attendus ?
En Occitanie, et plus particulièrement dans le département de l’Aude, nous nous sommes battus, avec l’ancienne députée Marie-Hélène Fabre, pour arracher l’installation en 2015–2016 de deux fermes pilotes dans le golfe du Lion. La présidente de la région, qui défend cet important projet, a rappelé que 210 millions d’euros sont investis dans les travaux de Port-la-Nouvelle, destinés à accompagner le développement de cette filière. Sur son initiative, élus et acteurs économiques ont signé le pacte de Narbonne, que je soutiens.
Le coup de frein annoncé par le ministre est terrible pour l’ensemble des acteurs ayant déjà investi. Où est la cohérence ? Quand on veut développer, on donne de la visibilité et non des coups de frein. Dans ce dernier cas, cela peut provoquer l’arrêt des programmes d’investissement.
Je vous demande, madame la ministre, d’intervenir pour que le Gouvernement revoie sa feuille de route s’agissant du calendrier et des volumes annoncés. Ne brisons pas la dynamique de la filière de l’éolien flottant. Nous sommes aujourd’hui pionniers, ne soyons pas demain les derniers ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. Henri Cabanel. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jacques Mézard.
M. Jacques Mézard. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la violence est toujours inacceptable, surtout quand elle s’attaque aux symboles de la République et à nos forces de l’ordre. Le devoir de l’exécutif et de la représentation nationale, c’est de la condamner, et nous le faisons, tout en essayant de comprendre les raisons d’une crise et d’en tirer vite les leçons.
Quelques jours après la présentation par le Gouvernement du projet de loi d’orientation des mobilités et de la programmation pluriannuelle de l’énergie, et alors que s’ouvre aujourd’hui la vingt-quatrième édition, en Pologne, de la Conférence sur le changement climatique, le sujet dont nous débattons est au cœur de la crise que connaît aujourd’hui le pays.
Le groupe du RDSE, comme une grande majorité de nos concitoyens, est convaincu depuis longtemps que le réchauffement climatique est une menace vitale pour l’homme et que la transition écologique et énergétique est une nécessité impérieuse, une urgence, appelant une politique forte ainsi que des choix stratégiques économiques nouveaux.
Production de l’énergie, utilisation de l’énergie, mobilités, préservation de l’eau, nécessitent des approches et des moyens nouveaux, mais d’abord une politique transparente et lisible.
La crise actuelle en est l’illustration. La transition impose des financements considérables, donc des ressources nouvelles. Très simplement, nos concitoyens veulent que les efforts fiscaux demandés pour la transition écologique soient clairement identifiés, fléchés vers cet objectif et en adéquation avec leurs capacités contributives.
Le caractère prioritaire des enjeux impose de balayer les postures idéologiques qui ont pollué ces débats depuis de longues années.
Notre groupe, dans sa très grande majorité, a toujours défendu la filière nucléaire et sa modernisation – nous avons notamment toujours rappelé que l’abandon de la surgénération était une faute. Mais, bien sûr, nous avons toujours été favorables également à un rééquilibrage, au développement fort de toutes les énergies renouvelables, solaire, éolien, hydroélectricité, à une politique d’économies d’énergie, en particulier dans le bâtiment.
Sortir de la dépendance aux produits pétroliers est une évidente nécessité, mais on ne saurait le faire n’importe comment. Et, madame la ministre – vous le savez –, les problématiques ne sont pas les mêmes pour tous les territoires. Quand on ne peut se déplacer qu’avec une automobile, certaines mesures sont perçues comme inacceptables, voire provocatrices. N’oublions pas que ce sont les exécutifs successifs, quelle que soit leur couleur politique, qui ont vanté et développé la production du diesel !
Notre groupe a défendu ici, depuis des années, la filière hydrogène. Nous avons été peu entendus jusqu’à présent, et nous nous réjouissons qu’enfin l’hydrogène vert soit placé au cœur du nouveau dispositif.
Les véhicules électriques et les véhicules à hydrogène ne sont pas seulement l’avenir ; ils doivent être le présent.
Un mot sur les chaudières au fioul : leur suppression est un bon objectif, mais il faut cesser les annonces brutales. Il faudra du temps et des concours financiers. Quand on a une petite retraite – on a vécu une situation analogue avec l’assainissement individuel –, trouver 6 000 euros est impossible ; et les banques sont sourdes aux sollicitations des plus pauvres.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Eh oui !
M. Jacques Mézard. Sur les questions de mobilité, madame la ministre, nous attendons avec impatience le débat auquel donnera lieu votre projet de loi.
Je sais, moi, votre bon sens sur ces sujets – vous l’avez clairement exprimé depuis dix-huit mois – et votre attachement à une politique de justice territoriale. Les dernières décennies ont favorisé les autoroutes et les lignes à grande vitesse ; les territoires qui en sont dépourvus sont des victimes qui, à ce titre, ont aujourd’hui droit à la réparation des dégâts qu’elles ont subis depuis des décennies – droit, donc, à la restructuration de leur réseau de routes nationales, au soutien à leurs lignes de transport aérien régional, et à un vrai service ferroviaire.
D’une autre manière, le Grand Paris Express est une nécessité pour l’Île-de-France. Mais je conçois la difficulté de l’exercice.
À la demande de mon collègue et ami Ronan Dantec, un mot concernant les agences de l’eau : il considère à juste titre que la réduction de 500 millions d’euros de leur budget est trop importante, d’autant que le montant de la redevance est plafonné. Il attire aussi votre attention sur le changement du mode de calcul de la contribution à l’Agence française pour la biodiversité et à l’ONCFS, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, qui ne lui semble pas compenser le sous-dimensionnement de ces organismes.
Pour conclure, ce projet de loi de finances suscite un débat justifié sur la fiscalité des carburants. La décarbonation automobile est un bon et indispensable objectif – la pollution, dans les grandes villes, suffit à le démontrer –, mais un concept lointain pour beaucoup de nos concitoyens, ceux qui n’ont pas d’autre choix que l’automobile et dont les fins de mois sont critiques.
Un tempo plus équilibré, plus pédagogique, moins technocratique, si vous me permettez ce mot qui m’est cher, s’impose donc, afin de rendre acceptable la transition écologique, c’est-à-dire de faire en sorte qu’elle ne soit plus perçue comme une punition mais comme un espoir pour l’ensemble de nos concitoyens. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et sur des travées du groupe Union Centriste et du groupe Les Républicains.)
M. Antoine Lefèvre. Très bien !
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Bien ! Depuis le temps que nous le disons…
M. le président. La parole est à M. Jean-François Longeot. (Mme Sophie Joissains et M. Hervé Maurey applaudissent.)
M. Jean-François Longeot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je me concentrerai, dans mon intervention, sur les crédits consacrés aux transports et à la mobilité. Comme mes collègues, je ne peux que me féliciter de les voir désormais regroupés en un seul rapport. Le caractère lisible et simple des documents budgétaires n’est pas seulement une question formelle : c’est un sujet de démocratie – cette lisibilité et cette simplicité conditionnent l’effectivité du contrôle que le Parlement exerce sur les finances de la Nation.
Ce budget des transports est le budget de transition par excellence. Il est calé entre deux réformes majeures : d’un côté, la loi pour un nouveau pacte ferroviaire ; de l’autre, la loi d’orientation des mobilités, ou LOM. Cette situation pour le moins atypique n’est pas sans conséquences.
Première conséquence : ce budget est le premier à prendre acte de la réforme ferroviaire. Mais, pour l’heure, il ne transcrit que les efforts de productivité acceptés par l’opérateur dans le contrat de performance. Ce n’est qu’en 2020 et 2022 que l’État reprendra la dette de SNCF Réseau. Par ailleurs, du fait du glissement du calendrier de la loi d’orientation des mobilités, nous n’avons pas une vision claire des orientations stratégiques globales en matière de transports. Tel sera l’enjeu du volet « programmation » de la LOM.
En attendant, les grandes lignes du présent budget nous semblent aller dans le bon sens. Assainissement financier et sécurisation des infrastructures : tels semblent en être en effet les maîtres mots. L’assainissement concerne principalement l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF. Mais l’établissement de son budget à 2,7 milliards d’euros prouve que nous sommes toujours au milieu du gué.
Le scénario 2 du Conseil d’orientation des infrastructures prévoyait un budget annuel de 3 milliards d’euros par an pour l’AFITF, afin de concilier contrainte budgétaire et investissements. Nous n’y sommes pas encore, et il serait bon que vous nous indiquiez, madame la ministre, comment le Gouvernement entend y parvenir.
Quant à la problématique de l’obsolescence des infrastructures, elle est transverse au ferroviaire et à la route. Après l’effondrement du pont de Gênes et la catastrophe de Brétigny-sur-Orge, l’inquiétude est croissante. Elle n’est pas sans fondement, puisqu’un audit a révélé un écart de 520 millions d’euros entre les besoins théoriques de renouvellement des infrastructures et le contrat de performance signé par SNCF Réseau.
De même, dans le secteur routier, plusieurs années de sous-investissement ont fait dangereusement baisser le pourcentage de chaussées en bon état structurel.
Dans ces conditions, sécuriser est évidemment la priorité immédiate. La taxe sur les poids lourds pourrait être le vecteur financier de cette sécurisation. Mais va-t-elle être créée ? Encore une incertitude de taille qu’il serait bon de voir levée au plus vite.
Pour conclure, un mot, tout de même, de ce qui a suscité les plus vifs débats lors de l’examen de la première partie du PLF, à savoir la fiscalité environnementale. Nous nous réjouissons du succès de la prime à la conversion. Nous soutenons par conséquent son renforcement annoncé.
Sous réserve donc des importants éclaircissements que nous attendons dans les prochains mois, en particulier avec l’examen de la LOM, le groupe Union Centriste soutiendra les crédits dévolus aux transports. (Mme Sophie Joissains, ainsi que MM. Hervé Maurey et Jean-Pierre Corbisez applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde. (MM. Antoine Lefèvre, Stéphane Piednoir, Jean-Pierre Moga et Jean-Pierre Corbisez applaudissent.)
Mme Christine Lavarde. Monsieur le président, madame le ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les budgets passent, les constats demeurent.
Il y a un an, dans cet hémicycle, à l’occasion, déjà, de la discussion des crédits de la mission « Écologie », j’avais eu l’occasion de dénoncer le changement de philosophie en matière de fiscalité de l’eau.
Les redevances sur l’eau, versées aux agences de l’eau, devaient donner à ces dernières les moyens de soutenir des actions permettant aux industriels, aux agriculteurs, aux collectivités, de préserver la ressource en eau. La débudgétisation introduite par le PLF pour 2018 et poursuivie par le PLF pour 2019 transforme ces taxes en un impôt de rendement. Ces redevances sont payées par les consommateurs, sans prise en compte de leur situation sociale ou familiale. Elles pèsent donc davantage sur les ménages les plus modestes.
L’année dernière, j’avais invité le Gouvernement à ouvrir un chantier sur la fiscalité écologique. En application du principe pollueur-payeur, il serait honorable de diversifier les assiettes contributives et de mettre le financement des mesures assurant la protection et la restauration de la biodiversité terrestre à la charge des activités qui la dégradent.
Ce chantier sur la fiscalité écologique doit également porter sur la fiscalité de l’énergie. À de multiples reprises, des orateurs de tous les groupes ont dénoncé l’écart grandissant entre, d’une part, le montant des recettes perçues sur la consommation des différentes énergies et, d’autre part, les dépenses en faveur de la transition écologique et énergétique.
Ces recettes substantielles – les trois composantes de la TICPE, la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, doivent rapporter près de 38 milliards d’euros en 2019 – devraient permettre de mettre en œuvre un plan Marshall de la rénovation thermique des bâtiments.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Très bien !
Mme Christine Lavarde. Le gouvernement auquel vous appartenez, madame le ministre, a délibérément choisi de taxer massivement les carburants pour faire changer les comportements. Mais le secteur des transports représente moins d’un tiers de l’énergie consommée, quand celui des bâtiments avoisine 45 %. La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte fixe l’objectif qu’à l’horizon 2050 l’ensemble des bâtiments du parc immobilier français atteigne le niveau de basse consommation d’énergie. Elle prévoyait, à cette fin, qu’à partir de 2017 serait atteint un rythme de 500 000 rénovations énergétiques par an.
L’ANAH, l’Agence nationale de l’habitat, se félicite de ses résultats très encourageants en 2017 ; certes, le niveau atteint est le meilleur depuis 2010, mais, avec 81 000 logements réhabilités seulement, nous sommes très loin du compte.
Madame le ministre, je l’affirme ici avec conviction : la meilleure énergie est celle que l’on ne consomme pas. Et, en la matière, nous pouvons tous être acteurs de la transition écologique et énergétique, et ce dès le plus jeune âge, en éteignant la lumière, en économisant l’eau, en prenant les transports en commun, toutes mesures du quotidien.
Il est certes difficile – je l’entends – de passer au « sans voiture » dans les territoires les plus enclavés ou les moins denses ; cependant, dans la région francilienne, les transports du quotidien sont la clef de voûte de la décarbonation et de l’amélioration de la qualité de l’air. Or, là encore, l’État n’est pas au rendez-vous.
Les engagements ne sont pas honorés : 50 millions d’euros ont manqué en 2017 dans la mise en œuvre du contrat de plan État-région ; en 2018, ce sont les régions Île-de-France et Grand Est, ainsi que le département de Seine-et-Marne qui ont pallié la démobilisation de l’État à hauteur de 40 millions d’euros pour l’électrification de la ligne Paris-Provins-Troyes ; en 2019, les crédits inscrits dans le PLF sont inférieurs de 90 millions d’euros aux engagements pris antérieurement par l’État. De lourdes incertitudes pèsent désormais sur la réalisation de plusieurs opérations de transport – et je ne parle pas du métro du Grand Paris.
Madame le ministre, la mobilisation des « gilets jaunes » est l’expression d’un ras-le-bol, d’une incompréhension face à des prélèvements toujours plus lourds sur l’énergie, sur l’eau, demain sur les déchets, sans amélioration du quotidien, sans réalisation d’actions concrètes.
La planète est notre patrimoine. Nous devrions donc tous, gilets jaunes, citoyens, entreprises, élus, pouvoir nous rejoindre sur un grand principe : les dépenses en faveur de la transition écologique et énergétique doivent être d’un volume équivalant à celui des recettes collectées par l’intermédiaire des taxes comportementales.
Une nouvelle fois, à l’unanimité du Sénat, a été adopté un amendement visant à affecter une partie des recettes nouvelles de TICPE aux collectivités territoriales.
Le maire, par sa proximité avec ses concitoyens, est l’élu préféré des Français, car il est l’élu du quotidien. En proposant de donner des moyens aux collectivités pour la réalisation d’actions concrètes, nous vous donnons une piste, madame le ministre, pour essayer de faire en sorte que l’État ne reste pas un monstre froid. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions. – Mme Sophie Joissains applaudit également.)
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Bravo !
M. le président. La parole est à M. Joël Bigot. (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Joël Bigot. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la question sociale et écologique est désormais sur toutes les lèvres et de tous les débats.
La séquence allant de la démission de Nicolas Hulot, celui-ci ayant perdu la plupart de ses arbitrages budgétaires, à l’affirmation d’un puissant mouvement de protestation populaire, celui des « gilets jaunes », en passant par le nouveau rapport alarmiste du GIEC, le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le démontre, s’il en était besoin : l’écologie, la sauvegarde de la biodiversité, la transition énergétique, les mobilités, sont aujourd’hui des thèmes centraux de l’action politique.
Il est temps, et les Français nous le rappellent à juste titre, de fonder un véritable contrat social-écologique qui réconcilie nos engagements climatiques et la justice sociale.
Malheureusement, ce budget transcrit mal ces attentes et ne répond en aucun cas aux inquiétudes et à la colère qui s’expriment dans les rues.
Le ministère de l’écologie annonçait en septembre une augmentation de son budget de l’ordre de 3 %. Nous nous en félicitons, mais est-ce bien à la hauteur des enjeux ? La question se pose d’autant plus que, dans le même temps, vous supprimez 1 000 postes équivalents temps plein !
Vous ratez ici l’occasion de faire entrer la France dans une nouvelle ère, en ne transférant pas massivement les ressources de la fiscalité carbone vers la transition écologique ; en ne proposant pas un véritable accompagnement de la population dans la sobriété énergétique que nous appelons de nos vœux ; en ne rétablissant pas l’équité fiscale pour les personnes vivant dans les « zones blanches de la mobilité », soit 28 % de la population totale, selon les chiffres du CEREMA, le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement. Nos concitoyens se mobilisent aujourd’hui pour vous rappeler cette erreur et ce manque profond de lisibilité des mesures prises.
Lors de son discours de présentation de la très décevante programmation pluriannuelle de l’énergie, mardi dernier, le Président de la République lui-même avouait ne pas comprendre ce qu’est le chèque énergie.
Devant cet aveu un peu ubuesque, et au regard de la gestion calamiteuse, jusqu’à présent, de la crise sociale, il est peut-être temps, madame la ministre, d’écouter attentivement le Parlement. Nous avons en effet des propositions très concrètes pour nos concitoyens, applicables dès janvier 2019.
En l’occurrence – Roland Courteau vous le disait à l’instant –, nous vous proposons de tripler le montant du chèque énergie à destination des ménages modestes.
L’augmentation du chèque, dont le montant serait porté à 600 euros, permettrait à ses bénéficiaires de faire face à la nouvelle fiscalité et leur donnerait en même temps la possibilité de prévoir des travaux d’isolation énergétique, ce chèque étant cumulable avec d’autres aides.
L’idée d’un chèque transport fait également son chemin. Notre collègue Olivier Jacquin vous la présentera.
Concernant le budget de la mission « Écologie » proposé par le Gouvernement, nous nous interrogeons sur plusieurs mesures qui nous paraissent plus qu’étonnantes.
En effet, et tout d’abord, nous ne saisissons pas la raison pour laquelle le budget de l’ADEME, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, est étrangement en baisse de 6 millions d’euros, alors que – vous le savez, madame la ministre –, l’agence est le fer de lance, le grand ensemblier, de la transformation écologique dans les territoires, aussi bien dans le domaine des mobilités que dans la mise en œuvre de projets environnementaux structurants. Cette décision est illisible !
S’il est bien un secteur où l’investissement de l’État ne doit pas diminuer, c’est celui de la transition écologique. Conscient de l’urgence, le groupe socialiste proposera donc de remettre à niveau l’action n° 12, ADEME, du programme 181, « Prévention des risques » – et je ne parle pas du « fonds chaleur », dont le Président de la République avait promis le doublement de l’enveloppe.
Une telle remise à niveau serait un bon message envoyé à cette agence et à l’ensemble des collectivités territoriales qui, désireuses d’investir dans la transition énergétique, regrettent l’abandon des appels à projets « Territoires à énergie positive », les fameux TEPOS, lancés durant le précédent quinquennat, et qui ont obtenu, au niveau local, des résultats remarquables.
Par ailleurs, comme de nombreux collègues dans cet hémicycle, nous sommes très attachés au principe en vertu duquel l’eau paie l’eau.
Or ce principe est progressivement mis à mal par l’État. En effet, la loi de finances pour 2018 a prévu un prélèvement cumulé de 480 millions d’euros sur les budgets des agences de l’eau, entraînant une baisse nette de plus de 20 % de leur budget.
Ce prélèvement est opéré pour combler les déficits de l’État et financer l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, donc pour financer des missions sans lien avec l’objet des redevances prélevées. Le budget des agences de l’eau ne doit pas servir à financer la baisse des redevances cynégétiques, et cela n’a rien à voir avec le soutien que nous pouvons adresser aux chasseurs dans nos circonscriptions respectives.
L’enveloppe dédiée aux agences de l’eau baisse, au total, de près de 1 milliard d’euros sur la période 2019–2024. Comment pourront-elles remplir, avec moins de moyens, des missions dont l’étendue s’accroît ?
La question se pose, car le Gouvernement a annoncé, lors des assises de l’eau, l’augmentation de 50 % des aides versées par les agences de l’eau aux territoires ruraux qui n’ont pas les moyens d’investir dans le renouvellement de leurs installations, soit 2 milliards d’euros qui devraient être investis dans le cadre du XIe programme 2019–2024.
En outre, un plan Biodiversité a été présenté en juillet dernier. Au regard des moyens qui y sont consacrés, il apparaît très ambitieux. Je pense notamment à l’objectif « zéro plastique rejeté dans l’océan d’ici à 2025 », qui passera par l’interdiction des produits en plastique à usage unique d’ici à 2020, ou encore à l’objectif « 100 % plastique recyclé d’ici à 2025 ».
Nos inquiétudes portent également sur le programme 159, « Expertise, information géographique et météorologie », et notamment sur la situation du CEREMA. En deux ans, les crédits auront diminué de 11,6 millions d’euros. Notre collègue Angèle Préville aura l’occasion d’y revenir durant le débat.
Les enjeux de ce budget étant ainsi brossés, je réitère notre désaveu, et surtout notre crainte que le Gouvernement ne soit pas à la hauteur du défi climatique et social auquel nous faisons collectivement face.
Le Gouvernement, jusqu’à présent, use de tous les faux-fuyants pour repousser le moment des réponses. La loi d’orientation sur les mobilités en est un bon exemple : elle risque d’être réduite à peau de chagrin si nous n’arrivons pas à vous convaincre, dans la discussion à venir, de proposer aux Français des solutions efficaces et significatives en matière de pouvoir d’achat. Nous serons donc très attentifs au cours du débat budgétaire ; et vous l’aurez compris, madame la ministre : en l’état actuel des choses, nous ne voterons pas les crédits de la mission. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Jean-Pierre Corbisez applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Stéphane Piednoir. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Stéphane Piednoir. Monsieur le président, madame la ministre, madame, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à défaut d’être réellement en mouvement, ce gouvernement veut nous faire croire qu’il est en marche. Soit. Encore faudrait-il connaître la direction envisagée, et le sens de parcours choisi.
Après avoir organisé les « assises de la mobilité » – il fallait oser –, et face à la grogne très vive qui s’exprime en réaction à une fiscalité écologique hors sol, on nous livre un volant de pseudo-mesures pour la transition écologique, une sorte d’usine à gaz nouvelle génération totalement inappropriée.
Pour paraphraser un journal satirique bien connu, tout cela fait plutôt penser à une transition « bricologique »…
Le constat est très clair concernant les crédits alloués au budget de l’écologie : à comparer la hausse des recettes issues de la fiscalité avec la réalité du budget du ministère, le compte n’y est pas.
Les Français, et particulièrement ceux qui résident en zone rurale, vont subir un choc fiscal sans précédent si aucune inflexion n’est envisagée. Chacun est capable de comprendre l’urgence climatique. Mais embarquer l’ensemble des Français dans des changements de comportement suppose de leur donner une vision claire des moyens techniques, politiques et financiers qui vont être mobilisés pour atteindre cet objectif. Force est de constater qu’en la matière tout reste encore aujourd’hui beaucoup trop flou.
On a ainsi le sentiment, par exemple, que la seule ligne directrice de la programmation pluriannuelle de l’énergie dévoilée en début de semaine, fidèle à une forme d’écologie punitive et pour tout dire très idéologique, est de programmer la fermeture de réacteurs nucléaires dans un délai plus ou moins long.
Or il est indispensable que les objectifs d’évolution de notre mix énergétique soient crédibles et réalistes. Je me suis livré à quelques calculs. Savez-vous que chaque réacteur fermé, si l’on prend pour base une puissance fournie de 1 gigawatt, nécessitera par exemple l’implantation d’environ 2 000 éoliennes, ce qui consommera près de 50 000 hectares ? À titre de comparaison – j’aurais souhaité adresser cette remarque au ministre de la transition écologique –, il faudrait trente sites équivalents à celui de Notre-Dame-des-Landes pour accueillir ces éoliennes.
M. Antoine Lefèvre. Cela fait réfléchir !
M. Stéphane Piednoir. Voilà de quoi, à n’en pas douter, susciter bien des velléités !
En outre, l’acceptabilité citoyenne de ce genre de projets, comme celle des réformes fiscales, doit être prise en compte et anticipée.
Je n’ai rien entendu non plus de très volontariste concernant la filière hydrogène, pour laquelle les 100 millions d’euros précédemment annoncés par Nicolas Hulot semblent bien modestes compte tenu des enjeux, y compris à l’échelle européenne. En ce domaine, avons-nous réellement l’intention d’accélérer, ou nous contenterons-nous d’attendre et, si j’ose dire, de laisser passer les trains ?
J’en viens maintenant à la loi d’orientation des mobilités, qui a aussi été présentée en début de semaine. La dépendance à la voiture individuelle est aujourd’hui incontournable. L’enjeu des prochaines années est bien que les nouvelles mobilités ne soient pas des mobilités à plusieurs vitesses, laissant sur le bord du chemin une part importante de la population et des territoires, notamment les plus ruraux.
Le projet de loi prévoit un élargissement des compétences territoriales. Je m’interroge sur les moyens qui seront mis en place pour accompagner cet élargissement. En matière d’infrastructures par exemple, la question se pose pour les départements, qui connaissent déjà des difficultés financières importantes, et dont on ne connaît pas l’avenir des recettes fiscales.
Pour ce qui concerne la mobilité décarbonée, volet essentiel de la transition énergétique, je prends acte de l’augmentation du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres ». Beaucoup reste encore à faire, certes, pour atteindre l’objectif de l’arrêt des ventes de véhicules essence et diesel à l’horizon 2040 ; néanmoins, les deux mesures d’augmentation du montant de la prime à la conversion, d’une part, et d’élargissement des bénéficiaires aux automobilistes effectuant un trajet domicile-travail supérieur à 60 kilomètres par jour, d’autre part, vont dans le bon sens.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, mon avis est que, en matière de transition énergétique, les défis à relever sont encore nombreux pour passer de l’annonce, voire de l’injonction politique, à la mise en œuvre effective. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – MM. Jean-Pierre Corbisez et Michel Dagbert applaudissent également.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire, chargée des transports. Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, en préambule de mon intervention, vous dire quelques mots de l’action du Gouvernement en matière de transition écologique et solidaire, sujet au cœur de l’actualité. Car il s’exprime depuis plusieurs semaines, dans notre pays, une colère qu’il est de notre devoir d’écouter et à laquelle il est de notre devoir de répondre.
Mais ce qui s’est passé hier, à Paris, au Puy-en-Velay, à Charleville-Mézières, n’a rien à voir avec l’expression pacifique d’une colère légitime. Le Gouvernement ne confond pas les casseurs et nos concitoyens qui veulent s’exprimer.
M. Antoine Lefèvre. Tant mieux.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Les coupables de ces violences ne veulent pas de changement ; ils veulent le chaos. Ils manipulent et ils trahissent ce qu’expriment les « gilets jaunes ». Et, au-delà des nombreuses dégradations matérielles, qui ont touché y compris des symboles de notre République, ces violences ont engendré plus de 130 blessés, dont plusieurs très grièvement.
Je voudrais rendre hommage à nos forces de l’ordre et de secours, dont la mobilisation est exceptionnelle. Elles ont agi avec un très grand professionnalisme, donnant une priorité absolue à la sécurité de tous, notamment des gilets jaunes pacifiques.
L’état d’esprit du Gouvernement est clair : d’une part, fermeté totale à l’égard de ceux qui s’en prennent à la sécurité et à la République, d’une part – nous avons procédé à 422 interpellations ; 378 personnes étaient encore gardées à vue ce matin, et les suites judiciaires appropriées seront apportées – et, d’autre part et en même temps, ouverture du dialogue avec nos concitoyens qui s’expriment légitimement.
Tel est le sens des annonces faites mardi dernier par le Président de la République, avec notamment la volonté d’organiser une « grande concertation de terrain », au plus près des problématiques du quotidien, pour apporter des réponses précises et concrètes.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Il n’y a pas de méthode, pas de fil conducteur, pas de cadre !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Comme l’a rappelé le Président de la République : « dans ce contexte, chacun doit jouer son rôle, tout son rôle ».
De ce point de vue, je ne doute pas de trouver, dans cette chambre, la sérénité des débats qui fait sa réputation.
Je voudrais également, pour éviter toute méprise ou confusion, distinguer trois problématiques en matière de fiscalité écologique.
Premièrement, le verdissement de la fiscalité est une ambition assumée du Gouvernement – cela a été rappelé par le Président de la République lors de son discours devant le Conseil national de la transition écologique, le 27 novembre dernier. Ce principe concerne tous les Français, les ménages comme les entreprises. Les administrations, quant à elles, doivent être exemplaires dans cette stratégie de transformation de notre société. C’est un engagement collectif en faveur de la transition écologique.
C’est pourquoi ce budget pour 2019 confirme le cap donné par le Président de la République.
Afin de doter cette transition écologique d’un volet solidaire et de la rendre acceptable par nos concitoyens, nous avons fait un effort de baisses substantielles des prélèvements obligatoires. Pour l’année 2019, la réduction des prélèvements, pour les ménages, est de 6 milliards d’euros.
Je le redis, pour être très claire : nous baissons la fiscalité sur les ménages. Nous baissons également la fiscalité sur le travail, afin d’encourager l’emploi, et nous l’augmentons sur ce qui pollue, pour accompagner la transformation de notre société vers un modèle plus durable.
S’agissant, deuxièmement, de l’affectation de la fiscalité écologique, le Gouvernement est attaché au principe pollueur-payeur, mais la fiscalité actuelle n’est pas suffisante pour financer le budget du ministère de la transition écologique et solidaire. Rappelons les chiffres : la TICPE, en 2019, rapportera 37,7 milliards d’euros, dont 25,4 milliards pour l’État – et, donc, 12,3 milliards pour les collectivités –, ce chiffre comprenant la part allouée au compte d’affectation spéciale « Transition énergétique » et à l’AFITF.
Mais peut-on considérer que la TICPE relève à 100 % de la fiscalité écologique ? La réponse, à l’évidence, est non, car les carburants étaient taxés avant qu’on se préoccupe d’écologie. C’est plutôt la contribution climat-énergie qu’il faut prendre en compte. Or celle-ci représente 8 milliards d’euros pour 2019. Et même en ajoutant aux 25,4 milliards d’euros de TICPE perçus par l’État les redevances sur l’eau – 2,1 milliards d’euros – et la TGAP, la taxe générale sur les activités polluantes, le total obtenu, 28 milliards d’euros, est loin de couvrir les 34 milliards d’euros du budget qui vous est présenté.
J’entends néanmoins les attentes d’une plus grande lisibilité de la fiscalité écologique et du financement de la transition environnementale. Sur ce sujet, il nous faudra continuer à travailler, et le Gouvernement sera conduit à présenter des éléments de réponse dans le cadre des concertations qui vont s’engager dans les territoires.
Troisièmement, libérer les ménages et les entreprises des énergies carbonées est un sujet central, mais il est aussi lié aux prix de marché. Effectivement, la situation est extrêmement pénalisante pour certains de nos concitoyens qui peuvent être confrontés à de graves difficultés pour se chauffer ou se déplacer. Nul ne peut ignorer cette détresse et le Gouvernement y est pleinement attentif.
C’est le sens des engagements du Président de la République en faveur d’une transition écologique qui accompagne chacun. Mais la planète ne peut pas attendre, ou plutôt elle ne peut plus attendre. De trop nombreux Français sont aujourd’hui victimes de la pollution : chaque année, 48 000 personnes meurent en effet prématurément du fait de la pollution. C’est plus que tous les accidents de la route, tous les suicides, tous les meurtres, toutes les noyades et tous les accidents domestiques !
Au-delà de cet impératif climatique, c’est aussi un enjeu de protection des Français, voire de souveraineté. Il faut sortir de notre dépendance aux énergies fossiles pour nous libérer des menaces qu’elles font peser sur le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Pour relever ce défi, nous devons permettre à tous les Français de disposer d’équipements peu énergivores et utilisant des énergies durables. C’est l’enjeu de cette transformation de la société.
Cette stratégie s’appuie aujourd’hui déjà sur des dispositifs efficaces, que nous devons encore probablement mieux faire connaître, voire améliorer. Ils méritent par ailleurs d’être consolidés ; c’est l’ambition de ce projet de loi de finances. Ils représentent aujourd’hui plus de 3,5 milliards d’euros d’aides par an.
Je pense, notamment, pour l’amélioration de l’efficacité énergétique des logements, au crédit d’impôt pour la transition énergétique, le CITE, renforcé pour l’aide au changement des chaudières fuel, au taux réduit de TVA à 5,5 %, à l’éco-prêt à taux zéro, ou éco-PTZ, ou aux aides de l’Agence nationale de l’habitat, l’ANAH.
Pour aider les ménages les plus modestes à payer leur facture de chauffage, le chèque énergie est augmenté de 50 euros par bénéficiaire et étendu à 2,2 millions de foyers supplémentaires dès 2019, soit au total près de 6 millions de foyers, c’est-à-dire 20 % de la population. Je tiens à rassurer le sénateur Joël Bigot sur le sens des propos du Président de la République : il nous alerte sur la nécessité que ce chèque soit accessible et compréhensible par tous.
Concernant, enfin, la mobilité, et je reviendrai plus tard sur les axes de notre politique en matière de déplacements et de lutte contre les fractures territoriales, vous savez que le Gouvernement accompagne très fortement la conversion du parc automobile.
Je pense, en particulier, à la prime à la conversion. Elle permet d’accompagner les Français qui mettent au rebut un vieux véhicule énergivore et polluant pour en acheter un, le cas échéant d’occasion, plus propre et plus économe. Cette prime a déjà fait l’objet de plus de 250 000 demandes. Les ménages non imposables bénéficiaient déjà d’une prime doublée, à 2 000 euros. Elle sera encore doublée, à 4 000 euros pour les 20 % de Français les plus modestes et pour les ménages non imposables « gros rouleurs », du fait de leur activité professionnelle, et portée à 5 000 euros pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables, neufs ou d’occasion. (M. Daniel Gremillet s’exclame.)
L’objectif de 500 000 primes est désormais porté à 1 million de véhicules sur le quinquennat. C’est autant de dépenses de carburant diminuées, de pouvoir d’achat et de qualité de l’air regagnés.
À la prime s’ajoute le bonus écologique de 6 000 euros pour les véhicules neufs électriques et hydrogènes, qui sera maintenu. J’ai bien entendu les remarques du sénateur Corbisez : il nous faut aussi savoir accompagner les véhicules à l’hydrogène.
Quelques mots à présent des principales mesures de ce projet de loi de finances.
Concernant la prévention des risques, les récents épisodes météorologiques que nous avons connus dans l’Aude sont venus nous rappeler l’impérieuse nécessité de poursuivre l’effort en faveur de la réduction des risques, naturels et technologiques. Le changement climatique est une menace quotidienne pour les Français. Si nous ne faisons rien, ces catastrophes vont se multiplier.
Deux mesures vont dans le sens d’une plus grande prévention des risques. Premièrement, les crédits du fonds Barnier nous permettent de mobiliser près de 137 millions d’euros en 2019. Nous allons notamment déployer nos efforts sur l’outre-mer, dans l’Aude et pour financer les travaux des barrages de la Loire. Deuxièmement, soyez rassuré, monsieur le sénateur Capo-Canellas, des crédits supplémentaires pour le financement du supercalculateur de Météo France sont également prévus en 2019.
S’agissant de la biodiversité, le récent rapport du World Wide Fund for Nature, le WWF, est venu rappeler l’urgence d’agir pour lutter contre l’érosion de la biodiversité. En quarante-quatre ans, la planète a perdu 60 % des populations d’animaux sauvages. Nous pouvons encore inverser la tendance à condition de nous en donner les moyens. C’est donc une priorité du ministère.
Deux mesures vont dans ce sens. Premièrement, la mise en place du XIe programme des agences de l’eau doté de 12,6 milliards d’euros pour les six prochaines années, avec une priorité au financement du plan Biodiversité. Deuxièmement, l’augmentation de la redevance pour pollution diffuse, qui incitera à réduire l’utilisation des produits phytosanitaires et financera la conversion à l’agriculture biologique.
Concernant l’énergie, dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie, le ministère a fixé une série d’objectifs pour donner un cadre cohérent à la transition énergétique. Elle intègre six volets : l’amélioration de l’efficacité énergétique et la baisse de la consommation d’énergies fossiles, l’accélération du développement des énergies renouvelables, le maintien d’un haut niveau de sécurité d’approvisionnement dans le respect des exigences environnementales, la préparation du système énergétique de demain, le développement de la mobilité propre et la prise en compte des enjeux économiques et sociaux, ainsi que l’action collective avec les territoires.
Trois mesures illustrent cette ambition : 5,4 milliards d’euros de soutien seront consacrés aux ENR électriques en 2019 ; la renégociation réussie des champs d’éolien offshore ; l’augmentation progressive du fonds chaleur qui va atteindre 300 millions d’euros en 2019, soit 50 % de plus qu’en 2017.
Enfin, s’agissant de la maîtrise des déficits, le ministère de la transition écologique et solidaire prend sa part dans l’objectif porté par le Gouvernement de réduction des déficits, avec une baisse à hauteur de 2 % des effectifs, soit 811 emplois, à l’exception de la Société du Grand Paris dont les effectifs augmenteront de 200 emplois, ce qui sera nécessaire pour relever les défis de cet important chantier.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. C’est très bien !
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Absolument !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Les effectifs de la direction de l’énergie et du climat, de prévention des risques et ceux des autorités administratives indépendantes – l’Autorité de sûreté nucléaire, l’ASN, notamment – seront quant à eux maintenus.
J’en viens enfin à la question de la mobilité.
J’ai eu l’honneur de présenter lundi en conseil des ministres le projet de loi d’orientation des mobilités, après plus d’un an de travail, d’écoute, de concertation avec les citoyens et les territoires. Ce n’est pas un projet de circonstance, mais c’est bien l’engagement d’une transformation profonde, structurelle des politiques de mobilité.
Ce projet de loi est le fruit d’un diagnostic, d’une conviction posés dès la campagne présidentielle et que je porte depuis dix-huit mois : nous ne pouvons plus accepter que notre pays avance à deux vitesses.
La politique du tout-TGV menée pendant des décennies a laissé beaucoup de territoires et de citoyens abandonnés au tout-voiture.
Au-delà des fractures, du sentiment d’injustice, cette politique ne répond pas aux besoins des Français, qui attendent d’abord des transports du quotidien plus efficaces, plus accessibles et plus propres.
L’objectif de ce projet de loi mobilités est donc d’améliorer concrètement les déplacements du quotidien, pour tous les citoyens et dans tous les territoires.
Cette ambition, je n’ai pas voulu l’imaginer seule depuis Paris : c’est dans les territoires, au plus près des besoins, que se prennent les bonnes décisions et que s’inventent les solutions intelligentes qui répondent aux attentes. J’ai donc conçu ce projet de loi comme une boîte à outils au service des territoires.
Pour parvenir à améliorer le quotidien, nous allons relever quatre défis.
Premier objectif, nous allons simplifier la vie des collectivités et les accompagner pour que des solutions soient apportées sur 100 % du territoire.
Deuxième objectif, nous voulons soutenir l’innovation : toutes ces nouvelles solutions qui émergent doivent profiter à tous les territoires et à tous nos concitoyens. Nous allons donc favoriser les expérimentations et soutenir les nombreuses initiatives.
Troisième objectif, il nous faut réduire l’empreinte environnementale des transports, qui pèse encore lourdement sur le climat et la qualité de l’air. Nous allons pour cela encourager les déplacements en covoiturage ou à vélo, grâce notamment à la création du forfait mobilité durable, qui pourra s’élever jusqu’à 400 euros par an défiscalisés. Ce sont aussi des mesures pour les véhicules électriques et biogaz ou encore le déploiement des zones à faibles émissions.
Enfin, ce projet de loi a pour ambition de fixer une programmation soutenable de nos infrastructures de transport qui repose sur quatre principes fondamentaux : sortir des promesses non financées ; s’engager sur des choix clairs ; s’engager sur ce qu’on sait financer ; et s’engager de façon démocratique puisqu’il vous appartiendra d’en débattre.
Ce sont 13,4 milliards d’euros que nous allons investir dans ce quinquennat, soit 40 % de plus que durant la période passée. Cet effort sans précédent ira d’abord à ce que nous considérons comme des priorités : l’entretien de nos réseaux routier, ferroviaire et fluvial, pour les remettre enfin à niveau ; le désenclavement routier des territoires ruraux et des villes moyennes ; la désaturation de nos nœuds ferroviaires pour y développer davantage de trains.
Mais disposer d’une programmation soutenable de nos investissements suppose de réfléchir à de nouvelles ressources.
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Eh oui !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Il n’y a pas de décision, mais il n’y a pas de renoncement. Des ressources dédiées n’ont jamais été prévues pour 2019, les crédits ayant été dégagés par redéploiement au sein du budget de l’État. Nous allons continuer à y travailler.
J’en viens maintenant à la présentation des priorités du Gouvernement inscrites dans le projet de loi de finances pour 2019 qui traduisent les objectifs que je viens d’évoquer.
Ce sont ainsi plus de 8 milliards d’euros qui seront investis par l’État dans les transports au travers des différents programmes budgétaires ou des moyens affectés à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF.
L’amélioration des moyens se fera sur plusieurs axes : le programme « Infrastructures et services de transports » sera augmenté de 2,3 % par rapport à 2018 ; l’AFITF bénéficiera de 230 millions d’euros de recettes supplémentaires, soit une hausse de 10 % ; enfin, des ressources complémentaires seront apportées à la Société du Grand Paris, la SGP. J’indique à Mme la sénatrice Lavarde que nous multiplions par deux les crédits engagés par l’État et la SGP en Île-de-France sur ce quinquennat.
Vous le savez, en termes d’investissement, la première des priorités est celle de l’entretien et la modernisation des réseaux existants ; le drame de Gênes le 14 août dernier est venu nous le rappeler.
L’audit que j’ai commandé sur le sujet viendra nourrir les travaux de la commission spéciale dont je salue la mise en place au sein de votre assemblée. Le montant dédié à l’entretien et l’exploitation du réseau routier national avait augmenté de 100 millions d’euros en 2018. L’effort sera poursuivi à hauteur de 50 millions d’euros l’an prochain.
Nos priorités en matière d’investissement ne s’arrêtent pas à la route et au fer : je tiens à souligner que la dotation pour le dragage des grands ports maritimes sera augmentée en 2019 de 29 millions d’euros. Monsieur le sénateur Vaspart, je puis vous assurer que le Gouvernement se prépare au Brexit, quelle qu’en soit la forme, même si je n’ai pas le temps de vous apporter une réponse plus complète aujourd’hui.
Enfin, 2019 verra aussi le respect de nos engagements en matière de renouvellement de rames de trains d’équilibre du territoire, ou TET : 450 millions d’euros y seront consacrés.
Nos engagements au profit des mobilités actives se traduiront cette année par le lancement des premiers appels à projets du plan Vélo que nous avons présenté en septembre avec le Premier ministre et François de Rugy.
La lutte contre le réchauffement climatique passe aussi par la transformation des mobilités des marchandises. Le fret a toute sa place dans cette stratégie. Je pense tout particulièrement au transport combiné. C’est pourquoi nous avons décidé de donner une visibilité sur tout le quinquennat aux aides au transport combiné à hauteur de 27 millions d’euros.
Ce budget traduit également la politique maritime ambitieuse confirmée lors du comité interministériel de la mer, le CIMer à Dunkerque en novembre dernier.
Concernant le domaine aérien, alors que les assises conduites depuis le printemps arrivent à leur terme, nous avons d’ores et déjà décidé d’augmenter de plus de 15 millions d’euros les moyens des liaisons aériennes d’aménagement du territoire.
M. Jacques Mézard. Très bien ! Parfait !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Alors que la croissance du nombre de passagers s’élève à 4,6 %, il est impératif que nous nous dotions de tous les outils pour assurer la sécurité et la sûreté du transport aérien. Aussi, les investissements seront portés à près de 300 millions d’euros, en augmentation de 45 millions d’euros, pour dynamiser en particulier les grands projets de la navigation aérienne, notamment 4-Flight et Data-Link.
Le Président de la République l’a réaffirmé mardi dernier : « la réaction profonde de notre pays dit cette part de vérité française ». Nous avons donc, tous ensemble, le devoir, mais aussi la capacité d’y répondre.
Je crois que le budget présenté aujourd’hui s’inscrit pourtant en pleine cohérence avec l’ambition dont la France souhaite se doter.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Je n’en suis vraiment pas sûr !
Mme Élisabeth Borne, ministre. L’ambition d’une politique qui apporte des solutions au quotidien à tous nos concitoyens et dans tous les territoires. L’ambition d’une politique qui contribue à la lutte contre le changement climatique pour protéger les Français et les générations futures. L’ambition, enfin, de choix sincères et financés, c’est-à-dire d’un État crédible envers nos concitoyens et nos territoires. (MM. Frédéric Marchand, Jean-Pierre Corbisez et Jacques Mézard applaudissent.)
écologie, développement et mobilité durables
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », figurant à l’état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Écologie, développement et mobilité durables |
11 697 739 882 |
11 569 690 675 |
Infrastructures et services de transports |
3 365 600 659 |
3 193 638 870 |
Affaires maritimes |
163 055 254 |
157 335 254 |
Paysages, eau et biodiversité |
164 130 813 |
159 930 812 |
Expertise, information géographique et météorologie |
494 607 687 |
494 607 687 |
Prévention des risques |
831 328 679 |
825 802 247 |
Dont titre 2 |
46 446 540 |
46 446 540 |
Énergie, climat et après-mines |
400 130 246 |
400 130 246 |
Service public de l’énergie |
3 297 503 669 |
3 319 360 538 |
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables |
2 962 988 288 |
3 000 490 434 |
Dont titre 2 |
2 766 032 479 |
2 766 032 479 |
Économie sociale et solidaire (ligne nouvelle) |
18 394 587 |
18 394 587 |
M. le président. L’amendement n° II–442, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
30 000 |
30 000 |
||
Expertise, information géographique et météorologie |
||||
Prévention des risques dont titre 2 |
||||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
234 |
136 324 136 324 |
234 |
136 324 136 324 |
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
234 |
166 324 |
234 |
166 324 |
SOLDE |
- 166 090 |
- 166 090 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Cet amendement vise à diminuer les crédits des programmes 113 et 217 au profit des collectivités locales dans le cadre des transferts de compétences, conformément aux lois de décentralisation.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Sur le programme 113, le Gouvernement propose une minoration de 30 000 euros des autorisations d’engagement et des crédits de paiement au titre du transfert aux départements de la propriété du domaine public fluvial. Sur le programme 217, il propose une minoration de 136 000 euros.
Il s’agit certes d’ajustements mineurs visant à tenir compte « des données nouvelles dont le Gouvernement ne disposait pas au moment du dépôt du projet de loi de finances ». Néanmoins, la somme est considérable rapportée à l’ensemble des crédits de la mission. Avis de sagesse.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Ces amendements traitent de thématiques très variées, ils ont cependant été mis en discussion commune, car six d’entre eux visent à prélever des crédits sur l’action n° 03 du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ». Cette action ne comprend que 67,7 millions d’euros en autorisations d’engagement. Or l’adoption cumulée de ces amendements conduirait à la prélever d’une somme très supérieure.
En conséquence, en cas d’adoption d’amendements prélevant sur cette action, les amendements qui conduiraient à dépasser cette somme tomberaient.
Cette précision faite, nous passons à la présentation des amendements.
L’amendement n° II–216 rectifié ter, présenté par MM. Courteau et J. Bigot, Mme Artigalas, MM. M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Dagbert, Daunis et Duran, Mmes M. Filleul et Guillemot, MM. Iacovelli, Montaugé, Tissot et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville, Tocqueville et Taillé-Polian, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
1 500 000 000 |
1 500 000 000 |
||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
||||
Expertise, information géographique et météorologie |
||||
Prévention des risques dont titre 2 |
||||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
1 500 000 000 |
1 500 000 000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
||||
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
1 500 000 000 |
1 500 000 000 |
1 500 000 000 |
1 500 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Roland Courteau.
M. Roland Courteau. Le groupe socialiste et républicain considère que la fiscalité écologique ne doit pas être socialement punitive et que les efforts en faveur de la transition écologique doivent être équitablement répartis.
Il faut notamment veiller à accompagner les populations les plus fragiles, celles qui sont en situation de précarité énergétique ou risquent d’y basculer du fait de l’accroissement du poids des dépenses énergétiques contraintes, comme le chauffage ou les carburants. La fiscalité écologique ne peut donc être pensée indépendamment d’importantes mesures d’accompagnement pour ces populations.
Or, comme le souligne dans son dernier rapport annuel le médiateur national de l’énergie, près de 6 millions de personnes ont des difficultés à payer leurs factures d’électricité, de gaz ou de fioul, et 7,4 millions de personnes vivent dans des « passoires énergétiques ». Il souligne encore qu’en 2017 un tiers des ménages ont réduit leur consommation de chauffage pour ne pas payer une facture trop importante.
Les ménages en précarité consacrent, toujours selon le rapport du médiateur national de l’énergie, en moyenne 1 925 euros par an en énergie, contre 1 584 euros par an pour la moyenne nationale.
Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques, l’OFCE, la fiscalité carbone est quatre fois plus importante pour les 10 % des ménages les plus précaires que pour les ménages les plus aisés, soit respectivement 1,8 % et 0,4 % de leur revenu.
Or force est de souligner que le montant du chèque énergie, de l’ordre de 150 euros en moyenne par an, est complètement déconnecté de la trajectoire carbone rehaussée par ce gouvernement.
Le Gouvernement a proposé dans le projet de loi de finances pour 2019 d’augmenter la valeur du chèque énergie de 50 euros. Selon nous, cette augmentation est largement insuffisante face au risque d’une augmentation massive de la précarité énergétique dans le contexte actuel. Les populations fragiles sont les premières victimes de l’alourdissement des dépenses énergétiques contraintes, liées à l’augmentation de la fiscalité carbone, sur fond, qui plus est, d’augmentation des prix du pétrole.
Pour toutes ces raisons, les auteurs de l’amendement souhaitent revaloriser le montant moyen du chèque énergie à 600 euros, afin que ce chèque puisse non seulement permettre aux ménages de vivre dignement sans renoncer, par exemple, à se chauffer, mais également permettre, le cas échéant, de répondre aux enjeux de la transition énergétique.
La possibilité de cumuler sur trois années le montant du chèque énergie, soit une valeur moyenne cumulée de 1 800 euros, rendrait enfin possible son utilisation pour des travaux d’efficacité énergétique du logement.
M. le président. L’amendement n° II-22 rectifié, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
||||
Expertise, information géographique et météorologie |
||||
Prévention des risques dont titre 2 |
||||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
62 000 000 |
62 000 000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
62 000 000 |
62 000 000 |
||
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
62 000 000 |
62 000 000 |
62 000 000 |
62 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Dans ses objectifs initiaux, le chèque énergie devait non seulement permettre de payer les factures, mais aussi aider à financer des travaux de rénovation énergétique.
En réalité, le montant du chèque, même cumulé sur trois ans, est bien trop faible comparé au coût des travaux pour déclencher, à lui seul, une opération de rénovation. Les chiffres l’ont d’ailleurs prouvé : lors de l’expérimentation, à peine quelques centaines de chèques, au mieux, ont servi à financer des travaux. Depuis sa généralisation à l’ensemble du territoire, ce sont vraisemblablement quelques milliers de chèques au plus qui sont concernés.
Si l’on veut inciter véritablement les ménages à préférer payer des travaux plutôt que des factures et les aider à sortir de la spirale de la précarité énergétique, il faut renforcer le signal public, et donc moduler le chèque en fonction de son utilisation.
La commission des affaires économiques propose donc de doubler le montant du chèque lorsqu’il sert à financer des travaux : cumulé sur trois ans, ce seraient ainsi, en moyenne, 1 200 euros qui pourraient venir en déduction du coût des travaux, en complément d’autres aides, notamment celles de l’ANAH.
L’évaluation de la dépense publique correspondante est difficile à faire, mais l’on peut penser que même avec l’extension annoncée à 2 millions de ménages supplémentaires, les 62 millions d’euros proposés ici devraient suffire largement. Sans ce « bonus » pour travaux, on continuera d’entretenir la précarité énergétique à coups de petites déductions sur la facture, plutôt que de traiter le mal à la racine.
Ou alors on acte le fait que le chèque énergie ne sert qu’à payer des factures, mais dans ce cas on aura mis en place un système bien complexe pour faire, en moins bien, ce que faisaient déjà les tarifs sociaux !
Cet amendement vise donc à ajuster le chèque énergie pour lui permettre d’atteindre l’un des objectifs qui lui avaient été fixés.
M. le président. L’amendement n° II–120, présenté par MM. J. Bigot, Bérit-Débat et Kanner, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville, Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
||||
Expertise, information géographique et météorologie |
||||
Prévention des risques dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
6 000 000 |
6 000 000 |
||
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
6 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Joël Bigot.
M. Joël Bigot. Cet amendement vise à supprimer la baisse de la subvention pour charges de service public versée à l’ADEME, soit 6 millions d’euros en 2019 par rapport à 2018.
L’ADEME joue aujourd’hui un rôle fondamental en matière de transition écologique et climatique, et le champ de ses missions est de plus en plus élargi. Dans ce cadre, il semble donc anormal, particulièrement à l’heure où cette transition apparaît comme de plus en plus indispensable et urgente, que ses moyens soient diminués même de façon réduite, la baisse étant de 1 %.
Afin d’être recevable, cet amendement prévoit de prélever ce montant au sein du programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durable » afin de l’orienter vers l’action n° 12, ADEME, du programme 181 « Prévention des risques ».
M. le président. L’amendement n° II–169 rectifié ter, présenté par Mme M. Filleul, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville, M. Madrelle, Mme Tocqueville, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
||||
Expertise, information géographique et météorologie |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Prévention des risques dont titre 2 |
||||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
5 000 000 |
5 000 000 |
||
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
5 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. Cet amendement vise à augmenter de 5 millions d’euros les autorisations d’engagement et les crédits de paiement alloués aux dépenses de fonctionnement de l’action 10, Prévention des risques naturels et hydrauliques, du programme 181 en direction de Météo France. Face à la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes qui frappent le territoire français, le rôle de Météo France est d’autant plus décisif en matière de sécurité et d’anticipation.
Les récentes inondations dans l’Aude ont démontré l’importance de la prévision météorologique et d’une vraie politique de planification. Or le projet de loi de finances pour 2019 prévoit pour Météo France une baisse de 5 millions d’euros de sa subvention pour charges de service public et une suppression de près de 90 équivalents temps plein travaillé par an jusqu’en 2022.
Établissement public, Météo France fournit des prévisions, des données climatiques, des outils d’aide à la décision. Ces informations permettent à de nombreux acteurs d’agir en conséquence dans le domaine des transports, de l’agriculture, du tourisme, du bâtiment ou de l’énergie. Elles permettent surtout de préserver des vies humaines, de réduire les difficultés des secours lors de la catastrophe et le coût des dommages aux biens et activités économiques.
M. le président. L’amendement n° II–118, présenté par Mme Préville, MM. Bérit-Débat, Kanner et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
||||
Expertise, information géographique et météorologie |
4 600 000 |
4 600 000 |
||
Prévention des risques dont titre 2 |
||||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
||||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
4 600 000 |
4 600 000 |
||
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
4 600 000 |
4 600 000 |
4 600 000 |
4 600 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Cet amendement vise à supprimer la baisse de la subvention pour charges de service public versée au centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, qui s’élève à 4,6 millions d’euros en 2019.
Si cette baisse était maintenue et votée, cet établissement enregistrerait une diminution de ses crédits de 11,6 millions d’euros en deux ans, soit 5,5 %. Je rappelle qu’à sa création, en 2014, l’établissement était doté d’un budget de 250 millions d’euros. Il s’établira donc à 201,4 millions d’euros en 2019, soit une baisse de 20 % en cinq ans.
Pourtant, cet établissement joue un rôle important dans l’élaboration et la mise en œuvre de nos politiques publiques. Il accompagne nos collectivités territoriales qui peuvent bénéficier de ses expertises et de son ingénierie, notamment dans le domaine de l’aménagement du territoire, des transports, de l’environnement ou encore de l’habitat. Ses missions, en appui aux services de l’État et des collectivités, sont essentielles dans une logique d’ancrage territorial.
Le CEREMA est aussi traversé depuis plusieurs années par une crise, qui a abouti à la démission avec fracas en 2017 de son président et de son directeur général.
Dans ce contexte difficile, le groupe socialiste et républicain estime qu’il n’apparaît pas du tout opportun de grever encore le budget de cet établissement.
M. le président. L’amendement n° II–299 rectifié, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Accompagnement de l’opération de conversion du réseau de gaz à bas pouvoir calorifique
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
||||
Affaires maritimes |
||||
Paysages, eau et biodiversité |
||||
Expertise, information géographique et météorologie |
||||
Prévention des risques dont titre 2 |
||||
Énergie, climat et après-mines |
||||
Service public de l’énergie |
||||
Accompagnement de l’opération de conversion du réseau de gaz à bas pouvoir calorifique |
2 400 000 |
2 400 000 |
||
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
2 400 000 |
2 400 000 |
||
Économie sociale et solidaire |
||||
TOTAL |
2 400 000 |
2 400 000 |
2 400 000 |
2 400 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Dans quelques semaines, une opération de changement du gaz distribué dans le nord de la France va commencer. Elle concernera 1,3 million de clients, soit 10 % de la consommation française. Cela tient à l’arrêt d’un gisement de gaz aux Pays-Bas qui desservait toute cette zone. Or il se trouve que certains appareils ou équipements, à commencer par des chaudières, ne seront pas compatibles avec ce nouveau gaz ; il faudra donc les remplacer, sous peine de coupure de l’alimentation pour raisons de sécurité.
Pourtant, et bien que le Sénat alerte depuis février 2017 sur la nécessité d’aider les consommateurs concernés, qui ne sont pour rien dans ce changement, aucun dispositif n’a été mis en place, à ce jour, par le Gouvernement.
Madame la ministre, nous savons que le Gouvernement travaille sur le sujet, mais nous ne voyons toujours rien venir. Il est question de créer un « chèque conversion », qui serait financé par le tarif d’utilisation du réseau et non par le budget de l’État. L’aide serait identique pour tous les consommateurs concernés, quelles que soient leurs ressources, avec pour objectif un reste à charge de zéro en cas de remplacement par une chaudière à gaz performante.
Cette solution aurait certes le mérite de régler le problème pour tous les clients concernés, mais elle ne s’est toujours pas concrétisée. En attendant, il nous faut agir tout de suite pour l’année 2019, qui débutera dans quelques semaines. Sans cela, des clients recevront très prochainement un courrier leur demandant de changer leur appareil sous peine de coupure, mais sans qu’aucun accompagnement financier leur soit proposé.
Madame la ministre, je sais que Gaz Réseau Distribution France, GRDF, vous a encore alerté, il y a quelques jours, sur l’urgence et sur la sensibilité de la situation ; nous ne pouvons plus reculer. En attendant la mise en place du « chèque conversion », la commission des affaires économiques propose de voter des crédits afin de financer les premières aides.
J’invite chacun d’entre nous à bien mesurer la situation : dans très peu de temps, des consommateurs risquent d’être privés de gaz. Nous avons toutes les données du problème ; il est temps d’agir ! C’est pourquoi je présente cet amendement, au nom de la commission des affaires économiques.
M. le président. L’amendement n° II–401, présenté par Mmes S. Robert et Préville, MM. J. Bigot et Tissot, Mme Taillé-Polian, MM. Kanner et Bérit-Débat, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
2 000 000 |
2 000 000 |
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Économie sociale et solidaire |
2 000 000 |
2 000 000 |
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TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte.
M. Jean-Michel Houllegatte. Le verdissement de la fiscalité ne doit en rien laisser penser que ce sont les gros contribuables, au bout du compte, qui se mettent au « vert ». D’où la nécessité d’encourager et d’accompagner toutes les initiatives citoyennes. Or, parmi ces initiatives, beaucoup sont menées par l’économie sociale et solidaire, qui met en œuvre à travers de nombreuses microstructures maintes innovations non technologiques.
Cet amendement vise à transférer 2 millions d’euros au profit du nouveau programme « Économie sociale et solidaire ». Cette augmentation a pour objet de rétablir les crédits alloués par l’État aux dispositifs locaux d’accompagnement, les DLA, au niveau du montant qui figurait au sein de la loi de finances pour 2017, soit 10,4 millions d’euros.
L’année dernière, dans le cadre du débat budgétaire, le Gouvernement s’était engagé à ce que les moyens alloués à ces engagements soient maintenus en exécution. Or ces engagements n’ont pas été suivis d’effets.
Pourtant, les dispositifs locaux d’accompagnement constituent un soutien essentiel pour les structures de l’économie sociale et solidaire, qui sont ancrées dans les territoires, notamment dans la sphère culturelle. Ces dispositifs ont vocation à accompagner les acteurs de l’économie sociale et solidaire, en particulier les associations, dans leurs démarches de création, de consolidation et de développement de leur activité. Avec plus de 95 % des structures accompagnées satisfaites, les DLA ont largement montré leur efficacité.
Afin de ne créer aucune charge supplémentaire, la hausse des crédits dédiés au programme « Économie sociale et solidaire » est compensée par une baisse équivalente des crédits de l’action n° 03, Politique et programmation de l’immobilier et des moyens de fonctionnement, du programme 217 portant sur la conduite et le pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° II–216 rectifié ter, II–22 rectifié et II–120 ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Le fil conducteur de nos débats de la mi-journée sera assez simple, puisque j’ai annoncé que nous rejetterions les crédits de la mission. Cela ne nous empêche toutefois pas de donner l’avis de la commission sur les amendements.
Je note que les auteurs de ces amendements font souvent appel à la mobilisation de crédits supplémentaires. Or, faute de ces crédits, les uns et les autres jouent en quelque sorte au bonneteau. Ce n’est certes pas une solution, mais cela rejoint la préoccupation que de nombreux orateurs ont exprimée ce matin, en déplorant que le budget consacré aux enjeux écologiques soit très insuffisant.
Le premier de cette série d’amendements en est un bon exemple. Je partage la volonté, manifestée au travers de cet amendement n° II–216 rectifié ter, d’augmenter le montant du chèque énergie. Mais faire passer celui-ci de 150 euros à non pas 200, mais 600 euros, cela revient à prendre 1,5 milliard d’euros dans d’autres poches. Au vu du principe de rigueur qu’observe la commission des finances au cours de ses travaux, cette solution n’est pas acceptable. Ce n’est pas le fond de l’amendement qui est en cause, mais la mécanique budgétaire.
Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
L’avis sera le même sur l’amendement n° II–22 rectifié de Daniel Gremillet, qui a d’ailleurs souligné à juste titre les insuffisances du chèque énergie au regard de son origine et de ses objectifs.
Ce dispositif doit en effet, me semble-t-il, si l’on ne veut pas qu’il devienne un tonneau des Danaïdes, permettre de faire des travaux – or c’est insuffisamment le cas, on l’a souligné – pour mettre fin aux « passoires énergétiques ». L’aide qui est donnée ne doit donc pas l’être de façon systématique, puisque l’objectif est son extinction.
À défaut d’un retrait de cet amendement, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° II–120 de Joël Bigot concerne le budget de l’ADEME. J’ai eu l’occasion de le dire dans mon propos introductif, on confie des missions supplémentaires à cette agence tout en réduisant son budget, et donc l’élastique finit par casser !
La commission des finances ne pouvant, à elle seule, remédier à ce problème, je demande, là encore, le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur les amendements nos II–169 rectifié ter et II–118 ?
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. L’amendement n° II–169 rectifié ter vise à augmenter de 5 millions d’euros les crédits de Météo France.
Au vu du montant de cette baisse, je peux comprendre l’intention des auteurs de l’amendement, dont l’objectif est de rétablir la stabilité financière. Cependant, comme je l’ai dit précédemment, mon analyse est la suivante : pour une fois – si j’ose dire –, Météo France dispose d’une trajectoire claire sur cinq ans ; or c’était ce qui lui faisait défaut jusqu’à présent.
Auparavant, on faisait un exercice quelque peu scabreux consistant à fixer au conseil d’administration une perspective, mais ce n’était qu’ensuite que l’on regardait ce qui figurait dans le projet de loi de finances, puis ce qui avait été voté définitivement dans la loi de finances initiale, avant que n’interviennent un gel et un surgel.
En l’occurrence, la perspective est raide, mais elle permet à l’établissement de s’adapter : on lui laisse la capacité de gérer cette difficulté, qui est réelle. Tout en déplorant la baisse des crédits, je tiens donc à saluer le fait que le Gouvernement ait enfin donné une perspective claire à cet établissement.
Je rappelle aussi que Mme la ministre s’est engagée, même si c’est à demi, sur la question de l’investissement, qui me paraît être centrale. On peut discuter du fonctionnement, mais il s’agit désormais de faire en sorte que le supercalculateur voie le jour.
Je suis dans la même logique que Jean-François Husson : puisque nous allons proposer de rejeter globalement les crédits de la mission, nous ne souhaitons pas donner un avis favorable sur ces amendements.
J’ai eu l’occasion de me rendre au siège de Météo France et de rencontrer les équipes. Elles sont en effet mobilisées, car elles comprennent les objectifs difficiles qui leur sont assignés, ainsi que la volonté de renforcer la Météopole de Toulouse, et la logique de centralisation sur cet établissement. Il s’agit, grâce aux investissements et aux progrès informatiques, de modéliser et de remplir leur mission différemment.
Voilà pourquoi je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Concernant l’amendement n° II-118, relatif au CEREMA, ses auteurs ont rappelé à juste titre l’importance de cet établissement et des missions d’expertise qu’il réalise, et ce de plus en plus en direction des collectivités.
Une transition est en cours au sein du CEREMA. L’année dernière, mon inquiétude était très forte, car j’avais rencontré son directeur général trois jours avant qu’il démissionne, ce qui n’était pas simple. La perspective actuelle me paraît meilleure pour le Centre : la crise de gouvernance est en partie derrière nous, la crise au sein de la direction étant jugulée. Un important travail social d’écoute des différentes entités locales et de remobilisation a lieu.
Je demande donc, là encore, le retrait de l’amendement, car je pense qu’il faut permettre au CEREMA de continuer le travail qui a été engagé sur ce point, et aussi de travailler avec la future Agence nationale de la cohésion des territoires.
Nous aurions évidemment pu sacrifier une partie de la mission pour satisfaire le CEREMA, mais, comme l’a dit Jean-François Husson – je reprends volontiers son mot à mon compte –, nous ne sommes pas là pour jouer au bonneteau.
À défaut de retrait, l’avis sera défavorable.
M. le président. Dans le bal des rapporteurs (Sourires.), qui souhaite prendre la parole ?
Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial. Je souhaite revenir sur l’amendement n° II–216 rectifié ter, qui vise à augmenter le chèque énergie en prélevant 1,5 milliard d’euros sur les crédits de transport.
Nous connaissons tous la règle de l’article 40 de la Constitution, il est donc difficile d’accepter cet amendement, dont je propose également le retrait.
Toutefois, je soutiens le message porté dans cet amendement comme dans celui de notre collègue Gremillet. Il conviendrait en effet, de renforcer le dispositif du chèque énergie, ou « chèque vert », et de cibler les personnes qui sont très dépendantes de l’énergie tant pour le transport que pour le chauffage.
Cela pose de nouveau, madame la ministre, la question des mesures de compensation, qui sont sous-jacentes dans plusieurs amendements, et d’accompagnement de la transition écologique, que nous appelons tous de nos vœux. Nous tenons à vous dire que nous sommes à vos côtés pour négocier, avec les services du budget, davantage de moyens pour ces mesures, indispensables pour rendre acceptable cette transition écologique.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° II–299 rectifié ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Je partage, moi aussi, le message porté par Daniel Gremillet.
Vous allez sans doute, madame la ministre, nous apporter des éléments de réponse. En effet, un amendement similaire portant sur le même sujet avait été présenté l’année dernière, et il nous avait alors été répondu qu’il n’y avait pas de difficulté et qu’une solution serait apportée.
Même si cela arrive à tout le monde de faire cela, vous comprendrez qu’il est quelque peu désagréable de demander des éléments de réponse et de ne pas les obtenir avant de revenir en séance. Comme ici, au Sénat, on est bien élevé, on ne proteste pas trop vigoureusement !
Or, à force de ne pas protester, ce sont les personnes touchées par le dispositif qui finissent par se manifester. Là encore, il y a une véritable urgence. Néanmoins, je pense que vous trouverez une solution.
Cela étant dit, pour les mêmes raisons que celles que j’ai évoquées précédemment, je demande le retrait de l’amendement n° II–299 rectifié.
M. le président. Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° II–401 ?
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Cet amendement vise à attribuer 2 millions d’euros supplémentaires au programme « Économie sociale et solidaire ». Cela pose une petite difficulté, mais vous me direz que c’est le propre de la loi organique relative aux lois de finances, la LOLF : cette mesure reviendrait, pour rétablir l’équilibre, à enlever 2 millions d’euros au programme « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables ».
C’est toute la difficulté : nous devons faire des choix qui sont des crève-cœurs. Mais je ne peux que demander le retrait ou, à défaut, émettre un avis défavorable, sur un amendement qui vise à enlever un bout des crédits de la mission pour les redonner à un autre bout.
Les DLA, qui ont été créés en 2002 par l’État et la Caisse des dépôts et consignations, et qui sont également soutenus par le Fonds social européen, le FSE, et par le mouvement associatif, effectuent, on le voit bien, un travail utile en faveur de l’emploi dans les structures de l’économie sociale, ce qui est leur mission. Toutefois, le programme « Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables » est tout aussi important.
Pour suivre la logique définie par la commission, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Élisabeth Borne, ministre. Les amendements nos II–216 rectifié ter et II–22 rectifié visent à renforcer le dispositif du chèque énergie.
Outre les difficultés que cela poserait pour les programmes dont on serait obligé de réduire les crédits en vue de gager des dépenses supplémentaires, je rappelle que le chèque énergie n’est pas le seul dispositif permettant d’accompagner la rénovation thermique des bâtiments, loin de là.
Le chèque énergie vise d’abord à aider à payer les factures et, le cas échéant, à réaliser de petits investissements. Vous connaissez tous les autres dispositifs qui existent : le crédit d’impôt pour la transition énergétique, le CITE, les aides de l’ANAH, le prêt à taux zéro, la TVA à 5,5 %. Il ne faut donc pas vouloir faire peser sur le chèque énergie le travail réparti entre tous les dispositifs d’accompagnement de la rénovation énergétique des bâtiments.
Non, monsieur Gremillet, ce que nous proposons n’est pas moins bien que les tarifs sociaux qui existaient auparavant. C’est largement mieux ! En effet, je rappelle que les foyers qui étaient équipés de chaudières au fioul, à gaz propane ou à bois, ne bénéficiaient pas des précédents dispositifs, alors que le chèque énergie permet de vous accompagner, quelle que soit l’énergie utilisée pour vous chauffer.
L’avis est donc défavorable sur ces deux amendements.
J’en viens à l’amendement n° II–120.
La situation de l’ANAH s’est largement améliorée depuis que les crédits ont été rebudgétisés en 2018. La dotation prévue dans le projet de loi de finances pour 2019 représente encore une hausse de 30 % par rapport aux années précédentes. Par ailleurs, l’ADEME dispose d’un fonds de roulement, qu’elle peut mobiliser, ce qui lui permettra de présenter prochainement un budget avec une augmentation de 62 millions d’euros des crédits pour le fonds chaleur, et des crédits d’intervention d’un montant au global de 73 millions d’euros.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut l’avis sera défavorable.
Pour ce qui concerne l’amendement n° II–169 rectifié ter, comme l’a expliqué M. Capo-Canellas, les moyens nécessaires pour le programme de supercalculateur sont effectivement prévus dans le cadre du budget de Météo France.
Cet amendement, outre le fait qu’il viendrait réduire les moyens de fonctionnement du ministère de la transition écologique et solidaire, n’est pas nécessaire.
Je vous en propose donc également le retrait ; sinon, l’avis sera défavorable.
Le raisonnement est le même s’agissant des moyens du CEREMA. Nous demandons en effet – je crois important de partager cette volonté avec vous – à l’ensemble des établissements, à nos services et à nos opérateurs des efforts d’efficacité et de performance.
On ne peut pas, à la fois, vouloir baisser les prélèvements obligatoires et ne pas s’assurer que les services participent aussi à l’amélioration globale de la performance du service public.
L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° II–118.
Pour ce qui concerne, l’amendement n° II–22 rectifié, je vous confirme, monsieur Gremillet, que nous prenons pleinement en compte le problème que vous soulevez et je m’engage, au nom du Gouvernement, à vous présenter le dispositif dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances pour 2019.
L’amendement tel qu’il est rédigé ne permet pas de garantir que le reste à charge sera limité pour tous les consommateurs contraints de remplacer un appareil à gaz, tout particulièrement ceux qui sont en situation de précarité. Le dispositif sur lequel le Gouvernement a travaillé et qui sera présenté, je le répète, avant la fin de l’examen du projet de loi de finances pour 2019 est une solution beaucoup plus simple.
Alors que la solution préconisée dans l’amendement obligerait à compléter le système par toutes sortes de dispositifs complémentaires, nous proposons un titre spécial de paiement couvrant le coût de remplacement de l’appareil au gaz, ce qui permet d’éviter un reste à charge pour le consommateur ainsi qu’une avance de frais. Cela laissera également aux ménages la possibilité de choisir l’énergie de leur futur système de chauffage. Ce dispositif permettra d’accompagner les changements d’appareils de chauffage et de production d’eau chaude sanitaire.
Je demande donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
Pour ce qui concerne l’amendement n° II–401, je souhaite tout d’abord souligner que le budget consacré à l’économie sociale et solidaire a fortement augmenté depuis qu’il est rattaché au ministère de la transition écologique et solidaire. La dotation attribuée aux DLA a été dimensionnée en fonction des besoins connus. Tous les projets seront financés et, le cas échéant, on pourra en 2019 abonder cette action importante si cela s’avérait nécessaire.
Je propose donc le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Je souhaite m’expliquer sur les deux amendements présentés au nom de la commission des affaires économiques.
Je maintiens le premier, l’amendement n° II–22 rectifié, car il a été voté à l’unanimité des suffrages exprimés en commission. C’est le travail de toute la commission !
M. Roland Courteau. C’est vrai !
M. Daniel Gremillet. Il ne s’agit pas, madame la ministre, monsieur le rapporteur spécial de la commission des finances, d’une fuite en avant ! Le doublement proposé, je l’ai dit, correspond à une mesure bien maîtrisée par rapport à l’actuelle enveloppe budgétaire. Surtout, il permettra de prendre en compte les situations des plus précaires. Il faut ouvrir les yeux : on ne peut pas siéger ici sans regarder ce qui se passe sur le terrain !
Par ailleurs, cette mesure permettra de faire des investissements qui apporteront une réponse pour lutter contre la précarité énergétique et permettront à nos concitoyens d’effectuer des travaux en ce sens. Sur ce point, madame la ministre, nous pouvons nous rejoindre.
Je maintiens également l’amendement n° II–299 rectifié.
J’entends votre réponse, madame la ministre, mais vous conviendrez – je vous le dis avec respect – que si nous n’avions pas posé cette question, le point n’aurait même pas été évoqué. Aucune mesure n’est lisible par les 1,3 million de personnes qui sont concernées par cette rupture brutale ! Elle entrera en vigueur au début de l’année 2019, dans quelques semaines, et il n’y a aucune réponse !
Là encore, cet amendement, présenté au nom de la commission des affaires économiques, a été voté à l’unanimité des suffrages exprimés. Je vais donc le maintenir.
Vous me dites, madame la ministre, que mon amendement est moins intéressant que le vôtre. Mais, votre amendement, encore fallait-il en avoir connaissance ! Or, au jour d’aujourd’hui, aucun document ne permet aux personnes concernées d’avoir une certitude quelconque sur les mesures qui seront prises.
Nous étions prêts à travailler avec vous pour améliorer notre proposition. Vous devez accepter de reconnaître que le travail du Sénat permet d’identifier un problème, d’y apporter des réponses, et surtout de faire figurer celles-ci dans le projet de budget pour 2019.
Je le redis, je maintiens les deux amendements. (MM. Arnaud Bazin et Jean-Raymond Hugonet, ainsi que Mme Sophie Joissains applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. En réponse à l’amendement n° II–216 rectifié ter présenté par Roland Courteau, vous avez dit, madame la ministre, qu’il convenait d’augmenter la fiscalité de ceux qui polluent.
Je partage cet argument : il convient de rendre plus cher ce qui pollue par rapport à ce qui est propre. Mais, dans le même temps, il est indispensable d’apporter un soutien important aux plus fragiles ; sinon, on les assassine !
Mon collègue a précisé que, en moyenne, les dépenses des ménages précaires pour l’énergie étaient plus élevées que celles de la moyenne des ménages français. Je reprends son chiffre : 1 925 euros en moyenne pour les personnes dont les revenus sont inférieurs à 800 euros par mois, quand un ménage français moyen dépense 1 584 euros pour ce poste.
Ces gens ne parviennent pas à boucler le mois ! Il convient donc de les aider de manière substantielle.
Ce chiffre de 600 euros nous a été communiqué lors d’une audition par la Fondation pour la nature et l’homme, la FNH. Ses représentants nous ont expliqué que, si l’on voulait compenser l’impact réel de l’augmentation du coût de l’énergie pour les ménages les plus fragiles, il faudrait leur verser précisément cette somme. Ce n’est pas un chiffre obtenu d’un claquement de doigt, dans la seule intention de proposer un montant trois fois plus élevé que celui qui a été prévu par le Gouvernement ! C’est réfléchi…
Enfin, puisque nous sommes « coincés » par le fameux article 40, on laisse entendre que nous voulons diminuer d’autres crédits. Or nous ne sommes pas inconséquents ! Mais nous n’avons pas d’autre choix, si nous voulons exprimer une idée, que de trouver des économies, même dans des budgets qui nous sont chers par ailleurs.
Le montant de 1,5 milliard d’euros qu’exigerait cette mesure pourrait sans doute être optimisé via un dispositif dégressif. Quoi qu’il en soit, nous maintenons qu’il faut accompagner les plus fragiles.
Il y a tout de même de l’argent ! Vous avez dit, madame la ministre, qu’il fallait augmenter la fiscalité sur ce qui polluait, et la baisser dans d’autres domaines. Or nous n’oublions pas vos choix fiscaux de début de mandat, qui ont permis d’accorder à certains Français des baisses d’impôt très importantes !
Cet amendement est donc maintenu.
M. le président. La parole est à Mme Angèle Préville, pour explication de vote.
Mme Angèle Préville. La précarité énergétique est une dure réalité. Les inégalités continuant de se creuser inexorablement, il est absolument nécessaire de renforcer la compensation financière, faute de mieux, dont bénéficient les populations les plus pauvres.
Je rappelle que ce sujet concerne, notamment, environ 900 000 enfants. Dans ces familles, il n’est pas rare que l’on se chauffe mal, ou pas du tout, et qu’il n’y ait pas certains jours, en plein hiver, d’eau chaude à la maison.
Est-ce tolérable ? Ne sommes-nous pas un pays développé ? Nous nous devons d’accompagner ces personnes, et de manière importante, pour ne pas dire décente, afin que tous les Français puissent vivre dignement !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Nous pouvons soutenir l’ensemble de ces amendements, notamment ceux qui ont trait au chèque énergie, lesquels visent à accompagner et à aider les personnes les plus vulnérables dans un esprit d’équité. Il en est de même pour l’amendement relatif au CEREMA, sujet dont j’ai parlé dans mon intervention. Ces amendements vont dans le bon sens.
Bien sûr, nous sommes bloqués par l’article 40, et il faut donc bien prendre de l’argent d’un côté pour financer ces propositions, mais ce n’est pas forcément satisfaisant. Il n’existe aucun budget que nous avons envie de priver d’argent !
Il me semble tout de même intéressant et important de pointer ces priorités.
M. le président. La parole est à M. Roland Courteau, pour explication de vote.
M. Roland Courteau. Tout d’abord, je veux dire que tous les amendements présentés par le groupe socialiste seront maintenus et soumis au vote.
S’agissant de l’amendement n° II–216 rectifié ter, à la suite des propos du Président de la République sur la revalorisation du chèque énergie, nous avons tendu la perche au Gouvernement. Nous avons même, un temps, espéré qu’il lèverait le gage financier de cet amendement pour permettre une augmentation satisfaisante du montant du chèque énergie, sans en faire supporter l’effort par les programmes mentionnés dans ledit amendement.
Face à l’urgence écologique et sociale, les recettes supplémentaires engrangées par l’État au titre de la fiscalité écologique doivent servir à des politiques de redistribution, tout en favorisant la transition énergétique, surtout en faveur des plus démunis.
M. le président. La parole est à M. Jean-Michel Houllegatte, pour explication de vote.
M. Jean-Michel Houllegatte. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, on parle de transition écologique et solidaire. Or, dans l’esprit de la LOLF, il convient de considérer l’efficience des moyens que nous mettons en œuvre et quels sont les indicateurs de performance.
Lacan disait qu’il y a le réel, le symbolique et l’imaginaire. Et le réel, c’est quand on se cogne la tête ! J’ai l’impression, en ce lendemain de 1er décembre, que l’on est en train de se cogner la tête contre les murs…
Si l’on ne propose pas une mesure forte, symbolique, qui prenne véritablement en compte la situation dans laquelle nous sommes aujourd’hui, nous risquons, hélas, de continuer à être dans l’incompréhension.
Or, dès lors qu’il y a de l’incompréhension, on ouvre un interstice, pour ne pas dire un fossé, où la violence peut s’installer. Faisons donc preuve, aujourd’hui, de sérénité ! (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Antoine Lefèvre applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Connaissez-vous, madame la ministre, les Shadoks ? Comme eux, vous taxez, taxez, taxez, puis vous compensez, compensez, compensez. (Mme la ministre fait un signe de dénégation.)
Ce qui se passe dans notre pays, c’est une totale incompréhension du Gouvernement face à la colère des Français. Vous réagissez souvent dans l’improvisation, en urgence… Nous sommes devant une situation intolérable !
Lorsque M. Courteau présente cet amendement qui, parmi, les amendements déposés par le groupe socialiste, est essentiel, il vous demande simplement de nous donner les moyens de répondre à cette colère, notamment en levant le gage. Or vous avez décidé, ce qui est bien sûr la consigne, de ne pas répondre à notre attente, y compris en demandant le retrait de notre amendement.
M. Houllegatte vient de dire le malaise que connaît le pays, et surtout le fossé qui est en train de se créer entre le peuple et les élites, diront certains. Nous pensons, pour notre part, que le peuple doit croire dans ses représentants, ce qui n’est plus le cas.
Face à cette situation, nos amendements ont une cohérence : ils tendent à renouer le dialogue avec nos concitoyens. En n’en voulant pas, vous prenez une énorme responsabilité devant les représentants de la Nation, bien sûr, mais aussi devant nos concitoyens qui, aujourd’hui, ne demandent qu’une seule chose : non pas obtenir des compensations à quelque hauteur que ce soit – nous pensons cependant qu’il faut les augmenter –, mais pouvoir vivre correctement de leur travail…
M. Roland Courteau. Très bien !
M. Patrick Kanner. … et de leur investissement sur le terrain. Voilà le message qui vous est envoyé et que vous n’arrivez manifestement pas à entendre ! (Applaudissements sur des travées du groupe socialiste et républicain. – M. Dominique de Legge et Mme Sophie Joissains applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. Ces amendements illustrent ce qui a été dit par les rapporteurs spéciaux et les rapporteurs pour avis : un certain nombre d’organismes manquent de moyens.
Ils visent, par exemple, à donner davantage de marge de manœuvre à l’ADEME, qui voit finalement ces crédits réduits pour permettre une augmentation du fonds chaleur – inférieure à ce qu’avait annoncé le Président de la République, mais augmentation tout de même –, que l’on finance en réduisant d’autres missions. Ainsi, dans mon département, l’agence locale de l’énergie et du climat va sans doute devoir fermer parce que l’ADEME ne peut plus subvenir à ses besoins…
Il a également été question des crédits de Météo France.
Le CEREMA, évoqué par Mme Préville, assure des missions d’expertise dont on aura besoin, notamment sur la question des ponts, dont vous avez parlé, madame la ministre, en faisant référence à la mission d’information que nous menons et pour laquelle nous nous rendrons dans quelques heures à Gênes.
Tous ces organismes ont des budgets très serrés !
Malheureusement, les rapporteurs spéciaux l’ont rappelé, la plupart de ces crédits supplémentaires ne pourraient être obtenus qu’en privant d’autres secteurs qui ont aussi besoin de moyens. Je pense notamment aux infrastructures ferroviaires : la priorité à la régénération n’autorise sans doute pas que l’on réduise leurs moyens.
Je m’abstiendrai sur ces amendements, sauf sur ceux de M. Gremillet, pour deux raisons.
Tout d’abord, la question de l’augmentation du fonds chaleur me paraît tout à fait essentielle, car un grand nombre de Français connaissent un problème de précarité énergétique, qui ne fait que s’aggraver. Là où l’on aurait dû observer au cours des dernières années une réduction de la précarité énergétique, on constate au contraire une aggravation de ce phénomène ! Donner plus de moyens pour lutter contre cette situation est donc une priorité.
En outre, M. Gremillet propose, au nom de la commission des affaires économiques, de le faire en redéployant des moyens de fonctionnement au sein du ministère de l’écologie. Je pense qu’il y a toujours dans les ministères, et encore aujourd’hui, des marges de manœuvre en termes de crédits de fonctionnement, contrairement à ce que je disais sur certaines agences.
Je voterai donc pour les deux amendements de la commission des affaires économiques et m’abstiendrai sur les autres.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Oui, il faut apaiser les tensions ! Oui, il faut écouter la colère des Français ! Mais, pour apaiser cette colère, il faut dire la vérité aux Français.
Il faut dire, ainsi, aux Français que le Gouvernement n’augmente pas les prélèvements sur les ménages.
En 2019 nous baissons de 4 milliards d’euros la taxe d’habitation…
M. Patrick Kanner. Et l’ISF, la flat tax, madame !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je vous parle de 2019, monsieur le président !
En 2019, nous baissons également de 4 milliards d’euros les charges qui pèsent sur le travail.
Oui, il y a une augmentation de fiscalité sur les carburants, que nous allons accompagner afin d’aider les personnes les plus fragiles. Mais la baisse globale pour les ménages atteint 6 milliards d’euros !
Oui, il faut tenir compte de la précarité énergétique, de la détresse de nos concitoyens dans des territoires abandonnés depuis des décennies. Mais quelle politique a été menée dans le passé ? La politique du tout-TGV, qui a livré à l’abandon des pans entiers de notre territoire et entraîné la dégradation des réseaux !
Qu’avez-vous fait, lorsque vous étiez aux responsabilités, et qu’est-ce qui a été fait avant vous, pour remettre en état les réseaux ferroviaires et routiers dans ces territoires ?
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. La France est à feu et à sang, et vous rejetez la faute sur les autres !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Qu’on fait vos prédécesseurs et vous-mêmes pour permettre à nos concitoyens, dans ces territoires, de disposer de solutions alternatives à la voiture individuelle ?
Nous avons mis en place des dispositifs, comme le chèque énergie en 2018 – nous l’augmentons en 2019 et nous l’élargissons à 2 millions de foyers supplémentaires – et comme la prime à la conversion.
Ces dispositifs ne répondent peut-être pas à toutes les difficultés, mais je pense qu’il faut dire la vérité aux Français sur ce qui est fait et, tous ensemble, les accompagner dans les territoires, afin de leur apporter les bonnes réponses. (Applaudissements sur les travées du groupe La République En Marche. – M. Jacques Mézard applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Je veux préciser deux éléments.
D’abord, je ne vais pas répéter mes explications relatives au chèque énergie. Néanmoins, j’étais comme vous, madame la ministre, mardi à l’Élysée à l’invitation du Président de la République : comme il l’a évoqué, à ceux qui parlent de la taxe carbone, on répond qu’il existe le chèque énergie. Or, pour résumer, il a dit qu’il ne comprenait pas lui-même le dispositif. (Mme la ministre s’étonne.) Vous pouvez reprendre ses propos !
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Je n’ai aucun souci de compréhension ! Mais quand le Président de la République lui-même, devant les Français – son intervention était télévisée –, exprime une forme d’incompréhension, comment voulez-vous, pour dire posément les choses, que nos concitoyens s’y retrouvent ?
Cela signifie que nous avons besoin d’un débat apaisé pour aider les Français à comprendre. Et, pour reprendre les propos du ministre redevenu sénateur, Jacques Mézard, il faut, pour pouvoir le faire, certaines conditions.
Il ne faut pas dire : « On ne change pas. » Or le Président de la République a redit : « On ne change pas. » Ce matin, le porte-parole du Gouvernement a répété : « On ne change pas de cap. » Si on ne change ni le cap ni la manière de travailler avec les Français, on peut s’attendre au pire ! Il y a vraiment urgence à agir, je le dis calmement une nouvelle fois.
Madame la ministre, je pensais que vous alliez répondre à la question de Daniel Gremillet sur les installations de gaz, car vous aviez indiqué qu’on l’évoquerait lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2019. Pouvez-vous lui fournir la réponse maintenant ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. Je lui répondrai, mais pas dans le présent débat. Pour autant, je m’engage à échanger, avant la fin de l’examen du projet de loi de finances, avec Daniel Gremillet sur la mise en place d’un dispositif, qui fera l’objet d’un amendement déposé par le Gouvernement.
Cela étant, lorsque le Président de la République se demande comment fonctionne le chèque énergie – vous imaginez bien qu’il le sait ! –, il pointe du doigt la complexité des dispositifs mis à la disposition des Français, ce qui doit collectivement nous conduire à nous interroger.
M. Antoine Lefèvre. C’est le problème !
Mme Élisabeth Borne, ministre. Cette réflexion, nous pouvons la mener tous ensemble, de manière apaisée, pour voir comment les dispositifs que nous proposons sont reçus par leurs destinataires et s’ils répondent concrètement aux difficultés que rencontrent nos concitoyens.
C’est le sens des débats dans les territoires, souhaités par le Président de la République, que nous allons lancer très prochainement : aller au plus près des citoyens pour partager leurs difficultés, que nous n’ignorons pas, et pour apporter des réponses efficaces, opérationnelles, concrètes, pratiques à tous les Français. (MM. Didier Rambaud et Jacques Mézard applaudissent.)
M. le président. La parole est à M. Dominique de Legge, pour explication de vote.
M. Dominique de Legge. Madame la ministre, il y a tout de même un petit problème… Vous prenez des décisions, vous constatez qu’elles sont difficiles à appliquer et vous dites : « Ce n’est pas grave, nous allons discuter et nous prendrons des mesures demain. » Cela ne peut pas fonctionner de la sorte !
Depuis le temps qu’on vous dit qu’il y a urgence à décider d’un moratoire, on pourrait peut-être se mettre autour de la table. Mais, pour ce faire, encore faudrait-il être assuré qu’à un moment donné, vous serez disposée à bouger… Or vous affirmez que vous ne bougerez pas, mais que vous êtes prête à discuter. Cela ne peut pas fonctionner ainsi !
Ne vous étonnez pas que les Français ne comprennent pas, dès lors que le Président de la République lui-même et qu’une majorité de parlementaires disent qu’ils ne comprennent pas…
À un moment, il faut accepter de reconnaître qu’on n’a pas toujours raison tout seul ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste et sur des travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-216 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. En conséquence, l’amendement n° II-120 n’a plus d’objet.
Je mets aux voix l’amendement n° II-169 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente-cinq.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures cinq, est reprise à quatorze heures trente-cinq, sous la présidence de M. Thani Mohamed Soilihi.)
PRÉSIDENCE DE M. Thani Mohamed Soilihi
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilités durables ».
L’amendement n° II-217 rectifié bis, présenté par MM. Montaugé, M. Bourquin et Cabanel, Mme Conconne, MM. Courteau, Daunis et Duran, Mme Guillemot, MM. Iacovelli, Tissot, Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mmes Préville, Tocqueville et Taillé-Polian, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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+ |
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Infrastructures et services de transports |
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500 000 000 |
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500 000 000 |
Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
500 000 000 |
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500 000 000 |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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TOTAL |
500 000 000 |
500 000 000 |
500 000 000 |
500 000 000 |
SOLDE |
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La parole est à M. Olivier Jacquin.
M. Olivier Jacquin. Il n’y a pas de transition énergétique sans les collectivités territoriales. Nous avions, déposé, à une étape précédente, un certain nombre d’amendements visant à doter spécifiquement les collectivités de quelques euros par habitant pour leur permettre de faire levier auprès de nos concitoyens sur tous les changements devant être apportés. Je précise, par ailleurs, que le premier signataire du présent amendement est Franck Montaugé.
Le dispositif TEPCV, ou territoires à énergie positive pour la croissance verte, avait suscité, en 2015 et 2016, un véritable engouement, pour ne pas dire un enthousiasme.
Forts du succès des précédents mécanismes TEPCV, nous proposons de mettre en place un dispositif de nouvelle génération, en élargissant le champ d’éligibilité des actions à celles qui présentent le meilleur effet de levier, en révisant les cibles de l’appel à projets, en créant davantage d’interaction entre les lauréats et en améliorant la cohérence de l’action de l’État.
Il s’agit d’accroître le niveau d’ambition du dispositif. On me répondra peut-être qu’actuellement sont prévus des contrats de transition écologique. Mais, franchement, ils ne sont pas du tout au niveau de ce qui était proposé auparavant.
Alors, comment finance-t-on les 500 millions d’euros nécessaires ? En raison de l’article 40 de la Constitution, nous sommes contraints, pour reprendre l’expression de M. le rapporteur spécial, de faire un jeu de bonneteau désagréable, en déshabillant quelques actions qui nous semblent pourtant essentielles. Mais il fallait que nous développions l’idée d’un accompagnement fort des territoires. (M. Guillaume Gontard applaudit.)
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Nous l’avons exprimé sur toutes les travées de cet hémicycle de façon unanime, il faut accompagner les territoires dans la transition énergétique.
Mon cher collègue, vous proposez, au nom de M. Montaugé, de relancer les TEPCV. Je veux rappeler que l’histoire s’était terminée assez douloureusement, puisque, lors du quinquennat précédent, il avait été difficile de les financer complètement.
Pour être à la fois constructif et sincère, je préfère, en ce qui me concerne, les contrats de transition écologique, parce que la contractualisation est préférable à l’appel à projets et que ces contrats doivent pouvoir être proposés à tous les territoires. Ce n’est pas encore le cas actuellement, je comprends bien qu’ils n’en sont qu’à leurs débuts. Il faudra être attentif à ce point.
Enfin, vous avez eu l’honnêteté de dire qu’on jouait en quelque sorte au bonneteau. Il est tout de même, me semble-t-il, assez compliqué, alors que, dans tous les territoires, on regrette de ne pas avoir assez de crédits pour l’entretien de nos routes et l’investissement, de prélever justement dans ces crédits.
Madame la secrétaire d’État, pour être clair – on le dit depuis ce matin, mais je pense qu’il est important que notre assemblée continue de le répéter –, l’enveloppe est beaucoup trop « étroite », et il manque des crédits dans le budget de votre ministère pour conduire des actions.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire. Le Gouvernement partage l’avis de la commission, pour les mêmes raisons.
Monsieur le sénateur Jacquin, je vous rejoins quand vous dites qu’il ne peut pas y avoir de transition écologique sans les territoires. C’est bien notre vision : accompagner cette transition écologique au plus près des territoires.
Quant à la question que vous posez précisément, l’appel à projets TEPCV n’est pas achevé. Les crédits sont encore en cours d’attribution ; d’ailleurs, comme vous le savez, nous avons prévu 60 millions d’euros supplémentaires pour accompagner cet appel à projets dans le projet de loi de finances rectificative de cette année.
Pour la suite, c’est bien la mobilisation de tous les crédits existants – ceux de la politique industrielle et ceux du ministère de la transition écologique et solidaire – que nous souhaitons mettre en place. Nous allons accompagner les territoires d’industrie avec un volet relatif à la transition écologique. Les 124 territoires d’industrie qui ont été définis recoupent d’ailleurs largement la carte des premiers contrats de transition écologique qui ont été demandés. Ces derniers, comme l’indiquait M. le rapporteur, sont l’occasion d’une véritable contractualisation entre l’État, les établissements publics du ministère et les collectivités territoriales.
Enfin, le gage, comme vous l’avez dit vous-même, est difficilement soutenable.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement est intéressant, bien qu’il faille toujours faire la même manipulation consistant à prendre l’argent quelque part pour financer le dispositif. Il permet de pointer du doigt les plus de 550 contrats qui ont été signés avec les territoires, dont les effets sur ces derniers ont été vraiment positifs.
Je sais que François de Rugy ne partageait pas cet avis, puisqu’il parlait d’effet d’aubaine plutôt que d’effet de levier. Je pense, au contraire, qu’il y avait un véritable effet de levier sur la plupart des territoires, avec des plateformes de transition énergétique, la mise en place de filières et le déclenchement d’une véritable dynamique.
Si ce dispositif n’est pas reconduit, il faut vraiment réfléchir à ce qui sera prévu par la suite et à la façon d’accompagner les territoires qui se sont engagés dans cette transition énergétique et se retrouvent aujourd’hui en quelque sorte au milieu du gué.
Je rappelle que les contrats de transition écologique ne prévoient pas de financement : il s’agit seulement d’un accompagnement de la part des services de l’État. Par ailleurs, depuis leur lancement, seuls au mieux 10 contrats ont été signés.
Il faut vraiment réfléchir à une véritable politique d’accompagnement des territoires. Je soutiens cet amendement, même si je comprends bien que le financement n’est pas forcément acceptable.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Comme nous sommes en pleine reprise postprandiale (Sourires.), je veux insister sur le fait que cet amendement vise à rappeler que nous avons besoin d’ambition pour nos territoires. Tel est le message que nous tentons d’envoyer.
Je vous remercie, monsieur Gontard, de votre argumentaire et d’avoir rappelé le nombre de contrats de transition écologique signés – une dizaine –, comparé à l’engouement de la précédente démarche. Telle est la réalité.
M. le rapporteur signale des financements incomplets, mais les TEPCV duraient plusieurs années, et les inscriptions budgétaires étaient annuelles et existaient bel et bien.
Je vous remercie également de votre réponse sereine, madame la secrétaire d’État, parce que, ce matin, face à une interpellation du président Kanner, Mme la ministre Borne s’était un peu emportée, en lui demandant ce qu’avait fait la majorité précédente au cours de son mandat. Cela n’est franchement pas la réponse que les Français attendent d’un débat actuel sur la transition écologique et sur la fiscalité écologique. Mme Borne nous a tenu un discours d’ancien monde, affirmant que nous n’avions pas fait ce qu’il fallait, mais cette démarche des TEPCV montre qu’il y a une ambition bien plus forte avec les territoires.
Tel était le message que je voulais faire passer.
M. le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour explication de vote.
M. Hervé Maurey. Je ne voterai pas cet amendement, et ce pour une raison très simple : on ne peut pas se permettre de retirer des crédits à l’entretien de nos infrastructures, notamment de nos infrastructures routières et fluviales. (M. Roland Courteau s’exclame.)
On parle insuffisamment des infrastructures fluviales à mon goût et pour avoir eu l’occasion d’en voir quelques-unes dans le cadre du Conseil d’orientation des infrastructures, le COI, j’ai été absolument abasourdi de constater l’état lamentable dans lequel elles se trouvent. Par conséquent, je ne voterai pas cet amendement.
En revanche, celui-ci a le mérite de vous interroger, madame la secrétaire d’État, sur la question des besoins de financement de nos territoires. On l’a répété ce matin, les territoires ont un rôle essentiel à jouer en matière de transition énergétique, mais, pour pouvoir mener à bien cette mission, il leur faut des ressources. On nous a aussi expliqué que le Gouvernement faisait déjà énormément d’efforts, mais je veux rappeler que l’augmentation de la taxe carbone, entre 2017 et 2019, représente 6 milliards d’euros, et on est en train de pleurer pour avoir quelques centaines de millions d’euros, afin de permettre, ce matin, à des agences de fonctionner un petit peu mieux, et cet après-midi, aux territoires qui en ont la volonté d’avoir les moyens d’assurer des missions en matière de transition écologique.
Il faut, encore une fois, madame la secrétaire d’État, écouter les territoires, le pays, les élus, le Sénat, et arrêter de corseter les crédits destinés à la transition écologique, que vous utilisez majoritairement pour essayer – vous n’y arrivez même pas – de boucher les trous du budget de l’État.
M. le président. La parole est à Mme Viviane Artigalas, pour explication de vote.
Mme Viviane Artigalas. Je veux, moi aussi, insister sur ce sujet ; la transition écologique doit être un choix politique auquel vous consacrez des moyens, madame la secrétaire d’État.
On le voit bien, ce qui manque globalement, c’est un meilleur financement ; il est important qu’on le comprenne. Mon collègue l’a dit, les taxes destinées à la transition écologique sont affectées à d’autres postes. C’est votre choix politique, vous devez l’assumer, madame la secrétaire d’État !
Je rejoins aussi ce que disait M. Jacquin ; peut-être que des choses n’ont pas été faites par d’anciens gouvernements, mais vous remettez, chaque fois, cet argument sur le tapis, quel que soit le ministre présent au banc. Vous êtes aux affaires depuis un an et demi maintenant. Prenez vos responsabilités et apportez, sur ces questions de transition écologique, des réponses concrètes aux Français, qui le demandent ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Frédéric Marchand, pour explication de vote.
M. Frédéric Marchand. Quand on fait de la politique – c’est un peu notre cas dans cette enceinte –, il faut avoir de la mémoire et faire preuve de constance. Or j’ai parfois l’impression que, en matière de constance, nous sommes un tantinet déficients…
J’entendais les uns et les autres parler de besoin de financement, mais, quand on écoute les élus du territoire – ce que nous faisons dans le cadre de nos responsabilités, et ce que fait aussi le Gouvernement, puisque vous étiez, madame la secrétaire d’État, en Sambre-Avesnois avec Sébastien Lecornu il n’y a pas si longtemps, pour la signature d’un contrat de transition écologique et solidaire –, on a le sentiment que ce qui manque cruellement aujourd’hui aux élus locaux, c’est l’ingénierie.
Or il me semble, pour avoir longuement échangé avec des élus de petites et de moyennes communes et avec le président de l’agglomération Maubeuge-Val-de-Sambre, Benjamin Saint-Huile, que ces contrats de transition écologique et solidaire sont unanimement appréciés par les élus ; le Gouvernement prend ses responsabilités en matière d’ingénierie et va aider les territoires à se développer harmonieusement. Je tenais à le dire.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Je veux repartir de la question de l’accompagnement des territoires. Pour moi, ce qui se joue dans ce débat, et de manière plus globale, est de savoir comment être capable de faire évoluer la totalité de notre modèle de développement économique, y compris rural et périurbain, d’aménagement de nouvelles activités et de réponse à la question sociale, tout en faisant la transition écologique. On ne peut effectivement pas imaginer de continuer à produire du développement économique si l’on ne met pas la question écologique en son cœur.
Par conséquent, pour moi, la question n’est pas de savoir si l’on crée une nouvelle poche particulière, dotée de tant de millions d’euros, sur un appel à projets dédié, ponctuel ; elle est de savoir si l’on est capable d’accompagner un territoire dans sa globalité, avec tous les moyens disponibles des différents départements ministériels et des collectivités locales, pour que le projet de territoire soit véritablement un projet économique, écologique et solidaire.
C’est ce que nous avons essayé de faire – je remercie M. le sénateur Marchand de l’avoir mentionné – dans le pacte Sambre-Avesnois, lui-même adossé à un pacte plus large, celui des Ardennes, qui pose la problématique dans sa totalité et qui y répond au moyen de l’ingénierie, qui est probablement ce qui manque le plus – nous sommes très doués pour financer des projets, mais en général moins pour financer l’ingénierie permettant de les mettre en œuvre –, et d’une vision globale du territoire – développement économique, développement industriel, mobilité, ou encore économie sociale et solidaire.
Je veux donc réaffirmer la volonté du Gouvernement de faire cette transition au plus près des territoires, afin que les outils que nous mettons en place et les contrats de transition écologique, les CTE – nous allons en faire beaucoup plus qu’aujourd’hui, je m’y engage –, soient au service d’un projet de territoire global.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-217 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-549 rectifié, présenté par MM. Kern et Longeot et Mme Billon, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
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Infrastructures et services de transports |
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200 000 000 |
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200 000 000 |
Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
200 000 000 |
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200 000 000 |
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Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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TOTAL |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
200 000 000 |
SOLDE |
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0 |
La parole est à M. Claude Kern.
M. Claude Kern. Je retire cet amendement au profit de mon amendement de repli n° II-550 rectifié, que je vais défendre tout de suite, si vous me le permettez, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-549 rectifié est retiré.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
M. Claude Kern. Le Fonds chaleur doit apporter le soutien nécessaire à la chaleur renouvelable et de récupération, afin de permettre à la France d’atteindre ses objectifs énergétiques. Il a été démontré que ce fonds, géré par l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, l’ADEME, est l’un des dispositifs les plus efficaces de soutien à la chaleur renouvelable.
Or le Président de la République, Emmanuel Macron, s’est engagé à doubler l’enveloppe du Fonds chaleur lors de la campagne présidentielle. Cet amendement vise donc à concrétiser ce doublement au cours du quinquennat.
Par ailleurs, le secteur de la chaleur renouvelable connaît actuellement d’importantes difficultés, et ne se développe pas du tout à un rythme suffisant pour atteindre les objectifs de transition énergétique de la France.
Je ne détaille pas la nouvelle répartition budgétaire prévue au travers de cet amendement, que je vous demande, mes chers collègues, de soutenir.
M. le président. La parole est à M. le président de la commission.
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Depuis la reprise, nous avons examiné bien peu d’amendements, et le temps consacré à chacun d’eux est plus ou moins long.
Je veux juste appeler l’attention des membres de la Haute Assemblée sur la nécessité d’observer la plus grande concision possible. On peut parfois dire les choses de manière très explicite et convaincante en peu de temps. C’est ce à quoi je vous invite, mes chers collègues, sans quoi nos débats risquent de déraper. Nous avons encore une mission à examiner. (Marques d’assentiment sur les travées du groupe La République En Marche et du groupe de Rassemblement Démocratique et Social Européen.)
M. Jean-Pierre Corbisez. Voilà une bonne parole !
M. le président. L’amendement n° II-20 rectifié, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
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Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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TOTAL |
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0 |
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. L’efficacité du Fonds chaleur, soulignée à plusieurs reprises par la Cour des comptes, n’est plus à démontrer.
Par rapport aux énergies renouvelables électriques, qui concentrent une très grande partie des soutiens publics, les énergies renouvelables thermiques présentent de nombreux avantages : elles sont pilotables, non intermittentes, globalement plus pourvoyeuses en emplois, et elles permettent d’exploiter la forêt française et de créer des revenus complémentaires pour les agriculteurs.
Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement s’est engagé à porter le budget du Fonds chaleur à 315 millions d’euros en 2019, c’est bien, mais il ne prévoit pas d’augmenter le budget de l’ADEME en conséquence. Les crédits seront donc prélevés sur d’autres fonds de l’Agence, par exemple sur le Fonds déchets, alors que celui-ci finance aussi des projets de méthanisation et de valorisation du biogaz par cogénération. Où est la cohérence ?
Pour sécuriser la hausse du Fonds chaleur sans obliger l’ADEME à recycler des moyens existants, la commission des affaires économiques vous propose donc de relever le budget de ce fonds de 100 millions d’euros, ce qui permettra d’atteindre 315 millions d’euros, comme promis par le Gouvernement. C’est d’ailleurs une façon de montrer aux Français qu’une toute petite partie des hausses de taxes profitera à la transition énergétique.
M. le président. L’amendement n° II-464 rectifié, présenté par M. Gontard, Mme Assassi, M. Gay et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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Infrastructures et services de transports |
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100 000 000 |
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0 |
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La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Cet amendement va dans le même sens et il appelle toujours à la constance et à la cohérence.
Lors du débat qui a eu lieu en octobre dernier au Sénat, le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire a annoncé que le Fonds chaleur, doté de 215 millions d’euros en 2018, passerait à 300 millions en 2019.
Cet amendement a pour objet de concrétiser cet engagement et de transférer 100 millions d’euros, au sein du programme 181, à l’action n° 12, Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, afin d’augmenter le budget du Fonds chaleur, géré par l’ADEME, opérateur de ce programme.
Par ailleurs, le secteur de la chaleur renouvelable connaît actuellement d’importantes difficultés, et ne se développe pas du tout à un rythme suffisant pour atteindre les objectifs de transition énergétique de la France. Ce retard est notamment dû au manque d’attractivité des investissements dans ce secteur ; un projet de chaleur renouvelable sur deux finit par être abandonné parce qu’il est insuffisamment attractif.
Ainsi, il est essentiel d’augmenter le montant du Fonds chaleur pour améliorer le niveau de soutien apporté à chaque projet, afin de donner aux projets de réseau de chaleur renouvelable un niveau de rentabilité suffisant. En effet, comme le souligne le Syndicat des énergies renouvelables, la chaleur représente près de 50 % des besoins énergétiques de la France ; elle est pourtant aujourd’hui massivement produite par des énergies fossiles importées et émettrices de gaz à effet de serre. Les objectifs énergétiques de notre pays sont d’atteindre 23 % d’énergies renouvelables dans notre consommation en 2020, puis 32 % en 2030, et de multiplier par cinq la quantité d’énergies renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid entre 2012 et 2030.
Le Fonds chaleur doit désormais apporter le soutien nécessaire à la chaleur renouvelable et de récupération pour permettre d’atteindre ces objectifs.
M. le président. L’amendement n° II-550 rectifié, présenté par MM. Kern et Longeot et Mme Billon, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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100 000 000 |
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100 000 000 |
Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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|
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|
Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
100 000 000 |
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100 000 000 |
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Énergie, climat et après-mines |
|
|
|
|
Service public de l’énergie |
|
|
|
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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|
|
|
TOTAL |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
100 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
Cet amendement a été défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Je partage évidemment les objectifs des auteurs de ces amendements, quels qu’ils soient, mais – je serai très bref, sur l’invitation du président de la commission – je rappelle que la commission des finances a aussi une obligation, qui consiste à faire malheureusement preuve de rigueur comptable et budgétaire.
Ces amendements soulignent de nouveau que ce projet de budget est largement insuffisant – j’aurais même tendance à dire, maintenant, un peu inconséquent – en faveur de l’écologie.
Cela étant, je demande le retrait de ces amendements, et, à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. En réalité, ces amendements sont satisfaits.
Je veux vous rassurer, conformément à l’engagement pris par le ministre d’État et par le Président de la République, le budget du Fonds chaleur augmentera l’année prochaine. Il était de 200 millions d’euros il y a deux ans et de 245 millions cette année ; il sera de 307 millions l’an prochain et de 350 millions l’année suivante.
Cette augmentation résultera de la gestion au sein de l’ADEME et n’aura pas lieu au détriment des autres fonds d’intervention. En effet, le Fonds déchets sera également en légère hausse, et, globalement, la section d’intervention augmentera de 73 millions d’euros, dont 62 millions pour le seul Fonds chaleur. Par conséquent, nous n’avons pas besoin de crédits budgétaires supplémentaires pour tenir notre parole.
L’avis du Gouvernement sur ces amendements est donc défavorable.
M. le président. Monsieur le rapporteur pour avis, l’amendement n° II-20 rectifié est-il maintenu ?
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Si Mme la secrétaire d’État confirme que les fonds de l’ADEME ne font pas l’objet de recyclage et qu’ils sont bien à la hauteur, je considère que notre demande est satisfaite, mais je veux que les choses soient très claires.
M. le président. L’amendement n° II-20 rectifié est retiré.
La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je profite de ce moment pour appeler succinctement l’attention sur les problématiques liées à l’énergie et à l’industrie, même s’il ne s’agit pas forcément des mêmes lignes financières. Clairement, l’accompagnement du thermique d’habitation est actuellement en voie d’amélioration, mais, pour l’industrie, on a de vraies difficultés à financer de grands projets consommant beaucoup d’énergie.
Dans le département dont je suis élu, il y a deux soudières. L’une d’elles, qui appartient au groupe Novacap, est en cours de transition énergétique – elle passe du charbon à des déchets de bois –, mais cela fait trois ans qu’elle attend, et il va lui falloir répondre une nouvelle fois à un appel à projets de la Commission de régulation de l’énergie, ou CRE. On compte sur la programmation pluriannuelle de l’énergie pour débloquer de gros dossiers.
Pour ce qui concerne l’autre soudière, celle de Solvay, de près de 110 mégawatts de puissance, le projet ne peut être satisfait dans les conditions actuelles.
M. le président. Monsieur Kern, l’amendement n° II-550 rectifié est-il maintenu ?
M. Claude Kern. Je suis sur la même ligne que M. le rapporteur pour avis, donc je retire également mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-550 rectifié est retiré.
Monsieur Gontard, l’amendement n° II-464 rectifié est-il maintenu ?
M. Guillaume Gontard. Oui, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-404, présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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140 000 000 |
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|
Affaires maritimes |
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|
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Paysages, eau et biodiversité |
140 000 000 |
|
|
|
Expertise, information géographique et météorologie |
|
|
|
|
Prévention des risques dont titre 2 |
|
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Énergie, climat et après-mines |
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|
Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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TOTAL |
140 000 000 |
140 000 000 |
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|
SOLDE |
0 |
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Nous proposons, au travers de cet amendement, de réorienter les autorisations d’engagement liées à la mise en œuvre de la liaison Charles-de-Gaulle Express, ou CDG Express, qui ne nous paraît pas prioritaire pour les usagers quotidiens des transports.
J’évoque spécifiquement le programme 203, « Infrastructures et services de transports », pour lequel 140 millions d’euros sont prévus, au titre de l’action Transports collectifs, pour la mise en œuvre de ce projet. Ces crédits ont vocation à couvrir l’engagement de l’État à racheter la part non amortie du matériel roulant et de l’atelier de maintenance dans lequel l’exploitant du service aura investi, des conditions particulièrement favorables à cet exploitant ; nous les contestons.
Cette dépense, je le répète, ne nous semble pas prioritaire, alors que les besoins pour les transports du quotidien sont sous-estimés et sous-financés, ce qui conduit, en lien avec les politiques de libéralisation des transports publics, au renforcement des inégalités territoriales, qui sont au cœur du mouvement des « gilets jaunes » – cela a été beaucoup rappelé ces jours-ci.
Nous proposons donc de réorienter ces crédits vers les agences de l’eau, dont, loi de finances après loi de finances, les crédits fondent comme neige au soleil au travers de la mise en œuvre d’un plafond mordant, mais également du prélèvement sur leurs ressources pour financer l’ensemble des politiques liées à la biodiversité.
Il s’agit, très concrètement, de les réorienter vers le programme 113, « Paysages, eau et biodiversité », et plus spécifiquement vers l’action Gestion des milieux et biodiversité.
Les agences de l’eau doivent disposer de moyens supplémentaires, afin de pouvoir, sur le long terme, faire face à l’accroissement de leurs missions, en particulier dans le cadre du plan 2019-2024. Une attention doit être spécifiquement portée aux questions d’assainissement non collectif, notamment dans les territoires ruraux.
Enfin, nous considérons que des sommes supplémentaires doivent être affectées au financement du plan Biodiversité, actuellement sous-doté, particulièrement des nouvelles réserves nationales. En effet, ce plan prévoit la création de cinq de ces réserves chaque année pendant quatre ans, mais celles-ci sont sous-financées à ce jour.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Ma chère collègue, les crédits affectés aux agences de l’eau ne figurent pas dans le programme : ils sont extrabudgétaires ; de ce fait, je considère que votre amendement est un amendement d’appel. Je me tourne donc vers le Gouvernement ; cela signifie que les agences de l’eau, on l’a dit ce matin, ont besoin de crédits, elles sont largement à l’os.
Madame la secrétaire d’État, je le répète au nom de de l’ensemble de mes collègues, puisque c’était Mme Borne qui était au banc du Gouvernement ce matin, entendez bien que, même si les agences de l’eau et les comités de bassin ont adopté une cure d’amaigrissement, à un moment, il n’y aura même plus besoin de faire un cran supplémentaire à la ceinture, parce qu’il n’y aura plus rien à serrer.
Cela étant, la commission demande le retrait de cet amendement et, à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Il est le même, pour deux raisons.
En premier lieu, dans le cadre du onzième programme des agences de l’eau, même si celui-ci a été réorienté, à la suite des assises de l’eau, vers le petit cycle de l’eau et les principaux investissements, l’assainissement non collectif en milieu rural reste possible, en particulier lorsqu’il s’inscrit dans une mission de service public. Encore aujourd’hui, on y consacre 10 millions à 20 millions d’euros.
En second lieu, budgétairement, vous le savez également, les agences de l’eau font l’objet du plafond mordant, qui a été adopté, et il n’est donc pas possible de les redoter à partir du programme 113.
L’avis du Gouvernement sur cet amendement est par conséquent défavorable.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Je souhaite juste apporter un complément à ce qu’a très bien dit mon collègue Jean-François Husson.
Les auteurs de cet amendement croient viser une réduction des crédits alloués au CDG Express ; or il n’y a pas de crédits publics affectés au CDG Express, qui est financé sur les fonds propres d’Aéroports de Paris, de SNCF Réseau et de la Caisse des dépôts et consignations. Il n’y a donc rien de budgétaire ; un prêt de l’État se substitue à une garantie.
Ainsi, mes chers collègues, alors que vous pensez enlever, en l’occurrence, 140 millions d’euros au CDG Express, vous les ôtez en fait aux transports collectifs, hors CDG Express.
M. Antoine Lefèvre. Ce n’est pas le but, en effet.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Par conséquent, l’objet de votre amendement est inexact, il y a une erreur.
M. le président. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote.
M. Roger Karoutchi. J’allais tenir à peu près les mêmes propos que mon collègue Vincent Capo-Canellas.
Je souhaite juste ajouter, madame la secrétaire d’État, que, si je comprends bien, non pas l’amendement, que je ne voterai pas, mais la défense du projet Charles-de-Gaulle Express, cela ne fait que renforcer ma conviction que le Gouvernement est dans l’erreur quand il veut privatiser ADP. (Marques d’assentiment sur de nombreuses travées.)
M. Olivier Jacquin. Absolument !
M. Roger Karoutchi. Laissez les choses se faire selon le programme prévu, sinon vous casserez vous-même le dispositif que vous avez souhaité.
Je le répète, je ne voterai pas cet amendement, car, Charles-de-Gaulle Express n’ayant pas de crédits publics en tant que tels, les crédits pourraient être retirés du budget du reste des transports collectifs, ce qui serait un désastre pour nous – ça va comme ça, c’est déjà assez difficile. Toutefois, si vous privatisez ADP, vous nous enlèverez, en Île-de-France, l’un des leviers majeurs d’intervention sur la structuration des transports publics ; et, là, franchement, je ne sais plus faire… (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Sophie Joissains applaudit également.)
M. Dominique de Legge. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Il s’agit bien sûr d’un amendement d’appel, visant surtout à souligner le problème des agences de l’eau. Il n’y aurait pas de difficulté pour l’assainissement individuel et un budget serait prévu. Mais dans les territoires ruraux, particulièrement de montagne, dans lesquels l’assainissement individuel représente la seule possibilité d’assainissement, il y a zéro financement. Il est donc impossible d’inciter les habitants à se mettre en conformité. Telle est la réalité !
Cela étant, je veux bien retirer cet amendement, car il avait vocation à mettre en avant les vraies problématiques et le fait que l’on supprime des financements des agences de l’eau.
M. le président. L’amendement n° II-404 est retiré.
L’amendement n° II-21 rectifié, présenté par M. Gremillet, au nom de la commission des affaires économiques, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fermeture des centrales thermiques à charbon
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes |
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|
Paysages, eau et biodiversité |
|
|
|
|
Expertise, information géographique et météorologie |
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40 000 000 |
|
2 000 000 |
Prévention des risques dont titre 2 |
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|
|
|
Énergie, climat et après-mines |
|
|
|
|
Service public de l’énergie |
|
|
|
|
Fermeture des centrales thermiques à charbon |
40 000 000 |
|
2 000 000 |
|
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
|
|
||
Économie sociale et solidaire |
|
|
|
|
TOTAL |
40 000 000 |
40 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. La fermeture des quatre dernières centrales électriques au charbon doit intervenir d’ici à 2022 – c’est ce que le Gouvernement a annoncé en juillet dernier dans son plan Climat, et c’est ce qu’a confirmé le Président de la République mardi dernier.
Pour autant, aucun dispositif d’accompagnement n’est aujourd’hui prévu, alors que les conséquences sur les entreprises, les salariés et les territoires concernés seront, bien entendu, majeures.
J’ai été très surpris d’apprendre au cours de mes auditions que les industriels concernés n’ont, à ce jour, même pas été reçus par le Gouvernement.
On évoque des CTE spécifiques, mais, là non plus, il n’est pas question de moyens budgétaires dédiés.
J’ajoute qu’un dispositif existe d’ores et déjà pour accompagner la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim, à la fois pour aider les exploitants et pour aider à la reconversion des salariés et du site. Il n’y a aucune raison de traiter différemment le cas des centrales à charbon : là aussi, l’État décide d’arrêter des actifs de production bien avant leur fin de vie technique, ce qui ouvre droit à une indemnisation pour les exploitants ; là aussi, des sites industriels et des emplois disparaîtront.
Il y a donc urgence à penser la reconversion industrielle de ces sites. Quant au reclassement des salariés, il sera impossible à assurer en interne, au moins pour un ou pour deux des opérateurs, qui n’ont pas ou qui ont très peu d’autre activité industrielle en France.
Par conséquent, la commission des affaires économiques propose, au travers de cet amendement, de créer dès maintenant une nouvelle ligne budgétaire qui permettra de financer les premières études de faisabilité des nouveaux projets d’activité économique, dès 2019. Cette ligne sera dotée de 40 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 2 millions d’euros en crédits de paiement.
Il est impératif de donner de la visibilité aux industriels, aux salariés, et surtout à ces territoires.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Monsieur Gremillet, j’avais pour ma part compris que la fermeture des centrales à charbon concernait quatre territoires avec une échéance à fin 2022 et un accompagnement spécifique au travers des CTE.
En aparté, Mme la secrétaire d’État m’indiquait que l’on affecterait des sommes en fonction des cas et des sites. D’un côté, cette méthode est positive, parce qu’elle permet d’apprécier les choses au bon niveau, mais, d’un autre côté, il faut s’assurer du respect de l’équité. En effet, selon le cas de figure, il peut s’agir d’une centrale à charbon située sur un territoire sans guère d’activité industrielle à proximité et avec de la pauvreté ou d’une centrale implantée sur un territoire plus industriel et avec plus de richesse – je pense que vous interviendrez sur ce point, madame la secrétaire d’État.
Ce qui me gêne dans cet amendement, c’est de dépouiller, pour ce motif, le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, le CEREMA, et l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN. Or la situation est déjà compliquée pour ces organismes et j’ai bien entendu ce matin certains d’entre nous plaider pour leur conserver des moyens. Je nous appelle donc aussi à la cohérence, mes chers collègues.
Dans cet esprit, la commission vous demande, monsieur Gremillet, de bien vouloir retirer cet amendement, à défaut de quoi elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. L’accompagnement de la fermeture des quatre centrales à charbon est un sujet extrêmement sensible et important, sur lequel nous allons travailler en profondeur.
Je veux d’abord vous rassurer, nous avons reçu les industriels. J’ai moi-même reçu le président d’EDF, la semaine dernière, et l’entretien a largement porté sur ce sujet. Le ministre d’État, François de Rugy, a reçu, avec moi, l’autre industriel, Uniper, qui est également en contact avec Bercy. Nous avons par ailleurs tenu quatre premières réunions, à Paris, avec toutes les parties prenantes. En outre, nous sommes allés à Saint-Avold et nous avons prévu de nous rendre dans chacun des sites concernés.
Cet accompagnement devra faire l’objet de mesures à la fois pour les personnes concernées, qui devront être soit reclassées, soit aidées dans leur reconversion, et pour les territoires. Il n’y a pas, pour l’instant, de budget spécifique prévu.
Pour la centrale de Fessenheim, je rappelle que, au-delà du protocole d’indemnisation avec EDF, le budget est pour le moment de 10 millions d’euros, en autorisations d’engagement, ce qui ne réduit pas du tout l’effort de l’État pour l’accompagnement du site, puisqu’un projet de territoire est en cours et appellera de nombreux investissements. Nous souhaitons faire la même chose pour les centrales de Saint-Avold, de Gardanne, de Cordemais et du Havre ; et les crédits seront disponibles quand nous en aurons besoin, une fois que les projets de territoire seront définis.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Joissains, pour explication de vote.
Mme Sophie Joissains. J’y insiste, au détour d’une question d’actualité au Gouvernement, François de Rugy a annoncé qu’il n’y aurait pas de financement pour ce qui concerne l’accompagnement de la fermeture des centrales à charbon.
Celle de Gardanne compte tout de même 170 emplois, qui relèvent du statut des industries électriques et gazières, ou IEG, hérité de la fermeture de la mine. Conformément à ce statut, les salariés qui touchent les indemnités de chômage ne cotisent pas pour leur retraite ; il leur sera en outre très difficile de se reconvertir. Les équipements concernés sont quasi neufs puisque Uniper a repris le site en 2007 et y a investi quasiment 1,2 milliard d’euros. Cette entreprise a assumé cinq fermetures de tranche à charbon parmi les plus polluantes de France, elle a assuré à elle seule 7,5 % de la décarbonation française durant toutes ces années.
Or, aujourd’hui, nous n’avons absolument aucune perspective.
Nous avons bien été reçus par le ministre d’État, ministre de la transition écologique et solidaire – vous étiez d’ailleurs présente, madame la secrétaire d’État.
De fait, l’ensemble des collectivités ont refusé que le CTE puisse concerner la fermeture de la centrale de Gardanne, et ce pour une bonne et simple raison : il n’y a aucun euro de l’État derrière ! Par conséquent, on va se reposer uniquement sur la Caisse des dépôts et consignations et sur les collectivités territoriales, ce qui est absolument infaisable et invraisemblable. Il faut protéger les 170 salariés de la centrale de Gardanne, mais il y va aussi de l’avenir industriel du territoire.
Quand on parle de transition écologique, on parle aussi de transition industrielle et énergétique. On ne peut absolument pas rester les bras croisés et voir une entreprise comme Uniper, qui perdra d’ailleurs 56 % de sa capacité de production sur les deux centrales, disparaître de cette façon-là. Il faut que notre territoire puisse rayonner et avoir un avenir économique.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je vous demande instamment de voter cet amendement, qui est aussi un amendement d’appel.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous soutiendrons cet amendement ; nous partageons les arguments qui ont été développés.
On pourrait presque presser le Gouvernement d’aller plus loin encore que ce que revendiquent les auteurs de cet amendement. Bien sûr, il faut un accompagnement social et une reconversion des territoires, mais il faut surtout que les exploitants des centrales à charbon, qui sont en train d’examiner des projets alternatifs, c’est-à-dire des technologies moins polluantes, puissent aller au bout de ces recherches.
Or, aujourd’hui, les calendriers et les mesures qui sont proposés ne le permettent pas. C’est regrettable, parce que, au-delà de l’avenir propre de ces sites, qui est une question cruciale pour les territoires concernés – je suis évidemment particulièrement intéressée par la centrale du Havre –, il y a aussi le devenir de notre mix énergétique.
À l’heure actuelle, les centrales à charbon assurent une part indispensable de ce mix, notamment la production au moment de la pointe de consommation électrique que ni le nucléaire ni les énergies renouvelables ne peuvent assumer. Il est donc nécessaire de reconvertir ces centrales grâce à des modes de production plus propres et plus écologiques, mais il faut se laisser le temps d’aller au bout des avancées technologiques en la matière.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Daniel Gremillet, rapporteur pour avis. Je maintiens cet amendement, pour deux raisons.
Première raison, comme je l’ai expliqué au nom de la commission des affaires économiques, il nous faut absolument des certitudes. Vous n’étiez pas présente ce matin, madame la secrétaire d’État, mais Mme la ministre chargée des transports, à propos d’un amendement concernant le changement de gaz distribué dans le nord de la France, a évoqué un titre spécial de paiement. J’ai l’impression que l’on avance à vue dans ce projet de loi de finances pour 2019. Or, 2022, c’est maintenant !
Seconde raison, j’ai auditionné des organisations syndicales. Les dommages collatéraux entraînés par la fermeture de ces centrales, en termes d’approvisionnement – je pense aux ports, au trafic –, mais aussi en nombre d’emplois concernés sont énormes et dépassent largement la dimension uniquement productive de ces quatre centrales. Il s’agit donc d’un véritable sujet.
Je veux rassurer le rapporteur spécial de la commission des finances, Jean-François Husson : l’idée, c’est de créer une ligne budgétaire. En crédits de paiement, seuls 2 millions d’euros sont inscrits. Nous ne voulons surtout pas laisser penser que ce sujet ne doit pas être traité, notamment en termes d’aménagement du territoire.
L’adoption de cet amendement est absolument nécessaire : elle est stratégique pour ces sites, mais aussi pour l’environnement territorial.
En conclusion, je rappelle que ces quatre centrales n’ont rien demandé ! On les oblige à fermer d’ici à 2022 ; il faut donc en assumer les conséquences.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Pour éclairer nos débats, je livre deux chiffres sur les conséquences qu’aurait l’adoption de cet amendement.
Le CEREMA et l’IGN sont dans le programme que vous visez comme ressource et où vous prélevez 40 millions d’euros en autorisations d’engagement et 2 millions d’euros en crédits de paiement, mon cher collègue. Il se trouve que, en 2019, le CEREMA perd 4,6 millions d’euros et Météo France 5 millions d’euros. Ce matin, nous avons examiné des amendements visant à abonder les crédits de ces deux organismes. L’adoption du présent amendement contredirait cette volonté.
M. le président. La parole est à M. Didier Mandelli, pour explication de vote.
M. Didier Mandelli. J’ai eu l’occasion de visiter à plusieurs reprises la centrale de Cordemais, en Loire-Atlantique, qui est concernée, tout comme celle du Havre, puisque c’est la même entité.
Je n’évoquerai pas les incidences de la fermeture sur les salariés. Les essais qui sont conduits sur la biomasse nécessitent un peu plus de temps, demandent un peu d’engagement et des études complémentaires. Les premiers essais sont concluants.
Se pose également la question du financement. Je rappelle que le Gouvernement a annoncé, dans le cadre du démantèlement de la centrale de Fessenheim, que le développement des zones avec une autre vocation plus énergétique – on se tournerait plutôt vers du renouvelable – serait financé à hauteur de 2 % par un prélèvement sur l’IFER, l’imposition forfaitaire sur les entreprises de réseau. Voilà qui ne va pas plaire aux collectivités qui bénéficient de ce dispositif.
Pour ma part, je m’interroge : la fermeture de la centrale de Fessenheim n’aura pas lieu tout de suite. La question de la redistribution des 2 % prélevés sur l’IFER se pose. Ne peut-on imaginer un dispositif du même type pour les quatre sites en cause ? Certes, un tel mécanisme aura un effet sur la répartition de ces fonds aux collectivités locales, mais il pourrait être une solution palliative.
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. J’attacherai personnellement beaucoup d’attention, et avec moi le Gouvernement tout entier, aux conséquences de la fermeture de ces quatre sites sur les emplois directs et les emplois induits. Mesdames, messieurs les sénateurs, ne prenez pas la réponse du Gouvernement à cet amendement comme un indice de l’intérêt ou de l’absence d’intérêt qu’il porterait à ces sites.
Reste que nous examinons le projet de loi de finances pour 2019 et que, même en autorisations d’engagement, les projets ne sont pas prêts. Le débat commence.
Je partage votre point de vue. Oui, il y a, par site, deux sujets à l’intérieur du même dossier : d’une part, la question de l’accompagnement de la centrale elle-même, de son devenir et de celui de ses salariés, d’autre part, la question générale de l’impact sur le territoire. Selon que celui-ci est plus ou moins grand, plus ou moins industrialisé, les besoins sont différents. Dans certains territoires, par exemple à Saint-Avold, la réindustrialisation à proximité est possible ; dans d’autres, notamment la métropole Aix-Marseille Provence, la réponse sera peut-être plus globale, dans le cadre du projet de territoire.
Se pose également la question des alternatives énergétiques. La programmation pluriannuelle de l’énergie a donné quelques indications : la biomasse a vocation à être utilisée plutôt pour de la production de chaleur renouvelable que pour de la production électrique, dans la mesure où le rendement est bien supérieur. Néanmoins, des interrogations ont été émises et des études sont en cours.
C’est la raison pour laquelle je considère que, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019, nous n’avons pas besoin de crédits budgétaires, même en autorisations d’engagement. Ces sites feront toutefois l’objet d’un accompagnement extrêmement sérieux.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-21 rectifié.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas l’amendement.)
M. le président. L’amendement n° II-66, présenté par Mme Cartron, MM. Patriat, Bargeton, Patient, Rambaud, Amiel, Buis, Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi et Navarro, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Indemnisation des propriétaires de biens immeubles rendus inhabitables par l’érosion côtière
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
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Expertise, information géographique et météorologie |
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Prévention des risques dont titre 2 |
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7 000 000 |
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7 000 000 |
Énergie, climat et après-mines |
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Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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Indemnisation des propriétaires de biens immeubles rendus inhabitables par l’érosion côtière |
7 000 000 |
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7 000 000 |
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TOTAL |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
7 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. La mesure proposée s’inscrit dans l’ambition affirmée par Mme Borne en introduction de nos débats, à savoir conduire une politique qui apporte une solution concrète à la majorité de nos concitoyens.
Il s’agit de permettre l’indemnisation des copropriétaires de la résidence Le Signal, située à Soulac-sur-Mer, immeuble dont le permis de construire a été signé en 1965 dans le cadre d’un projet de l’État, à savoir la mission interministérielle d’aménagement de la côte aquitaine.
Ce sujet est bien connu sur nos travées, puisqu’une proposition de loi a été votée quasiment à l’unanimité au mois de mai dernier.
Aujourd’hui, en raison du recul du trait de côte, phénomène que tout monde connaît, la zone a été classée en zone rouge inconstructible du plan de prévention des risques d’avancée dunaire et de recul du trait de côte, approuvé par le préfet le 28 juin 2004. Or l’article L. 561-1 du code de l’environnement exclut le régime d’expropriation qu’il institue aux risques liés à l’érosion côtière, lesquels ne sont pas assimilables au risque de submersion marine.
Cet amendement vise donc à couvrir l’indemnisation d’immeubles situés en zone dunaire dont l’usage d’habitation est rendu impossible par le recul du trait de côte et l’érosion côtière.
Son adoption est neutre financièrement, puisqu’il s’agit de réorienter 7 millions d’euros de l’action n° 10, Prévention des risques naturels et hydrauliques du programme 181. En d’autres termes, cette mesure vise le cas d’immeubles à usage d’habitation dont l’accès est rendu impossible aux habitants, sans que ceux-ci soient indemnisés via une procédure normale d’expropriation. À ce stade, seul l’immeuble Le Signal à Soulac-sur-Mer est concerné. N’entrant pas dans les conditions d’expropriation de l’article L. 561-1 du code précité, les propriétaires ont été tenus d’abandonner leur logement sans percevoir d’indemnités et contraints de se reloger tout en restant propriétaires de leur appartement et en continuant à payer les charges de copropriété.
Il s’agit de réparer une totale injustice.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Réparer une injustice, tout le monde est d’accord ! L’interrogation qui se pose et qui pourrait concerner bien d’autres sujets est la suivante : faut-il créer des programmes spécifiques chaque fois qu’une question ne trouve pas sa solution dans un texte ?
Sur un sujet comme celui-là, après l’adoption à la quasi-unanimité d’une proposition de loi par notre assemblée, le plus simple, dans une démocratie parlementaire qui fonctionne bien, c’est que l’État entende la représentation nationale.
Nous ne sommes pas là pour nous diviser : certes, c’est le jeu habituel. Je demande, au nom de la commission, le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. Mais je souhaite, madame la secrétaire d’État, que vous éclairiez notre assemblée et l’ensemble de ses membres et que, répondant à la préoccupation légitime et unanime de notre assemblée, vous nous annonciez une bonne nouvelle pour l’année 2019.
M. Roger Karoutchi. Très bien ! Enfin une bonne nouvelle !
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Prenez l’exemple de votre collègue ce matin à propos du changement de gaz distribué dans le nord de la France.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, la question que vous posez est très large. En effet, presque un quart du littoral est potentiellement concerné à moyen terme par le recul du trait de côte. On ne peut pas soutenir que ce phénomène est de même nature que les catastrophes naturelles qui frappent d’autres territoires. À ce titre, comme vous le savez, l’indemnisation n’est pas ouverte aujourd’hui au titre du fonds Barnier.
Néanmoins, je partage ce point de vue : une réponse doit être apportée à cette situation particulière, à ce territoire et à ses habitants. Pour identifier des pistes de réponse, nous avons demandé un rapport à trois inspections : l’Inspection générale de l’administration, le Conseil général de l’environnement et du développement durable et l’Inspection générale des finances. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Claude Raynal. Ah !
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. On ne nous la fait plus !
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Nous l’avons néanmoins fait !
Il faut apporter une réponse particulière à ce dossier, qui prendra une autre forme.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Il ne faut jamais avoir été parlementaire ou être un jeune ministre pour croire en une réponse pareille !
M. le président. La parole est à M. Michel Vaspart, pour explication de vote.
M. Michel Vaspart. Encore des rapports !
Madame la secrétaire d’État, nous avons discuté de ce sujet à trois reprises dans cette enceinte.
La première fois, la proposition de loi d’une députée, Pascale Got, a été examinée par le Sénat – j’en étais le rapporteur. Nous avons évoqué, à l’article 2, l’indemnisation des propriétaires de l’immeuble Le Signal, le recul du trait de côte et l’amélioration de la jurisprudence de la loi Littoral. Ce texte, adopté à une large majorité par le Sénat, n’est pas allé jusqu’au bout du processus législatif, l’élection présidentielle empêchant une deuxième lecture.
La deuxième fois, le Sénat a réécrit un texte, dans lequel a été repris l’ensemble des dispositions de la proposition de loi qui avait été précédemment votée, avec d’infimes modifications juridiques. Là encore, il a été adopté à une très large majorité.
La troisième fois, ma collègue Françoise Cartron a déposé une proposition de loi portant uniquement sur l’indemnisation des propriétaires de la résidence Le Signal, lesquels se trouvent dans une situation catastrophique. Pour la plupart, ce sont des gens qui ont très peu de moyens : on les a évacués de leur logement, ils continuent à payer les charges et, aujourd’hui, ils n’ont aucune indemnisation.
Il ne s’agit pas d’indemniser les membres d’autres copropriétés, il s’agit d’indemniser, dans le cadre de l’article 2, les propriétaires de cet immeuble. Aujourd’hui, ce n’est pas fait et vous lancez une réflexion avec des inspecteurs !
Mais on engage toujours des réflexions et on diligente des inspecteurs quand on ne veut pas traiter un problème ! J’ai le sentiment que c’est votre cas, madame la secrétaire d’État. On s’en rend d’ailleurs très bien compte, puisque la proposition de loi sur le recul du trait de côte n’arrive pas à voir le jour, alors qu’elle a été déposée par une députée de La République En Marche et que nous avions des textes prêts.
Nous avons tous voté à l’unanimité cette indemnité. Je ne comprendrais pas le manque de cohésion du Sénat si nous n’adoptions pas cet amendement aujourd’hui. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Pour information, après le vote à la quasi-unanimité de la proposition de loi que j’ai déposée, il m’a été fait cette réponse : « Nous allons regarder. Nous allons travailler. Nous allons voir ». La crainte, c’est qu’il y ait d’autres cas semblables au Signal.
Le 7 juin dernier, j’ai été reçue par le cabinet de Mme Poirson qui m’a indiqué : « On étudie, on va faire un inventaire, on va voir. » Le 10 juillet, la conseillère environnement de Matignon m’a tenu les mêmes propos : « On va lancer une inspection, parce qu’il ne faudrait pas qu’il y ait moult cas similaires au Signal en France et que nous ouvrions en quelque sorte une boîte de Pandore. »
Depuis lors, j’ignore où l’on en est : soit personne ne s’est mis au travail, soit on n’a rien trouvé.
Je rappelle que l’immeuble Le Signal a bénéficié d’un permis de construire accordé par l’État dans le cadre d’une mission interministérielle d’aménagement de l’État, qu’il a été construit à 400 mètres du bord et qu’aujourd’hui il est les pieds dans l’eau. On me répond que l’on ne pouvait pas le savoir. Dans ces conditions, les propriétaires doivent être indemnisés, puisque la situation actuelle fait partie des risques imprévisibles !
M. Michel Vaspart. Exactement !
Mme Françoise Cartron. Pourtant, non !
Un arrêté de péril a été pris. On a ordonné aux habitants d’évacuer l’immeuble en quarante-huit heures. Au demeurant, ils n’auraient pas pu y rester, puisque l’eau et l’électricité ont été coupées. Ils ne sont pas revenus dans leur appartement, car le danger est toujours là, mais ils restent propriétaires, paient les charges de copropriété. Et ils n’ont pas droit à une quelconque indemnisation, leur situation n’entrant dans aucun cadre.
Je ne sais pas si l’inspection chargée de ce rapport est la même que celle dont m’a parlé la conseillère de M. le Premier ministre, mais il existe une ligne budgétaire qui s’appelle « Prévention des risques naturels et hydrauliques ». Je ne prends pas l’argent ailleurs : attribuons les 7 millions d’euros nécessaires à ces copropriétaires.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Nous devons être justes devant cette situation kafkaïenne que subissent des habitants ; ils se trouvent à bout de patience.
Après les longs débats que nous avons eus, il faut agir. Agir aujourd’hui, c’est voter cet amendement, mettre le Gouvernement face à sa responsabilité, et la solidarité nationale doit jouer devant ces risques majeurs nouveaux que sont les risques environnementaux.
M. le président. La parole est à Mme Sophie Joissains, pour explication de vote.
Mme Sophie Joissains. Pardonnez-moi, madame la secrétaire d’État, si je reviens sur le problème des centrales à charbon, mais je rebondis à vos propos sur l’accompagnement.
Vous accompagnez la fermeture de la centrale de Fessenheim à hauteur de 450 millions d’euros, vous débloquez encore 10 millions d’euros à destination de cette centrale cette année, avec une incitation à l’emploi qui va jusqu’à 15 000 euros par emploi créé. Vous accompagnez Total et la centrale de La Mède, ce dont je vous remercie du reste – c’est encore un territoire que je connais bien.
Je suis contre l’exonération de l’huile de palme dans les biocarburants. Néanmoins, lorsqu’il y a un moratoire et que cela peut préserver des emplois, c’est une bonne chose.
Sur le CTE de Sambre-Avesnois, l’État met 12,5 millions d’euros. Pour l’instant, rien n’est prévu sur le plan financier pour le CTE de la métropole Aix-Marseille Provence. Cependant, j’aimerais connaître la nature des accompagnements que vous prévoyez pour la centrale de Gardanne : il y a le volet social, le volet industriel et le volet économique. Pour ce qui concerne le volet social, nous avons vraiment besoin de vous, parce que les salariés ont un statut particulier. Pour ce qui est du volet industriel, le matériel est quasiment neuf et nous avons besoin d’une reconversion. Quant au volet économique du territoire, y a-t-il une possibilité de contractualiser, même dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020 ?
M. le président. L’amendement n° II-548, présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
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Affaires maritimes |
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Paysages, eau et biodiversité |
2 000 000 |
|
2 000 000 |
|
Expertise, information géographique et météorologie |
|
|
|
|
Prévention des risques dont titre 2 |
2 000 000 |
2 000 000 |
||
Énergie, climat et après-mines |
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|
Service public de l’énergie |
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Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
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Économie sociale et solidaire |
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TOTAL |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
2 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Il s’agit encore d’un amendement de cohérence, qui a pour objet de consolider le financement des réserves naturelles nationales.
Le plan Biodiversité présenté par le Gouvernement prévoit la création de cinq nouvelles réserves par an pendant quatre ans. Cette mesure n’est pas totalement financée pour l’année 2019 et nécessite un financement complémentaire de un million d’euros. Par ailleurs, pour permettre aux gestionnaires des réserves naturelles d’exercer leur mission, il convient d’augmenter le budget de un million d’euros supplémentaires. Les moyens budgétaires consacrés aux 167 réserves existantes et aux cinq nouvelles qui seront créées méritent donc d’être portés à 25,3 millions d’euros, en tenant notamment compte des subventions versées aux réserves régionales.
À cette fin et par obligation, cet amendement vise par conséquent à augmenter le programme 113, « Paysages, eau et biodiversité » de l’action n° 07, Gestion des milieux et biodiversité de 2 millions d’euros supplémentaires.
Il est également extrêmement curieux que les premiers subsides du plan Biodiversité ne soient pas prévus dans ce budget. L’adoption de cet amendement nous semble le minimum pour commencer à déployer les mesures de ce plan dès l’année prochaine. Pour ce faire, le programme 181, « Prévention des risques » de l’action n° 01, Prévention des risques technologiques et des pollutions doit subir un prélèvement de 2 millions d’euros.
Dans l’idéal, il conviendrait que le gage soit levé et que les crédits du programme 181 ne diminuent pas.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Mon cher collègue, vous n’avez pas écouté ce que j’aurais dû dire ce matin. (Sourires.)
Le sujet que vous abordez est important et, bien que n’étant pas au banc des ministres, je pense que, quand bien même c’est un amendement d’appel, il pose un vrai sujet, celui du financement du plan Biodiversité, de l’ordre de 10 millions d’euros pour l’année 2019. Ce plan concerne cent départements, soit une moyenne de 100 000 euros par département. C’est dire l’indigence des crédits qui sont prévus !
En outre, 90 % du financement de ce plan provient des agences de l’eau. Par conséquent, grâce à ce fameux jeu de bonneteau que je ne souhaite pas voir pratiquer, le Gouvernement a trouvé une astuce pour refiler le mistigri aux territoires et aux organismes, ce qui n’est pas une bonne solution. Il faut avoir une ligne directrice, une grande vision des enjeux environnementaux et écologiques pour le pays, et donner à chacun la responsabilité qui lui incombe pour permettre aux territoires et à leurs élus de conduire les programmes, et ce, bien évidemment, avec des financements. C’est bien le sujet de cet amendement.
Malgré cette analyse, mon cher collègue, vous me voyez un peu mortifié, puisque, dans le cadre de ma mission de rapporteur spécial, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. M. le rapporteur spécial l’a rappelé, le programme 113 fait l’objet d’une augmentation nette cette année, de 10 millions d’euros pour concourir au financement du plan Biodiversité. À l’intérieur de ces 10 millions d’euros, une augmentation à hauteur de un million d’euros est fléchée pour l’extension des réserves naturelles.
Si le besoin est supérieur, en faisant jouer la fongibilité, la gestion à l’intérieur du programme, il sera possible d’y pourvoir et ainsi d’accompagner la création des réserves naturelles.
Dès lors, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Même si je suis d’accord avec les propos du rapporteur spécial, je maintiens cet amendement.
Le plan Biodiversité a été annoncé par Nicolas Hulot et nourrit de grandes ambitions. Or, cela a été rappelé, le financement n’est pas à la hauteur. Il me semble important qu’une réflexion soit menée sur ce sujet. Si on lance des plans, il faut pouvoir les assumer !
M. le président. Mes chers collègues, plusieurs d’entre vous me demandent d’aller plus vite. En effet, notre rythme est de huit amendements par heure (Exclamations sur diverses travées), mais je ne peux pas empêcher ceux qui demandent la parole d’intervenir.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-181, présenté par M. Poadja, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
|
|
|
|
Affaires maritimes |
|
|
|
|
Paysages, eau et biodiversité |
500 000 |
|
500 000 |
|
Expertise, information géographique et météorologie |
|
|
|
|
Prévention des risques dont titre 2 |
|
|
|
|
Énergie, climat et après-mines |
|
|
|
|
Service public de l’énergie |
|
|
|
|
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
|
500 000 |
|
500 000 |
Économie sociale et solidaire |
|
|
|
|
TOTAL |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Gérard Poadja.
M. Gérard Poadja. La France couvre 10 % de la surface corallienne mondiale, dont 75 % se trouvent en Nouvelle-Calédonie, où les lagons sont classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Il y a urgence à agir pour préserver notre patrimoine marin. Ce projet de budget ne consacre que 300 000 euros à la protection des récifs coralliens. Je crois que nous devons aller plus loin et l’augmenter de 500 000 euros supplémentaires pour atteindre l’objectif que s’est fixé la France, à savoir protéger 75 % des récifs coralliens dans les outre-mer d’ici à 2021.
Je rappelle que, à l’Assemblée nationale, cet amendement a été soutenu par les rapporteurs et que la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire l’a adopté.
Dans ce contexte, l’IFRECOR, l’Initiative française pour les récifs coralliens, joue un rôle essentiel pour promouvoir une politique active favorable à la préservation et à la gestion des écosystèmes. Elle contribue à protéger un patrimoine marin exceptionnel aux potentialités formidables, reconnu de toute la communauté scientifique internationale.
M. le président. L’amendement n° II-532, présenté par M. Antiste, Mmes Conconne et Jasmin, MM. Lalande, Duran et Todeschini, Mmes Conway-Mouret et Tocqueville, M. Daudigny et Mme Monier, n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. La commission émet malheureusement le même avis que précédemment.
Comme il faut être bref – n’y voyez pas un manque d’intérêt, mon cher collègue –, je précise qu’il nous faut avoir la même ligne de conduite, quels que soient les montants sollicités. Je l’ai dit lorsqu’il s’agissait de mobiliser 1,5 milliard d’euros. C’est la même logique budgétaire qui prévaut.
La commission demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. J’émets le même avis que sur les amendements précédents : les crédits du programme 113 sont en hausse de 10 millions d’euros et ceux en faveur des réserves naturelles de plus d’un million d’euros. Enfin, nous portons un intérêt tout particulier aux récifs coralliens. Nous considérons donc que cet amendement est satisfait et nous émettons un avis défavorable.
M. le président. L’amendement n° II-167 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul, MM. Bérit-Débat et J. Bigot, Mme Bonnefoy, MM. Dagbert, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville, M. Madrelle, Mme Tocqueville, M. Kanner et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Infrastructures et services de transports |
|
|
|
|
Affaires maritimes |
|
|
|
|
Paysages, eau et biodiversité |
|
|
|
|
Expertise, information géographique et météorologie |
|
|
|
|
Prévention des risques dont titre 2 |
|
|
|
|
Énergie, climat et après-mines |
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300 000 |
|
300 000 |
Service public de l’énergie |
|
|
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|
Conduite et pilotage des politiques de l’écologie, du développement et de la mobilité durables dont titre 2 |
300 000 |
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300 000 |
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Économie sociale et solidaire |
|
|
|
|
TOTAL |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
300 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Martine Filleul.
Mme Martine Filleul. L’actualité douloureuse du week-end montre, s’il le fallait, combien nos concitoyens ont besoin d’être informés et d’être davantage associés aux décisions publiques.
La Commission nationale du débat public, ou CNDP, est l’un des acteurs qui favorisent cette information et cette association. Elle veille au respect de la participation du public dans l’élaboration des projets d’aménagement ou d’équipement d’intérêt national qui présentent de forts enjeux ou ont des incidences significatives sur l’environnement ou l’aménagement du territoire. Elle organise, vous le savez, mes chers collègues, des débats publics, veille au bon déroulement des concertations et à la bonne information du public. Par ailleurs, elle mène une activité de conseil et assure une mission de conciliation.
La CNDP a vu ses missions élargies par l’ordonnance du 3 août 2016. Les concertations préalables qu’elle a gérées ont ainsi augmenté, leur nombre étant annuellement passé de neuf à cinquante-six entre 2016 et 2018.
Par ailleurs, la Commission fait un bilan contrasté du débat public organisé de mars à juin derniers sur la programmation pluriannuelle de l’énergie, justement à cause d’un manque de moyens.
L’objectif est donc d’en tirer des enseignements pour le futur débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs, prévu pour fin janvier 2019. Ce débat sera très important pour nous tous, compte tenu des enjeux environnementaux que nous connaissons.
Le budget de la CNDP, stable pour 2019, mérite par conséquent d’être augmenté, afin de permettre à cette commission de développer ses actions. Telles sont les raisons pour lesquelles nous souhaitons que 300 000 euros supplémentaires soient fléchés vers cette instance.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. J’entends bien votre demande, chère collègue, mais l’actualité me donne à penser qu’il faudra bien plus de 300 000 euros en 2019. Je souhaite connaître l’avis du Gouvernement sur ce point.
Madame la secrétaire d’État, vous annoncez un temps de consultation de quelques mois sur la politique énergétique. La CNDP pourrait être mise à contribution. Pour éviter les rapports technocratiques, peut-être pourrait-on articuler les moyens ?
Ma chère collègue, je vous prie de retirer votre amendement, car je devine que Mme la secrétaire d’État va annoncer que le Gouvernement octroiera davantage de moyens à la CNDP en 2019, ce qui rendra votre mesure inutile. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Madame la sénatrice, le Gouvernement est évidemment attaché à la CNDP et au débat public, comme le montrent bien d’ailleurs les débats qui ont lieu en ce moment.
Permettez-moi de revenir sur la mécanique du financement de la CNDP. Les dépenses de fonctionnement et les dix agents de cette autorité administrative indépendante sont financés par le budget du ministère de la transition écologique et solidaire, à hauteur de 3,5 millions d’euros, ce budget étant maintenu.
En revanche, chacun des débats est financé spécifiquement par les maîtres d’ouvrage. Dans certains cas, il s’agit de maîtres d’ouvrage privés ; dans d’autres, cela peut être le ministère lui-même.
Le débat que vous avez mentionné sur les déchets radioactifs et nucléaires sera financé par la direction générale de l’énergie et du climat de ce même ministère.
La question se pose de savoir quel sera le type de financement d’autres débats. En tout état de cause, ils ne seront pas financés par le budget de fonctionnement de la CNDP elle-même.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° II-167 rectifié bis.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
(Il est procédé au dépouillement du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 32 :
Nombre de votants | 342 |
Nombre de suffrages exprimés | 317 |
Pour l’adoption | 36 |
Contre | 281 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Mise au point au sujet d’un vote
M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, je vous prie de bien vouloir m’excuser, mais je viens de commettre une erreur. Alors que je voulais voter pour, j’ai voté contre, et mes collègues du groupe Les Indépendants – République et Territoires voulaient s’abstenir. (Exclamations amusées sur diverses travées.)
Tout le monde connaît désormais mon vote…
M. le président. Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Dans la suite de l’examen du projet de loi de finances pour 2019, j’appelle en discussion les articles 75 à 76 quinquies, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».
Écologie, développement et mobilité durables
Article 75
I. – Le code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au début de la première phrase du V de l’article L. 213-10-8, les mots : « Entre 2012 et 2018, » sont supprimés ;
2° L’article L. 423-21-1 est ainsi modifié :
a) Les sept premiers alinéas sont ainsi rédigés :
« Le montant des redevances cynégétiques est fixé pour 2019 à :
« 1° Pour la redevance cynégétique nationale annuelle : 44,5 € ;
« 2° Pour la redevance cynégétique nationale temporaire pour neuf jours : 31 € ;
« 3° Pour la redevance cynégétique nationale temporaire pour trois jours : 22 € ;
« 4° Pour la redevance cynégétique départementale annuelle : 44,5 € ;
« 5° Pour la redevance cynégétique départementale temporaire pour neuf jours : 31 € ;
« 6° Pour la redevance cynégétique départementale temporaire pour trois jours : 22 €. » ;
b) À la première phrase de l’avant-dernier alinéa, l’année : « 2008 » est remplacée par l’année : « 2020 ».
II. – Les deux derniers alinéas du I de l’article 135 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« Chaque année, un arrêté conjoint des ministres chargés de l’écologie et du budget fixe le montant de cette contribution, en précisant les parts allouées à l’Agence française pour la biodiversité et à l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, et la répartit entre les agences de l’eau en fonction du potentiel économique du bassin hydrographique pondéré par l’importance relative de sa population rurale.
« Le potentiel économique du bassin hydrographique est déterminé pour 20 % à partir du produit intérieur brut des régions relevant de chaque bassin et pour 80 % à partir du revenu des ménages des régions relevant de chaque bassin.
« Pour chaque bassin, un coefficient de modulation rurale définit l’importance relative de la population rurale. Ce coefficient, compris entre 75 % et 115 %, est déterminé de façon linéaire selon la part de population du bassin habitant des communes non incluses dans des aires urbaines.
« Cet arrêté détermine également les modalités de versement de cette contribution. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-150 rectifié, présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 3 à 12
Supprimer ces alinéas.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Mme Christine Prunaud. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous changeons de sujet.
Par cet amendement, nous souhaitons nous opposer à la baisse de la redevance nationale du permis de chasse.
En effet, après avoir rencontré la Fédération nationale des chasseurs en août dernier, le Président de la République a annoncé que le Gouvernement allait diminuer de moitié le prix du permis national annuel de chasse, celui-ci passant de 400 à 200 euros.
Pour permettre cette baisse, le présent article fait passer la redevance cynégétique nationale annuelle de 197,50 euros à 44,50 euros, la redevance temporaire pour neuf jours de 118,10 euros à 31 euros et la redevance temporaire pour trois jours de 59 à 22 euros. Dans le même temps, les redevances cynégétiques départementales sont légèrement relevées, afin de les aligner sur les redevances nationales.
La principale conséquence de cette décision est financière. Le coût de cette mesure est de l’ordre de 27 millions d’euros – vous me confirmerez ce chiffre, madame la secrétaire d’État –, soit une perte de recettes de 21 millions d’euros pour l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. À l’heure où l’on se plaint de la disette budgétaire, comment faire l’impasse sur une telle somme ?
Plus globalement, nous nous inquiétons de voir que les moyens consacrés à la police de la chasse et à la préservation de la faune sauvage, lesquels sont en constante diminution depuis plus de dix ans, soient encore réduits à la suite de cette nouvelle inflexion gouvernementale.
Nous craignons que les missions régaliennes que sont la police de la chasse et la protection de la biodiversité ne soient à terme transférées directement aux fédérations de chasseurs.
Nous proposons donc logiquement de supprimer cette baisse des redevances cynégétiques.
M. le président. L’amendement n° II-317 rectifié, présenté par Mmes Préville, Taillé-Polian et Conway-Mouret et M. Daudigny, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 11
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« À ces redevances, s’ajoute une contribution d’un montant fixe de 5 € au titre de la sauvegarde de la biodiversité. » ;
La parole est à Mme Angèle Préville.
Mme Angèle Préville. Le 28 août dernier, le Gouvernement a annoncé les principales mesures visant à moderniser l’organisation de la chasse et à assurer la protection de la biodiversité. Parmi ces annonces figurait la contribution d’un montant fixe de 5 euros par chasseur en faveur de la sauvegarde de la biodiversité.
L’exposé des motifs du projet de loi de finances pour 2019 mentionne à propos de l’article 75 « une contribution de 5 € par chasseur pour la biodiversité, associée à des cofinancements publics, pour financer des actions concrètes en faveur de la biodiversité et de la restauration des habitats. »
Si cette contribution figure bien dans l’exposé des motifs, elle ne se concrétise pas juridiquement dans le projet de loi de finances. Quand le Gouvernement a été interpellé à l’Assemblée nationale sur cette question, il a annoncé que le sujet serait traité dans le cadre du prochain projet de loi ordinaire relatif à la création du nouvel établissement public issu de la fusion de l’ONCFS, l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, et de l’AFB, l’Agence française pour la biodiversité. Nous estimons que ce décalage dans le temps n’est ni souhaitable ni nécessaire.
L’exposé des motifs susvisé précise bien que la baisse des redevances cynégétiques et le prélèvement sur les ressources des agences de l’eau seront compensés par cette nouvelle contribution de 5 euros.
À l’heure où l’on assiste à une baisse drastique de la biodiversité, voire à son effondrement – on parle d’une sixième extinction –, ne prenons pas de retard dans les financements indispensables. Ici, la cause est belle et le but vertueux : il s’agit d’augmenter les crédits en faveur de soutien à la biodiversité. Ne dit-on pas que les petits ruisseaux font les grandes rivières ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Sur ce dossier, je rappelle d’abord qu’un accord de financement entre l’ONCFS et l’AFB vient d’être trouvé. Il ne nous a pas échappé. Il est l’une des raisons qui ont conduit, si j’ai bien compris, au départ de Nicolas Hulot.
Ces deux amendements tendent à le remettre en cause. Or, par principe, je pense que lorsqu’un accord intervient, il doit être mis en œuvre. Ma chère collègue, on peut considérer, comme vous l’avez d’ailleurs dit, que le projet de loi ordinaire que vous visez permettra au Gouvernement, comme il s’y est engagé, de trouver un équilibre sur les modalités pratiques et de participation financière. Je lui fais confiance. Nous verrons de quelle manière les choses évoluent.
Cela étant, je rappelle qu’il va manquer 20 millions d’euros au budget de l’ONCFS, ce qui n’est pas sans soulever des interrogations au moment où l’on prépare la fusion de l’Office avec l’Agence française pour la biodiversité. Il faut pourtant que la nouvelle structure ait demain les moyens de bien travailler.
En conclusion, je demande le retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Vous l’avez rappelé, un accord global est intervenu il y a quelques semaines, afin de moderniser l’organisation de la chasse et développer la protection de la biodiversité. Cet accord prévoit notamment la réduction du prix du permis de chasse national, ce qui devrait permettre d’améliorer l’attractivité de ce permis et la mobilité des chasseurs, qui sont utiles pour maîtriser les populations de grands gibiers et réduire les dégâts que causent ces derniers.
Cet accord prévoit aussi la création d’un grand établissement de développement et de protection de la biodiversité, que nous allons proposer d’appeler l’office français de la biodiversité. Le projet de loi prévoyant sa création sera discuté cette semaine en commission à l’Assemblée nationale. Dans ce texte, nous rappelons et nous confirmons les missions régaliennes de cet établissement, que ce soit en matière de développement et de protection de la biodiversité ou de régulation de la chasse.
La remise à plat budgétaire se fera plutôt dans le projet de loi de finances pour 2020. Cette année, la baisse du prix du permis de chasse ne sera pas compensée dans le budget de l’ONCFS, son important fonds de roulement autorisant un prélèvement à titre exceptionnel pour l’exercice 2019 tout en permettant le maintien de la totalité de ses dépenses classiques et normales.
Enfin, les 5 euros de contribution sur chaque permis de chasse afin de financer des actions en faveur de la biodiversité sont bien mentionnés dans le projet de loi précité. C’est la raison pour laquelle ils ne figurent pas dans le présent projet de loi de finances.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
M. le président. Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L’amendement n° II-119 est présenté par Mme Préville, MM. Bérit-Débat, Kanner et J. Bigot, Mme Bonnefoy, M. Dagbert, Mme M. Filleul, MM. Houllegatte, Jacquin et Madrelle, Mme Tocqueville et les membres du groupe socialiste et républicain.
L’amendement n° II-151 rectifié est présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéas 13 à 17
Supprimer ces alinéas.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Angèle Préville, pour présenter l’amendement n° II-119.
Mme Angèle Préville. L’article 75, en ses alinéas 13 à 17, modifie les modalités de répartition des contributions des agences de l’eau à l’Agence française pour la biodiversité et à l’ONCFS. Il vient ainsi rompre avec le principe, de plus en plus détourné, selon lequel « l’eau paie l’eau ». De manière générale, la pédagogie relative aux taxes doit être plus claire si on veut le consentement. Il faut pour cela affecter le produit d’une taxe à ce à quoi elle est destinée.
En matière de fiscalité, trois maîtres-mots doivent prévaloir : transparence, justice, efficacité.
Les agences de l’eau n’ont pas à compenser la diminution des redevances cynégétiques mise en œuvre dans le présent article. Selon certains chiffrages, le montant à compenser pourrait s’élever à 21 millions d’euros.
Cette situation est d’autant plus anormale que le budget des agences de l’eau est de plus en plus contraint et qu’il paraît nécessaire aujourd’hui de le sanctuariser. Or, dans le cadre du plan 2019-2024, le plafond des recettes a été fixé à 12,6 milliards d’euros sur six ans, soit une baisse de 1 milliard d’euros par rapport à la période 2013-2018.
Les missions des agences de l’eau sont pourtant grandissantes et les besoins sur nos territoires impérieux, car il est nécessaire de poursuivre les travaux d’assainissement, de rénovation et de mise en conformité des réseaux pour lutter contre les pollutions et préserver les ressources en eau. Partout en France, notamment dans les territoires ruraux, des communes et des collectivités territoriales ont besoin et espèrent des subventions des agences de l’eau pour pouvoir boucler financièrement leurs projets et mener à bien leurs travaux.
Les enjeux sont considérables. Ainsi, à titre d’exemple, dans le bassin Adour-Garonne, alors que Bordeaux et Toulouse comptent chacune 15 000 habitants supplémentaires par an, que les périodes de sécheresse se reproduisent, année après année, il est urgent d’anticiper un avenir qui pourrait se révéler très problématique.
Les agences de l’eau ont la responsabilité de prévoir d’importants investissements, et elles le font, tout comme les élus des communes et des communautés de communes, car ils se préoccupent du bien commun.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous proposons la suppression des alinéas visés.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour présenter l’amendement n° II-151 rectifié.
M. Guillaume Gontard. Nous l’avons rappelé, nous sommes très attachés au principe selon lequel « l’eau paie l’eau ». Ce principe est pourtant largement bafoué depuis plusieurs années. En effet, les agences de l’eau subissent une double peine.
En premier lieu, un plafond dit « mordant » est instauré chaque année, qui permet de réaffecter les ressources vers le budget général, comme le prévoit l’article 29 du présent projet de loi de finances. Nous avions déposé des amendements visant à supprimer ce plafond mordant ; ils ont malheureusement et abusivement été déclarés irrecevables. Nous le déplorons.
En second lieu, un prélèvement est opéré sur les ressources des agences pour financer l’Agence française pour la biodiversité et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage, ainsi que les parcs naturels.
Les agences de l’eau, les syndicats et les associations de protection de l’environnement dénoncent cette saignée pratiquée au nom de la maîtrise des dépenses publiques.
L’eau devient ainsi une simple assiette fiscale. Pourtant, compte tenu des nombreuses missions qui incombent aux agences de l’eau, il semble nécessaire de préserver le principe selon lequel « l’eau paie l’eau ».
Cette situation est d’autant plus grave que tous les signaux de qualité de l’eau sont au rouge et que les agences de l’eau se sont déjà engagées dans des programmes ambitieux pour les six prochaines années.
Les six agences de l’eau subissent aujourd’hui une telle contrainte budgétaire qu’elles ne seront plus en capacité de remplir l’intégralité de leurs missions, alors même que celles-ci se multiplient pour faire face au réchauffement climatique.
Je rappelle que la France s’est engagée, conformément à la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages et à la directive européenne à atteindre un bon état des eaux.
Nous demandons donc la suppression des alinéas 13 à 17 de l’article 75 et le retour à une clef de financement des opérateurs de la biodiversité qui ne repose pas exclusivement sur un financement par les agences de l’eau.
M. le président. L’amendement n° II-551, présenté par MM. Kern et Longeot et Mme Billon, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 13 à 17
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
II. – Le I de l’article 135 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 est abrogé.
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean-François Longeot.
M. Jean-François Longeot. Cet amendement, qui émane de Claude Kern, a été remarquablement défendu par mon collègue Gontard.
J’insiste néanmoins à mon tour sur le fait que nous devons respecter le principe selon lequel « l’eau paie l’eau », car nos collectivités ont aujourd’hui beaucoup de mal à financer leurs projets.
Il est effectivement important que l’on revienne sur ce système, qui donne lieu à des dérives. Sur nos factures d’eau, la redevance n’est pas bien affectée.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Ce sujet reste sensible.
La loi de finances pour 2018 a instauré une contribution des agences de l’eau au financement des opérateurs de la biodiversité. En contrepartie, les principales subventions pour charges de service public du programme 113 ont été supprimées, traduisant un désengagement de l’État du financement de la politique de la biodiversité. Je m’étais opposé l’an passé à ce transfert de financement injustifié aux agences de l’eau, d’autant qu’il rompait, cela a été dit, avec le principe selon lequel l’eau paie l’eau et qu’il s’éloignait également du principe du pollueur-payeur qui préside à la politique de l’eau.
L’article 75 du projet de loi de finances pour 2019 ne revient pas sur cette contribution des agences de l’eau, mais il propose de nouvelles modalités de répartition de la contribution entre les agences.
À ce jour, la clef de répartition de la contribution entre les agences est déterminée en fonction de la part du total des redevances. Cette modalité de répartition a eu pour effet de favoriser les agences de l’eau situées dans les zones peuplées, au détriment des agences de l’eau situées en zone rurale.
Il est proposé que, chaque année, un arrêté conjoint des ministres chargés de l’écologie et du budget fixe le montant de cette contribution et la répartisse entre les agences de l’eau en fonction du potentiel économique du bassin hydrographique, pondéré par l’importance relative de sa population rurale.
L’adoption des amendements que nous examinons aurait pour conséquence de supprimer les nouvelles modalités de répartition de la contribution entre agences, mais elle n’entraînerait pas la suppression de la contribution des agences de l’eau aux opérateurs de la biodiversité, contrairement à l’intention de leurs auteurs.
Cette nouvelle clé de répartition de la contribution m’apparaît comme un moindre mal, dans la mesure où elle entend réduire la charge imposée aux bassins les moins favorisés. Par ailleurs, les agences de l’eau et les comités de bassin ont d’ores et déjà adopté le onzième programme d’intervention.
Pour cette raison, je ne souhaite pas m’opposer à cette mesure et je sollicite le retrait des deux amendements identiques. À défaut, l’avis sera défavorable.
L’amendement n° II-551 est plus abouti, mais les opérateurs n’auraient plus de ressources, faute de financement. En conséquence, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Je partage l’avis de M. le rapporteur. Cet article permet de répartir plus justement la contribution entre les agences de l’eau, selon une nouvelle clé de répartition définie après une très large concertation avec les comités de bassin et les agences.
Je vous rassure toutefois sur un point, mesdames, messieurs les sénateurs : il n’y aura pas de prélèvement supplémentaire à cette occasion, puisque nous sommes à ressources constantes.
En conséquence, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-119 et II-151 rectifié.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
M. le président. Je mets aux voix l’article 75.
(L’article 75 est adopté.)
Article 76
L’article L. 213-10-8 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le II est ainsi rédigé :
« II. – L’assiette de la redevance est la masse de substances contenues dans les produits mentionnés au I :
« 1° Appartenant, en raison de leur cancérogénicité, de leur mutagénicité sur les cellules germinales ou de leur toxicité pour la reproduction, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n° 1907/2006 ;
« 2° Appartenant, en raison de leur toxicité aiguë de catégorie 1, 2 ou 3 ou en raison de leur toxicité spécifique pour certains organes cibles, de catégorie 1, à la suite d’une exposition unique ou après une exposition répétée, soit en raison de leurs effets sur ou via l’allaitement, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 précité ;
« 3° Appartenant, en raison de leur toxicité aiguë pour le milieu aquatique de catégorie 1 ou de leur toxicité chronique pour le milieu aquatique de catégorie 1 ou 2, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 précité ;
« 4° Appartenant, en raison de leur toxicité chronique pour le milieu aquatique de catégorie 3 ou 4, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 précité ;
« 5° Qui ne répondent pas aux critères des paragraphes 3.6 et 3.7 de l’annexe II au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil mais qui sont encore commercialisées ;
« 6° Dont on envisage la substitution au sens de l’article 24 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 précité.
« Un arrêté conjoint des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture fixe la liste des substances relevant des 1° à 6° du présent II. » ;
2° Les trois premiers alinéas du III sont remplacés par cinq alinéas ainsi rédigés :
« III. – Le taux de la redevance, exprimé en euros par kilogramme, est fixé selon le tableau suivant :
« |
Substances |
Taux (en euros par kg) |
|
Substances relevant du 1° du II |
9,0 |
||
Substances relevant du 2° du II |
5,1 |
||
Substances relevant du 3° du II |
3,0 |
||
Substances relevant du 4° du II |
0,9 |
||
Substances relevant du 5° du II |
5,0 |
||
Substances relevant du 6° du II |
2,5 |
« Lorsqu’une substance relève de plusieurs catégories mentionnées aux 1° à 4° du II, le taux de redevance appliqué est le plus élevé parmi les catégories dont elle relève.
« Lorsqu’une substance relève de plusieurs catégories mentionnées aux 5° et 6° du même II, le taux de redevance appliqué est le plus élevé parmi les catégories dont elle relève.
« Lorsqu’une substance relève d’une ou de plusieurs catégories mentionnées aux 1° à 4° et aux 5° et 6° dudit II, le taux retenu est la somme des taux calculés en application des troisième et quatrième alinéas du présent III. »
M. le président. L’amendement n° II-91 rectifié, présenté par MM. Gremillet, H. Leroy et Genest, Mme Deroche, MM. Magras, Pierre, Bonhomme, Cuypers, Poniatowski, Longuet, B. Fournier, Babary, Savary, Pillet et Sido, Mmes Gruny et A.M. Bertrand, M. Revet, Mmes Lassarade et Morhet-Richaud, M. Pellevat, Mme Micouleau, MM. Chaize et Raison, Mme Deromedi, M. Lefèvre, Mme Bruguière, M. Vogel, Mme L. Darcos, M. Mouiller, Mme M. Mercier, M. Cardoux, Mmes Chain-Larché et Thomas, M. Savin, Mme Imbert et MM. Mayet, de Nicolaÿ, Morisset, Moga et D. Laurent, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Daniel Gremillet.
M. Daniel Gremillet. Aujourd’hui, nous avons la preuve que la redevance pour pollutions diffuses payée par les agriculteurs n’apporte pas de réponses concrètes à la problématique des produits phytosanitaires.
L’augmentation prévue, qui consisterait à faire supporter, encore une fois, un peu plus de fiscalité aux seuls agriculteurs, pénaliserait encore un peu plus l’agriculture.
Il y a en outre une certaine incohérence à augmenter cette taxe, alors que le Gouvernement – nous l’avons dit au ministre de l’agriculture – n’a pris aucune mesure concrète sur les produits de biocontrôle. Aujourd’hui, de nombreuses entreprises françaises sont prêtes à commercialiser ce type de produits, mais, faute d’agrément, elles ne le peuvent pas.
C’est donc pour éviter une double peine que je présente cet amendement de suppression.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. La révision de l’assiette et des taux de la redevance pour pollutions diffuses est issue des États généraux de l’alimentation. On peut comprendre qu’il est nécessaire de faire évoluer les pratiques agricoles.
La redevance augmente, certes, mais de manière modérée, et je crois aussi savoir qu’elle doit servir à financer des aides pour que les agriculteurs aient un mode de production plus respectueux de l’environnement.
Pour cette raison, la commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, son avis sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Le Gouvernement partage l’avis du rapporteur.
Cette mesure est issue des États généraux de l’alimentation et elle a vocation à financer des aides à la conversion, notamment au bio.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. J’ai bien fait de rester… (Sourires.) Vous dites, madame la secrétaire d’État, que cette taxe va financer la conversion au bio. On croit rêver ! C’est même une insulte vis-à-vis du monde paysan !
Nous avons débattu dans cet hémicycle du compte d’affection spéciale « Développement agricole et rural », ou CASDAR, des fonds destinés au développement de l’agriculture et payés à 100 % par les paysans. Pas un centime n’est payé par l’État. Or cet argent est souvent confisqué ; il n’est pas nécessairement orienté vers l’objet que vous venez d’évoquer, madame la secrétaire d’État.
J’étais prêt à retirer cet amendement au profit de l’amendement de repli qui suit et qui vise une augmentation d’une taxe acquittée non par les agriculteurs, mais par les entreprises. Aujourd’hui, les producteurs sont complètement exemptés du paiement de cette contribution, et vous pouvez leur faire confiance pour en répercuter le coût sur les agriculteurs.
Nous sommes en panne sur les produits de substitution. Je le redis : de nombreuses entreprises investissent en France sur les produits de biocontrôle, mais elles n’obtiennent pas d’autorisation de mise sur le marché. Vous prenez en otage les agriculteurs ! Je maintiens mon amendement.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. À entendre l’explication de vote de Daniel Gremillet, il semblerait que votre réponse soit plutôt vécue comme une provocation, madame la secrétaire d’État.
Je pensais, moi aussi, qu’il s’agissait d’un amendement d’appel et qu’une solution serait proposée à travers l’amendement suivant.
Je me dis que vous avez peut-être commis une erreur, madame la secrétaire d’État, et qu’il est encore temps de la réparer. On vous laisse une deuxième chance…
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Je crois aux deuxièmes chances, et je vais essayer de saisir celle-ci.
Tout d’abord, je le rappelle, cette mesure est issue des États généraux de l’alimentation. Le Gouvernement s’est engagé à lutter contre ces substances, notamment dans le plan Écophyto, et c’est la raison pour laquelle nous proposons de modifier cette redevance pour pollutions diffuses. Son produit sera versé directement aux agences de l’eau, à charge pour elles de conduire des actions d’appui à la conversion agricole.
Celles-ci, au demeurant, ne se limiteront pas au bio. L’idée est de soutenir une agriculture plus durable ou plus régénératrice, et les agences de l’eau utiliseront le produit de cette redevance au bénéfice de différentes formes d’agriculture. Cette redevance contribuera donc à la conversion agricole dans son ensemble, le bio n’étant qu’un exemple parmi d’autres.
Quoi qu’il en soit, je ne prétends pas répondre à travers cette mesure précise à la question de la transition agricole dans son ensemble. C’est un sujet plus large, qui devra être traité avec mon collègue ministre de l’agriculture et l’ensemble des parties prenantes.
L’avis du Gouvernement reste défavorable sur cet amendement.
M. Daniel Gremillet. Je retire mon amendement !
M. le président. L’amendement n° II-91 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-321 rectifié est présenté par M. Duplomb, Mme Férat, M. Bascher, Mmes A.M. Bertrand et Bonfanti-Dossat, M. Bonhomme, Mme Bories, MM. J.M. Boyer, Brisson et Charon, Mme Chauvin, M. Chevrollier, Mme L. Darcos, MM. Darnaud et Daubresse, Mme de la Provôté, M. de Nicolaÿ, Mme Deromedi, M. Détraigne, Mme Di Folco, MM. B. Fournier et Genest, Mme Goy-Chavent, MM. Grand et Gremillet, Mmes Gruny et Keller, MM. Kennel et Kern, Mme Lanfranchi Dorgal, MM. D. Laurent et Lefèvre, Mme Loisier, MM. Longeot, Louault, Mandelli, Mayet et Moga, Mmes Morin-Desailly et Morhet-Richaud, M. Morisset, Mme Noël, M. Pellevat, Mme Perrot, MM. Pierre, Poniatowski, Reichardt, Revet, Savary, Schmitz, Sol et Vogel et Mme Vullien.
L’amendement n° II-561 est présenté par M. Cabanel et Mme Tocqueville.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le IV de l’article L. 253-8-2 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Les mots : « , plafonné à 0,3 % du chiffre d’affaires mentionné au III, » sont supprimés ;
2° Sont ajoutés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur des produits mentionnés au I contenant des substances appartenant, en raison de leur cancérogénicité ou de leur mutagénicité sur les cellules germinales ou de leur toxicité pour la reproduction, à une classe de danger prévue par le règlement (CE) n° 1272/2008 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relatif à la classification, à l’étiquetage et à l’emballage des substances et des mélanges, modifiant et abrogeant les directives 67/548/CEE et 1999/45/CE et modifiant le règlement (CE) n° 1907/2006, le taux est plafonné à 10 % du chiffre d’affaires mentionné au III du présent article.
« Lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur des produits qui ne répondent pas aux critères des paragraphes 3.6 et 3.7 de l’annexe II au règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil mais qui sont encore commercialisées ou dont on envisage la substitution au sens de l’article 24 du règlement (CE) n° 1107/2009 du Parlement européen et du Conseil du 21 octobre 2009 précité, le taux est plafonné à 5 % du chiffre d’affaires mentionné au III du présent article.
« Lorsque l’autorisation de mise sur le marché ou le permis de commerce parallèle porte sur un produit de biocontrôle figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 253-5, le taux prévu au présent IV est plafonné à 0,1 % du chiffre d’affaires mentionné au III du même article.
« Pour les autres produits, le taux est plafonné à 0,3 % du chiffre d’affaires mentionné au III. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État due au remplacement de la majoration de la redevance pour pollutions diffuses par une augmentation de la taxe due par les fabricants de produits phytosanitaires sur leurs ventes est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° II-321 rectifié.
M. Daniel Gremillet. Comme je l’ai expliqué précédemment, cet amendement de repli vise à faire supporter l’augmentation de redevance, non pas aux agriculteurs, mais aux industriels qui fabriquent les produits phytosanitaires.
On risque certes d’assister à une refacturation aux agriculteurs, mais l’avantage de cet amendement est de flécher précisément l’utilisation de cet argent vers la recherche et à l’innovation. Cette taxe complémentaire supportée par la filière et les agriculteurs bénéficierait donc à la recherche sur les produits de substitution.
La mise en œuvre de la loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, dite loi ÉGALIM, montre toutefois que nous sommes très forts pour instaurer des taxes nouvelles, mais bien plus faibles pour accorder des moyens supplémentaires à l’agriculture au regard des ambitions des États généraux de l’alimentation. Le budget pour 2019, très pauvre en la matière, ne traduit pas ces engagements.
M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour présenter l’amendement n° II-561.
M. Henri Cabanel. Madame la secrétaire d’État, ce matin, votre collègue a parlé du principe pollueur-payeur. Les agriculteurs emploient des produits phytopharmaceutiques, mais sont-ils les seuls pollueurs ?
L’augmentation de la redevance que propose le Gouvernement ne concernerait pas ceux qui fabriquent ces produits, alors que ce sont pourtant les premiers pollueurs. L’agriculteur, lui, n’a pas le choix. Il dépend directement de la volonté du fabricant de réaliser des produits plus ou moins dangereux.
Vous avez rectifié votre erreur, madame la secrétaire d’État : en effet, l’agriculture biologique n’est pas seule concernée.
Dans ma famille, nous sommes viticulteurs de père en fils. Mon père et mon grand-père étaient des viticulteurs bio sans le savoir, puisqu’ils n’employaient que des matières actives naturelles. Puis l’industrie chimique est arrivée, avec de nouvelles molécules permettant aux agriculteurs de traiter leurs cultures plus facilement. Et nous sommes passés de trois traitements à six, sept, voire huit.
Vous le constatez, mes chers collègues, il est nécessaire de faire reposer cette taxe sur les fabricants, car cela les incitera à chercher d’autres produits de substitution, moins dangereux, qui permettront aux agriculteurs de mettre en œuvre l’agriculture durable à laquelle ils aspirent tous.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. J’émets un avis de sagesse sur cet amendement, sous réserve d’une rectification de sorte que l’augmentation de la redevance pour pollutions diffuses soit associée à la hausse proposée en l’espèce.
Il s’agirait, au premier alinéa, de remplacer les mots « Rédiger ainsi cet article » par les mots « Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés ». De cette manière, les agriculteurs comme les fabricants seraient contributeurs, les uns et les autres étant placés devant leurs responsabilités.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Je comprends la logique de cet amendement, qui vise à faire peser la contrainte sur le metteur sur le marché. Toutefois, comme l’a dit M. Gremillet, si l’on renchérit le prix des produits, il est assez probable que, par le jeu du marché, les agriculteurs soient de facto amenés à payer la part supplémentaire.
Or, dans le mécanisme proposé, le produit de cette taxe n’est plus affecté aux agences de l’eau, dans le but de financer ensuite des actions au bénéfice de la transition agricole, mais à un autre dispositif de vigilance, certes utile, mais qui ne se traduira pas en actions concrètes.
C’est la raison pour laquelle je ne suis pas favorable à ces deux amendements identiques. Je suis également réservée sur la proposition du rapporteur. Même si l’augmentation est répartie entre les agriculteurs et les metteurs sur le marché, j’ai peur que la charge finale des agriculteurs ne soit de facto alourdie.
Enfin, sur les États généraux de l’alimentation et notre prétendu manque de célérité dans l’accompagnement des agriculteurs, je signale que le ministère de la transition écologique et solidaire et le ministère de l’agriculture et de l’alimentation vont mettre en œuvre la prestation pour service écologique rendu. Nous avons prévu 150 millions d’euros pour financer les actions des agriculteurs en faveur de la transition agricole et pour anticiper ce que nous espérons être la future réforme de la PAC.
M. le président. Monsieur Gremillet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens proposé par la commission ?
M. Daniel Gremillet. Nous ne souhaitons pas modifier notre amendement, car cela reviendrait à infliger une double peine aux agriculteurs. On sait pertinemment que les fabricants répercuteront une grande part du coût de la taxe sur les agriculteurs. Mais si nous adoptons la rédaction proposée par la commission, ces derniers payeront deux fois !
Madame la secrétaire d’État, quelles que soient nos sensibilités politiques, nous avons été nombreux dans cet hémicycle à nous émouvoir de la ponction opérée sur les agences de l’eau. Souvenez-vous, ce n’est pas si lointain ! Cette ponction s’est faite au détriment de la politique territoriale des agences auprès des communes, mais aussi des industriels et des agriculteurs.
Il est donc stratégique que l’utilisation de cette redevance soit correctement fléchée vers la recherche et l’innovation en matière de produits de substitution. Nous en revenons, de fait, au débat d’actualité sur les taxes détournées de leur objet.
Quant à votre dernière remarque sur la compensation pour services rendus, madame la secrétaire d’État, je vous accorde un bon point ! C’est un débat que nous devons ouvrir, en France, mais aussi à l’occasion de la réforme de la politique agricole commune.
Je maintiens donc l’amendement n° II-321 rectifié en l’état.
M. le président. Monsieur Cabanel, suivez-vous la décision de votre collègue ?
M. Henri Cabanel. Monsieur le rapporteur, si l’on acceptait votre proposition, l’augmentation serait supportée par les agriculteurs, qui la payent déjà, et par les fabricants, qui ne la payent pas !
Les fabricants répercuteront peut-être une partie du prix sur les agriculteurs, mais, contrairement à la situation actuelle, ils participeront à la contribution, en espérant qu’ils trouvent des matières de substitution permettant à l’agriculteur d’avoir, demain, un réel choix.
Enfin, madame la secrétaire d’État, sachez que, sur l’initiative du groupe socialiste et républicain, nous débattrons le 12 décembre prochain au Sénat de la création de paiements pour services environnementaux rendus par les agriculteurs. Cette proposition de résolution permettra aux citoyens de comprendre que les agriculteurs ne sont pas là pour polluer, mais au contraire pour rendre des services environnementaux à la société.
M. le président. Monsieur le rapporteur spécial, maintenez-vous l’avis de sagesse de la commission en dépit du refus de votre proposition de rectification ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Oui, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Olivier Jacquin, pour explication de vote.
M. Olivier Jacquin. Je n’ai pas parfaitement saisi les subtilités de la proposition du rapporteur. J’ai aussi le sentiment qu’elle reviendrait à infliger une double peine à propos de cette redevance pour pollutions diffuses.
Puisqu’on parle en l’occurrence de fiscalité écologique, il s’agit bien de faire payer les externalités négatives de l’agriculture conventionnelle. Son impact sur la qualité des eaux, en particulier, est manifeste.
Je veux réagir à l’envolée de mon collègue Daniel Gremillet et revenir sur la très nette diminution des soutiens à l’agriculture biologique. Nombreux sont ceux qui opposent les différents types d’agriculture, et c’est dommage. En effet, les agricultures conventionnelles, bio et autres sont complémentaires, en fonction de la quantité de produits demandés.
En condamnant de cette manière l’agriculture bio, en empêchant la reconversion des terres, outre que certains n’ont pas compris le sens de l’histoire, on commet une double erreur d’un point de vue économique. D’une part, on favorise l’importation de produits biologiques. D’autre part, les terres non converties en biologique viennent saturer le marché conventionnel.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-321 rectifié et II-561.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. En conséquence, l’article 76 est ainsi rédigé.
M. Daniel Gremillet. Très bien !
Article 76 bis (nouveau)
La première phrase du e du 2° de l’article L. 121-7 du code de l’énergie est ainsi modifiée :
1° Les mots : « supportés par un producteur ou un fournisseur » sont supprimés ;
2° Après la référence : « L. 141-5 », sont insérés les mots : « , supportés par un producteur ou un fournisseur ou à l’initiative du représentant de l’État dans le département ou du gestionnaire de réseau, » ;
3° Après la référence : « 2° », sont insérés les mots : « ou à un surcoût d’achat d’électricité au titre du c ». – (Adopté.)
Article 76 ter (nouveau)
La deuxième phrase de l’article L. 122-5 du code de l’énergie est supprimée. – (Adopté.)
Article 76 quater (nouveau)
I. – L’article L. 213-11-10 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, le mot : « trois » est remplacé par le mot : « quatre » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque leur montant excède 1 000 euros, les redevances sont acquittées par prélèvement ou virement. Si l’agence de l’eau en charge du recouvrement l’autorise, ces redevances peuvent également être acquittées par télérèglement ou télépaiement. »
II. – Le I s’applique aux paiements effectués à compter du 1er janvier 2019. – (Adopté.)
Article 76 quinquies (nouveau)
I. – L’article 128 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, le montant : « 125 » est remplacé par le montant : « 105 » ;
2° Il est ajouté un 4° ainsi rédigé :
« 4° Par dérogation au 1° et jusqu’au 31 décembre 2023, le taux maximal d’intervention est fixé à 60 % dans la zone du territoire français la plus exposée au risque sismique, définie par décret en application de l’article L. 563-1 du code de l’environnement, pour les études et travaux de prévention du risque sismique relatifs aux établissements d’enseignement scolaire. »
II. – L’article 136 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006 est ainsi modifié :
1° La première phrase du I est ainsi rédigée : « Dans la limite de 17 millions d’euros par an, les dépenses afférentes à la préparation et à l’élaboration des plans de prévention des risques naturels prévisibles, aux actions d’information préventive sur les risques majeurs et à l’élaboration et la mise à jour des cartes des surfaces inondables et des cartes des risques d’inondation prévues à l’article L. 566-6 du code de l’environnement peuvent être financées par le fonds de prévention des risques naturels majeurs mentionné à l’article L. 561-3 du même code. » ;
2° Le IV est ainsi rédigé :
« IV. – Dans la limite de 13 millions d’euros par an et jusqu’au 31 décembre 2023, dans la zone du territoire français la plus exposée au risque sismique, définie par décret en application de l’article L. 563-1 du code de l’environnement, le fonds de prévention des risques naturels majeurs peut contribuer au financement :
« 1° Des études et travaux de prévention du risque sismique pour les bâtiments, équipements et installations nécessaires au fonctionnement des services départementaux d’incendie et de secours et dont ces services assurent la maîtrise d’ouvrage, y compris lorsque les travaux portent sur des biens mis à disposition par les collectivités territoriales ou leurs groupements. Le taux maximal d’intervention est fixé à 50 % pour les études, travaux, ouvrages ou équipements de prévention pour les communes où un plan de prévention des risques naturels prévisibles est approuvé ou appliqué par anticipation conformément à l’article L. 562-2 du même code. Il est fixé à 50 % pour les études et à 40 % pour les travaux, ouvrages ou équipements de prévention pour les communes où un plan de prévention des risques naturels prévisibles est prescrit ;
« 2° Des travaux de confortement des habitations à loyer modéré mentionnées au livre IV du code de la construction et de l’habitation. Le taux maximal d’intervention est fixé à 35 %. » ;
3° Le V est abrogé ;
4° Le début du VI est ainsi rédigé : « Dans la limite de 75 millions d’euros à partir du 1er janvier 2019 et jusqu’au 31 décembre 2023, le fonds… (le reste sans changement). » ;
5° Au VII, l’année : « 2018 » est remplacée par l’année : « 2019 » ;
6° Le VIII est abrogé ;
7° Il est ajouté un XI ainsi rédigé :
« XI. – Dans la limite de 5 millions d’euros par an et jusqu’au 31 décembre 2023, dans la zone du territoire français la plus exposée au risque sismique, définie par décret en application de l’article L. 563-1 du code de l’environnement, le fonds de prévention des risques naturels majeurs peut contribuer au financement des études et travaux de prévention du risque sismique pour les immeubles domaniaux utiles à la gestion de crise. Le taux maximal d’intervention est fixé à 50 %. »
III. – Le I de l’article L. 561-3 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Le 6° est ainsi modifié :
a) À la première phrase du a, après le mot : « propriétaires », sont insérés les mots : « , exploitants ou utilisateurs » ;
b) Le b est ainsi rédigé :
« b) Le montant de la participation du fonds est plafonné à :
« – 80 % des 10 % de la valeur vénale ou estimée du bien, s’agissant d’un bien à usage d’habitation ou à usage mixte ;
« – 20 % des 10 % de la valeur vénale ou estimée du bien, s’agissant d’un bien utilisé dans le cadre d’activités professionnelles.
« La valeur vénale ou estimée du bien est constatée à la date de réalisation de l’étude de diagnostic de vulnérabilité aux inondations ; »
2° Au dernier alinéa, le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 80 % ».
M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques.
L’amendement n° II-427 rectifié bis est présenté par MM. Mandelli, Retailleau et Vaspart, Mme Bruguière, M. de Nicolaÿ, Mme L. Darcos, MM. Mouiller, Chaize, Kennel, Perrin, Raison, B. Fournier, Grand, Chevrollier et Pellevat, Mme Deseyne, M. Babary, Mme Bories, MM. Charon et Darnaud, Mmes Morin-Desailly, Gruny, M. Mercier et Puissat, M. Danesi, Mmes Deromedi et Noël, M. Marseille, Mme Lamure et MM. Poniatowski et Bazin.
L’amendement n° II-557 est présenté par MM. Bignon, Capus, Decool, Guerriau, Lagourgue, Malhuret, Chasseing, Wattebled et A. Marc et Mme Mélot.
L’amendement n° II-581 est présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 2
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Didier Mandelli, pour présenter l’amendement n° II-427 rectifié bis.
M. Didier Mandelli. Le Fonds de prévention des risques naturels majeurs, ou fonds Barnier, a été créé il y a un peu plus de vingt ans. Il est alimenté par les cotisations de chacun d’entre nous, entreprises, collectivités et particuliers, dans le cadre d’une taxe additionnelle sur les fonds relatifs aux catastrophes naturelles et, comme son nom l’indique, il finance des actions de prévention de ces risques.
En 2017, le Gouvernement avait ponctionné 55 millions d’euros sur ce fonds, dont le montant global avoisine 210 millions d’euros. L’an dernier, madame la secrétaire d’État, votre gouvernement a ponctionné 71 millions d’euros, en intégrant un mécanisme désormais bien connu, la fixation d’un plafond à 137 millions d’euros.
Cette année, l’imagination n’a pas de limite : non seulement ce fonds est de nouveau plafonné, à 125 millions d’euros cette fois, mais vous intégrez également un mécanisme de fonds de roulement, à hauteur de 20 millions d’euros, pour diminuer encore le plafond à 105 millions d’euros.
À n’en pas douter, ce fonds de roulement sera aussi utilisé pour combler les déficits qui pourront subvenir par ailleurs.
Ces 110 millions d’euros ponctionnés cette année sont à rapprocher des 7 millions d’euros prévus dans l’amendement relatif à l’immeuble Le Signal.
Dans mon département, la Vendée, qui a connu la tempête Xynthia, comme nos voisins de Charente-Maritime et tout le littoral atlantique, le montant des travaux prévus pour mettre à niveau et assurer une réelle protection de nos côtes, de nos biens et de nos concitoyens s’élève à 100 millions d’euros. Sur ces crédits, 35 millions d’euros ont déjà été consommés, les 65 millions d’euros restants n’ayant malheureusement pas pu être utilisés compte tenu des retards et des délais de procédure. Il reste donc 65 millions d’euros à financer, pour le seul département de la Vendée, simplement pour « se protéger ». Imaginons les montants nécessaires pour mettre en œuvre les plans de prévention des risques d’inondation sur tout le territoire !
Les besoins seront immenses demain. Ponctionner une nouvelle fois, à un tel niveau, le Fonds de prévention des risques naturels majeurs est une erreur historique au regard des catastrophes qui s’annoncent.
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon, pour présenter l’amendement n° II-557.
M. Jérôme Bignon. Je reprends les explications de M. Mandelli pour le compte du groupe Les Indépendants – République et Territoires.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial, pour présenter l’amendement n° II-581.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Le fonds Barnier est plafonné différemment en recettes et en dépenses.
En recettes, il est plafonné à 137 millions d’euros.
En dépenses, il est plafonné par catégories de dépenses et la somme des différents sous-plafonds est supérieure à 137 millions d’euros, en raison des mécanismes de trésorerie et de décalage dans le temps.
Ces amendements ont trait au sous-plafond de dépenses portant sur la partie générale des plans de prévention des risques des collectivités, aujourd’hui fixé à 125 millions d’euros. Le Gouvernement souhaite le ramener à 105 millions, sachant qu’il existe d’autres sous-plafonds de dépenses en hausse, en particulier pour ce qui concerne les digues domaniales ou pour faire face aux suites des séismes aux Antilles et des inondations dans l’Aude.
Il nous paraît possible de plafonner le sous-plafond de dépenses sur la partie générale des plans de prévention à 105 millions d’euros, car, en moyenne, sur les dernières années, les dépenses se sont élevées à 90 millions d’euros. Ce plafonnement ne devrait donc pas poser de problème en exécution.
C’est la raison pour laquelle le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-427 rectifié bis, II-557 et II-581.
(Les amendements sont adoptés.)
M. le président. L’amendement n° II-553, présenté par M. Mandelli, est ainsi libellé :
I. – Après l’alinéa 2
Insérer trois alinéas ainsi rédigés :
…° La première phrase du 1° est ainsi modifiée :
a) Après les mots : « équipements de prévention », sont insérés les mots : « à l’exception des mesures de réduction de la vulnérabilité des biens d’habitation pouvant prétendre à un taux de 80 % ».
b) Le taux : « 40 % » est remplacé par le taux : « 60 % » ;
II. - Alinéa 6
Remplacer le nombre :
17
par le nombre :
20
La parole est à M. Didier Mandelli.
M. Didier Mandelli. Cet amendement porte toujours sur le Fonds de prévention des risques naturels majeurs. L’objectif est de flécher, au sein de ce fonds, les dépenses afférentes à la préparation et à l’élaboration des plans de prévention, qui vont monter en puissance.
Nous proposons de fixer à 20 millions d’euros le montant de ces dépenses. Le plafond était établi à 26 millions d’euros, mais vous voulez l’abaisser à 17 millions d’euros cette année.
Cet amendement vise en outre à porter la part de financement de 40 % à 60 % pour accompagner encore plus fortement les collectivités et les acteurs qui mettent en œuvre ces travaux.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Nous sollicitons l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Sur le plafonnement, le Gouvernement reste défavorable, pour les raisons que j’ai indiquées précédemment. Le plafond de 17 millions d’euros est supérieur à la dépense annuelle constatée sur tous les exercices allant de 2013 à 2017.
En ce qui concerne le taux de subventionnement, une question de principe se pose. S’il était porté à 60 %, le taux de subvention des dépenses de réparation serait supérieur au taux de subvention des dépenses de prévention, fixé à 40 %. Ce ne serait pas un bon signal adressé aux collectivités.
Pour ces deux raisons, l’avis du Gouvernement est défavorable.
M. le président. Quel est finalement l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Sagesse.
M. le président. Je mets aux voix l’article 76 quinquies, modifié.
(L’article 76 quinquies est adopté.)
budget annexe : contrôle et exploitation aériens
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens », figurant à l’état C.
ÉTAT C
(En euros) |
||
Mission/Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Contrôle et exploitation aériens |
2 122 031 925 |
2 122 031 925 |
Soutien aux prestations de l’aviation civile |
1 507 437 897 |
1 507 437 897 |
dont charges de personnel |
1 212 396 147 |
1 212 396 147 |
Navigation aérienne |
572 223 059 |
572 223 059 |
Transports aériens, surveillance et certification |
42 370 969 |
42 370 969 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Capo-Canellas, rapporteur spécial. Pour la clarté des débats, je rappelle que la commission des finances est favorable à l’adoption des crédits du présent budget annexe « Contrôle et exploitation aériens ».
M. le président. Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : aides à l’acquisition de véhicules propres
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Aides à l’acquisition de véhicules propres |
860 000 000 |
860 000 000 |
Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres |
264 000 000 |
264 000 000 |
Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants |
596 000 000 |
596 000 000 |
M. le président. L’amendement n° II-152, présenté par M. Gontard, Mme Assassi et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Soutien au plan vélo
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres |
|
82 000 000 |
|
82 000 000 |
Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants |
|
100 000 000 |
|
100 000 000 |
Soutien au plan vélo |
182 000 000 |
|
182 000 000 |
|
TOTAL |
182 000 000 |
182 000 000 |
182 000 000 |
182 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Guillaume Gontard.
M. Guillaume Gontard. Par cet amendement simple, nous demandons l’élargissement de l’utilisation de la prime à la conversion à l’acquisition d’un vélo.
Aujourd’hui, les marges de manœuvre existent. En effet, le présent compte d’affectation spéciale est alimenté par le bonus-malus, dont les recettes ont cru pour cette année de 182 millions d’euros.
Nous proposons donc, et dans la continuité des annonces du Gouvernement sur un plan Vélo dans le cadre du Grand Plan d’investissement, une ligne spécifique pour l’aide à l’acquisition d’un vélo, dotée de ce supplément de recettes.
Sur le fond, nous considérons que la conversion du parc automobile au tout électrique n’est pas une politique écologique suffisamment ambitieuse. En effet, si cette conversion vise à limiter les effets des gaz à effet de serre – ce n’est même pas une garantie au vu de l’explosion des ventes de gros modèles de véhicules type SUV que connaît notre pays –, elle ne remet pas en cause le nombre de véhicules individuels en circulation, et donc les problèmes de congestion automobile.
L’alternative ne peut juste se situer entre la voiture et la voiture. Il faut évidemment encourager les transports collectifs, mais également les modes doux, dont le vélo à titre principal.
D’autre part, le développement de la voiture électrique pose un certain nombre de questions, notamment sur les besoins en lithium. En 2040, on peut estimer que nous aurons environ 530 millions de véhicules électriques dans le monde, soit entre 150 et 200 fois plus qu’aujourd’hui. Or, actuellement, près de 35 % du lithium produit sur la planète sert d’ores et déjà à fabriquer des batteries et une telle conversion risque d’épuiser cette ressource à très court terme. Comment faire pour rendre un tel développement soutenable ?
Une vraie politique écologique de transition énergétique doit donc également prendre en compte la modification de nos habitudes de mobilité. Parmi elles, il paraît judicieux de financer l’achat de vélos, électriques et non électriques.
Si un vélo est un véhicule peu onéreux, le vélo électrique qui représente une solution de mobilité remarquable et les vélos particuliers du type vélo-cargo ou vélo-remorque, qui sont nécessaires pour les artisans ou les jeunes parents, sont quant à eux beaucoup plus chers et méritent de faire l’objet de cette prime.
Pour ce faire, nous proposons de créer un nouveau programme, « Soutien au plan vélo », en prélevant l’équivalent de la hausse prévue pour l’année 2019, soit 182 millions d’euros, sur les programmes 791, « Contribution au financement de l’attribution d’aides à l’acquisition de véhicules propres » et 792, « Contribution au financement de l’attribution d’aides au retrait de véhicules polluants ».
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Nous avons déjà évoqué ce sujet l’an passé. Cet amendement s’inscrit dans le cadre du soutien au plan Vélo, mais il présente un inconvénient : il vise à prélever des crédits sur le budget qui assure le remplacement des véhicules anciens par des véhicules plus propres.
Or je rappelle que ce programme fonctionne bien et que le Gouvernement a fait part de son ambition, que nous partageons, d’assurer cette mutation dans de bonnes conditions.
Ensuite, il me semble que nous devons éviter de faire en permanence des zigzags. L’an passé, nous avons réussi à faire entendre la voix de la raison dans les arbitrages budgétaires.
En ce qui concerne le plan Vélo, nous voyons bien que les collectivités prennent parfois des positions différentes. Il est vrai qu’une telle politique peut regrouper des mesures très variées, que ce soit en matière d’aménagements ou de type de vélos, électriques ou non.
C’est pourquoi nous devons concentrer les aides, là où les besoins de mutation sont les plus forts, c’est-à-dire sur les véhicules. Pour cette raison, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Même avis, monsieur le président. L’amendement est gagé sur des mesures qui financent à la fois la prime à la conversion et la voiture électrique. Or la prime à la conversion permet de passer à des voitures plus récentes, donc moins polluantes, quel que soit leur mode de combustion.
Certes, la voiture électrique pose des problèmes, comme tous les modes de fabrication d’énergie, mais elle est nettement moins polluante, lorsque l’on prend en compte l’ensemble de son cycle de vie, en particulier en termes d’émission de gaz à effet de serre.
La prime à la conversion fonctionne bien ; elle va être de nouveau élargie et nous tablons sur 300 000 primes versées l’année prochaine. Par ailleurs, la vente de véhicules électriques augmente d’environ 18 % chaque année.
Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons pas donner un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Je comprends bien les arguments avancés, mais cet amendement ne prévoit pas du tout de supprimer la prime à la conversion, qui est une bonne mesure.
Pour autant, il est nécessaire de travailler sur l’ensemble des mobilités et je ne vois pas pourquoi on pénaliserait des gens qui abandonnent leur voiture ou une de leurs voitures, notamment en ville, pour prendre un vélo, électrique ou non.
Je rappelle que, pour une famille, l’achat de vélos, notamment ceux qui sont destinés aux enfants, peut s’avérer coûteux. Je ne vois pas pourquoi nous pénaliserions ces familles par rapport aux personnes qui remplacent leur véhicule par un autre.
Il faut vraiment travailler sur la logique d’ensemble, en contribuant à modifier les habitudes. Si nous ne faisons pas cela – nous le voyons clairement avec l’actualité –, nous aurons de grandes difficultés. Faire croire que nous réglerons les problèmes en incitant uniquement les gens à changer de voiture est illusoire.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », figurant à l’état D.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale |
360 000 000 |
360 000 000 |
Électrification rurale |
355 200 000 |
355 200 000 |
Opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables ou de production de proximité dans les zones non interconnectées, déclarations d’utilité publique et intempéries |
4 800 000 |
4 800 000 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : services nationaux de transport conventionnés de voyageurs
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs |
359 200 000 |
359 200 000 |
Exploitation des services nationaux de transport conventionnés |
286 200 000 |
286 200 000 |
Matériel roulant des services nationaux de transport conventionnés |
73 000 000 |
73 000 000 |
M. le président. Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : transition énergétique
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Transition énergétique |
7 279 400 000 |
7 279 400 000 |
Soutien à la transition énergétique |
5 440 400 000 |
5 440 400 000 |
Engagements financiers liés à la transition énergétique |
1 839 000 000 |
1 839 000 000 |
M. le président. L’amendement n° II-63, présenté par MM. Bargeton, Patient, Rambaud, Amiel et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Patriat, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Rédiger ainsi l’intitulé du compte spécial :
« Soutien aux énergies renouvelables »
II. – Rédiger ainsi l’intitulé du programme « Soutien à la transition énergétique » :
« Soutien au développement des sources d’énergies renouvelables »
III. – Rédiger ainsi l’intitulé du programme « Engagements financiers liés à la transition énergétique » :
« Engagements financiers liés au développement des sources d’énergies renouvelables »
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. Cet amendement vise à modifier l’intitulé de ce compte d’affectation spéciale pour apporter de la clarté sur ce sujet.
Le débat public et politique démontre une confusion sur les dépenses du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », qui retrace non pas l’ensemble des dépenses que l’État affecte à la transition écologique, mais seulement certaines actions de l’État en faveur du soutien au développement d’énergies de sources renouvelables.
La création de ce compte d’affectation spéciale en 2015 a permis de donner une visibilité au Parlement sur le mécanisme de la contribution au service public de l’électricité. En somme, le CAS traduit budgétairement les mécanismes de soutien : obligation d’achat d’électricité produite à partir de sources renouvelables par les acheteurs et compensation pour les fournisseurs ; effacement de consommation électrique ; obligation d’achat du biométhane…
Dans sa délibération du 12 juillet 2018, la Commission de régulation de l’énergie a estimé à 7 788 millions d’euros le montant prévisionnel de l’ensemble des charges de service public de l’énergie au titre de l’année 2019.
Ce montant est évidemment éloigné des dépenses pour la transition écologique qui concernent tous les ministères. Ainsi, le budget du ministère de l’écologie représente environ 10 milliards d’euros, les mesures en faveur de l’efficacité énergétique du bâtiment 14 milliards d’euros sur le quinquennat, le crédit d’impôt recherche environ 6 milliards d’euros. Et il ne faut pas oublier l’ensemble des mesures d’allégement de la trésorerie décidées cette année par l’exécutif et la majorité, qui atteignent 24 milliards d’euros en baisses d’impôts pour les ménages et les entreprises.
Le présent amendement vise donc à clarifier les dépenses retracées par le compte d’affectation spéciale, en modifiant son titre.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Cet amendement est clairement cosmétique ! Le véritable sujet, ma chère collègue, n’est pas de changer l’intitulé du compte d’affectation spéciale, mais de dégager davantage de moyens pour financer, via la TICPE, la politique que tout le monde attend. C’est cela, la priorité ! L’avis de la commission est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Emmanuelle Wargon, secrétaire d’État. Le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat. Il est vrai que l’intitulé du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique » est très large. Celui que vous proposez, madame la sénatrice, « Soutien aux énergies renouvelables », est plus proche de la réalité, même s’il ne couvre pas l’ensemble des missions de ce compte – je pense par exemple au financement de l’effacement.
M. le président. La parole est à Mme Françoise Cartron, pour explication de vote.
Mme Françoise Cartron. Cet amendement n’est pas cosmétique, monsieur le rapporteur spécial.
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Mais si !
Mme Françoise Cartron. Il répond à une interrogation que nous entendons tous : les citoyens et même les élus ne s’y retrouvent plus et ne savent pas à quoi correspondent les dépenses de ce compte d’affectation spéciale. Adopter un intitulé plus précis me semble apporter de la clarté à nos débats.
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Transition énergétique », figurant à l’état D.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Nous allons procéder à l’examen de l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 84 quater.
Article additionnel après l’article 84 quater
M. le président. L’amendement n° II-62, présenté par MM. Bargeton, Patient, Rambaud, Amiel et Buis, Mme Cartron, MM. Cazeau, de Belenet, Dennemont, Gattolin, Hassani, Haut, Karam, Lévrier, Marchand, Mohamed Soilihi, Navarro et Patriat, Mme Rauscent, M. Richard, Mme Schillinger, MM. Théophile, Yung et les membres du groupe La République En Marche, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 84 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au premier alinéa de l’article 5 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, les mots : « Transition énergétique » sont remplacés par les mots : « Soutien aux énergies renouvelables ».
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’un intitulé ainsi rédigé :
Transition énergétique
La parole est à Mme Françoise Cartron.
Mme Françoise Cartron. C’est la même philosophie que précédemment. Je considère cet amendement comme défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur spécial. Même avis que sur l’amendement précédent : défavorable !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Je veux juste rappeler que la CSPE – la contribution au service public de l’électricité – est payée par les consommateurs et qu’il est évidemment nécessaire d’équilibrer les recettes et les dépenses : on ne peut pas à la fois demander moins aux contribuables et financer davantage de mesures par l’impôt…
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », ainsi que du budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » et des comptes d’affectation spéciale « Aides à l’acquisition de véhicules propres », « Financement des aides aux collectivités pour l’électrification rurale », « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs » et « Transition énergétique ».
Sport, jeunesse et vie associative
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, je commencerai mon intervention en relevant le caractère symbolique que revêt l’examen du budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » un dimanche après-midi… (Sourires.)
Cette mission incarne le ciment de notre société. Pourtant, les annonces positives de ces derniers mois n’ont pas, me semble-t-il, été suivies d’effets : les crédits destinés au sport diminuent de 8 %, tandis que les associations sont mises sous tension du fait des réformes fiscales.
Je vais concentrer mon intervention sur trois points, je dirais même trois alertes, qui méritent une attention toute particulière.
La première alerte porte sur le soutien au mouvement sportif.
L’année 2019 verra la mise en œuvre d’une nouvelle gouvernance. Il s’agit d’une avancée réelle, puisque la future agence agrégera les différents acteurs et financeurs du sport.
Il ne pourra toutefois s’agir d’une avancée qu’à la condition qu’on y mette les moyens nécessaires. Or, si le Président de la République s’était engagé à ce que le financement des Olympiades ne s’opère pas au détriment du sport pour tous, les chiffres révèlent une réalité différente. En 2019, puis en 2020, ce sont 20 millions d’euros d’efforts qui sont demandés au sport pour préparer l’organisation de la compétition.
Il me semble difficile d’accepter que les soutiens financiers aux seules disciplines olympiques, qui sont au nombre de trente-six, se fassent au détriment des quarante-six disciplines qui ne le sont pas.
Je rappelle, par ailleurs, que les dépenses du Centre national pour le développement du sport, le CNDS, ont déjà subi une réduction de 63,8 millions d’euros l’an dernier du fait du transfert opéré avec le programme 219.
C’est pour porter votre attention sur ce hiatus que la commission des finances a adopté l’amendement de crédits que je vous présenterai.
La réponse apportée par le Gouvernement, consistant à relever de 15 millions d’euros les ressources du CNDS, n’est pas satisfaisante. Plutôt qu’un soutien effectif au sport pour tous, elle colmate les restes à payer du Centre. Ces restes à payer, dont le montant excède la centaine de millions d’euros, risquent bien de grever les moyens d’action de la future agence.
La deuxième alerte porte sur le soutien aux associations.
Nous le constatons tous dans nos territoires : les associations font face à de lourdes difficultés. Elles incarnent la pierre angulaire du lien social dans notre pays, mais sont pourtant minées par divers facteurs. Et les choix du Gouvernement en font partie : je pense ici à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, l’ISF, au profit d’un impôt à base réduite, à la réduction drastique du nombre de contrats aidés, ou encore à la diminution du concours financier des collectivités en raison de l’attrition de leurs ressources.
M. Roland Courteau. Très bien ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. La suppression de l’ISF, qui incitait les ménages les plus aisés à faire preuve de générosité, et un sentiment d’incertitude fiscale ont ainsi conduit ces derniers mois à une forte diminution des dons versés aux associations. Les dons pourraient chuter de 15 % en 2018, selon France générosités.
La concertation engagée en novembre 2017 doit encore aboutir à des mesures concrètes, très attendues par le mouvement associatif. Peut-être pourriez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous en dire davantage sur le calendrier…
La troisième alerte porte sur le service national universel, SNU. La communication a pu brouiller le message, mais soyons clairs : aucun crédit n’est prévu en 2019 pour la mise en œuvre de celui-ci.
Les crédits proposés pour le service civique correspondent à une cible de 150 000 jeunes, conforme à l’objectif fixé l’an dernier. Dès lors, évoquer une mise en œuvre du service national universel dès 2019 s’apparente soit à une annonce erronée, soit à une insincérité budgétaire manifeste. Qu’en est-il, monsieur le secrétaire d’État ?
Les obstacles sont nombreux. Ils sont juridiques, puisqu’une révision constitutionnelle est indispensable pour prévoir une phase d’engagement obligatoire. Ils sont aussi organisationnels, puisque 80 000 places d’hébergement devront être trouvées, sans que la direction de l’immobilier de l’État n’ait été sollicitée. Ils sont enfin financiers, puisque, outre un coût initial d’investissement de 1,75 milliard d’euros, le coût annuel de fonctionnement est compris entre 2,1 milliards d’euros et 4,3 milliards d’euros selon le nombre de jeunes s’engageant dans la deuxième phase.
Souhaité par le Président de la République, ce service national universel soulève de nombreuses questions. Le succès du service civique dépendra des réponses qui seront apportées.
Pour conclure, il me revient de vous expliquer la position de la commission des finances, qui a adopté les crédits de la mission amendés.
Le soutien à la vie associative ne relève pas tant de cette mission que de dispositifs budgétaires annexes et des dépenses fiscales.
Les deux autres alertes valent essentiellement pour l’avenir. En effet, la réduction des crédits du sport en 2019 est imputée par des techniques budgétaires et ne vise pas les crédits effectivement destinés au sport.
L’amendement de crédits adopté par la commission des finances appelle une réponse du Gouvernement sur la trajectoire budgétaire de la mission pour les exercices à venir. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jean-Jacques Lozach, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, pour le sport. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en 2018, la commission de la culture avait émis un avis favorable sur les crédits du sport, en signe de confiance dans l’action de la nouvelle équipe ministérielle et quelques semaines après l’attribution, à Lima, des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 à Paris.
Un an après, la même commission de la culture a décidé, à l’unanimité, de donner un avis défavorable sur les crédits du sport. C’est un signal d’alarme que nous actionnons, car nous pensons que le Gouvernement n’a pas pris la mesure des enjeux et que Bercy a décidé de réduire au minimum les dotations consacrées à la pratique du sport et aux sportifs de haut niveau.
Au-delà de la baisse des crédits inscrite dans le projet de loi de finances qui s’élève tout de même à 8,1 % en crédits de paiement, ce sont les incertitudes qui entourent la réforme de la gouvernance du sport qui nous conduisent à nous interroger.
Ce sont l’organisation même de la politique du sport et le rôle de ses acteurs respectifs qui vont être profondément redéfinis. Et nous sommes favorables au principe d’une évolution, allant dans le sens d’une responsabilisation des acteurs publics et privés.
Mais l’annonce de la suppression du CNDS et son intégration dans la future agence nationale du sport, attendue pour 2019, posent la question du respect des engagements financiers en cours. Ainsi, les collectivités territoriales s’inquiètent pour le financement de leurs projets.
Je regrette que les commissions chargées du sport dans les deux assemblées parlementaires n’aient pas été associées à cette réflexion. Nous aurions pu poser des questions sur le fonctionnement opérationnel de la nouvelle agence qui reste imprécis à ce stade, alors même qu’il nous est demandé de voter des crédits. Je pense notamment au fonctionnement des conférences régionales des financeurs et à la façon dont les collectivités territoriales et les entreprises seront associées, mais aussi à l’articulation entre l’agence et l’INSEP, l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance.
Ces inquiétudes n’ont pas été apaisées, bien au contraire, par l’annonce du Gouvernement, selon laquelle l’État ne souhaiterait plus rémunérer directement quelque 1 600 conseillers techniques sportifs, les CTS.
L’absence de moyens nouveaux et suffisants pour préparer les sportifs de haut niveau pour 2024 crée un doute sur les ambitions du Gouvernement.
Si ce budget est décrié, c’est aussi parce que le Gouvernement n’a pas pris la précaution d’isoler les crédits de la Société de livraison des ouvrages olympiques, la SOLIDEO, du reste des crédits du ministère.
Beaucoup s’interrogent : les crédits dédiés à la pratique du sport et aux fédérations non olympiques seront-ils sollicités pour financer les jeux Olympiques ? La commission des finances a clairement donné du corps à cette hypothèse, en constatant que 42 millions d’euros seront prélevés en 2019 et 2020 sur les crédits du sport pour financer les jeux Olympiques.
Ce scénario ne serait pas acceptable, madame la ministre. C’est pourquoi nous demandons solennellement au Gouvernement de prendre la mesure des enjeux. La préparation des jeux Olympiques nécessite de produire un effort aussi physique que budgétaire, si l’on souhaite obtenir des résultats.
Par ailleurs, la création de l’agence nationale du sport ne peut suffire à faire oublier le besoin d’un grand plan d’équipements sportifs à l’échelon local et la poursuite des investissements nécessaires à l’INSEP.
Que dire enfin de la préparation des jeux Olympiques de Tokyo de 2020 et des jeux Olympiques d’hiver de Pékin de 2022 ?
Certes, le Gouvernement a fait adopter un amendement lors du débat à l’Assemblée nationale, qui augmente de 15 millions d’euros le plafond de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite taxe Buffet, pour financer des mesures en faveur de la lutte contre les inégalités d’accès à la pratique sportive. Mais pourquoi ne pas avoir été plus ambitieux, en déplafonnant l’ensemble des crédits extrabudgétaires qui financent le sport, en particulier le prélèvement sur les paris sportifs ?
Vous n’avez sans doute pas pu, madame la ministre, peser autant que nécessaire sur ce projet de loi de finances. Nous souhaitons qu’il en soit autrement l’année prochaine. Nous ne voudrions pas que la devise des jeux de Paris devienne : « Moins vite, moins haut, moins fort ! » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe Les Républicains. – Mme Céline Brulin et M. Laurent Lafon applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. le rapporteur pour avis.
M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, pour la jeunesse et la vie associative. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, on peut présenter un budget en augmentation et mener une mauvaise politique ! (Sourires.) C’est malheureusement ce qui caractérise les crédits consacrés au programme 163, « Jeunesse et vie associative ».
Certes, je me réjouis de la poursuite du développement du service civique. En revanche, je m’inquiète de l’acharnement du Président de la République à vouloir imposer un service national universel, dont le coût paraît complètement disproportionné par rapport au bénéfice attendu. Nous en reparlerons, monsieur le secrétaire d’État.
Je regrette également la stricte reconduction des autres crédits dédiés à la jeunesse et à la vie associative. Cette stagnation correspond de facto à une baisse, si l’on tient compte de l’inflation. Certes, une telle évolution n’est pas nouvelle. Toutefois, par rapport aux législatures précédentes, elle est accentuée par la suppression de la réserve parlementaire intervenue l’année dernière, soit 52 millions d’euros en moins pour les associations, qui n’a été compensée que partiellement à travers l’octroi de 25 millions au Fonds pour le développement de la vie associative, le FDVA.
Je regrette donc que le Gouvernement n’ait pas augmenté cette année la contribution au FDVA. À défaut de pouvoir profiter de crédits budgétaires supplémentaires, le FDVA pourrait néanmoins voir son budget augmenter, s’il pouvait bénéficier des fonds et avoirs issus des comptes inactifs des associations en déshérence. Je proposerai un amendement sur ce sujet qui, je l’espère, recevra l’approbation du Sénat et du Gouvernement, après avoir reçu le soutien unanime de la commission de la culture.
Au-delà des crédits du programme 163, la politique du Gouvernement n’est pas favorable à la vie associative et à la jeunesse.
Ainsi, les avantages fiscaux et sociaux dont bénéficie le milieu associatif doivent être mis en regard de la forte baisse des crédits finançant les contrats aidés, soit une perte de 1,6 milliard d’euros de subventions indirectes pour les associations entre 2016 et 2019.
Il est regrettable qu’aucune initiative ne soit prise afin d’introduire un soutien direct aux emplois associatifs au regard de leur utilité sociale, ce qui met en péril de nombreuses associations, notamment dans le domaine du sport et de la culture. Cela entraîne de graves répercussions en matière de cohésion sociale et de réponse à des besoins non couverts par les pouvoirs publics.
Plusieurs pistes sont envisageables : créer un fonds qui s’inspirerait du FONJEP, le Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire, et qui permettrait de financer du personnel associatif auprès des associations ; créer une ligne budgétaire spécifique dans le fonds d’inclusion dans l’emploi permettant le financement de 38 000 emplois utiles socialement.
Hélas ! Aucune piste de réflexion n’est avancée par le Gouvernement, alors même que la fragilisation du monde associatif par la réforme des contrats aidés est accentuée par l’effet négatif des dispositions fiscales mises en œuvre par la loi de finances pour 2018.
Pourtant, qu’il s’agisse de la mise en place du service national universel, de la lutte contre la pauvreté, ou encore du développement du sport pour tous, ces exemples montrent que les associations sont censées être au cœur du dispositif gouvernemental. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez récemment fait des annonces, elles sont positives, mais elles doivent se concrétiser.
Pour ces raisons, la commission de la culture a donné un avis défavorable à l’adoption des crédits de la jeunesse et de la vie associative. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – M. Olivier Paccaud applaudit également.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps d’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Didier Rambaud.
M. Didier Rambaud. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la France a toujours été une nation donnant à la pratique physique et à la compétition sportive une place éminente au cœur de sa société. Il y a, dans notre pays, une culture active du sport qui se trouve au croisement d’importants enjeux sociétaux, sociaux et économiques.
Dans ce cadre, la puissance publique est un partenaire engagé, présent aussi bien à l’échelle locale des associations sportives, qui dynamisent nos territoires et constituent un fort levier de cohésion sociale, qu’à l’échelon international du sport de haut niveau, garant du rayonnement et de l’influence de la France.
De grands chantiers se trouvent aujourd’hui engagés, et ils représentent de fortes opportunités pour le constant développement de la culture et de la pratique sportives.
Les jeux Olympiques de 2024 constituent bien sûr un rendez-vous majeur. L’événement donnera à notre pays et à sa capitale une visibilité considérable. Nous connaissons tous les enjeux économiques et d’influence qui sont liés à l’organisation des jeux Olympiques, mais il convient d’aller plus loin et de souligner à quel point cet événement sportif constitue un catalyseur en matière, par exemple, de développement des infrastructures et des transports. Les jeux Olympiques créent du lien, de toutes les manières possibles.
La réussite de ces jeux Olympiques et Paralympiques ne passera pas seulement par le nombre de médailles récoltées. L’engouement qu’ils susciteront dans notre pays est une opportunité, dont il faut se saisir, pour amener vers la pratique sportive ceux qui en sont, ou s’en sont, éloignés. Je rappelle que l’ambition a été affirmée jusqu’au sommet de l’État de porter le nombre de pratiquants à 3 millions d’ici à 2022.
Le second chantier réside dans la création d’une agence nationale du sport en remplacement du Centre national pour le développement du sport, CNDS.
J’ai eu plaisir à vous entendre, madame la ministre, lors des débats avec nos collègues députés, développer les contours de cette future agence, ainsi que les objectifs que vous lui assignez. Je ne doute pas que vous aurez l’occasion d’éclairer la chambre haute sur les missions et la forme de cette agence.
J’ajoute simplement que, si le CNDS avait quelques défauts, dont celui d’avoir accumulé quelques dizaines, voire centaines de millions d’euros de factures impayées, il avait aussi le mérite d’avoir fortement soutenu la pratique sportive, notamment dans nos territoires. Je formule ainsi le vœu, madame la ministre, que ce lien étroit avec les territoires ne soit pas rompu avec la création de l’agence et que son action s’inscrive, au moins sur ce plan, dans la droite ligne d’une coopération renforcée avec les élus et les associations.
Une ambition commune s’affirme à travers ces chantiers : démocratiser la pratique sportive et la rendre non seulement plus accessible, mais aussi plus évidente.
Et nous pouvons nous réjouir de la double volonté de renforcer le nombre de licenciés dans les clubs, celles et ceux qui constituent le terreau fertile sur lequel éclosent les champions qui font rayonner le France, et d’inciter un nombre croissant de personnes à faire du sport, un indispensable facteur de santé, de bien-être et de plaisir.
Cette ambition nécessite des moyens, et le budget qui nous est présenté sert d’impulsion.
J’ai pris connaissance de manière très attentive, comme nous tous, dans cette enceinte, sans doute, des tribunes et lettres ouvertes publiées par de grands quotidiens. D’un côté, trois cent quatre-vingts sportifs, de l’autre, quatre-vingts présidents de fédération, ainsi que quatre-vingts médaillés olympiques, et non des moindres, se sont adressés au Président de la République et aux élus de la Nation, s’inquiétant d’une possible remise en cause des moyens alloués aux fédérations et d’une baisse du budget du ministère.
Si nous ne pouvons que souscrire à leur volonté de voir la France conserver sa place dans le concert des grandes nations sportives, voire de l’améliorer, si nous devons entendre ces inquiétudes, il faut aussi examiner les moyens alloués à travers le prisme de la réforme en profondeur de notre politique sportive, sur laquelle je m’exprimais à l’instant. La question qui guide la majorité et le Gouvernement depuis le début de ce quinquennat est en effet de savoir non pas s’il faut dépenser plus, mais comment dépenser mieux.
J’entends bien, déjà, les critiques de nos collègues qui nous accusent de mettre à mal le modèle sportif français à la lumière de cette diminution constatée du montant du budget des sports. Cette diminution, cependant, j’oserai la qualifier de trompe-l’œil, car je fais confiance aux explications données par le ministère – pourquoi ne le ferais-je pas ? – sur la surévaluation de l’ordre de 30 millions d’euros dans le budget précédent de certaines dépenses en matière de remboursement de cotisations sociales pour les joueurs et les arbitres.
Nous devons par ailleurs garder à l’esprit la disparition en début d’année prochaine du CNDS, remplacé avant l’automne par l’agence nationale du sport, l’ANS. Chacun imagine bien que le CNDS n’engagera pas d’argent en début d’année, sachant sa disparition proche, et alors que l’ANS sera à même de reprendre cette activité mi-2019, selon toute vraisemblance.
Les moyens de cette nouvelle agence sont non seulement préservés, mais également augmentés, puisque le Gouvernement et Mme la ministre nous proposent d’augmenter de 55 millions d’euros les fonds alloués, d’une part, à la haute performance, et, d’autre part, au développement des pratiques. Ce sont 25 millions d’euros d’un côté, 30 millions d’euros de l’autre, au bénéfice de la nouvelle agence nationale du sport, qui sera ainsi portée sur les fonts baptismaux sous les meilleurs auspices.
D’une manière générale, avec ce budget des sports, il convient de souligner la volonté du ministère de réorienter son action vers les pratiquants en général, et de mieux répartir les moyens entre le sport professionnel et le sport amateur. Ce budget manie l’ambition « en même temps » de donner aux sportifs les moyens de s’épanouir, à tout niveau, dans leur discipline, et d’engager, avec toute la prudence requise lorsque l’on gère l’argent public, les fonds nécessaires pour leur donner cette possibilité.
Aucun moyen n’est donc ôté au milieu sportif, comme on a pu l’entendre dire par ailleurs, ou comme certains grands sportifs ont pu s’en inquiéter. Plus de projets pourront être menés en 2019, et, par effet de levier, nous savons bien que les collectivités locales, d’ailleurs souvent subventionnées par l’État, alimentent largement les budgets des associations, directement sur le terrain.
Je crois donc pouvoir affirmer, avec l’ensemble de mes collègues du groupe La République en Marche, que le budget que nous propose d’adopter le Gouvernement est à la hauteur de toutes nos ambitions et qu’il servira les intérêts de toutes celles et de tous ceux qui contribuent à diffuser toujours davantage la culture sportive au cœur de notre société.
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, après un budget des sports en baisse en 2018, une nouvelle diminution s’annonce pour 2019. C’est tout à fait contradictoire avec l’ambition affichée d’aller vers 3 millions de sportifs supplémentaires, et cela risque de donner un goût amer aux jeux Olympiques et Paralympiques de Paris en 2024, comme aux autres grandes compétitions que la France accueillera dans les prochaines années. Mais nous sommes malheureusement désormais habitués à ce décalage entre les annonces et la réalité …
Plus largement, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, les orientations mêmes que vous donnez à l’organisation du sport en France inquiètent de nombreux acteurs, jusqu’à provoquer une réaction sans précédent du mouvement sportif, tant de la part des professionnels que des bénévoles.
L’augmentation des crédits destinés au sport professionnel et de haut niveau ne masque pas les ponctions, à hauteur de 40 millions d’euros, sur le sport amateur.
Derrière ces chiffres, je l’affirme, il y a la volonté de mettre fin au modèle français du sport populaire, amateur, représenté notamment par 3,5 millions de bénévoles engagés dans leurs clubs locaux, dans nos villes, nos quartiers comme nos villages, au profit d’un modèle d’inspiration britannique, c’est-à-dire un modèle centré sur la performance, le haut niveau, où la salle de sport offre un service payant à ses clients, en lieu et place d’une licence dans un club ou une association.
Ce modèle démontre outre-Manche son incohérence et son inefficacité. En effet, assécher le sport de masse, c’est, à terme, se priver de la performance et du plus haut niveau.
C’est pourtant ce chemin que nous risquons d’emprunter, l’État n’entendant plus assumer sa mission de définition d’une politique sportive ni assurer le service public déclinant celle-ci. C’est bien de cela qu’il s’agit, avec le « transfert » de 1 600 postes de conseillers techniques sportifs, ou CTS, de l’État – 60 % des effectifs, tout de même –, qui signe un nouvel abandon de l’État, après la fermeture d’un tiers des CREPS, les centres de ressources, d’expertise et de performance sportives, et la suppression de 40 % des agents « Jeunesse et sports » sur la dernière décennie.
Ces CTS jouent pourtant un rôle essentiel dans la formation des éducateurs sportifs, la détection des jeunes talents et les plans locaux de développement du sport.
Je mets le terme « transfert » entre guillemets, car nous avons bien noté que, face au mécontentement, le Gouvernement a indiqué que ces conseillers seraient non pas supprimés, mais réorientés. Toutefois, imaginer que les fédérations pourront les accueillir et les financer est tout simplement irresponsable, tout particulièrement dans un contexte où, cette année encore – faut-il le rappeler ? –, les associations sportives souffriront de la disparition des contrats aidés.
L’État souhaite donc se désengager de la pratique sportive, abandonner la promotion de notre modèle sportif populaire et accessible, mais au bénéfice de qui ?
Faut-il voir un signe dans la place donnée aux entreprises au sein de la nouvelle agence ? Nous le craignons. À affaiblir constamment le sport public, c’est son versant privé que l’on favorise, comme je l’ai déjà dit. Il vaudrait mieux libérer le sport de l’argent plutôt que d’y faire entrer davantage d’intérêts mercantiles.
Cette évolution est renforcée par la diminution des moyens des collectivités territoriales. Elles investissent plus de 12 milliards d’euros par an dans le sport, mais les premiers effets des baisses de dotations qu’elles subissent se font sentir, puisqu’un quart d’entre elles ont déjà diminué leurs subventions au sport. Au bout de la chaîne, les clubs, pour subsister, n’auront d’autre choix que d’augmenter le prix des licences. C’est évidemment impensable, sauf à vraiment refuser d’entendre le cri de colère de la France sur le pouvoir d’achat.
Quant aux 15 millions d’euros accordés à la réduction des inégalités d’accès à la pratique sportive sur les territoires carencés, axés notamment sur la natation, ce montant est si faible pour des enjeux si importants que cela n’est tout simplement pas sérieux.
Enfin, une des portes d’entrée dans la pratique sportive, c’est l’éducation physique et sportive, l’EPS. Là non plus, les perspectives ne sont pas brillantes. Toujours pas d’épreuve finale au baccalauréat, et la réforme du lycée amène à faire de l’EPS la seule discipline du bloc obligatoire à ne pas avoir de spécialisation.
Je terminerai, trop brièvement malheureusement, en évoquant les crédits de la jeunesse et de la vie associative. L’équation est une nouvelle fois simple : l’intervention de l’État, concentrée sur le service civique, ne vient même pas compenser la baisse des dons induite par la suppression d’une part importante de l’ISF, la diminution considérable des emplois aidés et la multiplication des missions que l’État confie aux associations, la ligne budgétaire consacrée au développement de la vie associative diminuant même d’un million d’euros. Vous ne serez donc pas surpris que le groupe CRCE vote contre ce budget. (Applaudissements sur les travées du groupe communiste républicain citoyen et écologiste.)
M. le président. La parole est à Mme Mireille Jouve.
Mme Mireille Jouve. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous évoquons ce jour les crédits alloués à la mission « Sport, jeunesse et vie associative » du projet de loi de finances.
Sur le volet sportif, l’an passé, nous déplorions un recul des moyens d’environ 7 %. L’essentiel de cette baisse a touché la part territoriale du CNDS.
Le budget qui nous est soumis pour 2019 s’inscrit dans la même tendance au repli. L’effort consacré à la pratique sportive dans nos territoires semble une nouvelle fois pâtir des moyens mobilisés pour accueillir les jeux de la XXXIIIe Olympiade en Île-de-France et à Marseille.
C’est un signal particulièrement inquiétant, au moment où la désaffection populaire pour ce type de manifestation est toujours plus significative. Pour mémoire, après quatre référendums perdus par des comités d’organisation, seule la ville de Milan est aujourd’hui un candidat certain pour accueillir les jeux Olympiques d’hiver en 2026.
Comment prétendre faire des jeux Olympiques en France un succès populaire si la concrétisation de ceux-ci est perçue comme faite au détriment du sport pour tous, que les valeurs olympiques sont pourtant censées aussi promouvoir ?
Le groupe du RDSE soutient donc pleinement la proposition réitérée par notre collègue rapporteur pour avis, Jean-Jacques Lozach, d’élaborer une loi de programmation budgétaire dédiée à cet événement et à la Coupe du monde de rugby, qui le précédera d’un an.
Il est nécessaire de sanctuariser les moyens alloués à ces manifestations, en isolant notamment les crédits alimentant la SOLIDEO, pour ne pas risquer de compromettre l’image de ces jeux, qui ont avant tout vocation à valoriser la pratique sportive dans notre pays. La SOLIDEO connaît une croissance pour le moins timide, puisque son budget s’établit à 113 millions d’euros, quand nos engagements auprès du CIO, le Comité international olympique, portent sur 1,1 milliard d’euros à l’échéance de 2022.
Le second point d’inquiétude des élus du groupe du RDSE porte sur la réforme de la gouvernance du sport à venir.
Nous sommes convaincus de l’utilité de la démarche, alors que la pratique sportive, amateur comme professionnelle, a connu de profondes mutations ces dernières années. Toutefois, cette réforme ne doit pas conduire l’État à se désengager progressivement du financement et de la gouvernance du mouvement sportif.
A minima, les dépenses supportées par le programme 219 et le CNDS devront donc être maintenues au sein de la future structure. Nous nous interrogeons, en outre, sur l’avenir même du ministère des sports après 2020, lorsque la nouvelle agence sera pleinement opérationnelle.
Ce désengagement devrait également se traduire par la suppression de 1 600 conseillers techniques sportifs à l’horizon 2022, ce qui représente plus de la moitié des agents du ministère. Compte tenu de l’ampleur de la réforme envisagée, nous souhaiterions disposer enfin d’informations plus détaillées, tout particulièrement sur l’association des collectivités territoriales, des fédérations et des entreprises au sein de la future agence.
Sur le volet jeunesse et vie associative, nous constatons la montée en puissance du service civique, qui sera en mesure d’accueillir 140 000 volontaires l’an prochain.
Nous continuons d’apporter notre soutien à ce dispositif créé en 2010. Nous demeurons en revanche beaucoup plus réservés sur la perspective de concrétiser l’engagement du Président de la République sur la mise en œuvre d’un service national universel, compte tenu du coût très important du déploiement de celui-ci.
Concernant la vie associative, force est de constater, en dépit de multiples mises en garde, que le Fonds pour le développement de la vie associative, qui ne fait pas l’objet d’une revalorisation dans ce projet de loi de finances, est très loin de pallier la disparition de la dotation d’action parlementaire.
Mme Nathalie Goulet. Eh non !
Mme Mireille Jouve. Contrairement à ce qui avait été annoncé à la représentation nationale, les montants alloués précédemment à la réserve parlementaire n’ont pas été reconduits sous d’autres formes. Dans le même temps, la forte baisse des crédits relatifs aux contrats aidés se poursuit, alors que 40 % d’entre eux bénéficient aussi aux associations.
Comme l’a très justement rappelé notre rapporteur, cet assèchement équivaut à la suppression de 1,5 milliard d’euros de subventions indirectes.
Le remplacement de l’ISF par l’IFI, l’impôt sur la fortune immobilière, se traduit également par une baisse de 50 % des dons, ce qui représente, pour l’année en cours, une perte de 130 millions à 150 millions d’euros pour le milieu associatif.
Tous ces signaux sont extrêmement inquiétants et pourraient, à terme, conduire à décourager les nombreux bénévoles impliqués. Plus largement, nous devons éviter de dissuader celles et ceux qui, à l’instar des élus de communes modestes, remplissent aujourd’hui une mission d’intérêt général, de manière bénévole ou quasi bénévole, de poursuivre leur engagement faute de moyens suffisamment adaptés. Ne sous-estimons pas le rôle crucial joué par ces derniers dans la cohésion nationale.
Mes chers collègues, ce projet de budget comporte des points positifs. Toutefois, les motifs d’inquiétude qu’il suscite sont trop prégnants pour ne pas être mis en avant. J’attire l’attention des membres du Gouvernement sur l’unanimité qui a prévalu à la commission de la culture de la Haute Assemblée au moment d’émettre un avis défavorable sur l’adoption des crédits de cette mission.
Cette unanimité doit vous conduire à vous interroger, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État. Elle ne participe ni d’une volonté d’affichage ni d’une volonté d’obstruction politique. (Applaudissements sur les travées du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe Union Centriste. – Mme la présidente de la commission de la culture applaudit également.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, c’est au nom de mon collègue Claude Kern, qui a dû s’absenter, que je m’exprime devant vous.
La mission « Sport, jeunesse et vie associative » voit cette année ses crédits augmenter de près de 4,1 %, soit plus de 39,7 millions d’euros supplémentaires. Si nous saluons cette hausse, la diversité des thématiques réunies ici impose de regarder davantage dans le détail.
Ainsi, le programme dédié au sport connaît un recul de 8,1 %, pour atteindre 319,2 millions d’euros. Madame la ministre, vous aviez défendu, lors de vos auditions, un budget préservé pour les sports, justifiant la baisse des crédits de votre ministère par des ajustements techniques. Cependant, cette baisse s’annonce lourde de conséquences pour le monde sportif français. En effet, la diminution du budget dédié à la promotion du sport pour tous de 44,9 % est particulièrement alarmante.
Je n’ai pas besoin de vous convaincre du rôle social extrêmement important que les clubs de proximité jouent dans nos villages et dans nos villes, dans nos quartiers et dans nos territoires, en particulier les plus délaissés. Ils constituent des lieux de sociabilité pour les jeunes, comme pour leurs familles, et participent de l’éducation de nos enfants à travers la promotion des valeurs éducatives, sociétales et citoyennes. Ils ont de plus une forte incidence en matière de santé publique.
Ce réseau de proximité est aussi essentiel à la bonne santé, ô combien importante, du sport de haut niveau français, alors que se profilent les jeux de Tokyo en 2020, puis, surtout, de Paris en 2024. Il s’agit de préparer nos sportifs de haut niveau à l’excellence, si nous voulons en faire de vrais champions. Or tout champion, quelle que soit sa pratique, a nécessairement commencé un jour au club de son village ou de son quartier, club qui l’a ensuite accompagné tout au long de son parcours. L’augmentation du budget dédié au sport de haut niveau, de 4,6 %, n’est donc à ce titre qu’une demi-satisfaction, tant elle est altérée par l’opposition créée entre deux pratiques qui sont pourtant complémentaires.
Au-delà du strict examen budgétaire, de nombreuses questions soulevées dans le cadre de cette mission restent sans réponse.
Ainsi, quel sera l’effet de l’intégration du CNDS au sein de la future agence nationale du sport sur les financements des clubs et associations ? Cette agence devrait reprendre en effet le budget du CNDS, bras financier du ministère des sports chargé d’en répartir les financements, soit 130 millions d’euros. Quid de la répartition des aides à l’avenir ?
Les 15 millions d’euros supplémentaires votés en première partie du PLF vont-ils réellement servir au sport pour tous, comme cela a été évoqué en commission à l’Assemblée nationale, ou plutôt à payer les restes à charge du CNDS, comme cela a été soutenu en séance publique, toujours à l’Assemblée nationale ?
De même, les inquiétudes sur le devenir des 1 600 conseillers techniques sportifs n’ont pas encore trouvé de raison de s’apaiser. Je veux parler du transfert de ces CTS vers les fédérations et les collectivités, alors que la grande majorité n’aura pas les moyens de se payer un cadre d’État, solution par ailleurs inacceptable. Ces agents jouent pourtant un rôle extrêmement important dans le monde sportif, notamment dans la démocratisation du sport, la formation des cadres sportifs et la détection de nouveaux talents, qui porteront haut les couleurs de la France. Leur disparition risque fort de rajouter à la fracture entre sport de haut niveau et sport de proximité. Nous nous acheminons donc vers une politique à deux vitesses, en contradiction avec le principe d’un service public à destination du plus grand nombre.
Le sport n’est pas le seul domaine concerné par cette mission. La jeunesse et la vie associative voient ainsi leur budget, rattaché au ministère de l’éducation nationale, augmenter de 8,9 %, pour atteindre 614 millions d’euros. À ce titre, nous saluons l’effort significatif porté sur le service civique.
Cependant, la diminution des crédits dédiés au développement de la vie associative, qui étaient déjà faibles, doit être mentionnée. Les associations, nous le savons, sont essentielles à notre cohésion nationale, mais force est de constater que, si on leur demande beaucoup, on leur donne peu. J’en profite pour saluer l’action et le dévouement des nombreux bénévoles au service de notre jeunesse, notamment.
La suppression de la réserve parlementaire vient encore aggraver cette situation, et ce d’autant plus que le FDVA, censé la remplacer, ne dispose que de la moitié de ses moyens. De plus, l’attribution des aides manque de transparence.
Une fois encore, la mission que nous examinons aujourd’hui, en particulier son volet sport, sert de variable d’ajustement budgétaire. Cela est difficilement supportable, dans la mesure où le budget dédié au sport ne représente que 0,13 % du PIB, ce qui est objectivement très peu au regard des enjeux que représentent l’organisation des jeux Olympiques de 2024 ou, plus généralement, le rôle du sport dans la société, notamment pour la santé publique.
Je le dis sans ambages, madame la ministre, le Gouvernement n’a pas choisi la bonne méthode. Alors même que la France ambitionne de ramener quatre-vingts médailles des prochains jeux Olympiques de 2024 et vise une augmentation sans précédent du nombre de licenciés, il faut se donner les moyens de nager dans le grand bain, si vous me permettez de reprendre cette expression.
Des efforts doivent donc être entrepris, et ce dès maintenant. Vous l’aurez compris, le groupe Union Centriste, que je représente, ne votera pas le budget de cette mission en l’état, car les moyens présentés ne sont pas à la hauteur des ambitions. (Applaudissements sur les travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jérôme Bignon.
M. Jérôme Bignon. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » connaissent une hausse de 22,3 % en autorisations d’engagement et de 4,1 % en crédits de paiement par rapport à l’année dernière. La hausse globale de l’enveloppe budgétaire masque des évolutions hétérogènes au sein de la mission. Si le financement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et les dépenses du service civique captent l’essentiel des crédits, le programme sport, hors jeux Olympiques, connaît une attrition de plus de 8 %, et les soutiens au secteur associatif restent bien en deçà des espérances et des besoins.
Sur la question sportive, nous constatons une réduction des crédits pour la deuxième année consécutive, hors financement des infrastructures pour les jeux Olympiques de 2024, alors que les priorités sont nombreuses dans ce domaine. Sous couvert d’efficacité et de bonne gestion financière, il ne faudrait pas que nous en arrivions à réduire certaines mesures visant à promouvoir les pratiques sportives ou à ne pas accompagner les petits clubs sportifs.
Nous suivrons avec attention la mise en place de l’agence nationale du sport au 1er mars 2019. Cette structure remplacera le Centre national pour le développement du sport. Ces objectifs doivent bien être complémentaires : le travail mené pour les jeux Olympiques de Paris en 2024 doit se faire en parallèle avec la promotion de la pratique d’activités sportives. L’objectif de 3 millions de pratiquants supplémentaires d’ici à 2022 est ambitieux, mais doit être atteint. Cette agence doit notamment être pourvue des moyens financiers nécessaires, notamment pour ce qui concerne le sport pour tous et les nouvelles mesures en faveur de la réduction des inégalités d’accès à la pratique sportive sur les territoires carencés.
Nous resterons aussi vigilants sur l’avenir des 1 600 conseillers techniques sportifs, pour lesquels les annonces du Gouvernement ont suscité des inquiétudes dans le milieu sportif.
Nous soulignons également qu’il ne faut pas négliger le soutien aux petites associations sportives – je suis issu du milieu rural et je les connais particulièrement bien –, qui doivent faire face à un contexte difficile, alors qu’elles assurent le maillage territorial de nombreuses pratiques sportives.
La conciliation entre l’organisation des jeux Olympiques et la maîtrise des comptes publics ne doit pas s’opérer au détriment des associations de nos territoires.
Les jeux de 2024, qui seront sans conteste un grand événement pour la France et ses territoires, ne seront une réussite qu’avec la participation active du tissu sportif de terrain.
Par ailleurs, la France est riche, en plus de son tissu sportif, de plus d’un million d’associations, animées par 13 millions de bénévoles passionnés et 80 000 jeunes en service civique. Les salariés du secteur représentent 9,7 % des salariés du privé.
Pour autant, le tissu associatif pâtit de la suppression de la réserve parlementaire et de la baisse du nombre de contrats aidés, qui ont dégradé les conditions de fonctionnement et de financement de bon nombre d’associations locales.
La France ne peut se concevoir sans l’engagement de ces citoyens, qui ne comptent pas leurs heures ni dans leur portefeuille pour donner du temps, de la compétence et faire preuve de générosité. Mes chers collègues, le tissu associatif est le ciment de la République, le dernier rempart contre l’isolement, le populisme et la montée des égoïsmes. Si l’État ne peut être partout, il doit cependant prendre ses responsabilités pour valoriser l’action de ceux qui agissent là où il ne peut lui-même aller, au cœur du terrain, au plus près des besoins et des initiatives.
La majoration de 25 millions d’euros de la dotation du Fonds pour le développement de la vie associative permettra de compenser, partiellement seulement, la suppression de la réserve parlementaire, mais cela reste insuffisant pour pallier la diminution des contrats aidés et la fragilisation des ressources des plus petites associations.
J’ai été longtemps élu local, et j’ai remplacé les mandats que je n’exerce plus à cause de l’interdiction du cumul par un engagement accru dans la vie associative. Très sincèrement, je souffre, à titre personnel, pour les associations, nombreuses, dont je m’occupe – Banque alimentaire, aide au soutien médical dans des zones désertifiées. Madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, le secteur souffre vraiment de cette situation. Voilà bientôt quarante ans que je suis élu, et je n’ai jamais connu de telles difficultés pour aider le monde bénévole à avancer. En disant cela, je ne fais que partager le fruit de ma longue expérience, dont témoignent mes cheveux blancs et ma présence dans cette assemblée, que j’ai rejointe après avoir siégé très longtemps dans l’autre.
Madame la ministre, je vous remercie des efforts que vous faites, mais, malheureusement, le groupe Les Indépendants – République et Territoires, au nom duquel je m’exprime, ne votera pas les crédits de cette mission. (Applaudissements sur des travées du groupe Union Centriste, du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen et du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous voici réunis aujourd’hui afin de débattre du budget de la jeunesse, des sports et de la vie associative. Mon intervention se concentrera sur le budget des sports pour 2019.
Madame la ministre, vous en êtes bien consciente, l’ambiance actuelle dans le milieu sportif est à l’inquiétude et au désarroi. Le mouvement sportif s’interroge sur son organisation ; les bénévoles sont désemparés et les responsables locaux arrivent difficilement à gérer les demandes quotidiennes toujours plus nombreuses et toujours plus contraintes.
Votre ministère a également du retard sur de nombreux dossiers. L’Agence française de lutte contre le dopage ne connaît toujours pas votre arbitrage sur son futur site, alors qu’il s’agit là d’un outil de rayonnement français très fort. Le préfigurateur de l’ANS n’est toujours pas nommé, alors que celle-ci est censée être à pied d’œuvre au 1er mars.
La stratégie relative au sport de haut niveau demeure floue. Quant à la politique du sport pour tous, rien n’est défini en matière d’objectifs et de moyens.
Le statut des CTS et leur évolution ne sont toujours pas réglés, et le sport scolaire attend une réponse à une demande de moyens supplémentaires, afin de mieux fonctionner pour s’inscrire dans la dynamique des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Il y a ainsi de nombreux exemples.
Sans vouloir opposer les domaines, je constate que le sport est le grand perdant des politiques nationales, et les signaux négatifs s’amoncellent pour un pays qui devrait être totalement mobilisé pour préparer au mieux les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 : suppression de l’option sport au baccalauréat ; suppression des emplois aidés ; suppression de la réserve parlementaire ; baisse des moyens des collectivités, qui sont les premiers financeurs du sport. Et le budget que vous nous présentez pour 2019 est une nouvelle fois en diminution.
Certes, vous avez comblé les trous à l’Assemblée nationale, mais il manque toujours 15 millions d’euros pour atteindre le niveau de 2018. Les chiffres sont terribles : le budget actuel est de 466 millions d’euros, contre 481 millions d’euros l’an passé. Aujourd’hui, votre gouvernement fait les choses à l’envers. Pis, vous nous soumettez aujourd’hui en dernière minute un amendement qui a pour objet de réduire de près de 2 millions d’euros le budget du sport, ce qui conduira à une baisse de 17 millions d’euros par rapport à 2018.
Vous décidez des moyens sans même présenter une stratégie globale et définir les ambitions que vous souhaitez voir réaliser par le sport français.
Une des demandes légitimes du mouvement sportif est de déplafonner les taxes affectées au sport. Que le sport finance le sport ! Il est en effet totalement anormal que ces taxes créées pour le financement du sport soient finalement fléchées en grande partie pour combler les erreurs budgétaires du Gouvernement. Chaque année, leur montant augmente et, chaque année, la part reversée au sport diminue.
Je rappelle aussi le détournement sur le dos de Paris 2024 du prélèvement complémentaire de 0,3 % sur les mises sur les jeux. Ce prélèvement, créé pour financer les stades de l’Euro 2016 et le dossier de candidature de Paris 2024, ne bénéficie plus au sport, ce qui est totalement anormal. Mais il est toujours bien présent !
Dans le même temps, par le fait du prince, à la suite d’un coup de téléphone, la Fondation du patrimoine se voit reverser toutes les taxes issues de son nouveau jeu de grattage. Tant mieux pour elle, mais ce qui est possible pour le patrimoine devrait l’être pour le sport.
M. Claude Raynal. Très bien !
M. Michel Savin. Autre exemple, madame la ministre, vous avez évoqué devant notre commission un plan « piscine et anti-noyades ». Nous y sommes favorables, mais soyons honnêtes, le budget que vous présentez ne permettra pas de soutenir la réhabilitation, pourtant nécessaire, des piscines françaises ni de financer la formation de nouveaux maîtres-nageurs pour compenser un manque d’environ 5 000 professionnels. Quelle est réellement votre intention ?
En l’état actuel des choses, et sans garantie de la part du Gouvernement, mon groupe va rejeter ce budget, comme l’a fait l’unanimité des membres de la commission, y compris les membres du groupe La République En Marche !
Cependant, sachez que nous sommes à vos côtés, madame la ministre. Le Sénat a voté cette semaine des propositions sur le financement du sport.
M. le président. Mon cher collègue, vous avez dépassé votre temps de parole de trente secondes !
M. Michel Savin. J’espère que vous retiendrez ces propositions et que vous saurez saisir cette opportunité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste, ainsi que sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.
M. Jean-Jacques Lozach. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les changements annoncés cette année dans le domaine sportif sont considérables ; le président du Comité national olympique et sportif français, le CNOSF a parlé de « révolution ». C’est l’organisation même de la politique du sport et le rôle de ses acteurs respectifs qui vont être profondément redéfinis à la suite de la consultation menée depuis janvier 2018 sur la rénovation du modèle sportif français. Différentes réflexions ont, par ailleurs, été conduites ces derniers mois. Je pense notamment au groupe de travail de Claude Onesta « Performance 2024 ».
La création de la future agence nationale du sport, qui sera effective au 1er mars 2019, suscite aujourd’hui des espoirs, mais également des craintes, certains experts mettant en évidence le risque de privatisation de la politique en faveur du sport et le fait que l’État pourrait renoncer à exercer pleinement une mission essentielle qui lui incombe. Sans reprendre nécessairement cette analyse à notre compte, nous considérons que les incertitudes qui demeurent écornent, à ce stade, le droit d’information du Parlement.
Ces inquiétudes concernent également l’annonce du Gouvernement selon laquelle l’État ne souhaite plus rémunérer directement quelque 1 600 CTS. Même si cette évolution n’est pas prévue dans le présent projet de loi de finances, la réaction a été vive dans le mouvement sportif, comme en témoigne la lettre ouverte aux élus, signée par près de 400 sportifs de haut niveau. La mobilisation a été d’autant plus forte que la réduction drastique des contrats aidés et la suppression en région de nombreux emplois associatifs ont aussi fragilisé et vont encore plus fragiliser dans l’avenir le maillage territorial des clubs.
L’absence de moyens nouveaux suffisants pour préparer les sportifs de haut niveau pour 2024 a créé un doute sur les ambitions du Gouvernement. Même Tony Estanguet, président du COJOP, le Comité d’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques, a fait part de ses préoccupations, rejoignant celles du mouvement sportif.
Patrick Kanner et moi-même avions proposé l’année dernière au Gouvernement de mettre en chantier rapidement une loi de programmation budgétaire sur la période 2019-2024 pour préparer les jeux Olympiques et Paralympiques, ainsi que la Coupe du monde de rugby 2023. Faute de pouvoir disposer de cet outil qui sanctuariserait les moyens nécessaires à l’organisation de ces grands événements, le risque est réel que la baisse des crédits du programme 219, à la suite d’ajustements, ne soit perçue comme un transfert de crédits vers le programme 350, ce qui pourrait nuire à ce grand événement populaire que doivent être les jeux Olympiques et Paralympiques.
En matière d’équipements, la nécessaire rénovation du Stade de France, futur stade olympique en 2024, avait été évaluée dans un premier temps à 50 millions d’euros dans le protocole financier des Jeux Olympiques de Paris 2024, voire à 70 millions d’euros, comme pour la rénovation du Parc des Princes. Aujourd’hui, le ministre Gérald Darmanin parle de 400 millions d’euros, tandis que le consortium qui exploite le Stade de France estime le coût à 450 millions d’euros. Où allons-nous ?
Par ailleurs, nous formulons le souhait de voir une structure exploitante tripartite mise en place qui comprendrait la Fédération française de football, la FFF, la Fédération française du rugby, la FFR, qui a abandonné son projet de grand stade, ainsi que le consortium Vinci-Bouygues, qui a déjà l’expérience en termes de gestion.
Pour autant, nous avons bien conscience de la nécessité d’actualiser, de moderniser le modèle sportif français en intégrant le phénomène de mondialisation, l’hyper-médiatisation, la diplomatie sportive.
Il est urgent d’avancer afin de répondre à l’explosion du sport-business dans certaines disciplines, à la montée en puissance des collectivités territoriales, à la nécessité de densifier le sport-entreprise en associant le monde économique, à l’autonomie attendue du mouvement sportif.
Il s’agit aussi de répondre aux opportunités offertes par les évolutions technologiques – recherche, innovation, développement –, qui ont des effets tant sur l’activité physique du quotidien que sur le sport de haut niveau. Il nous faut répondre à la demande exponentielle de sport-plaisir, car le sport ne sert pas qu’à faire des champions !
La mise en œuvre d’une stratégie ambitieuse en matière de sport-santé demeure un enjeu majeur de santé publique et, à mes yeux, la porte d’entrée la plus pertinente pour accroître le nombre de pratiquants. Or une telle orientation ne se dégage pas clairement du budget.
Plus généralement, le sport doit contribuer à l’activité économique, à l’emploi, à une société plus inclusive, ce qui implique de moderniser la mission de service public déléguée par l’État. Dans le nouveau schéma d’organisation, il est prévu que les services du ministère recentrent leur action sur les missions de stratégie, de régulation, de réglementation et de contrôle, notamment éthique. Il doit en effet rester le garant de cette dimension morale. Je pense à la lutte anti-dopage, à la lutte contre toute forme de corruption sportive. Comme cela a été dit tout à l’heure, nous attendons avec impatience la localisation du laboratoire qui succèdera à celui de Châtenay-Malabry.
La réussite de la mutation en cours se mesurera en particulier à l’aune des résultats des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Nous devons être à la hauteur de l’enjeu tant pour l’organisation que pour le nombre de médailles. Nous avons une double obligation de résultat. J’observe que le Gouvernement a souhaité commencer par réformer l’organisation du sport français. Je souhaite qu’il s’attelle demain aux moyens, afin de ne pas faire l’impasse sur les jeux Olympiques d’été de 2020 et les jeux Olympiques d’hiver de 2022, sans oublier les autres rendez-vous internationaux avant 2024.
Le 13 septembre 2017, la France obtenait l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, soulevant un grand enthousiasme dans le pays. La préparation de ces jeux nécessite de construire d’ici à 2024 un « héritage olympique », qui fait aujourd’hui consensus.
Vous avez confirmé, madame la ministre, les ambitions de votre prédécesseur – quatre-vingts médailles pour la France et un accroissement de trois millions du nombre de pratiquants.
Pour atteindre ces objectifs, des moyens financiers et humains doivent être à la hauteur des enjeux. Or, depuis le 13 septembre 2017, après un budget des sports pour 2018 en baisse, le Gouvernement nous propose de nouveau un budget en diminution.
Par ailleurs, nous comprenons difficilement pourquoi les 481 millions d’euros des crédits du budget pour 2018 n’ont pas été intégralement consommés. En effet, dans la réalité, 40 millions d’euros sont restés dans les caisses de l’État. Le projet de loi de finances rectificative pour 2018 aurait pu être mis à profit pour les réorienter au sein de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », tant les besoins sont criants.
Concernant le programme « Jeunesse et vie associative » de la mission, il nous paraît regrettable qu’aucune initiative ne soit prise, afin d’introduire un soutien direct aux emplois associatifs au regard de leur utilité sociale, ce qui met en péril de nombreuses associations, notamment dans le domaine du sport et de la culture, et entraîne de graves répercussions en matière de cohésion sociale et de réponse à des besoins non couverts par les pouvoirs publics.
Plusieurs pistes sont envisageables : créer un fonds qui s’inspirerait du FONJEP et qui permettrait de financer du personnel associatif auprès des associations ; créer une ligne budgétaire spécifique au sein du fonds d’inclusion dans l’emploi, permettant le financement de 38 000 emplois utiles socialement, afin de soutenir la professionnalisation des projets associatifs, tout particulièrement dans les petites et moyennes associations.
Je vous rappelle que la fragilisation du monde associatif avec la réforme des contrats aidés est accentuée par l’effet négatif des dispositions fiscales mises en œuvre par la loi de finances pour 2018. Pourtant, qu’il s’agisse de la mise en place du service national universel, de la lutte contre la pauvreté, ou encore du développement du sport pour tous, pour ne prendre que ces trois exemples, les associations sont censées être au cœur du dispositif gouvernemental.
Il est donc urgent que le Gouvernement donne un signal positif en direction des associations et les soutienne dans le financement des missions d’intérêt général qu’elles remplissent.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue !
M. Jean-Jacques Lozach. Pour l’ensemble des raisons invoquées, le groupe socialiste et républicain ne votera pas le budget de la mission et réaffirme la nécessité pour le Gouvernement de prendre la réelle mesure de l’effort à produire. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Raymond Hugonet. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Raymond Hugonet. Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2019 s’inscrit dans la préparation des grandes échéances sportives organisées par notre pays ces prochaines années : Coupe du monde féminine de football en 2019, Coupe du monde de rugby en 2023, Mondiaux de ski à Courchevel-Méribel en 2023, mais, surtout, jeux Olympiques et Paralympiques de 2024.
Bien entendu, le spectre d’un financement des Olympiades 2024 au détriment du mouvement sportif plane déjà au-dessus de nos têtes. Pour l’éloigner ou tenter de le masquer, on nous annonce, à grand renfort de communication, des crédits en hausse, conformément à la trajectoire du budget triennal.
Au-delà des effets d’annonce, qui ne trompent plus personne, et des manipulations de chiffres, dans lesquels le Gouvernement est passé maître, cette augmentation est, en vérité, uniquement le fait de deux facteurs principaux : les dépenses du service civique inscrites au sein du programme 163 et les besoins de financement au titre de l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Nous y voilà !
La comparaison entre, d’une part, la trajectoire budgétaire pour les années 2018 à 2022 précédant l’attribution des Olympiades de 2024 à la France et la trajectoire actualisée pour tenir compte de l’organisation de la compétition, et, d’autre part, les besoins de financement constatés sur le programme 350, « Jeux olympiques et paralympiques 2024 », fait apparaître un écart non compensé de plus de 20 millions d’euros, chaque année, pour 2019 et 2020.
La réalité brutale, c’est que les crédits de paiement du programme 219, « Sport » diminuent clairement de plus de 8 % par rapport à 2018. C’est une honte !
À l’heure où l’on tague l’Arc de Triomphe, il n’est pas un jour, pas une minute sans que l’on ait besoin, de façon urgente, de consolider trois piliers indispensables au bon fonctionnement de notre société, malheureusement déstabilisés aujourd’hui : la santé, l’éducation, l’intégration.
Mme Nathalie Goulet. Très bien !
M. Jean-Raymond Hugonet. Quel domaine, mieux que le sport, permet de répondre grâce à un seul et même vecteur à ce besoin urgentissime ?
Madame la ministre, quel domaine mieux que le sport est capable de redonner sens au mot si beau et si profond qu’est le mot « nation », que des apprentis sorciers vident de son sens premier pour mieux racoler honteusement ?
Les fonctions éducatives et sociales portées par le mouvement sportif dans nos territoires, en lien avec un encadrement de qualité, contribuent avec force et vigueur aux missions d’intérêt général et de service public.
Le sport mérite mieux que les coups de rabot dévastateurs portés par Bercy chaque année !
Si la France affiche des objectifs ambitieux en matière sportive et si notre pays veut enfin devenir la grande nation sportive dont nous rêvons tous, il faut changer de braquet !
Autre victime collatérale des restrictions budgétaires, les aides en faveur des territoires. Disons-le honnêtement, ce budget pour 2019 ne permettra pas de répondre aux besoins en équipements de nombreuses communes.
La forte baisse de la part territoriale du CNDS en 2018, c’est moins 50 % de subventions à la base du sport sur l’ensemble du territoire.
Depuis dix-huit mois, votre politique remet en cause, mesure après mesure, cet idéal sportif qui devrait nous rassembler.
Fragiliser les associations sportives qui font un travail exceptionnel aux côtés des fédérations nationales, c’est briser la chaîne qui nous rassemble autour de l’effort, de la solidarité et de l’ambition.
Le FDVA n’est crédité que de 25 millions d’euros au titre de sa nouvelle mission de financement des associations et ne saurait compenser la suppression de la réserve parlementaire.
La diminution des contrats aidés, dont un tiers concerne le secteur associatif, a elle aussi frappé de plein fouet le monde sportif, et ce alors même que les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 suscitent un élan sans précédent chez les bénévoles !
Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, nous n’approuverons pas le budget de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ». (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et du groupe Union Centriste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roxana Maracineanu, ministre des sports. Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai l’honneur de vous présenter cet après-midi, dans le cadre de l’examen de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », le budget pour 2019 du programme 219, « Sport » et du programme 350 « Jeux olympiques et paralympiques 2024 ».
Il s’agit d’abord d’un budget préservé, dont je veux souligner la cohérence ; un budget cohérent, car il s’inscrit dans la volonté du Gouvernement de respecter ses engagements budgétaires et de se positionner dans une action efficiente.
C’est aussi un budget fidèle, fidèle aux deux grands objectifs que nous avons définis avec le Président de la République et le Premier ministre.
Le premier objectif est de réussir les jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024. Nous devons livrer des infrastructures dans les délais et dans le cadre de coûts raisonnables. Cette volonté de réussite se traduit actuellement par les crédits affectés au programme 350.
Pour amorcer le fonctionnement de la SOLIDEO, les crédits accordés au programme 350 « Jeux olympiques et paralympiques 2024 » seront portés à 65,3 millions d’euros, soit une augmentation de 35,9 % par rapport à 2018.
La réussite des Jeux devra aussi et surtout être évaluée à la lumière de notre performance sportive et sociale. Vous le savez, après Rio, nous avons fait le constat que notre système de détection et d’organisation du sport de haut niveau était performant.
Toutefois, nous devons améliorer la haute performance, la dernière marche vers la réussite. Cette haute performance se fabrique par l’athlète et son entraîneur. Ce sont eux qui ne sont pas, aujourd’hui, suffisamment aidés. La cellule « athlète-entraîneur » doit être l’objet de toute notre attention ; ce duo doit être accompagné de manière optimale, tant dans son objectif de médailles que dans sa reconversion.
Les Jeux réussis, c’est aussi l’assurance de toutes et de tous de profiter de leurs retombées positives dans notre pays. Je souhaite, pour cela, passer du « ministère de ceux qui font le sport » au « ministère de ceux qui font du sport ». Les fédérations seront, bien entendu, au cœur du dispositif, mais elles ne seront pas les seules. Les acteurs non affiliés au système fédéral devront également mieux être pris en compte, tout comme le développement territorial du sport.
Nous entendons d’abord mettre le pratiquant au cœur de nos préoccupations communes pour mieux coller à la réalité sportive d’aujourd’hui.
Je suis convaincue que la politique sportive doit soulever la question du rapport de chacun au sport, afin que chacun, quel que soit son âge, se sente concerné.
La politique sportive doit également se mettre au service des autres politiques publiques – santé, qualité de vie au travail, inclusion sociale des personnes handicapées.
Nous devons ensuite considérer le sport comme un bien commun, un bien social qui appartient à tous, État, collectivités, mouvement sportif, monde économique et, bien sûr, pratiquants de tout âge et de toute origine culturelle et sociale. Pour faire vivre cette idée, l’État ne doit plus laisser croire qu’il est le seul promoteur des politiques sportives dans le pays. Il doit devenir un État partenaire du mouvement sportif et des collectivités locales. Pour que le sport se construise en tant que bien commun, il faut arriver à mieux faire ensemble.
Enfin, il convient de démocratiser ce que j’appelle les « primo apprentissages » et donner les clefs aux familles, aux parents, aux grands-parents, aux personnels des crèches, des écoles maternelles et primaires. Il va nous falloir trouver les voies et moyens de parler à tous pour que, dès le plus jeune âge, l’enjeu de la motricité sur le développement de la personnalité soit reconnu à sa juste valeur.
Quels outils pour atteindre ces objectifs ? Vous avez tous mentionné la création, au cours du premier trimestre 2019, d’une agence unique chargée, d’une part, de la haute performance et du haut niveau et, d’autre part, du développement des pratiques. Elle remplacera le CNDS et regroupera, pour une prise de décision concertée, tous les acteurs du sport : l’État, le mouvement sportif, les associations de collectivités et le monde économique.
Le budget dédié au mouvement sportif et à l’agence est ainsi, pour 2019, évalué à près de 350 millions d’euros, en intégrant les subventions accordées par le ministère des sports au CNOSF et au CPSF. Près de 70 % des moyens d’intervention de cette agence seront dédiés au développement des pratiques. L’enveloppe consacrée à la haute performance sera, quant à elle, en hausse de plus de 40 % par rapport à 2018, avec une enveloppe de crédits portée à 90 millions d’euros pour 2019.
J’ai entendu vos inquiétudes quant à l’opérationnalité de l’agence en 2019 et aux potentiels risques de rupture dans le financement des projets sportifs. Je tiens à vous rassurer. Sans attendre la nomination prochaine du préfigurateur de l’agence, le ministère des sports travaille déjà actuellement à garantir une continuité de service auprès des acteurs du mouvement sportif.
Les opérations pluriannuelles du CNDS, notamment le soutien aux emplois et aux territoires carencés, seront ainsi reprises en totalité par la future agence, tandis que les campagnes de financement au titre de 2019 des projets liés aux parts territoriale et équipements seront relancées, avant même la création officielle de l’agence, afin de continuer à soutenir la pratique sportive dans les territoires.
Le budget d’intervention du ministère des sports que je vous présente aujourd’hui sera donc préservé en 2019 par rapport à 2018 et comporte même des mesures nouvelles. Au sein de ce projet de loi de finances, l’ensemble des financements apportés par l’État au titre des sports est évalué à 515,9 millions d’euros.
Un exercice d’optimisation a été mené lors de la préparation du projet de loi de finances pour 2019, afin notamment de dégager des moyens nouveaux en faveur de la future agence du sport, évoqués précédemment et sur lesquels je pourrai revenir ultérieurement.
En complément, pour donner une nouvelle impulsion au financement du développement des pratiques, j’ai défendu à l’Assemblée nationale, vous le savez, un amendement gouvernemental visant à augmenter de 15 millions d’euros le plafond de la taxe sur les droits de retransmission audiovisuelle des événements sportifs, dite taxe « Buffet ».
Ces 15 millions d’euros supplémentaires seront consacrés au développement des pratiques, afin de mettre en œuvre des mesures concrètes en faveur de la lutte contre les inégalités d’accès la pratique sportive, ou encore le programme « savoir nager ».
Soyez assurés, mesdames, messieurs les sénateurs, que mon engagement et ma détermination à donner au sport français les moyens de son développement et de sa réussite, au plus haut niveau, mais également pour tous, et sur tous les territoires, sont entiers. Le projet me tient à cœur ! (MM. Didier Rambaud et Jean-Claude Requier applaudissent)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État auprès du ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j’aurai du mal à répondre à l’ensemble des questions et des interventions qui ont eu lieu entre trois minutes et trente-six secondes ! Je vais essayer de tracer les grandes lignes de notre action, me réservant la possibilité d’aller plus loin dans le cadre des échanges qui auront lieu lors de la discussion des amendements.
Les interventions ont essentiellement porté sur la situation actuelle et sur le financement de la vie associative.
Je veux commencer par me réjouir du dynamisme incroyable de nos associations, dont les bénévoles sont passés en deux ans de 20 millions à 22 millions. J’y ajouterai la création de 100 000 associations. Ce dynamisme est très positif !
Faut-il en déduire qu’il n’y a ni inquiétude ni difficulté sur le terrain ? Bien sûr que non ! Oui, il y a des difficultés et des inquiétudes, qui ont été relayées. J’ai notamment entendu le témoignage de M. Bignon, relatant son expérience. J’ai été attentif aux propos du rapporteur spécial, M. Jeansannetas, qui a évoqué l’impact de la suppression de l’ISF sur les dons, un impact qu’il faudra plutôt mesurer en fin d’année en raison du probable effet report sur l’impôt sur le revenu, à l’instar de ce que nous avions connu, les années précédentes.
Nous considérons qu’un bouleversement structurel est intervenu. Il a été provoqué par l’augmentation du nombre des associations et des bénévoles. Par définition, qui dit plus d’associations dit moins de moyens par association. C’est une réalité statistique !
Je remercie le sénateur Magner d’avoir mentionné nos annonces positives, qui méritent d’être suivies d’effets. L’idée maîtresse de notre action et de la feuille de route que j’ai présentée cette semaine est de soutenir les associations pour leur permettre de passer à une autre échelle, de recruter durablement et de manière stable. C’est la raison pour laquelle les cotisations salariales seront supprimées pour les associations à partir du 1er janvier 2019. Il leur sera restitué 1,4 milliard d’euros, ce qui représente un investissement inédit au profit des associations qui salarient. Cette mesure ne concerne évidemment pas les associations essentiellement composées de bénévoles.
M. Patrick Kanner. Et le crédit d’impôt sur la taxe sur les salaires, monsieur le secrétaire d’État ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Le CITS représente un gain de 500 millions d’euros l’an prochain, qui s’ajoute au 1,4 milliard d’euros de suppression de cotisations salariales.
Cela dit, nous voulons aider les associations de bénévoles à se regrouper pour passer à une plus grande échelle et pour pouvoir recruter elles aussi. En effet, il peut être compliqué pour une association de bénévoles de recruter son premier salarié. Quand on adhère à un groupement d’employeurs composé de plusieurs associations de son territoire, le recrutement devient plus simple. L’État doit lui aussi faire sa part du chemin et soutenir ces associations. Nous nous sommes engagés sur cette voie !
Vous avez été nombreux, notamment le sénateur Lozach, à évoquer le FONJEP. Nous le soutenons et créerons, dans les années qui viennent, 4 000 postes supplémentaires au FONJEP, qui seront précisément ciblés sur les groupements d’employeurs, lesquels permettront aux associations de mutualiser le poste pour lequel elles vont recruter. Nous poursuivrons sans doute dans ce sens.
Cela étant, je souscris totalement à la proposition du sénateur Magner de flécher les fonds des comptes inactifs liés à des associations sur le FDVA. Cela fait partie de mes annonces dans le cadre de la feuille de route. Il faut trouver un vecteur législatif pour mettre un terme à une situation dans laquelle les banques refusent d’identifier les comptes en question. Une proposition de loi du Modem sur le sujet, qui était inscrite cette semaine à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, n’a malheureusement pas pu être adoptée, car le temps réservé à la niche du groupe était insuffisant, mais je serai évidemment favorable à toutes les mesures présentées au Sénat ou à l’Assemblée nationale, afin de permettre une avancée rapide.
Pour terminer, dans les trente-neuf secondes qui me restent, j’aborderai la question du service national universel, le SNU, qui mériterait bien sûr beaucoup plus de temps. Le sujet dépasse peut-être la discussion de cet après-midi. Je me tiens à la disposition de votre assemblée pour venir en parler ultérieurement. Je suis très heureux qu’une audition du général Ménaouine soit prévue la semaine prochaine. Je suis moi-même à la disposition de la commission de la culture, comme de la commission de la défense pour venir aborder ce sujet.
Je précise, sur l’aspect budgétaire, qu’il n’est pas prévu une mise en œuvre totale du SNU en 2019. Ce qui est prévu, c’est une phase pilote qui se concentrera sur quelques centaines ou quelques milliers de jeunes. Elle ne nécessite pas de ligne budgétaire dédiée, car les évaluations font apparaître des coûts extrêmement minimes, qui seront absorbés en gestion. La vraie question budgétaire se pose pour l’année 2020 et pour les années suivantes. Et pour 2020, il y aura bien une ligne budgétaire dédiée, ce qui nous donnera l’occasion de beaux débats sur ce sujet !
M. le président. Je vous remercie, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, d’avoir joué le jeu du chronomètre ! (Sourires.)
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Sport, jeunesse et vie associative |
1 176 385 583 |
991 711 548 |
Sport |
326 126 125 |
314 202 090 |
Jeunesse et vie associative |
612 259 458 |
612 259 458 |
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
238 000 000 |
65 250 000 |
M. le président. L’amendement n° II-443, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Sport |
|
1 971 281 |
|
1 971 281 |
Jeunesse et vie associative |
|
|
|
|
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
1 971 281 |
|
1 971 281 |
SOLDE |
- 1 971 281 |
- 1 971 281 |
La parole est à Mme la ministre.
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Cet amendement correspond à la mise en œuvre de la compensation financière due aux régions à la suite de la décentralisation des CREPS, positionnés, depuis la loi relative à la nouvelle organisation territoriale de la République, la loi NOTRe, en qualité d’opérateurs partagés entre l’État et les régions.
Les CREPS ont pour vocation de conduire des actions nationales et régionales dans le champ du sport et de l’animation. En dehors des personnels pédagogiques et techniques qui continuent à relever de l’État et d’être payés par lui, les agents titulaires des CREPS ont la possibilité d’opter pour une intégration ou pour un détachement dans la fonction publique territoriale d’ici au 1er janvier 2020. Ce détachement sera compensé par l’État aux régions. Entre 2017 et 2020, plus de 10 millions d’euros vont être progressivement intégrés de manière pérenne dans ces dotations générales de fonctionnement versées aux régions.
En 2019, selon le chiffre communiqué en octobre, 46,6 équivalents temps plein seront transférés aux régions. Vous comprenez pourquoi le Gouvernement présente devant le Sénat cet amendement, qui n’a pas été examiné par l’Assemblée nationale.
C’est la raison pour laquelle vous avez adopté, au début de la semaine, à l’article 24 de la première partie du projet de loi de finances, l’amendement I-842 visant une hausse de 1,9 milliard d’euros des dotations versées aux régions qui seront concernées par ce transfert. Si cela vous intéresse, je pourrai vous communiquer la liste.
Je vous soumets donc aujourd’hui cet amendement technique, qui vise à minorer à due concurrence les crédits du programme « Sport », compensés à la même hauteur sur un autre poste.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. La commission, qui a d’abord été très surprise par cet amendement, a émis un avis défavorable. Après vérification, nous nous sommes aperçu que cet abondement de 1,9 milliard d’euros figure bien à l’article 24. Il s’agit donc d’un ajustement technique, et les régions ne vont donc pas être dépourvues du moindre centime d’euro dans cette affaire. Madame la ministre, vous nous avez indiqué les évaluations sur les transferts de postes en direction des régions. La situation est assez claire puisque vous avez maintenant les éléments.
Cela dit, à titre personnel, je suis plutôt favorable à cet amendement technique.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Non, cet amendement n’est pas seulement technique ! Certes, il a un aspect technique selon la présentation tout à fait juste que vient de faire Mme la ministre. Un amendement avait été voté à hauteur de 2 millions d’euros pour rectifier la situation, mais rien ne vous oblige aujourd’hui à transférer de nouveau ces crédits !
Vous avez fait voter, madame la ministre, à l’Assemblée nationale, un amendement de 15 millions d’euros en faveur du sport pour tous, notamment pour financer la politique que vous souhaitez mettre en place concernant les piscines et le savoir nager. Gardez ces 2 millions d’euros pour renforcer cette politique ! Gardez ces 2 millions d’euros pour donner plus de moyens au sport pour tous !
Pourquoi rendre cette somme à Bercy, qui prélève déjà beaucoup trop à nos yeux sur la politique du sport ? Je rappelle que l’essentiel des taxes affectées au sport est consacré au budget général et non plus au sport. Vous avez ici une possibilité de flécher un montant supplémentaire vers le sport pour tous et vers votre plan Piscine.
Je demande à mon groupe de voter contre cet amendement pour donner au budget du sport le moyen d’avoir 2 millions d’euros supplémentaires !
M. le président. La parole est à Mme Céline Brulin, pour explication de vote.
Mme Céline Brulin. Nous voterons, nous aussi, contre cet amendement. Je crois, madame la ministre, que les avis unanimement émis sur les différentes travées de cette assemblée en disent long. Nombreux sont ceux qui vous ont dit attendre de vous un signe montrant que vous voulez donner concrètement une nouvelle impulsion à la politique sportive. Je rejoins mon collègue Michel Savin : en voilà l’occasion !
De plus, les régions qui ont récupéré, par la loi NOTRe, une grande partie des CREPS, investissent énormément. Je vais citer l’exemple de la Normandie.
Mme Nathalie Goulet. Oui, c’est un bon exemple !
Mme Céline Brulin. La Normandie investit plus de 35 millions d’euros dans la rénovation de ce qui ne s’appelle plus un CREPS, mais qui est devenu le Centre sportif de Normandie.
Mme Nathalie Goulet. Tout à fait !
Mme Céline Brulin. Cet investissement est sans commune mesure avec la somme que vous venez de mentionner. Les régions et les collectivités locales investissent globalement beaucoup plus que ces 2 millions d’euros !
J’ajoute que les régions sont tenues, à la demande de votre gouvernement, de contractualiser avec l’État pour encadrer leurs dépenses de fonctionnement, afin que celles-ci ne progressent pas plus de 1,2 %. Or les CREPS représentent aussi d’importantes dépenses de fonctionnement. Je crois donc que vos arguments – même si je prends en considération le volet technique – ne correspondent absolument pas à la réalité de l’engagement des régions en matière sportive !
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Lozach. Il y a encore quelques minutes, madame la ministre, nous étions très dubitatifs et circonspects sur cet amendement. On pouvait en effet s’interroger sur l’amputation éventuelle de 2 millions d’euros de la mission « Jeunesse, sport et vie associative », qui a pourtant besoin de tellement de moyens financiers et humains complémentaires.
Toutefois, l’explication que vous nous avez donnée – il s’agirait d’un amendement purement technique – nous incite à réviser quelque peu notre position. Nous souhaiterions en effet que la mise en œuvre de la loi NOTRe et, en l’occurrence, le transfert de la responsabilité des CREPS de l’État vers les régions aillent jusqu’à leur terme de manière satisfaisante.
De fait, tout le monde – en particulier la Commission consultative pour l’évaluation des charges – s’accorde à dire que les conditions de ce transfert ont toujours été très satisfaisantes jusqu’à présent. On a connu, ces dernières décennies, tant de transferts de compétences ou de responsabilités de l’État vers les collectivités territoriales qui ne se sont pas déroulés de manière aussi satisfaisante que cela méritait d’être mentionné.
Quant à la compensation financière, il me semble, si vous me pardonnez l’expression, que le compte y est pour les régions.
C’est pourquoi nous voterons en faveur de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. Nous avons tous exprimé, lors du débat général sur cette mission, notre mécontentement par rapport à ce budget. Nous nous apprêtons tous à voter contre ses crédits.
M. Michel Savin. Bien sûr !
M. Laurent Lafon. Or ce débat vous offre, madame la ministre, une opportunité extraordinaire de retourner la Haute Assemblée et de transformer notre rejet de ces crédits en leur approbation. En effet, il est possible de récupérer à peu près 2 millions d’euros pour abonder le budget du sport. Vous nous auriez comme appui et comme soutien si vous renonciez à cet amendement pour abonder le budget du sport. Ce serait adresser un message important, non seulement aux sénateurs, mais au milieu sportif et aux territoires.
Mme Catherine Morin-Desailly. Excellent !
M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.
M. Patrick Kanner. Je confirme le propos de notre collègue Jean-Jacques Lozach : nous voterons pour cet amendement. Madame la ministre, n’y voyez pas un signe de soutien particulier ; vous verrez pourquoi tout à l’heure.
J’ai eu la responsabilité de ce transfert de charges, ou plutôt de compétences, vers les régions, en tant que ministre. Il s’est fait avec l’accord total de l’Association des régions de France, qui jugeait très bon que les CREPS basculent dans le giron des compétences de la collectivité régionale.
Dans ce cadre, votre amendement vient conforter ce mouvement. Nous souhaitons simplement que les régions puissent compter, en permanence, sur un financement correct de cette compétence transférée. Cela est important, notamment, pour la préparation des athlètes régionaux qui sont, nous le savons, nos potentiels futurs champions nationaux.
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Quand on est rapporteur spécial de la commission des finances, on s’efforce de respecter la philosophie de cette commission. Alors, pourquoi ne pas maintenir 2 millions d’euros dans le budget des sports ?
M. Michel Savin. J’entends bien ! Mais c’est Bercy qui parle !
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Non, c’est aussi ce que dirait notre rapporteur général. Nous voulons veiller à la maîtrise de la dépense publique. Sur quel point, sur quel budget porterait ce financement ?
Dès lors que le compte y est pour les régions, comme Jean-Jacques Lozach l’a rappelé, j’émets un avis favorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Mme Catherine Morin-Desailly. J’entends l’explication technique de M. le rapporteur spécial et de Jean-Jacques Lozach, mais je veux tout de même rappeler les circonstances qui ont présidé au transfert des CREPS et à l’acceptation par les régions de ce transfert lors de l’examen de la loi NOTRe.
Deux régions, dont la Normandie, n’avaient pas de CREPS à l’époque. Rapporteur pour avis de la commission de la culture sur la loi NOTRe, j’avais alors insisté sur une nécessité : le moment venu, quand ces régions s’engageraient dans la mise en place d’un centre de formation en lieu et place des CREPS, elles devraient, par équité de traitement, être accompagnées dans la mise en œuvre de ces projets. Or tel n’est pas vraiment le cas.
C’est pourquoi Michel Savin et Laurent Lafon émettent cette revendication tout à fait légitime : ces 2 millions d’euros représentent une occasion d’abonder à nouveau le budget du sport pour assurer une équité de traitement entre tous les territoires de l’Hexagone.
Je suivrais donc l’avis de M. Lafon, qui est membre de la commission de la culture et orateur du groupe Union Centriste sur cette question. Il me semble en effet d’une importance absolue que nous assurions une telle équité de traitement sur tout le territoire.
M. Jean-Raymond Hugonet. Très bien !
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Je vous confirme la volonté que le Gouvernement manifeste, en particulier, au travers de cet amendement. Nous voulons respecter les engagements pris envers les régions concernant les CREPS.
Nous voulons aussi que la collaboration entre l’État et les régions se renforce au sein de ces opérateurs dans les prochaines années. Nous voyons dans cette cogouvernance des régions une déclinaison très intéressante dans la perspective de la mise en place de l’Agence nationale du sport, et nous avons vraiment envie de conforter cette cogouvernance.
Nous tenons à respecter nos engagements, voire à aller plus loin dans le sens que vous avez indiqué, mesdames, messieurs les sénateurs. En effet, je suis tout à fait consciente que, dans certaines régions, de nouvelles structures différentes des CREPS se mettent en place : ce sont soit d’anciens CREPS qui relèvent désormais des régions, soit des installations totalement nouvelles.
Personnellement, je vois un grand intérêt dans ces structures, qu’on appelait les « bases arrière » et qui constitueront peut-être nos centres régionaux d’entraînement en vue des jeux Olympiques de 2024.
Je vous incite donc une fois de plus, mesdames, messieurs les sénateurs, à adopter cet amendement qui vise à mettre en avant le respect de nos engagements.
M. le président. La parole est à Mme Christine Prunaud, pour explication de vote.
Mme Christine Prunaud. Avant d’appartenir à la commission des affaires étrangères, je siégeais à la commission de la culture, où j’ai pris beaucoup de plaisir à m’occuper de la jeunesse et des sports.
Quant à ces 2 millions d’euros, quelque chose m’étonne : je ne comprends pas que les crédits affectés à cette mission n’aient pas été complètement utilisés. Pourriez-vous m’expliquer, madame la ministre, comment cela se fait ?
Je veux reprendre l’exemple cité par notre collègue Michel Savin : il existe, pour la natation, un projet formidable, intitulé « J’apprends à nager », dont j’espère qu’il fonctionne toujours avec autant de succès qu’auparavant. Chaque enfant doit savoir nager ! J’avais trouvé très intéressant que ce programme ait été jugé prioritaire. Je voudrais donc savoir pourquoi ces crédits n’ont pas été affectés à ce genre de projets.
M. le président. La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Mme Nathalie Goulet. J’ai discuté avec Mme Catherine Morin-Desailly. Lors de son explication de vote, elle a évoqué de la compensation qui devait être versée à la Normandie, région sans CREPS, à la suite du transfert de cette compétence aux régions.
Ma question est donc la suivante – la réponse qui lui sera apportée conditionnera peut-être mon vote – : dans votre liste de transferts, madame la ministre, avez-vous prévu quelque chose pour la Normandie ? (Sourires.)
M. le président. L’amendement n° II-137, présenté par Mme Brulin, MM. Ouzoulias, Bocquet, Savoldelli et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds d’aide au sport pour toutes et tous
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Sport |
|
200 057 449 |
|
199 453 849 |
Jeunesse et vie associative |
|
|
|
|
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
|
|
|
|
Fonds d’aide au sport pour toutes et tous |
200 057 449 |
|
199 453 849 |
|
TOTAL |
200 057 449 |
200 057 449 |
199 453 849 |
199 453 849 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Céline Brulin.
Mme Céline Brulin. Nous restons dans le même ordre d’idées : les crédits attribués au sport de haut niveau sont, approximativement, plus de quatre fois supérieurs à ceux qui bénéficient au sport pour tous. J’ai déjà pu expliquer que cela nous semblait contre-productif à long terme.
Évidemment, il faudra toujours investir plus pour un sportif de haut niveau que pour quelqu’un qui pratique le sport en amateur, voire de manière ludique, notamment en raison du matériel spécifique requis, de l’intensité de la pratique, ou des déplacements. Cependant, la France compte 18 millions de licenciés sportifs, pour à peine 15 000 pratiquants inscrits sur la liste ministérielle des sportifs de haut niveau. Or, comme plusieurs de nos collègues l’ont fort bien décrit, le sport amateur est aujourd’hui en très grande difficulté ; cette situation risque de ne pas s’améliorer au vu des orientations que vous avez présentées, madame la ministre.
Cet amendement vise donc, tout simplement, à rééquilibrer les crédits entre sport de haut niveau et sport de masse.
Loin de moi l’intention d’assécher les crédits du sport de haut niveau, mais l’article 40 de la Constitution nous contraint à procéder de la sorte. Je crois qu’il serait bon d’envoyer un signe fort : nous voulons soutenir le sport de masse, ainsi que tous les bénévoles, tous ceux qui s’engagent dans nos villes, dans nos quartiers et dans nos villages : tel est l’objet de notre amendement.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. C’est un amendement intéressant. Sur toutes nos travées, nous sommes plus qu’intéressés par le sport pour tous.
Nous considérons toutefois que le programme 219 « Sport » assure déjà le soutien du sport pour tous, sans qu’il soit nécessaire de procéder à la création d’un programme dédié.
Il n’y a aucune raison de soupçonner de quoi que ce soit la nouvelle gouvernance du sport. Les grandes fédérations et le Comité national olympique participeront en effet à cette nouvelle gouvernance, qui ne remettra donc pas en question le soutien apporté au sport du quotidien. La future Agence nationale du sport aura en effet une double mission : le sport pour tous et la haute performance.
Dès lors, même si nous partageons votre souci, ma chère collègue, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Je suis pleinement en accord avec vos propos, madame la sénatrice. Toutefois, si l’on examine les crédits qui sont dédiés à l’Agence nationale du sport – 350 millions d’euros, au total –, les deux tiers de ces crédits seront consacrés, sur les territoires, au développement du sport pour tous et de plans sportifs territoriaux : cela n’a rien à voir avec le sport de haute performance.
Au sein de l’ANS, 90 millions d’euros seront dédiés à la haute performance et 196 millions d’euros au sport pour tous. Cette proportion – un tiers pour la haute performance, deux tiers pour le sport de masse – me paraît raisonnable.
Cette nouvelle gouvernance – l’ANS et ses modalités de déclinaison sur les territoires – me paraît donc correspondre exactement à ce que vous proposez.
Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement visant à créer un nouveau programme budgétaire dédié au sport pour tous.
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Lozach, pour explication de vote.
M. Jean-Jacques Lozach. Nous souhaitons tous davantage de financements tant pour le sport de haut niveau que pour le sport de proximité, le sport du quotidien. Le problème est que cet amendement tend à retirer des fonds au sport de haut niveau. C’est la raison pour laquelle nous ne le voterons pas.
Je veux simplement citer un exemple assez symptomatique : la baisse de 2,6 millions d’euros des crédits alloués à l’INSEP. Il ne faudrait pas que ce vaisseau amiral du sport français échoue ! C’est en effet ainsi qu’on le présente toujours : un modèle en manière de préparation olympique et de double projet, que ce soit pour l’insertion sociale et professionnelle ou pour la recherche du meilleur résultat sportif.
Nous ne voterons donc pas cet amendement, qui tend à amputer les crédits affectés au sport de haut niveau.
M. le président. L’amendement n° II-39, présenté par M. Jeansannetas, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Sport |
20 000 000 |
|
20 000 000 |
|
Jeunesse et vie associative |
|
|
|
|
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
|
20 000 000 |
|
20 000 000 |
TOTAL |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
20 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. La décision du Comité international olympique d’attribuer l’édition 2024 des jeux Olympiques et Paralympiques à la France est intervenue après la présentation du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. La trajectoire triennale a donc été ajustée dans le cours de l’examen de ce texte par le Parlement, l’an dernier, afin de tenir compte du besoin de financement supplémentaire né de l’organisation de cette compétition.
Cependant, la comparaison entre, d’une part, les crédits supplémentaires inscrits au plafond de dépenses pour les années 2019 et 2020 et, d’autre part, le besoin de financement effectivement noté dans le programme 350 « Jeux olympiques et paralympiques 2024 » conduit à constater un écart non compensé de 20 millions d’euros en 2019, puis de 22 millions d’euros en 2020.
Cet écart rompt avec l’engagement du Président de la République. Il menace de surcroît la réalisation des objectifs de développement des pratiques quotidiennes des Français : on attend en effet une progression de 3 millions du nombre de pratiquants d’ici à 2022.
Cet écart est d’autant plus préoccupant que les besoins de financement du programme 350 vont considérablement croître lors des prochains exercices. Par rapport à 2019, ce sont ainsi 135 millions d’euros supplémentaires qui devront être dégagés en 2021.
Afin d’éviter que ne se matérialise le spectre redouté par le monde sportif d’un financement des Jeux au détriment du sport pour tous, cet amendement vise à transférer 20 millions d’euros en crédits de paiement et en autorisations d’engagement de l’action n° 01, Société de livraison des ouvrages olympiques et paralympiques, du programme 350 « Jeux olympiques et paralympiques 2024 » vers l’action n° 01, Promotion du sport pour le plus grand nombre, du programme 219 « Sport ».
On rétablirait ainsi les crédits destinés au sport pour tous qui ont été ponctionnés au profit de l’organisation des Jeux en raison d’un besoin de financement non inscrit dans la trajectoire corrigée du budget triennal.
J’ai lancé l’alerte sur ce sujet tout à l’heure à la tribune, car une inquiétude existe.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Je suis sensible au respect des engagements de l’État, monsieur le rapporteur spécial. Il me revient donc de procéder à quelques clarifications sur les sujets que vous venez d’évoquer.
Vous avez évoqué à la tribune cette baisse du budget. En vérité, ce qui a eu lieu est un ajustement technique portant sur 40 millions d’euros qui n’ont pas été consommés sur une ligne budgétaire. On ne pouvait pas reprendre cet argent et l’affecter à autre chose. Lors de la négociation que nous avons menée avec Bercy pendant la préparation de ce projet de loi de finances, nous avons réussi à garder 20 millions de ces 40 millions d’euros : c’est pourquoi la baisse constatée est de 20 millions d’euros.
Nous sommes également parvenus à reporter – je pense ainsi répondre à M. Lozach – les crédits à payer du CNDS sur le projet de loi de finances rectificative. C’est pourquoi vous ne les voyez pas apparaître ici.
Les crédits dédiés au financement par l’État des jeux Olympiques de 2024 ont été volontairement inscrits sur un programme à part afin de garantir l’étanchéité, dont vous rappeliez la nécessité, entre le budget pérenne du ministère des sports et les crédits destinés au financement des équipements.
C’est pourquoi les crédits destinés à la SOLIDEO sont en outre budgétés de la manière la plus conforme possible aux prévisions actuelles de programmation. Ils ne pourraient pas être remis en cause par la ponction de 20 millions d’euros que vous proposez, sauf à vouloir compromettre l’organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de Paris.
J’ai donc entendu, monsieur le rapporteur spécial, l’alerte que vous lancez sur le besoin de soutenir les politiques sportives et, en particulier, le sport pour tous. J’ai défendu à l’Assemblée nationale un amendement visant à relever de 15 millions d’euros le plafond de la taxe Buffet, et j’ai justement affecté cette ressource supplémentaire au développement des pratiques et, en particulier, à une révision de l’équipement des piscines aujourd’hui fermées.
Il me semble que ces 15 millions d’euros sont de nature à répondre à vos inquiétudes. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. J’entends bien les arguments de M. le rapporteur spécial, mais nous ne pourrons pas voter en faveur de cet amendement.
Ce serait en effet prendre le risque de mettre en difficulté la SOLIDEO, qui est chargée d’organiser et de financer les équipements et les aménagements pour les jeux Olympiques de Paris.
J’entends bien votre demande, et vous auriez pu en partie y répondre, tout à l’heure, en votant contre l’amendement gouvernemental pour conserver au sport ces 2 millions d’euros : cela aurait déjà permis de renforcer le budget du sport.
En revanche, amputer de 20 millions d’euros le budget de la SOLIDEO représente un risque, notamment par rapport aux engagements qu’a pris l’État français quant à l’organisation de ces jeux – Mme la ministre l’a redit. Il ne faut pas, vis-à-vis du monde extérieur, que nous paraissions manquer à nos engagements.
Il y avait d’autres moyens d’augmenter le budget du sport. Je pense notamment aux taxes affectées. C’est sur ce point, madame la ministre, que vous devez travailler : il faut parvenir à convaincre Bercy de lâcher un petit peu de lest sur ces taxes affectées, parce que le sport doit continuer à être financé par le sport !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. J’entends bien les arguments de Mme la ministre et ceux de M. Savin.
Certes, nous sommes contraints par les règles de la loi organique relative aux lois de finances : il faut déshabiller Pierre pour habiller Paul !
Mme Nathalie Goulet. Et alors ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Je souhaitais surtout envoyer un signal d’alerte en direction du Gouvernement. Mme la ministre a obtenu 15 millions d’euros à l’Assemblée nationale : cela nous rassure quelque peu, mais il y aura quand même un hiatus dans les années à venir. Les crédits affectés à la SOLIDEO et aux jeux Olympiques vont augmenter très nettement.
Nous sommes donc vigilants et nous attirons votre attention, madame la ministre, sur une nécessité : le sport pour tous ne doit pas être la victime de ce grand événement que la France attend. Cela dit, il n’est pas question, pour la commission des finances, de déshabiller la SOLIDEO, car nous voulons évidemment la pleine réussite de cet événement mondial que sont les jeux Olympiques.
Je retire donc cet amendement.
M. le président. L’amendement n° II-39 est retiré.
L’amendement n° II-490 rectifié bis, présenté par MM. Decool, Bignon, Capus, Chasseing, Fouché, Guerriau, Lagourgue, Malhuret et A. Marc, Mme Mélot et M. Wattebled, n’est pas soutenu.
L’amendement n° II-486, présenté par MM. Lafon et Longeot, Mme Joissains, M. Laugier, Mme Vullien et M. Moga, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Sport |
1 351 000 |
|
1 351 000 |
|
Jeunesse et vie associative |
|
|
|
|
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
|
1 351 000 |
|
1 351 000 |
TOTAL |
1 351 000 |
1 351 000 |
1 351 000 |
1 351 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Laurent Lafon.
M. Laurent Lafon. Mon amendement a pour objet l’INSEP. M. Lozach a évoqué cet établissement il y a quelques instants, en soulignant la baisse de 2,9 % des crédits qui lui sont alloués.
On connaît pourtant son travail de qualité, en particulier à destination de nos sportifs de haut niveau. Alors que les jeux Olympiques de 2020 sont à portée de main, il nous semble peu opportun de diminuer les crédits.
Certes, madame la ministre, vous nous répondrez – j’anticipe sans doute – qu’une partie de ces crédits sera reprise par l’Agence nationale du sport, qui sera créée officiellement le 1er mars prochain. J’ai quand même quelques doutes sur le caractère effectif de certaines actions de l’ANS, du moins en 2019. Il me semble donc préférable, par un souci de tuilage effectif, de garantir à l’INSEP un niveau de crédits pour cette année.
Je pense notamment à l’appel à projets national de recherche : ses crédits ont été gelés au sein du budget de l’INSEP. J’ai du mal à penser qu’ils seront opérationnels, dès 2019, dans le budget de l’Agence nationale du sport. La crainte est forte qu’il ne se passe encore rien cette année pour cet appel à projets, ce qui suscite de nouvelles craintes pour la préparation des jeux Olympiques de 2020.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Nous souhaitons entendre l’avis du Gouvernement et nous en remettons à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roxana Maracineanu, ministre. La baisse des crédits alloués à l’INSEP, que vous constatez, monsieur le sénateur, correspond en effet intégralement à des moyens dédiés désormais à l’ANS. Ces crédits de 0,5 million d’euros devaient servir à conduire plusieurs actions ponctuelles : le renforcement de l’accompagnement des fédérations dans la mise en œuvre de leur projet de performance, mais aussi le développement du système d’information dédié au sport de haut niveau. Ces missions relèveront désormais des compétences de l’ANS et, plus particulièrement, de ses activités de recherche pour le sport de haut niveau dirigées par Claude Onesta.
Tel est également le cas des crédits affectés au titre de l’appel à projets national de recherche, qui est déjà en œuvre. Ses acteurs sont déjà identifiés : effectivement, il ne s’agira plus exclusivement de l’INSEP, mais aussi des opérateurs d’autres projets, comme Sciences 2024, qui se sont positionnés sur cet accompagnement scientifique de la performance.
C’est l’ANS qui coordonnera à l’avenir l’ensemble des crédits dédiés à la recherche en matière de haute performance. Ce besoin sera donc toujours pris en charge par l’État, mais ce ne sera plus dans le cadre de l’INSEP. C’est vraiment sous cet angle que vous devez considérer la baisse des crédits de cet organisme. De fait, l’INSEP ne connaît pas de réelle baisse ; au contraire, il a même obtenu une hausse de 340 000 euros de sa subvention au titre de la prise en charge de la masse salariale des agents. La baisse constatée correspond juste au transfert à l’ANS de certaines compétences.
Le Gouvernement souhaite donc le retrait de cet amendement.
M. le président. Monsieur Lafon, l’amendement n° II-486 est-il maintenu ?
M. Laurent Lafon. Compte tenu des réponses que vous m’avez apportées, madame la ministre, je vais retirer mon amendement. Vous aurez compris que son dépôt constituait surtout une façon d’attirer votre attention sur l’INSEP et sur la nécessaire articulation entre la future Agence nationale du sport et cet établissement.
Il est aussi indéniable que, comme pour toute nouveauté, l’ANS suscite un certain nombre d’interrogations, voire d’inquiétudes, du côté de l’INSEP. Pour faire en sorte que les choses se passent le mieux possible compte tenu des échéances sportives qui sont devant nous, il faut que l’INSEP soit renforcé dans ses objectifs et ses moyens.
Cela dit, je retire mon amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-486 est retiré.
L’amendement n° II-533, présenté par M. Lozach, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Évaluation de l’impact social du sport
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
+ |
- |
+ |
- |
|
Sport |
|
150 000 |
|
150 000 |
Jeunesse et vie associative |
|
|
|
|
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
|
|
|
|
Évaluation de l’impact social du sport |
150 000 |
|
150 000 |
|
TOTAL |
150 000 |
150 000 |
150 000 |
150 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.
M. Jean-Jacques Lozach. Cet amendement vise à retirer 0,15 million d’euros de l’action n° 04, Promotion des métiers du sport, du programme 219 « Sport », afin d’alimenter un nouveau programme dédié à l’évaluation de l’impact social du sport.
Il apparaît aujourd’hui indispensable d’évaluer l’impact social des politiques sportives et des grands événements sportifs en mesurant leurs coûts et leurs bénéfices réels pour la société.
Il ne s’agit pas d’une demande supplémentaire de financement : je souhaite simplement flécher ce type d’études. Certes, l’Observatoire de l’économie du sport existe déjà, mais je me suis laissé dire que cet organisme ne disposait pas des moyens nécessaires pour procéder à ce genre d’études.
Cette demande va tout à fait dans le sens du rapport sur la nouvelle gouvernance du sport et, en particulier, de son volet intitulé « Le sport conçu comme un investissement social ». Ce type d’études serait particulièrement intéressant pour les organisateurs d’événements sportifs, pour les collectivités territoriales, pour les grands événements sportifs internationaux, mais également pour les acteurs privés du sport. Ce serait pour eux un argument commercial leur permettant d’aller chercher des financements supplémentaires, en particulier, mais non pas uniquement, au bénéfice des grands événements.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Le sujet est extrêmement intéressant, mais la commission a considéré qu’une telle évaluation était déjà possible dans le cadre du programme 219, sans qu’il soit nécessaire de procéder à la création d’un programme spécifique.
Je vous demande donc, mon cher collègue, de bien vouloir retirer cet amendement, faute de quoi l’avis de la commission sera défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Je souscris pleinement à cette volonté de mieux identifier l’impact social de nos politiques. Néanmoins, nous disposons d’ores et déjà des moyens nécessaires au niveau du ministère, en particulier au travers de l’Observatoire de l’économie du sport, qui fonctionne très bien. J’ai la liste de toutes ses activités ; si vous le souhaitez, monsieur le sénateur, je vous la communiquerai.
Je vous demande donc de bien vouloir retirer cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. Nous comprenons les préoccupations de M. Lozach, mais nous ne voterons pas cet amendement.
Tout d’abord, parce qu’il revient à prendre 150 000 euros sur les budgets du sport, ce qui ne nous paraît pas pertinent. (M. Jean-Jacques Lozach marque sa désapprobation.)
Ensuite, parce que la question de l’évaluation sociale du sport n’a pas lieu d’être, tant son apport est évident. On ne voit pas bien ce qu’apporterait une démarche différente sur ce sujet.
M. le président. Monsieur Lozach, l’amendement n° II-533 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Lozach. Non, monsieur le président.
Toutefois, madame la ministre, il nous faut non seulement des moyens, mais aussi la volonté de demander une étude de cette nature. Je crois que cela donnerait encore davantage de crédit à la nécessité de faire avancer la promotion du sport dans notre pays.
Je retire l’amendement.
M. le président. L’amendement n° II-533 est retiré.
L’amendement n° II-534, présenté par M. Lozach, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Sport |
|
|
|
|
Jeunesse et vie associative |
|
100 |
|
100 |
Jeux olympiques et paralympiques 2024 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
100 |
|
100 |
SOLDE |
- 100 |
- 100 |
La parole est à M. Jean-Jacques Lozach.
M. Jean-Jacques Lozach. Par cet amendement un peu particulier, je souhaite attirer l’attention de tout le monde, et notamment de Mme la ministre, sur la question récurrente du déplafonnement des trois taxes affectées au CNDS, bientôt intégré à l’Agence nationale du sport.
Il faut tenir compte de l’évolution de ces taxes, de ces dotations et du comportement des Français. Nous allons fêter l’année prochaine le quarantième anniversaire des crédits extrabudgétaires. Or il s’est passé bien des choses depuis 1979 et les dotations ont considérablement évolué.
Nous sommes partis, à l’origine, d’une taxe sur les débits de boissons et d’une autre sur les spectacles pour arriver aujourd’hui à la taxe Buffet, à la taxe sur les paris sportifs en ligne et à celle sur la Française des jeux.
Mais l’élément le plus significatif aujourd’hui est assurément l’explosion des paris sportifs en ligne. Selon l’Autorité de régulation des jeux en ligne, l’ARJEL, le montant total des mises devrait atteindre 6,7 milliards d’euros en 2018 contre 4,9 milliards l’année dernière. Même s’il faut tenir compte de l’effet lié au Mondial de football, il s’agit d’une croissance exponentielle.
Je mets de côté la Française des jeux, dont l’avenir est incertain, je mets de côté la taxe Buffet, car son augmentation pourrait poser problème à un certain nombre de diffuseurs français et de propriétaires de droits de retransmission télévisuelle dont nous avons bien besoin pour financer le sport, mais je ne peux qu’insister fortement sur la taxe concernant les paris sportifs en ligne.
Je crois le moment venu de les solliciter davantage. Sans ces clubs, sans ces associations, sans ces bénévoles, il n’y aurait pas les compétitions sportives sur lesquelles portent ces paris en ligne. C’est la raison pour laquelle j’ai déposé cet amendement d’appel très généraliste qui vise à ponctionner davantage les opérateurs de ces sites de paris au cours des années qui viennent.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. La commission demande le retrait de cet amendement d’appel, mais souhaite connaître la position du Gouvernement sur ce débat qu’il nous semble nécessaire de tenir.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Roxana Maracineanu, ministre. Si cet amendement avait visé à augmenter les crédits de 100 euros, j’aurais pu le négocier et vous inciter à le voter. (Sourires.)
J’ai bien entendu vos arguments, monsieur Lozach, mais je vous demande également de bien vouloir retirer votre amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Je remercie Jean-Jacques Lozach d’avoir déposé cet amendement d’appel.
Madame la ministre, il faut clarifier les choses entre la taxe Buffet, la taxe sur les paris sportifs, la « taxe Euro 2016 » qui continue d’être perçue – les recettes arrivent, mais ne sont plus fléchées vers le sport…
Il faut faire preuve de plus de transparence et établir rapidement quelles sont les taxes affectées au sport, et uniquement au sport. Bercy fera ensuite ses arbitrages, mais arrêtons de maintenir des taxes qui ne servent plus à financer le sport.
M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour explication de vote.
M. Didier Rambaud. Je suis très sensible à cette demande. Nous sommes sollicités depuis plusieurs mois déjà par le mouvement sportif qui souhaite que l’on augmente le plafond de ces taxes.
Toutefois, mes années d’étudiant et mes cours de finances publiques m’ont rattrapé : peut-être faut-il rappeler le principe d’universalité budgétaire ? Cet après-midi, on nous disait que les taxes générées par l’eau devaient aller à l’eau ; ce matin que les crédits générés par la transition énergétique devaient aller à la transition énergétique… Et demain, comment fera-t-on pour financer les fonctions régaliennes ? (M. Jean-Raymond Hugonet proteste.)
Je voulais simplement remettre les choses en perspective, tout en pensant que la réflexion sur les taxes liées au sport doit être approfondie.
M. le président. Monsieur Lozach, l’amendement n° II-534 est-il maintenu ?
M. Jean-Jacques Lozach. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° II-534 est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits ne sont pas adoptés.)
M. le président. Nous allons procéder à l’examen de l’amendement tendant à insérer un article additionnel après l’article 83 quater.
Article additionnel après l’article 83 quater
M. le président. L’amendement n° II-154 rectifié ter, présenté par M. Paccaud, Mme Berthet, MM. Bonhomme et Bonne, Mme Boulay-Espéronnier, MM. Brisson, Charon et Chatillon, Mme Deromedi, M. Gremillet, Mme Gruny et MM. Joyandet, H. Leroy, Mayet, Mouiller, de Nicolaÿ, Revet, Sol et Vogel, est ainsi libellé :
I. – Après l’article 83 quater
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2019, un rapport dressant un bilan sur la répartition, dans chaque département, des moyens alloués par le fonds de développement de la vie associative aux associations.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’un intitulé ainsi rédigé :
Sport, jeunesse et vie associative
La parole est à M. Olivier Paccaud.
M. Olivier Paccaud. Jadis, dans l’ancien monde, existait une étrange créature dont nous avons beaucoup parlé voilà quelques instants : la réserve parlementaire, véritable Gorgone diabolisée par ceux qui ne la connaissaient pas et qui ignoraient combien elle pouvait être utile, voire salvatrice, pour les communes au budget modeste et pour les associations peu fortunées.
Son péché originel était d’être distribuée par les parlementaires, ces suppôts de l’ancien monde. On lui a donc coupé la tête sur l’autel de la lutte contre le clientélisme.
Comme vous le savez, tous les crédits de feu la réserve parlementaire ont été en partie affectés à la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, et au FDVA, le Fonds pour le développement de la vie associative. Une autre partie, non négligeable, s’est évanouie dans les limbes des baisses de dotations budgétaires – il ne faut pas l’oublier.
En ce qui concerne le FDVA, comme l’ont souligné plusieurs orateurs, le compte n’y est pas. Nous sommes très loin de ce que réalisait la réserve parlementaire. Je ne donnerai qu’un seul chiffre : en 2017, 4 000 associations avaient pu recevoir une aide au titre de la réserve parlementaire.
Le FDVA, qui a le mérite d’exister, est précieux pour les rares, très rares, trop rares associations qui en bénéficient. Un décret de juin 2018 en fixe l’organisation. Or les modalités de répartition sont particulièrement floues et opaques. Les parlementaires n’y ont pas été associés, contrairement à ce qui a été fait pour la DETR. Aujourd’hui, c’est l’autorité préfectorale qui distribue ces fonds.
L’objet de cet amendement est simple : il s’agit d’obtenir un minimum de transparence via la production annuelle d’un rapport du Gouvernement au Parlement précisant qui a reçu quoi dans chaque département.
Dans mon département, par exemple, j’ai rencontré énormément de présidents d’association ayant envoyé un dossier à la préfecture et dont la demande n’a pas été satisfaite, alors que certains de leurs petits amis ont reçu des sommes non négligeables… Transparence, s’il vous plaît !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Éric Jeansannetas, rapporteur spécial. Au risque de vous surprendre – et je parle sous le contrôle de mon éminent président –, la commission des finances, qui n’est pas souvent favorable aux demandes de rapport, comme le rappelle régulièrement son rapporteur général, est favorable à cet amendement.
Nous avons besoin de savoir ce qui se passe. La réserve était un outil que les parlementaires utilisaient sérieusement. Décriée, on lui a coupé la tête, pour reprendre vos propos, monsieur Paccaud. Nous voulons savoir ce qu’il en est aujourd’hui.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. Nous avons déjà eu un débat en commission sur le FDVA.
Je veux redire rapidement ce que j’avais dit à l’époque : oui, le FDVA a été mis en place de manière rapide. Moi-même, en tant que député, j’avais alors regretté – j’allais dire « dénoncé », mais le mot est un peu fort – que le calendrier soit si compliqué à la fois pour les associations et pour les parlementaires qui voulaient informer ces dernières de l’existence de ce fonds et de la possibilité de demander une subvention. Tout s’est fait au cœur de l’été.
J’ai déjà annoncé que le calendrier allait évoluer et que l’ensemble de la procédure se ferait au 1er semestre de 2019, de la demande de subvention jusqu’au versement des fonds sur les comptes des associations. Il s’agit d’une première évolution importante qui donne de la visibilité aux associations qui vont pouvoir s’emparer davantage de ce dispositif.
Se pose ensuite la question de la transparence, à laquelle je suis sensible, sur les critères mis en place dans chacune des commissions. Il faut rappeler que le préfet ne décide pas seul de l’allocation des fonds. Une commission composée de représentants des associations et des élus…
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. Permettez-moi de rire ! Vous ne connaissez rien à la réalité locale !
M. Vincent Éblé, président de la commission des finances. C’est le préfet qui décide !
M. Gabriel Attal, secrétaire d’État. J’aimerais pouvoir m’exprimer, monsieur le président.
Je suis moi-même élu local et j’ai eu l’occasion de poser des questions sur le FDVA.
J’entends que, dans certains départements, la transparence a été moins assurée qu’ailleurs. Je suis d’ailleurs preneur d’exemples et à l’écoute des sénateurs, des députés et des autres élus pour qu’ils m’informent de ces difficultés particulières. Si les directives doivent être rappelées, elles le seront.
Je suis favorable à la plus grande transparence possible. C’est la raison pour laquelle j’avais annoncé, voilà deux semaines, que l’intégralité des versements de subventions aux associations serait mise en ligne pour chacun des départements.
J’ai même demandé que ces fonds soient cartographiés pour disposer d’une carte de France des subventions et localiser chacune des associations recevant des fonds. Cela permettra à tous de constater que l’ensemble du territoire est couvert et de faire évoluer les choses, le cas échéant.
Je pense que l’on se rendra alors compte que beaucoup d’associations ont été soutenues. Vous parliez à l’instant de 4 000 associations soutenues par la réserve parlementaire en 2017. Cette année, 9 000 associations, sur l’ensemble du territoire, ont reçu une subvention, pour un montant moyen compris entre 2 900 et 3 000 euros. Si je me fie à vos chiffres, c’est donc plus d’associations qu’auparavant…
La liste des associations percevant des aides dans chaque département sera publiée chaque année. Dès lors, je ne crois pas nécessaire de demander un rapport au Gouvernement, et ce d’autant moins que le Sénat n’est pas favorable à ce type de demande.
Comme je l’ai souligné, la transparence totale sera la règle, raison pour laquelle je demande le retrait de cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Requier, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Requier. Feu la réserve parlementaire, dont je regrette la disparition, était devenue publique depuis 2012.
Avant cette date, les choses étaient très opaques et les journalistes étaient très friands d’informations sur les bénéficiaires de cette réserve parlementaire. À partir du moment où ces informations ont été publiques, ils ne s’y sont plus du tout intéressés. (Sourires.)
Je salue l’annonce de M. le secrétaire d’État, qui m’a devancé : j’allais moi-même proposer que la liste des fonds distribués aux associations soit mise en ligne.
J’espère que les gens la consulteront, surtout les médias ! C’est une très bonne chose que la transparence. Quand il y a un peu de mystère, ça intéresse ; quand il n’y en a plus, ça intéresse beaucoup moins ! (Nouveaux sourires.)
Mme Nathalie Goulet. C’est comme ça pour beaucoup de choses !
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 83 quater.
Mes chers collègues, nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
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Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, lundi 3 décembre 2018, à dix heures, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2019, adopté par l’Assemblée nationale (n° 146, 2018-2019) ;
- Outre-mer (+ article 77 quinquies) ;
- Aide publique au développement (+ article 72) ;
- Compte spécial : Prêts à des États étrangers ;
- Action extérieure de l’État (+ article 71 ter) ;
- Recherche et enseignement supérieur (+ articles 78 et 78 bis).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-huit heures cinquante-huit.)
Direction des comptes rendus
GISÈLE GODARD